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1210.Nerf facial de l’anatomie à la pathologiefin

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1 – RAPPELS ANATOMIQUES ET
PHYSIOLOGIQUES
Fonctions, clinique
Le nerf facial (7e paire crânienne) est un nerf mixte avec des fibres efférentes (motrices et végétatives)
et afférentes (sensitives et sensorielles). Il se compose du nerf facial proprement dit (VII), moteur pur et
du nerf intermédiaire de Wrisberg (VIIbis) [1]. Il s’agit du nerf du second arc branchial avec une
formation très précoce au sein du complexe acoustico-facial. Il est fait d’une juxtaposition d’éléments
somitiques et branchiaux des noyaux des nerfs crâniens, expliquant notamment les anastomoses trijéminofaciales [2].
Fonction motrice (voie efférente)
Les symptômes associés à la perte de cette fonction sont en général ceux motivant la consultation. Il innerve
les muscles peauciers de la face et du cou à l’exception du releveur de la paupière supérieure (3e paire
crânienne). Une atteinte à ce niveau se traduit donc par une asymétrie faciale, le côté sain étant responsable
d’une attraction controlatérale. En cas d’atteinte périphérique, celle-ci est homogène sur le territoire facial
supérieur et facial inférieur et ne s’accompagne pas d’une dissociation automatico-volontaire. En cas de
paralysie faciale d’origine centrale, le déficit prédomine sur le territoire inférieur et s’accompagne d’une
dissociation automatico-volontaire. Le signe de Charles Bell correspond lors de la tentative d’occlusion
palpébrale, au déplacement automatique de l’œil vers le haut et le dehors (mécanisme de protection
cornéenne). Le signe de Souques n’est retrouvé que dans les paralysies faciales modérées, il se manifeste
par des cils plus visibles du côté pathologique lors de l’occlusion palpébrale volontaire forcée.
La sévérité de l’atteinte faciale peut être évaluée en fonction de l’importance du déficit moteur à partir
d’échelles cliniques, permettant également le suivi. La plus utilisée est la classification de HouseBrackmann. Elle correspond à une cotation globale allant de I (normal) à V (déficit total). Les fibres
motrices via les collatérales du facial sont les suivantes : nerf stapédien, nerf auriculaire postérieur, nerf
digastrique et stylo-hyoïdien alors que les fibres terminales sont celles destinées aux peauciers de la face
et du cou (branches temporales, zygomatiques, buccales, mandibulaires, cervicales).
Fonction viscérale (voie efférente sécrétoire)
Il s’agit, d’une part, de fibres parasympathiques destinées aux glandes lacrymales, à la muqueuse oronasale. La traduction clinique est un œil sec. D’autre part, le nerf facial assure l’innervation des glandes
salivaires sublinguale et submandibulaire. Une atteinte de cette portion se manifeste donc par une diminution
de la sécrétion salivaire, sauf celle issue de la parotide (nerf glosso-pharyngien).
Fonction sensitive
Elle correspond à la zone de Ramsay-Hunt incluant le conduit auditif externe, le pavillon de l’oreille et la
région rétro- auriculaire.
Fonction sensorielle
Il s’agit de la sensibilité gustative des deux tiers antérieurs de la langue et du palais par l’intermédiaire de
la corde du tympan.
Anatomie topographique
Noyaux du tronc cérébral
Noyau du nerf facial moteur
Il se situe au niveau du pont dans le tegmentum en avant et latéralement par rapport au noyau du VI.
Il existe une certaine somatotopie à son niveau, non retrouvée ensuite. De là partent des fibres vers l’arrière
pour faire une boucle derrière le noyau du VI et émerger du tronc juste au-dessus de la jonction bulbopontique entre le VIII (au-dessus) et le VI [3]. Le contrôle supra-nucléaire est assuré par le faisceau corticospinal. Celui-ci se projette de manière bilatérale sur la partie supérieure du noyau (contrôlant les muscles du
territoire facial supérieur) et uniquement en controlatéral pour la partie inférieure (expliquant l’atteinte
prédominant sur le territoire facial inférieur en cas de paralysie faciale d’origine centrale). Une atteinte
centrale pourra donc se situer depuis le gyrus précentral jusqu’au noyau du pont.
