République de Guinée-Bissau Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, de la Jeunesse et des Sports Guinée-Bissau Rapport d’état du système éducatif Marges de manœuvre pour le développement du système éducatif dans une perspective d’universalisation de l’enseignement de base et de réduction de la pauvreté Banque Mondiale GUINÉE-BISSAU Rapport d’état du système éducatif Marges de manœuvre pour le développement du système éducatif dans une perspective d’universalisation de l’enseignement de base et de réduction de la pauvreté Avril 2013 1 UNESCO-BREDA Le bureau de l’UNESCO à Dakar et le Bureau régional pour l’éducation en Afrique (UNESCO-BREDA) est le plus grand bureau de l’UNESCO en Afrique. L’UNESCO-BREDA a été créé en 1970 pour s’occuper de la planification de l’éducation en Afrique subsaharienne. Au fil des ans, il a élargi son champ d’activités l’étendant aux sciences, aux sciences sociales, à la culture et à la communication et l’information. Le Pôle de Dakar Le pôle de Dakar pour l’analyse sectorielle en éducation est une plateforme d’expertise rattachée à l’UNESCOBREDA. Le Pôle de Dakar œuvre depuis 2001 à l’appui aux pays comme aux partenaires techniques et financiers dans les domaines de l’analyse des systèmes éducatifs, de l’élaboration des stratégies, et du suivi des politiques sectorielles en éducation. Banque mondiale La Banque mondiale est une source essentielle d'appui financier et technique pour les pays en développement du monde entier. L’institution a mis l'éducation au premier plan de sa mission de lutte contre la pauvreté. La Banque mondiale intègre l'éducation dans les stratégies économiques nationales, et aide à mettre en place des systèmes scolaires qui donnent aux enfants les moyens de devenir des citoyens actifs. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Publié en 2013 par : 2 Pôle de Dakar UNESCO-BREDA 12 avenue Léopold Sédar Senghor Dakar SENEGAL Tél : (+221) 33 849 59 79 Fax : (+221) 33 821 35 25 Web : www.poledakar.org © UNESCO/Dakar - Pôle de Dakar ISBN : 978 92 9091 114 2 Conception graphique : Imprimerie Graphi Plus - Tél.: +221 33 869 10 16 Crédits photo : Braima Mané Ce document peut être reproduit librement à condition d’en mentionner la source. Les appellations employées dans cette publication et la présentation des données qui y figurent n’impliquent pas de la part de l’UNESCO aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. Les idées et les opinions exprimées dans cette publication sont celles des auteurs ; elles ne reflètent pas nécessairement les points de vue de l’UNESCO et n’engagent en aucune façon l’Organisation. Avant-propos Cette analyse sectorielle de l’éducation en Guinée-Bissau s’ajoute à la liste croissante des Rapports d’état des systèmes éducatifs nationaux (RESEN). Comme dans les rapports similaires, le RESEN de GuinéeBissau est le produit de la collaboration entre une équipe nationale composée de cadres des ministères en charge de l’Éducation et d’autres ministères, du Pôle de Dakar (UNESCO-BREDA), de la Banque mondiale et des partenaires au développement locaux. Le rapport est destiné à établir une photographie de l’état actuel de l’éducation en Guinée-Bissau, et donc d’offrir aux décideurs nationaux et à leurs partenaires au développement une base analytique solide pour instruire le dialogue politique et le processus de prise de décision. Dans les années récentes, le contexte du développement de l’éducation a évolué de telle sorte que les travaux analytiques de ce type sont de plus en plus nécessaires. Les gouvernements s’efforcent de réduire la pauvreté et d’atteindre les Objectif du millénaire pour le développement et la communauté internationale s’est engagée à contribuer aux efforts entrepris en apportant l’appui financier nécessaire pour la mise en œuvre de plans sectoriels crédibles de développement du système éducatif. Le lancement en 2002 de l’Initiative de mise en œuvre accélérée de l’éducation pour tous (IMOA-EPT), plus connue sous le nom anglais de Fast Track Initiative) a permis la mise en place du mécanisme d’appui nécessaire. En Décembre 2008, 20 pays africains avaient déjà reçu des dons pour un montant global de 1 172 millions de dollars afin de mettre en œuvre les plans sectoriels d’éducation ayant été endossés par les partenaires de l’initiative IMOA-EPT. Ce rapport présente plusieurs faits saillants, dont deux méritent d’être mentionnés ici. Tout d’abord, il a été élaboré grâce au concours conjoint et motivé d’une équipe nationale et d’une équipe d’appui des partenaires extérieurs. Ce rapport n’est donc pas une évaluation externe du système éducatif mais le fruit d’un travail en collaboration pour approfondir la compréhension des défis auquel fait face le secteur et pour bâtir une action conjointe sur la base d’un diagnostic commun. Le rapport représente donc une mise en œuvre concrète des recommandations de la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide. De plus, le mode de travail utilisé a également permis le renforcement des compétences en analyse sectorielle du ministère de l’Éducation en Guinée-Bissau ainsi que des autres ministères impliqués. Un second point saillant concerne la méthodologie et les sources de données utilisées, qui vont au-delà de ce qui est fait habituellement. L’équipe conjointe a exploité toutes les données disponibles, issues principalement du recensement scolaire annuel de l’administration mais aussi des enquêtes de ménages pour effectuer une analyse beaucoup Avant-propos Ce rapport est le premier RESEN en Guinée-Bissau et il constitue un diagnostic solide permettant au gouvernement d’élaborer et de se doter d’un plan sectoriel crédible. Les résultats de ce rapport sont donc particulièrement utiles pour l’élaboration de la politique sectorielle et du Plan d’Action de l’Éducation à l’horizon 2020 et pour fournir des éléments analytiques pour les futures réformes. Le rapport peut aussi constituer un instrument utile dans le dialogue sur les politiques éducatives entre le Gouvernement de Guinée-Bissau et les différents partenaires au développement intéressés au secteur de l’éducation. 3 plus détaillée que celle permise par le calcul des indicateurs de base utilisés habituellement pour le suivi des systèmes éducatifs. Toutefois, certaines analyses notamment sur la qualité des apprentissages n’ont pu être réalisées faute de données existantes (pas d’examens nationaux, évaluation des apprentissages inexistantes à ce jour). Le Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN (PASEC) doit cependant réaliser dans un futur proche une évaluation des apprentissages des élèves de 2ème et de 5ème année, ce qui constituera alors des données pertinentes sur la qualité des apprentissages en Guinée-Bissau avec une vision comparative aux autres pays d’Afrique. Il faut ajouter ici que ce rapport a été élaboré dans un premier temps au cours de l’année 2008 avec des données de base de l’année 2006 mais que celui-ci a été mis à jour en 2011 avec des données de base de 2010 en ce qui concerne notamment les données démographiques et économiques (chapitre 1), les données administratives sur les scolarisations (chapitre 2), les données financières de l’éducation (chapitre 3) et les disparités liées aux ressources publiques d’éducation (2ème partie du chapitre 4). Les différents résultats de ce rapport ont déjà stimulé les discussions à l’intérieur du gouvernement et entre le gouvernement et ses partenaires au développement sur les défis que doit relever le secteur éducatif bissau-guinéen. Ainsi, les chiffres du RESEN ont permis de travailler sur le modèle de simulation financière du secteur et de réaliser des arbitrages sur la politique éducative du pays pour les dix prochaines années. Ces arbitrages sont définis par une vision stratégique d’ensemble déjà décrite dans la lettre de politique éducative du gouvernement et dans le plan sectoriel intérimaire élaboré. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Plus généralement, ce rapport constitue une source documentaire complète pour qui s’intéresse à l’éducation en Guinée-Bissau. Ce n’est, cependant, qu’une photographie du système à un moment particulier. Ainsi, il risque de devenir dépassé au fur et à mesure que le pays mettra en œuvre son plan intérimaire de l’éducation. Par conséquent, nous espérons voir la réalisation d’une seconde version de ce diagnostic dans les années à venir, sous la direction d’une équipe nationale et avec un minimum d’appui technique extérieur. Cette approche a déjà fait ses preuves dans d’autres pays, en particulier pour améliorer l’appropriation du rapport. 4 Nous espérons également que le second RESEN montrera la poursuite des progrès du système éducatif à la fois en termes de nombre d’enfants accédant à un enseignement de base de qualité mais aussi en termes de nombres de jeunes sortant du système éducatif avec les compétences nécessaires pour appuyer le développement social et économique de Guinée-Bissau. Remerciements Ce rapport a été produit et mis à jour de façon conjointe par une équipe nationale composée de cadres du ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports, du ministère des Finances, du ministère de l’Économie et une équipe internationale composée de membres de la Banque mondiale et du Pôle d’analyse sectorielle en éducation de Dakar (UNESCO-BREDA). Nous remercions les Partenaires Techniques et Financiers des pays et agences multilatérales participant au soutien du secteur de l’éducation en Guinée-Bissau pour leur participation aux séminaires de préparation de ce diagnostic et aux discussions et assistance tout au long de ce processus. L’équipe nationale, sous la présidence d’Alfredo GOMES (ministre de l’Éducation nationale puis coordonnateur de l’équipe nationale), était composée de Nelvina BARETTO (consultante), Mamadou Saliu JASSI (Directeur général du GIPASE, ministère de l’Éducation nationale), Rui LANDIM (Coordonnateur EPT, ministère de l’Éducation nationale), Vençã MENDES (Représentant des syndicats de l’éducation), Braima MANE (cadre de la Direction générale de l’enseignement supérieur, ministère de l’Éducation nationale) et Romao VARELA (Directeur du Budget, ministère des Finances). Adululai JALO, cadre du ministère de l’Économie a également contribué à certaines analyses menées dans ce rapport. Geraldo MARTINS, Michaël DRABBLE et Rahamatra RAKOTOMALALA, spécialistes de l’éducation à la Banque mondiale, ainsi que Jean-Marc BERNARD, conseiller aux appuis pays au Pôle de Dakar (UNESCO-BREDA) et Nicolas REUGE (consultant) ont également contribué au travail et au processus dans lequel s’est engagé la Guinée-Bissau, notamment à travers l’atelier de formation à l’analyse sectorielle et les discussions sur les arbitrages de politique éducative autour du modèle de simulation financière. Cette contribution a permis la production de la note de cadrage pour la politique éducative future du pays pour la période 2009-2020, puis 2012-2020 avec mise à jour réalisée (en annexe du présent rapport). Remerciement L’équipe d’appui extérieur ayant participé aux analyses et à la rédaction du rapport était composée de Claire GALL, Guillaume HUSSON et Francis N’DEM, analystes des politiques éducatives au Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). Mohamed DIABY, consultant pour la Banque mondiale, a également contribué à certaines analyses menées dans ce rapport. 5 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Liste de Sigles et Abréviations 6 ADEA Association pour le développement de l’éducation en Afrique ADPP Ajuda de desenvolvimento de povo para povo - Danish NGO BECEAO Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest BREDA Bureau régional de l’UNESCO pour l’éducation en Afrique CEDEAO Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest CEFC Centre expérimental d’éducation et formation CENFA Centre de formation administrative CENFI Centre de formation industrielle CIFAP Centre industriel de formation et perfectionnement professionnelle CONFEMEN Conférence des ministres de l’Éducation ayant le français en partage EB Enseignement de base EBC Enseignement de base complémentaire EBE Enseignement de base élémentaire EN École normale ENEFD École nationale d’éducation physique et sportive ENSTT École normale supérieure Tchico Te EPT Education pour tous ES Enseignement secondaire ESC Enseignement secondaire complémentaire ESG Enseignement secondaire general EFTP Enseignement technique et formation professionnelle EVS Esperance de vie scolaire GIPASE Gabinete de Informacao, Planificacao e Analise do sistema educativo (Departement statistique du ministere de l’Éducation ILAP Enquête légère sur la pauvreté IMOA Initiative de mise en œuvre accélérée (Fast Track) INEP Institut national d’études et de recherche MICS Multiple Indicators Cluster Survey NU Nations unies PASEC Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN PIB Produit intérieur brut PNUD Programme des Nations unies pour le développement RCA République centrafricaine RESEN Rapport d’état sur le système éducatif national SAB Secteur autonome de Bissau TBS Taux brut de scolarisation UAC Université Amilcar Cabral UNESCO Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture UNICEF Fonds des Nations unies pour l’enfance VIH Virus de l’immunodéficience humaine Sommaire Avant-propos................................................................................................................................................... 3 Remerciement................................................................................................................................................. 5 Liste de sigles et abréviations......................................................................................................................... 6 Sommaire........................................................................................................................................................ 7 Liste des tableaux......................................................................................................................................... 10 Liste des graphiques..................................................................................................................................... 13 Résumé exécutif............................................................................................................................................ 15 Chapitre 1 : Le contexte démographique et macroéconomique............................................................ 29 Introduction : le contexte politique et institutionnel...................................................................................... 29 I. Un contexte démographique contraignant................................................................................................ 29 I.1 Démographie : la structure et la croissance de la population pèsent lourdement sur le système éducatif.................................................................................................. 30 I.2 Une population en majorité rurale et très pauvre : des défis supplémentaires pour l’école............................................................................................................ 31 I.3 La Santé ........................................................................................................................................... 33 II. Le contexte macroéconomique ................................................................................................................ 34 II.1 De faibles performances en termes de croissance ........................................................................ 34 II.2 Évolution des finances publiques .................................................................................................... 35 II.3 Dépenses d’éducation..................................................................................................................... 38 Annexes du chapitre 1................................................................................................................................... 42 Annexe 1.1 : Note sur les données démographiques................................................................................... 42 1.Estimation des données démographiques par âge et par sexe entre 1991 et 2009 ......................... 42 2.Projection des données démographiques par âge entre 2009 et 2020 dans un souci de planifier les coûts et les besoins futurs pour le système éducatif...................................................... 48 Annexe 1.2 : Tableaux détaillées................................................................................................................... 50 Chapitre 2 : Les scolarisations – quantité, flux, qualité........................................................................... 53 I.1 L’éducation formelle......................................................................................................................... 53 I.2 L’éducation non formelle................................................................................................................... 55 I.3 Les différents types d’établissements............................................................................................... 55 Sommaire I. Description du système éducatif de Guinée-Bissau.................................................................................. 53 I.4 Organisation du ministère de l’Éducation......................................................................................... 55 III. Analyse quantitative des scolarisations................................................................................................... 56 II.1 Une croissance soutenue des effectifs scolarisés........................................................................... 56 II.2 Une évolution importante de la couverture scolaire ........................................................................ 58 II.3 Le parcours scolaire : analyse des profils de scolarisation et de rétention..................................... 60 7 III.4 L’espérance de vie scolaire (EVS)................................................................................................... 63 II.5 Les questions d’offre et de demande scolaire................................................................................. 64 III. L’efficacité interne : une forte proportion des ressources publiques servent à financer les abandons et les redoublements en cours de cycle................................................................................................. 69 III.1 La question du redoublement......................................................................................................... 69 III.2 Les indicateurs d’efficacité interne................................................................................................. 72 IV. La qualité des apprentissages par l’analyse de l’alphabétisation............................................................ 74 Chapitre 3 : Les aspects financiers........................................................................................................... 77 I. Évolution des dépenses globales d’éducation .......................................................................................... 77 I.1. Évolution des dépenses courantes.................................................................................................. 77 I.2. Évolution des dépenses d’investissement....................................................................................... 79 I.3. Les dépenses des ménages............................................................................................................ 80 II. Analyse détaillée des dépenses courantes publiques pour l’année 2010................................................ 81 II.1. Les dépenses de personnel............................................................................................................ 81 II.2. Les dépenses publiques de fonctionnement.................................................................................. 85 III. Les dépenses unitaires publiques de scolarisation.................................................................................. 89 III.1. Estimation des dépenses unitaires publiques moyennes par niveau d’enseignement.................. 89 III.2. Comparaison internationale des dépenses unitaires publiques par niveau d’enseignement........ 91 IV. Analyse des facteurs qui influencent les dépenses unitaires de scolarisation......................................... 92 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF IV.1. L’encadrement des élèves.............................................................................................................. 92 IV.2. La rémunération des enseignants dans le système éducatif bissau-guinéen ............................... 94 IV.3. Comparaison du statut et du niveau de rémunération des enseignants........................................ 95 IV.4. Quelques éléments de réflexion pour la politique éducative future............................................... 96 V. Mise en perspective de la situation bissau-guinéenne avec le cadre indicatif de l’initiative Fast Track... 98 Chapitre 4 : La question de l’équité.......................................................................................................... 102 I. Les inégalités dans la scolarisation dues aux caractéristiques socio-économiques................................ 102 I.1 La question du genre....................................................................................................................... 103 I.2 La zone de résidence....................................................................................................................... 106 I.3 Le niveau de vie............................................................................................................................... 107 II. L’inégalité dans la répartition des ressources allouées à l’éducation...................................................... 109 III. Les inégalités régionales......................................................................................................................... 115 Chapitre 5 : La gestion du système.......................................................................................................... 118 I. L’allocation des moyens aux écoles.......................................................................................................... 118 8 I.1 Évaluation de la cohérence dans l’allocation des enseignants de l’enseignement de base........... 119 I.2 Évaluation de la cohérence dans l’allocation des enseignants de l’enseignement secondaire....... 122 II. Analyse des différents modes d’organisation scolaire au niveau de l’enseignement de base................ 124 Chapitre 6 : L’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale....................................... 128 I. Effet de l’éducation sur la reproduction................................................................................................... 128 II. Effet de l’éducation sur les comportements liés à la santé .................................................................... 130 II.1 Effet de l’éducation sur la santé maternelle....................................................................................130 II.2 Effet de l’éducation sur la santé infanto-juvénile............................................................................131 II.3 Effet de l’éducation dans la lutte contre le VIH/SIDA......................................................................132 III. Effet de l’éducation sur les comportements liés à la protection de la femme....................................... 134 IV. Effet de l’éducation sur les comportements liés au civisme.................................................................. 134 V. Analyse des gains marginaux.................................................................................................................. 135 Les effets sur les comportements liés à la reproduction......................................................................136 Les effets sur les comportements liés à la santé..................................................................................136 Les effets sur les comportements liés à la protection de la femme......................................................137 Les effets sur les comportements en matière de civisme.....................................................................138 Éléments de synthèse sur les effets marginaux de chaque niveau d’enseignement sur les variables sociales étudiées...................................................................................................................................138 Annexe du chapitre 6 : traitement et analyse de l’impact de l’éducation sur la sphère sociale................. 140 Annexe : Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme de la République de Guinée-Bissau.............................................................................................................................. 143 I. Les grandes priorités pour le développement du secteur de l’éducation..........................................143 II. Les ressources publiques pouvant être mobilisées pour le secteur.................................................144 III. Les dépenses associées aux options de politique éducative pour la production des services offerts........................................................................................................145 IV. Consolidation d’ensemble du cadrage macro-financier..................................................................158 Sommaire Bibliographie :............................................................................................................................................. 161 9 Liste des tableaux Tableau 1 : Quelques indicateurs démographiques, 1990-2009................................................................... 15 Tableau 2 : Indicateurs socio-économiques.................................................................................................. 16 Tableau 3 : L’évolution des taux bruts de scolarisation (TBS) entre 1999-00 et 2009-10............................. 16 Tableau 4 : Évolution des proportions de redoublants au cours des 10 dernières années.......................... 18 Tableau 5 : Répartition des dépenses courantes publiques d’éducation par niveau d’enseignement, année 2010..................................................................................................... 20 Tableau 6 : Structuration des dépenses courantes publiques d’enseignement, année 2010....................... 20 Tableau 7 : Les rémunérations des enseignants (PIB/ habitant)................................................................... 21 Tableau 8 : Les dépenses publiques par élève par niveau d’enseignement, année 2010............................ 22 Tableau 9 : Part des dépenses d’éducation des ménages dans les dépenses totales nationales............... 22 Tableau 10 : Part des ressources dont bénéficie chaque groupe de population ......................................... 26 Tableau 1.1 : Quelques indicateurs démographiques, 1991-2009................................................................ 31 Tableau 1.2 : Indicateurs socio-économiques............................................................................................... 31 Tableau 1.3 : Indicateurs de santé................................................................................................................ 33 Tableau 1.4 : Dépenses publiques d’éducation exécutées, 1997-2007....................................................... 39 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Tableau 1A : Population par tranche d’âge en 1991 et en 2009................................................................... 43 Tableau 2A : Population par âge (0-24 ans) entre 1991 et 2009.................................................................. 46 Tableau 3A : Population par âge (0-24 ans) entre 2009 et 2020................................................................... 48 Tableau 1A.1 : Évolution du PIB, 1997-2010................................................................................................. 50 Tableau 1A.2 : Les recettes de l’État en francs CFA constants de 2010, 1997-2007................................... 51 Tableau 1A.3 : Les dépenses de l’État en francs CFA constants de 2010, 1997-2010................................ 52 Tableau 1A.4 : Déficits, 1997-2007............................................................................................................... 52 Tableau 2.1 : Évolution des effectifs par ordre d’enseignement de 1999-00 à 2009-10.............................. 57 Tableau 2.2 : Évolution de la part des divers types d’enseignement de 1999-00 à 2009-10....................... 58 Tableau 2.3 : Évolution des taux bruts de scolarisation par ordre d’enseignement de 1999-00 à 2009-10 ..... 59 Tableau 2.4 : Comparaisons internationales de l’EVS................................................................................... 63 Tableau 2.5 : les explications données pour l’abandon des enfants au cours du primaire en 2002............ 64 Tableau 2.6 : Estimation logistique d’accéder à l’école pour une génération d’individus (13-15 ans)......... 65 Tableau 2.7 : Répartition des enfants âgés de 7 à 14 ans selon la distance à l’école la plus proche, (2002)........................................................................................................................ 66 10 Tableau 2.8 : Estimation logistique de fréquenter l’école d’enseignement de base pour les enfants de 7 à 14 ans en 2002............................................................................................... 67 Tableau 2.9 : Distribution de la proportion d’écoles et d’élèves en fonction du nombre de niveaux offerts pour l’année 2005-06 (Primaire : EBE et EBC)............................................................ 68 Tableau 2.10 : Proportion d’élèves n’ayant pas la possibilité de passer au niveau supérieur entre 2004-05 et 2005-06 pour les 6 premières années d’études................................................. 68 Tableau 2.12 : Évolution de la part des redoublants de 1997-98 à 2005-06................................................ 70 Tableau 2.13 : Rétention et coefficients d’efficacité interne dans l’enseignement de base en 2005-06 et 2009-10............................................................................................................... 72 Tableau 2.14 : Comparaison internationale des coefficients d’efficacité interne dans l’enseignement de base........................................................................................................ 73 Tableau 2.15 : Rétention et coefficients d’efficacité interne dans l’enseignement secondaire en 2005-06 et 2009-10............................................................................................................... 74 Tableau 3.1 : Évolution des dépenses courantes publiques d’éducation, 1998-2010............................... 78 Tableau 3.2 : Évolution de la répartition des dépenses courantes publiques d’éducation, 1998-2010..... 79 Tableau 3.3 : Évolution des dépenses d’investissement pour le secteur de l’éducation sur ressources propres et sur ressources extérieures, 1999-2010.............................................. 79 Tableau 3.4 : Dépenses estimées d’éducation des ménages par enfant selon le niveau et le type d’établissement fréquentés, la localisation géographique et le niveau de vie du ménage, année 2010 (francs CFA) .................................................................................. 80 Tableau 3.5 : Part des dépenses d’éducation des ménages dans les dépenses totales nationales.......... 81 Tableau 3.6 : Répartition du nombre de personnels de l’éducation et des masses salariales correspondantes selon la fonction, le statut et le niveau d’enseignement, année 2010 (en milliers de francs CFA)............................................................................................ 82 Tableau 3.7 : Répartition finale de la masse salariale des personnels de l’éducation selon la fonction, le statut et le niveau d’enseignement (en milliers de francs CFA) ......................... 84 Tableau 3.8 : Répartition des dépenses publiques courantes par nature et par sous-secteur, année 2006 (en milliers de francs CFA)................................................................................. 86 Tableau 3.9 : Comparaison internationale de la répartition intra-sectorielle des dépenses courantes publiques en éducation........................................................................................ 87 Tableau 3.10 : Structuration des dépenses courantes publiques d’enseignement, année 2010.................. 88 Tableau 3.11 : Estimation des dépenses unitaires publiques, année 2010................................................... 90 Tableau 3.12 : Comparaison internationale des dépenses unitaires publiques en % du PIB/ habitant par niveau d’enseignement...................................................................................... 91 Tableau 3.14 : La situation d’emploi des individus de 25 à 35 ans selon le niveau d’études atteint, année 2002................................................................................................................. 96 Tableau 3.15 : Reconstitution des dépenses unitaires publiques (en francs CFA) par niveau d’enseignement, année 2010................................................................................................ 98 Tableau 3.16 : Situation de l’éducation de base en 2006 par au cadre indicatif de l’initiative Fast Track.... 99 Liste des tableaux Tableau 3.13 : Répartition du niveau de rémunération des enseignants à la craie par statut pour les enseignements de base et secondaire, année 2010........................................................ 94 Tableau 4.1 : Répartition des individus de 7 à 24 ans selon le niveau atteint et leurs caractéristiques, 2006.......................................................................................................... 103 Tableau 4.2 : Distribution structurelle des ressources publiques en éducation allouées à une pseudo-cohorte de 100 enfants, année 2010..................................................................... 110 Tableau 4.3 : Part des ressources dont bénéficie chaque groupe de population .................................... 114 11 Tableau 5.1 : Degré d’aléa (1- R2) dans l’allocation des enseignants de l’enseignement de base dans 15 pays africains ........................................................................................................... 121 Tableau 5.2 : Ratio élèves-maître par région et cohérence dans l’allocation des enseignants à l’intérieur des régions 1 2 3 4................................................................................................ 122 Tableau 5.3 : Nombre de groupes pédagogiques en situation de classe multigrade, 2005-2006.............. 126 Tableau 5.4 : Nombre de salles de classe en situation de vacation multiple, selon le nombre de vacations, 2005-2006............................................................................................................ 126 Tableau 6.1 : Effet du nombre d’années d’études sur la reproduction chez les femmes âgées de 15 à 49 ans ...................................................................................................................... 129 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Tableau 6.2 : Mesure consolidée de l’impact social des différents niveaux éducatifs dans une variété de dimensions sociales............................................................................................. 136 12 Liste des graphiques Graphique 1 : Probabilité d’être alphabétisé en fonction du niveau d’étude chez les femmes âgées de 22 à 44 ans............................................................................................................. 18 Graphique 2 : Dépenses courantes publiques d’éducation en % des dépenses courantes hors dette de l’État, comparaisons internationales........................................................................ 19 Graphique 3 : rapport des probabilités d’accès garçons/filles selon la zone de résidence, 2005-06 ......... 23 Graphique 4 : probabilités estimées d’accéder à différents niveaux selon le niveau de vie, 2005-06......... 24 Graphique 5 : rapport des probabilités d’accès garçons/filles selon le niveau de vie, 2005-06.................. 24 Graphique 6 : % des ressources dont bénéficient les 10 % les plus éduqués, comparaisons internationales........................................................................................................................ 25 Graphique 7 : Cohérence de l’allocation des enseignants dans les écoles publiques au niveau de l’enseignement de base, 2005-2006...................................................................................... 27 Figure 1.1 : Pyramide des âges, 2009........................................................................................................... 30 Graphique 1.1 : Croissance économique, 1997-2010.................................................................................. 34 Graphique 1.2 : Décomposition des recettes de l’État, 1997-2010 (en volume base 2010)......................... 35 Graphique 1.3 : Évolution des recettes propres en % du PIB, 1997-2010.................................................. 36 Graphique 1.4 : Décomposition des dépenses de l’État, 1997-2010........................................................... 37 Graphique 1.5 : Évolution des déficits publics 1997-2010........................................................................... 38 Graphique 1.6 : Évolution de la dépense publique courante d’éducation par jeune de 7 à 12 ans, 1997- 2010.................................................................................................. 39 Graphique 1.7 : Dépenses publiques d’éducation en % des dépenses courantes hors dette, comparaisons internationales............................................................................................. 40 Graphiques 1A, 2A, 3A et 4A : Estimation de la population par âge à partir du multiplicateur de Sprague, années 1991 et 2009.................................................................... 44 Graphiques 5A et 6A : lissage des données de population de 1991 par âge et par sexe ........................... 44 Graphiques 7A et 8A : lissage des données de population de 2009 par âge et par sexe ........................... 45 Graphique 2.2 : Profils de scolarisation transversaux, 1999-00 et 2009-10................................................. 61 Graphique 2.3 : Profils de rétention 2009-10................................................................................................ 62 Graphique 2.4 : Proportion de redoublants dans l’enseignement de base (EBE+EBC) en fonction du statut des établissements, année 2009-10.................................................................... 71 Graphique 2.7 : Proportion de redoublants dans l’enseignement secondaire (ESG+ESC) en fonction du statut des établissements, année 2009-10.................................................. 71 Liste des graphiques Graphique 2.1 : Comparaison internationale du TBS dans l’enseignement de base, année comprise entre 2007 et 2010.............................................................................................. 60 Graphique 2.8 : Probabilité d’être alphabétisé en fonction du niveau d’étude chez les femmes âgées de 22 à 44 ans........................................................................................... 75 Graphique 3.1 : Comparaison internationale de la part des dépenses hors salaires enseignant à l’enseignement de base...................................................................................................... 89 Graphique 3.2 : Comparaison internationale des rapports élèves-enseignant dans l’enseignement de base public .......................................................................................... 93 13 Graphique 3.4 : Comparaison internationale du niveau de rémunération moyen pour les enseignants de l’enseignement de base............................................................................ 95 Graphique 4.1 : Répartition filles-garçons dans l’EB et dans l’ES en 2005-06 .......................................... 104 Graphique 4.2 : profils de rétention selon le genre, à l’EB et à l’ES, 2004-05 – 2005-06........................... 104 Graphique 4.3 : Part des filles dans différents établissements du supérieur.............................................. 105 Graphique 4.4 : probabilités estimées d’accéder à différents niveaux selon la zone de résidence, 2005-06........................................................................................................... 106 Graphique 4.5 : rapport des probabilités d’accès garçons/filles selon la zone de résidence, 2005-06 .... 107 Graphique 4.6 : probabilités estimées d’accéder à différents niveaux selon le niveau de vie, 2005-06.... 108 Graphique 4.7 : rapport des probabilités d’accès garçons/filles selon le niveau de vie, 2005-06 ............ 108 Graphique 4.8 : Courbe de Lorenz.............................................................................................................. 112 Graphique 4.9 : % des ressources dont bénéficient les 10 % les plus éduqués, comparaisons internationales................................................................................................................... 113 Graphique 4.10 : proportions d’enfants et de jeune accédant à différents niveaux selon la région, 2005-06............................................................................................................... 115 Graphique 4.11 : part des filles à l’EB et l’ES selon la région, 2005-06...................................................... 116 Graphique 5.1 : Cohérence de l’allocation des enseignants dans les écoles publiques au niveau de l’enseignement de base, 2005-2006............................................................... 120 Graphique 5.2 : Cohérence de l’allocation des enseignants dans les établissements publics au niveau de l’enseignement de secondaire, 2005-2006...................................................... 123 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Graphique 5.3 : Nombre de groupes pédagogiques et nombre de salles de classe dans l’enseignement de base public, 2005-2006...................................................................... 125 14 Graphique 6.1 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans adoptent des comportements favorables sur la santé maternelle suivant le nombre d’années d’études, exprimée en % ................................................................................................................. 131 Graphique 6.2 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans adoptent des comportements favorables sur la santé infantile suivant le nombre d’années d’études, exprimée en % ................................................................................................................. 132 Graphique 6.3 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans adoptent des comportements favorables vis-à-vis du VIH/SIDA suivant le nombre d’années d’étude, exprimée en % ................................................................................................................ 133 Graphique 6.4 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans soient défavorables à l’excision suivant le nombre d’années d’études, exprimée en % ................................................... 134 Graphique 6.5 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans enregistrent les naissances de leurs enfants à l’état civil suivant le nombre d’années d’études, exprimée en %.................... 135 Résumé exécutif L’analyse réalisée par une équipe nationale, en partenariat avec le Pôle de Dakar de l’UNESCO-BREDA et la Banque mondiale, a pour objectif de réaliser un diagnostic de l’ensemble du secteur éducatif afin de mettre en évidence les forces et les faiblesses du système éducatif et d’identifier ainsi les stratégies les plus efficientes pour son amélioration. A l’instar du rapport, ce résumé exécutif se limite au diagnostic factuel, sans aborder, de façon directe, des recommandations en termes d’actions de politique éducative ; bien que la distance entre diagnostic et recommandations soit parfois faible. Les analyses présentes dans cette étude ont pu être réalisées en mobilisant les données et informations issues de multiples sources, en particulier les enquêtes administratives scolaires du ministère de l’Éducation nationale, les données démographiques des Nations unies, les enquêtes de ménage du ministère de l’Économie (ILAP 2002, MICS 2006), les dépenses exécutées du ministère des Finances et les indicateurs macro-économiques du ministère de l’Économie. Le système éducatif s’inscrit dans un contexte de croissance rapide de la population qui est essentiellement jeune, majoritairement rurale et pauvre Le premier élément du diagnostic consiste à analyser le contexte dans lequel évolue le système éducatif bissau-guinéen. Ce contexte est marqué par deux dimensions déterminantes, l’une est relative aux questions démographiques, l’autre aux aspects macro-économiques. 1991 2000 2006 2009 979 1 220 1 413 1 521 Part des 7-12 ans 17 % 18 % 17 % 16 % Part des 7-17 ans 28 % 31 % 30 % 28 % Taux de natalité (‰) 44,1 42,3 40,9 Taux de mortalité (‰) 17,7 17,5 17,3 Indice de fécondité 6,8 6,8 6,8 Population totale (milliers) Taux de croissance moyen annuel 1991-2000 6,8 Résumé exécutif Tableau 1 : Quelques indicateurs démographiques, 1990 – 2009 2,5 % Source : INEC, RGPH 1991, RGPH 2009, et calcul des auteurs. 15 En effet, la population scolarisable pour l’enseignement de base, soit les 7-12 ans, représente près d’un cinquième de la population et cette part devrait se maintenir dans les prochaines années. Le conflit politico-militaire de 1998 et l’instabilité institutionnelle post-conflit a conduit à une dégradation profonde des conditions de vie de la population, dont 60 % vit en zone rurale, dans des conditions très difficiles et sans accès aux services et infrastructures sociaux de base (école, santé, assainissement). En 2010, 69 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté (moins de 2 dollars USD par jour). Tableau 2 : Indicateurs socio-économiques 2000 % population rurale 2002 65 % 2006 2010 63 % 60 % (2009) Pauvreté monétaire (<2$/jour) 64,7 % 69,3 % Pauvreté monétaire (<1$/jour) 20,8 % 33,0 % Indice de Développement humain (classement) 10 172/177 175/177 (2007) 164/169 Sources : MICS 2000, ILAP 2002, MICS 2006, Rapport sur le Développement Humain GB, Rapports mondiaux sur le développement humain 2007 et 2010, RGPH 2009, ILAP 2010. Les performances en termes de croissance économiques sont faibles et la Guinée-Bissau reste fortement dépendante de l’aide extérieure GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Sur le plan macro-économique, si le PIB connaît une croissance réelle positive depuis 2004 (+3,2 %), cette croissance est insuffisante pour absorber la croissance de la population et le PIB par habitant croit relativement peu. Le pays est loin d’avoir rattrapé son niveau de production d’avant la crise politico-militaire : le PIB par habitant est passé, en francs constants de 2010, d’environ 317 000 francs CFA en 1997 à 269 000 francs CFA en 2010, soit une baisse de 15 %, ce qui traduit un appauvrissement significatif du pays. 16 Par rapport aux valeurs préconisées par l’UEMOA, la Guinée-Bissau présente une performance peu satisfaisante en matière de prélèvement des recettes publiques puisque les recettes fiscales et non fiscales représentent environ 11 % du PIB en 2010). Par ailleurs, la part des recettes propres de l’État dans les ressources totales de Guinée-Bissau est assez faible : depuis 1997, les ressources extérieures représentent en moyenne plus de 40 % des recettes totales ce qui traduit une grande dépendance vis-à-vis de l’aide extérieure. Le système éducatif présente une bonne performance en termes quantitatifs avec une nette amélioration de la couverture scolaire La couverture scolaire s’est nettement améliorée à tous les niveaux entre 1999-00 et 2009-10, comme le montre le tableau 3. Tableau 3 : L’évolution des taux bruts de scolarisation (TBS) entre 1999/00 et 2009/10 1999/2000 2009/2010 Accroissement annuel Préscolaire 3% 5% +5 % Enseignement de base 70 % 117 % +5 % Enseignement secondaire 19 % 43 % +9 % Source : calcul des auteurs à partir des données GIPASE et données démographiques Nations unies. C’est l’enseignement secondaire qui a vu sa couverture scolaire progressé le plus rapidement (+9 % par an). À titre comparatif, les couvertures scolaires de l’enseignement préscolaire et de l’enseignement de base n’ont augmenté respectivement que de 5 % par an. Toutefois, l’enseignement de base présente la meilleure couverture avec un taux brut de scolarisation de 117 % alors que le taux brut de scolarisation du secondaire est de 43 % en 2009-10. Cependant, l’enseignement de base universel est encore loin d’être atteint Malgré l’évolution positive des taux brut de scolarisation pour chaque niveau d’enseignement, les analyses montrent que seuls 62 % des enfants achèvent l’enseignement de base en 2009-10. Les analyses montrent également que l’accès à l’enseignement de base (en première année) n’est pas forcément universel malgré un taux d’accès de 164 %. En effet, un nombre important d’enfants plus jeunes ou plus âgés que l’âge normal entrent à l’école et on observe donc un phénomène multi-cohortes. Même s’il convient de rester prudent sur la déclaration des âges, les données administratives montrent que 54 % des élèves nouveaux entrants en 1ère année de l’enseignement de base en 2009-10 étaient âgés de 8 ans et plus (hors madrasas). Une analyse menée sur le MICS 2006 montrait que la probabilité d’entrer à l’école était estimée en 2005-06 à 76 %. Même s’il est probable que la proportion d’enfants qui accèdent à l’école a augmenté depuis 2006, il n’est pas pour autant certains que tous les enfants entrent à l’école en Guinée-Bissau. Par ailleurs, 55 % des enfants accèdent à l’enseignement secondaire (en 7ème année) et seuls 22 % l’achèvent (11ème année). Les dynamiques actuelles observées entre les classes ainsi que les abandons constatés d’une année sur l’autre sont particulièrement préoccupants : sur 100 enfants qui entrent en première année de l’enseignement de base, seuls 72 accèdent en deuxième année ( 28 abandonnent), 58 arrivent en 3ème année (14 abandons supplémentaires entre la seconde et la troisième année) et 38 enfants arrivent au final en sixième année. D’autres facteurs de non-fréquentation scolaire liés à la demande sont en cause. En effet, les causes d’abandon de l’école citées en général par les familles sont essentiellement le travail des enfants (32 %) et le mariage précoce pour les filles (29 %). Par ailleurs, certains facteurs socio-économiques influencent la demande. