La dystrophie facio-scapulohumérale : une revue de la littérature – Place de la kinésithérapie. Promoteur : Monsieur DE MEUR T. PORCHER ANAIS Mémoire réalisé en vue d’obtenir le titre de master en kinésithérapie Année académique 2013-2014 1 Résumé La dystrophie facio-scapulo-humérale : une revue de la littérature – Place de la kinésithérapie. Introduction : La dystrophie facio-scapulo-humérale est une maladie génétique rare due à une anomalie du chromosome 4. Elle touche essentiellement les muscles du visage, des épaules et des bras. Cependant, en progressant, elle peut atteindre les muscles de l’abdomen et des membres inférieurs. Les fibres musculaires sont atteintes progressivement entraînant une perte de force. L’évolution de la maladie, la localisation et l’intensité des atteintes musculaires, la symptomatologie sont variables d’un individu à un autre, y compris au sein d’une même famille. Seule une prise en charge adaptée contribue à prévenir les complications et à améliorer le confort de vie des patients. Objectifs : Les objectifs de ce travail de fin d’étude sont d’effectuer une recherche actualisée autour de la problématique de la dystrophie facio-scapulo-humérale ; mais aussi d’analyser la prise en charge kinésithérapique, et ainsi pouvoir retenir des pistes de traitement. Pour cela, nous nous sommes référés à la littérature et renseignés auprès de kinésithérapeutes, d’associations et de personnes atteintes par la pathologie. Méthode : D’une part, grâce à une recherche bibliographique actualisée, nous avons défini la dystrophie FSH, parlé de l’historique, de l’épidémiologie, et décrit les principaux mécanismes génétiques, la physiopathologie, le diagnostic, et enfin les options de prise en charge. D’autre part, suite à des échanges avec des personnes atteintes de dystrophie FSH, nous avons effectué des études de cas, afin de mieux comprendre les patients et leur pathologie. 2 Conclusion : Suite aux recherches dans la littérature, aux échanges avec des personnes atteintes par la maladie et des kinésithérapeutes, on peut conclure que la prise en charge kinésithérapique a effectivement un rôle important pour préserver l’autonomie du patient, prévenir les déformations orthopédiques, les rétractions musculaires, les enraidissements, les conséquences fonctionnelles et respiratoires. Cependant, le kinésithérapeute a aussi un rôle social, et doit toujours rester à l’écoute de son patient. Plusieurs points sont importants dans la prise en charge de patients atteints de dystrophie FSH. Elle doit être individualisée, car les manifestations cliniques, l’évolution de la pathologie, les besoins des patients sont variables. Le kinésithérapeute devra réaliser des bilans personnalisés, puis en fonction des résultats, il mettra en place un programme de traitement. Les patients doivent bénéficier de la bonne prise en charge au bon moment. Les séances ne doivent pas induire de douleurs, de fatigue, ou de stress. Une prise en charge fondée sur la multidisciplinarité permettra d’optimiser le diagnostic et la prise en charge. « Les maladies rares sont rares, mais les malades nombreux » (Orpha.net) 3 Abstract Facioscapulohumeral muscular dystrophy : a review of the literature – The place of physiotherapy. Introduction : Facioscapulohumeral muscular dystrophy is a rare genetic disease caused by an anomaly of the chromosome 4. It affects essentially the muscles of the face, shoulders and the arms. However, by progressing, it can affect the muscles of the abdomen and lower limbs. The muscular fibers are progressively affected which provokes a loss of strength. The evolution of the disease, the location and the intensity of the myopathy, the symptoms are variable from an individual to another one, including within the same family. Only an adapted care helps to prevent the complications and to improve the comfort of patient’s life. Objectives : This work aims to provide an updated research about the facioscapulohumeral muscular dystrophy. Also to analyze the physiotherapy care and so be able to retain tracks of treatment. For that purpose we referred to the literature and informed with physiotherapists, associations and peoples who are affected by the pathology. Method: On the one hand, thanks to an updated literature research we defined facioscapulohumeral dystrophy, we spoken about the history, epidemiology, and describe the main genetic mechanisms, pathophysiology, diagnosis, and finally the options of care. On the other hand, further to exchanges with people affected by facioscapulohumeral dystrophy, we made case studies to understand better patients and their pathology. 4 Conclusion : Further to the literature researches, exchanges with people affected by the disease and physiotherapists, we can conclude that physiotherapy care has a significant role to preserve the autonomy of the patient, prevent orthopedic deformities, the muscular retractions, the enraidissements, functional and respiratory consequences. However, the therapist also has a social role, and must always listen to the patient. Several points are important in patient’s care affected by facioscapulohumeral dystrophy. It should be individualized because the symptoms, the evolution of the pathology and the patient’s needs are variable. Physiotherapist will have to realize personalized assessment, and according to the results, it will establish a program of treatment. Patients should receive the right care at the right time. The sessions do not have to cause pains, fatigue, or stress. A care based on multidisciplinary will allow optimize the diagnosis and the treatment. « Rare diseases are rare, but rare disease patients are numerous » (Orpha.net) 5 6 Remerciements Je souhaiterais remercier dans un premier temps mon promoteur, Monsieur De Meur, pour m’avoir guidé dans mes recherches, ainsi que pour ses précieux conseils qui ont permis l’élaboration de ce travail de fin d’étude. Je tiens également à remercier Monsieur Frennet qui m’a permis de prendre contact avec des personnes atteintes de dystrophie FSH, ainsi que pour ses nombreux renseignements. Je remercie également tous les patients qui ont accepté de témoigner à propos de leur pathologie. Je présente aussi mes remerciements à Monsieur Riou pour le partage de son expérience dans la prise en charge kinésithérapique des patients atteints de dystrophie FSH. Enfin, je remercie ma famille, mes amis, et mon compagnon pour m’avoir soutenu, aidé et encouragé durant ces 4 années d’études. 7 Table des matières Résumé ................................................................................................................................................ 2 Abstract ............................................................................................................................................... 4 Remerciements ................................................................................................................................ 7 Table des illustrations............................................................................................................... 13 Liste des abréviations ................................................................................................................ 14 Introduction ................................................................................................................................... 16 1. Définition et historique .................................................................................................... 18 1.1. La dystrophie facio-scapulo-humérale : ................................................................ 18 1.2. Historique : ...................................................................................................................... 19 2. Epidémiologie ....................................................................................................................... 20 2.1. Prévalence : ..................................................................................................................... 