Baisse des subventions à l'energie et des impots sur le revenu MEGC dynamique

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Un Peuple - Un But Une Foi
MINISTERE DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES
DIRECTION DE LA PREVISION ET DES
ETUDES ECONOMIQUES
Document d’Etude N°24
LA BAISSE DES SUBVENTIONS A L’ENERGIE ET DE L’IMPÔT SUR LE
REVENU AU SENEGAL : EFFETS SOCIO-ECONOMIQUES
ET BUDGETAIRES
A. DIALLO
M. N. KANE
B. B. MBAYE
S. M. SENE
@DPEE/DEPE Janvier 2013
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LA BAISSE DES SUBVENTIONS A L’ENERGIE ET DE L’IMPÔT SUR LE
REVENU AU SENEGAL : EFFETS SOCIO-ECONOMIQUES ET BUDGETAIRE
Alassane DIALLO1,
Mamadou Ngalgou KANE²,
Baïdy Baro MBAYE1
Serigne Moustapha SENE1
Janvier 2013
Résumé
Les appuis de l’Etat à l’énergie qui revêtent la forme de subventions à la production et à la consommation, sont
prévus à la baisse par le gouvernement au Sénégal pour des raisons budgétaires. Par ailleurs, la baisse de
l’impôt sur les salaires entre en vigueur en 2013 en guise de soutien à la consommation. Dans un pays pauvre
tel que le Sénégal, la pratique des subventions et la baisse de l’impôt ont assurément un rôle de stabilisateur
social. Néanmoins, les évidences empiriques sur les impacts budgétaires et macroéconomiques et sur la
réduction de la pauvreté et des inégalités sont moins nombreuses. Ce document traite de ces questions
d’impacts à partir d’un Modèle d’Equilibre Général Calculable en dynamique récursive. Les groupes de
ménages sont constitués selon la position géographique et en fonction des capacités des ménages à se
procurer des revenus (ability). Les simulations indiquent que le recul de la pauvreté est globalement attendu de
cette la baisse de l’impôt sur les salaires surtout pour les ménages autres que ceux de Dakar. En revanche, les
effets du retrait des subventions à l’énergie sur la pauvreté, globalement négatifs, seraient plus sévères pour
les ménages de Dakar. Quant aux impacts macroéconomiques, les recettes fiscales et le solde budgétaire
s’amélioreraient suite à la combinaison de ces mesures. En revanche, ces réformes ne stimuleraient pas la
croissance mais alimenteraient l’inflation, stimuleraient les importations et feraient perdre de la compétitivité
à l’économie.
Mots clés: Subventions, Impôt sur les salaires, Modèle d’Equilibre néral Calculable, Pauvreté, Déficit
budgétaire
Classification JEL: H2, E27, I32, H62
Abstract
The Senegalese Government intends to reduce subsidies to the energy sector for budget sustainability reasons.
Moreover, an income tax reform is introduced in 2013 in order to improve households’ purchasing power. In
poor countries such as Senegal, subsidies and tax reductions act as social stabilizers. However, little empirical
evidence is found with regards to impact of such reforms on budget, macroeconomic aggregates, poverty
reduction and inequalities. This paper intends to fill the blanks using a recursive dynamic computable general
equilibrium model. Households are sorted geographically and according to their income ability. Results show a
positive impact on poverty reduction especially for households located outside of Dakar. On the other hand,
the overall impact of energy subsidies’ removal is negative but sizeable on Dakar. On the macroeconomic
perspective, the Government revenue and budget balance would benefit if those reforms are combined and
imports for consumer goods would increase. But, such policies would not encourage growth and would
account for more inflation and loss of competitiveness.
Key words: Subsidies, Payroll Tax, Computable General Equilibrium, Poverty, Budget Deficit
JEL Classification : H2, E27, I32, H62
1 Ministère de l’Economie et des Finances du Sénégal, Direction de la Prévision et des Etudes Economiques (DPEE)
² Ministère de l’Economie et des Finances du Sénégal, Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD)
Les auteurs remercient Pr Yazid DISSOU de l’Université d’Ottawa (Canada).