Il existe également à partir des noyaux faciaux, des projections vers les voies extrapyramidales, le
cervelet, d’autres noyaux du tronc (noyau du V, olive supérieur, noyau du VIII. . .).
Noyaux viscéraux
Ils comprennent principalement le noyau salivaire supérieur, le noyau lacrymal et le noyau solitaire [4].
Les fibres correspondantes sont regroupées sur une partie de leur trajet au sein du nerf intermédiaire de
Wrisberg. Il existe ensuite plusieurs divisions impliquant des anastomoses trijémino-faciales.
Les fibres efférentes correspondent au contingent para- sympathique sécrétoire, elles sont issues du
noyau salivaire supérieur et du noyau lacrymal. Elles sont destinées, d’une part, à la glande lacrymale et
à la muqueuse rhino- pharyngée. Elles correspondent au nerf grand pétreux superficiel, se prolongeant
par le nerf ptérygoïdien faisant synapse au niveau du ganglion ptérygo-palatin. Par ailleurs, elles innervent
les glandes submandibulaires et sublinguales via la corde du tympan, celle-ci rejoignant distalement le
nerf lingual (branche trijéminale).
Les fibres afférentes sont, d’une part, sensitives depuis la zone de « Ramsay Hunt », empruntant
également le nerf lingual puis la corde du tympan vers le faisceau spinal (V) et, d’autre part, sensorielles
gustatives par les mêmes voies vers le noyau solitaire. Ce dernier reçoit également les afférences gustatives
du IX, X et du XI.
Segment cisternal
Les fibres motrices du VII, après avoir adhéré au pont sur 2 à 3 mm, suivent une direction ascendante
et latérale dans l’angle ponto-cérébelleux. Le VII bis est théoriquement séparé mais en contact intime
avec le nerf facial dans la citerne, l’individualisation de l’un par rapport à l’autre n’étant pas faisable,
y compris en peropératoire. En moyenne 2 mm après l’émergence du tronc, se situe la REZ (mais cela
peut aller jusqu’à 21 mm), correspondant à la zone théorique où les oligodendrocytes (système nerveux
central) se transforment en cellules de Schwann (système nerveux périphérique) [5].
Segment intracanalaire (méat auditif interne)
Les fibres du VII et du VII bis sont regroupées à la partie antéro-supérieure du méat auditif interne
(MAI), les fibres motrices recouvrant les fibres sensitives. À noter qu’un feuillet de l’arachnoïde
s’invagine dans le fond du MAI (voire jusqu’au ganglion géniculé pour certains auteurs).
Segment pétreux (canal de Fallope)
Il correspond au canal du facial proprement dit, séparé en 3 portions [1].
1re portion : labyrinthique
Elle s’étend du fundus du MAI au ganglion géniculé. Le facial suit un trajet en dehors et en avant, entre la
cochlée et le vestibule.
Genou du facial : ganglion géniculé
Il se situe dans l’os pétreux en situation postéro-latérale par rapport à l’artère carotide interne, postéromédiane par rapport au foramen spinosum, antérieure par rapport au canal semi-circulaire supérieur. Il
contient les corps cellulaires issus du nerf de la corde du tympan (goût et sensibilité). Par contre, les fibres
motrices y compris viscérales passent sans faire de synapse à ce niveau, leurs corps cellulaires étant au
niveau du tronc cérébral.
À ce niveau naît le nerf grand pétreux superficiel. Celui-ci sort de la base du crâne par le foramen du
grand pétreux. Il passe ensuite par le cavum de Meckel pour rejoindre le canal ptérygoïdien où il est
rejoint par le nerf pétreux profond (contingent sympathique issu du IX) pour former le nerf du canal
ptérygoïdien. Celui-ci passe par la fosse ptérygo-palatine pour se terminer au niveau du ganglion ptérygopalatin, donnant ensuite des branches s’anastomosant avec des branches du trijumeau V1 (lacrymal) et V2
(oro-nasal).
2e portion : horizontale ou tympanique
Son trajet est postérieur depuis le ganglion géniculé, sous le canal semi-circulaire latéral entre le vestibule
et la caisse du tympan. Il n’existe pas de collatérale à ce niveau, ni anastomose.