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, la probabilité d’être un jour allé à l’école augmente pour l’enfant lorsque : il est un garçon, le chef de ménage est une femme, le niveau d’instruction du chef de ménage est plus élevé, l’enfant appartient à une ethnie autre que l’ethnie mandingue, l’enfant vit à Bissau et non dans le Nord du pays, et l’enfant fait parti d’un ménage plus aisé. Une efficacité interne dans l’enseignement de base et l’enseignement secondaire général particulièrement faible L’efficacité interne vise à évaluer pour chaque cycle la capacité du système éducatif à amener les élèves du début à la fin du cycle à moindre coût. Les redoublements, de par les conséquences importantes en termes de places mobilisées qu’ils engendrent, sont, avec les abandons, une composante essentielle de l’efficacité interne. Le tableau 4 montre une légère diminution des redoublements pour chaque niveau d’enseignement entre 1997-98 et 2009-10. Toutefois, hormis pour l’enseignement secondaire complémentaire où la Résumé exécutif Les problèmes d’abandon en cours de cycle et de non-fréquentation scolaire sont à la fois des problèmes d’offre et de demande scolaire. Les analyses ont montré que plus de 20 % des enfants âgés entre 7 et 14 ans se trouvent à plus de 30 minutes de la première école alors même que la probabilité de ne pas aller à l’école augmente nettement avec le temps qui sépare la première école du domicile de l’enfant. Il y a donc un problème d’offre scolaire lié à un manque d’écoles dans certaines zones. De plus, même dans les zones où il y a des écoles, celles-ci ne présentent pas forcément la continuité éducative. En effet, 57 % des élèves scolarisés en 1ère année dans l’enseignement de base se trouvent dans des écoles qui n’assurent pas la continuité éducative jusqu’à la fin du cycle. De plus, 40 % des élèves scolarisés en 4ème année de l’enseignement de base ne peuvent pas continuer leur scolarité dans la même école l’année suivante car il n’y a pas de classe de 5ème année. 17 proportion de redoublants n’est que de 6 %, les chiffres pour les autres niveaux (enseignement de base et enseignement secondaire général) restent globalement trop élevés1. Tableau 4 : Évolution des proportions de redoublants au cours des 10 dernières années 1997-98 2005-06 2009-10 Enseignement de base 23 % 19 % 14 % Enseignement secondaire général 23 % 16 % 15 % Enseignement secondaire complémentaire 8% 5% 6% Source : Données GIPASE. Les ressources finançant les redoublements et les années de scolarité des élèves abandonnant avant la fin du cycle représentent environ 46 % des ressources au niveau de l’enseignement de base. Ce chiffre s’élève à 33 % pour l’enseignement secondaire général et à 17 % pour l’enseignement secondaire complémentaire. Ainsi, une partie importante des ressources n’est pas utilisée de la façon la plus efficace. Le système éducatif produit encore trop peu d’alphabétisés durables après six années de scolarité Graphique 1 : Probabilité d’être alphabétisé en fonction du niveau d’étude chez les femmes âgées de 22 à 44 ans 18 % de femmes de 22 à 44 ans alphabétisées GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 35,0 30,0 25,0 20,0 15,0 10,0 5,0 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 Nombre d'années d'études Source : MICS 2006, calcul des auteurs. Une mesure alternative à celle des acquis des élèves et mobilisable à travers certaines enquêtes de ménages est celle de l’alphabétisation des adultes. Bien sûr, les objectifs des programmes scolaires ne se limitent pas à l’alphabétisation mais on peut considérer qu’il s’agit d’une première dimension qui peut légitimement servir à l’évaluation de l’efficacité de l’école. Une analyse menée sur l’enquête MICS 2006 montre que, pour les femmes âgées de 22 à 44 ans, la probabilité d’être alphabétisé après 6 années de scolarité est seulement de 65 % (graphique 1) alors qu’on pourrait penser qu’un individu se doit d’être alphabétisé à la fin de l’enseignement de base. 1 Le cadre indicatif Fast Track préconise une moyenne de 10 % de redoublants à l’enseignement de base. La part de l’éducation dans les dépenses courantes totales de l’État est trop faible La part des dépenses courantes d’éducation dans les dépenses courantes de l’État hors dette représente 11 % en 2010 en Guinée-Bissau. Le graphique 2 compare la situation de la Guinée-Bissau avec d’autres pays africains à niveau de richesse similaire. Graphique 2 : Dépenses courantes publiques d’éducation en % des dépenses courantes hors dette de l’État, comparaisons internationales 25% 30% 25% 20% 15% 10% 5% Ghana (2007) Ouganda (2009) Mali (2008) Ethiopie (2007) Niger (2008) Tanzanie (2009) Burkina Faso (2006) Togo (2008) Madagascar (2008) Rwanda (2008) Sierra Leone (2008) Cadre Indicatif Fast-Track Malawi (2007) Gambie (2009) RCA (2008) Guinée-Bisseau (2010) 0% Sources : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). NB : pays avec un PIB/habitant compris en 2009 entre 300 et 700 dollars USD. La Guinée-Bissau est le pays où la part des dépenses publiques d’éducation représente la plus faible proportion des dépenses courantes hors dette de l’État. En effet, tous les autres pays représentés allouent une part supérieure ou égale à 14 % et des pays comme le Mali, l’Ouganda ou le Ghana allouent presque 30 % et plus de leurs dépenses courantes hors dette à leurs dépenses courantes d’éducation. Tout d’abord, du point de vue de la ventilation sous-sectorielle, on constate que la majeure partie des dépenses courantes sert à financer les enseignements de base et secondaire (55,2 % pour l’enseignement de base et 32,7 % pour l’enseignement secondaire soit un total de 87,9 %). L’enseignement de base occupe donc une place prioritaire au niveau de l’éducation en Guinée-Bissau puisque plus de la moitié des dépenses sont accordées à ce sous-secteur, ce qui entre en cohérence avec le cadre indicatif de l’initiative Fast Track2. Résumé exécutif En termes de répartition intra-sectorielle, les dépenses courantes d’éducation sont favorables à l’enseignement de base et à l’enseignement secondaire ; mais financent très majoritairement les dépenses de personnel au détriment des dépenses administratives et pédagogiques 19 2 Le cadre Fast Track indique que 50 % des dépenses courantes d’éducation devraient aller à l’enseignement de base. Tableau 5 : Répartition des dépenses courantes publiques d’éducation par niveau d’enseignement, année 2010 Préscolaire 0,9 % EB 55,2 % ES 32,7 % EFTP 2,5 % Supérieur 4,7 % Sup. à l’étranger 0,6 % Écoles normales 1,3 % ENS 1,0 % Alphabétisation 0,5 % Recherche. Scientifique 0,5 % TOTAL 100 % Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/10 de la GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports, et calcul des auteurs. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Les personnels constituent de loin le principal poste des dépenses d’éducation. En effet, les dépenses de personnel pour l’année 2010 représentent 91 % des dépenses courantes totales de l’éducation. 20 Tableau 6 : Structuration des dépenses courantes publiques d’enseignement, année 2010 Masses salariales Personnels Dépenses non salariales Personnels Admin. et Enseignants Sociales Sub. nonpédago. «craie en enseignants main» % dépenses hors salaires % des dépenses hors salaires enseignant (1) (2) (3) (4) (5) (3)+(4)+(5) (2)+(3)+(4)+(5) Préscolaire 63,9 % 30,6 % 5,5 % 0,0 % 0,0 % 5,5 % 36,1 % EB 80,4 % 13,9 % 5,7 % 0,0 % 0,0 % 5,7 % 19,6 % ES 79,4 % 15,0 % 5,6 % 0,0 % 0,0 % 5,6 % 20,6 % EFTP 56,8 % 37,6 % 5,6 % 0,0 % 0,0 % 5,6 % 43,2 % Supérieur (hors recherche scientifique) 67,9 % 12,0 % 8,1 % 11,0 % 1,0 % 20,1 % 32,1 % Écoles Normales 76,8 % 11,0 % 7,4 % 4,7 % 0,0 % 12,2 % 23,2 % ENS 84,5 % 10,0 % 5,5 % 0,0 % 0,0 % 5,5 % 15,5 % Alphabétisation 67,6 % 26,9 % 5,5 % 0,0 % 0,0 % 5,5 % 32,4 % Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/10 du GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports, et calcul des auteurs. Si on se réfère aux dépenses courantes par niveau d’enseignement (tableau 6), on s’aperçoit que les salaires (enseignants et non-enseignants) représentent 94 % des dépenses de l’enseignement de base et de l’enseignement secondaire en 2010 ce qui laisse peu pour les dépenses administratives et pédagogiques (environ 6 %). Concernant spécifiquement l’enseignement de base, le cadre indicatif Fast Track recommande une part des dépenses hors salaires des enseignants de 33,3 % alors que celle-ci n’est que de 19,6 % en Guinée-Bissau. Le tableau 7 présente les rémunérations moyennes des enseignants de l’enseignement de base en termes de PIB par habitant. On observe que les chiffres sont en dessous de la moyenne réalisée sur 10 pays3 d’un niveau de richesse comparable (2,3 PIB/habitant contre 4,4 en moyenne sur les 10 pays). Le niveau de rémunération des enseignants de l’enseignement de base est également inférieur à la rémunération moyenne indiquée par le cadre de l’initiative Fast Track (3,5 PIB/habitant). Tableau 7 : Les rémunérations des enseignants (PIB/ habitant) Enseignement de base Salaire moyen Guinée-Bissau 2,3 Moyenne sur 10 pays africains avec un PIB/habitant compris entre 300 et 700 dollars USD 4,4 Cadre de l’initiative Fast Track 3,5 Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/10 du GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports, et calcul des auteurs, et Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). L’analyse détaillée des dépenses publiques d’éducation en 2010 a permis de déterminer la dépense publique par élève pour chaque niveau d’enseignement (tableau 8), c’est-à-dire le montant dépensé par l’État pour chaque élève d’un niveau donné scolarisé dans un établissement public. Si un étudiant du supérieur a un coût 7,5 fois plus important qu’un élève de l’enseignement de base, un élève de l’EFTP coûte 3 fois plus cher qu’un étudiant de l’enseignement supérieur. En comparaison à la moyenne de 10 pays africains à niveau de richesse similaire, les dépenses publiques unitaires pour tous les niveaux d’enseignement sont beaucoup moins importantes en Guinée-Bissau. En effet, en raison d’un arbitrage budgétaire inter sectoriel défavorable à l’éducation4, les dépenses publiques unitaires sont assez faibles pour chaque niveau d’enseignement. Résumé exécutif Des dépenses publiques par élève inférieures à la moyenne des autres pays comparables 21 3 Ces pays sont le Burkina Faso (2006), le Mali (2008), la RCA (2008), la Gambie (2009), la Tanzanie (2009), le Niger (2008), le Rwanda (2008), Madagascar (2006), le Ghana (2007) et le Togo (2007). 4 Les dépenses courantes d’éducation ne représentent que 11 % des dépenses courantes hors dette de l’État. Tableau 8 : Les dépenses publiques par élève par niveau d’enseignement, année 2010 Enseignement de base Secondaire EFTP Supérieur* En FCFA 14 429 26 686 328 157 109 689 en % du PIB / habitant 5,4 % 9,9 % 122,1 % 40,8 % Moyenne 10 pays africains dont le PIB/ habitant compris entre 300 et 700 USD 11,9 % 28,8 % 177,3 % 236,9 % * y compris ENS Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/10 du GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports, et calcul des auteurs, et Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA. Une contribution importante des ménages à l’éducation de leurs enfants GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Les ménages contribuent fortement au financement de l’éducation : ils ont dépensé près de 4,4 milliards de francs CFA pour la scolarisation de leurs enfants en 2010, dont plus de la moitié pour le secondaire. Cette somme représente 49 % des dépenses totales, avec des différences selon les niveaux : les familles contribuent majoritairement au financement du secondaire et du préscolaire (à hauteur de 62 et 65 % pour ces deux niveaux). A l’inverse, à l’enseignement de base, c’est l’État le principal financeur, puisque les dépenses des ménages représentent 34 % du financement. Cependant, cette charge des ménages reste très importante, notamment au regard des objectifs de la Scolarisation Primaire Universelle. Tableau 9 : Part des dépenses d’éducation des ménages dans les dépenses totales nationales Préscolaire Enseignement de base Enseignement secondaire Dépense par enfant (FCFA) 9 500 5 100 36 130 Effectifs scolarisés 9 044 288 738 78 026 Dépenses des familles (millions FCFA 2010) 85,9 1 472,6 2 819,1 4 377,5 Dépenses de l’État (millions FCFA 2010) 46,1 2 889,2 1 709,3 4 644,6 Dépenses totales (millions FCFA 2010) 132,0 4 361,8 4 528,4 9 022,1 % des dépenses supportées par les familles 65 % 34 % 62 % 49 % Total Source : base de données de l’enquête auprès des ménages ILAP 2002, base de données du personnel 2005/06 de la GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, dde la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports, Ministère des Finances, et calcul des auteurs. Des disparités très marquées dans la scolarisation selon le niveau de vie des ménages, la zone de résidence et le genre 22 Si les filles entrent presque autant que les garçons à l’école en Guinée-Bissau, elles ont presque deux fois moins de chances d’arriver en 6ème année que les garçons en zone rurale, contre 1,4 en zone urbaine comme le montre le graphique 3. Il faut noter que, si on observe un accroissement continu des inégalités entre les filles et les garçons urbains au cours de la scolarité, ce constat n’est pas valable pour les jeunes ruraux puisque le rapport des probabilités d’accès garçons/filles stagne voire baisse légèrement à partir de la 6ème année. Les jeunes issus de milieu rural ont très peu de chances d’achever l’enseignement de base et d’accéder à l’enseignement secondaire ; on peut donc penser que ceux qui y parviennent, et notamment les filles, présentent des caractéristiques spéciales qui font qu’elles n’abandonnent alors pas plus que les garçons. Graphique 3 : rapport des probabilités d’accès garçons/filles selon la zone de résidence, 2005/06 2,0 1,8 1,6 1,4 1,2 urbain 1,0 rural 0,8 0,6 0,4 0,2 0,0 accès EB achvt EB accès ESG achvt ESG Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Résumé exécutif Le niveau de vie joue un rôle essentiel dès l’accès à l’école : alors que les enfants des ménages les plus aisés ont 90 % de chances d’aller à l’école, la probabilité pour les enfants des ménages les plus pauvres (quintiles 1 à 3) n’est que de 65 %. Comme pour les disparités liées au milieu de résidence, les inégalités liées au niveau de vie s’accroissent à mesure qu’on avance dans le système scolaire, puisque les enfants des ménages les plus aisés ont cinq fois plus de chances de terminer l’enseignement de base et huit fois plus de chances d’être scolarisés dans l’enseignement secondaire. 23 Graphique 4 : probabilités estimées d’accéder à différents niveaux selon le niveau de vie, 2005/06 1 0,9 0,8 0,7 0,6 quintiles 1 à 3 0,5 quintile 4 0,4 quintile 5 0,3 0,2 0,1 0 accès EB achvt EB accès ESG achvt ESG Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Par ailleurs, les filles subissent plus que les garçons ces inégalités dues au niveau de vie : les différences de scolarisation aux différents niveaux entre filles et garçons sont beaucoup plus accentuées dans les ménages très pauvres (quintiles 1 à 3) que dans les ménages plus aisés. Dans un contexte où les ressources sont particulièrement rares et où l’éducation de tous les enfants ne peut être assurée, celle des filles sera sacrifiée au profit de celle de leurs frères. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Graphique 5 : rapport des probabilités d’accès garçons/filles selon le niveau de vie, 2005/06 2,5 2,0 quintiles 1 à 3 1,5 quintile 4 1,0 quintile 5 0,5 0,0 accès EB achvt EB accès ESG Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. 24 achvt ESG Ainsi, dans les ménages les plus pauvres, les garçons ont 1,8 fois plus de chances d’arriver en 6ème année que les filles alors que ce rapport n’est que de 1,3 dans les ménages les plus aisés. On observe donc là encore un cumul des inégalités liées au genre et au niveau de revenu. Cependant, il faut souligner que même au sein des ménages du quintile 5, les disparités de genre sont loin d’être négligeables, puisque les garçons ont 1,5 fois plus de chances d’aller à l’enseignement secondaire général que les filles. Une répartition inégale des ressources allouées à l’éducation dans la population moins prononcée que dans les autres pays à niveau de richesse similaire, mais avec tout de même de fortes disparités sociales dans l’appropriation de ces ressources En se situant dans une perspective comparative, la Guinée-Bissau est l’un des pays les plus équitables en termes de distribution. En effet, les pays comparables à la Guinée-Bissau en termes de PIB/habitant allouent entre 47 % (Tanzanie) et 64 % (Rwanda) de leurs ressources au 10 % les plus éduqués de la population alors qu’en Guinée-Bissau, seuls 28 % des ressources bénéficient au 10 % les plus éduqués. Graphique 6 : % des ressources dont bénéficient les 10 % les plus éduqués, comparaisons internationales Rwanda (2008) RCA (2005) Madagascar (2006) Niger (2008) Mali (2008) Burkina Faso (2006) Tanzanie (2009) Guinée-Bissau (2010) 70 60 50 40 30 20 10 0 La question se pose à présent de savoir comment les inégalités dues aux caractéristiques socio-économiques se répercutent dans l’appropriation des ressources publiques allouées à l’éducation. Le tableau 10 présente le pourcentage de ressources dont bénéficie chaque groupe de population. On met ainsi en évidence que les groupes favorisés bénéficient de plus de ressources publiques d’éducation au détriment des groupes défavorisés. Les garçons par exemple s’approprient 59 % des ressources et les filles 41 % alors même qu’il y a autant de filles que de garçons dans la population. 76 % des ressources vont aux enfants et jeunes issus de milieu urbain alors même qu’ils ne représentent qu’un peu plus du tiers des jeunes de 7 à 24 ans. Enfin, le quart des jeunes issus des ménages les plus aisés bénéficient de plus de la moitié des ressources allouées à l’éducation, quand les 17 % les plus pauvres n’ont que 6 %. D’importantes disparités dans l’appropriation des ressources publiques sont donc observées en fonction des caractéristiques socio-économiques. Résumé exécutif Sources : Chapitre 2, Chapitre 3, calcul des auteurs, et Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). 25 Tableau 10 : Part des ressources dont bénéficie chaque groupe de population % de ressources accumulées % dans la population Sans scolarisation EB ESG ESC Supérieur Total Q1 0% 3% 2% 1% 1% 6% 17 % Q2 0% 3% 2% 1% 0% 6% 19 % Q3 0% 4% 3% 2% 0% 9% 20 % Q4 0% 5% 8% 6% 2% 21 % 21 % Q5 0% 5% 20 % 18 % 15 % 57 % 23 % Rural 0% 11 % 7% 5% 1% 24 % 61 % Urbain 0% 8% 27 % 23 % 18 % 76 % 39 % Filles 0% 9% 14 % 11 % 7% 41 % 50 % Garçons 0% 10 % 20 % 17 % 11 % 59 % 50 % Selon le revenu Selon la localisation Selon le sexe Source : tableau 4.1 et tableau 4.2 du rapport. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF L’allocation des enseignants par l’État dans les écoles d’enseignement de base reste à améliorer et à rendre plus équitable entre régions 26 L’allocation du personnel enseignant, qui constitue le point central des questions de gestion administrative, se présente différemment selon le niveau d’enseignement abordé. Pour l’enseignement de base, on observe que des progrès peuvent encore être réalisés dans l’allocation des enseignants aux écoles dans la mesure où encore 20 % des affectations ne s’expliquent pas par le nombre d’élèves dans les établissements ; or les pays les plus performants comme la Guinée obtiennent un chiffre inférieur à 10 %. À titre d’illustration, le graphique 8 permet de voir que pour une école de 500 élèves, certaines disposent de 15 enseignants alors que d’autres ne bénéficient que de 1. À titre d’illustration, le graphique 7 permet de voir que pour une école de 500 élèves, certaines disposent de 15 enseignants alloués directement par l’État alors que d’autres ne bénéficient que d’un enseignant alloué par l’État et que par conséquent, le déficit d’enseignants est très certainement comblés par des maîtres communautaires recrutés et payés directement par les parents. Graphique 7 : Cohérence de l’allocation des enseignants dans les écoles publiques au niveau de l’enseignement de base, 2005-2006 110 R2= 0,8 100 Nombre d'enseignants 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 4000 4500 Nombre d'élèves Source : calcul des auteurs à partir des bases de données scolaire et du personnel 2005-06 de la GIPASE. Les régions de Biombo, de Bolama et du Secteur Autonome de Bissau (SAB) sont les mieux dotées en enseignants alloués par l’État alors que la région de Quinara est la moins bien dotée. On note une différence de 34,7 points entre la région de Quinara (70,6 élèves par enseignant alloué par l’État) et celle du Secteur Autonome de Bissau (35,9 élèves par enseignant alloué par l’État). Dans l’ensemble, six régions présentent des ratios élèves-maître supérieurs à la moyenne nationale (50,4) et trois en dessous. Ces données traduisent des insuffisances dans la gestion au niveau central de l’allocation des enseignants aux régions. Toutefois, il convient de préciser que les ratios élèves-maître observés ne tiennent pas compte des maîtres directement recrutés et rémunérés par les communautés. On peut donc penser que les communautés des régions comme Quinara font appel à des enseignants communautaires payés directement par les parents dans des proportions relativement importantes. L’usage de la vacation multiple est très prononcée dans l’enseignement de base dans les écoles publiques étant donné qu’environ 56 % des salles de classe accueillent deux groupes d’élèves à des moments différents de la journée, 11,5 % des salles de classe accueillent trois groupes d’élèves à des moments différents et moins de 1 % des salles reçoivent quatre groupes d’élèves dans une journée à différents moments. Seules 29 % des salles de classe ne reçoivent qu’un groupe d’élèves durant toute une journée. La vacation multiple est beaucoup plus prononcée que l’usage du multigrade alors même que les études disponibles sur le sujet montre que celle-ci a des conséquences néfastes sur le temps scolaire. Résumé exécutif Une organisation scolaire dans l’enseignement de base essentiellement en vacations multiples qui peut avoir un impact négatif sur le temps d’apprentissage 27 Des impacts forts de l’éducation dans le domaine social, en particulier de l’enseignement de base Une part importante des effets sociaux de l’éducation mesurés (fécondité, santé, protection de la femme et civisme) est acquise avec l’enseignement de base, qui représente 65 % des effets apportés par l’éducation. L’enseignement secondaire général y contribue, quant à lui, à hauteur de 16 %, l’enseignement secondaire complémentaire à hauteur de 10 % et l’enseignement supérieur à hauteur de 15 %. Si l’enseignement de base contribue à hauteur de 65 % en moyenne sur l’ensemble des questions sociales analysées, cet impact est moins important sur les comportements liés à la fécondité (38 %) et au civisme (33 %). Pour ces deux questions sociales, les autres niveaux d’enseignement présentent un impact non négligeable : impact de 25 % de l’enseignement supérieur sur la fécondité et de 28 % sur le civisme. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF En effet, les rapports gains/coût sont faibles pour les autres niveaux d’enseignement comparativement à l’enseignement de base : celui de l’enseignement secondaire général en représente 25 %, celui de l’enseignement secondaire complémentaire représente le rapport le plus faible avec 15 % et celui du supérieur en représente 23 %, du fait de coûts unitaires de formations supérieurs à ceux de l’enseignement de base et d’un bénéfice marginal social moindre que celui de l’enseignement de base. 28 Chapitre 1 : Le contexte démographique et macroéconomique Introduction : le contexte politique et institutionnel La Guinée-Bissau est un pays lusophone de superficie modeste (36 125 km²). Situé sur la côté occidentale africaine, sa population est estimée à un peu plus d’un million et demi d’habitants en 2009. Comme de nombreux pays africains, la Guinée-Bissau fait face à des défis importants dans le secteur éducatif liés à la pression démographique et aux caractéristiques de sa population (ruralité, pauvreté, etc.) ; les moyens mobilisés pour y faire face dépendent de l’environnement macroéconomique du pays, des possibilités budgétaires publiques ainsi que de la capacité du pays à attirer des ressources extérieures. Le but de ce chapitre est donc de décrire les enjeux contextuels du secteur de l’éducation tant du point de vue démographique que macro-économique, mais il est auparavant essentiel de rappeler le contexte institutionnel et politique particulièrement instable qui caractérise la Guinée-Bissau. Ce contexte, de forte instabilité politique, a fragilisé l’administration publique, surtout dans le domaine de la gestion économique et financière du pays ; le système éducatif n’ayant pas été épargné. I. Un contexte démographique contraignant La Guinée-Bissau a connu un recensement général de la population et de l’habitat en 2009. Sur la base de ces données, la population est estimée à 1 520 830 habitants, dont 60 % vivent en milieu rural. Le pays est découpé en neuf régions administratives : la capitale, Bissau, qui concentre plus d’un quart de la population du pays, puis les régions de l’Oio, Bafata, Cacheu, Gabu, Biombo, Quinara, Tombali et Bolama. 1 Le contexte démographique et macroéconomique Le pays a connu une longue guerre de libération qui s’est terminée par la proclamation de l’indépendance en 1974, suivie d’une série de coups d’État et d’insurrections armées. Le conflit politico-militaire, de juin 1998 à mai 1999, a été particulièrement grave et a causé la destruction de près de 80 % des infrastructures économiques et sociales existantes. Les élections législatives et présidentielles tenues fin 1999 et début 2000 ont permis la constitution d’un Parlement et le choix d’un Président démocratiquement élu. Cependant, la perspective d’un retour à la démocratie a été une fois de plus perturbée par un coup d’État le 14 septembre 2003 et la prise de pouvoir par un comité militaire. La pression internationale pour un retour à la norme constitutionnelle a conduit, en octobre 2003, à la création d’un gouvernement et à la nomination d’un président de transition, tous les deux civils. Le gouvernement de transition a assuré la gestion des affaires courantes du pays et l’organisation des élections législatives de mars 2004, avec comme conséquence la mise en place d’un gouvernement élu. Le nouveau gouvernement, peu après son installation, s’est vu confronté à une nouvelle insurrection militaire le 6 octobre 2004, qui n’a cependant pas provoqué de rupture institutionnelle. Depuis cette date, hormis quelques insurrections militaires, on peut noter l’assassinat du chef de l’État-Major des armées et du président de la République les 1er et 2 mars 2009. Un nouveau président de la République a, depuis, été élu, les insurrections de nature militaire ont été de moins en moins nombreuses, mais l’instabilité institutionnelle persiste. 29 La population bissau-guinéenne est caractérisée par une grande diversité ethnique, notamment au regard de la taille du pays. Il n’y a pas de consensus sur le nombre exact d’ethnies dans le pays ; les données varient selon les sources et oscillent généralement entre dix et trente. Cependant, cinq groupes ethniques représentent environ 82 % de la population et se répartissent comme suit selon les données du RGPH 2009 : Fula 24 %, Balanta 23 %, Mandinga 14 %, Manjaco 12 % et Papel 9 %. La grande diversité ethnique entraîne une mosaïque linguistique. Le créole est considéré comme la langue nationale et est le moyen de communication entre les différents groupes ethniques. Cependant, une bonne partie de la population, notamment dans les zones rurales, ne parle pas le créole, ce qui constitue un obstacle dans leurs rapports avec les prestataires des services publics sociaux et avec certains groupes de la population. Le portugais, déclaré langue nationale officielle, est peu parlé et son usage est limité aux milieux officiels et à un petit nombre de Guinéens qui ont un niveau élevé d’éducation. L’analphabétisme parmi les individus âgés de plus de quinze ans était de 49,8 % (34,8 % chez les hommes et 63,1 % chez les femmes) en 2009 (selon les données du RGPH 2009). Enfin, trois religions coexistent dans le pays : les musulmans représentent 45 % de la population, les animistes 30 % et les chrétiens 20 % (MICS3 2006). I.1 Démographie : la structure et la croissance de la population pèsent lourdement sur le système éducatif La pyramide des âges en Guinée-Bissau a une base élargie et un sommet étroit, caractéristiques d’une population particulièrement jeune : les individus âgés de 7 à 17 ans représentent plus d’un quart de la population totale. Quant aux enfants en âge d’aller à l’enseignement de base (7-12 ans)5 en 2009, ils représentent 16 %, soit un peu plus d’un sixième de la population. La pression démographique apparaît donc très forte sur le système éducatif. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Figure 1.1 : Pyramide des âges, 2009 30 100 ans et + 95-99 ans 90-94 ans 85-89 ans 80-84 ans 75-79 ans 70-74 ans 65-69 ans 60-64 ans 55-59 ans 50-54 ans 45-49 ans 40-44 ans 35-39 ans 30-34 ans 25-29 ans 20-24 ans 15-19 ans 10-14 ans 5-9 ans 0-4 ans Hommes Femmes Source : RGPH 2009. 5 L’enseignement de base avant l’année scolaire 2010-2011 comprenait 6 années de scolarisation et la tranche d’âge officielle pour y être scolarisé était 7-12 ans. À compter de l’année scolaire 2010-2011, l’enseignement de base s’entend sur neuf années de scolarisation (3 cycles : 1ère à 4ème année, 5ème à 6ème année et 7ème à 9ème année) et la tranche d’âge officiel pour y être scolarisé est 6-14 ans. Par ailleurs, la Guinée-Bissau entame juste sa transition démographique : si le taux de mortalité baisse depuis 1990, le taux de natalité reste élevé (à 40 pour mille en 2006), de même que l’indice de fécondité qui se maintient aux alentours de 7 enfants par femme. Le taux de croissance annuel moyen de la population entre 1991 et 2009 a été d’environ 2,5 %. Si le taux de croissance annuel moyen reste le même entre 2009 et 2015, la population bissau-guinéenne dépassera les 1,7 millions d’habitants en 2015. Tableau 1.1 : Quelques indicateurs démographiques, 1991 – 2009 1991 2000 2006 2009 979 1 220 1 413 1 521 Part des 7-12 ans 17 % 18 % 17 % 16 % Part des 7-17 ans 28 % 31 % 30 % 28 % Taux de natalité (‰) 44,1 42,3 40,9 Taux de mortalité (‰) 17,7 17,5 17,3 Indice de fécondité 6,8 6,8 6,8 Population totale (milliers) Taux de croissance moyen annuel 1991-2000 6,8 2,5 % Source : INEC, RGPH 1991, RGPH 2009, et calcul des auteurs. I.2 Une population en majorité rurale et très pauvre : des défis supplémentaires pour l’école Tableau 1.2 : Indicateurs socio-économiques 2000 % population rurale 2002 65 % 2006 2010 63 % 60 % (2009) Pauvreté monétaire (<2$/jour) 64,7 % 69,3 % Pauvreté monétaire (<1$/jour) 20,8 % 33,0 % Indice de Développement humain (classement) 172/177 175/177 (2007) 164/169 Sources : MICS 2000, ILAP 2002, MICS 2006, Rapport sur le Développement Humain GB, Rapports mondiaux sur le développement humain 2007 et 2010, RGPH 2009, ILAP 2010. L’instabilité politico-institutionnelle qui a caractérisé le pays dans la période post-conflit a conduit à une dégradation profonde des conditions de vie de la population, dont 60 % vit en zone rurale en 2009, dans des situations très difficiles, sans accès aux services et infrastructures sociaux de base (école, santé, assainissement). Par ailleurs, en 2002, 64,7 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté avec moins de deux dollars USD par jour). Cette proportion s’est accrue puisqu’en 2010, 69,3 % de la population vivait avec moins de deux dollars USD par jour. Ces éléments sont des défis significatifs car la vie en milieu rural et la pauvreté monétaire des familles ont un impact négatif sur la scolarisation des enfants. 1 Le contexte démographique et macroéconomique Sur le plan socio-économique, le pays connaît d’énormes difficultés et souffre encore des suites du conflit politico-militaire de 1998. Le secteur privé, qui était déjà peu développé, a été davantage fragilisé par cette crise. Le rapport sur le développement humain de 2010 place la Guinée-Bissau en 164ème position sur 169 pays, ce qui s’explique par la persistance d’indicateurs sociaux défavorables, et notamment une très faible espérance de vie (48,6 ans). 31 Encadré 1.1 : L’indice de développement humain (IDH) L’indice de développement humain (IDH) est un indice composite créé par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et compris entre 0 (exécrable) et 1 (excellent), calculé par la moyenne de trois indices quantifiant respectivement : 1) la santé/longévité (mesurées par l’espérance de vie à la naissance), qui permet de mesurer indirectement la satisfaction des besoins matériels essentiels tels que l’accès à une alimentation saine, à l’eau potable, à un logement décent, à une bonne hygiène et aux soins médicaux ; 2) le savoir ou niveau d’éducation. Il est mesuré par le taux d’alphabétisation des adultes (pourcentage des individus de 15 ans et plus sachant écrire et comprendre aisément un texte court et simple traitant de la vie quotidienne) et le taux brut de scolarisation (mesure combinée des taux pour le primaire, le secondaire et le supérieur). GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 3) le niveau de vie (logarithme du produit intérieur brut par habitant en parité de pouvoir d’achat), afin d’englober les éléments de la qualité de vie qui ne sont pas décrits par les deux premiers indices tels que la mobilité ou l’accès à la culture. 32 I.3 La Santé Pays classé parmi les six pays les plus pauvres du monde, la Guinée-Bissau est fortement touchée par des maladies liées aux problèmes de nutrition, principalement chez les femmes enceintes, ce qui explique les taux élevés de mortalité maternelle et infanto-juvénile même si ces taux sont en baisse. D’après les données de l’enquête MICS 2010, la mortalité des enfants de moins de cinq ans a diminué de 29 % par rapport aux données de l’enquête MICS 2006 : un enfant sur quatre mourrait avant d’atteindre l’âge de cinq ans en 2006, contre un enfant sur six aujourd’hui, ce qui reste pour autant toujours préoccupant. Malgré tout, la prévalence de malnutrition sévère a baissé entre 2000 et 2006 grâce aux campagnes d’informations sur l’éducation et la nutrition effectuées dans le cadre du Programme national pour le développement sanitaire. Tableau 1.3 : Indicateurs de santé 2000 2001 2006 2010 Mortalité infantile 124 ‰ 138 ‰ 103 ‰ Mortalité avant 5 ans 203 ‰ 223 ‰ 158 ‰ 25 % 19.4 % Malnutrition a Malnutrition sévère a 6.5 % 4% Prévalence paludisme 11.3 % Prévalence VIH/SIDA 6.2 %c b 8.7 %d Sources : MICS 2000, MICS 2006, MICS 2010, RDH. : a/ enfants de moins de 5 ans. b/ prévalence chez les enfants de 0 à 14 ans, Direction des grandes endémies, Rapport Santé et Pauvreté en Guinée-Bissau, cité dans le RDH. c/ prévalence chez les femmes enceintes, LNSP Sida Sentinela, cité dans le RDH. d/ MICS3, cité dans Meeting the Demand of the Poor and Vulnerable – The Road for a Better Social Service Delivery, Preliminary Draft, World Bank . Concernant le paludisme, il constitue un des domaines prioritaires du Gouvernement dans la stratégie de réduction de la pauvreté. D’après les données disponibles, qui proviennent uniquement des services de santé publique et non des structures privées ou communautaires, la prévalence du paludisme est à peu près uniforme sur l’ensemble du pays. Cette maladie est la principale cause de décès parmi les enfants de moins de cinq ans. En 2005, 179 512 cas et 418 décès ont été enregistrés : environ 43 % de ces cas et 64 % de ces décès concernent des enfants de moins de cinq ans. Les femmes enceintes constituent également un groupe particulièrement vulnérable au paludisme, et cette maladie représente une cause majeure des anémies sévères, des avortements ou des naissances prématurées. Le paludisme a également un impact très négatif sur les revenus des familles et celui du gouvernement : il est responsable en partie de l’absentéisme à l’école et sur les lieux de travail. Pour ce qui est de l’infection du VIH/SIDA en Guinée-Bissau, il se caractérise par la circulation de deux types de virus, le VIH 1 et le VIH 26, et par des taux de prévalence relativement élevés. Il existe plusieurs sources de données et d’informations sur l’infection par le VIH, notamment les informations récoltées lors de consultations prénatales, les études de suivi longitudinal, les enquêtes et résultats des centres de prévention et de dépistage volontaire. Sur la base des informations disponibles des différentes sources, la 6 La transmission du VIH2 se fait par les mêmes voies que le VIH1, le sang, les relations sexuelles et la transmission maternofœtale. Néanmoins, cette transmission semble moins facile que celle du VIH1. 1 Le contexte démographique et macroéconomique Notes 33 prévalence du VIH varie selon les régions et à l’intérieur des régions entre zones rurales et zones urbaines. Sur l’ensemble du pays, la prévalence du VIH1 est estimée à 5,1 %. La région de Biombo présente le plus faible taux de prévalence (2,6 %) contre le Secteur Autonome de Bissau (7,4 %). Concernant le VIH 2, il est plus fréquent à Caio, Canchungo et Bissau. De manière générale, ce sont les régions les plus importantes du pays, du point de vue économique et démographique, qui présentent les plus hautes prévalences pour le VIH (Bissau, Bafata, Cacheu, Gabu et Oio). II. Le contexte macroéconomique II.1 De faibles performances en termes de croissance Depuis le conflit politico-militaire de 1997, la richesse de la Guinée-Bissau a diminué jusqu’en 2004. C’est seulement à partir de 2005 que la Guinée-Bissau a retrouvé le même niveau de richesse qu’elle avait en 1997. Si en valeur nominale le PIB a progressé de 4,4 % en moyenne par an entre 1997 et 2010, il a baissé en termes réels jusqu’en 2004 puis a retrouvé son niveau de 1997 en 2005 (environ 360 milliards de francs CFA de 2010) pour atteindre 418 milliards de francs CFA en 20107. Ainsi, le taux d’accroissement annuel moyen réel du PIB sur la période 1997-2010 n’a été que de 1,2 %. Huit ans après le conflit, la Guinée-Bissau est enfin parvenue à atteindre le niveau de production qu’elle avait juste avant. Toutefois, la population bissau-guinéenne a considérablement augmenté durant cette période. Si on rapporte la richesse nationale au nombre d’habitants, le PIB par habitant (en francs CFA constant base 2010) est passé de 317 000 francs CFA en 1997 à 269 000 francs CFA en 2010, soit une chute de 15 % traduisant un appauvrissement significatif de la population. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Graphique 1.1 : Croissance économique, 1997-2010 450 000 400 000 350 000 300 000 250 000 200 000 150 000 100 000 50 000 0 1997 1998 1999 2000 2001 2002 PIB réel (million Fcfa 2010) 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 PIB réel par tête (Fcfa 2010) Source : INEC. 34 Par ailleurs, depuis 2003 et la stabilisation politique, la croissance réelle est régulièrement positive mais encore faible (3,2 % en moyenne) au regard de la progression de la population, ce qui conduit à une stagnation du PIB/habitant à environ 260 000 francs CFA par habitant). 7 Voir tableau détaillé en annexe (Tableau 1A.1). II.2 Évolution des finances publiques II.2.1 Les recettes de l’État Les recettes de Guinée-Bissau ont connu, de façon globale, une croissance relativement faible entre 1997 et 20108 : elles ont légèrement augmenté en volume, passant de 62 milliards de francs CFA en 1997 à 66,8 milliards de francs CFA en 2010. Cette faible évolution des recettes et les fluctuations assez importantes au cours de la période sont dues vraisemblablement à des raisons de politique intérieure. Graphique 1.2 : Décomposition des recettes de l’État, 1997-2010 (en volume base 2010) 80,0 40,0 60,0 30,0 40,0 20,0 20,0 10,0 0,0 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 0,0 ressources extérieures en milliards de Fcfa 2007 recettes propres en milliards de Fcfa 2007 recettes propres par habitant, en milliers de Fcfa 2007 (échelle de droite) Source : Ministère des Finances, Ministère de l’Économie, et calcul des auteurs. 1 Le contexte démographique et macroéconomique Par ailleurs, la part des recettes propres de l’État dans les ressources totales est assez faible, puisqu’en moyenne, sur la période 1997-2010, les ressources extérieures représentent plus de 40 % des recettes totales : cela montre une grande dépendance de la Guinée-Bissau vis-à-vis de l’aide extérieure. La volatilité des ressources extérieures est, en outre, plus importante que la volatilité des ressources internes. 35 8 Voir tableau détaillé en annexe (Tableau 1A.2). Graphique 1.3 : Évolution des recettes propres en % du PIB, 1997-2010 12% 10% 8% 6% 4% 2% 0% 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 Source : Ministère des Finances, Ministère de l’économie, et calcul des auteurs. Cependant, on note une augmentation des recettes propres au cours des deux dernières années (2009 et 2010) pour atteindre 11 % du PIB en 2010, valeur toutefois toujours en dessous de ce que préconise l’UEMOA (recettes propres entre 14 et 18 % du PIB). GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF II.2.2 Les dépenses publiques Le volume total des dépenses publiques présente une grande volatilité depuis la fin de la guerre9 : après avoir augmenté entre 1998 et 2000, il chute brutalement en 2002, passant de plus de 75 milliards en 2001 à environ 55 milliards de francs CFA en 2002. Il atteint son niveau le plus haut en 2008 (92,5 milliards) avant de diminuer progressivement jusqu’en 2010 (70,5 milliards de francs CFA). Il est important de distinguer parmi les dépenses, les dépenses courantes (ou dépenses de fonctionnement), des dépenses d’investissement (ou dépenses en capital) ou celles correspondant au remboursement de la dette. Concernant les dépenses d’investissement, elles sont financées, depuis 2000, essentiellement sur ressources extérieures et leur évolution erratique ne présente pas de tendance précise. Le service de la dette constitue une part de moins en moins importante : il représentait plus de 35 % des dépenses courantes entre 1997 et 1999, alors qu’il pèse un peu plus de 2 % depuis 2009. 36 9 Voir tableau détaillé en annexe (Tableau 1A.3). Graphique 1.4 : Décomposition des dépenses de l’État, 1997-2010 120,0 100,0 80,0 60,0 40,0 20,0 0,0 1997 1998 1999 2000 2001 dépenses courantes hors service de la dette 2002 2003 2004 2005 service de la dette 2006 2007 2008 2009 2010 dépenses d'investissement Source : Ministère des Finances et Ministère de l’Économie. Après un pic en 2000 et un ralentissement dans les deux années suivantes, les dépenses courantes hors dette (en volume) ont augmenté de 2002 à 2006 passants de 35 à 51 milliards de Francs CFA. Ces dépenses courantes hors dette s’établissent à 49 milliards de francs CFA en 2010. Rapportées à la population du pays, la dépense par habitant est passée de 20 000 francs CFA de 2010 en 1997 à 31 000 francs CFA en 2010. Les dépenses depuis la fin de la guerre dépassent très largement les recettes10. En moyenne entre 2000 et 2007, près du quart des dépenses courantes hors dette ne sont pas couvertes par les recettes propres : en 2007, c’est même plus du tiers des dépenses structurelles de l’État qui dépassent les recettes propres. Toutefois, depuis 2008, on constate une diminution du déficit budgétaire (1 % du PIB en 2010 en comptant l’appui extérieur et 6 % du PIB hors appui extérieur). En 2010, seules 9 % des dépenses courantes hors de l’État ne sont pas couvertes par les recettes propres. 1 Le contexte démographique et macroéconomique II.2.3 L’équilibre budgétaire 37 10 Voir tableau détaillé en annexe (Tableau 1A.4). Graphique 1.5 : Évolution des déficits publics 1997-2010 25% 20% 15% 10% 5% 0% 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 avec appui extérieur 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 hors appui extérieur Source : Ministère des Finances, Ministère de l’Économe, et calcul des auteurs GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF II.3 Dépenses d’éducation Les dépenses publiques courantes d’éducation ont fortement augmenté entre 1997 et 2010 : elles ont en effet plus que doublé en volume, passant de 2,4 milliards à 5,6 milliards de Francs CFA de 2010. Rapportées au nombre de jeunes de 7 à 12 ans (âges de scolarisation à l’enseignement de base), les dépenses d’éducation ont augmenté dans un premier temps entre 1997 et 2002 ; les fluctuations observées par la suite s’expliquent en grande partie par le paiement ou non des arriérés de salaires11. En fin de compte, la dépense d’éducation par enfant d’âge scolaire atteint 22 600 Francs CFA en 2010. 38 11 La valeur particulièrement élevée pour 2005 s’explique essentiellement par le paiement d’un certain nombre d’arriérés de salaires et la revalorisation salariale décidée en 2004 mais payée en 2005. Tableau 1.4 : Dépenses publiques d’éducation exécutées, 1997-2007 part des dépenses d’éducation dépenses publiques d’éducation dépenses courantes dépenses en capital en % du PIB par jeune millions % millions de de 7 à 12 dépenses dépenses de FCFA financement FCFA 2010 ans (FCFA courantes en capital 2010 extérieur 2010) 1997 2 403 11 731 1998 1 939 9 169 1999 3 040 14 017 2002 3 746 16 428 2003 2 944 2004 3 702 2005 3 366 courantes total dans les dépenses courantes hors dette dans les dépenses totales 5% 100 % 1% 1% 10 % 0 - 1% 0% 10 % 5% 5 750 90 % 1% 2% 12 % 15 % 2 702 100 % 1% 1% 12 % 12 % 12 770 2 139 100 % 1% 1% 9% 8% 15 919 3 431 100 % 1% 1% 9% 8% 5 676 24 136 1 494 76 % 2% 0% 13 % 9% 2006 4 753 19 988 388 99 % 1% 0% 9% 6% 2007 5 590 23 253 517 97 % 1% 0% 12 % 7% 2008 5 030 20 699 863 100 % 1% 0% 11 % 6% 2009 4 777 19 436 1 213 100 % 1% 0% 11 % 7% 2010 5 615 22 600 1 033 100 % 1% 0% 11 % 9% 2000 2001 Sources : Ministère des Finances, Ministère de l’Économie, et calcul des auteurs Graphique 1.6 : Évolution de la dépense publique courante d’éducation par jeune de 7 à 12 ans, 1997 – 2010 Le contexte démographique et macroéconomique 25 000 20 000 Fcfa de 2010 1 15 000 10 000 5 000 0 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 39 Source : Ministère des Finances et données démographiques des Nations unies. Les dépenses courantes d’éducation représentent 11 % du total des dépenses courantes hors dette du gouvernement, sur les trois dernières années (2008 à 2010). Les arbitrages intersectoriels ne sont donc pas favorables à l’éducation qui ne perçoit qu’une faible part des dépenses courantes hors dette de l’État. La Guinée-Bissau est sur ce plan très en retard par rapport à d’autres pays africains. Le graphique 1.7 présente les dépenses d’éducation en pourcentage des dépenses hors dette pour 14 pays africains que l’on peut comparer à la Guinée-Bissau puisqu’il s’agit de pays ayant un PIB par tête en 2009 compris entre 300 et 700 dollars USD (la Guinée-Bissau ayant un PIB/habitant d’environ 500 dollars USD). La Guinée-Bissau est le pays de ce groupe où cette part est la plus faible. On peut souligner également que la RCA qui est, comme la Guinée-Bissau, un pays post-conflit, présente un niveau de dépenses courantes hors dette de l’État pour l’éducation supérieur à 14 %. Enfin, il est à noter que la valeur cible du cadre indicatif Fast Track s’établit à 20 %, soit plus du double de la valeur observée en Guinée-Bissau aujourd’hui. Graphique 1.7 : Dépenses publiques d’éducation en % des dépenses courantes hors dette, comparaisons internationales 35% 30% 25% 20% 15% 10% 5% 40 Source : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). NB : pays avec un PIB/tête compris en 2009 entre 300 et 700 dollars USD. Ghana (2007) Ouganda (2009) Mali (2008) Ethiopie (2007) Niger (2008) Tanzanie (2009) Burkina Faso (2006) Togo (2008) Madagascar (2008) Rwanda (2008) Sierra Leone (2008) Cadre Indicatif Fast-Track Malawi (2007) Gambie (2009) RCA (2008) Guinée-Bisseau (2010) GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 0% Principaux enseignements du chapitre 1 : Le contexte démographique et macro-économique Ce chapitre décrit le contexte démographique et macro-économique auquel le système éducatif bissau-guinéen fait face afin d’évaluer ses capacités à répondre aux besoins compte tenu des ressources mobilisées et susceptibles de l’être. Les analyses ont permis de dégager les observations suivantes : 1. Le système fait face à une forte pression démographique La population du pays est estimée à plus de 1 520 830 habitants en 2009 et croît au rythme d’environ 2,5 % par an. 69 % de la population vit avec moins de deux dollars américains par jour ce qui montre l’extrême pauvreté dans laquelle est plongée le pays. La majorité de la population vit en zone rurale (60 % en 2009). L’ensemble des jeunes en âge d’être scolarisés (7-17 ans) représente 28 % de la population et ceux en âge d’aller à l’enseignement de base (7-12 ans) représentent 16 % de la population. 