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Diabetes & Metabolism (Paris)
1999, 25, 177-179
P ratical Medicine
QUAND ET POURQUOI RECHERCHER LES
ANTICORPS ANTI-GAD CHEZ UN DIABÉTIQUE NON
INSULINO-DÉPENDANT ?
When and why should anti-GAD antibodies be looked for in the non-insulin-dependent diabetic patient?
C. ATLAN-GEPNER, B. VIALETTES
e nombreuses publications émanant des
différentes sociétés savantes de Diabétologie traitent de la classification des diabètes [1, 2]. Les termes de Diabète non
insulino-dépendant
ou
insulinodépendant ont été éliminés par l’ADA, et par le rapport préliminaire de l’OMS au profit d’une classification plus étiologique mais restant toutefois très
phénotypique. Le diabète de type 1 est défini par la
destruction des cellules béta du fait d’une maladie
auto-immune ou idiopathique. La notion d’insulinodépendance reste présente avec la phrase « l’insuline
est nécessaire pour la survie ». Le diabète de type 2,
lui, est défini par l’association d’une insulinorésistance et de défauts d’insulino-sécrétion mais reste
une entité très hétérogène.
Le diagnostic de diabète de type 1 qui était en
pratique un diagnostic de présomption est devenu,
grâce à la découverte des anticorps anti-GAD, un
diagnostic de quasi-certitude. En effet selon la littérature les anticorps anti-GAD sont positifs chez 60 à
90 % des patients diabétiques de type 1 au moment de
la révélation clinique [3]. Leur positivité dans un
contexte clinique évident d’acidocétose, de syndrôme
cardinal chez un sujet jeune de poids normal permet
d’affirmer le diagnostic.
Mais un authentique diabète de type 1 auto-immun
peut parfois prendre l’aspect phénotypique d’un diabète de type 2 en survenant chez un patient en surcharge pondérale par exemple ou lorsque l’insulinodépendance apparaît de façon beaucoup moins aiguë,
D
✍
: B. Vialettes, Service de Nutrition, Maladies Métaboliques et Endocrinologie, Hôpital Sainte Marguerite, Marseille.
Reçu : 15 février 1999
permettant l’obtention d’un contrôle correct des glycémies avec les antidiabétiques oraux pendant une
longue période. Le dosage des anticorps anti-GAD
peut alors aider à une meilleure classification « nosologique » des diabètes qui n’a pas qu’un intérêt purement intellectuel, mais également un intérêt thérapeutique.
m FRÉQUENCE DU DIABÈTE DE TYPE 1
CHEZ L’ADULTE
Contrairement au cas de l’enfant, chez l’adulte la
classification nosologique d’un diabète peut poser des
problèmes. On estime que parmi l’ensemble des patients présentant un diabète auto-immun, 40 % le développent avant l’âge de 15 ans, 30 % entre 15 et
34 ans et 30 % plus tard [4]. Le degré et la vitesse de
destruction des cellules béta sont très variables selon
les individus expliquant les diverses modalités de tableau clinique au diagnostic ; chez l’enfant l’acidocétose est fréquente probablement liée à un processus
très rapide, tandis que chez l’adulte le syndrome cardinal est plus ou moins intense et l’acidocétose révélatrice plus rare témoignant d’un processus plus lent.
Chez l’adulte une forme particulière de diabète autoimmun a ainsi été décrite : le diabète de type 1 lent ou
de type « 1 ½ » ou encore diabète auto-immun latent
de l’adulte (LADA : latent auto-immune diabetes in
adults) [5, 6]. Cette forme clinique se caractérise par
sa vitesse d’évolution lente vers l’insulinopénie, mais
plusieurs études ont clairement démontré qu’il s’agit
d’un authentique diabète de type 1 auto-immun même
s’il est très vraisemblable qu’il présente des caractéristiques immunologiques ou immunogénétiques particulières [7, 8].