3e portion : verticale ou mastoïdienne
Le nerf descend verticalement entre la caisse et le conduit auditif externe. Trois branches collatérales
naissent à ce niveau :
• stapédienne (muscle de l’étrier) ; une PFP complète. À partir du 8 jour, la neurographie
• corde du tympan (fibres efférentes pour les glandes submandibulaire et sublinguale et fibres
afférentes pour le goût des 2/3 antérieures de la langue). Elle traverse l’oreille moyenne au niveau de la
membrane tympanique puis passe par la fissure pétro-tympanique pour rejoindre le nerf lingual (branche
du V3) ;
• branche sensitive pour la région auriculaire.
Foramen stylo-mastoïdien, parotide
Il correspond à l’émergence du facial au niveau de la base du crâne. Il se situe en dehors de la styloïde.
Immédiatement après son passage, le nerf facial laisse des branches pour les muscles cervicaux
(auriculaires, digastrique, stylo- hyoïdien. . .) puis pénètre dans la parotide pour donner des branches
musculaires également à destinée temporo-faciale et cervico-faciale au contact de la face postérieure de la
jugulaire externe.
Examens complémentaires hors imagerie
Électroneuromyogramme (ENMG)
Il permet d’affirmer l’existence d’une lésion du nerf facial, de la caractériser (atteinte axonale ou
démyélinisante, bloc de conduction), de quantifier la dénervation motrice et de fournir des informations
pronostiques. Il comprend deux parties :
• la neurographie (ou stimulodétection), au cours de laquelle la stimulation du nerf facial en avant
de l’oreille génère une contraction musculaire enregistrée à l’aide d’électrodes de surface sur différents
muscles de la face (orbiculaire de l’œil, nasalis, orbiculaire des lèvres). La comparaison côté atteint/côté
sain permet de quantifier l’importance de l’atteinte et de suivre l’évolution. L’étude du blink reflex (ou
réflexe de clignement), per- met d’évaluer l’arc réflexe entre le nerf trijumeau (arc afférent par des
branches du nerf supra-orbitaire) et le nerf facial (arc efférent par ses fibres motrices). Des relais
existent au niveau de la protubérance et du bulbe, cet examen, fournissant ainsi des informations
complémentaires sur le tronc cérébral [2]. Dans le cas d’une paralysie faciale, sa persistance à la phase
initiale, très précoce, est un élément de bon pronostic ;
• l’électromyographie proprement dite (ou détection à l’aiguille), au cours de laquelle une aiguille est
insérée successivement dans l’orbiculaire de l’œil puis des lèvres, afin d’étudier l’aspect du tracé au repos
et en contraction. La présence — anormale — d’activités spontanées au repos telles que fibrillations ou
potentiels lents, signe la dénervation, mais ces activités n’apparaissent que de façon retardée (8—10 j pour
le facial). Lors de la contraction volontaire, l’aspect et le nombre de potentiels dits d’unité motrice ainsi
que leur mode de recrutement fournissent des éléments à la fois quantitatifs et pronostiques quant à la
réinnervation à venir ou en cours.
L’intérêt de l’ENMG est variable selon le délai de survenue de la paralysie faciale : dans les premiers
jours, le blink reflex est sans doute le meilleur outil pronostique, devant une PFP complète. À partir du 8
jour, la neurographie classique et l’EMG à l’aiguille renseignent sur l’existence éventuelle d’une
dénervation active et la quantifient. À plus long terme, l’ENMG permet de prévoir la poursuite ou non
d’une réinnervation.
Examens paracliniques réalisables par l’ORL
En plus de l’examen otoscopique, vestibulaire et de l’audiométrie tonale qui sont systématiques, certains
tests peuvent être réalisés à visée localisatrice.
Test de Schirmer
En cas de résultat pathologique (déficit lacrymal unilatéral), il situe l’atteinte en amont de l’origine du
nerf grand pétreux superficiel (origine au niveau du ganglion géni- culé) ou sur son trajet (atteinte isolée
de ce contingent sans atteinte du reste des fonctions du facial notamment motrice).
