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LA CELLULE CANCEREUSE

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LA CELLULE CANCEREUSE
OBJECTIFS :
1) expliquer les mécanismes de constitution de la cellule cancéreuse
2) décrire les modifications morphologiques de la cellule cancéreuse
3) décrire les modifications métaboliques de la cellule cancéreuse
PLAN
INTRODUCTION
I- Généralités
I-1- Pathogénie
I-2- Moyens diagnostiques
II- Caractères morphologiques
II-1- Anomalies nucléaires
II-2- Anomalies cytoplasmique
II-3- anomalies membranes nucléaires
III. Modifications fonctionnelles
III-1- Anomalies du métabolisme
III-2- Anomalies de comportement
III-3-Anomalies de croissance et de prolifération cellulaire
CONCLUSION
INTRODUCTION
Le tissu cancéreux comprend deux parties: le tissu tumoral constitué des cellules
cancéreuses et le stroma, tissu conjonctif de nature non tumorale qui sert de soutien et de
tissu nourricier pour les cellules cancéreuses. La cellule cancéreuse, objet de notre leçon
est une cellule transformée qui prolifère et s’organise pour former le tissu tumoral. Elle
ressemble plus ou moins à la cellule matricielle qui lui a donné naissance. Ses
caractéristiques morphologiques, fonctionnelles et antigéniques contribuent à poser le
diagnostic de la malignité et de l’histogenèse du cancer. L’étude la cellule cancéreuse
comporte un intérêt triple
Le premier intérêt est diagnostique car les caractères de la cellule cancéreuses sont à la
base du diagnostic positif des cancers
Le deuxième intérêt est thérapeutique dans la mesure où certains types de traitements sont
basés sur les caractères fonctionnels de la cellule cancéreuse ;
Le troisième intérêt est pronostique car selon les modifications cellulaires certains cancers
ont un pronostic plus mauvais que d’autres.
I. Généralités
I.1. Pathogénie :
On distingue trois étapes dans l’apparition et le développement de la cellule cancéreuse :
l’initiation, la promotion et la progression.
I.1. 1. Etapes de la cancérogénèse :
a) Initiation : L’initiation est le résultat de l’exposition d’une cellule à une dose appropriée
d’un agent cancérogène appelé initiateur. Une cellule initiée est en quelque sorte une
cellule altérée, ce qui la rend susceptible de donner naissance à une tumeur. Cependant,
l’initiation est insuffisante. Elle présente les caractères suivants:
Elle entraîne des altérations permanentes de l’ADN
Elle est rapide et irréversible
Elle a une mémoire, car même une seule exposition est suffisante pour initier une cellule.
Etant insuffisante pour déclencher un cancer, l’initiation est suivie par une phase de
promotion.
b) Promotion
Les agents promoteurs peuvent induire une tumeur à partir des cellules initiées. En
l’absence d’une initiation préalable, les agents promoteurs vont provoquer des altérations
additionnelles, mais leurs actions doivent être obligatoirement précédées de celles des
agents initiateurs. Les agents promoteurs sont incapables de déclencher un cancer
lorsqu’ils sont appliqués seuls.
Au total, l’action des agents initiateurs suivie par celles des agents promoteurs aboutit à la
prolifération cancéreuse.
c) La progression :
Au cours de cette phase, la cellule transformée va se multiplier, localement, puis envahie
les tissus voisins avant de migrer pour aller se développer à distance formant des cancers
secondaires. Une telle cellule est caractérisée par son instabilité génétique qui la
prédispose à des modifications additionnelles.
I.1.2. Bases moléculaires
Ces différentes modifications génétiques intéressent trois types de gènes :
a) Les oncogènes : Découverts pour la première fois dans le génome des virus
responsables des cancers expérimentaux, ce gène a été décrit par la suite dans le
génome humain sous forme de protooncogène. Les protooncogènes sont de gènes
qui président à la prolifération cellulaire. Ces protooncogènes sont activés au cours
des mutations géniques en oncogènes. Exemple : le gène KIT du sarcome stromal
gastro intestinal, le gène KRAS rencontré dans de nombreux cancers humains.
b) Les gènes suppresseurs des cancers dont les plus connus sont le TP 53 et Rb. Leur
inactivation favorise la survenue des cancers.