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Diabetes & Metabolism
C. ATLAN-GEPNER et al.
L’estimation de la fréquence du diabète de type 1
survenant à l’âge adulte dépend des critères diagnostiques utilisés, elle est vraisemblablement sous estimée [9, 10]. En effet elle doit être corrigée par la
fréquence du LADA qui dans certaines publications
pourrait atteindre 10 % des diabètes chez les patients
âgés de 45 à 65 ans [11], et par celle du diabète de
type 1 classé par erreur type 2 lorsque des critères
phénotypiques comme l’âge, le poids, l’absence d’acidocétose ou le traitement oral ont été utilisés comme
moyens diagnostiques [10]. La fréquence du LADA
parmi les patients classés type 2 est de 3,2 à 14.3 %
selon les études (citées dans 6). Parmi les adultes
développant un diabète de novo non cétosique, plusieurs études utilisant les marqueurs d’auto-immunité
ont montré que 10 à 20 % des patients selon la tranche
d’âge présentent un diabète de type 1 [11, 12] alors
que les critères cliniques phénotypiques comme l’index pondéral ou l’efficacité du traitement oral ne permettent d’en identifier que 5 %.
m INTÉRÊTS PRATIQUES
La prédiction de l’apparition d’une insulinodépendance – Depuis la mise au point du dosage des
anticorps anti-GAD, plusieurs publications ont fait
état de son intérêt dans le cadre du diabète de type 2
pour la prédiction de l’insulino-dépendance [12-15].
Notamment l’étude UKPDS qui, à côté de ses objectifs principaux, a également étudié la valeur prédictive
en terme d’apparition de l’insulino-dépendance dans
les 6 ans de la présence d’anticorps anti-GAD et antiîlots comparée aux arguments phénotypiques tels que
l’index pondéral, le degré d’hyperglycémie et la réponse favorable au régime. Ainsi, il apparaît que si le
phénotype est très prédictif de l’insulino-dépendance
chez les patients âgés de moins de 45 ans, il perd de sa
signification dans la tranche d’âge supérieure où la
présence d’anticorps anti-GAD et/ou anti-îlots a une
valeur prédictive d’insulinopénie meilleure (sensibilité : 38 %, spécificité 97 %, valeur prédictive positive : 37 %). Parmi les diabètes dits non insulinodépendants présentant un échec d’efficacité du
traitement oral dans une population japonaise, 10 %
ont des anticorps anti-GAD positifs et sont donc vraisemblablement des diabètes auto-immuns [16].
L’insulinothérapie précoce – Le diagnostic nosologique précis dans le cas du diabète de type 1 tardif ou
lent mérite toute l’attention des médecins. L’indication
plus précoce d’une insulinothérapie avant même
qu’elle ne devienne vitale est vraisemblablement utile
à différents titres. On peut penser qu’elle pourra,
comme cela a bien été démontré dans le diabète de
type 1 juvénile, participer à une conservation des
réserves endogènes d’insuline, et espérer à long terme
un diabète plus stable. Enfin ce diagnostic posé clai-
rement permettra une bonne éducation du patient, un
régime adapté et non trop restrictif comme on le voit
souvent chez les adultes développant un diabète dit
non insulino-dépendant que l’on inscrit dans une
crainte du « passage » à l’insuline. Les décompensations aiguës devraient également être évitées.
Autres avantages potentiel – Une recherche négative
d’anticorps anti-GAD ou anti-îlots dans ces cas de
diabètes dont la présentation ou l’évolution sont inhabituelles peut orienter vers d’autres causes d’insulinopénie. On pensera tout particulièrement aux diabètes
secondaires à une affection pancréatique (cancer du
pancréas, ou pancréatite chronique) ou aux cytopathies mitochondriales.
La caractérisation de la nature autoimmune d’un
diabète de l’adulte, au contraire, évoque la possibilité
d’une association de maladies autoimmunes spécifiques d’organe (le diabète de type « 1b » des anciennes
classifications). On se méfiera tout particulièrement de
l’hypothyroidie et de la maladie de Biermer dont on
connaît la possible latence clinique. La recherche
d’autoanticorps spécifiques peut-être un moyen de dépister des formes frustes ou des prédispositions à ces
maladies.
m QUELS AUTOANTICORPS
RECHERCHER ?