2. La performance économique reste très faible au regard de la forte pression sociale liée à la pression démographique 3. Le volume des dépenses publiques d’éducation a plus que doublé entre 1997 et 2010 mais la part des dépenses courantes allouées à l’éducation reste encore beaucoup trop faible au regard des valeurs observées dans les autres pays et au regard du cadre indicatif de l’initiative Fast Track Le volume des dépenses pour l’éducation a augmenté et peut-être apprécié sous divers angles. La dépense totale par jeune de 7 à 12 ans est passée en francs CFA de 2010, d’environ 11 700 francs CFA en 1997 à environ 22 600 francs CFA soit un quasi doublement des dépenses par jeune de 7 à 12 ans. Toutefois, la part des dépenses courantes allouées à l’éducation reste faible puisque celle-ci se situe à 11 % depuis 2007 alors qu’elle était déjà de 10 % en 1997, bien loin du cadre indicatif de l’initiative Fast Track qui recommande 20 %. 1 Le contexte démographique et macroéconomique Même si le PIB a légèrement progressé en valeur nominale (4,4 % en moyenne par an entre 1997 et 2010), en termes réels, il a diminué jusqu’en 2004 avant de retrouver son niveau de 1997 en 2005, jusqu’à atteindre 418 milliards de francs CFA en 2010, soit un taux d’accroissement annuel moyen réel de 1,2 % entre 1997 et 2010. La croissance démographique étant tellement forte, cela s’est traduit par un appauvrissement de la population puisque le PIB/habitant en francs constants de 2010 est passé de 317 000 francs CFA en 1997 à 269 000 francs CFA en 2010. Depuis 2003, la croissance réelle est régulièrement positive (3,3 % en moyenne) ce qui permet de dépasser légèrement la croissance de la population et ce qui se traduit par légère augmentation du PIB/habitant. Concernant les finances publiques, l’État bissau-guinéen présentait un déficit budgétaire relativement important puisque celui-ci se situait entre 11 et 17 % du PIB hors aide extérieure entre 2003 et 2009 et entre 4 et 9 % du PIB avec l’aide extérieure. En 2010, ce déficit a diminué et représente 6 % du PIB hors aide extérieur et seulement 1 % du PIB avec l’aide extérieur. 41 Annexes du chapitre 1 Annexe 1.1 : Note sur les données démographiques La description du contexte démographique, dans le cadre du chapitre 1 du diagnostic sectoriel en éducation, décrit l’évolution passée de la population tout en mettant en évidence ses traits caractéristiques majeurs. Par ailleurs, il est également important de connaître les tendances futures de la population, notamment celles de la population scolarisable, en vue de planifier les besoins réels pour le système éducatif comme cela est fait à travers la note de cadrage sur les arbitrages de politiques éducatives entre 2012 et 2020 (annexe du présent rapport). Le dernier recensement général de la population et de l’habitat (RGPH) en Guinée-Bissau date de 2009. Ce recensement a montré que la population totale était en 2009 de 1 520 830 et que celle-ci s’est accrue de 2,45 % en moyenne, par an, entre 1991 (RGPH de 1991) et 2009. L’INEC, à ce jour, a produit une décomposition de ces données démographiques par tranche d’âge entre 1991 et 2009. Toutefois, dans un soucis de connaître la situation la plus proche de la réalité du secteur de l’éducation entre 2000 et 2009, la présente note vise à estimer les données de population par âge entre 1991 et 2009 afin de pouvoir connaître le niveau des indicateurs de scolarisation durant cette période. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Par ailleurs, dans un souci de chiffrer les besoins futurs du secteur de l’éducation selon les arbitrages de politique éducative du gouvernement, il est également important de connaître les projections de la population à horizon 2020. La présente note vise également à estimer les populations futures par âge entre 2009 et 2020. 1. Estimation des données démographiques par âge et par sexe entre 1991 et 2009 Le tableau 1A qui suit présente la population par tranche d’âge et par sexe en 1991 et en 2009 selon les deux recensements de la population réalisés à ces deux périodes. À partir des données par sexe et par tranches d’âge quinquennales pour les années 1991 et 2009, il s’est agi, dans un premier temps, de décomposer ces tranches d’âges en âge spécifique pour les deux années de référence (1991 et 2009). Il existe plusieurs méthodes pour décomposer des tranches d’âges quinquennales en âge spécifique. L’une d’entre elle n’est autre que le multiplicateur de Sprague12. Les graphiques 1A, 2A, 3A et 4A présentent la décomposition par âge obtenue pour 1991 et 2009 par sexe en utilisant la méthode du multiplicateur de Sprague. 42 12 Cette méthode s’appuie sur la constatation d’une relation statistique entre l’effectif d’un âge donné et les effectifs de groupes quinquennaux voisins. Ainsi, par exemple, l’effectif obtenu par désagrégation des enfants d’âge de 4 ans du groupe d’âge (0-4 ans) s’obtiendra en pondérant par des coefficients (multiplicateurs de Sprague) les effectifs des enfants des groupes d’âge de (0-4ans), mais aussi de (5-9ans), (10-14 ans) et (15-19 ans). Tableau 1A : Population par tranche d’âge en 1991 et en 2009 2009 Accroissement annuel moyen Femmes Hommes Ensemble Femmes Hommes Ensemble Femmes Hommes Ensemble 0-4 ans 82 449 83 811 166 260 119 624 120 693 240 317 2,09 % 2,05 % 2,07 % 5-9 ans 84 181 86 519 170 700 108 463 109 820 218 284 1,42 % 1,33 % 1,38 % 10-15 ans 57 914 61 972 119 886 93 180 94 257 187 436 2,68 % 2,36 % 2,51 % 15-19 ans 48 424 44 649 93 073 91 592 87 991 179 583 3,60 % 3,84 % 3,72 % 20-24 ans 39 618 30 967 70 585 80 544 72 015 152 559 4,02 % 4,80 % 4,37 % 25-29 ans 41 426 30 912 72 338 72 051 61 361 133 412 3,12 % 3,88 % 3,46 % 30-34 ans 32 645 24 047 56 692 47 232 41 696 88 928 2,07 % 3,10 % 2,53 % 35-39 ans 25 880 21 392 47 272 41 571 35 795 77 366 2,67 % 2,90 % 2,77 % 40-44 ans 20 272 16 798 37 070 29 095 25 866 54 961 2,03 % 2,43 % 2,21 % 45-49 ans 15 538 14 819 30 357 26 726 23 773 50 499 3,06 % 2,66 % 2,87 % 50-54 ans 14 670 11 731 26 401 18 885 16 462 35 347 1,41 % 1,90 % 1,63 % 55-59 ans 8 299 8 129 16 428 13 950 13 754 27 707 2,93 % 2,96 % 2,95 % 60-64 ans 12 135 10 853 22 988 12 241 10 478 22 720 0,05 % -0,20 % -0,07 % 65-69 ans 6 590 7 630 14 220 8 901 7 711 16 612 1,68 % 0,06 % 0,87 % 70-74 ans 6 303 6 690 12 993 6 316 5 249 11 565 0,01 % -1,34 % -0,64 % 75-79 ans 3 091 3 968 7 059 4 665 3 679 8 344 2,31 % -0,42 % 0,93 % 80-84 ans 3 453 3 543 6 996 3 291 2 210 5 501 -0,27 % -2,59 % -1,33 % 85-89 ans 1 479 1 838 3 317 1 836 1 411 3 248 1,21 % -1,46 % -0,12 % 90-94 ans 1 092 1 173 2 265 869 661 1 530 -1,26 % -3,14 % -2,16 % 95-99 ans 390 476 866 691 562 1 253 3,23 % 0,93 % 2,07 % 100 ans et + 794 643 1 437 1 559 2 104 3 661 3,82 % 6,81 % 5,33 % 506 643 472 560 979 203 783 282 2,45 % 2,50 % 2,48 % Total 737 548 1 520 830 Source : RGPH 1991 et 2009. On se rend compte à travers ces quatre graphiques que la décomposition par âge présente quelques incohérences qui sont certainement dues à une mauvaise déclaration des âges à la base (dans les données initiales). Un exemple flagrant est le nombre d’enfants de sexe féminin comme de sexe masculin de moins de 1 an en 1991 qui est nettement inférieur au nombre d’enfants de un an, de deux ans… Les données telles qu’elles sont estimées à travers ces quatre graphiques ne permettent pas de faire des projections entre 1991 et 2009 par âge et par sexe de façon fiable. Il est donc impératif d’utiliser des techniques de lissage de ces données par âge, à la fois pour 1991 et 2009, afin de corriger les sous ou sur déclarations d’âge. 1 Le contexte démographique et macroéconomique 1991 43 Graphiques 1A, 2A, 3A et 4A : Estimation de la population par âge à partir du multiplicateur de Sprague, années 1991 et 2009 25 000 25 000 FEMMES 1991 20 000 FEMMES 2009 20 000 15 000 15 000 10 000 10 000 5 000 5 000 0 0 20 0 40 25 000 60 80 40 25 000 FEMMES 1991 20 000 20 0 15 000 10 000 10 000 5 000 5 000 0 80 FEMMES 2009 20 000 15 000 60 0 20 0 40 60 80 20 0 40 60 80 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : calcul des auteurs à partir des données des RGPH 1991 et 2009. On se rend compte à travers ces graphiques, que les fluctuations par âge sont surtout concentrées au cours de premières années. Étant donné que nous cherchons ici à estimer au mieux la population scolarisable par âge entre 1991 et 2009, le lissage des données démographiques par âge et par sexe en 1991 et en 2009 a été réalisé uniquement sur la tranche d’âge des 0 à 24 ans comme le montre les graphiques 5A et 6A. Graphiques 5A et 6A : lissage des données de population de 1991 par âge et par sexe FEMMES 1991 20 000 18 000 y=19904e-0,03x 16 000 R2= 0,867 14 000 18 000 12 000 10 000 8 000 8 000 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 R2= 0,885 14 000 10 000 6 000 y=22529e-0,05x 16 000 12 000 0 HOMMES 1991 20 000 6 000 0 2 4 6 8 âges 44 Source : calcul des auteurs à partir des données des RGPH 1991 et 2009. 10 12 14 16 18 20 22 24 âges Graphiques 7A et 8A : lissage des données de population de 2009 par âge et par sexe FEMMES 2009 24 000 22 000 22 000 20 000 20 000 18 000 18 000 16 000 y= -0,117x3 + 11,03x2 - 595,1x + 25529 14 000 R = 0,957 2 12 000 HOMMES 2009 24 000 16 000 y= -0,096x3 + 2,329x2 - 477,9x + 25529 14 000 R2= 0,981 12 000 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 âges 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 âges Source : calcul des auteurs à partir des données des RGPH 1991 et 2009. La courbe en marron sur chaque graphique, que ce soit pour 1991 ou 2009, correspond à la nouvelle distribution par âge de la population pour les deux années pour les individus de sexe féminin et de sexe masculin. De ce fait, nous disposons désormais de données par âge et par sexe lissées pour 1991 et pour 2009. Il s’agit maintenant d’estimer les données par âge pour chacune des années séparant ces deux années. Le contexte démographique et macroéconomique 1 45 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Tableau 2A : Population par âge (0-24 ans) entre 1991 et 2009 46 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 0 an 40 645 41 108 41 576 42 050 42 530 43 016 43 509 44 007 44 511 1 an 38 824 40 290 40 701 41 169 41 643 42 121 42 605 43 095 43 590 2 ans 37 086 38 534 39 939 40 299 40 767 41 239 41 716 42 198 42 685 3 ans 35 427 36 856 38 247 39 591 39 902 40 369 40 840 41 316 41 795 4 ans 33 844 35 251 36 627 37 963 39 247 39 509 39 976 40 446 40 919 5 ans 32 333 33 715 35 075 36 401 37 682 38 907 39 121 39 587 40 055 6 ans 30 891 32 247 33 588 34 901 36 176 37 403 38 570 38 737 39 202 7 ans 29 515 30 843 32 162 33 461 34 728 35 954 37 126 38 236 38 358 8 ans 28 201 29 500 30 796 32 077 33 335 34 557 35 733 36 853 37 906 9 ans 26 946 28 221 29 486 30 749 31 993 33 210 34 386 35 514 36 581 10 ans 25 749 27 017 28 242 29 472 30 702 31 910 33 086 34 218 35 297 11 ans 24 605 25 836 27 089 28 264 29 459 30 657 31 828 32 962 34 050 12 ans 23 514 24 656 25 923 27 162 28 286 29 446 30 611 31 746 32 840 13 ans 22 472 23 495 24 708 26 012 27 235 28 309 29 434 30 567 31 665 14 ans 21 477 22 382 23 476 24 760 26 101 27 309 28 332 29 423 30 523 15 ans 20 527 21 303 22 293 23 457 24 812 26 191 27 384 28 356 29 412 16 ans 19 619 20 302 21 130 22 205 23 439 24 865 26 282 27 459 28 381 17 ans 18 753 19 412 20 080 20 959 22 117 23 421 24 918 26 374 27 536 18 ans 17 926 18 604 19 206 19 860 20 789 22 029 23 403 24 972 26 466 19 ans 17 136 17 825 18 456 19 003 19 643 20 621 21 942 23 385 25 026 20 ans 16 381 17 087 17 725 18 309 18 802 19 428 20 454 21 855 23 368 21 ans 15 660 16 359 17 038 17 625 18 163 18 603 19 215 20 288 21 769 22 ans 14 972 15 625 16 337 16 989 17 526 18 019 18 406 19 005 20 124 23 ans 14 314 14 898 15 590 16 315 16 941 17 428 17 875 18 211 18 797 24 ans 13 686 14 207 14 824 15 554 16 293 16 892 17 330 17 733 18 018 Source : calcul des auteurs à partir des données des RGPH 1991 et 2009. La seule façon d’estimer la population féminine et masculine par âge et par année entre 1991 et 2009 est de se baser sur ces deux années de référence. En effet, on sait par exemple que les enfants qui sont nés en 1991 ont eu 18 ans en 2009, ceux qui avaient 2 ans en 1991 ont eu 20 ans en 2009. Il a donc été appliqué les taux d’accroissement annuels moyen observés par cohorte d’individus entre 1991 et 2009 pour estimer les individus par âge et par année entre 1991 et 2009. A titre d’exemple, on avait 19 117 enfants de sexe féminin de 0 an en 1991 et 17 364 femmes de 18 ans en 2009. On a donc observé une déperdition annuelle moyenne de cette cohorte entre 1991 et 2009 de 0,56 %. C’est donc la même déperdition annuelle moyenne qui a été appliquée aux enfants de sexe féminin de moins de 1 an de 1991 pour obtenir le nombre de filles 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 45 021 45 538 46 062 46 591 47 128 47 671 48 221 48 777 49 341 49 912 44 091 44 597 45 110 45 629 46 153 46 684 47 222 47 766 48 316 48 875 43 177 43 675 44 178 44 686 45 200 45 720 46 245 46 630 47 092 47 863 42 280 42 769 43 263 43 762 44 266 44 776 45 290 45 811 45 758 46 874 41 397 41 879 42 365 42 855 43 351 43 851 44 355 44 865 45 380 45 908 40 527 41 003 41 482 41 965 42 452 42 943 43 439 43 939 44 444 44 963 39 669 40 139 40 612 41 089 41 569 42 052 42 540 43 031 43 527 44 039 38 821 39 287 39 755 40 226 40 700 41 177 41 657 42 140 42 628 43 132 37 982 38 445 38 909 39 376 39 844 40 315 40 789 41 265 41 745 42 244 37 580 37 611 38 073 38 535 39 000 39 466 39 934 40 405 40 878 41 371 36 313 37 257 37 244 37 705 38 166 38 628 39 092 39 557 40 024 40 513 35 081 36 047 36 937 36 882 37 341 37 800 38 260 38 721 39 184 39 669 33 884 34 868 35 783 36 620 36 523 36 981 37 438 37 896 38 355 38 837 32 719 33 719 34 656 35 522 36 307 36 169 36 625 37 080 37 536 38 017 31 584 32 599 33 556 34 446 35 263 35 997 35 818 36 272 36 726 37 206 30 479 31 505 32 479 33 393 34 238 35 006 35 690 35 471 35 924 36 404 29 401 30 436 31 426 32 361 33 232 34 032 34 752 35 386 35 129 35 610 28 406 29 391 30 394 31 347 32 243 33 072 33 827 34 500 35 085 34 821 27 613 28 431 29 382 30 352 31 270 32 126 32 914 33 624 34 251 34 037 26 559 27 690 28 457 29 373 30 311 31 193 32 011 32 756 33 423 33 258 25 081 26 653 27 769 28 484 29 365 30 270 31 116 31 896 32 600 32 480 23 351 25 136 26 748 27 848 28 511 29 357 30 230 31 041 31 782 31 703 21 684 23 334 25 191 26 843 27 928 28 539 29 350 30 191 30 966 30 927 19 961 21 598 23 317 25 247 26 939 28 009 28 568 29 344 30 152 30 149 18 591 19 800 21 513 23 300 25 304 27 037 28 090 28 597 29 338 29 368 de 1 an en 1991, de 2 ans en 1992, etc. Toutefois, cette technique ne nous permet pas d’avoir le nombre de naissances par année entre 1991 et 2009 (enfants de moins de 1 an). Pour estimer le nombre d’enfants de moins de 1 an par année entre 1991 et 2009, il a été appliqué le taux d’accroissement annuel moyen observé pour les moins de 1 an entre 1991 et 2009. Une fois les données par âge estimée pour chaque année par sexe entre 1991 et 2009, la population totale par âge entre 1991 et 2009 est obtenue en additionnant la population féminine et la population masculine. Le tableau 2 qui suit présente les projections de la population totale (masculine et féminine) par âge (0 à 24 ans) entre 1991 et 2009. 1 Le contexte démographique et macroéconomique 2000 47 2. Projection des données démographiques par âge entre 2009 et 2020 dans un souci de planifier les coûts et les besoins futurs pour le système éducatif Le planificateur en éducation a toujours besoin de connaître le nombre d’individus potentiellement scolarisable dans un futur proche afin de pouvoir estimer le mieux possible les besoins nécessaires à l’atteinte des objectifs émis par la politique éducative du pays. Tableau 3A : Population par âge (0-24 ans) entre 2009 et 2020 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 0 an 49 912 50 489 51 075 51 667 52 267 52 874 53 489 54 112 54 742 55 380 56 027 56 681 1 an 48 875 49 447 50 020 50 600 51 187 51 781 52 384 52 993 53 611 54 236 54 869 55 509 2 ans 47 863 48 419 48 987 49 554 50 129 50 712 51 301 51 898 52 502 53 114 53 734 54 362 3 ans 46 874 47 415 47 967 48 531 49 094 49 664 50 241 50 826 51 417 52 017 52 623 53 238 4 ans 45 908 46 434 46 972 47 520 48 080 48 638 49 203 49 775 50 355 50 941 51 536 52 137 5 ans 44 963 45 475 45 998 46 533 47 078 47 633 48 186 48 747 49 314 49 889 50 470 51 059 6 ans 44 039 44 537 45 047 45 567 46 099 46 640 47 191 47 739 48 295 48 857 49 427 50 004 7 ans 43 132 43 618 44 115 44 623 45 141 45 669 46 206 46 753 47 297 47 848 48 405 48 970 8 ans 42 244 42 717 43 202 43 698 44 203 44 719 45 243 45 777 46 320 46 859 47 405 47 958 9 ans 41 371 41 791 42 307 42 791 43 285 43 788 44 301 44 822 45 352 45 890 46 425 46 966 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 10 ans 40 513 40 977 41 344 41 901 42 384 42 876 43 377 43 887 44 405 44 932 45 465 45 996 11 ans 39 669 40 175 40 588 40 902 41 500 41 981 42 472 42 971 43 478 43 993 44 515 45 045 12 ans 38 837 39 384 39 841 40 204 40 467 41 103 41 583 42 072 42 569 43 073 43 584 44 103 13 ans 38 017 38 601 39 101 39 510 39 824 40 036 40 711 41 190 41 677 42 171 42 672 43 180 14 ans 37 206 37 825 38 366 38 821 39 183 39 448 39 611 40 323 40 800 41 285 41 777 42 275 15 ans 36 404 37 056 37 636 38 134 38 544 38 860 39 077 39 191 39 939 40 415 40 898 41 388 16 ans 35 610 36 307 36 908 37 448 37 904 38 270 38 539 38 709 38 776 39 559 40 034 40 515 17 ans 34 821 35 601 36 210 36 761 37 262 37 676 37 998 38 223 38 346 38 367 39 184 39 658 18 ans 34 037 34 806 35 594 36 115 36 616 37 077 37 450 37 729 37 909 37 988 37 963 38 813 19 ans 33 258 33 923 34 791 35 588 36 022 36 472 36 895 37 227 37 463 37 599 37 633 37 563 20 ans 32 480 33 009 33 809 34 778 35 582 35 929 36 330 36 714 37 006 37 199 37 292 37 282 21 ans 31 703 32 128 32 762 33 697 34 765 35 577 35 837 36 189 36 535 36 787 36 939 36 989 22 ans 30 927 31 206 31 779 32 518 33 585 34 752 35 573 35 747 36 050 36 358 36 569 36 680 23 ans 30 149 30 386 30 716 31 435 32 276 33 474 34 741 35 571 35 658 35 912 36 182 36 354 24 ans 29 368 29 709 29 854 30 234 31 095 32 036 33 364 34 730 35 568 35 570 35 775 36 009 Source : calcul des auteurs à partir des données des RGPH 1991 et 2009. 48 Afin d’estimer la population scolarisable par année entre 2009 et 2020, nous nous sommes basés sur ce qu’il s’est produit entre 1999 et 2009. En effet, on sait que les enfants qui sont nés en 2009 auront 6 ans en 2015 et 11 ans en 2020. On sait aussi que les enfants qui ont 5 ans en 2009, auront 6 ans en 2010, 11 ans en 2015, etc. Il a donc été appliqué les taux d’accroissement annuels moyen observés par cohorte d’individus entre 1999 et 2009 pour estimer les individus par âge et par année entre 2009 et 2020. À titre d’exemple, on avait 21 600 filles de moins de 1 an en 1999 (selon les estimations produites dans la 1ère partie de cette note) et 20 163 filles de 10 ans en 2009. On a donc observé une déperdition annuelle moyenne de cette cohorte d’enfants entre 1999 et 2009 de 0,69 %. En conséquence, c’est la même déperdition annuelle moyenne qui a été appliquée aux filles de moins de 1 an de 2009 pour obtenir le nombre de filles de 1 an en 2010, de 2 ans en 2011… de 11 ans en 2020. Toutefois, cette technique ne nous permet pas d’avoir le nombre de naissances par année (enfants de moins de 1 an). Pour estimer le nombre d’enfants filles et garçons de moins de 1 an par année entre 2009 et 2020, il a été appliqué le taux d’accroissement annuel moyen observé pour les moins de 1 an chez les filles et chez les garçons entre 1991 et 2009. Bien entendu, afin d’avoir le total des individus par âge et par année entre 2009 et 2020 sans distinction de sexe, il suffit d’additionner les estimations du nombre de filles par âge et par année à celles des garçons. Le tableau 3A qui suit présente les projections de la population par âge (0 à 24 ans) entre 2009 et 2020. Le contexte démographique et macroéconomique 1 49 Annexe 1.2 : Tableaux détaillées Tableau 1A.1 : Évolution du PIB, 1997-2010 Produit Intérieur Brut (millions FCFA) GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Prix courants 50 Prix constants (FCFA 2010) PIB par habitant (FCFA) Croissance réelle Prix courants Prix constants (FCFA 2010) Croissance réelle 1997 240 693 359 476 212 254 317 002 1998 215 496 287 012 -20,2 % 185 442 246 985 -22,1 % 1999 248 997 333 881 16,3 % 209 094 280 375 13,5 % 2000 257 635 333 325 -0,2 % 211 120 273 145 -2,6 % 2001 281 685 339 885 2,0 % 225 250 271 790 -0,5 % 2002 283 444 335 303 -1,3 % 221 180 261 648 -3,7 % 2003 270 499 336 613 0,4 % 205 979 256 323 -2,0 % 2004 276 109 346 182 2,8 % 205 170 257 240 0,4 % 2005 302 162 361 069 4,3 % 219 104 261 819 1,8 % 2006 302 501 368 782 2,1 % 214 050 260 951 -0,3 % 2007 331 040 380 591 3,2 % 228 584 262 799 0,7 % 2008 377 451 392 852 3,2 % 254 333 264 711 0,7 % 2009 395 084 404 638 3,0 % 259 782 266 064 0,5 % 2010 418 800 418 800 3,5 % 268 722 268 722 1,0 % Source : INEC. Tableau 1A.2 : Les recettes de l’État en francs CFA constants de 2010, 1997-2007 Recettes totales Recettes propres Milliards de FCFA 2010 % PIB Par habitant Milliards de % recettes (milliers de FCFA 2010 totales FCFA 2010) 1997 62,0 17 % 32,1 52 % 1998 12,8 4% 7,6 60 % Recettes extérieures % PIB Milliards de FCFA 2010 % recettes totales 28,3 9% 29,9 48 % 6,6 3% 5,2 40 % 1999 38,6 12 % 30,6 79 % 25,7 9% 8,0 21 % 2000 74,5 22 % 36,8 49 % 30,1 11 % 37,7 51 % 2001 58,5 17 % 31,3 53 % 25,0 9% 27,2 47 % 2002 37,9 11 % 25,7 68 % 20,1 8% 12,2 32 % 2003 43,7 13 % 25,9 59 % 19,8 8% 17,8 41 % 2004 61,5 18 % 30,8 50 % 22,9 9% 30,8 50 % 2005 57,6 16 % 33,4 58 % 24,2 9% 24,2 42 % 2006 61,7 17 % 38,3 62 % 27,1 10 % 23,3 38 % 2007 62,4 16 % 30,8 49 % 21,3 8% 31,6 51 % 2008 56,5 14 % 34,5 61 % 23,3 9% 22,0 39 % 2009 70,3 17 % 36,2 52 % 23,8 9% 34,1 48 % 2010 66,8 16 % 44,6 67 % 28,6 11 % 22,1 33 % Source : Ministère des Finances, Ministère de l’Économie, et calcul des auteurs. Le contexte démographique et macroéconomique 1 51 Tableau 1A.3 : Les dépenses de l’État en francs CFA constants de 2010, 1997-2010 Dépenses courantes Total Milliards Milliards de FCFA de FCFA 2010 2010 1997 1998 1999 2000 2001 2002 35,8 30,5 38,1 67,1 49,6 39,9 Service de la dette Hors dette 23,0 19,4 26,3 55,7 34,9 31,8 Dépenses d’investissement Par habitant (milliers de FCFA 2010) % PIB % des dépenses courantes Milliards de FCFA 2010 20,3 16,7 22,1 45,7 27,9 24,8 6% 7% 8% 17 % 10 % 9% 36 % 36 % 31 % 17 % 30 % 20 % 72,4 9,9 20,0 21,1 26,1 15,0 financées par % PIB les ressources ext. (%) 20 % 3% 6% 6% 8% 4% 53 % 53 % 44 % 79 % 89 % 95 % 2003 42,6 33,8 25,8 10 % 21 % 22,3 7% 97 % 2004 2005 2006 2007 2008 52,7 52,6 56,3 53,9 47,0 41,8 44,6 50,7 48,1 44,9 31,1 32,3 35,9 33,2 30,3 12 % 12 % 14 % 13 % 11 % 21 % 15 % 10 % 11 % 4% 35,5 27,5 24,0 27,6 45,5 10 % 8% 6% 7% 12 % 93 % 93 % 90 % 91 % 96 % 2009 44,9 43,9 28,9 11 % 2,3 % 41,4 10 % 94 % 2010 50,1 49,0 31,4 12 % 2,2 % 20,4 5% 98 % GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : Ministère des Finances, Ministère de l’Économie, et calcul des auteurs. 52 Tableau 1A.4 : Déficits, 1997-2007 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 déficit en % du PIB % dépenses courantes hors dette non couvertes par les recettes propres avec appui extérieur hors appui -40 % 61 % -16 % 34 % 10 % 19 % 23 % 26 % 25 % 24 % 36 % 23 % 17 % 9% 13 % 10 % 6% 4% 5% 5% 6% 8% 6% 5% 5% 9% 4% 1% 21 % 11 % 8% 15 % 13 % 9% 12 % 17 % 13 % 11 % 13 % 15 % 12 % 6% Source : Ministère des Finances, Ministère de l’Économie, et calcul des auteurs. Les scolarisations – Chapitre 2 : quantité, flux, qualité Le développement du secteur de l’éducation dans son ensemble doit être stratégiquement pensé pour répondre aux besoins de développement du pays, tout en respectant la contrainte des ressources disponibles. L’ampleur des défis ainsi que les possibilités d’action varient selon les contextes nationaux. Afin de déterminer quelle marge de manœuvre possède la Guinée-Bissau sur des variables de nature structurelle, financière, humaine et pédagogique, mais aussi de mesurer le chemin qui reste à parcourir pour atteindre les objectifs que le pays s’est fixé et de juger de la faisabilité de certains défis au vu des évolutions passées, une analyse globale des scolarisations est nécessaire. Ce chapitre est structuré en quatre parties. Dans un premier temps, il décrit le système éducatif de GuinéeBissau. Dans un second temps, une analyse quantitative des scolarisations est réalisée : elle concerne notamment l’évolution des effectifs scolarisés et de la couverture scolaire, la présentation des profils de scolarisations, l’espérance de vie scolaire et l’examen des facteurs d’offre et de demande scolaire. Dans un troisième temps, les flux d’élèves dans le système, et plus particulièrement l’efficacité interne du système éducatif bissau-guinéen, sont traités. Enfin, la dernière partie est consacrée à la qualité du système éducatif en observant la situation du pays en termes d’alphabétisation La constitution de Guinée-Bissau stipule dans son article 45 que l’État est responsable de la conduite de la politique éducative et de la formation des hommes ; celle-ci est assurée par le ministère de l’Éducation, des Sciences, de la Culture, de la Jeunesse, et des Sports en collaboration avec les autres institutions, notamment les entités religieuses, les initiatives privées et communautaires. La Constitution garantit que l’éducation est un droit fondamental pour tous les enfants et stipule que l’enseignement basique de 6 ans est obligatoire et gratuit pour tous sur le territoire national. Le système éducatif est structuré en deux sous-secteurs : l’éducation formelle et l’éducation non formelle. I.1 L’éducation formelle L’éducation formelle comporte plusieurs niveaux et différents types d’établissements d’enseignement : yy L’enseignement préscolaire était destiné aux enfants de 3 à 6 ans jusqu’en 2009/10. Depuis la réforme de 2010, il est dispensé aux enfants de 3 à 5 ans. Il est dispensé dans les jardins d’enfants ou les crèches qui sont en majorité des initiatives communautaires, privées ou relevant d’entités religieuses. yy L’enseignement basique était théoriquement destiné aux enfants de 7 à 12 ans jusqu’à l’année scolaire 2009/2010. Il durait six ans, ce qui correspond aux classes de 1ère à 6ème année. Il était à l’origine divisé en deux sous-cycles, l’enseignement de base élémentaire (EBE) et l’enseignement de base complémentaire (EBC) et bien qu’une réforme visant l’unification des deux cycles ait eu lieu 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité I. Description du système éducatif de Guinée-Bissau 53 en 2001, de nombreux établissements n’offrent que le premier cycle et est dispensé dans les écoles d’enseignement basique. Suite à la nouvelle réforme de 2010, l’enseignement basique est destiné aux enfants de 6 à 14 ans à compter de l’année scolaire 2010/2011. Il dure neuf ans ce qui correspond aux classes de 1ère à 9ème année. Il est décomposé en trois sous-cycles : le 1er cycle de la 1ère à la 4ème année, le 2nd cycle de la 5ème à la 6ème année, et le 3ème cycle de la 7ème à la 9ème année. Le troisième cycle de l’enseignement de base (7ème à 9ème année) est dispensé à ce jour dans les lycées (ex-enseignement secondaire général) mais sera progressivement transféré dans les écoles d’enseignement basique. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF yy L’enseignement secondaire était destiné aux jeunes de 13 à 17 ans avant la réforme de 2010 et durait cinq ans. Il était divisé, en deux sous-cycles : l’enseignement secondaire général (ESG), correspondant aux trois premières années, suivies de deux années d’enseignement secondaire complémentaire (ESC). Depuis la réforme de 2010 et l’année scolaire 2010/2011, l’enseignement secondaire est destiné aux jeunes de 15 à 16 ans pour une durée de deux années : 10ème et 11ème années. L’enseignement secondaire est dispensé dans les lycées. 54 yy Le secteur de l’enseignement et de la formation technique et professionnel prend deux formes en Guinée-Bissau : la formation professionnelle d’insertion et l’enseignement technique et professionnel. La formation professionnelle d’insertion est ouverte aux élèves qui ont achevé l’enseignement de base jusqu’à la 6ème année. Elle dure entre six mois et un an et a pour but de faciliter l’intégration rapide des apprenants dans le monde du travail. Elle est dispensée dans le CIFAP (Centre Industriel de Formation et d’Apprentissage professionnel), structure semi-privée, le CEFC, qui est un centre de formation communautaire lié à l’agriculture et l’élevage, et le centre vocationnel mis en place par l’ONG danoise ADPP. L’enseignement technique et professionnel est destiné aux jeunes qui ont au moins terminé la 9ème année (fin de l’ESG avant 2010/2011 et fin du troisième cycle de l’enseignement basique après 2009/2010) ; d’une durée de trois ans, il confère un grade académique. Il n’existe qu’un établissement qui dispense ce type d’enseignement : le CENFI (centre de formation industrielle), qui est un établissement public. Le CENFA (ENA depuis 2010/2011) dispense également des formations professionnelles courtes en comptabilité et administration. yy L’enseignement supérieur est de deux types : un enseignement universitaire qui conduit à un diplôme académique et un enseignement non universitaire qui délivre un diplôme professionnel. Concernant l’enseignement universitaire, il existe depuis le début des années 1990 deux facultés, la faculté de droit et la faculté de médecine. En 2004 sont apparues deux universités, l’université Amilcar Cabral, établissement public mais autonome, qui a fonctionné jusqu’en 2008 en partenariat avec l’université lusophone privée de Lisbonne. À partir de 2009, le ministère s’est retiré du partenariat en cédant le site et les locaux à l’université privé lusophone pour une durée de trois années, avec comme objectif de reprendre cette université (et la rendre publique) après cette période. En 2004, l’université privée des Collines de Boé a également vu le jour. L’École normale supérieure qui assure la formation des enseignants du secondaire, l’École de santé qui forme les infirmiers, l’ENEFD pour le sport et la jeunesse et le CENFA (centre de formation administrative) dispensent un enseignement supérieur dit non universitaire. À noter que le CENFA est devenu École nationale d’administration (ENA) à compter de 2010/2011. yy La formation des enseignants se fait à des niveaux différents suivant le niveau d’enseignement auquel se destinent les enseignants. Les instituteurs sont formés dans les deux Écoles normales du pays, à savoir celle du 17 février et celle d’Amilcar Cabral qui sont devenus, en 2010/2011, des Pôles de formation sous la direction de l’École supérieure de l’éducation de Tchico Te (ESETT). Ils entrent sur concours réservés à ceux ayant atteint au moins la 9ème année (fin de l’enseignement secondaire général) et reçoivent une formation de trois ans : les deux premières années sont théoriques, la troisième est consacrée à un stage de pratique pédagogique. Les enseignants du secondaire sont formés traditionnellement à l’ENSTT (École normale supérieure de Tchico Te) devenue en 2010/2011 l’ESETT (École supérieure d’éducation de Tchico Te), sur concours après la 11ème année. Le cursus se déroule depuis 2004/05 en quatre ans : la première année constitue une année de préparation, c’est-à-dire de mise à niveau, et est suivie de deux années de cours théoriques et d’une année de stage pratique. Depuis 2004/05 également, l’Université privée des Collines de Boé dispense une formation pour les enseignants du secondaire qui a reçu l’agrément de l’État et qui est similaire à celle de l’ESETT : la première promotion est donc sortie en 2007/08 et a dû intégrer le corps des enseignants du secondaire à la rentrée 2008/09. yy Concernant l’enseignement spécial et notamment l’enseignement pour les enfants handicapés, une cellule dédiée existe, créée au sein du ministère de l’Éducation, des Sciences, de la Culture, de la Jeunesse et des Sports sous la pression des ONG mais on ne compte en réalité aucun dispositif institutionnel pour la prise en charge des enfants handicapés. I.2 L’éducation non formelle Le sous-secteur de l’éducation non formelle comprend l’alphabétisation, l’éducation des adultes et d’autres types d’éducation. Ce sous-secteur est sous l’orientation du ministère de l’Éducation et fonctionne avec l’intervention de différentes entités (ONG, organisations sociales, communautaires, etc.). Concernant l’éducation des adultes et l’alphabétisation, elles se font dans des centres gérés par les communautés ou des ONG ; il n’existe aucun centre d’alphabétisation géré par l’État. Ce dernier ne verse aucune aide ou subvention ; en revanche, il se charge de la formation des animateurs, de l’élaboration des matériels, ainsi que du suivi de ce sous-secteur par l’intermédiaire des personnels de la Direction Générale de l’Alphabétisation. I.3 Les différents types d’établissements -- les établissements publics sont sous un régime de gestion publique sous la responsabilité de l’État et en autogestion avec l’État et les particuliers, -- les établissements privés (religieux ou laïcs) sont sous gestion privée, -- les établissements communautaires sont sous la responsabilité de la communauté, -- les Madrasas qui suivent le programme officiel de l’éducation de base mais en langue arabe et portugaise ou uniquement en arabe et sous gestion privée. I.4 Organisation du ministère de l’Éducation I.4.1 Au niveau central Au niveau central, le ministère de l’Éducation, des sciences, de la culture, de la jeunesse et des sports est organisé en plusieurs structures de natures différentes : conception, opération et supervision. Au niveau de la conception, il existe le GIPASE13, organe qui s’occupe de l’information, de la planification et de l’évaluation du système éducatif. Au niveau des opérations éducatives, on dénombre trois directions générales (enseignements basique et secondaire, enseignement supérieur, alphabétisation et éducation non formelle), ainsi que la direction des ressources humaines et la direction des affaires administratives 13 Gabinete de Estatística e Planeamento do Sistema Educativo (Cabinet de la statistique et de la planification du système éducatif). 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité On distingue plusieurs types d’établissements : 55 et financières. Enfin la supervision et le contrôle sont sous la responsabilité de l’Inspection Générale de l’Éducation. On compte aussi des instituts autonomes et des structures déconcentrées sous ordre direct du ministre (les présidents de ces instituts sont nommés en Conseil des ministres sur proposition du ministre) : l’institut national pour le développement de l’éducation (recherche pédagogique et innovations éducatives), l’institut pour la formation technique et professionnelle (conduit la politique) et l’institut national des études et recherche scientifique. I.4.2 Au niveau déconcentré Au niveau déconcentré, on compte neuf directions régionales qui correspondent à la division administrative du pays. À celles-ci s’ajoutent deux sous-régions éducatives pour l’Ingore et les îles de Bubaque. II. Analyse quantitative des scolarisations14 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF II.1 Une croissance soutenue des effectifs scolarisés Les effectifs sont en forte hausse depuis 1999/00 à tous les niveaux, avec une augmentation moyenne annuelle comprise entre 7 % et 11 % entre 1999/00 et 2009/10 et entre 2 et 12 % entre 2004/05 et 2009/10. Le niveau qui a connu la plus forte augmentation depuis 1999/00 est l’enseignement secondaire qui était un des niveaux les moins développés et pour lesquels la marge de progression est par conséquent plus importante. Par contre l’enseignement supérieur ayant été créé en 2004/05, c’est ce niveau d’enseignement qui a connu le plus fort accroissement entre 2004/05 et 2009/10 avec une augmentation annuelle moyenne de 12 % par an. Les effectifs au niveau de l’enseignement préscolaire et de l’enseignement de base ont crû respectivement en moyenne au rythme de 8 et 7 % par an entre 1999/00 et 2009/10. Quant aux effectifs de l’enseignement technique et du supérieur, étant donné qu’on ne dispose de données qu’à compter de 2004/05, les effectifs ont cru au rythme de 3 % par an jusqu’en 2009/10. 56 14 Reuge, N. (2004). Mesurer l’avancée vers la scolarisation primaire universelle. Note méthodologique n°1 du Pôle d’analyse sectorielle en éducation. Dakar : UNESCO –BREDA. (Cf. http://www.poledakar.org/IMG/pdf/Note_Methodo1_Indicateurs_2004_FR.pdf). Tableau 2.1 : Évolution des effectifs par ordre d’enseignement de 1999-00 à 2009-10 ANNEE PRESCOLAIRE ENSEIGNEMENT DE BASE SECONDAIRE EBE EBC ENSEMBLE ESG ESC ENSEMBLE 1997-98 480 99 337 19 386 118 723 13 167 2 754 15 921 1998-99 812 53 084 6 629 59 713 2 520 16 2 536 EFTP Supérieur 1999-00 4 159 123 423 27 712 151 135 22 530 5 747 28 277 2000-01 6 032 149 640 32 015 181 655 25 424 7 541 32 965 194 971 37 321 232 292 2004-05 7 503 209 871 42 617 252 488 38 273 12 234 50 507 721a 3 122 2005-06 10 733 220 031 49 256 269 287 41 216 12 983 54 199 977 3 689 2009-10 9044 232950 55788 288738 58967 19059 78026 852 5477 Croissance annuelle 1999/2000 2009/2010 8% 7% 7% 7% 10 % 13 % 11 % nd nd 2001-02 2002-03 2003-04 2006-07 2007-08 2008-09 L’augmentation importante des effectifs au niveau préscolaire peut être attribuée aux initiatives privées et à quelques entités religieuses : la part des enfants du préscolaire inscrite dans ces jardins communautaires était nulle en 1999/00 et est passée à 34 % en 2005/06 avant de diminuer en 2009/10 au profit des écoles privées qui scolarisent 62 % des élèves du préscolaire. La majorité de l’offre à ce niveau provient du privé et seuls 17 % des effectifs sont scolarisés dans des structures publiques en 2009/10. Par contre, l’augmentation au niveau de l’enseignement secondaire est due à la fois à l’élargissement de l’offre publique et à l’augmentation du nombre de lycées privés (la part du privé entre 1999/00 et 2009/10 ne fluctue pas trop, et est comprise entre 10 % et 18 % selon le cycle). Par ailleurs, dans l’enseignement post secondaire, la part des effectifs scolarisés au privé pour l’EFTP a considérablement augmenté comme pour l’enseignement supérieur. La part des effectifs de l’EFTP scolarisés au privé est passée de 36 % en 2005/06 à 53 % en 2009/10 et celle de l’enseignement supérieur est passée de 20 à 45 % pour les mêmes années. À noter que concernant l’enseignement de base, on note une augmentation des effectifs scolarisés dans les madrasas entre 2006 et 2010 mais il faut rester prudent car avant 2010, les effectifs des madrasas étaient très mal recensés. En 2010, 715 instituteurs étaient en cours de formation et 1 541 élèves-enseignants étaient inscrits à l’école normale supérieure. Les effectifs sont en progression par rapport à 2005/06 (respectivement 423 et 935 enseignants en formation). 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité Croissance Notes annuelle * Hors formation des enseignants : 4% 2% 6% 3% 9% 9% 9% 3% 12 % 2004/2005 - a/ données du CENFI non disponibles. 2009/2010 Source : Données GIPASE – ministère de l’Éducation nationale, de la culture, des sciences, de la jeunesse et des sports. 57 Tableau 2.2 : Évolution de la part des divers types d’enseignement de 1999-00 à 2009-10 1999/00 Préscolaire 2005/06 2009/10 Pulic. Privé Comm. Mad. Public Privé Comm. Mad. Public Privé Comm. Mad. 38 % 62 % 49 % 0% 0% 16 % 34 % 0% 17 % 62 % 21 % Enseignement de Base EBE 79 % 16 % 0% 5% 74 % 8% 16 % 1% 66 % 10 % 18 % 5% EBC 89 % 11 % 0% 0% 88 % 11 % 1% 0% 82 % 14 % 3% 1% EBE+EBC 81 % 15 % 0% 4% 77 % 9% 14 % 1% 69 % 11 % 15 % 4% GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Enseignement Secondaire 58 ESG 89 % 11 % 0% 0% 84 % 15 % 0,20 % 0% 81 % 18 % 0% 0% ESC 88 % 12 % 0% 0% 90 % 10 % 0% 0% 85 % 15 % 0% 0% ESG+ESC 89 % 11 % 0% 0% 86 % 14 % 0,20 % 0% 82 % 18 % 0% 0% EFTP 64 % 36 % 0% 0% 47 % 53 % 0% 0% Supérieur 80 % 20 % 0% 0% 55 % 45 % 0% 0% Source : Données GIPASE – ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. II.2 Une évolution importante de la couverture scolaire Les fortes augmentations d’effectifs à tous les niveaux se traduisent par une croissance des indices de couverture. Cette couverture se mesure par les taux bruts de scolarisation du préscolaire au secondaire et par le nombre d’étudiants pour 100 000 habitants dans l’EFTP et dans le supérieur. L’évolution de la couverture est assez variable selon les différents niveaux d’enseignement. Tableau 2.3 : Évolution des taux bruts de scolarisation par ordre d’enseignement de 1999-00 à 2009-10 ANNEE PRESCOLAIRE ENSEIGNEMENT DE BASE ENSEIGNEMENT SECONDAIRE EBE EBC ENSEMBLE ESG ESC EFTP (pour EN100 000 SEMBLE hab) 1Supérieur2 (pour 100 000 hab) 1999/00 3% 83 % 41 % 70 % 25 % 10 % 19 % 2000/01 4% 99 % 46 % 83 % 27 % 13 % 22 % 2004/05 4% 133 % 58 % 109 % 36 % 19 % 29 % 52 226 2005/06 6% 138 % 66 % 115 % 38 % 19 % 31 % 69 262 2009/10 5% 139 % 71 % 117 % 53 % 27 % 43 % 55 351 Source : calcul des auteurs à partir des données GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la culture, des sciences, de la jeunesse et des sports et données démographiques (chapitre 1). Malgré son caractère embryonnaire avec 3 % des enfants scolarisés en 1999/2000, le préscolaire, a connu une évolution très importante puisque le taux brut de scolarisation a doublé entre 1999/2000 et 2005/06 (de 3 % à 6 %). Toutefois, celui-ci stagne voire diminue depuis, puisque ce taux n’est que de 5 % en 2009/10. Par rapport à d’autres pays comparables, la Guinée-Bissau présente des performances notables en termes de TBS dans l’enseignement de base, comme le montre le graphique 2.1. En ce qui concerne l’enseignement secondaire, on observe une évolution encore plus importante que celle de l’enseignement de base : le taux brut passe de 19 % à 43 % entre 1999/00 et 2009/10 sur l’ensemble du cycle. Par contre, il augmente plus rapidement dans l’ESC que dans l’ESG, signe d’un rééquilibrage entre les deux cycles de l’enseignement secondaire. 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité Sur cette même période, l’enseignement de base a également enregistré une évolution très significative, dans l’EBE comme dans l’EBC, avec une croissance d’environ 67 % entre 1999/00 et 2009/10. Le taux brut de scolarisation s’établit à 117 % pour l’enseignement de base, avec 139 % pour l’EBE et 71 % pour l’EBC : le fort déséquilibre entre l’EBE et l’EBC s’est maintenu entre 1999/00 et 2009/10. Par ailleurs, le TBS dans l’enseignement de base élémentaire supérieur à 100 % montre i) que l’EBE accueille un grand nombre d’enfants en dessous et surtout au-dessus de l’âge officiel pour être à ce niveau15 et ii) que l’EBE présente la capacité d’accueillir la totalité des enfants en âge d’être scolarisé à ce niveau. 59 15 La tranche d’âge officielle pour l’enseignement de base élémentaire est 7-10 ans. D’après les données scolaires de 2009/10, la proportion d’élèves (hors madrasas) ayant moins de 7 ans scolarisés dans l’EBE est de 7 % et celle ayant 10 ans et plus est de 46 % soit 53 % des élèves qui ont un âge en dehors de l’âge théorique. Graphique 2.1 : Comparaison internationale du TBS dans l’enseignement de base, année comprise entre 2007 et 2010 160 140 120 100 80 60 40 Sierra Léone (2007) Rwanda (2008) Madagascar (2008) Mozambique (2008) Guinée-Bissau (2010) Ouganda (2008) Togo (2009 Tanzanie (2000) Ghana (2008) Guinée (2008) Gambie (2010) Ethiopie (2008) RCA (2009) Mali (2009) Tchad (2007) Niger (2009) Burkina Faso (2009) 0 Erythrée (2008) 20 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). 60 Des mesures aussi synthétiques que celles abordées jusqu’à présent ne permettent pas de rendre compte du parcours scolaire des individus. Or, cette description est essentielle sur l’ensemble des cycles d’enseignement abordés, en particulier pour l’enseignement de base. La Guinée-Bissau ayant souscris aux objectifs de Dakar ainsi qu’aux objectifs du millénaire, cela implique que chaque enfant doit pouvoir achever un enseignement de base de qualité. Il s’agit donc d’entrer dans une description plus spécifique afin d’appréhender la couverture éducative effective du système. II.3 Le parcours scolaire : analyse des profils de scolarisation et de rétention16 II.3.1 Évolution du profil de scolarisation transversal entre 1999/00 et 2009/10 Le profil de scolarisation transversal permet de visualiser les taux d’accès (rapport des non redoublants à chaque niveau à la population d’âge de référence) à chaque niveau pour une année scolaire donnée et donc d’avoir un aperçu plus fin de la scolarisation. En 2009/10, l’accès en 1ère année est estimé à 164 % : ce chiffre très élevé ne signifie pas forcément que tous les enfants de Guinée-Bissau entrent à l’école mais plutôt qu’il y a de nombreux enfants scolarisés en 1ère année et qui sont plus jeunes ou plus âgés que l’âge normal, c’est-à-dire qu’on observe un phénomène multi16 Reuge, N. (2004). Les profils de scolarisation. Note méthodologique n°2 du Pôle d’analyse sectorielle en éducation. Dakar : UNESCO -BREDA (Cf. http://www.poledakar.org/IMG/pdf/Note_Methodo2_Profils %20de %20scolarisation_2004_FR.pdf ) cohortes. Les familles peuvent avoir tendance à scolariser leurs enfants plus tôt, dès l’âge de 5 ans, pour bénéficier des cantines scolaires. Par ailleurs, nombreux sont les enfants qui entrent à l’école tardivement, au-delà de l’âge de 7 ans. En effet, si on se réfère aux données scolaires et aux âges déclarés des élèves par années d’études, tout en restant prudent sur les déclarations, sachant qu’il existe des changements d’âge au registre d’état civil dans nombre de pays africains, on estime qu’en première année de l’enseignement de base en 2009/10, 54 % des élèves nouveaux entrants (hors madrasas) étaient âgés de 8 ans et plus, ce qui conclut à un phénomène de rattrapage. Cet effet de rattrapage, qui gonfle artificiellement le taux d’accès en 1ère année de l’enseignement de base, est corroboré par une analyse que nous avons menée sur la base de données du MICS 2006. Celle-ci montre que seuls 76 % des enfants ont accès à l’école en 2006 alors que le taux brut d’admission calculé à partir des données administratives affiche une valeur de 140 % pour la même année. Graphique 2.2 : Profils de scolarisation transversaux, 1999/00 et 2009/10 180% 164% 160% 140% 118% 120% 96% 100% 67% 62% 55% 60% 44% 60% 40% 52% 43% 20% 26% 2a 3a 4a 28% 36% 0% 1a 35% 5a 6a Profil transversal (2009/10) 23% 16% 13% 7a 8a 9a 22% 5% 10% 10a 11a Profil transversal (1999/00) Source : calcul des auteurs à partir des bases de données GIPASE– Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports et données démographique (chapitre 1). Le taux d’achèvement, qui mesure l’avancée vers l’enseignement de base universel, s’établit en 2009/10 à 62 % ; environ six enfants sur dix en 2009/10 terminent un cycle d’enseignement de base de 6 ans. Ce taux est assez faible au regard de l’objectif de scolarisation primaire universel visé par la communauté internationale à l’horizon 2015 et par rapport à la moyenne africaine (environ 70 % en 2009/10). Par ailleurs, en comparaison à d’autres pays à caractéristique, la Guinée-Bissau affiche un niveau d’achèvement relativement inférieur. La Gambie (75 %), la Ghana (88 %) ou la Tanzanie (108 %) présentent des taux d’achèvement supérieurs à 70 %. Le taux d’achèvement est également faible au regard du taux brut d’admission de 164 %, ce qui traduit une rétention assez faible tout au long du cycle de l’enseignement de base. Par ailleurs, en 2009/10, 55 % des enfants accèdent à l’enseignement secondaire général et 22 % achèvent l’enseignement secondaire complémentaire. 