20 2.2. Recensement :................................................................................................................. 20 2.2.1. En Belgique : ........................................................................................................... 20 2.2.2. En France : ............................................................................................................... 21 3. Génétique ................................................................................................................................ 22 3.1. Transmission : ................................................................................................................ 22 3.2. Localisation et identification du gène : .................................................................. 23 3.2.1. Avant-propos : ....................................................................................................... 23 3.2.2. Anomalies génétiques en cause dans la FSH1 : .......................................... 24 3.2.3. Anomalies génétiques en cause dans la FSH2 : .......................................... 26 3.2.4. FSH1 et FSH2 : un mécanisme commun : ..................................................... 26 3.2.5. Hypothèses concernant le gène DUX4 :......................................................... 28 3.2.6. Autres hypothèses émises : ............................................................................... 29 8 4. Physiopathologie ................................................................................................................. 31 4.1. L’appareil musculaire : ................................................................................................ 31 4.1.1. Atteinte et asymétrie musculaire : .................................................................. 31 4.1.2. Atteinte des muscles du visage : ...................................................................... 32 4.1.3. Atteinte des muscles de la ceinture scapulaire : ........................................ 33 4.1.4. Atteinte des muscles des membres supérieurs :........................................ 36 4.1.5. Atteinte des muscles de la ceinture pelvienne : ......................................... 36 4.1.6. Atteinte des muscles des membres inférieurs : ......................................... 37 4.1.7. Autres atteintes musculaires : .......................................................................... 37 4.1.8. Facteurs aggravants :........................................................................................... 38 4.2. L’appareil ostéo-articulaire : ..................................................................................... 39 4.3. Douleur et fatigue : ....................................................................................................... 39 4.3.1. La douleur : ............................................................................................................. 39 4.3.2. La fatigue : ............................................................................................................... 40 4.4. L’appareil auditif : ......................................................................................................... 41 4.5. L’appareil oculaire : ...................................................................................................... 42 4.6. L’appareil respiratoire : .............................................................................................. 42 4.7. L’appareil cardio-vasculaire : .................................................................................... 43 4.8. L’appareil digestif : ....................................................................................................... 44 4.9. L’aspect psychologique : ............................................................................................. 44 4.10. Evolution de la pathologie : ................................................................................... 46 4.10.1. Evolution classique : ............................................................................................ 46 4.10.2. Formes infantiles : ................................................................................................ 48 4.10.3. Formes à exacerbation tardive : ...................................................................... 49 5. Diagnostic ............................................................................................................................... 50 5.1. Diagnostic de la dystrophie FSH : ............................................................................ 50 5.1.1. L’examen clinique :............................................................................................... 50 5.1.2. Le test génétique : ................................................................................................. 50 5.1.3. Les examens complémentaires : ...................................................................... 51 5.1.3.1. Examens complémentaires musculaires :…………….………………...……..51 9 5.1.3.2. Examens auditifs :…………………………………………………………………………..54 5.1.3.3. Examen ophtalmologique :………………………………………….…………………54 5.1.3.4. Examens respiratoires :……………………………………………………………55 5.1.3.5. Examens cardiaques :………………………………………………………….……55 5.1.4. Diagnostic pré-symptomatique : ..................................................................... 56 5.1.5. Diagnostic prénatal : ............................................................................................ 56 5.1.6. Cas particulier : la dystrophie FSH infantile :.............................................. 57 5.2. Diagnostics différentiels : ........................................................................................... 58 5.2.1. Avant-propos : ....................................................................................................... 58 5.2.2. La dystrophie musculaire des ceintures : ..................................................... 58 5.2.3. Les myopathies à corps d’inclusion :.............................................................. 58 5.2.4. Les myopathies myofibrillaires : ..................................................................... 59 5.2.5. Les polymyosites : ................................................................................................ 59 5.2.6. La myopathie myotonique proximale : ......................................................... 59 5.2.7. La dystrophie myotonique de Steinert :........................................................ 59 5.2.8. Les myopathies congénitales :.......................................................................... 60 6. Prise en charge ..................................................................................................................... 61 6.1. Avant-propos : ................................................................................................................ 61 6.2. Prévention et surveillance : ....................................................................................... 61 6.2.1. Bilans répétés : ...................................................................................................... 61 6.2.2. Obésité :.................................................................................................................... 62 6.3. Traitement médicamenteux : .................................................................................... 63 6.3.1. Appareil locomoteur :.......................................................................................... 63 6.3.2. Appareil oculaire : ................................................................................................ 63 6.3.3. Aspect psychologique :........................................................................................ 63 6.3.4. Contre-indications :.............................................................................................. 63 6.4. Prise en charge orthopédique :................................................................................. 