
Dossier scientifique
Les bactéries anaérobies
nisme de résistance à la céfoxitine est une diminution
de l’afnité de certaines PLP à cette molécule, mais
cette résistance peut aussi être imputable à un autre
type de béta-lactamase, CfxA, transportée par un élé-
ment génétique mobile [7,8]. La béta-lactamase de
type métalloprotéinase CA (aussi appelée ccrA) peut
être responsable d’une perte d’activité de l’ensemble
des béta-lactamines, mais de nombreuses souches
conservent une sensibilité aux carbapénèmes du fait
d’une expression variable du gène en fonction de l’in-
sertion d’un promoteur efcace en amont (élément
d’insertion notamment) [7]. Une imperméabilité de la
paroi peut être associée à chacun de ces mécanismes,
renforçant la résistance et diminuant l’effet des inhi-
biteurs [9].
De nombreux types de gènes nim ont été mis en évi-
dence chez des Bacteroides, portés soit par des plas-
mides, soit par des transposons. Ils entraînent
une diminution de la sensibilité au
métronidazole, mais d’autres méca-
nismes de résistance non-trans-
missibles à cet antibiotique sont
aussi rencontrés[10]. Plusieurs
gènes de résistance aux macro-
lides et apparentés ont été
décrits chez Bacteroides (gènes
erm, linA, mefA, msrSA), parfois
retrouvés associés dans une
même souche, et fréquemment
responsables de résistances in
vitro [7]. Le gène tetQ est respon-
sable, quant à lui, de la majorité des
résistances à la tigécycline observées,
même si d’autres gènes ont été décrits[7].
Enn, il n’a pas encore été décrit de souche résis-
tante au linézolide, mais cet antibiotique reste peu
fréquemment testé, même dans les cas les plus
problématiques[11].
Certains taux de résistances observés en Europe
sont relativement faibles : environ 90 % des souches
sont sensibles à l’association amoxicilline acide cla-
vulanique, et aussi à l’association pipéracilline-tazo-
bactam (à l’exception notable de B. thetaiotaomi-
cron, pour lequel entre 55 % et 70 % des souches
sont sensibles) et à la céfoxitine, plus de 95 % des
souches sont sensibles au méropénème et plus de
99 % au métronidazole [12,13]. La clindamycine, à l’in-
verse, est régulièrement retrouvée résistante. Alors
que seulement 12 % des souches étaient résistantes
avant les années 1990, leur fréquence a fortement
augmenté : si moins de 22 % des B. fragilis stricto sensu
restent sensibles, les autres espèces ont un taux de
résistance avoisinant les 50 % [13]. De même, le
taux de résistance à la moxioxacine s’élève jusqu’à
13 %[12]. L’ensemble de ces résistances est en
augmentation nette depuis le début des dernières
années, surtout pour les associations pénicillines
inhibiteurs de béta-lactamase pour lesquelles moins
de 1 % des souches étaient alors résistantes [12].
Ces taux de résistance relativement faibles ne doivent
pas pour autant rassurer : de nombreuses souches mul-
tirésistantes (résistance à au moins 3 classes d’antibio-
tiques différentes) ont été décrites depuis le début des
années 2000, causant plusieurs décès. De même, un clone
portant nimB et cA en plus de plusieurs autres gènes
de résistance aux antibiotiques (tet, erm) a été récem-
ment mis en évidence dans plusieurs pays d’Europe [14].
Ce clone semble toutefois garder une sensibilité à la
tigécycline, au linézolide et, dans une moindre mesure,
à la moxioxacine.
Genre
Prevotella
Le genre Prevotella, séparé du genre Bacteroides depuis
la n des années 1980, est naturellement résis-
tant aux sulfamides, à la fosfomycine, à
l’acide fusidique, et aux glycopeptides.
Ce genre ne possède pas de pénicilli-
nase constitutive, et peut donc être
sensible aux pénicillines sans inhi-
biteurs. De nombreuses souches
sont toutefois porteuses du
gène cfxA, induisant une résis-
tance aux pénicillines mais sur
laquelle les inhibiteurs sont actifs
[15,16]. Cette béta-lactamase à
spectre étendu peut aussi induire
une résistance au céphalosporine
de 3e génération, mais elle n’est pas
active sur la cefoxitine [17]. Comme
pour le genre Bacteroides, des gènes de résis-
tances aux macrolides et apparentés (erm not-
tamment) et aux cyclines (tetQ) ont été décrits [17],
ainsi que la présence de gènes nim, et notamment le
gène nimI chez P. baroniae (qui pourrait être constitutif
chez cette espèce, mais n’est pas systématiquement
exprimé) [18].
Deux études européennes récentes, une publiée par
Ulger Toprak et al. portant sur 508 souches, et l’étude
T.E.S.T. portant sur 1 106 souches, montrent que le
genre Prevotella est fréquemment sensible aux asso-
ciations pénicilline-inhibiteur (>90 %), à la cefoxitine
(99,6 %), aux carbapénèmes (>99 %), au métronidazole
(>99 %) et à la tygécycline (100 %). La moxioxacine
reste fréquemment sensible (81,7 %) mais, à l’instar
des Bacteroides, un tiers des souches sont résistantes
à la clindamycine [13,19].
Genre
Porphyromonas
Le genre Porphyromonas, lui aussi distingué du groupe
Bacteroides depuis la n des années 1980, est naturel-
lement résistant à la fosfomycine et aux polymixines.
Peu de résistances ont été décrites en Europe chez les
différentes espèces de Porphyromonas. Seule la présence
De nombreuses
souches
multirésistantes ont
été décrites depuis le
début des années 2000,
causant plusieurs
décès
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REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES • N° 505 • SEPTEMBRE-OCTOBRE 2018