Alors que les anticorps anti-GAD sont présents
chez près de 90 % des patients présentant un diabète
de type 1, les anticorps anti-IA2 sont seulement présents chez 50 à 73 % des patients présentant un diabète de type 1 juvénile, mais ils ont une valeur prédictive et une spécificité très fortes. Par comparaison
avec les anticorps anti-îlots, la combinaison des anticorps anti-IA2 et anti-GAD a le pouvoir de détecter la
majorité des individus ICA positifs, et 97 à 100 % des
sujets futurs diabétiques dans la famille de diabétiques
[17]. Même si la décision définitive de l’abandon des
ICA ne fait pas l’unanimité, il existe désormais la
possibilité de remplacer la recherche des anticorps
anti-îlots par le dosage des anticorps anti-GAD et
anti-IA2 pour le diagnostic du diabète de type 1.
D’autant qu’il est désormais devenu très difficile de se
procurer du pancréas humain pour la recherche des
ICA alors que les dosages des anticorps anti-GAD et
IA2 font appel à des techniques courantes comme
l’ELISA ou les dosages RIA accessibles à tous les
laboratoires d’Immunologie ou d’Hormonologie. On
notera enfin que les anti-GAD sont codifiés (B150,
7890).
Il faut enfin remarquer que les anticorps anti-GAD
paraissent plus fréquents chez les diabétiques de
type 1 dont la maladie a débuté après la puberté, et
qu’ils persistent plus longtemps [18]. Lorsque le diabète a débuté après l’âge de 15 ans 63 % des patients
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Vol. 25, n° 2, 1999
QUAND ET POURQUOI RECHERCHER LES ANTICORPS ANTI-GAD CHEZ UN DIABÉTIQUE NON
INSULINO-DÉPENDANT ?
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présentent toujours des anti-GAD positifs après 10 ans
d’évolution, contre 39 % pour ceux dont la maladie a
débuté pendant l’enfance. Les anti-IA2 sont beaucoup
moins fréquents. Par conséquent, il semble que les
anticorps anti-GAD sont dans le cas de diabètes de
l’adulte connus depuis plusieurs années, nettement
plus intéressants que les anti-IA2, et sont les anticorps
à utiliser de manière privilégiée pour le classement
nosologique des diabètes de l’adulte.
m CONDUITE À TENIR
Chez l’adulte comme chez l’enfant le syndrome
cardinal et la cétose associés à l’hyperglycémie évoquent le diagnostic de diabète de type 1 et les anticorps anti-GAD pourront confirmer l’impression clinique.
En l’absence de ces critères phénotypiques évidents, la recherche des anticorps anti-GAD se justifie
au moment du diagnostic ou dans les mois qui le
suivent, quand certaines incohérences du phénotype
rendent le diagnostic de diabète de type 2 douteux :
statut pondéral non évocateur (BMI normal ou faible,
perte de poids récente), absence d’antécédent familial
de diabète ou au contraire présence d’antécédents personnels ou familiaux de pathologies auto-immunes ou
de diabète de type 1. De plus quelque soit le poids, et
ce surtout chez les sujets de plus de 45 ans si le
traitement oral n’est pas rapidement efficace, le dosage des anticorps anti-GAD, éventuellement associé
à la recherche des ICA, permettra de rectifier le diagnostic.
A distance du diagnostic devant une dégradation du
contrôle métabolique, le dosage des anticorps antiGAD se justifie également pour poser plus rapidement
l’indication de l’insulinothérapie en remplacement du
traitement oral et expliquer son caractère vital et définitif au patient.
Quand demander les anticorps anti-GAD dans
le diabète de l’adulte ?
Sujet « trop jeune » pour un diabète de type 2
Sujet « trop maigre » pour un diabète de type 2,
un amaigrissement « trop rapide », « trop facile »
Existence de pathologies auto-immunes personnelles ou familiales : thyroïdite, Basedow
Absence d’antécédents familiaux de diabète
Inefficacité rapide des antidiabétiques oraux
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© Masson, Paris, 1999
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