64 6.4.1. Prise en charge kinésithérapique : ................................................................. 64 6.4.1.1. Avant-propos :…………………………………………………………………………64 6.4.1.2. Anamnèse :………………………………………………………………………………65 10 6.4.1.3. Bilans :……….……………………….……………………………………………………66 6.4.1.3.1. Evaluation de la douleur :…….………………………………………….……..66 6.4.1.3.2. Examen statique :………………………………………………………………….67 6.4.1.3.3. Bilan articulaire :……………………….…………………………………………..67 6.4.1.3.4. Bilan musculaire :………………………………………………………………….68 6.4.1.3.5. Evaluation des capacités motrices :……………………………………..…68 6.4.1.3.6. Bilans respiratoires :………….…………………………………………………..69 6.4.1.3.7. Mesure de la qualité de vie :…………….……………………………………..70 6.4.1.3.8. Evaluation de l’équilibre, des transferts, et de la marche :….…….70 6.4.1.4. Traitement :……………………………………………………………………………..71 6.4.1.4.1. Avant-propos :………………………………………………………………………71 6.4.1.4.2. Massages :……………………………………………………………………………..74 6.4.1.4.3. Mobilisations :……………………………………………………………………….74 6.4.1.4.4. Physiothérapie :…………………………………………………………………….75 6.4.1.4.5. Entraînement physique :………………………………………………………..77 6.4.1.4.6. Verticalisation :…………………………………………………………….………..78 6.4.1.4.7. Kinésithérapie respiratoire :………………………………………………….79 6.4.1.4.8. Rééducation de l’équilibre et de la marche :……………………………79 6.4.1.5. Contracture reflexe et thérapie manuelle : ………………………………..80 6.4.1.5.1. Avant-propos :………………………………………………………………………80 6.4.1.5.2. Contractures musculaires :…………………………………………………….80 6.4.1.5.3. Contracture antalgique et Kinésithérapie Analytique :…………….81 6.4.1.5.4. Approche thérapeutique :……………………………….…………….………..82 6.4.2. Appareillages et aides techniques : ................................................................ 85 6.4.2.1. Appareillages :………………………...……………………………………………….85 6.4.2.2. Aides techniques :……………………………………………..……………………..86 6.4.3. Chirurgie : ................................................................................................................ 86 6.4.3.1. Membres supérieurs :…………………………………………...………………….86 6.4.3.2. Membres inférieurs :.…...…………………………………………………………..89 6.4.3.3. Colonne vertébrale :………………………………………………………………....89 11 6.4.3.4. Anesthésie :………………………………………………………………………..……89 6.5. Prise en charge auditive :............................................................................................ 89 6.6. Prise en charge ophtalmologique : .......................................................................... 90 6.7. Prise en charge respiratoire : .................................................................................... 90 6.8. Soutien psychologique : .............................................................................................. 91 6.9. Prise en charge multidisciplinaire : ........................................................................ 92 6.9.1. Objectifs : ................................................................................................................. 92 6.9.2. Les acteurs de la prise en charge multidisciplinaire : .............................. 92 6.10. Modèle biopsychosocial :........................................................................................ 93 6.11. Associations : .............................................................................................................. 93 7. Etudes de cas : ....................................................................................................................... 95 7.1. Avant-propos : ................................................................................................................ 95 7.2. Conclusion : ...................................................................................................................106 Discussion......................................................................................................................................108 Conclusion .....................................................................................................................................112 Bibliographie………………………………………………………………….……………………………………..114 12 Table des illustrations Figure 1 : La transmission autosomique dominante (Urtizberea, Pénisson-Besnier, & Lévy, 2011). .................................................................................................................................. 22 Figure 2 : Contraction de la région D4Z4 (Urtizberea, 2007). ........................................ 24 Figure 3 : FSH1 et FSH2 : un mécanisme commun pour des anomalies génétiques différentes (Myoinfo, 2013). ....................................................................................................... 28 Figure 4 : FSH1 et FSH2 : un mécanisme commun pour des anomalies génétiques différentes, avancée de la recherche (Myoinfo, 2013). ..................................................... 30 Figure 5 : Principaux muscles atteints dans la dystrophie FSH (Diaz, 1998). ........... 31 Figure 6 : Visage d'une personne atteinte de dystrophie FSH (Laterre, 2008). ....... 33 Figure 7 : Scapula alata (Laterre, 2008). ................................................................................ 34 Figure 8 : Enquête AFM : capacité fonctionnelle des membres supérieurs (Diaz, 2008)................................................................................................................................................... 35 Figure 9 : Avant bras de Popeye (Karpati, Hilton-Jones & Griggs, 2001).................... 36 Figure 10 : Vue de profil d'un patient atteint de dystrophie FSH (Karpati, HiltonJones & Griggs, 2001). ................................................................................................................... 38 Figure 11 : Biopsie musculaire d'une personne atteinte de dystrophie FSH : fibres musculaires atrophiées, de tailles inégales (Serratrice, Pellissier & Pouget, 1994). ............................................................................................................................................................... 53 Figure 12 : Biopsie musculaire d'une personne atteinte de dystrophie FSH : forme inflammatoire (Serratrice, Pellissier & Pouget, 1994). ..................................................... 53 Figure 13 : Patient de 18 ans atteint de dystrophie FSH : abductions actives des membres supérieurs limitées (Giannini & al., 2007). ........................................................ 87 Figure 14 : Patient de 18 ans atteint de dystrophie FSH : manœuvre d'Horwitz positive, gain à l'abduction de membre supérieur (Giannini & al., 2007). ................. 88 Figure 15 : Dessin illustrant la scapulopexie (Giannini & al., 2007). ............................ 88 13 Liste des abréviations ABMM : association belge contre les maladies neuromusculaires. ADN : acide désoxyribonucléique. AFM : association française contre les myopathies. ARN : acide ribonucléique. BiPAP : ventilation en pression positive biphasique. CPK : créatine phosphokinase. DMC : dystrophie musculaire des ceintures. DNP : diagnostic prénatal. DUX4 : double homeobox protein 4. ECG : électrocardiogramme. EFR : explorations fonctionnelles respiratoires. EIAS : épine iliaque antéro-supérieure. EIPS : épine iliaque postéro-supérieure. EMG : électromyogramme. EN : échelle numérique. EVA : échelle visuelle analogique. EVS : échelle verbale simple. FSH : facio-scapulo-humérale. FSH1 : dystrophie facio-scapulo-humérale de type 1. FSH2 : dystrophie facio-scapulo-humérale de type 2. IRM : imagerie par résonnance magnétique. mi-ARN : micro-ARN. MFM : mesure de fonction motrice. 14 MMF : myopathie myofibrillaires. MNM : maladie neuromusculaire. PaO2 : pression artérielle en oxygène. PaCO2 : pression artérielle en dioxyde de carbone. PEA : potentiels évoqués auditifs. SaO2 : saturation en oxygène. SMCHD1 : structural maintenance of chromosomes flexible hinge domain containing 1. TM6 : test de marche des 6 minutes. 