Arrêt cardiocirculatoire au bloc opératoire

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Le Praticien en anesthésie réanimation (2015) 19, 136—142
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RUBRIQUE PRATIQUE
Arrêt cardiocirculatoire au bloc opératoire
Cardiac arrest in the operating room
Diane Lena-Quintard
Cardiologie médico-chirurgicale, institut Arnault-Tzanck, avenue du Docteur-Donat,
06700 St-Laurent-du-Var, France
Diane Lena-Quintard
MOTS CLÉS
Arrêt cardiaque ;
Bloc opératoire ;
Réanimation
cardiopulmonaire ;
Monitorage
KEYWORDS
Cardiac arrest;
Operating theatre;
Cardiopulmonary
resuscitation;
Monitoring
Disponible sur Internet le 7 avril 2015
Résumé L’incidence de l’arrêt cardiaque au bloc opératoire est de 5,6 pour
10 000 interventions. Le contexte du bloc opératoire génère des spécificités par rapport
à la démarche préhospitalière, tant sur le plan du diagnostic, que de la prise en charge. Sous
anesthésie générale, le diagnostic et la conduite de la réanimation reposent sur le monitorage
qui est déjà en place. Les étiologies sont avant tout respiratoires avec comme conséquence
une hypoxémie mais aussi les accidents allergiques et toxiques. La réanimation (massage
cardiaque à un rythme de 100/minute, adrénaline, choc électrique en cas de trouble du
rythme ventriculaire. . .) est menée en parallèle avec le contrôle du circuit de ventilation. Le
pronostic est meilleur du fait de la rapidité du diagnostic et de l’immédiateté et de l’efficacité
des manœuvres de ressuscitation, ce qui justifie une réanimation prolongée.
© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Summary The incidence of cardiac arrest in the operating theatre is 5.6/10,000 surgical
procedures. Cardiac arrest occurring in the operating room has specific features. Diagnostic
and treatment are facilitated by monitoring already in place. The main causes are respiratory
complications (related to airway control, pulmonary embolism, pneumothorax) responsible for
severe hypoxaemia and surgical haemorrhage. Anaphylactic and toxic reactions to anaesthetic
drugs are also implicated. Cardiac resuscitation applies the usual recommendations. In the
Adresse e-mail : [email protected]
http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2015.03.008
1279-7960/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Arrêt cardiocirculatoire au bloc opératoire
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operating room, the prognostic of cardiac arrest is better, justifying the prolongation of the
resuscitation maneuvers.
© 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction
Prise en charge
La survenue d’un arrêt cardiaque au bloc opératoire constitue un évènement dramatique dans le cadre de la conduite
d’une anesthésie. Cependant, l’absence de délai diagnostique, l’environnement technologique et l’expertise autour
du patient font que le pronostic est meilleur que celui des
arrêts cardiaques extrahospitaliers.
Diagnostic et réanimation de l’arrêt
circulatoire
Épidémiologie et pronostic
L’incidence de l’arrêt cardiaque au bloc opératoire est
de 5,6 pour 10 000 interventions [1]. Un arrêt cardiaque au
bloc opératoire peut survenir à n’importe quel moment
de l’anesthésie et quelle que soit la technique employée.
En effet, 23 % des arrêts circulatoires surviennent au
moment de l’induction et 29 % au cours de l’entretien
de l’anesthésie. En cas d’anesthésie locorégionale, le
risque d’arrêt cardiaque concerne principalement la phase
d’installation de l’anesthésie, avec une incidence de
3/10 000.
Les facteurs de risque rapportés sont l’anesthésie réalisée en urgence, les âges extrêmes de la vie et un score
ASA élevé. L’obstétrique, les actes radiologiques et diagnostiques sont associés à un risque encore plus faible.
Le pronostic d’un arrêt cardiaque survenant dans la
période périopératoire est moins sombre qu’en extrahospitalier. En effet, le pourcentage de survie est de 31,7 % (dont
64 % sans séquelles neurologiques) en intrahospitalier, alors
qu’il est de 3 % en extrahospitalier.
Des facteurs de mauvais pronostic ont été décrits. Pour ce
qui est de la survie, il s’agit du rythme cardiaque de départ
(asystolie) et du terrain (insuffisance cardiaque congestive,
insuffisance rénale, septicémie, insuffisance respiratoire,
âge élevé, trauma majeur, anomalie métabolique, hémopathie maligne ou néoplasie métastasée). Pour ce qui concerne
la récupération neurologique, il s’agit de l’âge, du statut
neurologique à l’admission et de l’insuffisance respiratoire.