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I. Introduction
La lutte contre la pauvreté au Sénégal s’inscrit en droite ligne des objectifs du millénaire
pour le développement. Dans ce cadre, l’action gouvernementale se traduit notamment par
le choix de différentes politiques à fort contenu social qui peinent tout de même à se
traduire en résultats tangibles : la pauvreté est répandue et les inégalités restent marquées
entre les ménages. La vulnérabilité des ménages est accentuée par la part importante des
importations dans les biens de consommation. Dans certains cas, la production domestique
n’est pas bien positionnée pour la satisfaction de la demande solvable, du fait d’un manque
de compétitivité ou simplement à cause de l’étroitesse du tissu productif. Cela affecte aussi
la résilience de l’économie. Les chocs d’offre à intervalle rapproché constituent des menaces
pour les pays pauvres l’équilibre social est assez précaire, ce qui pousse leur
gouvernement à adopter des politiques de soutien à la production ou à la consommation.
Dans le cas des produits énergétiques, le profil et les objectifs des subventions ne sont pas
homogènes. Dans les pays riches, les subventions à l’énergie touchent surtout la production,
et s’inscrivent dans une optique de politique industrielle et de préservation de
l’environnement. Dans les pays en développement, elles visent plutôt à soutenir la
consommation par le canal des prix et permettent d’atteindre des objectifs socio-
économiques et politiques. En tant que telles, les subventions augmentent le surplus des
ménages et paraissent socialement équitables dans un contexte de pauvreté et de fortes
disparités des revenus. Ces mesures, au même titre que les transferts publics sous la forme
de services sociaux de base, contribuent à alléger les dépenses des ménages qui enregistrent
une hausse de leur revenu disponible pour l’achat d’autres biens et services. Cet effet-
revenu s’accompagne généralement d’un accroissement du bien-être.
Néanmoins, ces mesures de soutien créent des distorsions sur les marchés et affectent les
incitations. Il se manifeste un price gap qui fait que le bénéfice social ne comble pas a priori
la perte de surplus économique. En outre, les pratiques de subventions et/ou de détaxation
constituent des transferts indirects aux producteurs étrangers.
Au Sénégal, en plus de ces considérations, la refonte du Code Général des Impôts s’est
notamment matérialisée par la baisse de l’impôt sur le revenu (IR) dont devraient surtout
bénéficier les salariés et les entrepreneurs individuels des centres urbains.
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L’ensemble de ces mesures ont assurément un coût budgétaire dans un contexte les
besoins sont multiples et les ressources publiques plutôt rares. En tout état de cause, le
recentrage des ressources publiques vers plus d’efficacité commande de meilleures
politiques fiscales et des subventions. Sous l’hypothèse d’une croissance soutenue et
durable, telle que déclinée dans les ambitions du gouvernement pour les moyen et long
termes, la redistribution à travers ces mécanismes publics permettrait de réduire à la fois la
pauvreté et les écarts de revenus tout en ne portant pas atteinte à la dynamique productive.
Aussi, dans le contexte à la fois de lutte contre la cherté de la vie au Sénégal et de rareté des
ressources budgétaires, il est opportun de s’interroger sur la pertinence des mesures de
subventions et de défiscalisation des salaires. Ces mesures se justifient si elles n’entrent pas
en contradiction avec les objectifs à moyen terme de la politique économique. L’objectif de
cette étude porte précisément sur les impacts des mesures courantes de soutien à la
consommation dans le cas des produits énergétiques d’une part et de la baisse de l’impôt
sur le revenu des ménages d’autre part. Il s’agit d’étudier les effets dynamiques des
modifications des subventions et de la baisse de la fiscali sur le bien-être des groupes de
ménages, sur le déficit budgétaire ainsi que sur le bien-être social, à travers différents
scénarii portant aussi bien sur la baisse voire la suppression des subventions aux produits
énergétiques que sur la baisse de l’impôt sur les salaires. La soutenabilité de ces mesures
sera aussi appréhendée à travers leurs impacts sur le déficit budgétaire.