15 Introduction Actuellement, on dénombre environ 120 maladies neuromusculaires. (Gautheron, 2001). Bien que ces pathologies soient très diverses, elles ont une expression clinique commune, la faiblesse musculaire. La dystrophie facio-scapulo-humérale (FSH) est la troisième maladie neuromusculaire la plus fréquente à l’âge adulte. En moyenne, elle atteint une personne sur 20 000 habitants (Scionti & al., 2012). Comme son nom l’indique, elle se caractérise par une atteinte des muscles du visage, des épaules, et des bras. Cependant, en progressant, elle peut atteindre les muscles de l’abdomen et des membres inférieurs. Bien qu’elle soit de plus en plus diagnostiquée, la dystrophie FSH reste une maladie très complexe. En effet, le mécanisme moléculaire responsable du déclenchement de la dystrophie FSH n’est pas précisément identifié à ce jour. En dépit des progrès scientifiques récents dans la connaissance de cette maladie, il n’existe aujourd’hui aucun traitement médical curatif. C’est pourquoi, la prise en charge est essentiellement symptomatique, et intéresse de nombreuses spécialités médicales et paramédicales. Les manifestations cliniques et l’évolution de la pathologie étant variables, elle nécessite une prise en charge qui réponde aux besoins spécifiques des patients. Les objectifs de ce travail de fin d’étude sont d’effectuer une recherche actualisée autour de la problématique de la dystrophie FSH ; mais aussi d’analyser la prise en charge kinésithérapique, et ainsi pouvoir retenir des pistes de traitement. Pour cela, nous nous sommes référés à la littérature. De plus, nous nous sommes renseignés auprès de kinésithérapeutes, d’associations et de personnes atteintes de dystrophie FSH. Cela nous a permis de mieux comprendre la pathologie et l’impact de celle-ci sur la vie quotidienne des patients. D’une part, grâce à une recherche bibliographique actualisée, nous allons définir la dystrophie FSH, nous parlerons de l’historique et de l’épidémiologie, 16 puis, nous décrirons les principaux mécanismes génétiques, la physiopathologie, le diagnostic, et enfin les options de prise en charge. D’autre part, suite à des échanges avec des personnes atteintes de dystrophie FSH, nous effectuerons des études de cas, afin de mieux comprendre les patients et leur pathologie. Différents aspects seront abordés tels que : le diagnostic, l’évolution de la pathologie, les manifestations cliniques, la prise en charge, et leur ressenti. Ensuite, nous aborderons dans une discussion les points importants à prendre en compte. Enfin, nous terminerons par une conclusion de ce travail. 17 1. Définition et historique 1.1. La dystrophie facio-scapulo-humérale : La dystrophie musculaire facio-scapulo-humérale (ou dystrophie FSH, ou myopathie de Landouzy-Dejerine) est une dystrophie musculaire progressive héréditaire. Elle fait partie des maladies rares1. Elle a été décrite pour la première fois en 1885 par Landouzy et Dejerine. Elle se transmet selon le mode autosomique dominant et son origine est génétique. Deux types de dystrophie FSH ont été mis en évidence : leurs caractéristiques cliniques sont similaires, mais les anomalies génétiques sont différentes. En effet, la dystrophie FSH est caractérisée par une relaxation de la chromatine induisant une mauvaise expression du gène DUX42. Cependant la dystrophie FSH de type 1 est due à un nombre réduit du nombre de répétitions dans la région D4Z4, alors que la dystrophie FSH de type 2 est liée à des anomalies dans le gène SMCHD1. Son nom vient du fait qu’elle atteint principalement les muscles du visage (facio), des épaules (scapulo), et des bras (humérale). Cependant, en progressant, elle peut atteindre les muscles de l’abdomen et des membres inférieurs. C’est pourquoi, 15 à 20 % des patients seront contraints d’utiliser un fauteuil roulant (Tranchant & Azulay, 2012). Les fibres musculaires sont détruites par poussées évolutives pendant lesquelles le déficit musculaire s’installe dans un territoire musculaire, ou en continu dans les territoires musculaires déjà atteints (Karpati, Hilton-Jones & Griggs, 2001). Cela entraîne une perte de force. L’évolution de la pathologie, la localisation et l’intensité des atteintes musculaires, la symptomatologie sont variables d’un individu à un autre, y compris au sein d’une même famille. De plus, elle atteint les femmes comme les hommes. Une maladie rare touche moins d’une personne sur 2000 (Myoinfo, 2013) Van der Maarel & al. (2012) considèrent la suppression incomplète du gène DUX4 comme la cause la plus probable de la dystrophie FSH. 1 2 18 Le plus souvent, les premiers symptômes apparaissent entre 15 et 30 ans, avec aux extrêmes des formes infantiles parfois très précoces, et des formes débutant au-delà de 50 ans. 1.2. Historique : En 1885, Landouzy & Dejerine donnent une description clinique de la dystrophie FSH dans l’article «De la myopathie atrophique progressive, myopathie héréditaire, sans neuropathie, débutant d’ordinaire dans l’enfance». Ils y soulignent l’asymétrie des atteintes musculaires, l’absence de douleurs au niveau des muscles atteints, ainsi que le caractère héréditaire de cette pathologie (Diaz, 1998). En 1950, une étude réalisée par Tyler & Stephen a confirmé le mode de transmission autosomique dominant et l’hétérogénéité clinique de la dystrophie FSH (cité par Pandya, King & Tawil, 2008). En 1990, chez les patients atteints de dystrophie FSH, une anomalie génétique a été mise en évidence par Wijmenga et al. au niveau de la partie la plus terminale du bras long du chromosome 4 (cité par Cooper & Upadhyaya, 2004). En 2007, une étude dirigée par A. Belayew a montré que le gène DUX4 est actif chez les sujets atteints de dystrophie FSH. Le rôle pathologique du gène DUX4 ouvre la voie à de nouvelles stratégies dont le but serait d’empêcher l’expression de ce gène. (Myoinfo, 2013). En 2012, Lemmers & al. ont identifié et localisé l’anomalie génétique en cause dans la dystrophie FSH de type 2. Ce gène est localisé sur le chromosome 18. 19 2. Epidémiologie 2.1. Prévalence : La dystrophie FSH est la troisième maladie neuromusculaire la plus fréquente à l’âge adulte, après la myopathie de Duchenne et la dystrophie myotonique de Steinert (Pandya, King & Tawil, 2008). En moyenne, la prévalence de la dystrophie FSH est de 1 personne atteinte pour 20 000 habitants (Scionti & al., 2012). Cependant, celle-ci est sans doute sousestimée car la maladie n’est pas toujours détectée (Orphanet, 2013). 2.2. Recensement : 2.2.1. En Belgique : Un registre belge des maladies neuromusculaires a été mis en place. Il permet d'étudier les maladies neuromusculaires de manière épidémiologique, de faciliter les essais cliniques, et d'informer les autorités publiques sur la qualité des soins pour les patients atteints de ces maladies. Les patients atteints par une maladie neuromusculaire doivent contacter un centre de référence neuromusculaire et demander une inscription dans le registre belge des maladies neuromusculaires. Selon le Professeur Van den Bergh (du centre de référence UCL-St Luc), les centres neuromusculaires ont été créés vers 1999. Désormais, il y a 6 centres neuromusculaires en Belgique : 4 en Flandres dont 1 centre néerlandophone dans la région Bruxelles, 1 centre francophone dans la région de Bruxelles, et un autre centre francophone à Liège. Avant cette période, il était difficile pour les patients atteints d’une maladie neuromusculaire d’arriver à un diagnostic, et d’être correctement suivis et traités. En effet, comme ce sont des maladies rares, peu de médecins connaissent ces pathologies. 20 En 2008, le registre belge des maladies neuromusculaires a été développé. Il a pour but de : connaitre la prévalence des différentes maladies neuromusculaires en Belgique, via des données épidémiologiques, faire avancer la recherche clinique, et développer des traitements, en connectant le registre belge à d’autres registres internationaux. Les données qui sont collectionnées sont relativement basiques : le numéro de sécurité sociale, le sexe du patient, sa date de naissance, l’année de décès (si le patient décède), l’adhésion dans la convention neuromusculaire, le diagnostic, le fait que ce soit une maladie génétique ou non, le stade de la maladie, le stade du diagnostic, le stade ambulatoire, et les informations sur le début de la maladie. Selon P. Van den Bergh, environ 2000 patients étaient inscrits sur les listes en 2003 ; en 2012 ils étaient environ 3800. Cependant, il y a encore beaucoup de sujets qui ne sont pas inscrits dans un centre ou dans le registre. 