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité 80% 93% 98% 61 La comparaison des profils de scolarisation pour 1999/00 et 2009/10 montre une très nette amélioration de la scolarisation : malgré le conflit, le taux d’achèvement de l’enseignement de base a augmenté de 36 points de pourcentage en dix ans. L’augmentation de la fréquentation au secondaire est tout aussi importante : les taux d’accès ont triplé et quadruplé aux deux dernières années du secondaire (ESC). II.3.2 La rétention en cours de cycle : une forte déperdition lors des premières années d’enseignement Étant donné qu’on ne dispose pas de données pour l’année scolaire 2008/09 et que par conséquent il n’a pas été possible de regarder la dynamique de transition entre 2008/09 et 2009/10, on a observé la rétention de façon transversale, c’est-à-dire en rapportant les taux d’accès des années d’études a+1, a+2, a+3, etc., au taux d’accès de l’année a. Graphique 2.3 : Profils de rétention 2009/10 120% 100% 100% 100% 81% 80% 72% 58% 60% 65% 57% GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 40 62 52% 41% 38% 41% 33% 27% 22% 20% 17% 14% 0% 1a 2a 3a 4a 5a EB + ES 6a 7a 8a 9a 10a 11a ES uniquement Source : calcul des auteurs à partir des bases de données GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. On constate que sur 100 enfants qui rentrent à l’enseignement de base, 57 atteignent la 4ème année, 38 la 6ème année : le taux de rétention en 6ème année est donc de 38 %, ce qui est très faible. Une des raisons peut être la séparation en deux cycles de l’enseignement de base puisqu’on constate une déperdition forte entre la 4ème et la 5ème année (taux de transition de 71 % entre la 4ème et la 5ème année), mais ce n’est pas la seule raison puisque c’est également au cours des deux premières années que l’école perd beaucoup d’élèves (taux de transition de 72 % entre la 1ère et la 2nde année). La transition entre l’enseignement de base et l’enseignement secondaire n’est pas particulièrement marquée, et les dynamiques observées dans l’enseignement secondaire soulignent une faible rétention à ce niveau également : pour 100 jeunes bissau-guinéens qui entrent au secondaire, seuls 41 d’entre eux parviendront en dernière année de l’ESC, dans les conditions actuellement observées de transition. Globalement, le système éducatif bissau-guinéen se caractérise par de faibles rétentions en cours de cycle dans l’enseignement de base comme dans l’enseignement secondaire et une quasi absence de régulation des flux entre cycles. II.4 L’espérance de vie scolaire (EVS)17 De même que les démographes calculent une espérance de vie à la naissance, qui est la durée moyenne de la vie d’un individu dans un certain contexte donné, on peut calculer une espérance de vie scolaire. L’espérance de vie scolaire se définit comme le nombre total d’années de scolarité qu’un enfant peut espérer valider compte tenu des conditions actuelles du système éducatif. L’espérance de vie scolaire s’apparente donc à la durée moyenne des scolarisations. En Guinée-Bissau, l’EVS s’établit à 8,1 années, ce qui est assez élevé si on compare ce chiffre aux résultats observés dans des pays comparables. Tableau 2.4 : Comparaisons internationales de l’EVS Espérance de vie scolaire (années) Niger (2009) 4,5 RCA (2009) 4,8 Mali (2009) 6,3 Guinée (2008) 6,8 Éthiopie (2008) 7,4 Madagascar (2008) 7,6 Gambie (2008) 7,9 Guinée-Bissau (2010) 8,1 Rwanda (2008) 8,7 Ouganda (2008) 8,8 Tanzanie (2009) 9,4 Sources : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA) et calcul des auteurs. Les analyses précédentes sur les scolarisations ont montré que beaucoup d’enfants qui entrent à l’école abandonnent notamment au cours des premières années de scolarité. Les analyses ont également montré qu’il y avait un phénomène de multi-cohorte à l’entrée à l’enseignement de base (effet de rattrapage) et que l’accès à l’école n’est pas forcément universel (en 2006, la probabilité d’accéder un jour à l’école n’était que de 76 %). Il apparaît donc pertinent de chercher à savoir pourquoi les enfants qui entrent abandonnent en forte quantité dès les premières années d’enseignement et pourquoi certains enfants n’entrent jamais à l’école. Il s’agit, en conséquence, d’analyser les questions d’offre et de demande scolaire. 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité Pays 63 17 Amelewonou, K., Brossard, M. (2004). Mesurer la couverture scolaire globale d’un pays : l’espérance de vie scolaire. Note méthodologique n°3 du Pôle d’analyse sectorielle en éducation. Dakar : UNESCO –BREDA. (cf. http://www.poledakar.org/IMG/pdf/Note-methodo-EVS-vf.pdf). II.5 Les questions d’offre et de demande scolaire Les analyses conduites précédemment montrent que seuls 62 % des enfants achèvent l’enseignement de base en 2009/10. Il est donc nécessaire que d’importants progrès soient réalisés aussi bien en termes de rétention. Pour rendre compte de la rétention mais aussi de l’accès, deux types de facteurs peuvent être considérés en se référant à l’offre et à la demande scolaire. Pour cela, il est possible d’utiliser de façon complémentaire les données administratives existantes du GIPASE et les enquêtes ménages. II.5.1 Les raisons données par les familles à l’abandon en 2002 des enfants au cours du primaire GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Dans la mesure où la fragilité de la demande constitue une cause potentiellement importante des abandons, il convient de l’analyser plus en détail. La question de la demande est liée en grande partie à celle des coûts d’opportunité de l’école pour les parents. En effet, au moment d’envoyer leurs enfants à l’école, les parents jugent que l’école présente pour eux un rapport favorable entre les coûts supportés et les bénéfices attendus. S’il arrive quelques années plus tard, que ceux-ci retirent les enfants de l’école, cela suggère que le rapport peut s’être inversé et que les enfants scolarisés présentent une charge trop importante pour les parents. L’enquête ILAP 2002 confirme cette hypothèse puisque la principale raison d’abandon de l’école par les enfants est le travail des enfants (32 %). Le deuxième motif évoqué est le mariage de l’enfant (29 %), motif qui concerne essentiellement les filles. Ces deux raisons avancées par les familles pour expliquer l’abandon de l’école tiennent sans doute en partie à une entrée tardive à l’école, bien au-delà de l’âge légal (70 % des élèves de première année avaient 10 ans ou plus en 2005/06). En effet, les enfants entrés à 10 ans en 1ère année en ont 14 à la moitié du parcours de l’enseignement de base : c’est à ce moment-là que le garçon peut s’avérer plus utile au travail et que les familles commencent à chercher un époux à leur fille. Ce constat milite donc pour inciter les familles à scolariser les enfants dès qu’ils en ont l’âge. Tableau 2.5 : les explications données pour l’abandon des enfants au cours du primaire en 2002 Motif évoqué % Échec de l’enfant à l’école 0% École trop éloignée 4% École trop chère 7% Maladie ou grossesse de l’enfant 8% Pas d’intérêt pour l’école 9% Mariage de l’enfant 29 % Autres 30 % Travail de l’enfant 32 % Source : calcul des auteurs à partir de la base de données ILAP 2002. Par ailleurs, il est intéressant de noter que les autres raisons proposées, et notamment la cherté de l’école, son éloignement ou le manque d’intérêt ne sont pas très souvent citées. 64 II.5.2 Les facteurs socio-économiques qui influencent la demande La demande d’éducation diffère généralement selon un certain nombre de caractéristiques socioéconomiques. Dans le cas de la Guinée-Bissau, on a pu estimer dans quelle mesure différents facteurs tels que le genre, l’ethnie, le niveau de vie et d’autres avaient un impact sur la probabilité d’entrer un jour à l’école en 2006. Tableau 2.6 : Estimation logistique d’accéder à l’école pour une génération d’individus (13-15 ans) Caractéristiques Coefficient Effet marginal Significativité Genre (Réf : garçon) Fille -0,396 -0,057 *** Sexe du chef de ménage (Réf : femme) Homme -0,809 -0,098 *** Non - formel -0,249 -0,039 ns Primaire 0,499 0,067 *** Secondaire ou plus 1,489 0,160 *** Est -0,107 -0,016 ns Nord -0,514 -0,077 ** Niveau d’instruction du chef de ménage (Réf : sans instruction) Région (Réf : SAB) Ethnie (Réf : Mandingue) Richesse (Réf : Quintile 1) Notes : Sud -0,208 -0,032 ns Balanta 1,568 0,174 *** Fula 0,380 0,052 ** Manjaco 2,504 0,193 *** Mancanhe 2,272 0,167 *** Papel 0,841 0,098 *** Autre 1,303 0,136 *** Quintile 2 0,059 0,008 ns Quintile 3 0,061 0,009 ns Quintile 4 0,602 0,078 *** Quintile 5 1,358 0,154 *** Constante 0,771 Pseudo R2 0,184 N 3044 (*) significativité au seuil de 10 %, (**) significativité au seuil de 5 % (***) significativité au seuil de 1 % 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité Variables Source : calcul des auteurs à partir de la base de données MICS3 2006. D’après les données de l’enquête MICS réalisée en 2006, toutes choses égales par ailleurs, en prenant la variable genre, la probabilité d’être un jour allé à l’école augmente quand l’enfant est un garçon. La probabilité que l’enfant fréquente un jour l’enseignement de base est plus importante lorsque le chef de ménage est une femme. Elle augmente aussi avec le niveau d’instruction du chef de ménage, les enfants 65 dont le chef de ménage a un niveau enseignement secondaire ou plus ont une probabilité supérieure de plus de 15 points d’aller un jour à l’enseignement de base par rapport aux enfants dont les parents sont sans instruction. La variable ethnie a elle aussi un effet sur la scolarisation : la probabilité d’aller un jour à l’école augmente quand l’enfant appartient à une ethnie autre que l’ethnie mandingue. Quant à la localisation géographique, en prenant comme référence la capitale Bissau (SAB), l’étude révèle que les enfants de l’est, du nord et du sud du pays ont moins de chance d’aller un jour à l’école que ceux de Bissau. Enfin, concernant le niveau de richesse des ménages, les enfants des ménages plus aisés ont plus de chance d’être un jour allés à l’école que les enfants des ménages pauvres. Il est intéressant de remarquer que l’on n’observe pas de différence significative entre les trois premiers quintiles de revenu : la probabilité d’accéder à l’école n’augmente qu’à partir du 4ème quintile (+ 8 points de pourcentage) et du 5ème quintile (+15 points). II.5.3 Analyse entre distance et accès à l’école La distance entre le domicile et l’école la plus proche est une variable qui influe généralement sur la fréquentation de l’enseignement de base : plus l’école est éloignée du domicile, plus l’enfant risque de ne pas se rendre à l’école ou d’abandonner. Tableau 2.7 : Répartition des enfants âgés de 7 à 14 ans selon la distance à l’école la plus proche, (2002) Distance (en minutes) entre le domicile et l’école primaire la plus proche % d’enfants de 7 à 14 ans 0 – 14 min 15 – 29 min 30 – 45 min 45 – 60 min + 60 min 60 % 19 % 8% 3% 10 % GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : Calcul des auteurs à partir de la base de données ILAP 2002. 66 Selon l’enquête ILAP effectuée en 2002, si 60 % des enfants de 7 à 14 ans habitent à moins d’un quart d’heure de l’école la plus proche, plus de 20 % d’entre eux mettent plus de 30 minutes pour aller à l’école, dont 10 % plus d’une heure. Ainsi, une majorité d’enfants a une école proche du domicile mais pour un certain nombre, la distance est susceptible d’être un frein à leur scolarisation. Tableau 2.8 : Estimation logistique de fréquenter l’école d’enseignement de base pour les enfants de 7 à 14 ans en 2002 Caractéristiques Coefficient Effet marginal Significativité Distance à l’école primaire 15-30 min -0,33 -0,08 *** (réf : < 15 min) 30-45 min -0,78 -0,19 *** Variables 45-60min -1,02 -0,25 *** + 60 min -1,96 -0,44 *** fille -0,48 -0,12 *** 0,08 0,02 *** 0,85 0,20 *** Niveau d’instruction du chef de ménage 0,61 0,15 *** Région 0,69 0,02 *** Niveau de vie 0,09 0,02 *** Constante -1,44 Genre (Réf : garçon) Age Sexe du chef de ménage (Réf : homme) femme Pseudo-R2 0,17 N 5 542 *** Source : Calcul des auteurs à partir de la base de données ILAP 2002. Le tableau 2.8 montre que la durée du trajet domicile-école, même à partir de 15 minutes, a un impact significatif et négatif sur la fréquentation scolaire. Par rapport aux enfants qui habitent à moins d’un quart d’heure de l’école la plus proche, la probabilité de fréquenter l’école diminue de 8 points quand le temps de trajet vers l’école est situé entre 15 et 30 minutes, de 19 points quand cette durée varie entre 30 et 45 minutes, et de 25 points quand la durée de ce trajet est comprise entre 45 et 60 minutes du domicile. Quand l’école est à plus d’une heure du domicile, la probabilité de fréquentation diminue de 44 points. II.5.4 La continuité éducative en question Cette partie cherche à évaluer dans quelle mesure l’absence de continuité éducative peut expliquer à elle seule une partie des abandons en cours de cycle. Les données utilisées sont de 2005/06, soit quelques années en arrière, mais permettent tout de même de donner une idée du contexte bissau-guinéen en termes de continuité éducative (l’organisation scolaire et le nombre de classes ayant très peu changé entre 2006 et 2010). 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité Le modèle logistique (tableau 2.8) estime l’impact de la distance sur la fréquentation scolaire tout en contrôlant le genre de l’enfant, son âge, le sexe du chef de ménage, son niveau d’instruction, la région du ménage et son niveau de vie, c’est-à-dire en raisonnant « toutes choses égales par ailleurs ». Les commentaires qui suivent ne concernent donc que la distance entre le domicile de l’enfant et l’école primaire, après contrôle des variables citées précédemment. 67 On peut d’abord caractériser chaque école selon le nombre d’années d’études offert, et calculer au cours d’une année scolaire donnée, la proportion des élèves qui sont scolarisés dans une école à cycle incomplet (moins de six niveaux). Le tableau 2.9 donne l’état des lieux de la situation pour l’année scolaire 2005/06. Tableau 2.9 : Distribution de la proportion d’écoles et d’élèves en fonction du nombre de niveaux offerts pour l’année 2005-06 (Primaire : EBE et EBC) Niveaux offerts Nombre d’écoles Proportion d’écoles Nombre d’élèves Proportion d’élèves 1 seul niveau 62 5% 3567 1% 2 niveaux 157 12 % 15 580 6% 3 niveaux 222 17 % 21958 8% 4 niveaux 598 46 % 94 497 35 % 5 niveaux 49 4% 13 116 5% 6 niveaux 205 16 % 120 569 45 % GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : Données GIPASE– Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. On note que seuls 45 % des élèves se trouvaient dans des écoles complètes, c’est-à-dire disposant des six niveaux de scolarisation. Cependant, cela ne veut pas forcément dire qu’en 2005/06, 55 % (100 % - 45 %) des élèves sont en situation de pénurie d’offre éducative à un moment de leur scolarité car une école peut ne pas proposer l’ensemble des niveaux d’un cycle, mais « suivre » ses élèves, et créer des nouvelles classes au fur et à mesure ou utiliser un système de recrutement en année alternée. Il faut donc aller plus loin dans l’analyse. Une autre méthode consiste à utiliser les données scolaires par école sur deux années successives. Dans ce cadre, une école est considérée comme présentant une discontinuité si elle proposait en 2004/05 la classe de 2ème année et qu’en 2005/06 elle ne dispose pas de la classe de 3ème année. Le tableau 2.10 présente, parmi les élèves entrés dans un niveau, la part de ceux qui avaient la possibilité de passer au niveau supérieur l’année suivante. Tableau 2.10 : Proportion d’élèves n’ayant pas la possibilité de passer au niveau supérieur entre 2004-05 et 2005-06 pour les 6 premières années d’études % d’élèves entrés en 1ère dans % d’élèves n’ayant pas eu la possibilité de passer dans la des écoles qui sont en situation classe supérieure dans la même école de discontinuité éducative* 2004/05 à 2005/06 68 1a à 2a 2a à 3a 3a à 4a 4a à 5a 5a à 6a 1a à 6a 9% 10 % 10 % 40 % 4% 57 % Source : calcul des auteurs à partir de la base de données GIPASE– Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. On note qu’il y avait une forte discontinuité éducative entre la 4ème et la 5ème année : 40 % d’élèves de 4ème année n’avaient pas la possibilité de passer en classe de 5ème année entre 2004/05 et 2005/06. En effet, beaucoup d’écoles ne présentent que les quatre premières années d’enseignement correspondantes au premier cycle de l’enseignement de base (EBE). C’est notamment le cas des écoles communautaires. Hormis cette discontinuité importante entre ces deux niveaux, la discontinuité entre les autres niveaux est à peu près la même : environ 10 % d’élèves étaient en situation de discontinuité entre chaque niveau pour les quatre premières années et seulement 4 % entre la 5ème et la 6ème année. Au final, la proportion d’élèves inscrits en première année dans une école qui ne leur proposera pas la continuité de l’offre éducative jusqu’au terme du cycle si d’autres classes ne sont pas ouvertes est de 57 %, résultante de la forte discontinuité observée entre la 4ème et la 5ème année. Le phénomène de discontinuité éducative est donc largement répandu en Guinée-Bissau et constitue un défi pour le système éducatif. Les abandons scolaires relativement nombreux en cours de cycle en Guinée-Bissau comme nous avons pu le voir au cours de ce chapitre, ne sont pas sans incidence sur l’efficacité interne du système éducatif. III. L’efficacité interne : une forte proportion des ressources publiques servent à financer les abandons et les redoublements en cours de cycle III.1 La question du redoublement Le redoublement est une pratique très inégale selon les pays, alors qu’elle n’existe pas dans certains pays, elle est utilisée intensivement dans d’autres. En Afrique, il y a une ligne de fracture très nette entre pays francophones et lusophones, qui utilisent abondamment le redoublement, et pays anglophones qui y ont un recours assez modéré voire inexistant pour quelques-uns d’entre eux. Le tableau 2.12 révèle que les redoublements ont été, et sont encore, assez importants dans le système éducatif bissau-guinéen, mais de façon assez différenciée selon les années scolaires et les niveaux considérés. Lorsque l’on compare les années 2004/05, 2005/06, et 2009/10 aux années antérieures, on note une nette amélioration : à l’EB, la part des redoublants est inférieure à 20 % alors qu’elle était supérieure à ce niveau entre 1997 et 2000. À l’intérieur des cycles, on constate une diminution des proportions de redoublants entre les sous-cycles : les redoublants sont moins nombreux dans les dernières années en comparaison des premières années. Ainsi, en 2009/10, les redoublants représentent 15 % à l’EBE alors qu’ils ne sont que 9 % à l’EBC. De la même façon, la part des redoublants passe de 15 % à l’ESG à 6 % à l’ESC. . 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité Traditionnellement, les planificateurs accordent une grande attention aux flux d’élèves et notamment aux redoublements et aux abandons. Cette attention est légitime dans la mesure où ces éléments affectent le coût de fonctionnement du système éducatif et son efficacité. Concrètement, il s’agit ici de voir dans quelle mesure les ressources engagées permettent de produire les résultats attendus. La question est particulièrement importante pour l’enseignement de base où l’objectif est de voir la totalité des enfants achever ce cycle. On regroupe généralement ces questions sous le vocable d’efficacité interne. 69 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Tableau 2.12 : Évolution de la part des redoublants de 1997-98 à 2005-06 70 1997-98 1998-99 1999-00 2000-01 2004-05 2005-06 2009-10 EB 22,8 % 27,0 % 23,6 % 21,2 % 14,2 % 18,7 % 14,0 % EBE 22,1 % 25,8 % 23,7 % 20,8 % 15,1 % 20,3 % 15,1 % 1a 21,8 % 25,0 % 22,8 % 18,8 % 17,2 % 25,2 % 15,1 % 2a 23,8 % 26,7 % 25,5 % 25,1 % 15,6 % 20,6 % 16,1 % 3a 22,0 % 26,1 % 23,1 % 21,7 % 12,8 % 15,6 % 13,8 % 4a 20,1 % 25,9 % 23,5 % 18,1 % 11,9 % 15,4 % 15,2 % EBC 26,7 % 36,2 % 23,2 % 22,7 % 9,9 % 11,3 % 9,4 % 5a 22,9 % 33,5 % 20,1 % 21,6 % 8,5 % 9,8 % 9,3 % 6a 31,5 % 39,6 % 27,1 % 24,1 % 11,4 % 13,1 % 9,6 % ES 20,0 % 20,1 % 19,1 % 20,8 % 9,4 % 13,5 % 13,1 % ESG 22,5 % 20,1 % 20,2 % 22,5 % 11,2 % 16,0 % 15,2 % 7a 17,3 % 21,5 % 15,9 % 21,5 % 11,6 % 16,1 % 13,6 % 8a 22,7 % 11,7 % 22,8 % 19,3 % 10,9 % 16,6 % 15,7 % 9a 29,9 % 29,6 % 24,5 % 28,4 % 10,8 % 15,3 % 17,2 % ESC 8,1 % - 15,1 % 14,7 % 3,9 % 5,5 % 6,4 % 10a 9,4 % - 15,6 % 15,1 % 4,8 % 6,1 % 7,1 % 11a 6,4 % - 14,2 % 14,2 % 2,9 % 4,9 % 5,5 % Source : Données GIPASE– Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. De façon générale, on assiste à une réduction du poids du redoublement. On note à titre de comparaison que les pires années pour le redoublement ont été de 1997 à 1999 et les meilleures de 2005 à 2010. Cette situation s’explique en grande partie par le conflit militaire qui a éclaté à la fin de l’année scolaire 1997/1998, au moment où devait avoir lieu les évaluations. Dans le secteur autonome de Bissau, au cœur de ce conflit, les évaluations n’ont donc pas pu être menées puisque les enseignants, comme les élèves, avaient fui vers des lieux plus sûrs, loin de Bissau, et parfois même à l’étranger. Graphique 2.4 : Proportion de redoublants dans l’enseignement de base (EBE+EBC) en fonction du statut des établissements, année 2009-10 EBC MADRASA EBE COMMUNAUTAIRE PRIVE PUBLIC EB(EBE+EBC) 0,0% 5,0% 10,0% 15,0% 20,0% Source : Données GIPASE– Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. Graphique 2.7 : Proportion de redoublants dans l’enseignement secondaire (ESG+ESC) en fonction du statut des établissements, année 2009-10 ESC PRIVE ESG PUBLIC 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité Le redoublement constitue actuellement l’un des facteurs qui affectent le plus sérieusement le système éducatif de Guinée-Bissau. Le phénomène varie selon le statut scolaire. De façon générale, en regardant le graphique ci-dessus, les élèves des écoles privées redoublent moins que ceux des autres écoles. En effet, le redoublement est relativement faible dans les écoles privées, avec une proportion de 7 % sur l’ensemble de l’enseignement de base (EBE+EBC). Dans l’enseignement de base complémentaire, la proportion des redoublants dans les écoles madrasas est plus importante que dans les écoles communautaires, publiques et privées (plus de 14 %. Mais dans les écoles communautaires et publiques, c’est surtout dans l’enseignement de base élémentaire, c’est-à-dire au cours des quatre premières années, que les élèves redoublent plus fréquemment. ES (ESG+ESC) 0,0% 5,0% 10,0% 15,0% 20,0% Source : Données GIPASE– Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. 71 Le redoublement demeure très important dans l’enseignement secondaire public comparativement à l’enseignement privé. Sur l’ensemble du cycle secondaire, la proportion des redoublants ne dépasse pas 7 % dans l’enseignement privé alors qu’elle est supérieure à 14 % sur l’ensemble de l’enseignement public. Cette différence se retrouve dans les deux cycles. À l`enseignement secondaire général (1er cycle), la proportion de redoublants atteint 17 % dans le public contre 8 % dans le privé. Dans l’enseignement secondaire complémentaire (2nd cycle), la proportion de redoublants est de 2,5 % dans le privé contre 8 % dans le public. III.2 Les indicateurs d’efficacité interne Le coefficient d’efficacité interne se définit comme le rapport entre le nombre d’années d’études théoriquement nécessaires pour conduire un élève de la première année à la dernière année du cycle et le nombre d’ « années - élèves » effectivement consommées l’année observée. On multiplie par 100 pour raisonner en pourcentage. Un coefficient d’efficacité interne de 100 % signifie que la totalité des ressources finance le nombre d’années théoriquement prévu, il s’agit d’une situation idéale. Tableau 2.13 : Rétention et coefficients d’efficacité interne dans l’enseignement de base en 2005/06 et 2009/10 Enseignement de base 2005/06 2009/10 % de rétention sur le cycle 40,3 % 37,8 % % moyen de redoublants 18,7 % 14,0 % GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF % de redoublants par classe 72 1a 25,2 % 15,1 % 2a 20,6 % 16,1 % 3a 15,6 % 13,8 % 4a 15,4 % 15,2 % 5a 9,8 % 9,3 % 6a 13,1 % 9,6 % Coefficient d’efficacité interne global 53,9 % 53,4 % Coefficient sans les redoublements 66,2 % 62,1 % Coefficient sans les abandons 81,4 % 86,0 % Source : calcul des auteurs à partir de la base de données GIPASE– Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. Le tableau 2.13 présente un coefficient d’efficacité interne de 53,4 %18 dans l’enseignement de base en 2009/10, chiffre quasi-identique à celui de 2005/06. Ceci signifie qu’un peu plus de 46 % des ressources sont utilisées pour financer les redoublements et les années de scolarité des élèves ayant abandonné avant la fin du cycle. On peut considérer ces dépenses comme une mauvaise utilisation des ressources : consacrer 46 % des ressources aux abandons et aux redoublements est très excessif et des progrès importants sont souhaitables dans ce domaine. On observe que le coefficient d’efficacité interne s’élèverait à 62,1 % s’il n’y avait pas de redoublement et à 86 % sans abandons en 2009-10. On peut donc s’attendre à des gains importants si une diminution des abandons intervenait, les progrès seraient également appréciables avec 18 Pour former un élève jusqu’à la 6ème année de l’enseignement de base, on finance en moyenne presque 12 années. une diminution du redoublement. En outre, étant donné que le redoublement tend à accroître les abandons, une baisse du redoublement pourrait se révéler très bénéfique pour améliorer l’utilisation des ressources. Le tableau 2.14 permet de comparer la situation de la Guinée-Bissau avec d’autres pays africains de richesse comparable. On observe que le problème de la faible efficacité interne est commun à beaucoup de pays africains. Toutefois, les pays progressent depuis quelques années, notamment en termes de diminution de redoublements. Ainsi, des pays comme le Mali, la Gambie, le Niger et d’autres encore, présentent des coefficients d’efficacité interne nettement supérieurs à celui de la Guinée-Bissau. Tableau 2.14 : Comparaison internationale des coefficients d’efficacité interne dans l’enseignement de base Coefficient d’efficacité interne 39 Guinée-Bissau (2010) 53 Mauritanie (2008) 64 Côte d’Ivoire (2007) 65 Burkina Faso (2007) 69 Bénin (2009) 72 Mali (2008) 72 Gambie (2010) 75 Niger (2009) 79 Cap-Vert (2009) 87 République-Unie de Tanzanie (2009) Source : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). Moyenne 11 pays 99 70 Dans l’enseignement secondaire, on constate que les coefficients d’efficacité interne sont meilleurs que dans l’enseignement de base : 67 % au niveau de l’ESG (1er cycle) et 83 % au niveau de l’ESC (2nd cycle) en 2009/10. Ceci signifie qu’environ 33 % des ressources servent à financer les élèves redoublants et ceux qui abandonnent avant la fin du cycle dans l’ESG, et que ces ressources représentent environ 17 % dans l’ESC. On constate qu’il n’y a eu guère de progrès entre 2006 et 2010, et qu’au contraire, le coefficient d’efficacité interne à l’ESG s’est même dégradé. Par contre, plus on avance dans les niveaux d’enseignement et meilleurs sont les coefficients d’efficacité interne. En effet, les redoublements et les abandons diminuent avec le niveau d’enseignement. 2 Les scolarisations – quantité, flux, qualité Rwanda (2008) 73 Tableau 2.15 : Rétention et coefficients d’efficacité interne dans l’enseignement secondaire en 2005-06 et 2009-10 2005/06 2009/10 ESG ESC ESG ESC % de rétention sur le cycle 65,3 % 88,1 % 64,6 % 79,5 % % moyen de redoublants 16,0 % 5,5 % 16,0 % 5,5 % 7a / 10a 16,1 % 6,1 % 13,6 % 7,1 % 8a / 11a 16,6 % 4,9 % 15,7 % 5,5 % 9a 15,3 % % de redoublants par classe 17,2 % Coefficient d’efficacité interne global 66,6 % 88,5 % 67,0 % 82,9 % Coefficient sans les redoublements 79,3 % 93,7 % 79,0 % 88,6 % Coefficient sans les abandons 83,9 % 94,5 % 84,8 % 93,6 % Source : calcul des auteurs à partir de la base de données GIPASE– Ministère de l’éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF IV. La qualité des apprentissages par l’analyse de l’alphabétisation 74 Ce chapitre sur les scolarisations ne doit pas se réduire uniquement à des questions quantitatives mais doit également s’intéresser aux acquisitions des élèves. En effet, les enfants doivent entrer à l’école, achever l’enseignement de base mais aussi recevoir un enseignement de qualité devant faire d’eux des adultes alphabétisés. La mesure de la qualité des apprentissages n’est pas une chose aisée et elle implique la disponibilité de données spécifiques. En général, trois types de données sont utilisés pour mesurer cette qualité des apprentissages. Il s’agit de données de résultats aux examens nationaux à chaque niveau d’enseignement, de données d’évaluation spécifique des apprentissages et de données d’enquêtes ménages relatives à l’alphabétisation des individus. Ici, seule une source de données a été mobilisée. Il s’agit de données sur l’alphabétisation issues de l’enquête ménage MICS3 2006 permettant d’interroger la capacité du système éducatif bissau-guinéen à alphabétiser durablement les femmes selon leur niveau d’études. Toutefois, il conviendra de compléter cette analyse avec les résultats d’une évaluation des apprentissages et avec des résultats à des examens nationaux dès que ces évaluations auront été mises en place et que les données seront disponibles. L’alphabétisation présente un caractère symbolique notamment pour l’éducation de base et occupe une place importante dans les programmes scolaires. Il s’agit en effet d’un des objectifs premiers de l’école que de former de futurs adultes alphabétisés. Bien sûr, les objectifs des programmes scolaires ne se limitent pas à l’alphabétisation mais on peut considérer qu’il s’agit d’une première dimension qui peut légitimement servir à l’évaluation de l’efficacité de l’école. Cette dimension peut être approchée à partir des enquêtes réalisées auprès des ménages qui fournissent des éléments permettant d’analyser la relation entre la durée de scolarisation et l’alphabétisation. On cherche notamment à estimer la probabilité d’être durablement alphabétisé en fonction du niveau d’étude atteint. L’enquête MICS 2006 a permis de faire cette analyse sur 6 125 femmes âgées entre 22 et 44 ans. Le graphique 2.5 présente la probabilité d’être alphabétisé pour une femme bissau-guinéenne, âgée entre 22 et 44 ans, en fonction du niveau d’étude atteint, tout en contrôlant la zone géographique (rural/urbain) et le niveau de richesse. On constate tout d’abord que la probabilité d’être alphabétisée pour une femme entre 22 et 44 ans qui n’est jamais allé à l’école est extrêmement faible (0,3 %). En revanche, la probabilité d’être alphabétisée pour une femme qui a achevé l’enseignement de base (six années d’études) est d’environ 65 %. L’enseignement de base en Guinée-Bissau ne permet donc pas d’alphabétiser durablement toutes les femmes qui l’ont pourtant achevé, mais ce chiffre est assez proche de la moyenne africaine qui s’élève à 68 % pour l’ensemble des individus de 22 à 44 ans19. On peut estimer sur cette base qu’il faudrait environ 10 années de scolarité pour que la probabilité d’alphabétisation soit de 100 % chez les femmes en GuinéeBissau. Il faut néanmoins rappeler que les résultats présentés concernent des femmes âgées entre 22 et 44 ans et qu’ils renvoient donc à une image du système éducatif tel qu’il fonctionnait entre le début des années 80 et le début des années 90 et qu’ils ne concernent nullement l’ensemble de la population étant donné que les hommes ne sont pas présents dans cette analyse. En conséquence, il conviendra de compléter cette analyse avec d’autres, plus récentes, centrées sur l’évaluation des acquis des élèves Graphique 2.8 : Probabilité d’être alphabétisé en fonction du niveau d’étude chez les femmes âgées de 22 à 44 ans 100 80 2 60 40 20 0 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 Nombre d'années d'études Source : MICS 2006, calcul des auteurs. Les scolarisations – quantité, flux, qualité % de femmes de 22 à 44 ans alphabétisées 120 75 19 UNESCO-BREDA (2007), Rapport Dakar+7, EPT, L’urgence de politiques sectorielles intégrées, UNESCO, Dakar.. (Cf. http:// www.poledakar.org/IMG/pdf/Chapitre4_Dak7_fr.pdf ) Principaux enseignements du chapitre 2 : Les scolarisations – quantité, flux, qualité Ce chapitre étudie la scolarité sous les angles quantitatif et qualitatif. Il examine l’évolution des effectifs aux différents niveaux d’enseignement, les différents indicateurs de scolarisation permettant d’évaluer les progrès réalisés, le flux d’élèves dans chaque cycle, et la probabilité, pour les individus bissau-guinéens, d’être alphabétisés en fonction du nombre d’années d’études. 1. Une croissance soutenue des effectifs scolarisés Les effectifs scolarisés croissent assez rapidement. L’accroissement annuel moyen des effectifs entre 1999/00 et 2009/10 est de 8 % dans le préscolaire, 7 % dans l’enseignement de base et de 11 % dans l’enseignement secondaire. Durant cette période, les écoles communautaires et les madrasas se sont considérablement développées dans l’enseignement de base ; la part des effectifs scolarisés dans ce type d’écoles est passée de 4 % à 19 %. Au niveau de l’enseignement secondaire, on note une progression du privé, la part des effectifs scolarisés y est passée de 11 % à 18 % au cours la même période. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 2. Environ six enfants sur dix achèvent un enseignement de base de six années en 2009/10 Malgré un taux d’accès élevé en 1ère année de l’enseignement de base, notamment en raison d’un effet de rattrapage (beaucoup d’enfants rentrent à l’école après l’âge théorique d’entrée), il n’est pas certain que l’accès à l’école soit encore universel (seuls 76 % des enfants entraient à l’école en 2006). La rétention au cours de l’enseignement de base est mauvaise puisque sur 100 enfants entrants en 1ère année, seuls 38 atteignent la 6ème année. Cette forte déperdition est surtout marquée au cours des deux premières années, et entre la quatrième et la cinquième année d’enseignement. Plusieurs raisons viennent expliquer le non-accès à l’école et cette déperdition en cours de cycle. Au niveau de l’offre scolaire, 21 % des enfants du pays ayant entre 7 et 14 ans sont à plus de 30 minutes de l’école la plus proche et beaucoup d’écoles n’offrent pas la continuité éducative sur l’ensemble du cycle d’enseignement de base. Au niveau de la demande, les principales entraves avancées sont le travail des enfants et le mariage précoce. 3. L’enseignement de base et l’enseignement secondaire général (1er cycle) sont marqués par des taux de redoublement encore trop élevés et par de nombreux abandons La proportion de redoublants de l’enseignement de base est encore élevée (14 % en 2009/10) même si celle-ci a légèrement diminué depuis 1997/98 (22,8 %). Au niveau de l’enseignement secondaire général, les redoublements, même s’ils sont encore élevés, ont diminué passant de 20 % en 1997/98 à 13,1 %. Concernant l’enseignement secondaire complémentaire, ceux-ci sont plus faibles (6,4 % en 2009/10). Le coefficient d’efficacité interne de l’enseignement de base est de 53 % ce qui signifie que 47 % des ressources allouées à ce cycle d’enseignement servent à financer les redoublements et les années de scolarité des élèves ayant abandonné avant la fin du cycle. 4. L’enseignement de base ne remplit pas son rôle d’alphabétiser durablement ceux ayant achevé ce cycle d’enseignement 76 Seules 65 % des femmes, âgées entre 22 et 44 ans, sont alphabétisées durablement après 6 années de scolarité. Le système éducatif bissau-guinéen alphabétise, en revanche, durablement sa population lorsque celle-ci a suivi au moins 10 années d’études. Ceci signifie un problème de qualité des apprentissages, qu’il convient de corriger dès l’enseignement de base. Chapitre 3 : Les aspects financiers Les aspects financiers du secteur de l’éducation constituent un point essentiel de l’analyse du système éducatif. Dans la mesure où la politique éducative future du pays sera soumise à une forte contrainte financière, des arbitrages devront être réalisés. Il s’agit, à travers ce chapitre, d’examiner les ressources mobilisées pour le système éducatif bissau-guinéen, leur évolution, leur répartition en fonction de chaque niveau d’enseignement et en fonction de leur nature. Cette analyse est menée en priorité sur les financements publics mais concerne également les dépenses des ménages. L’année de base de cette analyse est l’année 2010. Une estimation des dépenses publiques unitaires par niveau d’enseignement sera proposée en axant l’analyse sur les facteurs structurant la variation de ces dépenses unitaires. La rémunération des enseignants constitue le cœur même de cette analyse. Il s’agit d’un élément central et prépondérant des dépenses publiques d’éducation, qu’il est nécessaire de prendre en compte dans la mesure où l’objectif visé est de scolariser le maximum d’enfants. I. Évolution des dépenses globales d’éducation L’évolution des dépenses exécutées, présentées ici, concerne la période 1998-2010 pour les dépenses courantes et, 1999-2010 pour les dépenses d’investissement. Toutefois, les données sur les dépenses courantes et d’investissement des années 2000 et 2001 n’ont pu être collectées et n’apparaissent donc pas dans cette partie. Les dépenses privées sont également examinées. 3 I.1. Évolution des dépenses courantes Les dépenses courantes publiques d’éducation en millions de francs CFA de 2010 ont connu une croissance entre 1998 et 2002 passants de 1 939 à 3 748 millions de francs CFA soit un doublement sur la période. Cette augmentation est surtout liée à l’accroissement des dépenses de personnel (de 1 613 à 2 644 millions de francs CFA correspondant à un accroissement de 64 %). En 2003, ces dépenses ont diminué du fait de problèmes financiers rencontrés par l’État avec un grand nombre de salaires impayés au cours de l’année. De 2004 à 2005, on note un fort accroissement des dépenses courantes exécutées (+53 %) notamment des dépenses salariales (+62 %) dues à une régularisation d’arriérés de salaires20. En 2006, les dépenses courantes exécutées sont de 4 729 millions de francs CFA mais auraient pu être plus importantes s’il y n’y avait pas eu d’impayés chez les agents contractuels au cours de l’année21. Entre 2007 et 2009, certains arriérés de 2006 ont été régularisés mais de nouveaux arriérés de salaires sont apparus, notamment chez les contractuels et les nouveaux fonctionnaires entrants dans le système. En 2010, une forte augmentation 20 En effet, en 2004, un réajustement à la hausse des salaires a été opéré mais ce réajustement a été régularisé en 2005. De plus, en 2005, des arriérés de salaires des agents contractuels ont également été régularisés. 21 Les agents contractuels n’ont été payés que 7 mois en 2006 (1 mois de salaire + 6 mois d’arriérés régularisés). Les aspects financiers Le tableau 3.1 présente l’évolution globale des dépenses courantes publiques d’éducation de 1998 à 2010 en millions de francs CFA courants et de 2010 (constants). 77 des dépenses de l’État pour l’éducation est constatée, notamment du fait de la régularisation d’arriérés de salaires (malgré tout certains salaires relatifs à 2010 n’ont pas été payés au cours de l’année 2010). Ainsi, les dépenses de personnel en 2010 représentent 5 272 millions de francs CFA alors qu’en 2008 et 2009, celles-ci ne représentaient que 4 548 et 4 393 millions de francs CFA. Comme cela a été montré dans le chapitre 1 du présent document, les dépenses courantes exécutées en 2010 ne représentent que 11 % des dépenses courantes hors dette de l’État22. Tableau 3.1 : Évolution des dépenses courantes publiques d’éducation, 1998-2010 1998 1999 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 Dépenses de personnel en millions FCFA courants 1 211 1 741 2 235 1 941 2 344 3 976 3 279 nc 4 369 4 289 5 272 en millions FCFA de 2010 1 613 2 335 2 644 2 415 2 939 4 751 3 997 nc 4 548 4 393 5 272 Biens et services en millions FCFA courants 40 205 116 40 95 663 244 nc 251 161 163 en millions FCFA de 2010 53 275 137 50 119 792 297 nc 262 165 163 Transfert en millions FCFA courants 205 321 817 385 513 111 356 nc 212 214 181 en millions FCFA de 2010 273 430 966 479 643 133 434 nc 221 219 181 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF TOTAL en millions FCFA courants 1 456 2 267 3 168 2 366 2 952 4 750 3 879 4 018 4 833 4 664 5 615 en millions FCFA de 2010 1 939 3 040 3 748 2 944 3 701 5 676 4 729 4 619 5 030 4 777 5 615 Sources : Direction Générale du Budget - Ministère des Finances, Banque mondiale – Région Afrique, Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA), et calcul des auteurs. En termes de répartition (tableau 3.2), on observe qu’entre 1998 et 2002, la part accordée aux dépenses salariales a diminué au bénéfice de la part accordée aux biens et services (entre 1998 et 1999) et aux transferts (entre 1999 et 2002). En 2002, 30 % des dépenses sont des dépenses d’achat de biens et services (4 %) et surtout des dépenses de transferts (26 %). À partir de 2004, la part des dépenses salariales augmente au-delà de 80 %, pour atteindre 85 % des dépenses courantes totales en 2006, 90 % en 2008 puis 94 % en 2010. 78 22 À noter que le cadre indicatif de l’initiative Fast-Track (FTI) recommande que la part des dépenses courantes d’éducation représente 20 % des dépenses courantes de l’État. Tableau 3.2 : Évolution de la répartition des dépenses courantes publiques d’éducation, 1998-2010 1998 1999 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 Dépenses de personnel 83 % 77 % 71 % 82 % 79 % 84 % 85 % nc 90 % 92 % 94 % Biens et services 3% 3% 14 % 6% nc 5% 3% 3% Transfert 14 % 14 % 26 % 16 % 17 % 2% 9% nc 4% 5% 3% 9% 4% 2% Sources : Direction Générale du Budget - Ministère des Finances, Banque mondiale – Région Afrique, Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA), et calcul des auteurs. I.2. Évolution des dépenses d’investissement Cette catégorie de dépenses relève à la fois d’un financement sur ressources propres et d’appuis extérieurs, sous forme de subventions non remboursables ou de prêts, pour lesquels l’État bissau-guinéen est appelé à s’acquitter de sa contrepartie. Le tableau 3.3 présente l’évolution des dépenses d’investissement entre 1999 et 2010, en millions de francs CFA courants et en millions de francs CFA constants (base 2010). Concernant les dépenses d’investissement dans le secteur de l’éducation en millions de francs CFA constants, l’évolution montre une baisse de ces dépenses de 1999 à 2006 (de 5 750 millions de francs CFA à 388 millions de francs CFA, soit une diminution de 93 % sur la période). À compter de 2007, on constate une augmentation des dépenses d’investissement mais sans pour autant être au niveau des années 1999 à 2004. Ainsi, en 2010, les dépenses d’investissement sont de 1 033 millions de francs CFA. La majorité des investissements dans le secteur de l’éducation sont financés sur ressources extérieures marquant ainsi une quasi absence des dépenses de l’État sur ressources propres. Depuis 2008, aucune dépense d’investissement sur ressources propres de l’État n’a été exécutée. Tableau 3.3 : Évolution des dépenses d’investissement pour le secteur de l’éducation sur ressources propres et sur ressources extérieures, 1999-2010 1999 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 en millions FCFA courants 445 5 0 0 299 5 13 0 0 0 en millions FCFA de 2010 597 6 0 0 357 6 15 0 0 0 951 313 437 829 1 184 1 033 Ressources propres 3 en millions FCFA courants 3 843 2 279 1 719 2 737 en millions FCFA de 2010 5 153 2 696 2 139 3 431 1 137 382 503 863 1 213 1 033 en millions FCFA courants 4 288 2 284 1 719 2 737 1 250 318 450 829 1 184 1 033 en millions FCFA de 2010 5 750 2 702 2 139 3 431 1 494 388 517 863 1 213 1 033 Ensemble des ressources Les aspects financiers Ressources extérieures Source : Ministère de l'Économie et Ministère des Finances. 79 I.3. Les dépenses des ménages Les dépenses de l’État ne constituent pas la seule source de financement de l’éducation. Les familles sont également mises à contribution, que ce soit, par exemple, pour le fonctionnement des associations de parents d’élèves, l’écolage, le transport, le matériel scolaire, l’uniforme, etc. Il convient d’estimer le montant de cette contribution et la part qu’elle représente dans le financement total de l’éducation (dépenses publiques ajoutées aux dépenses privées). Il est possible, grâce aux enquêtes ménages d’estimer le montant alloué par les familles pour la scolarisation de leurs enfants. On utilise ici les données de l’enquête ILAP23 réalisée en 2002 en Guinée-Bissau, et on fait l’hypothèse, assez forte, que les dépenses des ménages pour l’éducation demeurent sensiblement les mêmes en 2010 qu’en 2002. Ainsi, les montants présentés dans ce paragraphe sont ceux estimés pour 2002, corrigés de l’inflation et exprimés en francs CFA de 2010. Par ailleurs il n’a pas été possible d’estimer les dépenses privées au niveau du supérieur, l’échantillon ne comptant pas assez d’individus à ce niveau d’enseignement pour que l’estimation obtenue soit significative. Il est ici question d’observer, dans un premier temps, le niveau de financement des ménages, selon ses caractéristiques et les classes fréquentées par les enfants. Les résultats sont présentés dans le tableau 3.4. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF La contribution des ménages à l’éducation de leurs enfants varie selon le niveau fréquenté mais aussi, selon un certain nombre de paramètres, comme le type d’établissement où est scolarisé l’enfant, l’endroit où vit le ménage (Secteur Autonome de Bissau ou en région) et le niveau de vie du ménage. De façon générale, l’éducation de base est le niveau où la dépense est la plus faible (5 100 francs CFA par enfant) ; cette dépense est quasi multipliée par deux pour le préscolaire et par plus de six pour l’enseignement secondaire. La scolarisation des enfants dans des structures privées induit des contributions beaucoup plus élevées de la part des familles : au secondaire général par exemple, la dépense annuelle est près de cinq fois supérieure dans le privé que dans le public. 80 Tableau 3.4 : Dépenses estimées d’éducation des ménages par enfant selon le niveau et le type d’établissement fréquentés, la localisation géographique et le niveau de vie du ménage, année 2010 (francs CFA) Préscolaire Enseignement de base Enseignement secondaire général Enseignement secondaire complémentaire 9 500 5 100 34 200 42 100 Public 1100 3 300 26 300 31 700 Privé 10 600 14 700 118 400 139 200 Autre (communautaire, madrasa) 4 600 8 200 Bissau (SAB) 19 400 9 600 36 200 43 900 reste du pays 4 700 3 900 27 000 18 500 Moyenne Type d’établissement Localisation géographique Source : base de données de l’enquête auprès des ménages ILAP 2002, calcul des auteurs. 23 Enquête ménage QUIBB. Les dépenses des ménages sont plus élevées dans le SAB. Cette différence s’explique en partie par un plus grand recours au privé dans la capitale. Une fois estimées les dépenses des ménages pour chacun de leurs enfants, on s’intéresse à la part que représente l’ensemble des dépenses privées pour l’éducation dans le financement global du secteur (tableau 3.5), que l’on reconstitue à partir des dépenses par élève et des effectifs scolarisés. Les ménages contribuent fortement au financement de l’éducation : on estime qu’ils ont dépensé plus de 4 milliards de francs CFA pour la scolarisation de leurs enfants en 2010, dont plus de la moitié pour le secondaire. Cette somme représente 49 % des dépenses totales, avec des différences selon les niveaux : les familles contribuent majoritairement au financement du secondaire et du préscolaire (à hauteur respective de 65 % et 62 %). A l’inverse, au primaire, l’État est le principal financeur, puisque les dépenses des ménages représentent 34 % du financement. Cependant, cette charge des ménages reste très importante notamment au regard des objectifs de la Scolarisation Primaire Universelle du fait que plus des deux tiers de la population vivent en dessous du seuil de pauvreté ce qui a pour conséquence d’exclure les plus pauvres de l’école. Tableau 3.5 : Part des dépenses d’éducation des ménages dans les dépenses totales nationales Préscolaire Enseignement de base Enseignement secondaire Dépense par enfant (FCFA de 2010) 9 500 5 100 36 130 Effectifs scolarisés 9 044 288 738 78 026 Dépenses des familles (millions FCFA 2010) 85,9 1 472,6 2 819,1 4 377,5 Dépenses de l’État (millions FCFA 2010) 46,1 2 889,2 1 709,3 4 644,6 Dépenses totales (millions FCFA 2010) 132,0 4 361,8 4 528,4 9 022,1 % des dépenses supportées par les familles 65 % 34 % 62 % 49 % Total Source : base de données de l’enquête auprès des ménages ILAP 2002, GIPASE – Ministère de l’Éducation, de la Culture et des Sports, Ministère des Finances, et calcul des auteurs. 