DYSPNEES PSYCHOGENES Comment les repérer ? Quel bilan minimal ? Philippe Carré SOFOMEC, 17 mars 2011 La médecine chez les Grecs In : J Poulet et JC Sournia, Histoire de la médecine,1993 « Pour Homère, le souffle est porteur de l’activité spirituelle et des passions. Thumôs signifie vie, puissance vitale, esprit , désir, sentiment, âme…/.. L’esprit vital siège dans les phrènes (le diaphragme). Le souffle vital expirant dans la mort ou s’échappant par les blessures, psyché( l’âme) mène une vie de rêve dans l’Hadès » Dyspnea : Mechanisms, Assessment and Management. A consensus statement Am Rev Respir Crit Care Med 1999 « De toutes les fonctions vitales, l’action de respirer, est la seule qui soit régulée non seulement de manière automatique, mais aussi de manière volontaire via le cortex cérébral ../… la perception d’une difficulté respiratoire (dyspnée) est sous l’influence de facteurs culturels et psychologiques » Dyspnea : Mechanisms, Assessment and Management. A consensus statement Am Rev Respir Crit Care Med 1999 La psyché influence ++ le vécu d’une maladie organique dyspnéisante – Type de personnalité ( stoïque / dystonique) – « Réponse émotionnelle » à la maladie – Anxiété, dépression Corrélation « faible » entre la dyspnée et l’importance d’un déficit respiratoire Les maladies chroniques dyspnéisantes retentissent sur la psyché Un piège clinique : les dyspnées psychogènes aigües et chroniques (Cottraux J, Revue du Praticien 2009) « Tout problème psychiatrique , aussi bien que le stress quotidien, peut entraîner une dyspnée anxieuse. Deux tableaux cliniques émergent de la nébuleuse des dyspnées psychogènes : les crises d’angoisse aiguë ( attaques de panique), et l’anxiété généralisée, dont le tableau est plus discret…/…la dyspnée peut faire partie du trouble anxieux et se traduire par des soupirs ou une respiration courte et bloquée » Respiratory manifestations of psychologic issues Susan M Labott, Chest 2000 « Certains problèmes psychologiques ne manifestent souvent par des symptômes respiratoires : toux , dypsnée ou stridor » Désordres anxieux – Attaque de panique – Syndrome d’hyperventilation Désordres somatoformes – Syndrome de dysfonction des cordes vocales – Toux psychogène, dysphonie fonctionnelle Dyspnée factice ( syndrome de Münchhausen) HYPERVENTILATION(S) Physiologiques – Réponse « normale » à : stress, douleur, pyrexie, hypoxie d’altitude, chaleur intense.. Organiques – Asthme, embolie pulmonaire, certaines pathologies du SNC, acidose métabolique, cirrhoses sévères… Physiogéniques – Syndrome d’hyperventilation SYNDROME D’HYPERVENTILATION « Variété de signes somatiques, affectant plusieurs systèmes, induits par une hyperventilation physiologiquement inadéquate et habituellement, en totalité ou en partie, d’origine nerveuse » Fréquence +++ ( forme chronique : 99%) Sous- diagnostiqué ++ Adulte jeune. Enfant. HYPERVENTILATION : CONSEQUENCES Hypocapnie Alcalose respiratoire – Déplacement vers la G de la courbe de dissociation de l’Hb Alcalose et hypocapnie – Hyperexcitabilité neuronale et axonale – Vasoconstriction artériolaire ( peau, muscles, tube digestif, artères cérébrales, coronaires, ) B Z, 47 ans, 2010 Dypsnée 3 mois, diff. souffler à fond, indép. de l’effort Baillements et soupirs fréquents. Palpitations. tremblements Soucis familiaux ( fille ado fugueuse) Antécédents : tabac 25 PA, stop à 40 ans . 170 cm, 77 kgs Examen clinique, RT, spirométrie, sa02 , bio : N Pa02 76 mmHg, PCO2 31 mmHg, pH 7, 47 EE, 26 ans, 2004 Dypsnée Plusieurs années, blocages respiratoires, indép. de l’effort (animateur sportif), parfois la nuit Douleurs thoraciques atypiques Antécédents : 0 ( anxiété chronique) Examen clinique, RT, spirométrie, sa02 , bio : N Pa02 105 mmHg, PCO2 26 mmHg, ph 7, 49 Hyperventilation provoquée modérée--- dyspnée et vertiges SYNDROME D’HYPERVENTILATION Dyspnée ( 50-90%) Fatigue ++ Baillements et soupirs fréquents Toux sèche, raclements de gorge, dysphonie Palpitations, précordialgies, paresthésies, mains froides et moites, tremblements Vertiges, céphalées, acouphènes, vision