2.2.2. En France : Un observatoire national français de patients atteints de dystrophie FSH vient d’être créé. Il est coordonné par S. Sacconi. Son objectif est de recenser toutes les personnes atteintes de dystrophie FSH de type 1 et 2 afin de mieux connaître l’histoire naturelle de la maladie et faciliter la recherche. Il a pour but de collecter des données épidémiologiques sur la dystrophie FSH obtenues par auto-questionnaire et/ou par fiches d’évaluations cliniques remplis par le médecin. De plus, il va permettre le recrutement de patients dans les essais cliniques et de développer des recommandations sur la prise en charge de la maladie (Myoinfo, 2013). 21 3. Génétique 3.1. Transmission : La dystrophie FSH se transmet selon un mode autosomique dominant (Lefkowitz & al., 2012) : Le terme « autosomique » signifie que l’anomalie génétique n’est pas située au niveau des chromosomes sexuels, mais sur l’un des autres chromosomes, appelés autosomes. Le terme « dominant » signifie qu’un seul exemplaire est anormal, il a été transmis par le parent malade. Il suffit qu’un des deux parents soit atteint pour transmette la pathologie à l’enfant. Le malade est dit « hétérozygote » pour la région D4Z43 s’il possède un exemplaire altéré ainsi qu’un exemplaire normal dans cette région. De plus, le risque de transmission par le parent atteint de l’anomalie génétique est de 50% pour chaque grossesse, et quel que soit le sexe (figure 1). Si l’enfant n’est pas atteint, la transmission est interrompue dans cette branche de la famille (Urtizberea, Pénisson-Besnier, & Lévy, 2011). Figure 1 : La transmission autosomique dominante (Urtizberea, Pénisson-Besnier, & Lévy, 2011). La région D4Z4 est constituée de nombreuses répétitions d’un fragment d’ADN : entre 11 à 100 répétitions chez un individu sain, entre 1 à 10 répétitions chez un sujet atteint de dystrophie FSH. 3 22 En plus de la transmission autosomique dominante, de génération en génération, deux autres cas de figures sont parfois observés : Le mosaïcisme germinal : c'est-à-dire que l’anomalie génétique n’est présente que dans certaines cellules de la reproduction de l’un des parents (ovules ou spermatozoïdes). La néomutation ou mutation « de novo » : c'est-à-dire que l’anomalie est survenue par hasard chez la personne atteinte de dystrophie FSH. En effet, les parents n’ont pas transmis le gène à leur enfant. Les frères et sœurs ne risquent pas d’être atteints car les parents ne peuvent pas transmettre la pathologie. Ce phénomène est plus fréquent dans les formes infantiles de dystrophie FSH. Dans ces deux situations, les tests génétiques pratiqués chez les parents sont négatifs. Cependant, dans tous les cas, il convient de consulter un médecin généticien pour déterminer le risque de transmission au sein de la famille (Urtizberea, Pénisson-Besnier, & Lévy, 2011). 3.2. Localisation et identification du gène : 3.2.1. Avant-propos : La dystrophie FSH est l’une des maladies neuromusculaires les plus complexes et les plus difficiles à comprendre. En effet, le mécanisme moléculaire responsable dans le déclenchement de la dystrophie FSH n’est pas précisément identifié à ce jour. Cependant, la recherche est très active pour essayer de déterminer les mécanismes moléculaires et cellulaires responsables de cette pathologie. L’ensemble des travaux réalisés dans la dystrophie FSH permettent petit à petit de mieux comprendre les mécanismes moléculaires en cause dans le développement de la pathologie. Deux types de dystrophie FSH ont été mis en évidence, leurs caractéristiques cliniques sont similaires, mais les anomalies génétiques sont différentes, on parle alors de dystrophie FSH de type 1 (FSH1) ou de dystrophie FSH de type 2 (FSH2). 23 En 1990, une étude réalisée par Wijmenga & al. a mis en évidence l’anomalie génétique qui est en cause dans la dystrophie FSH. Cette anomalie est située à l’extrémité du chromosome 4 dans une région appelée 4q35-qter (cité par Cooper & Upadhyaya, 2004). 3.2.2. Anomalies génétiques en cause dans la FSH1 : Dans 95% des cas de dystrophie FSH, la pathologie est génétiquement liée à un nombre anormalement raccourci dans la région D4Z4, appelé «contraction» ou «raccourcissement» de cette région. Les chercheurs parlent alors de dystrophie FSH de type 1. En effet, la région chromosomique 4q35 est habituellement constituée chez un sujet sain de 11 à 100 répétitions d’un fragment d’ADN appelé D4Z4. Cependant, chez les sujets atteints de dystrophie FSH, le nombre de répétition de l’un des deux chromosomes 4 est diminué, dans ce cas, la région D4Z4 est constituée de 1 à 10 répétitions (Pandya, King & Tawil, 2008) (figure 2). Figure 2 : Contraction de la région D4Z4 (Urtizberea, 2007). 24 De plus, cette diminution du nombre de répétitions dans la région D4Z4 est associée à une modification de l’organisation de la chromatine qui est moins compacte. On parle alors de relaxation de la chromatine, ainsi qu’une hypométhylation4 de l’ADN. Une étude (Wang & al., 2012) réalisée chez 24 patients atteints de dystrophie FSH a montré une corrélation entre la longueur de la région D4Z4 et l’importance de l’atteinte musculaire. En effet, plus la région D4Z4 est raccourcie, et plus l’atteinte musculaire est importante. Cette étude a aussi mis en évidence un lien entre l’atteinte musculaire, le taux de créatine kinase dans le sérum, et la sévérité de la dystrophie. La contraction de la région D4Z4 provoque des conséquences encore assez inconnues, quelques hypothèses ont été émises : Le raccourcissement de la région D4Z4 induirait une suppression incomplète du gène DUX4. En 2007, une étude dirigée par Belayew a montré que le gène DUX4 est actif chez les sujets atteints de dystrophie FSH. Normalement, ce gène est réprimé chez les sujets sains, c'est-à-dire qu’il est inactif. Cependant, suite à la diminution du nombre de répétitions dans la région D4Z4, le gène est moins efficacement réprimé. C’est pourquoi, le gène DUX4 est actif chez les patients atteints de dystrophie FSH (Myoinfo, 2013). La contraction de la région D4Z4 influencerait la surexpression du gène FRG1. Cette surexpression jouerait un rôle dans l’apparition de la maladie. Une étude (Chen & al., 2011) a mis en évidence que la prolifération de myoblastes altérés pourrait favoriser la pathologie chez des souris surexprimant le gène FRG1. Cela contribuerait à la dystrophie FSH. La contraction de la région D4Z4 influencerait une production élevée de protéines. Une étude (Vizoso & Esteller, 2012) a montré que la contraction de la région D4Z4 induirait un excès de production de protéines à partir de la production d’un ARN non codant, appelé DEB-T. Celui-ci serait responsable de l’activation de certains gènes provoquant une production accrue de protéines. Ce mécanisme interviendrait dans l’apparition de la dystrophie FSH. 4 La méthylation vise à atténuer, voire à supprimer l’expression des gènes. 