Réflexe stapédien : acoustico-facial
Sa traduction clinique est une hyperacousie douloureuse. À partir d’un stimulus sonore, l’arc afférent
passe via les noyaux cochléaire et olivaire. L’arc efférent est lui via les noyaux faciaux accessoires ipsi
et controlatéral vers le muscle de l’étrier. Son altération peut donc être liée au nerf facial, au nerf auditif
ou à une atteinte de l’oreille moyenne. Il est aboli en cas de lésion se situant en amont ou sur le nerf
stapédien (origine sur la portion mastoïdienne du facial). Environ 50 % des patients présentant un spasme
de l’hémiface ont des anomalies sur cet arc réflexe, se normalisant après la chirurgie.
Électrogustométrie
Elle est anormale en cas d’atteinte en amont ou sur la corde du tympan.
Imagerie
Indications
L’imagerie n’est pas systématique devant une paralysie faciale périphérique (elle l’est devant une
paralysie faciale centrale). Elle est indiquée devant une installation progressive ou récidivante, devant une
forme grave non régressive ou en cas d’association à d’autres symptômes suggérant une atteinte d’autres
nerfs crâniens.
Protocoles d’exploration
Orientation vers une origine « centrale »
Elle sera suspectée en cas d’atteinte d’autres nerfs crâniens comme le VI ou d’une atteinte des voies
longues. Le protocole minimal sera : Flair, T2*, diffusion, complété si besoin de T2 en coupes fines, d’une
angioMR, d’une injection.
Orientation topographique au niveau de l’angle ponto-cérébelleux ou du MAI
Elle sera suspectée en cas d’atteinte associée du VIII. Des séquences centrées à ce niveau seront
réalisées : séquences très pondérées T2 type CISS ou FIESTA, coupes fines haute résolution en T1 sans
et avec gadolinium. Une exploration complète de l’encéphale, notamment avec injection, sera nécessaire
en cas de pathologie méningée.
Orientation topographique au niveau du rocher
Le scanner des rochers sera l’examen de 1re intention en contexte traumatique. Dans les autres
situations, l’IRM et le scanner seront le plus souvent complémentaires. L’exploration IRM au niveau de
l’os temporal sera réalisée en T2 haute résolution et T1 en coupes fines haute résolution avec saturation
de graisse sans et après injection de gadolinium. La séquence en diffusion pourra être utile dans certaines
situations, notamment lorsqu’un cholestéatome est suspecté. Il ne faudra pas oublier d’inclure la parotide
lors de l’exploration d’une paralysie faciale périphérique isolée.
Aspect normal en coupes
Les colliculi faciaux font saillie dans le plancher du 4e ventricule (correspondant à la courbe du facial
autour du noyau du VI) repère facilement identifiable sur les coupes axiales en IRM (Fig. 1).
Le facial dans son trajet cisternal et au niveau du MAI est bien repérable en IRM, notamment sur les
séquences CISS ou FIESTA (Fig. 2). Le VII et le VII bis ne sont pas identifiables l’un de l’autre.
Au sein du rocher, le facial est contenu dans un canal osseux, permettant sa localisation indirectement à
ce niveau en scanner en repérant le canal (Fig. 3). En coupe axiale, il ne faudra pas confondre le muscle du
tenseur du tympan et le segment tympanique (se poursuivant vers les autres segments sur les coupes sus
et sous-jacentes). En IRM, le nerf facial pourra être visualisé de manière inconstante sur ses 3 portions en
T1, notamment après injection ou en Flair 3D. Ses branches collatérales ne sont habituellement pas
identifiables.
Le nerf facial n’est pas repérable au sein de la parotide sur les imageries conventionnelles. L’utilisation
d’une séquence en tenseur de diffusion peut parfois permettre de le délimiter et préciser ses rapports avec
une lésion parotidienne.
Rehaussement normal
Le nerf facial présente des rapports anatomiques intimes avec des structures vasculaires sur certaines
portions. Il est donc fréquent de retrouver un rehaussement, notamment dans le canal du facial, dont le
caractère normal ou pathologique est parfois difficile à distinguer [6]. Néanmoins, une prise de contraste
intense au niveau de la 1re portion et de la 3e portion n’est habituellement pas observée chez les sujets
normaux. Les segments hors du canal du facial ne prennent normalement que peu ou pas le contraste. Par
ailleurs, une prise de contraste au niveau du méat auditif interne intéressant le VII et le VIII sera à considérer
comme pathologique. Récemment, certaines études ont rapporté, sur une IRM à 3T, la supériorité du flair
3D injecté comparativement au T1 injecté avec saturation de graisse dans l’interprétation de la prise de
contraste du facial, notamment en termes de spécificité [7].