Étiologies
Aucune cause n’est identifiée précisément dans 10—30 %
des arrêts cardiaques survenus au bloc opératoire. Dans
une revue de la littérature publiée en 2005, les rythmes
cardiaques retrouvés sur l’électrocardiogramme sont des
bradycardies dans 23 % des cas, une asystolie dans 22 % des
cas, une arythmie ventriculaire (FV ou TV) dans 14 % des cas.
L’ECG est normal dans 7 % des cas (33 % non documentés) [2].
Les étiologies les plus fréquemment retrouvées sont évoquées dans le Tableau 1.
Le diagnostic d’arrêt cardiaque au cours d’une anesthésie
ou d’une intervention est rapidement fait sur la base du
monitorage installé pour l’anesthésie. L’incidence des arrêts
cardiaques au bloc opératoire a diminué depuis la publication du décret sur la sécurité en anesthésie qui rendait le
monitorage, notamment celui du CO2 expiré et de la saturation artérielle en oxygène, obligatoire pour les patients sous
anesthésie [3] :
• le cardioscope permet de détecter rapidement une asystolie, une fibrillation ventriculaire ou une autre activité
ventriculaire sans pouls. Il fournit également des informations sur une étiologie cardiaque possible, notamment
une ischémie coronarienne, un trouble du rythme ou de
conduction ;
• l’oxymètre de pouls permet, en cas d’arrêt circulatoire,
d’observer une disparition des oscillations systolodiastoliques de la courbe de plethysmographie et une
diminution de la SpO2 qui est toutefois plus tardive du
fait de l’enrichissement en oxygène des gaz inspirés.
Cependant le signal disparaît en cas de vasoconstriction
périphérique ou d’hypotension artérielle sévère et bien
sûr lorsque l’activité cardiaque s’est arrêtée ;
• le monitorage du CO2 expiré est un paramètre fiable de
détection d’un bas débit puis d’un arrêt cardiaque au
bloc opératoire, lorsque le patient est intubé. En effet la
pression télé-expiratoire de CO2 reflète la pression alvéolaire de CO2 et donc la pression partielle artérielle en CO2 .
Ainsi, une variation brutale du débit cardiaque, et donc
du débit sanguin pulmonaire, se traduit par une baisse
de la PETCO2 du fait d’une diminution de la quantité de
CO2 transportée au niveau du poumon. On considère en
général, qu’une PETCO2 inférieure à 10 mmHg reflète une
inefficacité circulatoire nécessitant une réanimation cardiopulmonaire. La spécificité de la capnographie n’est
cependant pas absolue car il existe des situations autres,
qui sont responsables d’une baisse brutale de la PETCO2 ,
comme le bronchospasme, l’obstacle trachéal, l’embolie
pulmonaire, le capnothorax en chirurgie laparoscopique.
Chez les patients en ventilation spontanée, non intubés,
la capnographie permet surtout de détecter les apnées
et donc d’anticiper un éventuel arrêt cardiaque d’origine
hypoxique. Enfin, le CO2 expiré est un reflet direct de
l’efficacité du massage cardiaque et permet de guider la
réanimation [4].
Une fois le diagnostic d’arrêt circulatoire confirmé,
notamment après vérification de la fiabilité du monitorage (Fig. 1), la réanimation doit immédiatement débuter
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Tableau 1
D. Lena-Quintard
Étiologies les plus fréquemment associées à un arrêt cardiaque périopératoire.
Causes respiratoires
Causes cardiovasculaires
Causes anesthésiques
Causes neurologiques
Hypoxie (inhalation, échec d’intubation, extubation accidentelle, pneumothorax,
intubation sélective, panne de matériel, dépression respiratoire au cours d’une
anesthésie locorégionale)
Bronchospasme
Choc hypovolémique et/ou hémorragique
Manœuvres chirurgicales associées à une diminution de la perfusion des organes
Embolie pulmonaire cruorique, gazeuse, graisseuse, de ciment
Déséquilibre hydro-électrolytique (kaliémie)
Augmentation de la pression intra-abdominale
Accident transfusionnel
Choc anaphylactique
Pneumothorax compressif
Syndrome coronarien aigu (infarctus, Takotsubo. . .)