25 Le déficit du gène FAT1 aurait des conséquences sur les signes cliniques de la FSH1. En effet, une étude récente (Caruso & al., 2013) a observé qu’un modèle de souris n’exprimant pas le gène FAT1 reproduisait les signes cliniques de la FSH1. Ce gène agit dans les cellules musculaires en développement. Le déficit au niveau du gène FAT1 perturberait la migration cellulaire, provoquant une réduction de la masse musculaire au niveau des épaules, une fonte musculaire précoce au stade adulte, des défauts vasculaires au niveau de la rétine, et une malformation de l’oreille interne prédictive de la surdité. L’ensemble de ces atteintes ressemble fortement aux symptômes rencontrés dans la dystrophie FSH. De plus, le gène FAT1 se trouve près du lieu impliqué dans l’apparition de la dystrophie FSH. 3.2.3. Anomalies génétiques en cause dans la FSH2 : Dans 5% des cas de dystrophie musculaire FSH, le nombre de répétitions de la région D4Z4 n’est pas diminué au niveau du chromosome 4. Les chercheurs parlent de dystrophie FSH de type 2. Dans 80% des cas, les sujets atteints de FSH2 présentent des mutations dans le gène SMCHD1. En effet, une étude récente (Lemmers & al., 2012) a identifié des mutations du gène SMCHD1. Ce gène est localisé sur le chromosome 18 dans la région 18p11.32. Ces anomalies génétiques provoquent une diminution de la quantité de protéines SMCHD1, qui est responsable de la relaxation de la chromatine dans la région D4Z4, et qui permet l’expression du gène DUX4. Sabrina Sacconi (Dupuy-Maury, 2013, p31) précise que pour que la maladie s’exprime « il faut que les malades aient à la fois une mutation du gène SMCHD1 et un chromosome permissif, c'est-à-dire qui permet l’expression d’un gène toxique : le gène DUX4 » 3.2.4. FSH1 et FSH2 : un mécanisme commun : Les deux anomalies génétiques en cause dans la FSH1 et la FSH2 convergent vers un mécanisme similaire (figure 3). 26 L’organisation de la chromatine5 est modifiée, on parle alors de relaxation de la chromatine au niveau du chromosome 4. Dans le cas de la FSH1, cette relaxation est obtenue via un nombre réduit dans la région D4Z4. Dans le cas de la FSH2, la relaxation est obtenue par une trop faible méthylation. Celle-ci est liée à une insuffisance de la protéine SMCHD1. Puis, la relaxation de la chromatine induira une mauvaise expression du gène DUX4. Van der Maarel & al. (2012) considèrent la suppression incomplète du gène DUX4 comme la cause la plus probable de la dystrophie FSH. L’expression du gène DUX4 influencera les manifestations cliniques de la dystrophie FSH. Julie Dumonceaux affirme que le gène DUX4 « a indéniablement des effets négatifs puisque lorsqu’on augmente son expression, il tue les cellules en 48 heures » (Dupuy-Maury, 2012, p23). Le gène DUX4 régule l’expression d’autres gènes : selon Stephen Tapscott, plus d’un millier de gènes interagiraient avec le gène DUX4 (Dupuy-Maury, 2012). La chromatine est une substance contenue dans le noyau des cellules, elle est constituée d’ADN et de protéines qui organisent et protègent l’ADN. Lorsque la cellule se divise, la chromatine se condense en petits bâtonnets appelés chromosomes. 5 27 Figure 3 : FSH1 et FSH2 : un mécanisme commun pour des anomalies génétiques différentes (Myoinfo, 2013). 3.2.5. Hypothèses concernant le gène DUX4 : Le gène DUX4 serait à l’origine de la dystrophie FSH. Van der Maarel & al. (2012) considèrent la suppression incomplète du gène DUX4 dans le muscle comme la cause la plus probable de la dystrophie FSH. Le gène DUX4 initie une activation en cascade du gène PITX1. En effet, une étude (Dixit & al. 2007) a montré que le gène DUX4 serait activé dans un petit nombre de noyaux de myotubes où il activerait le gène PITX1. La protéine PITX1 produite diffuserait vers les noyaux voisins et permettrait d’étendre cette cascade d’activation. Les résultats de cette étude suggèrent que l’augmentation de DUX4 et PITX1 dans les muscles peuvent jouer un rôle critique dans les mécanismes moléculaires de la pathologie. De plus, la protéine PITX1 a un rôle important dans l’atrophie musculaire. 28 Le gène DUX4 serait nécessaire mais pas suffisant pour provoquer la pathologie. En effet, l’expression du gène DUX4 a aussi été mise en évidence chez des sujets non atteints de dystrophie FSH. En revanche, le gène DUX4 était exprimé plus fortement chez les patients atteints par la maladie. De plus, l’expression du gène DUX4 n’était pas toujours à corréler avec la sévérité de la pathologie. Dans certains cas, malgré une forte expression du gène DUX4 dans le muscle de patients FSH, celui-ci ne présentait pas de faiblesses musculaires apparentes (Myoinfo, 2013). 3.2.6. Autres hypothèses émises : Une perturbation dans l’organisation de la structure nucléaire de la cellule pourrait être impliquée dans le mécanisme pathogénique de la dystrophie FSH. (Myoinfo, 2013). Une étude récente (Harafuji, & al., 2013) a observé que le micro-ARN 411 est surexprimé dans la dystrophie FSH. Il semblerait qu’il joue un rôle dans la myogenèse. Les micro-ARN (mi-ARN) sont des petits ARN produits par les cellules et qui ne sont pas traduits en protéines. Leur fonction est de réguler l’expression des gènes en bloquant la traduction de l’ARN messager en protéines. 29 Figure 4 : FSH1 et FSH2 : un mécanisme commun pour des anomalies génétiques différentes, avancée de la recherche (Myoinfo, 2013). 30 4. Physiopathologie 4.1. L’appareil musculaire : 4.1.1. Atteinte et asymétrie musculaire : L’atteinte musculaire se manifeste par une amyotrophie, particulièrement au niveau des muscles du visage (facio), des épaules (scapulo), et des bras (humérale), ainsi qu’une atteinte des muscles des membres inférieurs (figure 5). En général, la dystrophie FSH évolue selon un mode descendant. Cependant, les atteintes musculaires sont variables d’un individu à l’autre. Figure 5 : Principaux muscles atteints dans la dystrophie FSH (Diaz, 1998). 31 La dystrophie FSH est caractérisée par une faiblesse musculaire et par une atteinte musculaire asymétrique (Urtizberea, 2007). Généralement, elle ne provoque pas de rétractions musculaires. En effet, elles sont rares, ou apparaissent tardivement (Diaz, 1998). 4.1.2. Atteinte des muscles du visage : L’atteinte musculaire va modifier l’expression du visage. L’inexpressivité est le signe essentiel du début de la pathologie. De plus, cette atteinte musculaire est souvent discrète. Les personnes atteintes de dystrophie FSH consultent rarement pour cela. Elle est parfois tellement modérée qu’elle est mise en évidence quand le patient essaie de siffler, de gonfler les joues, de souffler dans un ballon, de boire avec une paille ou d’arrondir les lèvres. En effet, cela est souvent difficile ou impossible pour les personnes atteintes de dystrophie FSH. L’atteinte musculaire de l’orbiculaire de l’œil provoque une disparition des plis et des rides au niveau du front et autour des yeux. Le visage devient lisse, les yeux semblent grands ouverts et saillants. A un stade assez avancé, l’occlusion complète des yeux devient impossible, notamment la nuit. Cette fermeture incomplète peut entrainer une irritation, ainsi qu’une inflammation de l’œil (conjonctivites, kératites) caractérisées par une sensation de brûlure, de rougeur, ou une gêne lors des mouvements des yeux. L’atteinte des muscles grands et petits zygomatiques, ainsi que du muscle orbiculaire de la bouche provoque un aplatissement des joues qui semblent creusées et amaigries. De plus, le sourire est plus ou moins asymétrique et horizontal. Les lèvres sont saillantes, la fente buccale paraît élargie et la lèvre inférieure est éversée. La physionomie générale prend un caractère moins jeune, moins intelligent, et moins expressif (figure 6) (Diaz, 1998). 32 Figure 6 : Visage d'une personne atteinte de dystrophie FSH (Laterre, 2008). 4.1.3. Atteinte des muscles de la ceinture scapulaire : Les muscles de la ceinture scapulaire sont touchés précocement. Cette atteinte est souvent la première manifestation clinique de la dystrophie musculaire FSH. En effet, Padberg a rapporté que 82% des patients remarquent la faiblesse de la ceinture scapulaire comme premier symptôme de la dystrophie FSH (cité par Pandya, King & Tawil, 2008). Les muscles touchés sont principalement les fixateurs de la scapula. Les autres muscles tels que le deltoïde, le muscle supra-épineux, le muscle infraépineux sont épargnés, ce qui entraîne la scapula alata classique (FournierMehouas & al., 2008). L’atteinte des fixateurs de la scapula (dentelé antérieur, rhomboïdes, grand dorsal, faisceau inférieur du trapèze) entraine une ascension de la scapula vers le haut, l’avant et le dehors. Les scapulas sont saillantes, elles ont un aspect « d’ailerons » en particulier lors de l’élévation du membre supérieur, on appelle cela une scapula alata (figure 7). 