Fig. 1:IRM en coupe axiale du tronc cérébral en T2. Saillie des colliculi faciaux au niveau du plancher du 4e ventricule correspondant à la
courbe du facial autour du noyau du VI.
Fig. 2: IRM en séquence CISS centrée sur le méat auditif interne : a : coupe axiale montrant le nerf facial en situation antérieure au sein du
paquet acoustico-facial ; b : coupe sagittale oblique perpendiculaire à l’axe du MAI, le facial est en position antér
Anomalies congénitales affectant le trajet du facial
Déhiscences du canal du facial
Elles sont fréquentes sur les études anatomopathologiques et ne concernent que des zones focales. Le
segment préférentiellement touché est le segment tympanique. Ce défaut de couverture osseuse représente
une zone de faiblesse en cas atteinte inflammatoire/infectieuse de l’oreille moyenne [8].
Variantes de trajet intrapétreux
Elles sont importantes à signaler dans un bilan pré- opératoire, ce d’autant qu’elles s’associent souvent
à des malformations de l’oreille (sténose ou atrésie du conduit auditif externe, hypoplasie ou atrésie de la
fenêtre ovale. . .).
Portion labyrinthique
Elle peut être bifide.
Portion tympanique
La portion tympanique est comme suit :
• bifide ;
• absente (la 3e portion étant très antérieure dans ce cas) ;
• procidente (devant la fenêtre vestibulaire), souvent accompagnée d’une agénésie de la fenêtre
vestibulaire, ce tableau étant responsable d’une surdité de transmission ;
• passage entre les branches de l’étrier, également responsable d’une surdité de transmission.
Portion mastoïdienne
La portion mastoïdienne est comme suit :
• bifide ;
• situation très antérieure en cas d’aplasie majeure voire absente.
Fig. 3: Scanner des rochers : a : reconstruction en coupe oblique montrant la portion tympanique et mastoïdienne du facial dans le rocher ;
b : en coupe axiale montrant la portion labyrinthique et le ganglion géniculé.
Pathologies responsables d’une paralysie faciale périphérique
La principale étiologie est la paralysie faciale a frigore dite de Bell (60 %) suivie de l’origine traumatique
(17 %), de causes inflammatoires ou infectieuses (10 %), et tumorales (6 %). La fréquence des différentes
étiologies dépend de la topographie lésionnelle.
Atteinte nucléaire
Même si l’on se situe stricto sensu sur une topographie centrale, la traduction clinique sera périphérique.
Néanmoins, compte tenu de la proximité des autres noyaux et des faisceaux appartenant aux voies longues,
l’atteinte faciale sera rarement isolée.
Les étiologies les plus fréquentes sont tumorales (primitive ou secondaire), inflammatoire (Fig. 4) ou
ischémique. Le mode d’installation ainsi que les caractéristiques IRM de l’anomalie de signal du tronc
permettent le plus souvent une orientation. Dans le cadre de l’ischémie, deux syndromes en particulier ont été
individualisés :
• le syndrome de Millard-Gubler : atteinte du VII homolatéral et déficit moteur controlatéral respectant la
face ;
• le syndrome de Foville : atteinte du VII homolatéral, du VI homolatéral, paralysie de la latéralité vers
la lésion et déficit moteur controlatéral respectant la face.
Angle ponto-cérébelleux et méat auditif interne
Compte tenu de la proximité du VIII, ce dernier est en général symptomatique, dominant le plus souvent
le tableau (surdité, vertiges, hyperacousie, acouphènes. . .).