3 Cette partie est consacrée aux différentes catégories de dépenses en fonction du niveau d’enseignement pour l’année 2010. Cette année a été retenue dans la mesure où elle correspond à l’année la plus récente pour laquelle l’information budgétaire exécutée est disponible. II.1. Les dépenses de personnel Cette section traite des dépenses publiques de personnel, en distinguant les personnels qui sont enseignants « craie en main » et ceux qui ne le sont pas (personnels des établissements scolaires déchargés de cours, personnels en poste dans les structures d’appuis centrales et déconcentrées), en distinguant également leur statut (fonctionnaires, contractuels) et le niveau d’enseignement pour lequel ils sont rattachés. Les aspects financiers II. Analyse détaillée des dépenses courantes publiques pour l’année 2010 81 Tableau 3.6 : Répartition du nombre de personnels de l’éducation et des masses salariales correspondantes selon la fonction, le statut et le niveau d’enseignement, année 2010 (en milliers de francs CFA) Nombre de personnels Enseignants craie en mains GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Autre Enseignants personnel craie en mains Autre personnel Total Enseignement préscolaire 64 22 29 464 11 304 40 769 Fonctionnaires 29 22 14 901 11 304 26 206 Contractuels 35 14 563 14 563 Enseignement de base 3 787 195 2 322 533 180 396 2 502 929 Fonctionnaires effectifs 2 577 195 1 819 067 180 396 1 999 464 Contractuels 1 210 Enseignement secondaire 1 488 108 1 357 547 126 890 1 484 438 Fonctionnaires 1 054 108 1 164 724 126 890 1 291 614 503 465 503 465 Contractuels 434 EFTP 116 12 74 869 42 511 117 379 39 44 30 969 42 511 73 480 Fonctionnaires 192 824 192 824 Contractuels 77 0 43 899 Enseignement supérieur 80 25 189 498 28 983 218 481 Fonctionnaires 13 25 11 789 28 983 40 772 Contractuels 67 0 36 109 0 Autres (enseignants étrangers) 34 43 899 141 600 36 109 141 600 Recherche scientifique 24 133 Fonctionnaires 492 Contractuels 23 642 Écoles normales 79 4 54 062 2 581 56 643 Fonctionnaires 21 4 24 087 2 581 26 668 Contractuels 58 École normale Supérieure 38 1 42 549 1 014 43 563 Fonctionnaires 38 1 42 549 1 014 43 563 45 5 18 665 5 663 24 328 5 663 42 993 29 975 29 975 Contractuels Alphabétisation Fonctionnaires Contractuels 5 45 18 665 18 665 Transversal 386 374 433 374 433 Fonctionnaires 335 345 357 345 357 51 29 076 29 076 Contractuels 82 Masse salariale TOTAL 4 887 097 Source : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/010 du GIPASE – Ministère de l’Éducation, de la culture, des sciences, de la jeunesse et des sports, calcul des auteurs. Il s’agit tout d’abord de confronter les différentes sources de données disponibles afin d’avoir le détail du personnel et des masses salariales correspondantes en fonction du statut. Les trois sources de données disponibles ici sont la base de données du personnel 2009/10 du GIPASE du ministère de l’Éducation, de la culture, des sciences, de la jeunesse et des sports, la base de données des dépenses courantes exécutées pour l’année 2010 et la base de données de la solde de la direction générale du budget du ministère des Finances. En Guinée-Bissau, deux statuts coexistent : les fonctionnaires24 et les contractuels25. Le tableau 3.6 qui suit présente la répartition des personnels de l’éducation qu’ils soient fonctionnaires ou contractuels par niveau d’enseignement, en distinguant les enseignants « craie en mains » et les autres personnels, ainsi que les masses salariales correspondantes. À noter que certains personnels ne peuvent pas être rattachés à un niveau car ils travaillent en transversal sur l’ensemble des niveaux d’enseignement (exemples : les personnels du cabinet du ministre, les personnels du GIPASE, etc.). La majorité des personnels travaillant dans l’éducation en Guinée-Bissau est fonctionnaire. Dans le tableau 3.6, la proportion de fonctionnaires est d’environ 70 %. Toutefois, ce tableau concernant le nombre de personnels n’est pas exhaustif notamment concernant les niveaux d’enseignement autres que l’enseignement de base et l’enseignement secondaire. Mais on peut penser que le chiffre de 70 % de fonctionnaires est très proche de la réalité (en 2006, le système comptait 71 % de fonctionnaires). Concernant les masses salariales, elles correspondent réellement aux salaires de 2010 pour les personnels de l’éducation. Toutefois, on constate que la masse salariale totale est de 4,887 milliards de francs CFA alors que la masse salariale réellement exécutée pour l’éducation en 2010 est de 5,272 milliards de francs CFA. La différence de 384,406 millions de francs CFA correspond à des régularisations de salaires de 2009 payées sur le budget de 2010. On constate qu’un montant total de 374,433 millions de francs CFA correspond à la masse salariale des personnels de l’éducation travaillant de façon transversale sur tous les niveaux d’enseignement (cabinet du ministre, GIPASE, etc.). 3 Les aspects financiers Étant donné la nécessité de pouvoir connaître la masse salariale pour chaque niveau d’enseignement et surtout de pouvoir calculer une dépense unitaire par élève pour chaque niveau d’enseignement, il est nécessaire de répartir la masse salariale par niveau d’enseignement pour les personnels qui ne sont pas enseignants « craie en mains ». La clé de répartition utilisée ici est le prorata de la masse salariale par niveau d’enseignement des enseignants « craie en mains ». Le tableau 3.7 qui suit présente la répartition finale de la masse salariale des personnels de l’éducation selon la fonction, le statut et le niveau d’enseignement. 83 24 Les fonctionnaires sont des agents permanents de l’État et sont en contrat à durée indéterminé avec l’État bissau-guinéen. 25 Les contractuels sont en contrat à durée déterminée de 12 mois pour les agents hors établissements scolaires et de 9 mois pour les enseignants et les agents en poste dans les établissements scolaires. Tableau 3.7 : Répartition finale de la masse salariale des personnels de l’éducation selon la fonction, le statut et le niveau d’enseignement (en milliers de francs CFA) Enseignants craie en mains Autre personnel Enseignement préscolaire 29 464 14 099 43 564 Fonctionnaires 14 901 13 882 28 783 Contractuels 14 563 217 14 780 Enseignement de base 2 322 533 400 691 2 723 224 Fonctionnaires 1 819 067 383 585 2 202 652 503 465 17 107 520 572 Contractuels Enseignement secondaire 1 357 547 255 655 1 613 203 Fonctionnaires 1 164 724 245 656 1 410 380 192 824 9 999 202 823 EFTP 74 869 49 612 124 481 Fonctionnaires 30 969 49 061 80 030 Contractuels 43 899 551 44 451 189 498 33 527 223 025 Fonctionnaires 11 789 33 174 44 962 Contractuels 36 109 353 36 462 Contractuels Enseignement supérieur Autres (enseignants étrangers) 141 600 141 600 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Recherche Scientifique 24 133 Fonctionnaires Contractuels 492 492 23 642 23 642 Écoles normales 54 062 7 709 61 771 Fonctionnaires 24 087 7 310 31 398 Contractuels 29 975 398 30 373 École normale Supérieure 42 549 5 050 47 599 Fonctionnaires 42 549 4 736 47 286 0 313 313 Alphabétisation 18 665 7 434 26 098 Fonctionnaires 0 7 296 7 296 18 665 137 18 802 Contractuels Contractuels Régularisation salaires de 2009 384 406 Enseignement de base 206 569 Enseignement secondaire 149 189 Autres niveaux 84 Total TOTAL 28 648 5 271 503 Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/010du GIPASE – Ministère de l’Éducation, de la Culture, des Sciences, de la jeunesse et des sports, calcul des auteurs. On constate à travers ce tableau que la majorité de la masse salariale va à l’enseignement de base (52 % de la masse salariale totale hors régularisation des salaires de 2009). Par ailleurs, la majorité des dépenses salariales concernent directement les enseignants « craie en main » puisque sur l’ensemble du système, elles représentent 84 % de la masse salariale (hors régularisation des salaires de 2009). La part salariale allouée aux enseignants « craie en mains » est à peu près identique pour les enseignements de base, secondaire et supérieur (entre 84 et 87 %) ; elle est inférieure pour le préscolaire (68 %), l’EFTP (60 %) et l’alphabétisation (72 %). II.2. Les dépenses publiques de fonctionnement Il est ici question de distinguer les dépenses de fonctionnement par nature (administratives et pédagogiques, sociales et subventions) et par niveau d’enseignement. À partir de l’exécution budgétaire de 2010, il a été possible de distinguer ces dépenses et de les répartir en fonction de chaque niveau d’enseignement comme suit : - les dépenses administratives et pédagogiques ont été réparties par niveau d’enseignement lorsque celuici est connu et lorsque celui-ci n’est pas connu (dépense transversale ou pour plusieurs niveaux d’enseignement) au prorata de la masse salariale du personnel relative à chaque niveau d’enseignement ; - les dépenses sociales : il a été possible de distinguer deux types de dépenses sociales, celles concernant l’achat de nourriture qui correspond aux dépenses d’alimentation de l’école normale de Bolama et sont donc rattachées aux écoles normales (formation initiale des maîtres pour l’enseignement de base), et celles concernant les bourses d’études pour les étudiants qui poursuivent leurs études supérieures à l’étranger, l’alimentation et celle des transferts concernant les bourses accordées uniquement aux étudiants pour l’étranger. Les dépenses d’alimentation concernent uniquement l’école normale de Bolama et sont donc rattachées aux écoles normales (formation initiale des maîtres pour l’enseignement de base) ; - les subventions accordées à différentes structures (transferts) concernant la faculté de droit ont été rattachées à l’enseignement supérieur et celles concernant la recherche scientifique ont été rattachées à la recherche scientifique. 3 Tout d’abord, du point de vue de la ventilation sous-sectorielle, on constate que la majeure partie des dépenses courantes sert à financer les enseignements de base et secondaire (55,2 % pour l’enseignement de base et 32,7 % pour l’enseignement secondaire, soit un total de 88 %). L’enseignement de base occupe donc une place prioritaire au niveau de l’éducation en Guinée-Bissau puisque plus de la moitié des dépenses sont accordées à ce sous-secteur, ce qui entre en cohérence avec le cadre indicatif de l’initiative Fast Track26. Du point de vue de la répartition des dépenses par nature, la majeure partie des dépenses est absorbée par les salaires (93,4 %). Le second poste de dépenses concerne les dépenses administratives et pédagogiques qui représentent 5,8 % des dépenses courantes en 2010. Les bourses, quant à elles, représentent 0,6 % des dépenses courantes du secteur. 26 Le cadre Fast Track indique que 50 % des dépenses courantes d’éducation devraient aller à l’enseignement de base. Les aspects financiers La répartition des dépenses de fonctionnement par nature et par sous-secteur pour l’année 2010 est présentée dans le tableau 3.8. À noter que la régularisation salariale de 2009 opérée sur le budget de 2010 n’est pas prise en compte dans ce tableau et dans les analyses qui vont suivre afin de ne pas fausser les dépenses réelles pour le système éducatif en 2010. Ce tableau peut être commenté de deux manières, soit par nature de dépenses, soit par sous-secteur. 85 Tableau 3.8 : Répartition des dépenses publiques courantes par nature et par sous-secteur, année 2006 (en milliers de francs CFA) GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Dépenses Masse administratives et salariale pédagogiques 86 Dépenses sociales Subventions Alimentation Bourses Total Répartition par soussecteur Enseignement préscolaire 43 564 2 522 0 0 0 46 085 0,9 % Enseignement de base 2 723 224 165 988 0 0 0 2 889 212 55,2 % Enseignement secondaire 1 613 203 96 108 0 0 0 1 709 311 32,7 % EFTP 124 481 7 438 0 0 0 131 919 2,5 % Enseignement supérieur 223 025 22 504 2 909 0 0 248 437 4,7 % Enseignement supérieur à l’étranger 0 0 0 0 30 847 30 847 0,6 % Recherche scientifique 24 133 0 2 510 0 0 26 644 0,5 % Écoles normales 61 771 5 239 0 3 341 0 70 350 1,3 % École normale Supérieure 47 599 2 755 0 0 0 50 354 1,0 % Alphabétisation 26 098 1 511 0 0 0 27 609 0,5 % 4 887 097 304 065 5 419 3 341 30 847 5 230 769 100,0 % 93,4 % 5,8 % 0,1 % 0,1 % 0,6 % 100,0 % TOTAL Répartition par nature de dépenses Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/10 du GIPASE – Ministère de l’éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des sports, et calcul des auteurs. Il est possible de faire des comparaisons avec d’autres pays de la sous-région à niveau de richesse comparable concernant la répartition intra-sectorielle des dépenses courantes. On peut également faire une comparaison temporelle dans la mesure où nous disposons également de cette répartition pour la GuinéeBissau pour l’année 2006. Le tableau 3.9 qui suit présente ces comparaisons. Concernant spécifiquement la comparaison temporelle dans la répartition intra-sectorielle des dépenses courantes publiques d’éducation, on se rend compte qu’entre 2006 et 2010, la part allouée à l’enseignement secondaire a augmenté au profit de la part allouée à l’enseignement supérieur. En effet, dans le chapitre 2, nous avons vu que les effectifs de l’enseignement secondaire ont cru fortement au cours des dernières années. Parallèlement, les bourses accordées aux étudiants allant faire leurs études à l’étranger ont fortement diminué au cours de la même période, expliquant aussi la diminution de la part allouée à l’enseignement supérieur. Pour la comparaison avec les autres pays à niveau de richesse comparable (PIB/habitant entre 300 et 700 dollars USD), la Guinée-Bissau alloue une part nettement plus importante à l’enseignement de base ainsi qu’à l’enseignement secondaire et l’EFTP que la moyenne des pays comparateurs. En revanche, on constate que la part allouée à l’enseignement supérieur est la plus faible de l’ensemble des pays, notamment en raison d’un enseignement supérieur essentiellement privé et embryonnaire. Tableau 3.9 : Comparaison internationale de la répartition intra-sectorielle des dépenses courantes publiques en éducation % secondaire % EFTP % supérieur et recherche scientifique* % autres niveaux Guinée-Bissau (2010) 55,2 32,7 2,5 6,8 2,8 Guinée-Bissau (2006) 56,7 24,3 2,6 12,3 4,1 Burkina Faso (2006) 56,3 14,6 2,6 22,4 4,1 République centrafricaine (2008) 54,5 24,0 1,3 17,4 2,8 Tchad (2004) 46,7 23,7 1,6 19,0 9,0 Érythrée (2006) 53,9 17,7 22,2 6,2 Éthiopie (2007) 50,9 7,9 27,8 13,4 Gambie (2009) 51,0 34,0 2,6 8,6 3,8 Ghana (2007) 32,5 33,5 1,1 20,8 12,1 Guinée (2005) 37,5 25,9 Madagascar (2008) 52,3 Mali (2008) 36,5 29,6 Niger (2008) 60,2 20,2 4,9 26,4 5,3 18,0 6,4 9,9 17,6 6,4 3,4 10,3 5,9 23,3 Rwanda (2008) 48,5 23,9 26,7 0,9 Togo (2008) 38,1 33,7 20,3 7,8 Ouganda (2009) 59,7 22,5 14,9 2,9 République-Unie de Tanzanie (2009) 44,2 26,9 8,3 Moyenne des 15 pays comparateurs 48,2 20,0 6,4 Notes : 13,5 7,0 25,5 * avec ENS et enseignement supérieur à l’étranger Source : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). On peut aussi analyser la structuration des dépenses courantes (cf. tableau 3.10) en distinguant les salaires des enseignants « craie en main » des autres dépenses27, dont on suppose qu’elles contribuent à appuyer l’acte pédagogique. Ainsi la part des dépenses courantes hors salaires enseignant fluctue de 15,5 % à l’ENS à 43,2 % au niveau de l’enseignement et la formation technique et professionnelle. Pour ce qui est de l’enseignement de base, cette part est de 19,6 %. 27 Salaires des non enseignants et ensemble des dépenses non salariales. 3 Les aspects financiers % Enseignement de base 87 Il faut noter que la plupart des dépenses hors salaires enseignants sont également des dépenses salariales (non enseignantes), laissant peu de marges pour les autres dépenses (seulement 5,7 % pour l’enseignement de base et 5,6 % pour l’enseignement secondaire). Le cadre indicatif Fast-Track préconise 33 % des dépenses hors salaires enseignants pour l’enseignement de base. La Guinée-Bissau est donc éloignée de cette référence. Le graphique 3.1 permet de comparer la valeur de la Guinée-Bissau en 2010 avec celle de 2006 mais également avec d’autres pays à niveau de richesse comparable. Tableau 3.10 : Structuration des dépenses courantes publiques d’enseignement, année 2010 Masses salariales Dépenses non salariales Personnels Personnels GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Admin. et Enseignants non-enseipédago. «craie en gnants main» 88 Sociales Sub. % des % dépenses dépenses hors hors salaires salaires enseignant (1) (2) (3) (4) (5) (3)+(4)+(5) (2)+(3)+(4)+(5) Préscolaire 63,9 % 30,6 % 5,5 % 0,0 % 0,0 % 5,5 % 36,1 % EB 80,4 % 13,9 % 5,7 % 0,0 % 0,0 % 5,7 % 19,6 % ES 79,4 % 15,0 % 5,6 % 0,0 % 0,0 % 5,6 % 20,6 % EFTP 56,8 % 37,6 % 5,6 % 0,0 % 0,0 % 5,6 % 43,2 % Supérieur (hors recherche scientifique) 67,9 % 12,0 % 8,1 % 11,0 % 1,0 % 20,1 % 32,1 % Écoles Normales 76,8 % 11,0 % 7,4 % 4,7 % 0,0 % 12,2 % 23,2 % ENS 84,5 % 10,0 % 5,5 % 0,0 % 0,0 % 5,5 % 15,5 % Alphabétisation 67,6 % 26,9 % 5,5 % 0,0 % 0,0 % 5,5 % 32,4 % Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/10 du GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports, et calcul des auteurs. Graphique 3.1 : Comparaison internationale de la part des dépenses hors salaires enseignant à l’enseignement de base 60,0 Moyenne des 10 pays comparateurs : 32,8% 50,0 40,0 30,0 20,0 10,0 RCA (2008) Rwanda (2008) Madagascar (2008) Mali (2008) Guinée (2008) Gambie (2009) Guinée-Bissau (2006) Niger (2008) Togo (2007) Burkina Faso (2007) Ghana (2007) Guinée-Bisseau (2010) 0,0 Source : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). Par rapport aux pays comparateurs, la part des dépenses hors salaires enseignants à l’enseignement de base est la plus faible en Guinée-Bissau. Cette part varie de 19,6 % en Guinée-Bissau (valeur de 2010) à 51,2 % en République centrafricaine et la moyenne des pays comparateurs se situe à 32,8 %, à un niveau proche de la valeur du cadre indicatif Fast Track (33 %). Si on regarde la situation de la Guinée-Bissau par rapport à 2006, on se rend compte que cette valeur a diminué puisqu’elle était, cette année-là, de 25,3 %. 3 Dans cette section, nous abordons la mesure des dépenses unitaires publiques de formation par niveau d’enseignement. Ces dépenses sont exprimées, d’une part, en francs CFA, et d’autre part, en unités de PIB/ habitant28, ce qui offre l’avantage de pouvoir mener des comparaisons internationales. III.1. Estimation des dépenses unitaires publiques moyennes par niveau d’enseignement La mise en relation pour chaque niveau d’enseignement des dépenses courantes publiques effectives avec le nombre d’élèves scolarisés dans les structures d’enseignement publiques nous permet d’approcher la dépense unitaire publique. À noter que dans le cas de la Guinée-Bissau, étant donné qu’il y a eu des 28 Dans le chapitre 1, le PIB/habitant est évalué à 268 722 francs CFA pour l’année 2010. Les aspects financiers III. Les dépenses unitaires publiques de scolarisation 89 régularisations de salaires de 2009 en 2010, l’estimation des dépenses unitaires publiques est faite, comme dans la section 2, uniquement sur les dépenses relatives à 2010 (hors régularisation des salaires de 2009). Les résultats sont présentés dans le tableau 3.11. Tableau 3.11 : Estimation des dépenses unitaires publiques, année 2010 Préscolaire EB ES EFTP Supérieur Écoles normales ENS Dépenses courantes réelles en 2010 (sans les régularisations salariales de 2009) (en millions de francs CFA) 46,1 2 889,2 1709,3 131,9 248,4 70,4 50,4 Nombre d’élèves du public 1 548 200 234 64 053 402 1 183 715 1541 en francs CFA 29 771 14 429 26 686 328 157 210 006 98 392 32 676 En % du PIB/Habitant 11,1 % 5,4 % 9,9 % 122,1 % 78,2 % 36,6 % 12,2 % 2,1 1,0 1,8 22,7 14,6 6,8 2,3 Dépense unitaire en 2010 Indice primaire = 1 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009-10 du GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, de la Science, de la Jeunesse et des Sports et calcul des auteurs. La dépense unitaire publique s’échelonne de 14 429 francs CFA au niveau de l’enseignement de base à 328 157 francs CFA au niveau de l’enseignement et la formation technique et professionnel. Cette structure appelle d’ores et déjà plusieurs remarques : yy dans l’enseignement général, on s’aperçoit que la dépenses unitaire publique au préscolaire et à l’enseignement secondaire est quasiment 2,1 fois plus élevée que celle de l’enseignement de base ; le coût de l’enseignement de base (5,4 % du PIB/habitant) est relativement faible, tout comme l’enseignement secondaire (9,9 % du PIB/habitant) ; yy au niveau de l’enseignement et la formation technique et professionnel, on se situe sur une fourchette plus élevée (122,1 % du PIB/habitant), conséquence du faible niveau de développement de ce cycle d’enseignement et d’un rapport élèves par enseignant plus faible ; yy au niveau de l’enseignement supérieur, le coût est relativement faible (78,2 % du PIB mais 14,6 fois plus élevé que l’enseignement de base) mais les facultés publiques disposent d’autres sources de financement privées ; yy le coût des écoles normales amène, quant à lui, des interrogations dans la mesure où il est 3 fois plus élevé que celui des ENS. Des éléments de comparaison internationale nous permettent de mieux apprécier cette structure, au regard des situations qui prévalent dans d’autres pays. 90 III.2. Comparaison internationale des dépenses unitaires publiques par niveau d’enseignement Le tableau 3.12 nous permet de comparer la structure des dépenses unitaires en Guinée-Bissau avec celles d’un certain nombre de pays comparateurs (ayant un niveau de richesse proche). Tableau 3.12 : Comparaison internationale des dépenses unitaires publiques en % du PIB/ habitant par niveau d’enseignement Secondaire EFTP Supérieur* Guinée-Bissau (2010) 5,4 9,9 122,1 40,8 Burkina Faso (2006) 16,6 26,4 180,7 215,2 République centrafricaine (2007) 6,4 18,9 51,1 93,9 Gambie (2009) 8,8 12,2 16,0 91,2 Ghana (2007) 17,8 39,8 42,7 297,8 Madagascar (2006) 9,3 26,6 74,2 186,4 Mali (2008) 10,9 27,1 191,3 130,6 Niger (2008) 21,6 51,5 612,0 402,0 Rwanda (2008) 7,1 41,4 nd 402,7 Togo (2007) 11,4 24,3 190,8 137,9 République-Unie de Tanzanie (2009) 9,3 20,1 236,7 411,0 Moyenne des 10 pays comparateurs 11,9 28,8 177,3 236,9 Notes : * y compris ENS Source : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). Ainsi, au regard de ce qui est observé dans les autres pays comparables, on constate que toutes les dépenses unitaires publiques de formation exprimées en % de PIB/habitant sont plus faibles en GuinéeBissau qu’aux moyennes de l’ensemble des pays comparateurs. Le coût de l’enseignement de base pour l’État en Guinée-Bissau est deux fois inférieur à la moyenne des pays comparateurs, celui de l’enseignement secondaire quasiment trois fois inférieur, et celui de l’enseignement supérieur plus de cinq fois inférieur. De plus, la Guinée-Bissau présente les coûts unitaires les plus faibles pour ces trois ordres d’enseignement par rapport à l’ensemble des pays comparateurs. Concernant l’EFTP, si le coût unitaire public est plus faible que la moyenne des pays comparateurs, la Guinée-Bissau ne présente pas le coût unitaire le plus bas par rapport aux autres pays considérés. 3 Les aspects financiers Enseignement de base 91 IV. Analyse des facteurs qui influencent les dépenses unitaires de scolarisation Dans la section précédente, la dépense unitaire était calculée de façon directe, en faisant le rapport de la somme des dépenses courantes constatées au cours de l’exercice budgétaire 2010 (sans les régularisations de salaires de 2009 opérées en 2010) pour un niveau d’éducation donné et en tenant compte du nombre d’élèves scolarisés à ce niveau. Nous abordons ici l’estimation de la dépense unitaire publique en partant des conditions d’enseignement et des ressources mobilisées en moyenne et en utilisant une relation du type de celle présentée dans l’encadré 3.1. Encadré 3.1 : décomposition micro de la dépense unitaire Pour l’analyse micro de la dépense unitaire de scolarisation à un niveau donné, il est commode d’utiliser une formule de décomposition de la dépense unitaire telle que la suivante : GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF DU = SE/REM + SNE/RENE + FONCU + SOCU + ADMU 92 Dans cette expression, DU représente la dépense unitaire, SE le salaire moyen des enseignants, REM le rapport élèves maîtres, SNE le salaire moyen des non enseignants, RENE le rapport entre le nombre des élèves et des non enseignants, FONCU les dépenses moyennes en biens et services et transferts aux établissements par élève, SOCU les dépenses sociales moyennes par élève et ADMU le niveau moyen des dépenses d’administration (salaires des personnels des services hors établissements scolaires et le fonctionnement courant de ces services) également par élève. IV.1. L’encadrement des élèves Pour ce qui est de l’encadrement des élèves, une référence normative est non seulement que l’on souhaite que les élèves et les enseignants aient des conditions de travail aussi favorables que possible, mais aussi que le plus grand nombre d’enfants puissent être scolarisés. Pour un budget donné, ces deux termes sont contradictoires car plus la taille moyenne des classes est réduite, plus, mécaniquement, la couverture scolaire est réduite. La recherche d’un compromis de situation est alors incontournable. Pour baliser ce consensus, deux pistes sont possibles : la première consiste à examiner l’impact du nombre d’élèves par classe sur le niveau général des apprentissages ; la seconde consiste une fois de plus à situer la GuinéeBissau dans une perspective comparative internationale. En ce qui concerne la relation entre le nombre moyen d’élèves par enseignant et les apprentissages des élèves, une idée courante, est qu’un nombre raisonnable d’élèves dans la classe serait favorable aux acquisitions. Cette idée est juste si l’on considère des conditions extrêmes : par exemple, 100 élèves dans une même classe constituent bien évidemment un environnement moins favorable que lorsqu’il n’y a que 20 élèves. Mais mises à part ces conditions extrêmes, l’argument n’est pas validé sur le plan empirique. Les résultats des études réalisées dans un certain nombre de pays africains29, montrent qu’il y a globalement peu de différences en matière d’apprentissage des élèves selon qu’ils soient 30 ou 50 en classe (toutes choses égales par ailleurs). Au niveau de l’enseignement de base, le rapport élève-maitre moyen africain s’établit à 43 en 2008, avec une étendue allant de 14 à 104 (Pôle de Dakar – UNESCO/BREDA). Avec 52 élèves par maitre dans l’enseignement public, la Guinée-Bissau se situe au-delà de la moyenne continentale, et de la valeur indicative de l’initiative Fast Track (40). Cependant, compte tenu de la diversité des pays africains, tant du point de vue économique que de celui du développement de leur système éducatif, il devient nécessaire de pouvoir comparer la situation de la Guinée-Bissau à celles de pays se trouvant dans une situation similaire. On peut également situer la Guinée-Bissau dans le temps. Le tableau 3.14 montre que la Guinée-Bissau, en 2010, est à un niveau de rapport élèves-maître plus bas que la moyenne de l’ensemble des 15 pays pris comme comparateurs (moyenne de 55). Toutefois, dans le temps, on s’aperçoit que le rapport élèves-maître s’est dégradé en Guinée-Bissau puisqu’en 2006, celui-ci était de 48. Graphique 3.2 : Comparaison internationale des rapports élèves-enseignant dans l’enseignement de base public Moyenne des 15 pays 110 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Source : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). 3 Les aspects financiers RCA (2009) Togo (2007) Rwanda (2008) Mozambique (2008) ouganda (2008) Tanzanie (2009) Mali (2008) Guinée-Bissau (2010) Burkina Faso (2009) Madagascar (2008) Erythrée (2008) Guinée-Bissau (2006) Guinée (2008) Sierra Leone (2007) Gambie (2009) Niger (2009) Ghana (2008) comparateurs : 55 élèves par maître 93 29 Les études menées par le Programme d’Analyse des Systèmes Éducatifs de la CONFEMEN (PASEC) notamment. IV.2. La rémunération des enseignants dans le système éducatif bissauguinéen La question ayant trait au statut et au niveau de rémunération est importante dans la mesure où l’on souhaite recruter des enseignants de qualité en nombre suffisant pour le développement du système. Il importe de recruter des enseignants d’un niveau académique suffisant, et de leur proposer des conditions statutaires et salariales intéressantes pour les attirer en nombre suffisant et les maintenir en poste, tout en restant dans le cadre de ressources budgétaires limitées. Le tableau 3.13 présente le niveau de rémunération des enseignants, pour chaque niveau d’enseignement, en fonction de leur statut pour l’année 2010. On se rend compte que plus le niveau d’enseignement est élevé, plus la rémunération est importante. En effet, les enseignants de l’enseignement secondaire (rémunération moyenne de 3,4 PIB/habitant) sont mieux rémunérés que leurs homologues de l’enseignement de base (rémunération moyenne de 2,3 PIB/habitant), ce qui peut paraitre normal étant donné le niveau de qualification plus important requis pour ce niveau d’enseignement. Tableau 3.13 : Répartition du niveau de rémunération des enseignants à la craie par statut pour les enseignements de base et secondaire, année 2010 Effectif % de la Masse salariale catégorie dans de 2010 (milliers le total FCFA) Salaire moyen annuel en 2010 en PIB/hab. en FCFA GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Enseignement de base Fonctionnaires 2 577 68,0 % 1 819 067 2,6 705 886 Contractuels 1 210 32,0 % 503 465 1,5 416 087 Total 3 787 100,0 % 2 322 533 2,3 613 291 1 054 70,8 % 1 164 724 4,1 1 105 051 434 29,2 % 192 824 1,7 444 294 1 488 100,0 % 1 357 547 3,4 912 330 Enseignement secondaire Fonctionnaires Contractuels Total Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/10 du GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la Culture, des Sciences, de la Jeunesse et des Sports, et calcul des auteurs. On s’aperçoit également que les enseignants contractuels sont moins rémunérés que les enseignants fonctionnaires, et ce, quel que soit le niveau d’enseignement. 94 Ce qu’il faut noter, en revanche, c’est que la rémunération moyenne d’un enseignant de l’enseignement de base qui est de 2,3 PIB/habitant est nettement en dessous de la valeur du cadre indicatif Fast Track qui préconise 3,5 PIB/habitant. Il est donc nécessaire de comparer les rémunérations des enseignants en Guinée-Bissau avec ceux de pays à niveau de richesse comparable. IV.3. Comparaison du statut et du niveau de rémunération des enseignants IV.3.1. Comparaison internationale Concernant ces éléments de rémunération des enseignants, nous disposons de plusieurs éléments d’appréciation, sous l’angle de la comparaison internationale. Le graphique 3.3 présente la situation de la Guinée-Bissau pour l’enseignement de base par rapport à des pays africains similaires en termes de richesse (PIB/habitant compris entre 300 et 700 dollars USD). Les enseignants Bissau-guinéens ont, en valeur relative, des niveaux de salaires moins importants que la moyenne des pays retenus. En effet, un enseignant touche en moyenne 2,3 fois le PIB/habitant, contre 4,4 en moyenne dans les pays considérés. La Guinée-Bissau présente même la valeur la plus faible puisque les salaires à l’enseignement de base vont de 2,3 fois le PIB/habitant en Guinée-Bissau à 6,6 fois le PIB/ habitant au Niger. Par ailleurs, la rémunération moyenne en Guinée-Bissau est en dessous de la valeur du cadre indicatif Fast Track (3,5 unités de PIB/habitant). La Guinée-Bissau se situe également en dessous de la moyenne observée au niveau du continent africain, qui s’établit à 4 fois le PIB/habitant, avec une étendue allant de 0,9 (au Congo) à 7,6 (au Burundi)30. Au niveau de l’enseignement secondaire, l’information sur les niveaux de rémunération des enseignants est également disponible pour neuf pays africains dont le PIB/habitant est compris entre 300 et 700 dollars USD31. Sur ces pays, la moyenne s’établit à 7,6 fois le PIB/habitant. Avec un salaire moyen de 3,4 PIB/ habitant, la Guinée-Bissau se situe une fois de plus nettement en dessous de la moyenne observée dans les pays à niveau de richesse comparable. Graphique 3.4 : Comparaison internationale du niveau de rémunération moyen pour les enseignants de l’enseignement de base 3 Moyenne des 10 pays comparateurs : 7,0 4,4 PIB/habitant 6,0 5,0 4,0 3,0 2,0 Niger (2008) Tanzanie (2009) Togo (2007) Burkina Faso (2006) Ghana (2007) Mali (2008) Madagascar (2006) RCA (2008) Rwanda (2008) Gambie (2009) Guinée-Bissau (2010) 0,0 Source : Pôle de Dakar – UNESCO/BREDA. 30 Cette étendue est basée sur l’ensemble des pays africains pour lesquels l’information est disponible, pouvant donc être de niveau de développement différent. 31 Ce sont les mêmes pays que pour la rémunération des enseignants de l’enseignement de base à savoir le Burkina Faso (2006), le Mali (2004), la RCA (2005), la Guinée (2003), le Burundi (2004) et le Niger (2003). Les aspects financiers 1,0 95 IV.3.2. Comparaison nationale On sait qu’il sera nécessaire de recruter, au cours des prochaines années, un nombre substantiel de nouveaux enseignants. Cela est rendu nécessaire par i) les conditions actuelles d’encadrement insuffisantes et, ii) le nombre d’enfants s’inscrivant à l’école que l’on espère rapidement croissant, compte tenu de l’objectif de scolarisation primaire universelle. Il s’agit donc de s’assurer qu’il existe un vivier potentiel suffisant de candidats qui ont les qualifications académiques requises. L’analyse des données de l’enquête bissau-guinéenne de 2002 auprès de ménages (ILAP), même si elle est un peu ancienne, est instructive à cet égard, car elle permet d’aborder des aspects liés au marché national de l’emploi et à quelques-unes de ses caractéristiques en termes d’emploi occupé. Le tableau 3.14 renseigne ces différents points sur la population des 25-35 ans. Tableau 3.14 : La situation d’emploi des individus de 25 à 35 ans selon le niveau d’études atteint, année 2002 Secteurs d’activités Total 0-6 7-9 10-11 >11 Sans emploi/inactif 48 064 7 299 5 084 214 60 661 Secteur privé 92 363 7 975 4 511 462 105 311 322 0 259 0 1 503 1 652 2 077 771 0 47 89 133 141 930 16 926 11 672 1 447 dont éducation Secteur public dont éducation GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Nombre d’années d’études 6 003 171 975 Source : Estimations basées sur l’enquête bissau-guinéenne ILAP 2002. En ce qui concerne la situation dans l’emploi, on constate qu’il existe une forte proportion d’individus ayant 7 à 11 années d’études – du niveau 7ème année au niveau 11ème année - qui n’exercent aucune activité. Si l’on considère les individus ayant 10 à 11 années d’études, on observe que 44 % d’entre eux n’exercent aucune activité et présentent donc un vivier intéressant en termes de recrutement d’enseignants (le recrutement pour entrer à l’école normale se fait à partir de la 9ème année d’études et à la 11ème année d’études pour l’entrée à l’école normale supérieure). On compte 5 084 individus ayant 10 à 11 ans d’années d’études et étant sans emploi. Par ailleurs, plus de la moitié (53 %) des 25-35 ans ayant plus de 11 années d’études (enseignement supérieur) exercent dans le secteur public et 15 % n’occupent aucun emploi. Enfin, on note qu’il n’y a pas d’individus de 25 à 35 ans travaillant dans le secteur de l’éducation publique qui ont moins de sept années d’études. En revanche, on note que la majorité des individus de 25 à 35 ans travaillant dans le secteur de l’éducation publique (49 %) ont un niveau d’études supérieur à 11 ans (enseignement supérieur) alors qu’ils ne sont pas présents dans le secteur de l’éducation privée. IV.4. Quelques éléments de réflexion pour la politique éducative future 96 La question enseignante s’avère cruciale en Guinée-Bissau dans la mesure où l’objectif de scolarisation primaire universelle, sur lequel s’est engagé le pays, ne pourra être atteint sans un recrutement massif d’enseignants. Cette problématique doit être envisagée en tenant compte du fait que le maintien des conditions actuelles d’encadrement est un strict minimum acceptable, qu’il serait souhaitable de dépasser pour proposer une amélioration de la qualité des services éducatifs. De plus, comme le montre le chapitre 2 du présent document, le pays présente un retard important en matière d’achèvement de l’enseignement de base (62 % de taux d’achèvement en 2010) sur l’objectif de scolarisation primaire universelle fixée à 2015 : des recrutements massifs sont donc à prévoir d’ici 2015 ou 202032 afin de pouvoir assurer un niveau d’achèvement de 100 %33. La politique éducative ne pourra donc faire l’économie d’une réelle réflexion, au niveau national, sur les statuts des personnels, impliquant l’ensemble des acteurs du système et en particulier les syndicats d’enseignants. IV.4.1. Reconstitution des dépenses unitaires publiques de scolarisation par niveau d’enseignement Après avoir examiné l’encadrement des élèves ainsi que le statut et la rémunération des enseignants qui sont en eux-mêmes des aspects très importants de la politique éducative, nous pouvons maintenant revenir à la question de la reconstitution globale des dépenses unitaires publiques en intégrant l’influence des autres facteurs. Le tableau 3.15 propose cette décomposition. On retrouve bien le niveau de dépense unitaire tel qu’il a été évalué précédemment de façon macro, dans laquelle on se contentait de rapporter la dépense publique budgétaire globale aux effectifs scolarisés. Cette décomposition permet d’appréhender l’importance des différents facteurs dans la détermination des dépenses unitaires de scolarisation, sachant qu’il est sans doute utile de rappeler l’existence de la relation structurelle fondamentale qui lie i) la dépense agrégée (DA), ii) la dépense unitaire (DU) et iii) le nombre des enfants qui sont scolarisés (NES). Cette relation porte aussi en filigrane la couverture scolaire dans la comparaison de NES avec NEP, le nombre des enfants d’âge scolaire dans la population : DA = DU x NES 3 Les aspects financiers Si, par exemple, on souhaite que NES soit égal à NEP au niveau de l’enseignement de base, la relation s’écrit alors DAP = DU x NEP et l’on peut en déduire le coût global de l’objectif de scolarisation primaire universelle. 32 On peut, en effet, penser qu’il sera très difficile pour un pays post-conflit comme la Guinée-Bissau d’atteindre un achèvement de 100 % au niveau de l’enseignement de base d’ici 2015 et qu’il est possible que cet objectif soit repoussé en 2020 comme cela a été le cas pour d’autres pays (exemple : la RCA). 33 Plus de 450 enseignants en moyenne à recruter par an pour l’enseignement de base 1er et 2nd cycle (6 premières années d’études) d’ici 2020. 97 Tableau 3.15 : Reconstitution des dépenses unitaires publiques (en francs CFA) par niveau d’enseignement, année 2010 Enseignement de base Enseignement secondaire 613 291 912 330 52,9 43,0 11 599 21 194 Dépense unitaire non-enseignants 2 001 3 991 Dépense unitaire totale personnel 13 600 25 185 829 1 500 0 0 829 1 500 14 429 26 686 Enseignants Salaire moyen des enseignants Rapport élèves-enseignants Dépense unitaire enseignants Autres personnels Dépense unitaire administrative et pédagogique Dépense unitaire sociale Dépense unitaire totale hors salaires Dépense Unitaire Totale GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Sources : Direction Générale du Budget – Ministère des Finances, Solde 2010 – Ministère des Finances, base de données du personnel 2009/10 du GIPASE – Ministère de l’Éducation nationale, de la culture, des sciences, de la jeunesse et des sports, calcul des auteurs. 98 V. Mise en perspective de la situation bissau-guinéenne avec le cadre indicatif de l’initiative Fast Track Au regard des informations quantitatives apportées par les trois premiers chapitres du présent document, il peut être utile de s’arrêter sur la situation actuelle du pays vis-à-vis de l’objectif de scolarisation primaire universelle de 2015. Cela s’avère d’autant plus nécessaire avec la mise en place du fonds catalytique de l’initiative Fast Track, pour lequel la Guinée-Bissau peut déposer une requête pour obtenir un financement additionnel. Le tableau 3.16 propose cette mise en perspective. Tableau 3.16 : Situation de l’éducation de base en 2006 par au cadre indicatif de l’initiative Fast Track Cadre indicatif Valeur 2006 Observations 14 - 18 11 Entre 9 et 11 % au cours des 3 dernières années (2008-2010) Dépenses publiques courantes d’éducation (en % des dépenses courantes discrétionnaires) 20 11 Arbitrages inter sectoriels défavorables à l’éducation. Dépenses publiques courantes pour l’enseignement de base (en % des dépenses courantes d’éducation) 50 55 Arbitrages intra sectorielle favorable à l’enseignement de base. Mobilisation de ressources Revenu domestique en % du PIB Indicateurs de flux % du groupe d’âge entrant en 1ère année 100 164 Taux supérieur à 100 % en 2010 mais effet multi cohortes. Probabilité d’accès à l’école en 2006 : 76 % % du groupe d’âge atteignant la 6ème année de l’enseignement de base 100 62 Dynamique actuelle insuffisante pour aller vers 100 % d’ici 2015 % de redoublants 10 14 % de redoublants trop élevé en 2006 40 53 Indicateurs de production des services éducatifs Salaire moyen des enseignants actuels 3,5 2,3 Moyenne salariale en-dessous du cadre indicatif (1,5 pour les contractuels, moyenne de 2,6 pour les fonctionnaires) Autres dépenses courantes hors salaire enseignant (en % des dépenses courantes totales) 33 20 Et 6 % autres dépenses hors salaires (enseignants et personnels administratifs) 11 % d’élèves scolarisés dans le public : 69 %, le reste (20 %) essentiellement scolarisés dans les écoles communautaires et les madrasas % d’élèves scolarisés au privé Nombre d’heures annuelles d’instruction 10 850 - 1000 Coût de construction d’une salle de classe équipée 8 000 - Source : Secrétariat FTI et calcul des auteurs. Sur le plan économique, avec un taux de pression fiscale de 11 % en 2010, la Guinée-Bissau se situe en dessous de la fourchette indicative du cadre de l’initiative Fast Track. La priorité accordée au secteur de l’éducation au vue des arbitrages intersectoriels est relativement faible en 2010 : seulement 11 % des dépenses courantes d’éducation sur l’ensemble des dépenses courantes discrétionnaires de l’État. Pour ce qui est des arbitrages intra-sectoriel, l’enseignement de base tient une place prioritaire avec 55 % des dépenses courantes d’éducation. 3 Les aspects financiers Rapport élèves maîtres dans le public 99 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Le chapitre 2 montre que les résultats en termes de couverture scolaire sont relativement faibles. En effet, l’accès à l’enseignement de base n’est pas encore universel malgré un taux d’accès de 164 % (en raison d’un effet multi cohortes, la probabilité d’accès en 2006 n’étant que de 76 %) et chemin à parcourir pour atteindre 100 % d’achèvement de l’enseignement de base reste long : 62 % en 2010. Enfin, concernant la question du redoublement, la Guinée-Bissau présente une proportion de redoublants encore trop élevée en 2010 (14 %). 100 Principaux enseignements du chapitre 3 : Les aspects financiers Ce chapitre examine l’évolution des ressources mobilisées pour le système éducatif, leur distribution par niveau d’enseignement et par nature pour l’année 2010 en ciblant particulièrement les finances publiques. Il s’intéresse également à l’évaluation des dépenses des ménages du préscolaire à l’enseignement secondaire et aux dépenses privées pour l’enseignement supérieur. Les analyses ont permis de déterminer les rémunérations moyennes des enseignants et des non-enseignants ainsi que la dépense publique par élève pour chaque niveau d’enseignement du secteur public. 1. Un arbitrage intersectoriel défavorable à l’éducation malgré une forte augmentation des dépenses courantes et un arbitrage intra-sectoriel favorable à l’enseignement de base Les dépenses courantes d’éducation ont fortement augmenté entre 1998 et 2010 puisqu’elles sont passées de 1,939 à 5,615 milliards de francs CFA de 2010. Toutefois, la part des dépenses courantes d’éducation dans les dépenses courantes totales hors dette de l’État est encore trop faible avec seulement 11 % pour l’année 2010 (contre 20 % requis par l’Initiative Fast Track). L’analyse intra-sectorielle montre que la Guinée-Bissau accorde une priorité à l’enseignement de base puisque 55 % des dépenses courantes d’éducation concernent ce niveau d’enseignement pour l’année 2010. 2. La quasi-totalité des dépenses courantes sont des dépenses salariales laissant peu de marge de manœuvre pour les autres dépenses (administratives, pédagogiques, sociales) La conséquence de la faible part des finances publiques allouée à l’éducation est que la quasitotalité des dépenses courantes d’éducation sont des dépenses salariales : 93 % des dépenses en 2010. Les dépenses des familles, estimées à partir de l’enquête ILAP de 2002, s’élèveraient à 4,4 milliards de francs CFA pour l’année 2010, soit 49 % des dépenses courantes totales pour l’éducation pour cette même année. Les dépenses des familles sont majoritaires au préscolaire (65 %) et au secondaire (62 %) mais sont minoritaires au niveau de l’enseignement de base (34 %), l’État restant le principal financeur (66 %). 4. Des dépenses unitaires par niveau d’enseignement en dessous de la moyenne constatée dans d’autres pays comparables et une rémunération moyenne par enseignant de l’enseignement de base en dessous des autres pays comparables et du cadre indicatif de l’Initiative Fast Track Les dépenses publiques par élèves sont de 14 429 francs CFA pour l’enseignement de base (soit 5,4 % du PIB/habitant), de 26 686 francs CFA pour l’enseignement secondaire (soit 9,9 % du PIB/ habitant), de 328 157 francs CFA pour l’enseignement et la formation technique et professionnelle (soit 122 % du PIB/habitant) et de 109 689 francs CFA pour l’enseignement supérieur (y compris ENS), soit 40,8 % du PIB/habitant, ce qui est en dessous des moyennes constatées dans les autres pays comparables. L’analyse des rémunérations montrent, qu’en moyenne, un enseignant de l’enseignement de base est rémunéré 2,3 fois le PIB/tête, un niveau inférieur aux autres pays comparables ainsi qu’au cadre indicatif de l’Initiative Fast Track. 3 Les aspects financiers 3. Les dépenses des familles représentent presque la moitié des dépenses totales d’éducation 101 Chapitre 4 : La question de l’équité GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Dans l’analyse d’un système scolaire, les considérations en matière d’équité sont importantes en tant qu’aspects descriptifs de ce système, mais aussi et surtout parce qu’on assigne à l’éducation des objectifs en matière d’égalité des chances. On sait que l’éducation constitue un investissement utile pour les individus qui la reçoivent et qu’elle contribue à déterminer leurs conditions économiques et sociales dans leur vie adulte. De plus, on sait que les possibilités scolaires seront toujours limitées par les possibilités de financement et que tous les individus ne pourront avoir les carrières scolaires maximales. Toutefois, le développement économique est lié en partie au niveau moyen d’éducation de la population et il faut donc que l’ensemble de la population atteigne un niveau minimum d’éducation pour espérer pouvoir bénéficier d’un « décollage économique ». Il importe alors que des chances de scolarisation aussi égales que possibles soient offertes à tous les jeunes pour assurer non pas l’égalité mais l’équité interindividuelle. On notera que la recherche de l’équité est en fait convergente avec celle de l’efficacité, car il convient que les individus les plus capables, indépendamment des conditions socio-économiques de leurs parents, soient sélectionnés pour les niveaux les plus élevés du système. Ceci est important dans une perspective de production efficace de services éducatifs et de promotion des élites de la prochaine génération. 102 Ce chapitre se décompose en trois parties : la première partie traite des inégalités dues aux caractéristiques socio-économiques dans la scolarisation, la seconde partie s’intéresse aux inégalités dans la répartition des ressources publiques allouées à l’éducation, enfin, la troisième partie traite spécifiquement les inégalités entre régions. I. Les inégalités dans la scolarisation dues aux caractéristiques socioéconomiques Il est connu que l’accès à l’éducation et que les acquisitions des élèves dépendent dans une certaine mesure des caractéristiques socio-économiques des individus. Pour avoir un premier aperçu des inégalités dans l’accès à l’éducation dues aux caractéristiques socioéconomiques, on peut calculer la distribution des jeunes de 7 à 24 ans (vivant chez au moins l’un de leurs deux parents)34 selon le niveau d’éducation qu’ils ont atteint et selon ces caractéristiques. 34 En se restreignant aux jeunes vivants avec au moins l’un de leurs deux parents, on s’assure de ne pas comptabiliser comme « urbain » un jeune issu de milieu rural mais qui aurait été confié à un autre membre de sa famille vivant en ville pour y poursuivre ses études par exemple. Cette restriction réduit l’échantillon de 11 % : la population de 7 à 24 ans passe de 17 243 à 15 316. On note cependant que cela ne change pas la répartition de cette population selon le milieu de résidence (61 % rural, 39 % urbain), ce qui revient à dire que les jeunes ne vivant pas avec leurs parents ne sont proportionnellement pas plus nombreux dans les ménages urbains que ruraux. Tableau 4.1 : Répartition des individus de 7 à 24 ans selon le niveau atteint et leurs caractéristiques, 2006 Total Non scolarisés EB ESG ESC Supérieur Filles 50 % 57 % 47 % 41 % 39 % 39 % Garçons 50 % 43 % 53 % 59 % 61 % 61 % Rural 61 % 82 % 56 % 20 % 18 % 4% Urbain 39 % 18 % 44 % 80 % 82 % 96 % Q1 17 % 25 % 15 % 5% 3% 4% Q2 19 % 26 % 17 % 6% 4% 0% Q3 20 % 25 % 20 % 10 % 8% 1% Q4 21 % 16 % 24 % 23 % 22 % 12 % Q5 23 % 8% 24 % 58 % 63 % 83 % Genre Milieu de résidence Niveau de vie Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Alors qu’il y a autant de garçons que de filles parmi les 7-24 ans, on constate que les garçons sont majoritaires dans le supérieur (61 % des étudiants). De la même façon, alors que les enfants et jeunes issus de milieu rural sont majoritaires parmi les 7-24 ans (61 %), ils sont largement sous-représentés au niveau secondaire, puisque seuls 20 % des jeunes qui ont atteint l’enseignement secondaire sont issus de milieu rural. De plus 82 % des jeunes de 7 à 24 ans de milieu rural ne sont pas scolarisés. Enfin, concernant le niveau de vie35, si les enfants issus du quintile de vie le plus aisé représentent 23 % des jeunes de 7 à 24 ans, ils sont largement surreprésentés à partir de l’enseignement secondaire et plus de 80 % des étudiants sont issus de ce quintile de niveau de vie. On voit donc que les caractéristiques sociales semblent avoir un impact fort sur les trajectoires scolaires. Il convient d’étudier le phénomène un peu plus en détail. 