33 Figure 7 : Scapula alata (Laterre, 2008). Lorsque le déficit musculaire des fixateurs de la scapula est trop important, l’antépulsion et l’abduction au-dessus de l’horizontale deviennent impossibles. C’est pourquoi, le patient a des difficultés dans certains gestes de la vie quotidienne, telles que : se coiffer, prendre soin de son visage, atteindre des objets en hauteur… Pour pallier à ce déficit les patients projettent leur membre supérieur vers l’avant et le haut rapidement, et le maintiennent ensuite avec l’autre bras. Une enquête de l’association française contre les myopathies (AFM) réalisée sur 270 personnes atteintes de dystrophie musculaire FSH a relevé les capacités fonctionnelles des membres supérieurs (figure 8) (cité par Diaz, 1998). 34 Figure 8 : Enquête AFM : capacité fonctionnelle des membres supérieurs (Diaz, 2008). La clavicule devient progressivement horizontale. Dans certains cas, son extrémité externe bascule vers le bas. Les muscles supra-épineux et infra-épineux sont rarement atteints au stade précoce de la pathologie. L’atteinte du faisceau sterno-chondro-costal du grand pectoral provoque une ascension des plis axillaires. Dans certains cas, on observe un pectus excavatum6 chez les patients atteints de dystrophie FSH. L’atteinte du muscle deltoïde est tardive, partielle, surtout au niveau proximal. Le mécanisme repose sur une hypertrophie des cartilages costaux inférieurs (le plus souvent du 3ème au 7ème). Ils sont d’origine congénitale ou apparaissent durant la croissance (De Blic & Delacourt, 2009). L’étiologie est généralement idiopathique. 6 35 4.1.4. Atteinte des muscles des membres supérieurs : A un stade plus avancé de dystrophie FSH, les groupes musculaires plus distaux sont atteints. Le biceps brachial, le triceps brachial, les extenseurs du poignet, et les extenseurs des doigts peuvent s’atrophier. C’est pourquoi, le membre supérieur a un aspect particulier, il ressemble a un avant-bras de « Popeye » (figure 9). Figure 9 : Avant bras de Popeye (Karpati, Hilton-Jones & Griggs, 2001). 4.1.5. Atteinte des muscles de la ceinture pelvienne : Selon Padberg (2004), environ 50% des patients ont une atteinte des muscles de la ceinture pelvienne (cité par Pandya, King & Tawil, 2008). 36 L’atteinte des muscles glutéaux provoque une bascule du bassin, ainsi qu’une hyperlordose lombaire qui vient équilibrer le centre de gravité. Elle est utile à l’individu pour conserver la marche. Le déficit musculaire entraine des difficultés pour se relever d’un siège, monter les escaliers ou se redresser. (Urtizberea, 2007). A un stade avancé, les patients atteints de dystrophie FSH ont des difficultés pour marcher, se lever, et cela devient parfois impossible. Selon Tranchant & Azulay (2012), ils seront contraints d’utiliser un fauteuil roulant dans 15 à 20% des cas. 4.1.6. Atteinte des muscles des membres inférieurs : L’atteinte des muscles tibial antérieur, court et long fibulaires est fréquente chez les patients atteints de dystrophie FSH. Selon Padberg (2004), l’atteinte des releveurs du pied est présente chez 67% des personnes atteintes de dystrophie FSH (cité par Pandya, King & Tawil, 2008). Cette atteinte musculaire provoque un steppage. En effet, lors de la marche, le patient va avoir sa pointe de pied constamment abaissée, et il fléchira beaucoup sa hanche et son genou pour éviter que sa pointe de pied ne touche le sol. Cela permet d’éviter les chutes. Ces atteintes musculaires provoquent des difficultés lors de l’utilisation des escaliers, et courir devient rapidement impossible (Urtizberea, PenissonBesnier, Levy, 2011). 4.1.7. Autres atteintes musculaires : Les muscles abdominaux sont souvent atteints à un stade tardif de la pathologie. Ce déficit majore la bascule du bassin et l’hyperlordose lombaire. Cette hyperlordose entraine souvent un abdomen proéminant (figure 10) (Urtizberea, 2007). Les muscles para-vertébraux sont parfois déficitaires. Ils contribuent à l’aggravation d’une scoliose, ou d’une hyperlordose lombaire (Diaz, 1998). 37 Figure 10 : Vue de profil d'un patient atteint de dystrophie FSH (Karpati, HiltonJones & Griggs, 2001). 4.1.8. Facteurs aggravants : L’amyotrophie peut être aggravée par différents facteurs (Diaz, 1998) : - l’immobilisation : provoquant une progression rapide de l’atrophie musculaire, les traumatismes : en particulier au niveau scapulaire, l’algo-neuro-dystrophie : qui est fréquente après un traumatisme. 38 4.2. L’appareil ostéo-articulaire : La faiblesse et l’atrophie musculaires provoquent des déséquilibres musculaires qui sont à l’origine d’attitudes vicieuses, pouvant s’aggraver en déformations squelettiques. Ces déformations squelettiques sont tardives, et elles sont principalement situées au niveau du rachis. En effet, une étude réalisée à partir de 53 sujets (Kilmer & al., 1995) a démontré que 35% des personnes atteintes de dystrophie FSH présentaient des déformations vertébrales, tel que l’hyperlordose, la scoliose, ou l’association des deux. L’hyperlordose lombaire, est la conséquence d’une compensation de la bascule pelvienne (conséquente à la faiblesse des muscles glutéaux), ainsi d’une faiblesse des muscles abdominaux. La scoliose est surtout présente dans les cas les plus graves de dystrophie musculaire FSH. La faiblesse des muscles spinaux provoque une cyphose de la charnière cervico-dorsale et une hyperlordose cervicale (Diaz, 1998). Chez les patients atteints de dystrophie FSH infantile, la progression de la pathologie sera plus rapide, c’est pourquoi ils seront plus confrontés aux risques de déformations de la colonne vertébrale. 4.3. Douleur et fatigue : 4.3.1. La douleur : La douleur est une plainte fréquente chez de nombreux patients atteints de dystrophie FSH. Une enquête réalisée par l'AFM a montré que 55% des patients se plaignent de douleurs plusieurs fois par semaine. Elles sont généralement musculo-squelettiques avec pour origine des rétractions musculaires, des tendinites, ou lorsqu’elles précèdent une atteinte musculaire. De plus, les régions les plus couramment douloureuses sont localisées au niveau des épaules, des genoux, du haut du dos, et de la région lombo-sacrée (Tawil, 2008). 39 Une enquête française réalisée par Urtizberea (1997) a observé que sur 270 patients atteints de dystrophie FSH : 5,5% d’entre eux ne se plaignaient pas de douleurs, 50% des sujets souffraient de douleurs plusieurs jours par semaine, et 32 % ont déclaré la douleur comme un problème quotidien (cité par Pandya, King & Tawil, 2008). Cette enquête a également observé que les douleurs sont qualifiées : - de gênes douloureuses dans 36% des cas ; de courbatures dans 35% des cas ; de crampes dans 29% des cas ; de brûlures dans 24 % des cas ; de tiraillements dans 20% des cas. (Diaz, 1998). Une enquête néerlandaise (Koetsier, 1997) a montré que, sur 109 personnes atteintes de dystrophie FSH (cité par Pandya, King & Tawil, 2008) : - 74% se plaignaient de douleurs plus de 4 jours par mois, 58% se plaignaient de douleurs plus de 4 jours par semaine, 32 % se plaignaient de douleurs quotidiennes, 91 % d’entre eux ont déclaré avoir d’avantage de douleurs à l'effort, 74 % d’entre eux se plaignaient de douleurs conséquentes à une mauvaise posture. Une étude récente (Jensen & al., 2008) a mis en évidence une fréquence élevée des phénomènes douloureux chez les patients atteints de dystrophie FSH, soit 82% d’entre eux. La diminution des capacités motrices et le recours à des aides techniques sont à corréler avec la fréquence plus élevée de douleurs. Cependant, l’âge semble peut influer. Quant aux traitements antalgiques, ils semblent peu efficaces dans l’ensemble. 4.3.2. La fatigue : La fatigue est un problème à la fois clinique et social chez les personnes atteintes d’une maladie neuromusculaire. C’est un symptôme fréquent dans de nombreuses maladies neuromusculaires. 