Certains processus plus volumineux peuvent également être responsables d’une atteinte associée du V
ou du VI, voire des voies longues au niveau du tronc. Les étiologies à ce niveau peuvent être séparées en
deux groupes :
• atteinte b i l a t é r a l e a ve c r e h a u s s e m e n t m éningé d i f f u s : méningite carcinomateuse (Fig. 5),
hémopathies (lymphome, leucémie), méningite infectieuse (lyme, tuberculose. . .) voire inflammatoire
(sarcoïdose. . .), syndrome de Miller-Fischer (forme de Guillain-Barré) ;
• syndrome de masse : méningiome, schwannome (du VIII ou du VII — Fig. 6).
Fig. 4: T2 TIRM en coronal sur le tronc cérébral mettant en évidence un hypersignal de la protubérance sur le trajet du facial juste avant
son émergence dans l’angle ponto-cérébelleux chez un patient présentant une paralysie faciale périphérique. Diagnostic de
Un conflit vasculaire sur le trajet cisternal du VII (Fig. 7) peut se manifester par un spasme de l’hémiface
(conflit sur la branche motrice) ou une névralgie du VII (conflit sur le VII bis — otalgie paroxystique).
Le spasme de l’hémiface se traduit par des clonies de l’hémiface débutant au niveau de la paupière
inférieure et se propageant ensuite à l’ensemble de l’hémiface. Dans cette situation, la réalisation d’une
angioMR en temps de vol sera contributive. Le vaisseau responsable du conflit est en général une artère
; une veine ou une malformation vasculaire étant rarement impliquées. L’artère le plus souvent impliquée
est la PICA, une atteinte liée à l’AICA, la vertébrale homo-, voire controlatérale étant possible [5]. Compte
tenu de la fréquence des contacts vasculo-nerveux chez le sujet sain, un conflit ne sera considéré comme
pathologique qu’au niveau de la REZ (2 à 3 mm après l’émergence du nerf au niveau du tronc), ce contact
étant perpendiculaire et entraînant une déformation du nerf. Le rôle du conflit vasculo-nerveux dans les
autres cas sera discuté. Une étiologie tumorale devant un spasme de l’hémiface sera suspectée en cas de
paralysie faciale et/ou d’une autre atteinte neurologique associée. Des injections de toxines botuliniques
dans les muscles concernés peuvent être bénéfiques, une décompression chirurgicale pouvant être
proposée lorsque le conflit vasculo-nerveux est mis en évidence.
Canal du facial
Étiologies infectieuses
Étiologies virales
La plus fréquente et également la 1re cause de paralysie faciale périphérique est la paralysie faciale
a frigore. Il s’agit cependant d’un diagnostic d’élimination. Son installation est brutale, parfois précédée
de douleurs mastoïdiennes. Une dysgueusie est souvent associée. L’étiologie serait une réactivation virale
du groupe herpès (le plus sou- vent HSV1). Le pronostic est le plus souvent bon. L’imagerie n’a pas
d’indication dans les formes isolées, typiques (début brutal, et d’évolution bénigne). A contrario, une
présentation atypique (début progressif ou récupération lente, voire absente, atteinte d’autres paires
crâniennes ou douleur associée importante), l’absence totale de récupération à 6 mois ou la récidive doivent
faire réviser le diagnostic et conduire à la réalisation d’une IRM. Celle-ci retrouve en cas de paralysie faciale
a frigore [9], une prise de contraste du nerf facial avec un rehaussement régulier (Fig. 8). Tous les segments
depuis le méat auditif interne jusqu’à la portion mastoïdienne peuvent être concernés. Néanmoins, on
retrouvera plus fréquemment un rehaussement du fond du MAI, de la 1re portion du facial et/ou du ganglion
géniculé.
Ce rehaussement est aspécifique. Un aspect épais, irrégulier ou nodulaire, est atypique pour une paralysie
faciale a frigore et devra donc faire élargir le bilan étiologique.
Le zona auriculaire est également une étiologie virale fréquente. Il correspond en fait à une résurgence
du VZV au niveau du ganglion géniculé. L’otalgie précédant la paralysie faciale est souvent très intense
à la différence de la paralysie a frigore. La paralysie faciale est d’installation brutale et très rapidement
totale. L’éruption vésiculaire dans la zone de Ramsay Hunt est pathognomonique mais inconstante. S’y
associent fréquemment des signes de névrite du VIII et plus rarement des autres nerfs crâniens.