Hypertension artérielle pulmonaire sévère
Défaut de fonctionnement de pace maker
Syndrome du Q-T long
Trouble de la conduction (BAV complet)
Hypothermie
Surdosage en agents anesthésiques
Erreurs d’administration d’un médicament
Anesthésie neuro-axiale avec bloc du tronc cérébral
Intoxication aux anesthésiques locaux
Hyperthermie maligne
Choc anaphylactique
Accident vasculaire cérébral
Hypertension intracrânienne
Figure 1. Algorithme de prise en charge d’un arrêt circulatoire
au bloc opératoire (PAD : pression artérielle diastolique).
par un massage cardiaque externe ou interne (selon le
type de chirurgie) à un rythme de 100/minute [5], en
essayant de minimiser la durée et la fréquence des interruptions. L’efficacité des compressions thoraciques est
indiquée par la valeur de la pression artérielle diastolique ≥ 40 mmHg (pour assurer une perfusion cérébrale)
et une ETCO2 ≥ 20 mmHg. Une ETCO2 < 10 mmHg après
20 minutes de réanimation cardiaque avancée est associée à
l’échec du retour à une circulation spontanée dans 100 % des
cas [2].
L’administration de tous les agents anesthésiques doit
être interrompue pendant le massage, une purge des circuits du respirateur est effectuée, la FiO2 est réglée à
100 %. Le patient est bien entendu intubé et ventilé si
l’intervention se faisait sous anesthésie locorégionale. Un
renfort doit être appelé simultanément en utilisant les
procédures de secours du bloc opératoire. Il faut noter
qu’en cas de chirurgie en décubitus ventral, un massage
cardiaque en position ventrale doit être effectué immédiatement, bien que son efficacité soit inconstante [4] et
le patient doit être replacé en position dorsale dès que
possible.
La suite de la prise en charge est codifiée par les recommandations de la SFAR [5] :
• l’adrénaline par voie intraveineuse reste le vasopresseur
de choix, quelle que soit l’étiologie de l’arrêt cardiaque.
La voie intra-trachéale n’est plus recommandée ;
• en cas de fibrillation ventriculaire ou de tachycardie
ventriculaire sans pouls, un choc électrique externe de
200 joules (8—10 joules en interne), doit être réalisé
(défibrillateur biphasique) suivi d’une reprise du massage cardiaque pendant 2 minutes avant de rechercher
la présence d’un rythme. L’amiodarone, la lidocaïne
et le sulfate de magnésium peuvent être utiles pour
les fibrillations ventriculaires résistantes à la défibrillation (Tableau 2) ;
Arrêt cardiocirculatoire au bloc opératoire
Tableau 2
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Indications et posologies des médicaments de l’arrêt cardiaque.
Médicament
Indication
Posologie
(voie intraveineuse)
Adrénaline
Amiodarone
Inefficacité circulatoire
Fibrillation ou tachycardie ventriculaire réfractaire après
3 CEE
Fibrillation ou tachycardie ventriculaire réfractaire ET
amiodarone indisponible
Torsade de pointe, hypomagnésémie
1 mg toutes les 3 à 5 minutes
300 mg IVD puis 150 mg si
FV/TV persistante
1 mg/kg
Lidocaïne
Sulfate de magnésium
• en cas d’asystolie ou de dissociation électromécanique,
le massage cardiaque doit être poursuivi sans interruption
jusqu’à la récupération d’une activité cardiaque ;
• les solutés de perfusion doivent être isotoniques ;
• l’administration d’un soluté alcalinisant ne doit pas être
systématique, mais guidée par la mesure des gaz du sang.
Diagnostic étiologique et réanimation
spécifique
La recherche de l’étiologie de l’arrêt circulatoire se fait
simultanément car elle peut permettre de proposer un traitement spécifique indispensable. Deux approches peuvent
être proposées.
La première, décrite par Moitra et al. [2], repose sur
l’analyse du rythme cardiaque de départ, démarche résumée dans le Tableau 3. Cependant cette approche est
souvent difficile du fait de la faible spécificité du rythme
initial et d’une analyse peu aisée du tracé ECG (parasite).
Une deuxième approche consiste à réaliser une série de
vérifications en fonction du contexte et de la fréquence
des évènements :
Figure 2.