4 L’étude de la répartition filles-garçons aux différents niveaux du système éducatif montre que, si dans les premières années de scolarité les filles sont aussi nombreuses que les garçons, ce n’est plus le cas dès la fin de l’enseignement de base (cf. graphique 4.1). La question de l’équité I.1 La question du genre 103 35 Les quintiles de niveau de vie étant faits au niveau des ménages, la distribution peut être modifiée lorsqu’on passe au niveau des individus : c’est pourquoi chaque quintile ne représente pas exactement 20 %. Graphique 4.1 : Répartition filles-garçons dans l’EB et dans l’ES en 2005/06 70% 60% 50% 40% garçons 30% filles 20% 10% 0% EBC EBE ESG ESC Source : données GIPASE. Ces résultats sont confirmés par l’étude des profils de rétention différenciés : les filles abandonnent plus que les garçons au cours de l’enseignement de base, puisque leur taux de rétention s’établit à 33 % en 6ème année, contre 47 % pour les garçons. Parmi les enfants qui entrent à l’école, seule une fille sur trois, contre environ un garçon sur deux, atteint la fin de l’enseignement de base. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Graphique 4.2 : profils de rétention selon le genre, à l’EB et à l’ES, 2004/05 – 2005/06 120% 100% 80% 60% 40% 20% 0% 1a 2a 3a garçons 4a 5a 6a filles Source : données GIPASE et calcul des auteurs. 104 On s’aperçoit que si les filles abandonnent plus fortement que les garçons au cours de l’enseignement de base, elles abandonnent dans les mêmes proportions que les garçons à l’enseignement secondaire : le taux de rétention en 11ème année est d’environ 40 % pour les deux sexes. Il apparaît donc que les inégalités de genre se forment dès les premières années de scolarité du fait d’abandons plus fréquents chez les filles que chez les garçons. Ces inégalités se traduisent ensuite par un déséquilibre dans les effectifs en faveur des garçons, déséquilibre qui reste stable par la suite : d’après l’enquête MICS3 2006, 40 % des jeunes ayant atteint le supérieur sont des filles en Guinée-Bissau, une situation meilleure à ce qui est généralement observé. À titre de comparaison, les filles ne représentent que 35 % des étudiants au Mali, 32 % en République centrafricaine et 25 % au Burundi36. Cependant, il est également possible qu’il y ait des disparités liées au genre dans le choix des filières et des différents établissements de l’ETFP et du supérieur. Les données ne suffisent pas à étudier cette question en détail, mais on dispose de quelques éléments. Pour l’EFTP, la part des filles dans les CIFAP est très faible (inférieure à 5 %). Le graphique 4.3 donne un aperçu de la situation dans les établissements du supérieur. Graphique 4.3 : Part des filles dans différents établissements du supérieur 60% 50% 40% 30% 20% 10% EN 17 Fev ENAC ENS TT Univ. Collines de Boé Univ. Amilcar Cabral ENEFD Source : données GIPASE. Les Écoles normales du 17 Février et Amilcar Cabral forment globalement autant d’institutrices que d’instituteurs, même si les filles sont plus nombreuses dans la première et minoritaires dans la seconde. Cet équilibre disparaît au niveau de l’ENS Tchico Tè puisque les femmes ne représentent guère plus de 10 % des effectifs. La féminisation du corps enseignant au secondaire est donc loin d’être acquise. Concernant les deux universités, toutes filières confondues, les filles représentent un tiers des effectifs, c’est-à-dire que les garçons y sont deux fois plus nombreux. Le déséquilibre est particulièrement frappant à l’ENEFD où l’on ne compte que trois filles pour 105 garçons. Il peut s’expliquer en partie par le contenu de la formation (éducation physique) mais cela ne devrait pas empêcher d’encourager les candidatures féminines. Le tableau 4.1 mettait en avant l’existence d’inégalités dans les parcours scolaires dues au milieu de résidence (urbain / rural) et au niveau de vie. Par exemple, 80 % des jeunes ayant achevé l’enseignement de base et atteint l’enseignement secondaire sont issus de zone urbaine et 85 % des individus ayant atteint l’ESC sont issus des 40 % des ménages les plus aisés. La zone de résidence et le niveau de vie semblent donc être des éléments déterminants pour l’éducation des jeunes et constituent des sources d’inégalités. D’autant que ces deux caractéristiques tendent à se recouper, puisque les ménages les plus pauvres vivent en grande majorité en milieu rural et qu’à l’inverse, les ménages les plus riches vivent en milieu urbain. L’idée étant d’isoler, dans la mesure du possible, l’effet de chacun de ces facteurs sur l’éducation, on recourt 36 RESEN Mali 2006, RESEN RCA 2007, RESEN Burundi 2006. 4 La question de l’équité 0% 105 à l’analyse économétrique37 pour estimer, « toutes choses égales par ailleurs », la probabilité d’atteindre différents niveaux du système éducatif selon les différentes caractéristiques. I.2 La zone de résidence Les inégalités liées au milieu de résidence émergent dès l’accès à l’école, puisqu’on estime que les enfants issus de milieu urbain ont 86 % de chances d’entrer à l’école, contre 65 % pour les enfants issus de milieu rural. Cet écart déjà important s’accroît rapidement puisque les jeunes urbains ont quatre fois plus de chances d’achever l’enseignement de base que leurs camarades ruraux. Graphique 4.4 : probabilités estimées d’accéder à différents niveaux selon la zone de résidence, 2005/06 1 0,9 0,8 0,7 0,6 urbain 0,5 rural 0,4 0,3 0,2 0,1 0 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF accès EB achvt EB accès EB achvt EB Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. L’accès à l’enseignement secondaire est réservé à une petite minorité parmi les jeunes ruraux puisque moins d’un sur dix parvient en 7ème année, et un sur vingt en 9ème année, alors que les chances pour les jeunes urbains sont multipliées respectivement par cinq et six. Il existe donc des disparités très importantes entre ceux qui vivent en ville et ceux qui vivent en zone rurale. On s’intéresse également à l’intensité des inégalités de genre selon le milieu de résidence et on note que celles-ci sont plus importantes en milieu rural qu’en milieu urbain. En effet, comme le montre le graphique 4.5, le rapport de probabilités garçons/filles, qui est une mesure des disparités de genre, est plus important en zone rurale. Si, comme on l’a déjà souligné dans le paragraphe précédent, les filles entrent presque autant que les garçons à l’école, elles ont presque deux fois moins de chances d’arriver en 6ème année que les garçons en zone rurale, contre 1,4 en zone urbaine. 106 37 Régressions logistiques à partir des données de l’enquête MICS3 2006. Graphique 4.5 : rapport des probabilités d’accès garçons/filles selon la zone de résidence, 2005/06 2,0 1,8 1,6 1,4 1,2 urbain 0,8 rural 0,6 0,4 0,2 0,0 accès EB achvt EB accès EB achvt EB Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Si l’on observe un accroissement continu des inégalités entre les filles et les garçons urbains au cours de la scolarité, ce constat n’est pas valable pour les jeunes ruraux puisque le rapport des probabilités d’accès garçons/filles stagne voire baisse légèrement à partir de la 6ème année. Les échantillons à ce stade sont trop petits pour véritablement tirer des conclusions, mais on peut avancer une explication. Les jeunes issus de milieu rural ont très peu de chances d’achever l’enseignement de base et d’accéder à l’enseignement secondaire ; on peut donc penser que ceux qui y parviennent, et notamment les filles, présentent des caractéristiques spéciales qui font qu’elles n’abandonnent alors pas plus que les garçons. Troisième volet de l’étude des inégalités dues aux caractéristiques socio-économiques, la question du niveau de vie apparaît généralement comme la plus déterminante dans le parcours scolaire des enfants. De la même façon que pour le milieu de résidence, on s’intéresse aux probabilités d’accès à différents niveaux selon le quintile de niveau de vie auquel le ménage de l’enfant appartient. En Guinée-Bissau, la pauvreté est très répandue (cf. chapitre 1) et les différences de niveau de vie entre les trois premiers quintiles sont assez faibles et ne se traduisent par conséquent pas dans les scolarités des enfants, c’est pourquoi on les regroupe. Le niveau de vie joue un rôle essentiel dès l’accès à l’école : alors que les enfants des ménages les plus aisés ont 90 % de chances d’aller à l’école, la probabilité pour les enfants des ménages les plus pauvres (quintiles 1 à 3) n’est que de 65 %. Comme pour les disparités liées au milieu de résidence, les inégalités liées au niveau de vie s’accroissent à mesure qu’on avance dans le système scolaire, puisque les enfants des ménages les plus aisés ont cinq fois plus de chances de terminer l’enseignement de base et huit fois plus de chances d’être scolarisés dans l’enseignement secondaire. 4 La question de l’équité I.3 Le niveau de vie 107 Graphique 4.6 : probabilités estimées d’accéder à différents niveaux selon le niveau de vie, 2005/06 1 0,9 0,8 0,7 0,6 quintiles 1 à 3 0,5 quintile 4 0,4 quintile 5 0,3 0,2 0,1 0 accès EB achvt EB accès EB achvt EB GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Par ailleurs, les filles subissent plus que les garçons ces inégalités dues au niveau de vie : les différences de scolarisation aux différents niveaux entre filles et garçons sont beaucoup plus accentuées dans les ménages très pauvres (quintiles 1 à 3) que dans les ménages plus aisés. Dans un contexte où les ressources sont particulièrement rares et où l’éducation de tous les enfants ne peut être assurée, celle des filles est sacrifiée au profit de celle des garçons. Graphique 4.7 : rapport des probabilités d’accès garçons/filles selon le niveau de vie, 2005/06 2,5 2,0 quintiles 1 à 3 1,5 quintile 4 1,0 quintile 5 0,5 0,0 108 accès EB achvt EB accès ESG Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. achvt ESG Ainsi, dans les ménages les plus pauvres les garçons ont 1,8 fois plus de chances d’arriver en 6ème année que les filles alors que ce rapport n’est que de 1,3 dans les ménages les plus aisés. On observe donc, là encore, un cumul des inégalités liées au genre et au niveau de revenu. Cependant, il faut souligner que même au sein des ménages du quintile 5, les disparités de genre sont loin d’être négligeables, puisque les garçons ont 1,5 fois plus de chances d’aller à l’enseignement secondaire général que les filles. Encadré 4.1 : La question des orphelins Les orphelins sont généralement considérés comme une population vulnérable, susceptibles d’être plus exposés à des problèmes de santé ou à la non scolarisation. L’enquête MICS3 2006 offre la possibilité de tester cette dernière hypothèse. Si le fait d’être orphelin d’un seul parent ne semble pas avoir effet sur la scolarisation, on observe une différence significative dans la fréquentation scolaire entre les enfants ayant perdu père et mère et les enfants dont les deux parents sont vivants. Tableau : fréquentation scolaire en 2005/06 selon que l’enfant est orphelin ou non Part des enfants et des jeunes (7-17 ans) scolarisés en 2005/06 Significativité de la différence par rapport aux non orphelins Père et mère vivants 91 % Orphelins d’au moins un parent 91 % ns Orphelins de père et de mère 86 % *** Source : MICS3 2006 et calcul des auteurs. 4 L’éducation a un coût pour l’État, qui alloue un certain montant de ressources à ce secteur. Chaque enfant scolarisé bénéficie d’une partie de ces ressources et l’idée, dans cette partie, est de mesurer la part des ressources allouées à une génération dont bénéficient les enfants et les jeunes de cette génération, d’abord selon le niveau atteint puis, dans un second temps, selon les caractéristiques sociales dont l’effet vient d’être mis en évidence (partie I.). Chaque enfant scolarisé bénéficie d’une part d’autant plus importante qu’il reste longtemps dans le système scolaire et qu’il atteint un niveau d’études élevé ; a contrario, les enfants qui n’entrent pas à l’école ne profitent d’aucune partie de ces ressources. La répartition des crédits publics est donc d’autant plus inégale qu’il existe une grande dispersion dans le parcours scolaire des enfants et que la croissance des coûts unitaires avec le niveau éducatif est forte. A l’inverse, elle sera plus égalitaire si tous les enfants d’une classe d’âge ont accès à l’école et effectuent des parcours scolaires semblables ou si les coûts unitaires augmentent faiblement avec le niveau d’enseignement. La question de l’équité II. L’inégalité dans la répartition des ressources allouées à l’éducation 109 Afin d’évaluer l’inégalité de la répartition des ressources allouées à l’éducation en Guinée-Bissau, il est nécessaire de déterminer quelle proportion d’une cohorte de jeunes du pays quitte le système éducatif à chaque niveau et de définir le volume de ressources publiques accumulées jusqu’à chacun de ces niveaux terminaux38. Tableau 4.2 : Distribution structurelle des ressources publiques en éducation allouées à une pseudo-cohorte de 100 enfants, année 2010 % cohorte EB ESG GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF ESC 110 Ressources % cumulés Accumulées par le groupe Niveau Coût Nb Taux terminal unitaire années d’accès (a) (FCFA) Niveau terminal 1a 100 % 0% 14 429 1 14 429 0 0% 0% 0% 2a 100 % 4% 14 429 1 28 858 115 432 1% 4% 1% 3a 96 % 3% 14 429 1 43 287 129 861 1% 7% 2% 4a 93 % 26 % 14 429 1 57 716 1 500 616 11 % 33 % 12 % 5a 67 % 5% 14 429 1 72 145 360 725 3% 38 % 15 % (b) En Fca. (a) x (b) Cohorte Ressources % 6a 62 % 7% 14 429 1 86 574 606 018 4% 45 % 19 % 7a 55 % 11 % 26 686 1 113 260 1 245 860 9% 56 % 28 % 8a 44 % 9% 26 686 1 139 946 1 259 514 9% 65 % 37 % 9a 35 % 7% 26 686 1 166 632 1 166 424 8% 72 % 45 % 10a 28 % 6% 26 686 1 193 318 1 159 908 8% 78 % 53 % 11a 22 % 18 % 26 686 1 220 004 3 960 072 28 % 96 % 81 % 4% 4% 109 689 4 658 760 2 635 040 19 % 100 % 100 % Supérieur Sources : chapitre 2 & chapitre 3. 38 On fait ici l’hypothèse que les données transversales observées sur une année récente (ici 2009/10), que ce soit pour les niveaux terminaux ou pour les coûts unitaires à chaque niveau, peuvent être transcrites dans une perspective temporelle, c’est-à-dire qu’on suppose que les données observées pour plusieurs générations peuvent être utilisées pour mener une analyse sur une pseudo-cohorte. Il est donc possible d’établir la distribution de la pseudo-cohorte par niveau terminal de scolarisation, ainsi que la répartition structurelle des ressources publiques en éducation qui en découle (cf. tableau 6.2). Encadré 4.2 : Construction et lecture du tableau 4.2 « Distribution structurelle des ressources publiques en éducation allouées à une pseudo-cohorte de 100 enfants » Concernant la proportion d’enfants qui atteint chaque niveau d’enseignement, on prend le profil transversal du chapitre 2 et on déduit pour chaque année d’études la proportion d’enfants pour qui l’année d’étude est le niveau terminal. Par exemple, en 4ème année, on un taux d’accès de 93 % et le taux d’accès en 5ème année est de 67 %. Ainsi, la 4ème année d’études est le niveau terminal d’éducation pour 26 % des enfants bissau-guinéens (93 % - 67 %), Pour chaque niveau, on calcule à l’aide des coûts unitaires (cf. Chapitre 3) les ressources dont a bénéficié un individu qui termine sa scolarité à ce niveau. Par exemple, un élève qui sort après la 3ème année (3 années à l’EB effectuées) bénéficie de 3 x 14 429 = 43 287 FCFA ; de même, un élève qui sort après la 8ème (c’est-à-dire après 6 années à l’EB et 2 années à l’ESG) bénéficie de (6 x 14 429) + (2 x 26 686) = 139 946 FCFA. Enfin, on suppose qu’un étudiant reste en moyenne 4 ans dans le supérieur, donc un élève qui va jusqu’au niveau supérieur « a consommé » 6 x 14 429 Francs CFA quand il était à l’EB + 5 x 26 686 FCFA quand il était à l’ES + 4 x 109 689 Francs CFA quand il était étudiant, ce qui donne un total de 658 760 Francs CFA. On calcule enfin les dépenses accumulées par chaque groupe du niveau terminal, en multipliant le pourcentage de la pseudo-cohorte qui termine à ce niveau (colonne (a)) par le coût cumulé d’un élève qui atteint ce niveau (colonne (b)). La somme des ressources accumulées par chaque groupe représente le montant total des ressources publiques allouées à une génération sur 15 ans (durée maximale de scolarité). On détermine finalement la distribution de ce montant total des ressources selon la distribution des niveaux terminaux. On observe, par exemple, que les 7 % de la pseudo-cohorte qui terminent leur scolarité après la 6ème année consomment en tout 606 018 Francs CFA, soit 4 % du total des ressources. 4 La question de l’équité D’après le profil de scolarisation probabiliste transversal au chapitre 2, l’accès à l’école est de 100 % (toutefois, on a vu qu’il fallait rester prudent du fait d’un effet multi cohorte et il n’est pas certain dans la réalité que tous les enfants entrent à l’école : en 2006, la probabilité d’entrer un jour à l’école n’était que de 76 %). 4 % des jeunes d’une génération qui poursuivent leur scolarité jusqu’au supérieur bénéficient de 19 % des ressources : on observe donc une certaine concentration des ressources par les plus éduqués. On peut facilement décrire ce phénomène en traçant la courbe de Lorentz, qui correspond aux points dont les coordonnées sont dans les deux dernières colonnes (% cumulé de la cohorte et % cumulé des ressources). 111 Graphique 4.8 : Courbe de Lorenz 100% 28% des ressources % cumulé des ressources 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 10% les plus éduqués 20% 10% A 0% 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% % cumulé des individus GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : idem tableau 4.2. 112 La diagonale noire sur le graphique représente une situation conceptuelle où tous les enfants d’une génération ont exactement le même parcours scolaire et bénéficieraient donc exactement du même montant de ressources. Une courbe de Lorentz qui passerait par le point A est la situation conceptuelle opposée, où un seul enfant s’approprierait l’ensemble des ressources allouées à l’éducation. Plus la courbe de Lorenz (en vert sur le graphique) s’écarte de la droite et se rapproche de A, plus la répartition des ressources est inégalitaire. On peut mesurer cette inégalité à l’aide de deux indicateurs. Le premier est l’indice de Gini, qui mesure le rapport de l’aire comprise entre la diagonale et la courbe d’une part et l’aire du triangle formé par la diagonale et le point A. Par définition, l’indice de Gini est compris entre 0 et 1, et sa valeur est d’autant plus petite que la courbe de Lorenz est proche de la diagonale, et que donc la distribution des ressources publiques est complètement égalitaire. En Guinée-Bissau en 2009/10, le coefficient de Gini s’établit à 0,38, ce qui souligne une certaine inégalité dans la répartition des ressources. Le second indicateur est le montant des ressources dont bénéficient les 10 % les plus éduqués de la cohorte : on lit sur le graphique que ces jeunes bénéficient de 28 % des ressources allouées à l’éducation. Ces indicateurs seuls permettent difficilement d’apprécier la situation d’un pays et il est généralement utile de les comparer à ceux observés dans d’autres pays. Le graphique 4.9 qui suit présente une comparaison avec d’autres pays africains, à niveau de richesse comparable, de la proportion des ressources dont bénéficient les 10 % les plus éduqués. Graphique 4.9 : % des ressources dont bénéficient les 10 % les plus éduqués, comparaisons internationales 70 60 50 40 30 20 Rwanda (2008) RCA (2005) Madagascar (2006) Niger (2008) Mali (2008) Burkina Faso (2006) Tanzanie (2009) 0 Guinée-Bissau (2010) 10 Source : Pôle de Dakar (UNESCO/BREDA). La question se pose à présent de savoir comment les inégalités dues aux caractéristiques socioéconomiques, étudiées dans la partie précédente, se répercutent dans l’appropriation des ressources publiques allouées à l’éducation. L’idée est de savoir par exemple quelle partie de ces ressources va aux plus aisés, par rapport aux plus pauvres, ou quelle partie va aux garçons par rapport aux filles. Le tableau 4.3 présente le pourcentage de ressources dont bénéficie chaque groupe de population. 4 La question de l’équité En Guinée-Bissau, les 10 % les plus éduqués bénéficient de 28 % des ressources contre 47 % en Tanzanie et 64 % Rwanda. Ainsi, si on observe une certaine inégalité structurelle dans l’appropriation des ressources publiques d’éducation, cette inégalité n’est pas excessivement prononcée. Ce résultat provient essentiellement d’une augmentation mesurée des coûts unitaires au fil de la scolarisation, et notamment de coûts unitaires relativement faibles au supérieur, ce qui est rarement le cas dans les autres pays. 113 Tableau 4.3 : Part des ressources dont bénéficie chaque groupe de population % de ressources accumulées Sans scolarisation EB ESG ESC Supérieur Total % dans la population Q1 0% 3% 2% 1% 1% 6% 17 % Q2 0% 3% 2% 1% 0% 6% 19 % Q3 0% 4% 3% 2% 0% 9% 20 % Q4 0% 5% 8% 6% 2% 21 % 21 % Q5 0% 5% 20 % 18 % 15 % 57 % 23 % Rural 0% 11 % 7% 5% 1% 24 % 61 % Urbain 0% 8% 27 % 23 % 18 % 76 % 39 % Filles 0% 9% 14 % 11 % 7% 41 % 50 % Garçons 0% 10 % 20 % 17 % 11 % 59 % 50 % Selon le revenu Selon la localisation Selon le sexe Source : idem tableau 4.1 et tableau 4.2. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Encadré 4.3 : Lecture du tableau 4.3 « Part des ressources dont bénéficie chaque groupe de population » 114 On sait que les enfants issus des ménages très pauvres (Q1) représentent 15 % des enfants à l’EB (cf. tableau 4.1) ; d’autre part 19 % des ressources publiques vont à ceux qui arrêtent à la fin de l’EB, c’est-à-dire après la 6ème année (cf. tableau 4.2). Les enfants issus des ménages très pauvres bénéficient donc, au titre de l’enseignement de base, de 15 % x 19 % = 2,9 % des ressources globales allouées à la pseudo-cohorte. On calcule de la même façon toutes les cases du tableau (pour chaque groupe social, les ressources accumulées au titre de la scolarisation dans un niveau donné), puis on somme en ligne pour avoir le pourcentage de ressources dont bénéficie chaque catégorie sociale. Ce pourcentage est à nouveau à comparer avec le pourcentage que représente chaque catégorie dans la population, rappelé dans la dernière colonne. Ainsi, les enfants issus des ménages les plus pauvres ne consomment au total pour leur scolarisation que 7 % des ressources alors qu’ils représentent 17 % du total. On met ainsi en évidence que les groupes favorisés bénéficient de plus de ressources publiques d’éducation au détriment des groupes défavorisés. Les garçons par exemple s’approprient 59 % des ressources et les filles 41 % alors même qu’il y a autant de filles que de garçons dans la population. Les trois quarts des ressources vont aux enfants et jeunes vivant en milieu urbain alors même qu’ils ne représentent qu’un peu plus du tiers des jeunes de 7 à 24 ans. Enfin, le quart des jeunes issus des ménages les plus aisés bénéficient de plus de la moitié des ressources allouées à l’éducation, quand les 17 % les plus pauvres n’ont que 6 %. On observe donc des disparités importantes dans l’appropriation des ressources publiques selon certaines caractéristiques socio-économiques. III. Les inégalités régionales Les données de population n’étant pas forcément fiables au niveau des régions, on utilise encore une fois l’enquête MICS 2006 pour étudier les disparités territoriales. Dans l’enquête, le découpage est moins fin que le découpage administratif puisqu’on identifie quatre zones que sont la capitale Bissau, l’Est qui regroupe les départements de Bafata et Gabu, le Nord qui regroupe les départements de Biombo, Cacheu et Oio et enfin le Sud qui comprend Bolama, Quinara et Tombali. Par ailleurs, pour s’affranchir des problèmes liés aux migrations stratégiques des jeunes (qui quittent le domicile familial pour aller chez un parent qui habiterait plus près d’un établissement de l’enseignement secondaire par exemple), on se limite aux enfants et aux jeunes qui vivent avec l’un de leurs deux parents. Du point de vue de la scolarité des enfants et des jeunes, les inégalités territoriales en Guinée-Bissau se résument en fait à un déséquilibre entre le Secteur Autonome de Bissau et le reste du pays : si l’accès à l’enseignement de base, généralisé à Bissau, est relativement important dans les autres régions, le déséquilibre se révèle dès l’accès en 6ème année. Alors que 60 % des enfants de la capitale atteignent la dernière année de l’EB, ils sont moins de 20 % dans le reste du pays, sans véritable différence entre le Nord et le Sud, et des taux légèrement plus faibles dans l’Est. Graphique 4.10 : proportions d’enfants et de jeune accédant à différents niveaux selon la région, 2005/06 100% 4 80% 60% 40% 0% accès EB achèvement EB accès ESG achèvement ESG accès ESC achèvement ESC Secteur Autonome de Bissau Est (Bafata - Gabu) Nord (Biombo - Cacheu - Oio) Sud (Bolama - Quinara - Tombali) La question de l’équité 20% Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Cela étant, la très forte différence observée entre le Secteur autonome de Bissau et le reste du pays peut révéler un problème d’offre (l’État ne se préoccupe pas suffisamment des régions et le nombre d’écoles ou de maîtres sont insuffisants) mais également un problème de demande. En effet, 70 % de la population du 115 SAB appartient au quintile de ménage le plus aisé et 27 % au quintile 4, c’est-à-dire que la quasi-totalité de la population de la ville se situe parmi les 40 % les plus aisés de Guinée-Bissau. A l’inverse, entre 70 % et 80 % des ménages interrogés dans les régions appartiennent aux quintiles les plus pauvres. Au vu des disparités dans l’éducation dues au niveau de vie et mises en évidence dans la première partie du chapitre, il importe de prendre en compte ce facteur dans l’interprétation des inégalités territoriales. Les disparités liées à la question du genre n’ont pas le même poids partout, comme le souligne le graphique 4.11. À l’enseignement de base, c’est essentiellement dans les régions de l’Oio et de Cacheu que les discriminations sont les plus marquées, avec moins de 45 % de filles. Cependant, c’est véritablement à l’enseignement secondaire qu’on observe des différences importantes : les garçons y sont trois fois plus nombreux que les filles dans les régions de l’Oio, de Quinara et de Tombali, alors que la part des filles dépasse 40 % à la capitale. Graphique 4.11 : part des filles à l’EB et l’ES selon la région, 2005/06 60% 50% 40% 30% 20% 10% GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 0% 116 Oio Quinara Tombali Cacheu Gabu EB Source : données GIPASE. Biombo ES Bafata Bolama SAB Principaux enseignements du chapitre 4 : La question de l’équité Principaux enseignements du chapitre 4 : La question de l’équité Ce chapitre analyse les questions d’équité au sein du système éducatif et donc celles des disparités. Ces disparités dans la scolarisation mais aussi dans les apprentissages peuvent être socio-économiques, régionales et concernent également l’allocation des ressources allouées au secteur éducatif. 1. Le genre, la zone de résidence (urbain/rural) et le niveau de vie ont des impacts considérables sur la scolarisation Si les proportions de filles et de garçons sont quasiment identiques au niveau de l’enseignement de base élémentaire (quatre premières années), ce n’est plus le cas pour les autres niveaux d’enseignement. En effet, à partir de l’enseignement de base complémentaire (5ème et 6ème année) et ce, jusqu’à l’enseignement supérieur, la part des filles n’est que de 40 %. Les enfants issus de milieu urbain ont une probabilité de 86 % d’accéder un jour à l’école contre 65 % pour ceux issus de milieu rural. Ces inégalités se creusent lorsqu’on monte dans les niveaux puisque ceux de milieu urbain ont quatre fois plus de chances d’achever l’enseignement de base et 5 à 6 fois plus d’accéder à l’enseignement secondaire que ceux de milieu rural. Les enfants issus des ménages les plus riches ont 90 % de chances d’accéder à l’école alors que ceux issus des ménages les plus pauvres n’en ont que 65 %. Ces disparités sont également plus marquées lorsqu’on monte dans les niveaux d’enseignement. En effet, les enfants de milieu aisé ont cinq fois plus de chances d’achever l’enseignement de base et huit fois plus de chances d’accéder à l’enseignement secondaire que ceux des ménages les plus pauvres. 2. Des inégalités dans l’appropriation des ressources allouées à l’éducation 3. Il existe également de fortes disparités régionales notamment entre le Secteur Autonome de Bissau et les autres régions du pays Au niveau de l’enseignement de base, 60 % des enfants du Secteur Autonome de Bissau achèvent le cycle contre moins de 20 % pour le reste du pays. Les écarts sont tout aussi importants pour les autres cycles d’enseignement. Les disparités entre régions concernent également la scolarisation des filles. Ainsi, les régions de l’Oio et de Cacheu scolarisent moins de 45 % de filles dans l’enseignement de base. Au niveau de l’enseignement secondaire, les différences sont plus marquées notamment dans les régions de l’Oio, de Quinara et de Tombali où les garçons y sont trois fois plus nombreux que les filles. 4 La question de l’équité Plus un enfant reste dans le système éducatif et plus il absorbe les ressources publiques allouées à ce secteur. Les 10 % les plus instruits en Guinée-Bissau utilisent 28 % des ressources allouées au secteur ce qui est moins que dans les autres pays comparables (de 47 % en Tanzanie à 64 % au Rwanda). Cette appropriation inégale des ressources se retrouve au niveau des caractéristiques socio-économiques : les filles ne consomment que 41 % de ces ressources et les enfants issus des ménages les 20 % les plus pauvres n’en consomment que 6 % alors que les 20 % les plus riches en consomment 57 %. Ainsi le système éducatif loin de corriger ces inégalités ne fait, en réalité, que de les accentuer. 117 Chapitre 5 : La gestion du système Ca chapitre s’intéresse à la gestion du système éducatif. On peut indiquer qu’au-delà de la politique éducative qui définit les choix structurels sur les modes d’organisation et les moyens mis à disposition de chaque niveau d’enseignement, la gestion va intervenir dans les processus par lesquels ces décisions sont concrètement mises en œuvre pour produire les résultats attendus. En suivant cette logique, on peut définir deux dimensions complémentaires à la gestion d’un système éducatif : i) la répartition aux unités déconcentrées et aux écoles et établissements scolaires des moyens mobilisés39 et ii) la transformation au niveau local de ces moyens par chaque école ou établissement d’enseignement en apprentissages effectifs chez les élèves40 c’est-à-dire d’un point de vue purement qualitatif. Toutefois, cette dernière question n’a pu être traitée ici faute de données sur les acquisitions des élèves mais sera à l’avenir abordée, notamment par le biais de l’évaluation des apprentissages que le PASEC doit mener dans le pays. Enfin, la gestion du système concerne également les différents modes d’organisation scolaire mis en place dans le système éducatif. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF I. L’allocation des moyens aux écoles La répartition des moyens matériels et des personnels aux écoles présente une double dimension. La première consiste à déterminer les choix qui sont faits en matière de carte scolaire. Il s’agit de déterminer comment les ressources sont distribuées. La seconde dimension concerne les allocations de moyens entre les établissements scolaires au cours d’une année scolaire donnée. On s’intéresse alors aux mécanismes mis en œuvre pour réaliser ces allocations et surtout à la cohérence et à l’équité dans la répartition. Dans un système qui serait organisé de manière optimale du point de vue de la gestion administrative et financière, il devrait y avoir une relation fonctionnelle entre les besoins existants et le volume des ressources mobilisées aux différents niveaux d’agrégation du système. Dans la mesure où l’on vise à ce que les conditions d’enseignement soient homogènes sur le territoire (tant pour des raisons d’efficacité que d’équité), on devrait s’attendre à ce qu’il y ait une relation assez stricte entre les effectifs scolarisés dans une école et le volume des ressources dont elle dispose. Cela veut dire que des écoles scolarisant le même nombre d’élèves devraient avoir le même nombre d’enseignants alloués par l’État41, et que des écoles disposant du même nombre d’enseignants alloués par l’État devraient avoir peu ou prou le même nombre d’élèves. Cela est vrai pour l’enseignement de base et moins vrai pour l’enseignement secondaire dans le sens où dans le secondaire, en théorie, le nombre d’enseignants alloués aux établissements devrait dépendre du nombre d’heures d’enseignement à dispenser dans ces établissements. Dans la mesure où pour la Guinée-Bissau, seules les données sur le nombre d’enseignants alloués aux établissements de l’enseignement de base et de l’enseignement secondaire et le nombre d’élèves de ces établissements sont disponibles, et qu’aucune autre données sur l’allocation des moyens hors personnel 118 39 Il s’agit de la gestion des moyens humains, matériels et financiers. 40 Il s’agit des pratiques-classe et de la gestion pédagogique. 41 C’est-à-dire des enseignants fonctionnaires et contractuels mais hors communautaires pour l’enseignement de base étant donné que les enseignants communautaires sont recrutés et rémunérés directement par les communautés pour pallier le déficit de l’État dans l’allocation des enseignants dans certaines écoles d’enseignement de base. enseignant n’est disponible, les analyses qui suivent ne s’intéressent qu’à la cohérence dans l’allocation du personnel enseignant aux établissements. II.1 Évaluation de la cohérence dans l’allocation des enseignants de l’enseignement de base Il s’agit ici d’analyser la cohérence de l’allocation des enseignants de l’État (fonctionnaires et contractuels) dans les écoles d’enseignement de base. Les données utilisées sont issues des bases de données scolaires et du personnel 2005/06 du GIPASE. L’allocation des enseignants sera abordée seulement au niveau des écoles publiques dans la mesure où l’État n’intervient que dans le public42. Le nombre d’écoles publiques en Guinée-Bissau est de 830. Toutefois, lorsque la base de données scolaire a été confrontée avec la base de données du personnel, des écoles ont disparues car soit les élèves, soit les enseignants n’étaient pas renseignés. De ce fait, l’analyse qui suit porte sur 662 écoles publiques, 4 209 enseignants et 201 116 élèves. Si on met en regard le nombre d’élèves et le nombre total d’enseignants alloués aux écoles, on peut situer toutes les écoles sur un plan qui croise ces deux variables. On peut ainsi représenter sur un graphique la dispersion qui existe dans l’affectation des personnels enseignants aux écoles. Le graphique 5.1 présente la situation des écoles publiques dont les données sont disponibles. De façon générale, on observe bien l’existence d’une relation positive entre les deux variables, c’est-à-dire que plus une école scolarise d’élèves, plus elle dispose d’enseignants. 5 La gestion du système Dans le cas idéal d’une cohérence parfaite de la répartition des enseignants alloués par l’État, le nombre d’enseignants fonctionnaires et contractuels dans une école donnée ne devrait dépendre que du nombre d’élèves de cette école. Il existerait alors une relation fonctionnelle entre le nombre d’enseignants et le nombre d’élèves et les points représentant les écoles seraient tous situés sur la droite d’ajustement. On est assez éloigné de cette situation de référence car il existe des variations importantes autour de cette relation moyenne. Par exemple, parmi les écoles comptant environ 500 élèves, certaines disposent de 15 enseignants alloués par l’État alors que d’autres ne bénéficient que d’un enseignant alloué par l’État et que par conséquent, le déficit d’enseignants est très certainement comblé par des maîtres communautaires recrutés et payés directement par les parents. Toutefois, les données disponibles ne nous permettent pas de savoir combien il existe d’enseignants communautaires dans le système éducatif bissau-guinéen et de savoir (en dehors des écoles communautaires) dans quelles écoles publiques ils se situent. 119 42 À partir du moment où une école communautaire reçoit un enseignant alloué par l’État, l’école devient alors publique. Graphique 5.1 : Cohérence de l’allocation des enseignants dans les écoles publiques au niveau de l’enseignement de base, 2005-2006 110 R2 = 0,800 100 90 Nombre d'enseignants 80 70 60 50 40 30 20 10 0 0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 4000 4500 Nombre d'élèves GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : calcul des auteurs à partir des bases de données scolaires et du personnel 2005/06 de la GIPASE. Dans l’analyse statistique, le coefficient de détermination R2 est un indicateur43 qui mesure l’ampleur des écarts relatifs par rapport à la relation moyenne estimée. Dans le cas de la Guinée-Bissau, la valeur du R2 est de 0,80. Le degré d’aléa dans le processus d’allocation des enseignants, mesuré par la valeur 1- R2, est donc égal à 0,20. Ceci signifie qu’environ 20 % du phénomène d’affectation des enseignants par l’État dans les écoles d’enseignement de base publiques n’est pas lié au nombre d’élèves présents dans ces écoles mais à d’autres critères. Une façon complémentaire d’apprécier la situation de la Guinée-Bissau consiste à la comparer avec celle observée dans d’autres pays. Le tableau 5.1 présente les chiffres du degré d’aléa dans la distribution des enseignants aux écoles d’enseignement de base pour quelques pays africains. Parmi les pays où cet indicateur est disponible, la plage de variation va de 7 % en Guinée à 54 % au Bénin. Avec 20 % d’aléa, la Guinée-Bissau se situe dans une position plus favorable que la moyenne (30 %) des pays de l’échantillon. Ces résultats montrent que la répartition des enseignants en Guinée-Bissau est plutôt meilleure que dans d’autres pays africains mais on observe aussi qu’un pays comme la Guinée présente de bien meilleurs résultats. Des progrès sont donc possibles en rendant les allocations plus équitables et plus cohérentes entre les différents lieux d’enseignement. La Guinée qui a adopté il y a quelques années un plan très structuré de redéploiement du personnel peut à cet égard être considérée comme un exemple 120 43 L’indicateur peut prendre une valeur comprise entre 0 et 1. La valeur 1 correspond à la relation fonctionnelle : tous les points se trouvent sur la droite moyenne, ce qui signifie que toutes les écoles sont traitées de la même manière et le nombre d’enseignants ne dépend que du nombre d’élèves. A contrario, la valeur 0 correspond à l’absence totale de relation entre le nombre d’enseignants d’une école et celui de ses élèves. Tableau 5.1 : Degré d’aléa (1- R2) dans l’allocation des enseignants de l’enseignement de base dans 15 pays africains Pays degré d’aléa dans l’allocation des enseignants par l’État Guinée (2004) 7 Lesotho (2003) 18 Niger (2003) 19 Guinée-Bissau (2006) 20 Burkina Faso (2007) 22 Mauritanie (2004) 22 Éthiopie (2002) 28 Tchad (2004) 33 Malawi (2007) 34 Congo (2005) 38 RCA (2005) 46 Burundi (2004) 50 Bénin (2006) 54 Moyenne 30 Source : RESEN autres pays, calcul des auteurs. Les régions de Biombo, de Bolama et du Secteur Autonome de Bissau sont les mieux dotées en enseignants alloués par l’État alors que la région de Quinara est la moins bien dotée. On note une différence de 34,7 points entre la région de Quinara (70,6 élèves par enseignant alloué par l’État) et celle du Secteur Autonome de Bissau (35,9 élèves par enseignant alloué par l’État). Dans l’ensemble, six régions présentent des ratios élèves-maître supérieurs à la moyenne nationale (50,4) et trois en dessous. Ces données traduisent des insuffisances dans la gestion au niveau central de l’allocation des enseignants aux régions. Toutefois, il convient de préciser que les ratios élèves-maître observés ne tiennent pas compte des maîtres directement recrutés et rémunérés par les communautés. On peut donc penser que les communautés des régions comme Quinara font appel à des enseignants communautaires dans des proportions relativement importantes. 5 La gestion du système Au vu du degré d’aléa dans l’allocation des enseignants dans les écoles d’enseignement de base publiques du pays, une question consiste à se demander si certaines régions apparaissent favorisées ou défavorisées. Le tableau 5.2 s’inscrit dans cette perspective. 121 Tableau 5.2 : Ratio élèves-maître par région et cohérence dans l’allocation des enseignants à l’intérieur des régions 1 2 3 4 44 45 46 47 Ratio élèves par maître44 R2 % d’écoles bien dotées45 % d’écoles sous dotées46 % d’écoles sur dotées47 Bafata 52,3 0,38 18 % 63 % 19 % Biombo 37,5 0,70 13 % 65 % 23 % Bolama 36,6 0,38 16 % 55 % 29 % Cacheu 53,7 0,59 13 % 44 % 43 % Gabu 59,0 0,85 7% 63 % 30 % Oio 55,2 0,77 18 % 50 % 32 % Quinara 70,6 0,83 14 % 45 % 41 % SAB 35,9 0,82 50 % 17 % 33 % Tombali 59,5 0,77 13 % 63 % 25 % Ensemble 50,4 0,80 13 % 57 % 30 % Régions GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Source : calcul des auteurs à partir des bases de données scolaire et du personnel 2005/06 de la GIPASE. 122 À l’intérieur des régions, si on se réfère au coefficient de détermination (R2), on constate que les régions de Bafata et Bolama présentent une très faible cohérence dans l’allocation du personnel enseignant aux écoles (R2 de 39 %). Dans une moindre mesure, la région de Cacheu présente aussi une faible cohérence dans cette allocation aux écoles (R2 de 59 %). Par ailleurs, en observant la proportion d’écoles bien dotées en enseignants au niveau national, on s’aperçoit que cette proportion est relativement faible (13 %). C’est également le cas à l’intérieur des régions où hormis la région du Secteur Autonome de Bissau où on compte 50 % des écoles bien dotées en enseignants, cette proportion varie entre 7 et 18 % pour les autres régions. Ces résultats montrent ici deux problèmes : un problème au niveau central de l’allocation des enseignants aux régions, et un autre problème au niveau régional de l’allocation des enseignants aux écoles. II.2 Évaluation de la cohérence dans l’allocation des enseignants de l’enseignement secondaire Les analyses ont porté sur les enseignants alloués par l’État dans les établissements publics, le privé ne recevant aucune dotation de l’État ne sera pas pris en compte dans cette analyse. Dans le cas de l’enseignement secondaire, on sait que le nombre d’enseignants dans un établissement dépend du nombre d’heures à dispenser en fonction des groupes pédagogiques et en fonction des disciplines. Toutefois, les données disponibles ne permettent pas de savoir quelles sont les heures à dispenser par établissement. L’analyse a donc porté, comme pour l’enseignement de base, sur la relation entre le nombre d’enseignants 44 Ratio élèves par maître pondéré c'est-à-dire le rapport entre le nombre total d’élèves de la région et le nombre total d’enseignants alloués par l’État dans la région. 45 Les écoles bien dotées sont des écoles dont le rapport élèves-maître est compris dans une fourchette de plus ou moins 10 % du ratio élèves-maître de la région. 46 Une école sous dotée est une école dont le rapport élèves-maître est supérieur de plus de 10 % au ratio élèves-maître de la région. 47 Une école sur dotée est une école dont le rapport élèves-maître est inférieur de plus de 10 % au ratio élèves-maître de la région. et le nombre d’élèves des établissements à partir des bases de données scolaire et du personnel 2005/06 de la GIPASE. Le nombre d’établissements de l’enseignement secondaire en Guinée-Bissau est de 30. Toutefois, lorsque la base de données scolaire a été confrontée avec la base de données du personnel, des établissements ont disparu car soit les élèves soit les enseignants n’étaient pas renseignés. De ce fait, l’analyse qui suit porte sur 23 établissements publics, 1 389 enseignants et 43 907 élèves. De la même façon que pour l’enseignement de base, si l’on met en regard le nombre d’élèves et le nombre total d’enseignants alloués aux établissements, on peut situer toutes les écoles sur un plan qui croise ces deux variables. On peut ainsi représenter sur un graphique la dispersion qui existe dans l’affectation des personnels enseignants aux établissements. Le graphique 5.2 présente la situation des établissements publics dont les données sont disponibles. De façon générale, on observe l’existence d’une relation positive entre les deux variables : plus un établissement présente un effectif d’élèves important, plus il dispose d’enseignants. Dans le cas idéal d’une cohérence parfaite de la répartition des enseignants, le nombre d’enseignants permanents dans un établissement donné ne devrait dépendre que du nombre d’heures d’enseignement dues. On s’aperçoit que cette relation n’est pas pleine et qu’il y a quelques variations autour de la relation moyenne. Toutefois, le degré d’aléa dans le processus d’allocation des enseignants, mesuré par la valeur 1- R2 est seulement de 0,07. Ceci signifie que seulement 7 % du phénomène d’affectation des enseignants dans les établissements publics du secondaire n’est pas lié au nombre d’élèves. Graphique 5.2 : Cohérence de l’allocation des enseignants dans les établissements publics au niveau de l’enseignement de secondaire, 2005-2006 220 5 R2 = 0,927 200 160 140 120 100 80 60 40 20 0 0 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 4000 4500 5000 5500 6000 6500 7000 Nombre d'élèves Source : calcul des auteurs à partir des bases de données scolaire et du personnel 2005/06 de la GIPASE. La gestion du système Nombre d'enseignants 180 123 Un autre point qu’il est important de prendre en compte ici est le nombre d’heures moyen effectué par un enseignant du secondaire. En effet, les données disponibles permettent de savoir qu’il y avait 1403 enseignants du secondaire en 2005/06 et qu’il y avait 866 groupes pédagogiques dans l’enseignement secondaire général (1er cycle) et 313 groupes pédagogiques dans l’enseignement secondaire complémentaire (2nd cycle) soit un total de 1179 groupes pédagogiques dans l’enseignement secondaire en 2005/06. Si l’on rapporte le nombre de groupes pédagogiques par enseignant, ce rapport est égal à 1,2. On sait qu’en moyenne, un groupe pédagogique de l’enseignement secondaire est censé suivre 20 heures d’enseignement par semaine. On peut donc estimer le nombre d’heures moyen réalisé par les enseignants. En moyenne, un enseignant réalisait 17 heures d’enseignement en 2005/0648. On peut penser que cette moyenne varie en fonction des zones géographiques et en fonction de l’allocation du personnel enseignant dans les établissements. En effet, comme pour l’enseignement de base, on peut penser que certains établissements sont sous dotés en enseignants et d’autres sur dotés. Par conséquent, si un établissement est sur doté en enseignants, on peut penser que le nombre d’heures moyen dispensé par les enseignants de cet établissement sera plus faible que le nombre d’heures officiel à dispenser et inversement pour les établissements sous dotés. Une analyse plus fine pourrait donc se pencher sur la dotation en enseignants par établissement dans le but de réallouer de façon optimale le personnel enseignant en fonction des besoins réels de chaque établissement. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF II. Analyse des différents modes d’organisation scolaire au niveau de l’enseignement de base 124 On sait que l’organisation scolaire peut prendre différentes formes et que certains modes d’organisation scolaire peuvent être liés à des contraintes physiques et/ou budgétaires. C’est notamment le cas avec la mise en place des classes multigrades49 dans des écoles où les effectifs d’élèves sont relativement faibles et dans un but de réduction des coûts liés à ce type d’école. En effet, on peut penser que dans des zones très reculées où une école serait implantée et où le nombre d’enfants à scolariser serait très faible, il ne serait pas pertinent de mettre un enseignant pour chaque niveau d’enseignement mais plutôt de mettre un enseignant pour plusieurs niveaux d’enseignement afin de limiter les coûts (ex : une école qui a 60 élèves de la 1ère à la 6ème année peut être amenée à créer deux classes : une classe comprenant les niveaux de 1ère, 2ème et 3ème année et une classe comprenant les niveaux de 4ème, 5ème et 6ème année avec un enseignant pour chacune de ces classes soit deux enseignants pour l’école au lieu de six sans la mise en place du multigrade). Deux autres modes d’organisation scolaire existants aussi sont le flux multiple50 et la vacation multiple51. Le flux multiple est utilisé face à deux contraintes : la première qui est une réduction des coûts liée au fait qu’il n’y a qu’un enseignant pour plusieurs classes et la seconde qui est le déficit de salle de classe ne permettant pas de scolariser plusieurs classes dans une école à un même moment. La vacation multiple, quant à elle, est liée uniquement à un déficit en salle de classe ne permettant pas de scolariser plusieurs classes dans une école à un même moment. La Guinée-Bissau présente la particularité d’avoir un enseignement de base dont les trois modes d’organisation scolaire cités précédemment (multigrade, flux multiple et vacation multiple) sont présents. Deux modes d’organisation scolaire sont même parfois utilisés pour un seul maître et pour une seule salle 48 Alors que le nombre d’heures officiel à dispenser était de 23 heures par enseignant en 2005/06. Aujourd’hui, le nombre d’heures officiel à dispenser pour un enseignant du secondaire est de 31 heures. 