Les autres étiologies infectieuses le plus souvent retrouvées sont l’HSV, la MNI, la maladie de Lyme, la
syphilis.
Fig. 5: T1 axial après injection de gadolinium montrant un rehaussement bilatéral symétrique des MAI (a), un rehaussement leptoméninge
diffus en fosse postérieure (b). Méningite carcinomateuse confirmée à la ponction lombaire.
Fig. 6: T1 axial 2 mm après injection de gadolinium. Lésion tissulaire rehaussée de l’angle ponto-cérébelleux envahissant le MAI.
Schwannome.
Fig. 7: T2 axial 3 mm. Aspect déroulé de la vertébrale gauche responsable d’un conflit vasculo-nerveux avec le VII révélé par un spasme de
l’hémiface.
Complications des atteintes infectieuses de l’oreille moyenne
Une otite moyenne aiguë peut se compliquer d’une paralysie faciale périphérique, d’évolution
généralement favorable après antibiothérapie. Une déhiscence du canal du facial au niveau de son segment
tympanique en est un facteur favorisant. En cas de chronicité de l’otite moyenne, la survenue d’une atteinte
du facial sera le plus souvent due à un cholestéatome ou un granulome à cholestérine, même si elle reste
une complication rare dans ce cas. Une tuberculose devra être recherchée en cas de complication d’une
otite moyenne chronique sans cholestéatome [10]. L’otite externe nécrosante peut également se compliquer
d’une atteinte du facial au sein du rocher avec un aspect pseudotumoral à l’imagerie.
Fig. 8: T1 axial 2 mm après injection de gadolinium et saturation de graisse. Rehaussement fin mais intense du facial dans le fond du méat
auditif interne, se poursuivant dans la 1re portion du facial et le ganglion géniculé. Paralysie faciale a frigore.
Étiologie traumatique
Elle est rencontrée dans 50 % des fractures transversales (qui représentent moins de 20 % des fractures
du rocher) contre 20 % dans les fractures longitudinales [11]. Elles sont principalement liées à une atteinte
du ganglion géniculé ou du segment mastoïdien. En cas de vertiges et/ou de surdité totale associés, on
recherchera une atteinte trans- labyrinthique (Fig. 9). Le trait de fracture n’est parfois pas visible, un signe
indirect étant le comblement des cellules mastoïdiennes. En fonction du délai d’installation au décours du
traumatisme, le mécanisme et la prise en charge seront différents :
• secondaire : son origine est inflammatoire avec un pronostic favorable sous corticoïdes ;
• immédiate et complète : le mécanisme est une section ou une compression. Une intervention chirurgicale
précoce pourra être indiquée.
Devant une paralysie faciale traumatique sans élément orientant vers le rocher, il faudra rechercher une
atteinte sur un autre segment (tronc cérébral, parotide). Une origine iatrogène peut également être rencontrée,
en particulier en cas de variante anatomique non repérée.
Étiologie tumorale
Elle sera évoquée devant une paralysie faciale périphérique incomplète, fluctuante, récidivante ou
progressive, précédée ou accompagnée d’un spasme de l’hémiface. Le rocher est la topographie la plus
fréquente avec plus particulière- ment à ce niveau :
Fig. 9: Fracture transversale du rocher passant par le golfe jugulaire, le labyrinthe et s’épuisant au niveau du ganglion géniculé.
• schwannome du facial : il est possible sur tout son trajet mais se situe plus souvent au fond du MAI, sur
le ganglion géniculé ou dans son segment tympanique (Fig. 10). En cas d’atteinte du ganglion géniculé, on
retrouve un aspect de pseudoméningiome de la fosse moyenne [12] ;
• hémangiome du facial : il se situe au niveau du ganglion géniculé. Les éléments IRM
caractéristiques sont un aspect très hyper T2 ainsi qu’une prise de contraste intense. L’aspect en nid
d’abeille sur le scanner est très évocateur [13] ;
• paragangliome jugulo-tympanique : le diagnostic pourra être suspecté dès l’examen otoscopique devant
une masse bleutée rétrotympanique. Sur le plan de l’imagerie, il se caractérise par une lyse osseuse, un
rehaussement très intense avec des images en vide de flux correspondant aux structures vasculaires
dilatées.