trouble, myalgies, troubles digestifs Sensation de tête légère, de « flotter dans les nuages », incapacité à se concentrer Crainte d’une maladie grave, troubles du sommeil.. SYNDROME D’HYPERVENTILATION Physiopathogénie Anxiété, traits phobiques Mauvaise habitude respiratoire – Respiration « thoracique » Hypocapnie et alcalose respiratoire : anxiogènes ( cercle vicieux) Les symptômes sont secondaires : – à l’ anxiété – aux conséquences de l ’hyperventilation SHV : COMMENT FAIRE LE DIAGNOSTIC ? Eliminer une cause organique – Interrogatoire et examen clinique +++ – EFR, RT, Bilan cardiaque, bio ( NFS, TSH) Les signes d’orientation Dyspnée de repos Baillements et soupirs fréquents Incapacité à prendre une respiration profonde Symptômes atypiques touchant plusieurs systèmes Anxiété, quelques traits phobiques Gazométrie (limites) Test d’hyperventilation volontaire Un diagnostic différentiel ++ : l’asthme ( association fréquente) SHV : COMMENT TRAITER ? Rassurer Informer Rééducation respiratoire (+++) – Respiration « en carré » – Privilégier la respiration « abdominale » Beta-bloquants, anxiolytiques Prise en charge psy rare ++ ( 5%) Respiratory manifestations of psychologic issues Susan M Labott, Chest 2000 « Certains problèmes psychologiques ne manifestent souvent par des symptômes respiratoires : toux , dypsnée ou stridor » Désordres anxieux – Attaque de panique – Syndrome d’hyperventilation Désordres somatoformes – Syndrome de dysfonction des cordes vocales – Toux psychogène, dysphonie fonctionnelle Dyspnée factice ( syndrome de Münchhausen) Syndrome de dysfonction des cordes vocales Fermeture paradoxale des CV à l’inspiration Au repos et/ou à l’effort Forme aiguë : détresse respiratoire Dyspnée, cornage, wheezing BDV : courbe inspiratoire « aplatie » « Gold standard » : laryngoscopie Pseudo-asthme Association à un asthme ( 30 à 50% ) Troubles de la personnalité ++ Orthophonie, prise en charge psy Mélange Hélium/02, intubation, trachéotomie C V, 44 ans, 2002 Dyspnée – Qqs mois, au repos, inspiratoire ( cornage) – « Bizarre » moins importante en fin de CS Augmente quand elle parle (dysphonie, anxiété+++) Antécédents – COTOREP, décès d’un nourrisson, mauvaise situation socio-économique et familiale (fils ainé), CMPP Bilan – Examen clinique, RT, N. Pa02 87mmHg, PCO2 34 mmHg. VEMS 86%, CVF 75%, aplatissement Courbe Insp. BDV – Endoscopie : CV fermées en inspiration. Agitation +++ – CS psy : somatisation Traitement – Orthophonie et proposition de psychothérapie CV, 44 ans, 3/03 : V Woisard ( ORL CHU Tlse) – Dysphonie : « forçage laryngé avec hyperadduction des cordes vocales en phonation ». RDV le 16/09 1/09/03 : Aphonie 16/09/03 : V Woisard – mobilité des CV normale, mais « les essais de phonation sont marqués par une hypercontraction laryngée à glotte fermée qui empêche toute sortie d’air ../… processus psychologique de blocage de la communication…aucun support anatomique qui empêche la patiente d’émettre un son.. » Entre 2003 et 2010, 12 hospitalisations 04/03 : Medecine : paraparésie MS + douleurs abdo. 06/03 : Pneumologie : dyspnée ( add° CV) 4/05 : Rhumato : Cervicalgie et paraparésie des M. inf. (conversion) 6/05 : Néphrologie : Pyélonéphrite 7/01/06 : UHCD : TS méd. (séparation) 29/01/06 : Psychiatrie : agitation (départ de sa fille) 3/07 : Pneumologie : Attaque d’asthme 11/07 : Médecine : eczéma d’une main et doul. Hypochondre D 10/08 : Rhumatologie : Gonalgie G ( chute. Faiblesse MIG) 5/09 : Réanimation : Etat de mal asthmatique 9/09 : Pneumologie : Attaque d’asthme 09/10 : Pneumologie : « gonflée de partout ».. Histoire du souffle. La respiration dans l’Antiquité occidentale (Daniel Piperno) « .. Pour le poète Orphée, l’ âme proviendrait d’une sorte de souffle universel, en quelque sorte « l’âme du monde »,et pénètrerait dans l’homme par la respiration. La respiration participe également aux activités sensorielles, à la digestion, à l’activité cardiaque (dont elle tempère le feu inné), à la reproduction (donnant souffle à la semence), à l’intelligence et à la pensée.. »