2 g IVD
• la première étape consiste à rechercher une orientation
en fonction du contexte : le geste chirurgical (hypovolémie, pertes sanguines, embolie gazeuse. . .), le type
d’anesthésie (intoxication aux anesthésiques locaux. . .),
le terrain (coronarien par exemple), la clinique (signe
d’anaphylaxie. . .) et enfin les données du monitorage
(désaturation, hyperthermie. . .) ;
• en l’absence d’orientation évidente, la recherche d’un
mécanisme ventilatoire constitue la deuxième étape,
notamment chez le patient intubé. En effet les causes
les plus fréquentes sont l’obstruction ou le déplacement
de la sonde d’intubation, le bronchospasme et le pneumothorax. Le moindre doute sur le bon fonctionnement du
circuit de ventilation conduit à une ventilation manuelle
en oxygène pur. La démarche diagnostique chez un patient
ventilé est résumée dans la Fig. 2 ;
• la troisième étape demande une vérification rapide
du plateau d’anesthésie afin de détecter une erreur
d’administration ;
• la quatrième étape repose sur un bilan cardiovasculaire avec analyse de l’ECG à la recherche d’un trouble
du rythme, d’un trouble de la repolarisation ou de
la conduction. Quelques études ont analysé l’intérêt
Recherche d’un mécanisme ventilatoire au décours d’un arrêt cardiaque chez un patient ventilé.
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D. Lena-Quintard
Tableau 3
Rythme cardiaque initial et étiologies.
Bradycardie ou asystolie
Tachycardie ou fibrillation
ventriculaire
«H»
«T»
Hypoxie
Hypovolémie
Hypokaliémie
Hyperkaliémie
Hydrogène (acidose)
Hypothermie
Hypoglycémie
Hyperthermie maligne
réaction « Hypervagal »
Toxicité (anaphylaxie, anesthésie)
pneumoThorax compressif
Thromboembolie (pulmonaire, coronaire)
Tamponnade
Traumatisme (hémorragie)
QT allongé
Ischémie coronaire
Dyskaliémie
Une fois le diagnostic étiologique établi, une prise en
charge spécifique doit être proposée. Celle-ci ne sera pas
développée ici.
Intérêt d’une réanimation prolongée
Figure 3.
Recherche étiologique : démarche diagnostique.
La durée de réanimation est sujette à débat. De nombreuses
équipes arrêtent la réanimation après 20 minutes d’absence
de récupération d’une activité circulatoire, cependant il
semble qu’un certain nombre de patients pourraient bénéficier d’une réanimation plus longue, d’au moins 30 minutes,
sans aggraver le pronostic neurologique par rapport à
ceux qui ont été réanimés plus rapidement [7]. En effet,
un arrêt cardiaque peropératoire présente quelques particularités par rapport à un arrêt préhospitalier, ce qui
justifie une modification de la prise en charge recommandée : le monitorage peropératoire obligatoire permet
un diagnostic quasi immédiat, ce qui diminue considérablement le délai de réanimation cardiopulmonaire (no
flow, c’est-à-dire durée pendant laquelle le débit cardiaque
est nul avant l’instauration des manœuvres de réanimation, diminuée). De plus, l’anesthésie générale associée
souvent à une hypothermie modérée peut laisser espérer un certain degré de protection cérébrale. Enfin, la
réanimation spécialisée d’emblée avec une période de
low flow (période pendant laquelle le débit cardiaque est
diminué et assuré par la réanimation cardiopulmonaire)
optimisée (massage cardiaque par des professionnels, accès
rapide aux voies aériennes supérieures, vasopresseurs, défibrillation précoce) permet d’espérer un pronostic plus
favorable.
Place de l’assistance circulatoire
de l’échocardiographie pendant un arrêt cardiaque
notamment pour la détection des causes réversibles
(tamponnade, embolie pulmonaire, dissection aortique,
hypovolémie. . .) [6] ;
• enfin un bilan biologique peut être réalisé (ionogramme, numération formule sanguine, gaz du sang, bilan
d’anaphylaxie) à la recherche d’un trouble métabolique
ou d’un mécanisme allergique.
L’ensemble de cette démarche diagnostique est résumé
dans la Fig. 3.
La SFAR a publié en 2008 des recommandations sur les indications de l’assistance circulatoire dans le traitement des
arrêts cardiaques réfractaires [8]. Les critères de mise
en place d’une assistance circulatoire sont les suivants :
les intoxications médicamenteuses, une hypothermie inférieure à 32 ◦ C ou bien la présence de signes de vie pendant
la réanimation cardiopulmonaire. En cas d’incertitude sur
l’étiologie, l’association d’un arrêt cardiaque survenant
devant témoin avec une période de no flow inférieure à
5 minutes, ainsi qu’un low flow inférieur à 100 minutes et
Arrêt cardiocirculatoire au bloc opératoire
une ETCO2 supérieure à 10 mmHg peuvent amener à proposer une technique d’assistance circulatoire.