Étiologies inflammatoires
Elles sont responsables d’une infiltration nerveuse. Les plus courantes sont la sarcoïdose et la maladie
de Wegener.
Parotide
Les lésions tumorales à ce niveau responsables d’une atteinte du facial sont en général malignes [14].
Il peut s’agir de tumeurs primitives (carcinome adénoïde kystique), de métastase intraparotidienne (Fig. 11).
Le schwannome du facial peut également se développer sur son segment parotidien. Ses caractéristiques
de signal en IRM sont proches de celles d’un adénome pléomorphe. On recherchera donc une extension
tumorale le long du facial en particulier le long du foramen stylo-mastoïdien avec un élargissement
foraminal sans ostéolyse aidant au diagnostic.
Atteinte périneurale
Cela correspond à une dissémination des cellules tumorales le long de la gaine des nerfs. Compte tenu
de la richesse des anastomoses nerveuses notamment entre le V et le VII (nerf grand pétreux superficiel),
les voies de propagation possibles sont nombreuses.
Les principales néoplasies retrouvées sont les carcinomes de la tête et du cou, le mélanome et le lymphome
[15]. Les signes à rechercher sont :
• une augmentation de calibre du nerf avec un rehausse- ment irrégulier, nodulaire ;
• un élargissement des foramens de la base du crâne ;
• un effacement de la graisse périneurale, à rechercher plus particulièrement au niveau de la fosse
ptérygo-palatine ;
• des signes de dénervation sur les groupes musculaires impliqués.
Cette dissémination est importante à rechercher, ce d’autant qu’elle peut être asymptomatique, compte
tenu de modifications de la prise en charge thérapeutique (passage du curatif au palliatif dans certains cas).
Fig. 10: T1 axial 2 mm après injection de gadolinium et saturation de graisse. Rehaussement épais du facial dans le fond du méat auditif
interne, se poursuivant dans la 1re portion du facial et le ganglion géniculé. Schwannome du facial.
Fig. 11: T1 coronal 3 mm après injection de gadolinium et saturation de graisse, centré sur les parotides. Lésion nodulaire
intraparotidienne avec rehaussement se poursuivant le long du nerf facial dans sa 3e portion. Lésion nodulaire rehaussée intracérébrale p
Étiologies pédiatriques [16]
Nouveau-né
Il peut s’agir d’une origine traumatique obstétricale ou d’une atteinte congénitale. Pour cette dernière,
les principales étiologies sont l’hypoplasie du facial (identifiée par un petit canal sur le scanner du rocher),
le syndrome de Moebius (diplégie faciale associée à une atteinte du VI avec sur l’IRM hypoplasie du tronc
et absence de nerf visualisé dans la citerne) et l’aplasie de l’oreille (plus souvent une malposition du VII
avec rarement une paralysie faciale).
Nourrisson et enfant
Bien que la 1re étiologie reste également la paralysie faciale a frigore, elle est moins fréquente que chez
l’adulte. Les atteintes postotitiques sont fréquentes compte tenu de la prévalence de l’otite dans la
population pédiatrique. Les causes virales sont également retrouvées, plus particulière- ment devant une
diplégie faciale, la maladie de Lyme étant non exceptionnelle comme chez l’adulte.
Les causes tumorales les plus fréquentes en pédiatrie sont le rhabdomyosarcome du rocher, l’histiocytose,
les hémopathies. Les schwannomes sont beaucoup plus rares et s’intègrent alors le plus souvent dans le cadre
d’une neurofibromatose de type 2.
POINTS À RETENIR
• L’exploration d’une atteinte périphérique du nerf facial se fait du tronc cérébral à la parotide.
• Une prise de contraste du facial est pathologique en dehors du canal du facial, si elle est intense sur
les
2e et 3e portions ou si elle s’étend au VIII ou se situe en dehors du rocher (méat auditif, après le foramen
stylo-mastoïdien).
• La paralysie faciale a frigore est l’étiologie la plus fréquente. L’IRM, examen de 1ère intention,
n’est cependant pas systématique sauf en cas d’atypies, de symptômes récurrents ou s’aggravant.
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