c) Les gènes de contrôle de l’apoptose. Ces gènes sont assimilés à des gènes
suppresseurs de cancer. Leur inactivation empêche l’orientation des cellules dont
l’ADN est altéré vers l’apoptose et le risque ‘évolution vers un cancer
I.2. Moyens d’étude
I.2.1. Matériels
*Prélèvements cytologiques :
Méthodes de prélèvement
Cellules desquamées dans des
liquides biologiques
Cellules obtenues par exfoliation
Cellules aspirées à l'aiguille
Types de prélèvement
Crachats, urines,
liquide céphalo-rachidien,
Epanchements des séreuses
Ecoulement mamelonnaire
Grattage du col utérin
Brossage en cours d'endoscopie
Sang et moelle osseuse
Ponction de : sein, thyroïde, ganglions
lymphatiques…..
* Prélèvements histologiques
-Les biopsies simples
-Les biopsies exérèses
-les pièces opératoires
-Les prélèvements nécropsiques
I.2.2. Méthodes
*Prélèvements cytologiques : fixation à l’air ou à la laque à cheveux et coloration au MGG
ou au Papanicolaou selon le mode de fixation.
*Prélèvements histologiques : Fixation, coupe puis coloration à l’Hématéine éosine (HE).
 Colorations spéciales :
- Le PAS et le Bleu Alcian (mucoprotéines),
- La coloration de Fontana (mélanine)
-Perls (pigments ferriques)
 Techniques spéciales :
-La microscopie électronique. L'étude ultra structurale peut permettre de préciser la
différenciation d'une tumeur en visualisant des organites spécifiques.
-L'immunohistochimie : permet de mettre en évidence à l'intérieur ou à la surface de la
cellule un constituant spécifique (antigène) d'un type cellulaire donné, et ainsi de préciser la
différenciation d'une tumeur.
-La biologie moléculaire : permet de rechercher un remaniement du gène des chaînes
lourdes d'immunoglobuline ou du récepteur T dans les proliférations lymphoïdes,
l'amplification d'un oncogène (comme le gène n-Myc dans les neuroblastomes), des pertes
d'allèles ou un remaniement chromosomique spécifiques dans une tumeur.
La cytogénétique permet de réaliser un caryotype des cellules tumorales.
L'hybridation in situ de sondes d'ADN fluorescentes sur les chromosomes tumoraux peut
permettre de mieux caractériser les remaniements en cause (FISH, Fluorescent In Situ
Hybridization).
II-Modifications morphologiques
La cellule cancéreuse possède de nombreuses caractéristiques la différenciant d'une
cellule normale notamment la taille est variable d'une cellule à l'autre,anisocytose. Tous les
constituants de la cellule sont anormaux.
Toutefois, aucune de ces caractéristiques n'est à elle seule spécifique de la malignité.
II-1- Anomalies du noyau
a) Noyau interphasique
 Taille du noyau :
- Les noyaux sont globalement augmentés de taille. Cette augmentation est en
partie, à l'origine d'une augmentation du rapport nucléo-cytoplasmique.
- Les noyaux sont de taille inégale d'une cellule à l'autre : anisocaryose
 Anomalies de nombre et de forme :
- Le noyau est de forme irrégulière, avec parfois des monstruosités.
 Le nombre de noyau peut être augmenté : Exemple : la cellule de Sternberg dans la
maladie de Hodgkin et certains sarcomes. Cependant certaines cellules normales
telles que les mégacaryocytes de la moelle osseuse sont dotées de noyaux
volumineux bourgeonnant voire multinucléées.
 Anomalies du contenu : Les noyaux sont foncés, denses : hyperchromatisme, avec
une altération de la répartition de la chromatine qui est anormalement répartie : en
mottes irrégulières ou en condensation contre la membrane nucléaire. Les nucléoles
sont multiples, volumineux, irréguliers.