Un arrêt cardiaque au bloc opératoire survient devant
témoin, la période de no flow est courte et mesurable,
le monitorage obligatoire de l’ETCO2 permet d’évaluer
l’efficacité de la réanimation, les causes sont souvent
réversibles, enfin le terrain et les comorbidités sont
connus. En cas d’arrêt cardiaque réfractaire, la réflexion
quant au recours à une technique d’assistance circulatoire paraît donc plus facile. Il n’existe pas cependant à
l’heure actuelle de recommandations spécifiques pour cette
situation.
Réanimation post arrêt cardiaque
La prise en charge après récupération d’un arrêt circulatoire au bloc opératoire est similaire à celle d’un arrêt
préhospitalier, notamment en termes d’objectifs de normoxie, normocapnie, d’équilibre glycémique et de contrôle
de la pression artérielle [9].
141
et neurologique stable qu’un désengagement des mesures
d’assistance peut être envisagé.
Quand et comment délivrer une information à
la famille ?
La survenue d’un arrêt cardiaque au bloc opératoire impose
d’en informer les proches du patient. Plusieurs points sont
à souligner dans la façon de délivrer cette information. Il ne
faut pas attendre plusieurs heures avant de prendre contact
avec la famille. Ce point est souvent reproché quand un
contentieux médico-judiciaire fait suite à la survenue de
cette complication, la famille ayant eu l’impression d’un
abandon alors qu’elle se trouve confrontée à un évènement
douloureux et inattendu. L’information doit être donnée
simultanément par le chirurgien et l’anesthésiste en charge
du patient qui doivent délivrer une information cohérente,
chacun intervenant pour sa part d’expertise sans intervenir
sur celle de l’autre. La transparence concernant les faits
tels qu’ils se sont produits doit être totale.
Faut-il poursuivre l’intervention ?
En cas de reprise d’une activité cardiaque efficace, la décision de report ou de poursuite de l’acte chirurgical doit être
discutée au cas par cas. Plusieurs facteurs alimentent la
discussion : l’indication de l’intervention et son caractère
vital, le fait qu’elle soit débutée ou non, le degré d’urgence,
l’étiologie et la durée de l’arrêt cardiaque, et la stabilité
hémodynamique post arrêt cardiaque. Si l’intervention n’est
pas débutée et si elle n’est pas vitale, elle doit être reportée. Si elle est en cours, elle est terminée ou écourtée si
possible.
Conclusion
L’arrêt cardiaque au bloc opératoire est un évènement rare,
ce qui rend sa prise en charge peu aisée, bien qu’il survienne
en milieu spécialisé. Le diagnostic a été rendu plus facile
par l’introduction d’un monitorage obligatoire au cours de
l’anesthésie. Concernant la démarche diagnostique et thérapeutique, l’application d’algorithmes permet d’améliorer
la prise en charge de ce type d’événement.
Quelle est la place de l’hypothermie
thérapeutique dans ce contexte particulier ?
Déclaration d’intérêts
Les travaux sur l’hypothermie modérée après un arrêt
cardiaque extrahospitalier par fibrillation ventriculaire
décrivent un effet neuroprotecteur associé à une amélioration du devenir neurologique [10]. L’extrapolation
de ces données aux autres types d’arrêts cardiaques,
notamment intrahospitalier, semble raisonnable, bien
qu’il n’y ait pas actuellement de données scientifiques
suffisantes.
L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
Évaluation de l’état neurologique
Un point important est l’évaluation de l’état neurologique après arrêt cardiaque qui est en fait difficile dans
l’immédiat. Sur la notion d’une reprise de la ventilation et
de quelques mouvements spontanés, on voit trop souvent
des patients extubés au décours d’un arrêt cardiaque. . ..
puis réintubés devant l’aggravation de la situation telle
que la survenue de crises convulsives. Il n’est pas recommandé d’extuber un patient au décours d’un arrêt cardiaque
même si la durée de celui-ci a été brève. Il faut prendre le
temps d’évaluer l’état neurologique et la stabilité hémodynamique, maintenir la ventilation au besoin associée à
une sédation et mettre en route des mesures de protection cérébrale comme l’hypothermie modérée. Ce n’est
qu’après avoir compris la cause de l’arrêt cardiaque, y avoir
remédié et avoir constaté une récupération hémodynamique
Références
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D. Lena-Quintard
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