49 Une classe multigrade est une classe à plusieurs niveaux tenue par un seul enseignant qui fait cours à ces élèves de plusieurs niveaux en même temps (ex. classe comprenant des élèves de 1ère et de 2ème année). 50 Le flux multiple consiste à ce qu’un enseignant fasse cours à un groupe d’élèves à un moment de la journée et à un autre groupe d’élèves de niveau identique ou différent à un autre moment de la journée dans la même salle de classe. 51 La vacation multiple consiste à ce qu’un enseignant fasse cours à ses élèves à un moment de la journée dans une salle de classe et qu’un autre enseignant fasse cours à ses élèves à un autre moment de la journée dans la même salle de classe. de classe (ex. multigrade et flux multiple) Toutefois, les données disponibles ne permettent pas de distinguer le flux multiple et la vacation multiple. Par conséquent, les analyses qui suivent parlent de vacation multiple sans savoir s’il s’agit réellement de flux multiple ou de vacation multiple. Pour mieux comprendre l’ampleur de ces types d’organisation scolaire en Guinée-Bissau, il est important déjà de bien situer le nombre de salles de classe disponibles et le nombre de groupes pédagogiques52 dans les écoles publiques du territoire. Le graphique 5.3 présente cette situation. Graphique 5.3 : Nombre de groupes pédagogiques et nombre de salles de classe dans l’enseignement de base public, 2005-2006 6000 5000 4000 3000 5 589 2000 2 455 1000 0 Nombre de groupes pédagogiques Nombre de salles de classe 5 En 2005/06, on compte 5 589 groupes pédagogiques pour 2 455 salles de classe dans les écoles publiques d’enseignement de base bissau-guinéennes soit un rapport de 2,3 groupes pédagogiques par salles de classe. Un premier point consiste à observer le nombre de groupes pédagogiques en situation de multigrades. Le tableau 5.4 présente cette situation pour l’année 2005/06. La gestion du système Source : calcul des auteurs à partir de la base de données scolaire 2005/06 de la GIPASE. 125 52 Un groupe pédagogique est un groupe d’élèves de même niveau. Toutefois, dans une même école, il peut y avoir plusieurs groupes pédagogiques de même niveau (ex. un groupe pédagogique de 2ème année de 40 élèves et un autre groupe pédagogique de 2ème année de 35 élèves). Tableau 5.3 : Nombre de groupes pédagogiques en situation de classe multigrade, 2005-2006 Nombre de grades Nombre de groupes pédagogiques % % cumulé 1 3 582 64,1 64,1 2 1 336 23,9 88,0 3 177 3,2 91,2 4 20 0,4 91,6 Non renseigné 474 8,4 100,0 Total 5 589 100 Source : calcul des auteurs à partir de la base de données scolaire 2005/06 de la GIPASE. Les résultats sur le multigrade montrent que les écoles d’enseignement de base ont recours à ce type d’organisation scolaire en Guinée-Bissau de façon prononcée. Si environ 64 % des groupes pédagogiques se retrouvent dans des classes ayant un seul grade d’enseignement, environ 28 % des groupes pédagogiques se retrouvent dans des classes multigrades c’est-à-dire avec d’autres groupes pédagogiques de niveau d’enseignement différents, 8 % des groupes pédagogiques n’étant pas renseigné. Ainsi, on compte environ 24 % de groupes pédagogiques en situation de classes multigrade à deux niveaux d’enseignement, 3 % en situation de classe multigrade à trois niveaux d’enseignement et 0,4 % en situation de classe multigrade à quatre niveaux d’enseignement. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Le second point consiste à observer le nombre de salles de classe (au nombre de 3 587) qui est en situation de vacation multiple selon le nombre de vacations. Le tableau 5.5 présente cette situation pour l’année 2005/06. 126 Tableau 5.4 : Nombre de salles de classe en situation de vacation multiple, selon le nombre de vacations, 2005-2006 Nombre vacations Nombre de salles de classe % % cumulé 1 704 28,7 28,7 2 1 368 55,7 84,4 3 283 11,5 95,9 4 18 0,7 96,6 100,0 Non renseigné 82 3,4 Total 2 455 100 Source : calcul des auteurs à partir de la base de données scolaire 2005/06 de la GIPASE. Les résultats du tableau 5.5 montrent que l’usage de la vacation multiple est très prononcée dans l’enseignement de base étant donné qu’environ 56 % des salles de classe accueillent deux groupes d’élèves à des moments différents de la journée, 11,5 % des salles de classe accueillent trois groupes d’élèves à des moments différents et moins de 1 % des salles reçoivent quatre groupes d’élèves dans une journée à différents moments. Seules environ 29 % des salles de classe ne reçoivent qu’un groupe d’élèves durant toute une journée. Ces résultats montrent donc qu’il y a un déficit important de salles de classe. La vacation multiple est beaucoup plus prononcée que l’usage du multigrade alors même que celle-ci peut avoir des conséquences sur le temps scolaire. En effet, les différentes études menées sur le continent africain montre que les élèves qui se trouvent dans des classes à vacations multiples auraient en moyenne 200 heures de moins d’apprentissage par an que les autres alors même que le lien entre acquisitions scolaires et temps d’apprentissage est fortement corrélé (ADEA, 2003). Il sera donc extrêmement utile de quantifier le temps d’apprentissage pour les élèves bissau-guinéens scolarisés dans des classes en multiple vacation. L’évaluation des apprentissages que le PASEC53 doit mener sur l’année scolaire 2008/09 permettra déjà de voir quel est le lien entre acquisitions des élèves et ce type d’organisation scolaire. Principaux enseignements du chapitre 5 : Efficience dans l’usage des dépenses publiques et dans la gestion du système Ce chapitre examine l’impact des dépenses publiques d’éducation sur la durée de scolarisation moyenne d’un individu bissau-guinéen et l’efficience dans la gestion du système en se focalisant particulièrement sur l’allocation du personnel enseignant. Les différents modes d’organisation scolaire sont également abordés dans ce chapitre. 1. Des progrès peuvent encore être réalisés dans la gestion administrative des enseignants de l’enseignement de base 20 % des affectations d’enseignants ne s’expliquent pas par le seul fait du nombre d’élèves dans les écoles d’enseignement de base publiques du pays. Des progrès peuvent encore être réalisés étant donné que les pays les plus performants comme la Guinée obtiennent un chiffre inférieur à 10 %. L’analyse au niveau régionale montre des déséquilibres dans l’allocation de ce personnel enseignants entre régions puisque les ratios élèves par maître varient de 35,9 dans la région du Secteur autonome de Bissau à 70,6 dans la région de Quinara. Il existe également des déséquilibres en enseignants entre écoles à l’intérieur même des régions. 5 Les écoles publiques d’enseignement de base en Guinée-Bissau ne disposent que de 2 455 salles de classes alors qu’il y a 5 549 groupes pédagogiques. Ainsi, 28 % de groupes pédagogiques se retrouvent en situation de classes multigrades mais cette forme d’organisation scolaire n’est pas la plus prononcée. En effet, entre 68 et 71 % des salles de classes accueillent plusieurs classes dans une journée à des moments différents de la journée alors même que ce type d’organisation scolaire diminue significativement le temps d’apprentissage des élèves et a donc un impact négatif sur les apprentissages. La gestion du système 2. Les vacations multiples : un mode d’organisation scolaire très répandu 127 53 Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN (Conférence des ministres des pays ayant le français en partage). L’efficacité externe du Chapitre 6 : système éducatif sur la sphère sociale Ce chapitre examine l’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale, autrement dit : i) l’usage que font les sortants du système éducatif au cours de leur vie d’adulte des connaissances qu’ils ont pu acquérir à l’école et, ii) les bénéfices collectifs que la société retire à moyen terme des investissements réalisés dans l’éducation. Sur la base des informations disponibles, il décrit l’impact de l’éducation sur la sphère sociale en particulier à travers l’impact de l’éducation de la femme sur les comportements liés à la reproduction, à la santé, à la protection de la femme et au civisme. Les données disponibles n’ont par contre pas permis d’analyser l’efficacité externe du système éducatif sur la sphère économique. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Ce chapitre analyse donc l’effet de l’éducation sur l’adoption de comportements positifs ou attendus des individus au niveau social. L’effet spécifique de chaque année d’études est évalué comparativement aux autres années54. Pour mesurer l’impact de l’éducation sur les domaines étudiés, un modèle économétrique a été utilisé en introduisant des variables de contrôle. Cela signifie que l’on compare des individus qui ont exactement les mêmes caractéristiques, à l’exception de la variable « nombre d’années d’études » dont on cherche à tester l’effet. Dans cette analyse, on contrôle l’âge de l’individu, l’effet du milieu de résidence (rural/urbain) et le niveau de vie du ménage. Lorsqu’on abordera le civisme à travers la déclaration des naissances à l’état civil et la santé infanto-juvénile, l’âge des enfants est également contrôlé. Par cette méthode, on parvient ainsi à voir si les personnes adoptent bien des comportements sensiblement différents selon le niveau d’éducation55. Les données mobilisées afin de mesurer l’impact de l’éducation sur la sphère sociale sont issues de l’enquête MICS 2006. I. Effet de l’éducation sur la reproduction Dans cette section, on cherche à identifier l’existence de relation entre le nombre d’années d’études de la mère et quelques éléments associés à la reproduction. Nous analysons quatre variables de résultats ou de comportement à savoir : - l’âge moyen au premier accouchement ; - la probabilité d’utiliser un moyen contraceptif ; - le nombre d’années moyen d’espacement des naissances ; - le nombre moyen d’enfants. 128 54 Il s’agit de comparer les femmes en fonction du nombre d’années d’études. 55 Les analyses qui vont suivre prennent en compte le nombre d’années d’études de l’individu qui influe sur le revenu du ménage et sa localisation, qui eux même ont un effet sur les domaines d’impact sociaux. Dans les modèles comprenant les trois variables comme explicatives, l’effet du nombre d’années d’études est sous-estimé. Par contre dans les modèles sans le revenu et la localisation, l’effet du nombre d’années d’études est surestimé. Ainsi, les analyses menées dans le cadre de ce chapitre et prenant en compte les trois variables explicatives, sous-estiment légèrement l’effet du nombre d’années d’études sur la sphère sociale. Le tableau 6.1 montre que plus le nombre d’années d’études est important, plus les femmes adoptent des comportements dans le sens d’une réduction de la fécondité. Tableau 6.1 : Effet du nombre d’années d’études sur la reproduction chez les femmes âgées de 15 à 49 ans Nombre d’années d’études Age moyen de la mère au premier accouchement aucune 18,2 9,0 2,6 3,3 Nombre moyen d’enfants 1 année 18,2 11,6 2,7 3,2 2 années 18,2 14,3 2,8 3,1 3 années 18,2 17,3 2,8 3,1 4 années 18,2 20,3 2,9 2,9 5 années 18,3 23,1 3,0 2,8 6 années 18,5 25,8 3,1 2,7 7 années 18,7 28,1 3,2 2,5 8 années 18,9 30,0 3,3 2,4 9 années 19,2 31,4 3,4 2,2 10 années 19,5 32,3 3,4 2,0 11 années 19,9 32,6 3,5 1,8 12 années 20,4 32,6 3,6 1,6 13 années 20,8 32,6 3,7 1,4 14 années 21,4 32,6 3,8 1,2 Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Concernant l’âge moyen de la mère pour un premier accouchement, on observe une différence de 3,2 années entre une femme qui n’est jamais allée à l’école (environ 18,2 ans) et une femme qui a fait 14 années d’études (21,4 ans), à niveau d’âge, à niveau de vie et à milieu de résidence identiques. En revanche, on ne note quasiment pas de différence entre une femme qui a fait l’ensemble de l’enseignement de base c’est-àdire six années d’études (18,5 ans) et quelqu’un qui n’a jamais été scolarisé. C’est réellement à compter de l’enseignement secondaire et au fil des années d’études que l’âge moyen pour un premier accouchement augmente. L’utilisation d’une méthode contraceptive est corrélée positivement avec le niveau d’instruction des femmes. Pour un niveau d’âge, un niveau de vie et un milieu de résidence donnés, la probabilité d’utiliser une méthode de contraception est faible pour les femmes qui ne sont pas allées à l’école (9 %) et cette probabilité va en augmentant avec le nombre d’années d’études : 25,8 % pour six années, 31,4 % pour neuf années et 32,6 % à partir de 11 années d’études. Cela dit, on n’observe plus de gain supplémentaire dans la probabilité d’utiliser une méthode contraceptive après 11 années d’études, autrement dit, dans ce domaine, le maximum d’efficacité est atteint à la fin de l’enseignement secondaire complémentaire et l’enseignement supérieur n’entraîne plus de gain supplémentaire. 6 L’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale Probabilité d’utiliser une Nombre d’années méthode contraceptive moyen d’espacement (en %) des naissances 129 En moyenne, l’espacement des naissances est de l’ordre de 2,6 années pour une femme qui n’a jamais été à l’école. Ce nombre augmente progressivement avec le niveau d’études, toujours en contrôlant l’âge, le niveau de vie et le milieu de résidence, pour atteindre 3,8 années au bout de 14 années d’études. L’impact de l’éducation sur l’espacement des naissances commence dès les premières années d’études et continue jusqu`à l’enseignement supérieur. Enfin, de façon similaire, on note une nette différence sur le nombre moyen d’enfants entre les femmes sans instruction (3,3 enfants) et les femmes ayant fait des études : 2,7 enfants par femme au bout de six années, 2,2 au bout de 9 années, 1,8 au bout de 11 années et 1,2 enfants par femme au bout de 14 années d’études. II. Effet de l’éducation sur les comportements liés à la santé Concernant la santé, nous nous sommes intéressés principalement à trois domaines que sont (i) la santé maternelle ; (ii) la santé infanto-juvénile ; et (iii) le VIH/SIDA. II.1 Effet de l’éducation sur la santé maternelle Les variables étudiées ici en termes de santé maternelle sont au nombre de quatre. On cherche à mettre en relation le nombre d’années d’études de la femme à niveau d’âge, à niveau de vie et à milieu de résidence donnés avec : - la probabilité de consulter un spécialiste de santé avant les naissances des enfants (consultations prénatales) ; - la probabilité de se vacciner contre le tétanos avant l’accouchement ; GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF - la probabilité d’avoir recours à l’assistance d’un professionnel lors de l’accouchement ; 130 - la probabilité de prendre de la vitamine A après l’accouchement. Le graphique 6.1 présente les probabilités d’avoir des comportements favorables sur la santé maternelle en fonction du nombre d’années d’études pour les femmes de 15 à 49 ans. Concernant la prise de vitamines A après l’accouchement et l’assistance d’un professionnel à l’accouchement, les gains en termes de comportements favorables se font à l’enseignement de base : probabilité de 67 % de prendre de la vitamine A après l’accouchement pour les femmes ayant au moins 5 années d’études (contre 57 % sans niveau d’instruction) ; probabilité de 65 % de faire appel à l’assistance d’un professionnel lors de l’accouchement pour les femmes ayant achevé l’enseignement de base (6ème année) et 66 % pour les femmes ayant fait au moins 7 années d’études (contre 41 % pour les femmes n’ayant jamais été scolarisées). On note que les probabilités de procéder à des consultations prénatales et à la vaccination anti-tétanos avant l’accouchement sont de façon globale plus importantes que respectivement la prise de vitamines A et l’appel à l’assistance d’un professionnel lors de l’accouchement et les pourcentages augmentent progressivement avec le nombre d’années d’études : de 78 % pour les femmes sans niveau d’instruction à 94 % pour les femmes ayant 14 années d’études de probabilités de consulter un spécialiste avant la naissance, et de 72 % pour les femmes sans aucune année d’études à 86 % pour les femmes ayant 14 années d’études de probabilités de se faire vacciner contre le tétanos avant l’accouchement. Graphique 6.1 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans adoptent des comportements favorables sur la santé maternelle suivant le nombre d’années d’études, exprimée en % 100% consultations prénatales 90% 80% vaccination anti tétanos avant accouchement prise de vitamines A après accouchement 70% 60% assistance d'un professionnel pendant l'accouchement 50% 40% 30% 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 Nombre d'années d'études Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Il s’agit ici d’identifier l’existence de relation entre l’éducation des femmes et leurs comportements en matière de santé de leurs enfants. On cherche à mettre en relation le nombre d’années d’études de la femme à niveau d’âge, à niveau de vie, à milieu de résidence donnés ainsi qu’à âge donné pour l’enfant avec : - la probabilité de faire vacciner leurs enfants de moins de 5 ans56 ; - la probabilité de se rendre dans un établissement sanitaire en cas de fièvre de leurs enfants de moins de 5 ans ; - la probabilité d’utiliser une moustiquaire pour prémunir du paludisme leurs enfants de moins de 5 ans. Le graphique 6.2 présente la probabilité pour les femmes de 15 à 49 ans d’adopter ces comportements suivant chaque année d’étude. Les calculs montrent qu’en moyenne, la probabilité pour les femmes de faire vacciner leurs enfants de moins de cinq ans n’est que de 33 %. Et cette probabilité croît de façon continue avec le nombre d’années d’étude de la femme : de 26 % pour les femmes n’étant jamais allées à l’école à 50 % pour les femmes ayant fait l’enseignement supérieur. 6 L’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale II.2 Effet de l’éducation sur la santé infanto-juvénile 131 56 Il est considéré ici que l’enfant est totalement vacciné s’il a reçu les vaccins suivants : BCG, polio, DTCoq, rougeole et fièvre jaune. L’effet de l’éducation s’observe également dans le comportement adopté en cas de fièvre chez l’enfant. La probabilité de consulter un établissement sanitaire en cas de fièvre chez l’enfant de moins de 5 ans est en moyenne de 42 % avec de fortes variations : de 39 % pour les femmes sans niveau d’instruction à 62 % chez les femmes ayant suivi l’enseignement supérieur. Au niveau de la lutte contre le paludisme qui est une grande cause de mortalité infantile et juvénile, l’analyse montre que la probabilité chez les femmes d’utiliser une moustiquaire de prévention contre la maladie pour leurs enfants de moins de cinq ans est de 73 % et s’accroît avec le nombre d’années d’études. On note que l’accroissement est concentré dans les six premières années d’études. Ainsi, il passe de 71 % pour les femmes sans niveau d’éducation à 81 % pour celles ayant atteint au moins la 6ème année d’études. Au-delà de l’enseignement de base, on n’observe aucune amélioration dans l’utilisation d’une moustiquaire. Graphique 6.2 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans adoptent des comportements favorables sur la santé infantile suivant le nombre d’années d’études, exprimée en % 85% 80% utilisation d'une moustiquaire pour l'enfant 75% 70% 65% consultation d'un établissement sanitaire en cas de fièvre chez l'enfant 60% 55% 50% faire vacciner l'enfant 45% GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 40% 132 35% 30% 25% 20% 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. II.3 Effet de l’éducation dans la lutte contre le VIH/SIDA La Guinée-Bissau est marquée par un taux de prévalence du VIH/SIDA de 8,7 % en 2006 (rapport de l’enquête ménage MICS 2006). Il s’agit ici d’analyser, dans un premier temps, la probabilité qu’une femme âgée de 15 à 49 ans ait déjà entendu parler du VIH/SIDA. Cette question sera complétée dans un second temps, par l’analyse de la connaissance des femmes sur le VIH/SIDA (sur une échelle allant de 0 à 11, 0 représentant aucune connaissance et 11 une très bonne connaissance) portant principalement sur les modes de contraction du virus. Et dans un troisième temps, l’analyse se concentrera sur la probabilité qu’un individu soit tolérant face aux malades du sida. Cette tolérance est jugée sur une échelle allant de 0 à 4 (allant d’intolérant à très tolérant). Le graphique 6.3 présente la probabilité pour les individus d’avoir ou d’adopter des comportements positifs par rapport au VIH/SIDA suivant le nombre d’années d’études. Une forte proportion de femmes en Guinée-Bissau ne connait pas la maladie du VIH/SIDA puisque 27 % d’entre elles âgées entre 15 et 49 ans n’ont jamais entendu parler de cette maladie et que 36 % ont une connaissance nulle des modes de contraction du virus. 26 % des femmes ayant déjà entendu parler du VIH/ SIDA sont totalement intolérantes (échelle 0) vis-à-vis des malades du VIH/SIDA. La connaissance du VIH/SIDA et notamment des modes de contraction s’améliore très faiblement avec le nombre d’années d’études, à âge, milieu de résidence et niveau de vie donnés, puisque la probabilité d’avoir une meilleure connaissance du virus passe de 97 % pour les femmes sans niveau d’instruction à environ 100 % à partir de trois années d’études. Cela signifie donc, d’une part, que la connaissance du VIH/ SIDA est faible chez les femmes bissau-guinéennes en général mais, d’autre part, que cette connaissance reste faible même chez celles qui ont un niveau d’études plus élevé. Concernant la probabilité d’avoir déjà entendu parler du VIH/SIDA, celle-ci augmente avec le nombre d’années d’études passant de 65 % pour les femmes sans instruction à 82 % à partir de six années d’études. Enfin concernant la tolérance vis-à-vis des malades du VIH/SIDA, la probabilité d’être plus tolérant augmente également avec le niveau d’études passant de 80 % pour les femmes n’étant jamais allées à l’école à 88 % pour les femmes ayant suivi au moins sept années d’études. Les résultats en terme de relation entre le nombre d’années d’études et la question du VIH/SIDA doit amener l’ensemble des acteurs du système éducatif et de la santé à s’interroger sur la pertinence des programmes scolaires vis-à-vis de cette question extrêmement importante pour l’avenir du pays. Il semble donc opportun de s’interroger plus en détail sur le contenu des programmes scolaires dès l’enseignement de base et plus globalement aux questions d’éducation à la santé. Graphique 6.3 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans adoptent des comportements favorables vis-à-vis du VIH/SIDA suivant le nombre d’années d’étude, exprimée en % avoir une meilleure connaissance du VIH/SIDA 95% avoir déjà entendu parlé du VIH/SIDA 90% être plus tolérant vis-à-vis des malades du VIH/SIDA 85% 80% 75% 70% 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 6 L’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale 100% 14 Nombre d'années d'études 133 Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. III. Effet de l’éducation sur les comportements liés à la protection de la femme Ici, l’objectif est de rechercher comment l’éducation peut influencer l’attitude des femmes vis-à-vis de l’excision (probabilité que la femme soit défavorable à l’excision). L’excision est encore très pratiquée en Guinée-Bissau et beaucoup de femmes, même si ce n’est pas une majorité, y sont favorables : 40 % des femmes de 15 à 49 ans sont encore favorables à cette pratique selon les analyses menées sur la base de données du MICS 2006. Pourtant, la lutte contre l’excision constitue une priorité en matière de santé et d’épanouissement de la femme pour le gouvernement bissau-guinéen. Le graphique 6.4 présente la probabilité pour les femmes de 15 à 49 ans d’être défavorables à l’excision suivant le nombre d’années d’études à âge, milieu de résidence et niveau de vie donnés. Graphique 6.4 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans soient défavorables à l’excision suivant le nombre d’années d’études, exprimée en % 90% 85% défavorable à l'excision 80% 75% 70% GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 65% 134 60% 55% 50% 45% 40% 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. L’analyse montre que la probabilité qu’une femme soit défavorable à l’excision augmente significativement avec le nombre d’années d’études, pour atteindre son maximum à compter de 10 années d’études (88 %). Les femmes sans instruction présentent une probabilité faible d’être défavorables à l’excision (46 %). Il apparaît donc opportun de traiter la question de l’excision et de ses méfaits dans les programmes scolaires, dès l’enseignement de base. IV. Effet de l’éducation sur les comportements liés au civisme Une des attentes de la société vis-à-vis de l’éducation est de former des citoyens qui participent activement à la vie civique. Il aurait été intéressant de pouvoir analyser l’effet du nombre d’années d’études sur les différents aspects liés à la gestion de la collectivité. Cela étant, faute de données suffisantes, l’analyse est faite uniquement sur l’effet de l’éducation sur l’enregistrement des naissances à l’état civil (à âge, milieu de résidence et niveau de vie donnés) ainsi qu’à âge donné pour l’enfant. Ainsi, il ressort du graphique 6.5 que plus le nombre d’années d’études des femmes augmente plus la probabilité d’enregistrer la naissance de leur enfant à l’état civil augmente : de 10 % pour les femmes sans aucune instruction, la probabilité de déclaration des naissances augmente progressivement à 30 % pour les femmes ayant fait l’enseignement supérieur. La probabilité moyenne n’est que de 14 % et reste faible même avec l’augmentation du nombre d’années d’études. Graphique 6.5 : Probabilité que les femmes de 15 à 49 ans enregistrent les naissances de leurs enfants à l’état civil suivant le nombre d’années d’études, exprimée en % 35% 30% enregistrement des naissances à l'état civil 25% 20% 15% 10% 5% 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 Nombre d'années d'études Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. V. Analyse des gains marginaux Si dans les parties précédentes, l’analyse a considéré le nombre individuel d’années d’études, dans cette dernière partie, l’élément de base sera constitué de chaque niveau d’enseignement pris dans son ensemble. Afin de mieux apprécier leur apport à l’adoption des comportements sociaux attendus, une analyse des gains marginaux pour les différents aspects sociaux étudiés a été faite. Elle a consisté à déterminer le gain moyen, c’est-à-dire la valeur ajoutée entre deux niveaux d’éducation achevés consécutifs : aucun niveau et niveau d’enseignement de base, niveau d’enseignement de base et enseignement secondaire général, enseignement secondaire général et enseignement secondaire complémentaire, enseignement secondaire complémentaire et enseignement supérieur57. Le calcul de la valeur ajoutée de chaque niveau permet de répondre aux questions : les effets sociaux de l’éducation sont-ils croissants avec le niveau d’éducation ? Sont-ils présents dès les niveaux les plus bas d’éducation ou leur ampleur n’est importante qu’à partir d’un certain niveau d’éducation ? Le tableau 6.2 présente la mesure consolidée de l’impact social des différents niveaux éducatifs. 57 Pour l’enseignement supérieur, il a été considéré trois années d’études au supérieur comme niveau d’éducation achevé. 6 L’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale 0 135 Les effets sur les comportements liés à la reproduction Pour ce qui est des comportements liés à la reproduction, on constate un impact appréciable en termes de gains pour chacun des différents niveaux : enseignement de base (38 %), enseignement secondaire général (23 %), enseignement secondaire complémentaire (15 %) et enseignement supérieur (25 %). En ce qui concerne spécifiquement l’âge de la mère au premier accouchement, l’enseignement supérieur assure à lui seul près de la moitié de l’impact, ce qui peut paraître normal étant donné que les femmes qui font plus d’études ont tendance à se marier plus tard et donc à avoir des enfants à un âge supérieur aux autres. En ce qui concerne la contraception, on note que l’enseignement de base assure à lui seul 71 % de l’impact de l’éducation sur l’utilisation d’une contraception. L’enseignement secondaire général assure 24 % de cet impact et l’enseignement secondaire complémentaire, seulement 5 %. Par rapport au nombre d’enfants (dans le sens d’une réduction de la fécondité), on constate que chaque niveau apporte un gain substantiel : 29 % à l’enseignement de base, 22 % à l’enseignement secondaire général, 18 % à l’enseignement secondaire complémentaire et 31 % au supérieur. Les effets sur les comportements liés à la santé Pour ce qui est des comportements liés à la santé, on constate que l’enseignement de base à lui seul assure 76 % de l’impact en termes de gains. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Au niveau de la santé maternelle, l’enseignement de base assure à lui seul 75 % des comportements positifs, l’enseignement secondaire général 12 %, l’enseignement secondaire complémentaire 6 % et l’enseignement supérieur 7 %. 136 Tableau 6.2 : Mesure consolidée58 de l’impact social des différents niveaux éducatifs dans une variété de dimensions sociales Domaine d’impact Comportements liés à la reproduction Écart entre sans Écart Écart entre Écart entre instruction et entre EB ESG et ESC et niveau EB et ESG ESC supérieur 38 23 15 25 Total 100 Age de la mère au premier accouchement 10 23 22 45 100 Utiliser une méthode contraceptive 71 24 5 0 100 Espacement des naissances 43 21 14 22 100 Nombre d’enfants 29 22 18 31 100 Comportements liés la santé 76 11 6 7 100 - Santé maternelle 75 12 6 7 100 Consultations prénatales 56 20 11 13 100 Vaccin anti tétanos avant l’accouchement 49 21 13 17 100 58 Si l’on prend l’exemple « utiliser une méthode contraceptive », l’écart entre la probabilité estimée d’avoir eu ce comportement chez les femmes n’ayant jamais été à l’école (9 %) et celles ayant atteint un niveau d’éducation supérieur (33 %) est de 24 % (33 % - 9 %). On normalise cet écart à 100 % ce qui permet d’obtenir la contribution de chaque niveau d’enseignement : si l’écart de probabilité entre une femme sans éducation formelle et une autre avec un niveau supérieur est de 100 %, la décomposition de cet écart nous dit que celui entre une femme sans éducation et une femme ayant atteint le primaire est de 71 % ((26 % - 9 %) / 24 %)) ; c’est-à-dire l’écart de probabilité entre « enseignement de base » et « sans éducation » divisé par l’écart de probabilité entre « éducation supérieure » et « sans éducation ». 94 6 0 0 100 Prise de vitamines A après l’accouchement 100 0 0 0 100 - Santé infantile 60 15 10 15 100 Faire vacciner son enfant 40 22 15 23 100 Consulter un établissement sanitaire en cas de fièvre chez l’enfant 43 22 14 21 100 Utiliser une moustiquaire pour l’enfant 98 2 0 0 100 - VIH/SIDA 93 6 1 0 100 Avoir déjà entendu parlé du VIH/SIDA 87 10 3 0 100 Avoir une meilleure connaissance du VIH/ SIDA 99 1 0 0 100 Être plus tolérant vis-à-vis des malades du VIH/SIDA 94 6 0 0 100 Comportements liés à la protection de la femme 90 9 1 0 100 Être défavorable à l’excision 90 9 1 0 100 Comportement en matière de civisme 33 22 17 28 100 Enregistrer les naissances à l’état civil 33 22 17 28 100 Ensemble (Total = 100) 65 16 10 15 100 Indice (primaire =100) 100 25 15 23 Dépense publique annuelle par élève (FCFA 2006) 11744 24 260 24 260 54 597 Dépense publique cumulée (FCFA 2006) 70 464 72 780 48 520 163 791 100 24 22 10 Indice global Bénéfice-coût (primaire =100) Source : MICS 2006 et calcul des auteurs. Concernant la santé infanto-juvénile, les gains les plus importants sont également au niveau de l’enseignement de base (60 %). Toutefois, les gains concernant la vaccination des enfants et la consultation d’un établissement sanitaire en cas de fièvre chez l’enfant représentent moins de la moitié des gains pour l’enseignement de base avec respectivement 40 et 43 %. Par contre, 97 % des gains relatifs à l’utilisation d’une moustiquaire pour prémunir les enfants du paludisme sont obtenus dès l’enseignement de base. Enfin, concernant le VIH/SIDA, l’essentiel des gains sont obtenus au niveau de l’enseignement de base (93 %). L’enseignement supérieur ne présente aucun gain supplémentaire sur la question du VIH/SIDA par rapport aux autres niveaux d’enseignement. 6 L’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale Assistance d’un professionnel à l’accouchement Les effets sur les comportements liés à la protection de la femme Sur cette préoccupation, il ressort que l’enseignement de base apporte à lui seul une valeur ajoutée de 90 % aux femmes afin qu’elles soient défavorables à l’excision et 9 % pour l’enseignement secondaire général. 137 Les effets sur les comportements en matière de civisme Tous les niveaux d’enseignement apportent une valeur ajoutée au fait d’enregistrer les naissances des enfants à l’état civil : 33 % pour l’enseignement de base, 22 % pour l’enseignement secondaire général, 17 % pour l’enseignement secondaire complémentaire et 28 % pour l’enseignement supérieur. Éléments de synthèse sur les effets marginaux de chaque niveau d’enseignement sur les variables sociales étudiées Si l’on considère l’ensemble des dimensions sociales abordées dans cette section (impact social de l’éducation) et en donnant à chacune une importance identique, on s’aperçoit (même si la démarche est grossière) que l’enseignement de base est le niveau d’éducation qui génère les impacts sociaux les plus manifestes. Au total, 65 % des effets sociaux59 de l’éducation sont déjà obtenus du fait que l’élève ait fait l’enseignement de base (moyenne des contributions de l’enseignement de base des quatre catégories sociales considérées, sans pondération des variables). A la marge, la poursuite d’études à l’enseignement secondaire général apporte une contribution positive mais nettement plus faible (16 %), de même que l’enseignement secondaire complémentaire (10 %) ou l’enseignement supérieur (15 %). GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF La prise en compte des coûts unitaires publics de scolarisation contribue à renforcer le rapport gain / coût60 (ratio bénéfice marginal social/coût marginal public) de l’enseignement de base comparativement aux autres niveaux d’enseignement, comme le montre le tableau 6.2. Pour les autres cycles d’enseignement, on se rend compte que les rapports gains/coûts sont faibles par rapport à celui de l’enseignement de base : celui de l’enseignement secondaire général en représente 25 %, celui de l’enseignement secondaire complémentaire représente le rapport le plus faible avec 15 % et celui du supérieur en représente 23 %, du fait de coûts unitaires de formations supérieurs à ceux de l’enseignement de base et d’un bénéfice marginal social moindre que celui de l’enseignement de base. 138 59 Les effets sociaux étudiés dans ce chapitre. 60 Par exemple, pour l’enseignement secondaire général, cet indicateur rapporte l’impact marginal lié à l’achèvement de ce cycle sur l’ensemble des dimensions sociales considérées dans ce texte, aux dépenses publiques supplémentaires, nécessaires pour faire passer un jeune de la fin du cycle d’enseignement de base à la fin de l’enseignement secondaire général. Le calcul fait l’hypothèse d’une efficacité interne de 100 %, ce qui n’est pas le cas (cf. chapitre 3). Mais la prise en compte des caractéristiques réelles du fonctionnement du système éducatif national (probabilités d’abandons et de redoublements) est sans conséquence majeure sur la hiérarchie entre les rapports gains/coûts estimés pour les différents niveaux d’éducation. Principaux enseignements du chapitre 6 : Efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale Ce chapitre examine l’impact de l’éducation et des différents niveaux scolaires sur la sphère sociale. Les analyses ont permis de distinguer la valeur ajoutée de chaque niveau d’enseignement sur les questions sociales suivantes : la reproduction, la santé, la protection de la femme et le civisme. 1. Des impacts forts de l’éducation dans le domaine social, en particulier de l’enseignement de base Une part importante des effets sociaux de l’éducation mesurés ici (reproduction, santé, protection de la femme et civisme) est acquise avec l’enseignement de base avec 65 % des effets apportés par ce niveau d’enseignement. L’enseignement secondaire général contribue à hauteur de 16 %, l’enseignement secondaire complémentaire à hauteur de 10 % et l’enseignement supérieur à hauteur de 15 %. 2. L’enseignement de base présente des valeurs ajoutées plus importante que les autres niveaux d’enseignement mais avec des différenciations en fonction des questions abordées… Si l’enseignement de base contribue à un impact de 65 % en moyenne sur l’ensemble des questions sociales analysées, cet impact est moins important sur les comportements liés à la reproduction (38 %) et au civisme (33 %). Pour ces deux questions sociales, les autres niveaux d’enseignement présentent un impact non négligeable : impact de 25 % de l’enseignement supérieur sur la reproduction et de 28 % sur le civisme. En effet, les rapports gains / coût sont faibles pour les autres niveaux d’enseignement comparativement à l’enseignement de base : celui de l’enseignement secondaire général en représente 25 %, celui de l’enseignement secondaire complémentaire représente le rapport le plus faible avec 15 % et celui du supérieur en représente 23 %, du fait de coûts unitaires de formations supérieurs à ceux de l’enseignement de base et d’un bénéfice marginal social moins élevé. 4. D’où la nécessité d’universaliser l’enseignement de base au plus vite et d’intégrer certaines questions clés dans les programmes scolaires de ce cycle d’enseignement Le fort impact de l’enseignement de base sur la sphère sociale d’une part, et le rapport gain / coût montrent qu’il est nécessaire que la Guinée-Bissau universalise son enseignement de base dans les meilleurs délais (actuellement le taux d’achèvement du primaire n’est que de 48 %) tout en progressant selon les possibilités offertes vers l’enseignement secondaire général. Toutefois, les analyses sur la connaissance du VIH/SIDA et sur l’excision ont montré qu’il convient d’adapter les programmes scolaires dès l’enseignement de base pour que ceux-ci puissent avoir un impact positif en terme comportemental et ce, dès le plus jeune âge. 6 L’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale 3. Toutefois, la prise en compte des coûts unitaires publics de scolarisations contribue à renforcer le rapport gain /coût de l’enseignement de base comparativement aux autres niveaux d’enseignement… 139 Annexe du chapitre 6 : traitement et analyse de l’impact de l’éducation sur la sphère sociale À l’aide d’outils économétriques (modèles logit multivariés), l’effet du nombre d’années d’études sur les comportements a été estimé en contrôlant les effets (lorsqu’ils sont significatifs) que peuvent exercer l’âge, le niveau de vie, le milieu de résidence ainsi que l’âge de l’enfant lorsqu’il s’agit de civisme (déclaration des naissances) et de santé infanto-juvénile. D’autres facteurs peuvent également jouer un rôle à la fois sur l’éducation et les comportements mais les données dont nous disposons ne nous permettent pas de les contrôler. À partir de la relation estimée entre les comportements sociaux et le nombre d’années d’études, nous obtenons des probabilités estimées, calculées au point moyen de l’échantillon pour les variables de contrôle, d’avoir ces comportements pour chaque niveau d’éducation en contrôlant par ces autres caractéristiques. Enfin, une dernière opération permet de quantifier pour chaque niveau d’éducation le gain marginal (en termes de probabilité) supplémentaire pour chacune des variables de comportement et de voir si on observe des effets de seuil entre les cycles d’enseignement. Ce qui suit présente les coefficients des différents modèles logit multivariés réalisés sur les bases des données du MICS 2006 à partir du logiciel STATA. 1. Age au premier accouchement GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Coefficient 140 Nombre d’années d’études -0,1139108 Nombre d’années d’études au carré 0,02379462 Age 0,56038123 Age de la femme au carré -0,0064584 Score de l’indice de richesse -0,4339127 Score de l’indice de richesse au carré 0,19990663 Constante 8,12303857 2. Utilisation d’une contraception Coefficient Nombre d’années d’études 0,28640115 Nombre d’années d’études au carré -0,0129557 Age 0,1859548 Age de la femme au carré -0,0035789 Zone urbaine 0,53004518 Score de l’indice de richesse 0,42403069 Score de l’indice de richesse au carré -0,1201929 Constante -4,5563658 Coefficient 7. Assistance d’un professionnel à l’accouchement Coefficient Nombre d’années d’études 0,08671233 Age 0,08842474 Nombre d’années d’études 0,2637795 Age de la femme au carré -0,0010014 Score de l’indice de richesse 0,16193802 Nombre d’années d’études au carré -0,016487 Constante 0,96398035 Age -0,173885 Age de la femme au carré 0,0029136 4. Nombre d’enfants Coefficient Zone urbaine 0,4856186 Score de l’indice de richesse 0,744506 Constante 1,6818759 Nombre d’années d’études -0,06329 Nombre d’années d’études au carré -0,00636 Age 0,39571 Age de la femme au carré -0,002781 Nombre d’années d’études 0,1405195 Zone urbaine -0,170434 -0,011917 Score de l’indice de richesse -0,078822 Nombre d’années d’études au carré Score de l’indice de richesse au carré Score de l’indice de richesse 0,2171827 -0,063653 Constante 0,2747567 Constante -5,166959 8. Prise de vitamine A Coefficient 9. Être défavorable à l’excision 5. Consultations prénatales Coefficient Coefficient Nombre d’années d’études 0,1047607 Zone urbaine 0,4881614 Score de l’indice de richesse au carré 0,118005 Constante 0,9325774 6. Vaccination anti-tétanos Coefficient Nombre d’années d’études 0,0642094 Age -0,01112 Score de l’indice de richesse 0,101121 Constante 1,2272201 Nombre d'années d'études -0,436118 Nombre d'années d'études au carré 0,0216864 Zone urbaine -0,66046 Score de l'indice de richesse 0,3249651 Score de l'indice de richesse au carré -0,217215 Constante 0,6182148 6 L’efficacité externe du système éducatif sur la sphère sociale 3. Espacement des naissances 141 10. A Déjà entendu parler du VIH/SIDA 13. Déclaration des enfants à l’état civil Coefficient Nombre d'années d'études 0,3740559 Coefficient Nombre d'années d'études 0,0957204 Age -0,092694 Age de la femme au carré 0,0014186 Score de l'indice de richesse 0,7209457 0,3110033 Score de l'indice de richesse au carré -0,123106 Score de l'indice de richesse 0,9049633 Age de l'enfant 0,1015893 Score de l'indice de richesse au carré -0,2091405 Age de l'enfant au carré -0,000957 Constante -2,359131 Constante -0,3398686 Nombre d'années d'études au carré -0,0144584 Age 0,0957335 Age de la femme au carré -0,0017147 Zone urbaine 14. Vaccination des enfants 11. Connaissance du VIH/SIDA Coefficient Coefficient Nombre d'années d'études GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Nombre d'années d'études au carré 142 0,7236546 -0,0419038 Age 0,1633784 Age de la femme au carré -0,0027419 Zone urbaine 0,5043566 Score de l'indice de richesse 1,390648 Score de l'indice de richesse au carré -0,4193521 Constante 1,462136 12. Tolérance vis-à-vis des malades du VIH/SIDA Coefficient Nombre d'années d'études 0,0731374 Score de l'indice de richesse 0,3802512 Age de l'enfant 0,055143 Age de l'enfant au carré -0,0005904 Constante -1,888957 15. Visite d’un établissement sanitaire en cas de fièvre chez l’enfant Coefficient Nombre d'années d'études Score de l'indice de richesse Age de l'enfant Age de l'enfant au carré Constante 0,0645013 0,4669534 -0,072958 0,0010886 0,4998043 16. Utilisation d’une moustiquaire pour l’enfant Nombre d'années d'études 0,1388498 Nombre d'années d'études au carré -0,0083204 Nombre d'années d'études 0,1564698 Age 0,0277199 Nombre d'années d'études au carré -0,01059 Age de la femme au carré -0,0004632 Age 0,0826437 Age de la femme au carré -0,001178 Score de l'indice de richesse 0,3377526 Coefficient Zone urbaine 0,4113748 Score de l'indice de richesse 0,3143123 Score de l'indice de richesse au carré Score de l'indice de richesse au carré -0,156343 -0,0523469 Age de l'enfant -0,005886 Constante 0,8556235 Constante -0,11712 Annexe : Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme de la République de Guinée-Bissau Les chapitres précédents (1 à 6) ont fait un état assez détaillé des forces et des faiblesses structurelles du fonctionnement du système éducatif du pays, comme des contraintes et des espaces de liberté qui encadrent les évolutions possibles pour son développement. Ceci fournit une base de discussion des stratégies qu’il serait intéressant de prendre en compte pour les années à venir. Pour rendre concrètes ces discussions, il est utile de considérer les implications en matière de coûts et de financement de différentes options de politique éducative. Suite aux éléments de diagnostic, un modèle de simulation sectoriel a été construit, en intégrant tous les éléments connus tant dans le fonctionnement du système que dans son contexte macroéconomique. Cette note vise à illustrer une approche systématique qui prend en compte les implications dans ces dimensions pour évaluer l’option finale de politique éducative retenue. I. Les grandes priorités pour le développement du secteur de l’éducation Si un objectif majeur concerne l’achèvement universel du second cycle de l’enseignement de base avec des services de qualité améliorée, d’autres objectifs importants ne sont pas pour autant négligés. Ainsi, une dimension importante est l’expansion de la couverture du troisième cycle de l’enseignement de base (jusqu’à la neuvième année d’études). Les autres dimensions à considérer concernent i) l’enseignement préscolaire, ii) les programmes visant à impartir aux jeunes les compétences appropriées pour leur insertion dans la société et, iii) l’amélioration de l’enseignement supérieur pour répondre, en quantité et en qualité, aux demandes de l’économie et aux besoins de la société. Mais il faut noter qu’il y a nécessairement une dose de flexibilité dans la définition d’un programme de développement sectoriel car il existe toujours a) plusieurs façons d’interpréter un objectif, b) plusieurs manières d’organiser les services pour y répondre et c) des variantes possibles sur le cadre temporel dans lequel on envisage que les différents objectifs seraient atteints. Enfin, soulignons qu’une dimension importante de la définition de la stratégie sectorielle concernant les modes de fonctionnement des services n’est pas seulement qu’ils assurent les objectifs quantitatifs et qualitatifs, mais qu’ils les assurent de manière efficiente. Les chapitres du RESEN ont identifié des zones d’inefficience (par ex. l’allocation du personnel enseignant, le temps d’apprentissage faible dû à une organisation scolaire en vacations multiples) ; la stratégie vise aussi à corriger ces aspects du fonctionnement actuel du système éducatif bissau-guinéen. 61 Le second cycle de l’enseignement de base va jusqu’à la sixième année d’études en Guinée-Bissau A Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme Dans la mesure où le développement et la mise en application des politiques prennent du temps avant de produire des résultats tangibles, nous adoptons une perspective de moyen terme en ciblant l’année 2020. L’année de référence pour la communauté internationale en terme d’atteinte des Objectifs du millénaire est 2015, mais il est apparu plus réaliste pour un pays comme la Guinée-Bissau d’envisager d’atteindre l’achèvement du second cycle de l’enseignement de base universel61 en 2020. Dans l’évaluation des arbitrages de politique éducative, on peut partir de l’idée que certains objectifs sont plus importants ou plus urgents que d’autres. Alors qu’on pourrait identifier une longue liste de toutes les actions et de tous les investissements que l’on souhaiterait voir être mis en place, à chacun des niveaux éducatifs, dans une situation idéale, les contraintes physiques et budgétaires imposent que des choix soient faits. Dans ce contexte, comme tout arbitrage implique un compromis, le programme de développement sectoriel retenu s’évaluera à sa capacité de répondre aux problèmes les plus importants dans une perspective d’équilibre i) sur le plan quantitatif entre les différents niveaux et types d’enseignement et ii) entre les dimensions de quantité (couverture) et de qualité des services offerts dans chacun d’entre eux. 143 Notons aussi que si nous examinons principalement les aspects de soutenabilité financière à moyen terme, des limitations en termes de capacité de mise en œuvre vont aussi inévitablement exercer une influence sur le rythme auquel le secteur pourra se développer. II. Les ressources publiques pouvant être mobilisées pour le secteur Avant de considérer le coût d’un scénario concernant la production des services éducatifs, il est intéressant de faire des estimations du montant des ressources qui pourraient être mobilisées pour financer les dépenses du secteur. Dans la mesure où nous considérons une perspective de moyen terme pour le développement du système, il est pertinent de positionner le test de la soutenabilité financière au cours de l’année 2020. Par ailleurs, pour éviter l’usage d’hypothèses incertaines concernant le taux d’inflation de l’économie au cours des prochaines années, tous les calculs sont faits en monnaie constante, c’est-à-dire, en francs CFA de l’année 2010 (année de base considérée dans le modèle de simulation financière de l’éducation). Nous considérons ici essentiellement les ressources nationales62. Les ressources nationales dérivent des projections du PIB du pays, des recettes fiscales et non fiscales pour abonder les recettes publiques de l’État, et de la priorité que le pays accorde à son secteur de l’éducation, telle qu’on peut l’apprécier par le volume des dépenses publiques du secteur en proportion des recettes de l’État. L’exercice est basé sur les projections globales de l’économie bissau-guinéenne faites par le ministère des Finances et par le ministère de l’Économie. Comme toutes projections, l’exercice est caractérisé par un certain degré d’incertitude. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Le tableau 1, ci-après, propose des mesures du montant plausible des ressources pour le financement du fonctionnement du secteur. Plusieurs estimations sont proposées selon diverses hypothèses ; elles concernent d’une part la mobilisation globale des ressources, et d’autre part le niveau de priorité accordé par le pays au fonctionnement de son secteur éducatif au sein des recettes. 144 Tableau 1 : Une estimation du volume des ressources publiques qui pourraient être mobilisées pour le secteur de l’éducation en 2020 Recettes publiques 2020 PIB 2020 Scénario de mobilisation Taux de croissance des ressources annuel moyen 2010-2020 (%) Milliards FCFA de 2006 % du PIB Milliards FCFA de 2006 Ressources pour le secteur en 2020 % des recettes Milliards FCFA publiques de 2006 1 4,6 % 656,634 10,3 % 67,633 10,7 % 7,237 2 4,6 % 656,634 16,0 % 105,061 10,7 % 11,242 3 4,6 % 656,634 16,0 % 105,061 17,0 % 17,860 Trois scénarios de mobilisation des ressources publiques pour l’éducation sont ici envisagés : i) le premier scénario envisage une croissance du PIB au rythme de 4,6 % par an (valeur retenue par les perspectives macroéconomiques entre 2011 et 2020), une valeur de 10,3 % du PIB pour les recettes publiques (valeur identique à celle de 2010) et la part des dépenses d’éducation dans les recettes de l’État au niveau de 10,7 % (valeur identique à celle de 2010). Selon ces hypothèses, il est estimé que le 62 Les appuis budgétaires, qui représentent 18 % des ressources de l’État en 2010, n’ont pas été pris en compte dans les projections de long terme. Il est en effet quasiment impossible de prévoir leur évolution. PIB s’établirait en 2020 à 657 milliards de francs CFA de 201063, que les recettes de l’État seraient de 67,6 milliards de francs CFA et que les ressources pour l’éducation se monteraient alors à 7,2 milliards de francs CFA. ii) le second scénario envisage que le taux de croissance s’établirait toujours à 4,6 % en moyenne sur la période 2011-2020. Dans ce scénario, il est envisagé une valeur de 16 % du PIB en moyenne, sur la période, pour les recettes de l’État (la valeur retenue par les perspectives macroéconomiques nationales), ce qui permettrait d’obtenir un volume de ressources publiques de 105 milliards de francs CFA en 2020. Le maintien à 10,7 % de la priorité pour l’éducation en 2020 conduirait à un volume pour le secteur de 11,2 milliards de francs CFA de 2010. iii) le troisième scénario conserve les mêmes paramètres macroéconomiques que le précédent, mais anticipe que la priorité pour le secteur de l’éducation soit progressivement augmentée pour atteindre une valeur de 17 %, afin de s’approcher de la valeur de référence de 20 % identifiée comme un minimum par la communauté internationale. Ceci permettrait une augmentation très significative du volume des ressources publiques pour le secteur éducatif qui atteindrait alors 17,9 milliards de francs CFA en 2020. Au total, ces simulations montrent un fort degré de variabilité des chiffres du volume éventuel des ressources publiques pour le secteur en 2020 selon les hypothèses étudiées. Une évaluation, même conservative, de ces différents cas conduit à penser que l’hypothèse 1 sous-estime ce qui pourrait raisonnablement être obtenu par le secteur en 2020. Il paraît acceptable de retenir les hypothèses 2 et 3. La troisième hypothèse (17 % de priorité pour le secteur) doit alors être considérée comme un minimum compte tenu des références retenues par la communauté internationale dans le contexte de l’Initiative Fast Track (20 % pour le secteur). Rappelons que ce scénario 3 présente des évolutions très positives en référence à la situation actuelle notamment pour la priorité accordée au secteur de l’éducation (10,7 % en 2010) et qu’il devra être validé par les structures interministérielles et intersectorielles. III. Les dépenses associées aux options de politique éducative pour la production des services offerts Le modèle de simulation utilisé pour évaluer ce que pourraient être les dépenses courantes et en capital a été adapté pour répondre aux spécificités du système éducatif bissau-guinéen et aux instruments de politique éducative éventuellement envisagés pour répondre aux défis de la période à venir. Il permet d’illustrer les différents arbitrages auxquels est par nature confronté le décideur politique en charge de conduire le développement du système éducatif et ainsi d’instruire les choix nécessaires. Le tableau 2, ci-dessous, présente un résumé du scénario final retenu en documentant, outre la mobilisation des ressources, les principales caractéristiques de chaque cycle d’études, leur couverture quantitative, les principaux éléments définissant les conditions d’enseignement ainsi que les dépenses courantes et en capital correspondantes. 63 Cette mention selon laquelle il s’agit, comme toutes les données financières de ces simulations, de chiffres exprimés en valeur de l’année 2010, est extrêmement importante. Cette mention est essentielle à considérer notamment en relation avec l’inflation. On notera que ceci aura des conséquences à prendre en compte dans la préparation du CDMT. A Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme Examinons maintenant les estimations des coûts associés au scénario retenu pour le développement du secteur entre 2011 et 2020 ; il sera bien sûr intéressant de confronter ces coûts avec les ressources susceptibles d’être mobilisées pour le secteur ; ou, de façon symétrique, d’examiner ce que serait le meilleur programme dont le pays pourrait bénéficier avec le montant des ressources qui ont été identifiées. 145 Tableau 2 : Les dépenses courantes et en capital selon différents scénarios de développement du secteur, à l’horizon 2020 Année 2010 2020 Mobilisation des ressources nationales Ressources publiques en % du PIB 10,3 % 16,0 % Dépenses courantes d’éducation en % des ressources nationales 10,7 % 17,0 % Ressources totales pour l’éducation (millions FCFA) 5 594 17 860 Taux brut de scolarisation 6,1 % 16,8 % Nombre d’élèves 9 044 29 973 dont public 1 548 3 500 dont privé 5 580 14 473 dont communautaire et madrasa Dépenses courantes Préscolaire 1 916 12 000 Ratio élèves/maître dans le public 24,2 25,0 Subvention unitaire privé en % du CU public 0% 5,0 % Subvention unitaire communautaire et madrasas en % du CU public 0% 15,0 % Dépenses courantes dans le préscolaire (en millions FCFA) 46 766 Taux d’accès en 1ère année 154,1 % 100,0 % Taux d’achèvement 60,5 % 100,0 % Proportion de redoublants 14,0 % 10,0 % Nombre total d’élèves scolarisés 290 193 354 430 % d’élèves dans le privé 11,1 % 10,0 % Subvention unitaire par élève du privé en % du CU public 0,0 % 10,0 % % d’élèves dans le communautaire et les madrasas 19,9 % 0,0 % Nombre d’élèves dans le public (madrasas et communautaire publics) 200 234 318 987 Ratio Élèves-Groupe pédagogique 33,9 37,0 Ratio Groupe pédagogique/Enseignant 1,5 1,2 Ratio Élèves-maîtres (REM) 51,7 44,4 Nombre total d’enseignants dans les écoles publiques 3 874 7 184 Catégorie 1: fonctionnaires 2 577 6 184 Catégorie 2 : contractuels 1 210 1 000 Catégorie 3 : communautaires 87 0 Salaire fonctionnaires en unités de PIB/habitant 2,8 3,5 Salaire contractuels en unités de PIB/habitant 1,6 2,3 Salaire moyen enseignant en unité de PIB /tête 2,4 3,3 % d’enseignants bénéficiant d’une prime zone isolée 0% 10 % Prime zone isolée en % du salaire moyen enseignant 0% 20 % GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Enseignement de base (Cycles 1 et 2) 146 Masse salariale non-enseignante (hors prime directeur d’école) en % de la masse salariale enseignante 17,3 % 10,0 % Prime directeur d’écoles avec classes en multiple vacation en unité de PIB/habitant 0,0 1,0 Dépenses administratives et pédagogiques par élève en FCFA (hors manuels et kits) 829 3000 % d’élèves concernés par les dépenses sociales 0% 10 % Subvention par élève concerné en % du PIB/habitant 0% 20 % Dépenses de formation continue en % de la masse salariale enseignement de base 0,0 % 2,0 % Dépenses courantes hors salaires enseignants 19,6 % 34,8 % Dépenses courantes dans l’enseignement de base cycles 1 et 2 (millions FCFA) 2 889 11 904 Taux d’accès 7ème année 53,7 % 80,0 % Taux de transition effectif 6è année - 7ème année 88,7 % 80,0 % Taux d’accès 9ème année 35,7 % 64,0 % Taux de rétention 7è - 9è année 66,4 % 80,0 % Proportion de redoublants EB3 15,2 % 14,0 % Nombre total d’élèves scolarisés EB3 58 967 119 823 % d’élèves dans le privé 18,5 % 15,0 % Nombre total d’élèves scolarisés dans le public (y c communautaire et madrasas publics) 47 781 101 850 Élèves / groupes pédagogiques 43,4 45,0 Taux d’accès 10ème année 28,9 % 25,6 % Taux de transition effectif 9è année - 10ème année 81,1 % 40,0 % Taux d’accès 11ème année puis en 12ème année à partir de 2018 23,3 % 24,3 % Taux de rétention 10è - 11è année puis 10è-12è année à partir de 2018 80,6 % 95,0 % Proportion de redoublants ESC 6,4 % 5,5 % Nombre total d’élèves scolarisés ESC 19 059 34 799 % d’élèves dans le privé 14,6 % 14,0 % Nombre total d’élèves scolarisés dans le public (y c communautaire et madrasas publics) 16 272 29 927 Élèves / groupes pédagogiques 40,3 30,0 Ratio Élèves-maîtres (REM) 43,3 40,4 Ratio Enseignants par groupe pédagogique 1,0 1,0 Nombre d’heures hebdomadaire moyennes d’enseignement par groupe pédagogique 20 25 Enseignement de base cycle 3 (ex ESG) et enseignement secondaire Enseignement de base cycle 3 (ex ESG) DEPENSES PUBLIQUES EB3+ES A Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme ES (ex ESC) 147 Nombre d’heures hebdomadaire réelles dispensées en moyenne par un enseignant 20 25 Nombre d’enseignants 1 488 3 261 Catégorie 1: fonctionnaires 1 054 2 261 Catégorie 2: contractuels 434 1000 Salaire fonctionnaires en unités de PIB/habitant 4,3 5,5 Salaire contractuels en unités de PIB/habitant 1,7 3,0 Salaire moyen enseignant en unité de PIB /tête 3,6 4,7 Masse salariale non-enseignante en % de la masse salariale enseignante 18,8 % 16,0 % Dépenses administratives et pédagogiques par élève en FCFA (hors manuels) 1 500 5000 % d’élèves concernés par les dépenses sociales 0% 5% Subvention par élève concerné en % du PIB/habitant 0% 25 % Dépenses de formation continue en % de la masse salariale enseignement de base 0,0 % 2,0 % Dépenses courantes hors salaires enseignants 20,6 % 23,0 % Dépenses courantes dans les enseignements de base 3 et secondaire (millions FCFA) 1 709 6 374 Nombre d’élèves Formation professionnelle d’insertion courte (sortants de l’EB ou de l’ES) dans le public 402 4 539 % des sortants de 6ème année et de 9ème année 5% 15 % Nombre d’élèves Formation professionnelle d’insertion (sortants de l’EB ou de l’ES) dans le privé 450 450 Nombre d’élèves Enseignement technique et professionnel dans le public 0 800 Nombre d’élèves Enseignement technique et professionnel dans le privé 0 1 000 Dépenses courantes dans l’enseignement technique et la formation professionnelle (millions de FCFA) 132 2 928 Étudiants / 100 000 habitants 220 300 Effectifs dans le public 1 183 2 500 Effectifs dans le privé 2 439 3 561 Effectifs dans la formation à distance 0 0 Part du financement public dans le fonctionnement hors dépenses sociales 51 % 50,0 % Dépense par étudiant en unité de PIB/habitant (financements public et privé) hors dépenses sociales 1,3 3,0 Dépense par étudiant en francs CFA (financements public et privé) 343 028 953 954 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Technique et Professionnel 148 Enseignement supérieur et Recherche scientifique (hors EN et ENS) Enseignement supérieur Dépenses sociales publiques par étudiant en % de PIB/habitant 0% 30,0 % Subvention moyenne par étudiant du privé en % du CU de fonctionnement dans le public 0% 10,0 % Dépenses pour les études à l’extérieur en % des dépenses totales locales 14,9 % 20,0 % en % des dépenses de fonctionnement du supérieur (public + privé) 31 % 20 % Part du financement public 19,4 % 30 % Dépenses courantes dans l’enseignement supérieur et la recherche scientifique (millions FCFA) 264 2 268 Recherche Formation initiale des enseignants du préscolaire et de l’enseignement de base % en formation 97,0 % Durée de la formation (années) 3 2 Coût unitaire en unité de PIB /habitant 0,4 2,1 Nombre total d’élèves en formation 715 850 Dépenses courantes des écoles normales (millions de FCFA) 70 568 Écoles Normale Supérieure (Formation initiale enseignants secondaire) % en formation 100,0 % Durée de la formation 4 3 Coût unitaire en unité de PIB /habitant 0,1 2,0 Nombre d’élèves-maîtres en formation 1 541 696 Dépenses courantes des écoles normales supérieures (millions de FCFA) 50 443 Nombre d’étudiants 1 855 0 Coût unitaire en % du PIB /habitant 4,7 % 5,5 % Dépenses courantes des écoles normales supérieures (millions de FCFA) 22 0 54 % 0,0 % ENA formation longue Taux d’analphabétisme Année cible 2020 Dépenses courantes pour l’alphabétisation (millions de FCFA) 28 0 Totales des dépenses courantes (millions de FCFA) 5 211 25 250 Gap total sur dépenses courantes (millions de FCFA) - 7 390 Dépenses en capital moyennes annuelles (millions $US de 2010) Préscolaire Coût unitaire de construction 9 200 Nombre de salles à construire par an 10 Dépenses en Capital (y compris système et entretien) 0,10 Enseignement de base 1 et 2 cycles er Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme Alphabétisation A nd Coût unitaire de construction 11 960 Nombre de salles à construire par an 302 Dépenses construction (y compris système et entretien) 3,80 149 Coût manuel scolaire et kit scolaire par élève 14 Dépenses manuels et kits scolaires 4,47 Dépenses totales en Capital 8,27 Enseignement de base 3ème cycle et enseignement secondaire Coût unitaire de construction 27 600 Nombre de salles à construire par an 178 Dépenses construction (y compris système et entretien) 5,16 Coût manuel scolaire et kit scolaire par élève 20 Dépenses manuels et kits scolaires 2,64 Dépenses en Capital (y compris système et entretien) 7,80 Total des dépenses en capital (millions $ USD de 2010) 16,17 Gap total (millions $ USD de 2010) 30,94 Dépenses courantes 14,78 Dépenses en capital 16,16 Enseignement de base 1 et 2 cycles + Écoles normales 15,20 Dépenses courantes 7,08 Dépenses en capital 8,26 Autres niveaux 15,59 Dépenses courantes 7,70 Dépenses en capital 7,89 GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF er 150 nd Au niveau du préscolaire, on envisage d’augmenter la capacité d’accueil au niveau des structures publiques de 1 548 à 3 500 élèves en 2020, un accroissement annuel de 10 % du nombre d’enfants scolarisés dans le privé pour atteindre environ 14 500 élèves en 2020 alors que l’effectif accueilli dans les structures communautaires et les madrasas passerait de 1 916 à 12 000 élèves en 2020. La structure des coûts unitaires publics passerait progressivement de 11,7 % du PIB/habitant à 40 % dès 2015 et le ratio élèves/ maître dans le public passerait à 25 en 2020 (24,2 en 2010). Concernant le financement public des services communautaires et des madrasas, l’expérience montre que ces services sont en général bien adaptés pour le milieu rural et que les coûts de fonctionnement sont sensiblement moindres que ceux du préscolaire public. Cela dit, l’expérience montre aussi qu’il importe de les organiser i) en formant les animateurs et en proposant un programme d’activités bien défini, ii) en fournissant les consommables adaptés aux activités à mettre en œuvre, iii) en assurant aux animateurs un appui rapproché et régulier, et enfin iv) en mobilisant un minimum de ressources pour donner une compensation financière aux animateurs. Les travaux menés dans d’autres pays suggèrent que le coût unitaire des services communautaires ayant ces caractéristiques peut se situer entre 5 et 7 % du PIB par habitant. C’est pourquoi une subvention unitaire sera allouée aux communautaires et aux madrasas à hauteur de 15 % du coût unitaire du public soit 6 % du PIB/habitant, et ce, à compter de 2013. Le privé bénéficiera également d’une subvention de 5 % du coût unitaire du public par élève scolarisé. La prise en compte globale de ces actions sur la quantité et la qualité des services préscolaires conduit à un chiffre de dépenses courantes de 766 millions de francs CFA en 2020. Au niveau de l’enseignement de base, la loi de base de l’éducation adoptée en 2010 rattache l’ancien enseignement secondaire général à l’enseignement de base qui comprend désormais 3 cycles. Les cycles 1 et 2, respectivement de 4 et 2 ans, correspondent aux six premières années de scolarité. Le cycle 3 renvoie aux trois années suivantes (7ème, 8ème et 9ème année). Si l’objectif d’un enseignement primaire (soit les six premières années) universel fixé par la communauté internationale apparaît toujours primordial, cet objectif parait ambitieux à atteindre dès 2015 pour la Guinée-Bissau surtout dans la dynamique observée ces trois dernières années. C’est pourquoi cet objectif est repoussé à 2020. Toutefois, le report de cet objectif ne doit en aucun cas avoir pour conséquence un ralentissement des actions visant l’atteinte de cet objectif dans les meilleurs délais et il est certain qu’il faudra cibler de façon optimale les actions prioritaires qui permettront de relancer la dynamique de la scolarisation dans l’enseignement de base. Concernant spécifiquement l’enseignement de base premier et second cycles, le ratio élèves par maître est de 51,7 en 2010. Ce ratio cache une réalité qui doit être prise en compte. En effet, le nombre d’élèves par maître n’est pas trop élevé pour un pays post-conflit mais le système tel qu’il est organisé aujourd’hui ne permet pas un temps d’apprentissage optimal puisque plusieurs groupes d’élèves se succèdent dans une même salle de classe tout au long d’une journée. Ce phénomène de vacations multiples est très prononcé dans l’enseignement de base puisqu’on estimait 71 % de salles de classes en multiples vacations en 2010. Il serait souhaitable de supprimer totalement ce mode d’organisation scolaire à l’horizon 2020 mais ceci impliquerait de dépasser la capacité physique du pays à construire un nombre de salles de classe suffisant à l’horizon 2020. Ce qui est proposé ici, c’est de réduire significativement cette organisation scolaire en vacations multiples qui pénalise le temps d’apprentissage pour n’avoir plus que seulement 25 % de salles de classes fonctionnant en double vacation à l’horizon 2020. Toutefois, les écoles dont les salles de classes fonctionneront en vacations multiples verront leur temps d’ouverture hebdomadaire augmenté (par exemple ouverture de l’école 6 jours sur 7 au lieu de 5 jours sur 7), et ce, afin que les élèves puissent bénéficier d’un temps d’apprentissage suffisant. Par ailleurs, les directeurs des écoles qui ouvriront plus de temps, se verront allouer une prime représentant 1,0 le PIB/habitant à compter de 2013. Il faut noter que l’organisation scolaire en multigrade sera développée dans les zones à faibles effectifs scolarisés. Concernant l’enseignement public, les écoles communautaires et les madrasas qui scolarisent 19,9 % des élèves en 2010 deviendraient des structures publiques dans lesquelles l’État allouerait les enseignants, mais avec une forme de gestion spécifique à ces établissements. Ainsi, il ne devrait plus y avoir d’élèves scolarisés dans les structures communautaires et madrasas telles qu’elles sont en 2010, et ce, dès 2017. Le nombre d’élèves dans l’enseignement public passerait alors de 200 000 en 2010 à 319 000 en 2020. En ce qui concerne les dépenses de personnels, les enseignants fonctionnaires qui sont rémunérés à l’équivalent de 2,8 unités de PIB/habitant en 2010 verraient leur rémunération passer progressivement à l’équivalent de 3,5 PIB/habitant à l’horizon 2020. Ainsi la rémunération moyenne des enseignants fonctionnaires en termes réels c’est-à-dire en francs CFA de 2010 connaîtrait un accroissement annuel moyen de 4,7 % sur la période (de 706 000 francs CFA en 2010 à 1 110 000 francs CFA par an en 2020). Le nombre d’enseignants fonctionnaires serait multiplié par 2,4 à l’horizon 2020 et passerait de 2 600 en 2010 à 6 200 en 2020. Le nombre d’enseignants contractuels qui est de 1 200 en 2010 diminuerait à 1 000 en 2020 (soit 14 % du nombre d’enseignants contre 31 % en 2010). La rémunération des enseignants contractuels qui équivaut à 1,6 unités du PIB/habitant en 2010 passerait progressivement à 2,3 unités du PIB/habitant en A Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme La proportion de redoublants serait ramenée de 14,0 % en 2010 à 10 % dès 2015. La part des effectifs scolarisés dans l’enseignement privé diminuerait progressivement de 11,1 % en 2010 à 10 % en 2020 (étant donné que les enfants non-scolarisés en 2010 le sont essentiellement en zone rurale et que ce sont surtout des écoles publiques qui vont se construire dans ces zones) avec une subvention par élève scolarisé dans le privé de 10 % du coût unitaire public, et ce, dès 2013. Le ratio élèves par groupe pédagogique passerait de 33,9 en 2010 à 37,0 à l’horizon 2020 mais le ratio groupes pédagogiques par maître serait ramené de 1,5 en 2010 à 1,2 en 2020. Ceci aurait pour conséquence de passer le rapport élèves - maître dans l’enseignement public de 51,7 en 2006 à 44,4 en 2020. 151 2020. La rémunération moyenne des contractuels en termes réels (en francs CFA de 2010) connaitrait un accroissement annuel moyen de 5,8 % sur la période (de 416 000 francs CFA en 2010 à 730 000 francs CFA en 2020). Par ailleurs, une prime pour les enseignants des zones isolées sera mise en place dès 2013. Celleci concernera 10 % des enseignants à hauteur de 20 % du salaire moyen enseignant. Pour ce qui est du personnel non-enseignant (personnel déchargé de cours dans les écoles et personnel des structures centrales et déconcentrées), leur masse salariale qui représente 17,3 % de la masse salariale enseignante en 2010 diminuera progressivement à hauteur de 10 % de la masse salariale enseignante à l’horizon 2020. Cette part semble suffisante à condition de bien optimiser les tâches allouées au personnel non-enseignant et peut-être en réorganisant les services de façon plus optimale. Pour ce qui est des dépenses administratives et pédagogiques qui représentent 829 francs CFA par élève en 2010, (soit 0,3 % du PIB/ habitant), on envisagerait de passer ce montant à 3 000 francs CFA par élève dès 2013 (soit environ 1 % du PIB/habitant). Ces dépenses pédagogiques ne tiennent pas compte des manuels et des kits scolaires dont les dépenses sont rattachées à l’investissement. Les dépenses sociales inexistantes aujourd’hui seraient présentes dès 2013 et concerneraient 10 % des élèves scolarisés dans le public et représenteraient une subvention unitaire par élève concerné de 20 % du PIB/habitant. Enfin, les dépenses de formation continue pour l’ensemble du personnel travaillant dans l’enseignement de base, inexistante en 2010, passeraient à 2 % de la masse salariale totale pour ce niveau d’enseignement dès 2013. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Sous l’ensemble de ces hypothèses, le nombre d’élèves scolarisés dans les écoles d’enseignement de base cycle 1 et 2 bissau-guinéennes passerait de 290 000 en 2010 à 355 000 en 2020. La capacité d’accueil des établissements publics devrait être multipliée par 1,6 d’ici 2020. Le nombre d’enseignants titulaires de classe devrait passer de 3 900 en 2010 à 7 200 en 2020. Le niveau de dépenses courantes du sous-secteur devrait atteindre 11,830 milliards de francs CFA en 2020 (contre 2,9 milliards en 2010). 152 Pour ce qui est de l’enseignement de base cycle 3 (ex enseignement secondaire général), la loi de base prévoit que l’accès à ce cycle dépend des capacités financières de l’État. L’expérience suggère qu’une multiplication par un facteur d’environ 2,0 de la capacité d’accueil de ce cycle d’enseignement en dix ans est le maximum possible, même si cela demanderait de toute façon une programmation stricte et un suivi sans faille. Si on applique cette référence, le taux de transition au cours de l’année 2020 devrait s’établir à 80 %. La rétention au cours de ce cycle serait améliorée et passerait de 66,4 % en 2010 à 80 % en 2020. La proportion de redoublants qui est de 15,2 % passerait à 14 % dès 2013. La part de l’enseignement privé, en termes de nombre d’élèves scolarisés, passerait de 18,5 % en 2010 à 15 % en 2020. Une subvention moyenne de 5 % du coût unitaire public de l’enseignement de base cycle 3 et de l’enseignement secondaire par élève scolarisé dans le privé serait allouée dès 2013. Au niveau de l’enseignement public, le nombre d’élèves par groupe pédagogique de 43,4 en 2010 passerait à 45 à l’horizon 2020 ce qui reste très acceptable compte tenu des mesures prises au niveau de l’enseignement de base cycle 3 et de l’enseignement secondaire sur l’augmentation du temps scolaire que nous abordons plus loin. La capacité d’accueil du public passerait de 48 000 élèves scolarisés en 2010 à 102 000 en 2020 avec 64 % de la classe d’âge qui atteindrait la fin de l’enseignement de base cycle 3 (contre un chiffre de 35,7 % en 2010). Concernant l’enseignement secondaire (ex ESC), le taux de transition effectif entre l’EB3 (ex ESG) et l’ES passerait de 81,1 % en 2010 à 40 % en 2020, l’objectif visé est d’avoir un enseignement préparant à l’enseignement supérieur aussi bien en termes quantitatif que qualitatif. La rétention en cours de cycle passerait de 80,6 % à 95 % en 2020 et la proportion de redoublants en 2010 (6,4 %) passerait à 5,5 % en 2020. La part des élèves scolarisés dans les établissements privés qui est de 14,6 % en 2010 resterait la même sur la période (14 %). Dans la mesure où les choix effectués pour les effectifs sont pour un contrôle clair de la dimension quantité et un fonctionnement orienté vers le supérieur, l’option est d’insister sur la dimension qualité des services éducatifs offerts. Dans cette perspective, il est proposé d’augmenter le temps d’apprentissage moyen des élèves comme nous le verrons dans le paragraphe suivant. Le ratio élèves par groupe pédagogique serait réduit et passerait de 40,3 en 2010 à 30 en 2020. Enfin, une 12ème année de scolarisation serait introduite à compter de 2018 ce qui aura pour conséquence de passer l’ES de 2 à 3 années d’enseignement. Sous l’ensemble de ces hypothèses, le nombre d’élèves scolarisés dans l’enseignement secondaire passerait de 19 000 en 2010 à 35 000 en 2020. - À partir des hypothèses d’expansion de l’enseignement de base cycle 3 et de l’enseignement secondaire, l’objectif est également d’améliorer le temps d’apprentissage des élèves et le temps d’enseignement des enseignants. Ainsi, le nombre d’heures hebdomadaire moyen dispensé à un groupe pédagogique passerait de 20 heures en 2010 à 25 heures à l’horizon 2020 et le nombre d’heures moyen effectif fait par les enseignants passerait de 20 heures en 2010 à 25 heures en 2020. Ainsi, le nombre d’enseignants pour ces deux niveaux d’enseignement passerait de 1 500 en 2010 à 3 300 en 2020. Les enseignants fonctionnaires qui sont au nombre de 1 050 en 2010 et dont la rémunération moyenne correspond à 4,3 unités de PIB/ habitant passerait au nombre de 2 250 en 2020 avec une rémunération moyenne correspondant à 5,5 unités de PIB/habitant. En termes réels, cette hausse de rémunération correspond à un accroissement annuel moyen de 4,7 % puisque le salaire moyen d’un enseignant fonctionnaire passerait de 1 105 000 francs CFA en 2010 à 1 750 000 francs CFA de 2010 en 2020. La proportion d’enseignants contractuels qui est de 29 % en 2010 se maintiendrait à peu près à cette hauteur soit un nombre de 1 000 enseignants contractuels en 2020. Le niveau moyen de rémunération des enseignants contractuels passeraient de 1,7 PIB/habitant à 3 PIB/habitant ce qui correspondrait à un accroissement annuel moyen en termes réel (en francs CFA de 2010) de 7,9 % sur la période (de 445 000 francs CFA en 2010 à 950 000 francs CFA de 2010 en 2020), et ce, afin d’être assez attractif pour attirer les enseignants dans certaines disciplines où les besoins se font sentir. Sous l’ensemble de ces hypothèses, le niveau de dépenses courantes de l’EB3 et de l’ES devrait atteindre 6,374 milliards de francs CFA en 2020 (contre 1,709 millions en 2010). L’ambition affichée au niveau de l’enseignement technique et de la formation professionnelle est double : développer les structures d’enseignement technique et professionnel, avec une amélioration de la couverture sur l’ensemble du territoire et également les filières de formation professionnelles courtes permettant d’accueillir à terme 15 % des sortants de sixième et de neuvième année de l’enseignement de base. En effet, on peut penser aussi que l’économie étant essentiellement agricole, un grand nombre des sortants de l’enseignement de base et de l’enseignement secondaire iront travailler directement dans l’exploitation familiale où leur formation ne nécessitera pas de coût pour l’État. D’autres sortants seront également directement formés par des entreprises privées dans le but de les conserver par la suite. Ainsi, la proportion de sortants allant dans les formations professionnelles courtes d’insertion sera de 15 % à l’horizon 2020 soit un nombre total de 4 500 formés. La structure des coûts unitaires publics pour la formation professionnelle courte passerait progressivement à 1,5 PIB/habitant à l’horizon 2020. Le nombre d’élèves de l’enseignement technique et professionnel classique passerait progressivement à 800 en 2020 dans le public (contre 0 en 2010) et à 1 000 dans le privé (contre 0 en 2010). Le coût unitaire public pour l’enseignement technique et professionnel classique doublerait en passant de 1,5 PIB/habitant en 2010 à 3 dès 2013. A Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme La masse salariale des personnels non-enseignants qu’ils soient en poste dans les établissements (déchargés de cours) ou dans les structures centrales et déconcentrées, qui représente 18,8 % de la masse salariale enseignante diminuerait à 16 % à l’horizon 2020. Les dépenses administratives et pédagogiques qui représentent 1 500 francs CFA par élève du public en 2010 (soit 0,6 % du PIB/habitant) passeront à 5 000 francs CFA par élève du public à l’horizon 2020 (soit 1,6 % du PIB/habitant). Ces dépenses n’intègrent pas les manuels et les kits scolaires qui sont budgétisés dans la partie des investissements. Les dépenses sociales de 0 % du PIB/habitant en 2010 concerneraient 5 % des élèves scolarisés dans l’enseignement public à hauteur de 25 % du PIB/habitant par élève concerné dès 2013. Ces dépenses sociales devraient permettre de conserver les meilleurs élèves ne pouvant pas poursuivre leurs études pour des raisons financières. Les dépenses de formation continue pour l’ensemble du personnel travaillant pour ces deux niveaux d’enseignement représenteraient 2 % de la masse salariale totale de ce sous-secteur dès 2013. 153 Les dépenses courantes du secteur devraient ainsi passer de 132 millions de francs CFA en 2010 à 2,928 milliards de francs CFA en 2020. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF Pour ce qui est de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique64, les analyses montrent que pour un pays comme la Guinée-Bissau dont l’économie est essentiellement duale, les besoins du marché du travail concernant les diplômés du supérieur sont très limités sur le plan quantitatif. En effet, il est estimé un nombre d’étudiants compris entre 200 et 300 pour 100 000 habitants pour des pays à PIB/habitant similaire à la Guinée-Bissau. Parallèlement, les filières proposées dans les universités publiques se doivent d’être ciblées et répondre au mieux aux besoins économiques du pays et également d’assurer un enseignement de qualité (c’est-à-dire d’avoir la capacité pour former les étudiants des différentes filières). En 2010, seules les facultés de droit et de médecine sont des établissements publics auxquelles on peut ajouter l’école de santé (infirmières). L’École nationale d’administration qui ne proposait pas d’études supérieures jusqu’ici fait désormais partie de l’enseignement supérieur et devrait proposer des formations dans ce sens. Les étudiants désirant suivre des filières qui ne sont pas dispensées par le public iront soit dans le privé, soit poursuivront leurs études à l’étranger dans le cas de filières très spécifiques et indispensables aux pays. Ainsi, il est prévu un nombre de 300 étudiants pour 100 000 habitants (hors écoles normales et école normale supérieure) à l’horizon 2020 (contre 220 en 2010). L’enseignement supérieur public qui augmentera significativement avec l’intégration, accueillerait 2 500 étudiants à l’horizon 2020. Les universités privées, quant à elles, accueilleraient 3 600 étudiants à l’horizon 2020 (contre 2 400 étudiants en 2010). 154 L’ambition est également de fournir des services de qualité : le coût par étudiant (sur financement public comme privé) des structures publiques passerait de 1,3 fois le PIB/habitant en 2010 (soit l’équivalent de 690 dollars USD de 2010) à 3 fois le PIB/habitant dès 2013 (soit l’équivalent de 1 900 dollars USD de 2010). Cette augmentation toucherait essentiellement les dépenses de fonctionnement administratives et pédagogiques ainsi que les salaires des enseignants, afin de pouvoir conserver les éléments de qualité en évitant qu’ils ne partent pas dans des structures privées où ils seraient mieux rémunérés. La part du financement public pour l’enseignement supérieur public qui est de 51 % en 2010 resterait au même niveau en 2020 (50 %). Les dépenses sociales inexistantes en 2010 seraient mises en place (bourses pour les meilleurs étudiants qui n’ont pas les moyens de pouvoir continuer) à compter de 2012 à hauteur de 30 % du PIB/habitant en moyenne par étudiant. Pour les étudiants étant obligés de se rendre dans l’enseignement privé faute de filière inexistante dans le public, une subvention moyenne par étudiant de 10 % du coût unitaire de fonctionnement dans le public serait prévu à compter de 2012. Concernant les étudiants à l’étranger, les dépenses (bourses) représentant 14,9 % des dépenses totales de l’enseignement supérieur local en 2010 passeraient à 20 % de ces dépenses dès 2013. Quant à la recherche scientifique, les dépenses de ce sous-secteur représentent 31 % des dépenses de fonctionnement de l’enseignement supérieur en 2010 et passeraient à 20 % en 2020. La part du financement public pour la recherche scientifique qui est de 19,4 % en 2010 passerait à 30 % en 2020. Les dépenses courantes de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique passeraient ainsi de 264 millions de francs CFA en 2010 à 2,268 milliards de francs CFA en 2020. Les Écoles normales forment les enseignants du préscolaire et de l’enseignement de base. L’objectif affiché ici est d’arriver à former presque 100 % en 2020 des 475 enseignants nécessaires chaque année. Le coût unitaire de formation actuel qui est de 0,4 unités de PIB/habitant passerait à 2,1 unités de PIB/habitant dès 2015. En revanche, la durée de formation de 3 ans serait ramenée à deux ans à partir de 2014. La capacité d’accueil des ENI qui est de 715 élèves-maîtres en 2010 (classes surchargées) passerait à 850 élèvesmaîtres dès 2014 avec la construction de quatre nouvelles ENI (ce qui permettrait d’avoir des classes de 30 élèves-maîtres). Le niveau de dépenses courantes passerait ainsi de 70 millions de francs CFA en 2006 à 568 millions de francs CFA en 2020. 64 Hors écoles normales et écoles normales supérieures. L’École normale supérieure forme les enseignants de l’enseignement secondaire. L’objectif est d’arriver à recruter 700 enseignants formés par année d’ici 2020. La durée de formation de 4 années après l’enseignement secondaire passerait à 3 années dès 2013. Par contre, le coût unitaire de formation de 0,1 unité de PIB/habitant en 2010 passerait à 2 dès 2015. Le niveau de dépenses courantes passerait ainsi de 50 millions de francs CFA en 2010 à 443 millions de francs CFA en 2020. Enfin, l’objectif de l’alphabétisation est de réduire le nombre actuel d’analphabètes de 15 à 35 ans estimé à 54 % en 2010 à 0 % dès 2020. Le coût unitaire moyen par analphabète de 0,04 % du PIB/habitant en 2010 passerait progressivement à 2 % jusqu’en 2020. Le montant des dépenses courantes du sous-secteur deviendrait nul à compter de 2020 du fait d’une population totalement alphabétisée en 2020. L’ensemble des objectifs fixés conduit à un niveau de dépenses courantes pour l’ensemble du secteur qui devrait atteindre 25,176 milliards de francs CFA en 2020. Celles-ci s’élèvent en 2010 à 5,211 milliards de francs CFA (+ 384 millions de salaires de 2009 régularisés en 2010 pour les enseignants nouveaux entrants). Le tableau 3 présente la matrice des politiques éducatives retenues aux différents niveaux d’enseignement à l’horizon 2020. Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme A 155 Tableau 3 : Matrice des politiques éducatives aux différents niveaux d’enseignement 2020 Supérieur Objectifs 2020 Stratégies Spécifiques Environ 6 100 étudiants au total (contre 3 600 en 2010) 1- Rationalisation des filières en fonction des capacités et des besoins du pays 2- Encouragement du développement de l’enseignement privé 3- Financement de bourses pour les meilleurs étudiants issus de milieux défavorisés 4- Augmentation des crédits pour la recherche Technique classique : environ 1 800 (contre 0 en 2010) Technique et Formation courte d’insertion 1-Création, renforcement et réhabilitation des formules professionnelle/apprentissage et structures de formation courte pour l’insertion professionnelle en partenariat avec les organisations Profession- 15 % des sortants du sysprofessionnelles et la société civile (ONG) nel tème d’ens. en 6ème année et 15 % des sortants en 9ème année (5 000 apprentis) 1-Mise en place d’une nouvelle politique de formation et de recrutement des enseignants pour l’expansion du système PARTIE HAUTE DU SYSTEME GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF 2- Développement d’un système de formation continue des enseignants 156 ES Augmenter les effectifs en référence aux objectifs de l’enseignement supérieur Environ 30 000 élèves (16 000 en 2010) 3- Amélioration de la rétention et de l’équité en particulier en stimulant la demande scolaire des groupes les plus vulnérables 4- Amélioration de la qualité des apprentissages par la fourniture du matériel pédagogique (manuels et kits) et de mesures visant à l’augmentation du temps scolaire (Augmentation du nombre moyen d’heures d’enseignement par groupe pédagogique de 20h à 25h par semaine) 5- Construction des infrastructures scolaires en nombre suffisant pour l’expansion du système 6- Mise en place d’un système d’examen national en fin d’ESC 7- Introduction d’une année supplémentaire d’enseignement (12è année) 1-Mise en place d’une nouvelle politique de formation et de recrutement des enseignants pour l’expansion du système Augmenter autant que possible les effectifs : EB3 Environ 120 000 élèves (59 000 en 2010) 2- Développement d’un système de formation continue des enseignants 3- Amélioration de la rétention et de l’équité en particulier en stimulant la demande scolaire des groupes les plus vulnérables 4- Amélioration de la qualité des apprentissages par la fourniture du matériel pédagogique (manuels et kits) et de mesures visant à l’augmentation du temps scolaire (Augmentation du nombre moyen d’heures d’enseignement par groupe pédagogique de 20h à 25h par semaine) 5- Construction des infrastructures scolaires en nombre suffisant pour l’expansion du système 6- Mise en place d’un système d’examen national en fin d’EB3 1-Mise en place d’une nouvelle politique de formation et de recrutement des enseignants pour l’expansion du système et l’amélioration de la qualité de l’enseignement 2- Développement d’un système de formation continue des enseignants PARTIE BASSE DU SYSTEME 3- Mise en en œuvre de mesures administratives et pédagogiques de réduction du redoublement (sous-cycles) (100 % d’achèvement) 4- Amélioration de la rétention et de l’équité en particulier en stimulant la demande scolaire des groupes les plus vulnérables 5- Incitation du secteur privé par une subvention (10 % du coût unitaire de l’école publique) 6- Amélioration de la qualité des apprentissages par la fourniture du matériel pédagogique (manuels et kits) et de mesures visant à l’augmentation du temps scolaire (diminution des vacations multiples) 7- Augmentation des infrastructures scolaires en nombre suffisant pour l’expansion du système et la diminution des vacations multiples 8- Mise en place d’un système d’examen national en fin de primaire Préscolaire TBS = 16,8 % 1-Renforcement du mode communautaire avec un encadrement public 2-Doublement des capacités d’accueil du public (6,1 % en 2010) A Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme EB 1 et 2 (Primaire) Achèvement universel 3-Encouragement du développement de l’enseignement privé (subvention) 157 IV. Consolidation d’ensemble du cadrage macro-financier À ce point, nous avons exploré les principales politiques ou mesures structurelles qui dessinent une vision souhaitable pour le système éducatif bissau-guinéen à l’horizon 2020. Sur le plan du financement, c’est évidemment le budget de l’État bissau-guinéen qui sera le principal contributeur ; mais l’appui extérieur pourra aussi jouer un rôle important. Il importe maintenant d’examiner de façon synthétique le bouclage financier global en identifiant bien d’une part les engagements du pays pour ce qui concerne la mobilisation des ressources nationales et d’autre part la contribution de l’aide extérieure. Pour cette dernière, il y a lieu de distinguer de façon spécifique ce qui pourrait être mobilisé dans le cadre de l’Initiative Fast Track pour les niveaux d’enseignement de base et les écoles normales. Avant d’identifier les montants, il est utile de rappeler quelques références pour le financement dans le cadre de l’Initiative Fast Track : i) un premier point est qu’il est anticipé que le pays donne une priorité au secteur de 20 % de ses ressources publiques nationales et que sa pression fiscale soit comprise entre 14 et 18 %65; ii) un second point est que 50 % des ressources publiques du secteur soient affectées à l’enseignement de base ; iii) sur cette base, on détermine un montant de ressources publiques conceptuellement mobilisées par le pays et le montant de l’appui potentiel de l’initiative Fast Track par la différence entre le volume des dépenses effectives du programme pour l’enseignement de base premier et second cycles et les écoles normales, validé par les partenaires techniques et financiers actifs dans le pays, et le montant conceptuel déterminé précédemment. L’orthodoxie est que le pays utilise par priorité ses ressources propres pour financer les dépenses courantes et notamment les salaires : GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF - si les ressources nationales pour l’enseignement de base premier et second cycles et les écoles normales sont supérieures aux dépenses courantes, le solde sert à financer les besoins en capital ; si cela est suffisant, il n’y a pas d’appui extérieur dans le cadre du FTI. Par contre s’il reste une partie en suspens, le FTI peut intervenir pour assurer l’équilibre financier du programme ; - si les ressources nationales pour l’enseignement de base premier et second cycles et les écoles normales sont inférieures aux dépenses courantes, le FTI peut intervenir pour financer cette partie des dépenses courantes non couvertes ; dans ce contexte, l’initiative prend aussi en considération les dépenses en capital. Sur la base des arbitrages de politique éducative pris comme référence et des dispositions du FTI décrites ci-dessus, on aboutit au tableau de financement suivant pour la période 2009-2020. Dans le tableau 4, les montants financiers sont exprimés en millions de francs CFA de l’année 2010. 158 65 À ce niveau, le pays s’est engagé à mettre 17 % de ses ressources dans les dépenses courantes d’éducation à l’horizon 2015. Le cadre indicatif Fast Track fait référence à 20 % et à un taux de pression fiscale entre 14 et 18 %. La Guinée-Bissau aurait une moyenne de 18,4 % de pression fiscale sur la période 2009-2020 ce qui est relativement important et ce qui peut donc justifier une allocation de 17 % de ses ressources pour l’éducation. Tableau 4 : Financement de la politique sectorielle, Scénario final, 2012-2020 (Millions de francs CFA de 2010) Années 2010 2012 2013 2014 2015 2020 Ressources publiques pour le secteur 5 594 8 390 10 490 12 277 11 719 17 860 Ressources allouées à l’enseignement de base 1 et 2 2 889 4 306 5 366 6 260 5 957 8 930 Ressources allouées aux autres niveaux 2 705 4 084 5 124 6 017 5 763 8 930 Enseignement de base 1 et 2, formation initiale enseignants de l’enseignement de base 1 et 2 Dépenses courantes 2 960 4 272 6 564 7 396 8 239 12 397 Enseignement de base 1 et 2 2 889 4 068 6 377 7 071 7 823 11 904 Formation initiale des enseignants 70 204 275 415 506 568 Gap sur dépenses courantes -34 1 285 1 225 2 373 3 541 Dépenses en capital 2 949 3 565 3 658 3 752 4 131 Gap total 2 915 4 850 4 883 6 125 7 672 Autres niveaux (préscolaire, EB3, ES, EFTP, Enseignement supérieur, ENS, alphabétisation) 4 060 5 533 6 268 7 237 12 779 Gap sur dépenses courantes 2 252 -24 410 251 1 474 3 849 Dépenses en capital 3 130 3 436 3 494 3 553 3 947 Gap total 3 106 3 845 3 745 5 027 7 796 Ce cadrage macro-financier va servir de base à l’élaboration du plan de mise en œuvre triennal et à l’élaboration du plan sectoriel qui doit suivre. La requête au fonds catalytique de l’initiative Fast Track qui doit être déposée doit considérer la période 2012-2014 comme possible dans le cadre d’un financement par le fonds catalytique. Si on cible la situation des années à venir (2012-2014), le cadrage est caractérisé de la façon suivante : - Les ressources publiques pour l’ensemble du secteur pour la période 2012-2014 se situe à 31,2 milliards de francs CFA (de 2010) soit 62,3 millions de dollars USD66, alors que les dépenses courantes sont estimées à 34,1 milliards de francs CFA soit 68,2 millions de dollars USD. L’application des critères standard du FTI conduit à ce qu’il apparaisse, en fait, un gap brut de financement sur dépenses courantes dans l’enseignement de base premier et second cycles et la formation initiale des enseignants de l’enseignement de base premier et second cycles qui est de 2,5 milliards de francs CFA sur la période 2012-2014 (5 millions de dollars USD) et un gap de financement sur dépenses courantes de 636 millions de francs CFA (1,3 million de dollars USD) dans les autres niveaux. Sur cette base, pour l’enseignement de base 1 et 2 et la formation initiale des enseignants de l’enseignement de base 1 et 2, il convient d’ajouter les 20,3 millions de dollars pour la période 2012-2014 au titre des 66 Le taux de change est 1 dollar USD = 500 francs CFA. A Annexe - Les arbitrages pour la politique éducative sectorielle à moyen terme Dépenses courantes 159 dépenses en capital. Le besoin total de financement pour ces niveaux d’enseignement serait alors de 25,3 millions de dollars USD pour 2012-2014. Pour l’ensemble des autres niveaux, le besoin de financement brut pour 2012-2014 est estimé à 21,4 millions de dollars qu’il conviendra de faire financer sur d’autres sources de financement. GUINÉE-BISSAU RAPPORT D’ÉTAT DU SYSTÈME EDUCATIF À noter qu’il s’agit ici du besoin de financement brut et qu’il conviendra de prendre en compte l’appui financier des partenaires techniques et financiers locaux afin d’avoir un besoin de financement net qui pourra alors faire l’objet d’une requête de financement pour l’enseignement de base 1 et 2 et la formation initiale des enseignants de l’enseignement de base 1 et 2 au fonds catalytique de l’initiative Fast Track. À noter également que le gap réel net pour les années 2012-2014 devra être adapté à la capacité de mise en œuvre du pays notamment pour les premières années de la politique sectorielle (ex. environ 302 salles de classe par an à construire en moyenne jusqu’en 2020 : l’expérience montre que, généralement, les premières années le nombre de salles pouvant être construites est moindre et augmente progressivement au fil des ans). 160 Bibliographie : ADEA (2003), Le défi de l’apprentissage : améliorer la qualité de l’éducation de base en Afrique subsaharienne, Document de la biennale 2003 de l’ADEA, Grand Baie, Maurice. Amelewonou, K., Brossard, M. (2004), Mesurer la couverture scolaire globale d’un pays : l’espérance de vie scolaire. Note méthodologique n°3 du Pôle d’analyse sectorielle en éducation. Dakar : UNESCO –BREDA. 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