 La membrane nucléaire est épaissie, les contours nucléaires sont irréguliers
présentant des incisures, des lobulations et des bourgeonnements)
b) Noyau mitotique
o Nombre de mitose est augmenté. Les cellules cancéreuses présentent fréquemment
de nombreuses mitoses et pour certaines tumeurs comme les sarcomes bien différenciés
(fibrosarcome), seul le comptage des mitoses permet de faire le diagnostic de malignité. A
l’inverse, certaines proliférations néoplasiques sont dépourvues d’image mitotique, dans
ces cas, la mitose pourrait se dérouler très rapidement alors que la période interphasique
serait très longue.
o Mitoses fréquemment anormales : Ces anomalies portent sur le fuseau mitotique :
fuseau achromatique, mitoses tripolaires ou tétrapolaires.
o Anomalies chromosomiques nombreuses : Elles ont été décrites en réalisant des
caryotypes tumoraux. Il s’agit
- d’une modification du nombre : monosomie, trisomie, tétrasomie
- d'anomalies de structure des chromosomes acquise au cours de
l’évolution de la tumeur (translocations, chromosomes en anneaux…).
- des anomalies de la ploïdie (aneuploïdie) : les cellules néoplasiques ont un potentiel
chromosomique différent de 46 (2n) mais 23 (haploïdie, n), 69 (triploïdie, 3n), 92
(tétraploïdie, 4n).
Les anomalies chromosomiques ont été étudiées dans de nombreuses tumeurs, que ce soit
des hémopathies et les tumeurs solides.
Exemples :
o Leucémie myéloïde chronique, chromosome Philadelphie : translocation du segment
distal du bras long du 22 sur un autre chromosome, le 9 le plus souvent.
o Lymphome de Burkitt : translocation du 8 sur le 14, parfois 8 - 22,
o Dans le sarcome d'Ewing : une translocation met en contact deux gènes avec création
d'un gène de fusion, exprimant un transcrit de fusion et une protéine de fusion. Cette
protéine de fusion sert de cible diagnostique car la production d'anticorps spécifique
permet le diagnostic en immunohistochimie. Mais on peut concevoir dans l'avenir leur
utilisation en thérapeutique. De plus, des peptides spécifiques du site de fusion
pourraient être injectés au malade et être à l'origine d'une vaccination anti-tumorale
II.2. Anomalies du cytoplasme
o Le cytoplasme est moins abondant, ce qui contribue aussi à l'augmentation du
rapport nucléo-cytoplasmique.
o La taille des cellules est variable (anisocytose)
o Le cytoplasme est basophile (par augmentation de son contenu en acides
nucléiques).
o Il peut contenir des inclusions (par exemple des amas de filaments intermédiaires) et
des vacuoles (de lipides ou de glycogène).
II.3. Anomalies de membrane cellulaire
o A l'examen microscopique, il n'existe pas de modifications décelables de la
membrane cellulaire.
o L'étude ultra-structurale permet de noter des altérations des jonctions cellulaires. Les
modifications de la membrane cellulaire sont fonctionnelles.
III. Modifications fonctionnelles
Elles ont de trois et concernent le comportement, la reproduction et la croissance.
III.1. Modifications de comportement :
Le comportement de la cellule cancéreuse est étudié en culture cellulaire :
a) Perte de l’adhésivité cellulaire.
- En culture cellulaire, les cellules normales se multiplient tout en maintenant de contact
entre elles.
- En cas de cancer, les cellules sont peu cohésives du fait
. d’une forte augmentation de la charge négative cytoplasmique et
. d’autre part d’un défaut de synthèse des molécules d’adhésion telle que la
fibronectine. Ce caractère explique en partie la capacité de la cellule cancéreuse à se
détacher du tissu cancéreux pour envahir les tissus voisins.
b) Perte de l’inhibition de contact : Egalement étudiée en culture cellulaire.
- Les cellules normales arrêtent leur multiplication lorsqu’elles rentrent en contact les
unes avec les autres.
- A l’inverse, les cellules cancéreuses continuent de se multiplier en se superposant,
même en contact avec les cellules normales.
C’est le caractère le plus important du potentiel des cellules cancéreuses.
c) Agressivité des cellules cancéreuses
Lorsque deux colonies cellulaires, l’une normale, l’autre cancéreuse sont mises en contact,
les cellules cancéreuses vont remplacer les cellules normales.
III.2. Anomalies de reproduction de la cellule cancéreuse
Ces anomalies sont de trois types, l’autonomie, l’immortalité et l’anarchie
a) L’autonomie : La reproduction de la cellule cancéreuse échappe à la régulation de
l’homéostasie.
Cependant, les cellules cancéreuses des cancers du sein et de la prostate peuvent être
parfois hormono-dépendantes.
b) L’immortalité : Les cellules tumorales ont tendance à se multiplier éternellement.