La méthodologie repose sur un Modèle d’Equilibre General Calculable (MEGC) dynamique
récursif lequel s’appuie sur des données fines pour valider les avancées remarquables en
matière de modélisation des comportements microéconomiques et des transactions. Le
MEGC est devenu un outil standard d’évaluation empirique des impacts socio-économiques
et budgétaires des choix publics ainsi que des politiques commerciales.
La suite du document est organisée ainsi qu’il suit. La revue de la littérature documente
l’état de la recherche sur la question. La section 2 établit des faits stylisés sur les politiques
énergétiques, les caractéristiques des ménages surtout en termes de consommation
d’énergie et de revenus. La méthodologie basée sur un MEGC dynamique récursif est
présentée à la quatrième section. Les simulations et l’analyse des résultats en termes de
pauvreté, d’inégalités et de soutenabilité bouclent l’étude.
4
II. Revue de la littérature
Les premières utilisations des MEGC dans l’analyse de la distribution des revenus remontent
aux années 80. Des auteurs tels qu’Adelman et Robinson (1979) pour la Corée mais aussi
Devis, Melo et Robinson (1982) et Gunning (1983) au Kenya ont été parmi les pionniers dans
l’utilisation des MEGC pour l’analyse de la distribution des revenus. Des travaux suivirent
dans le cadre spatial des pays pauvres pour l’analyse des impacts des politiques
d’ajustement structurel sur la distribution de revenus. Plus récemment, l’étude des relations
entre les politiques économiques, les niveaux de pauvreté et la distribution des revenus a
été approfondie2.
L’utilisation des MEGC répond précisément au besoin de combler le vide laissé par les
modèles macroéconomiques keynésiens et par les analyses en équilibre partiel. La réforme
américaine de 1986 a été le déclic qui a montré l’utilité des MEGC dans l’analyse de l’impact
structurel des mesures de politique fiscale. En effet, dès la fin des années 70, on a pris
conscience des limites des modèles macroéconomiques keynésiens dans la formation des
anticipations et des salaires (Lucas et Sargent). Quoique de bons outils de prévision, les
modèles macroéconomiques se sont révélés, dans la plupart du temps, inappropriés pour
apprécier les principaux aspects de la fiscalité. Par ailleurs, les effets de revenu et de salaire
privilégiés par ces modèles de type keynésien sont essentiellement de court terme ; les
élasticités de comportement sont contraintes par des rigidités de court terme.
L’investissement et l’épargne sont peu élastiques à la rémunération du capital et les facteurs
faiblement substituables. En cela, ces modèles n’intègrent pas correctement les
changements de comportement des agents mais mettent l’accent sur les effets revenus alors
que les mesures fiscales, par exemple, visent généralement à modifier les comportements.
Pour pallier les manquements des modèles macro économiques keynésiens, des modèles
d’équilibre partiel ont été développés pour apprécier les effets structurels des réformes
fiscales. Ces analyses se sont développées dans les années quatre vingt dans le cadre de
l’économétrie sur données de panel et des modèles ad hoc dont on teste la sensibilité aux
2 Voir entre autres Janvry, Sadoulet et Fargeix (1991), Bourguignon, de Melo et Suwa (1991), Thorbecke (1991),
Decaluwé et al. (1998), Decaluwé, Dumont et Savard (1999), Cockburn (2001), Agenor, Izquierdo et Fofack
(2001), Cogneau et Robillard (2000), Colatei et Round (2000), Bouguignon, Robillard et Robinson (2002), Savard
(2005). Pour une revue, voir par exemple Boccanfuso et al. (2003).
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