.Cependant, ce caractère n’est pas absolu car il existe de rares cas de régression
tumorale spontanée. Cette immortalité serait due à la persistance des télomères qui
maintiennent la multiplication des cellules cancéreuses de manière indéfinie. Dans
une cellule normale, les télomères qui sont des fragments terminaux de
chromosomes diminuent de longueur au fur et à mesure de la division cellulaire
réduisant ainsi le rythme de division cellulaire.
c) L’anarchie : Cette anarchie dans la reproduction des cellules cancéreuses se traduit
par
- Les atypies
- La répétition des mitoses dans le temps et dans l’espace
- Les anomalies du caryotype
- Les anomalies de différentiation cellulaire.
Ainsi les cellules cancéreuses peuvent avoir une évolution proche de la normale ou non.
III.3. Anomalies du métabolisme de la cellule cancéreuse :
Le métabolisme général de la cellule cancéreuse est en général augmenté avec une
augmentation de synthèse d’acides nucléiques (ADN et ARN).
III.3.1.Conservation de fonctions.
Les fonctions habituelles sont conservées et souvent exagérées traduisant le degré de
maturation de la tumeur.
Sécrétion de substances :
- Mucine,
- hormones….
Molécules de surface
- Antigène leucocytaire commun : leucocytes, Hémopathies
- L26, CD20 : Lymphocytes B Lymphomes B
- CD3 Lymphocytes T, Lymphomes T
Filaments intermédiaires
- Cytokératine Cellules épithéliales Carcinomes
- Vimentine Cellules mésenchymateuses Sarcomes
- Desmine Cellules musculaires striées Rhabdomyosarcomes
- Neurofilament Cellules neuronales Tumeurs nerveuses
- Protéine Gliale fibrillaire (GFAP) Cellules gliales Gliomes
Autres
- HMB45 Cellules mélanocytaires Mélanomes
- Chromogranine Cellules neuroendocrines Tumeurs endocrines
II.3.2.Perte des fonctions habituelles : Cette perte de fonction peut rendre difficile
l’identification de la tumeur.
III.3.3. Acquisition de fonctions nouvelles
Les marqueurs tumoraux sont des indicateurs biochimiques de la présence d'une tumeur.
La synthèse de ces substances semble due à la répression de gènes présents dans les
cellules normales et qui s'expriment dans les cellules cancéreuses. L’intérêt de ces
marqueurs est multiple : dépistage chez des sujets à risque, classification fonctionnelle des
tumeurs, apprécier l'efficacité thérapeutique et mettre en évidence les récidives ou les
métastases. Ils correspondent :
a) Aux antigènes oncofoetaux. Présents dans les tissus foetaux, ils disparaissent en
fin de gestation et réapparaissent dans certains cancers : Antigène carcino-
embryonnaire (ACE) : carcinomes du tube digestif, du sein, des bronches, de
l'ovaire et de l'utérus et alpha foetoprotéine (AFP), hépatocarcinome, carcinomes
ovariens et testiculaires.
b) A des hormones
- Hormones placentaires, présentes dans le sérum de la femme enceinte : HCG
(hormone chorionique gonadotrope) et HPL (hormone placentaire lactogène), indicateurs
de choriocarcinome.
- hormones protéiques et polypeptidiques. Toutes les hormones peuvent être
secrétées par les cellules tumorales qui correspondent soit à la même lignée cellulaire
soit à des cellules mutantes.
c) Aux enzymes, présentes dans les cellules normales et sécrétées en quantité anormale
dans les cellules malignes : Phosphatase acide : carcinome de la prostate et
phosphatase alcaline : cancer primitif ou secondaire des os.
Les Substances sécrétées sont parfois responsables des syndromes paranéoplasiques :
Exemple : le schwartz Bartter du à une sécrétion d’ADH par les cellules d’un carcinome
bronchique.
Conclusion :
La cellule cancéreuse possède des propriétés morphologiques et fonctionnelles permettant
sa reconnaissance. Les difficultés résident encore dans la compréhension de ses
caractères envahissants et ses localisations secondaires. Une meilleure approche de ce
mécanisme permettrait dans l’avenir de maitriser les difficultés auxquelles les praticiens et
les pathologistes sont toujours confrontés.
La découverte de gènes déterminant le caractère malin des cancers devraient ouvrir des
portes vers des thérapeutiques adaptées voire des mesures préventives.
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