40 Une équipe néerlandaise (Kalkman & al., 2005) a évalué la fatigue dans trois pathologies neuromusculaires (la dystrophie FSH, la maladie de Steinert, la maladie de Charcot-Marie-Tooth). Au total, 598 patients ont été inclus dans l’étude, dont 139 sujets atteints de dystrophie FSH. L’étude a permis de montrer que 61% des patients atteints de dystrophie FSH se plaignaient de fatigue importante. Les patients les plus fatigués étaient davantage gênés dans leur vie quotidienne (douleurs plus intenses, santé mentale altérée). D’après cette étude, la fatigue sévère est un symptôme majeur dans ces maladies neuromusculaires. Associée aux autres atteintes fonctionnelles, elle entraîne une altération de la qualité de vie. C’est pourquoi, elle représente un problème à la fois clinique et social à prendre en compte dans la prise en charge des maladies neuromusculaires. 4.4. L’appareil auditif : Une atteinte de l’audition est fréquente chez les patients atteints de dystrophie FSH. En effet, il semble y avoir une augmentation de la prévalence de déficience auditive chez les patients atteints de dystrophie FSH par rapport à la population générale (Darras & Tawil, 2013). Cependant, une étude (Trevisan & al, 2008) portant sur 73 patients atteints de dystrophie FSH a montré que cette prévalence différait peu de la population normale. Cette atteinte auditive est la conséquence d’une atteinte de la cochlée. Le patient présente alors une diminution ou une perte de l’audition, qui est souvent bilatérale. La sévérité de l’atteinte auditive est variable d’un individu à l’autre. De plus, elle débute par un déficit des sons aigus, et progresse ensuite vers les autres fréquences. Selon Darras & Tawil (2013), la perte auditive a été décrite en particulier chez les patients atteints de dystrophie FSH infantile. Cependant, les cas typiques de dystrophie FSH sont aussi touchés par ce trouble. Dans le cas de la forme infantile sévère, la perte auditive peut être profonde. Si elle n'est pas détectée elle pourra affecter le développement normal du langage, l’apprentissage et provoquer une déficience cognitive. 41 Les troubles de l’audition seront dépistés et suivis par des audiogrammes. Cet examen est indiqué de façon systématique dans les cas de dystrophie FSH. Il sera important chez les nourrissons et chez les enfants d’âge préscolaire atteint de dystrophie FSH (Diaz, 1998). 4.5. L’appareil oculaire : Chez les personnes atteintes de dystrophie FSH, l’appareil oculaire peut lui aussi être affecté. L’atteinte de l’orbiculaire des paupières empêche l’occlusion complète des yeux, et altère l’écoulement normal des larmes qui humidifient la cornée. C’est pourquoi, la cornée et la conjonctive vont s’assécher, et pourront provoquer des ulcérations cornéennes, ou des conjonctivites (Diaz, 1998). Une étude (Ganesh, Kaliki, & Shields, 2012) a observé des modifications vasculaires rétiniennes similaires à celles observées dans la maladie de Coats. Elles ont été mises en évidence par angiographie à la fluorescéine chez 40 à 75% des patients atteints de dystrophie FSH. La plupart des patients ont une télangiectasie rétinienne asymptomatique qui a été trouvée au dépistage oculaire à l'âge adulte après le diagnostic de la FSH. Le syndrome de Coats est une complication extra-musculaire rare chez les patients atteints de dystrophie FSH1. Elle est généralement liée à une contraction de la région D4Z4 importante (Statland & al., 2013). Remarque : La maladie de Coats est idiopathique et elle est caractérisée par une télangiectasie, c'est-à-dire à un développement anormal des vaisseaux de la rétine. Progressivement des dépôts d'exsudats intra et sous-rétiniens peuvent provoquer un décollement de la rétine. L'angiographie rétinienne à la fluorescéine permet de mettre en évidence une simplification de l’arbre vasculaire rétinien, avec des capillaires plus longs, plus larges et moins nombreux. 4.6. L’appareil respiratoire : L'insuffisance respiratoire conséquente à une faiblesse des muscles respiratoires est une complication fréquente de nombreuses maladies neuromusculaires. La prévalence de l'insuffisance respiratoire concerne 1% des sujets 42 atteints de dystrophie musculaire FSH (Tawil, 2008). Ces troubles respiratoires sont liés à différents facteurs, tels que la faiblesse de certains muscles, un stade avancé de dystrophie FSH, ou un retentissement d’une déformation de la colonne vertébrale (scoliose, cyphoscoliose, hyperlordose lombaire). Les patients doivent être informés des signes de l'hypercapnie, tels que : les troubles du sommeil, les maux de tête matinaux, et l’hyper-somnolence diurne. Quelques études ont été menées au sujet des troubles respiratoires dans la dystrophie FSH. Une étude (Stübgen, & Schultz, 2009), a montré une légère faiblesse musculaire concernant la fonction des muscles respiratoires chez les patients atteints de dystrophie FSH. Les muscles expiratoires (en particulier les muscles abdominaux) seraient les plus atteints. Le diaphragme ne présentait pas de faiblesse musculaire significative. De plus, le volume résiduel était augmenté chez certains patients. Une étude réalisée par Wohlgemuth & al. (2004) a mis en évidence qu’1% de la population FSH néerlandaise avait une aide ventilatoire la nuit. L’utilisation d’un fauteuil roulant, la scoliose, ou le pectus excavatum semblent être des facteurs de risques de l’insuffisance respiratoire. Les résultats d’une étude (Della Marca & al., 2009) suggèrent une prévalence élevée de troubles respiratoires du sommeil chez les patients atteints dystrophie FSH. La présence de ces troubles ne dépend pas de la gravité de la maladie, et elle est souvent asymptomatique. Un dépistage doit être inclus dans l'évaluation clinique de la dystrophie FSH. 4.7. L’appareil cardio-vasculaire : En général, les sujets atteints de dystrophie musculaire FSH ne souffrent pas de symptômes cardiaques importants. Des études ont signalé que des troubles cardiaques sont possibles chez les patients atteints de dystrophie FSH. Une étude (Trevisan, 2006) a observé que des troubles du rythme cardiaque semblent être plus fréquents que prévu chez les patients 43 atteints de dystrophie FSH. L’étude confirme l’implication d’un facteur de risques cardiaques avec une estimation au-dessus des 10%. Une étude (Della Marca & al, 2010) a mis en évidence une légère augmentation de l’effet du système nerveux sympathique et une diminution de l’effet du système nerveux parasympathique. Ces modifications deviennent plus évidentes avec la progression de la maladie. Elles pourraient accroître le risque d'arythmie. 4.8. L’appareil digestif : La dysphagie regroupe les troubles survenant au cours de l’alimentation. Elle n’est pas considérée comme un symptôme dans la description clinique de la dystrophie FSH. Cependant, quelques études ont été menées à ce sujet : Une étude (Wolgemut & al., 2006) a permis de constater que des troubles de dysphagie peuvent se produire à un stade avancé de la dystrophie FSH. Cependant, la dysphagie est rarement une cause de mortalité chez ces patients. Stübgen (2008) a mené une étude qui avait pour but de déterminer si la dystrophie FSH avait des conséquences sur la phase pharyngée ou œsophagienne. Cependant, cette étude n’a pas établi que ces troubles étaient liées à la dystrophie FSH. De plus, ces personnes n’avaient pas spontanément de plaintes concernant leur déglutition. Desuter (2013) a expliqué que les troubles propulsifs étaient majorés chez les personnes atteintes de dystrophie FSH. 4.9. L’aspect psychologique : L’annonce du diagnostic peut être un moment délicat pour la personne atteinte de dystrophie FSH. Il s’agirait d’un instant « rupture » où le passé et le futur perdent leurs sens. Les patients expriment une impression de séparation avec les sujets normaux. Selon Ville, le déni est présent chez la moitié des personnes atteintes de dystrophie FSH. Ce déni peut entraîner un refus d’aide, un 44 refus d’en parler avec les proches. Cela conduit souvent le patient à éviter les associations, alors qu’ils pourraient y trouver de l’aide (cité par Diaz, 1998). Remarque : l'annonce d'une maladie grave peut entrainer le déclenchement d'un processus d’acceptation incluant plusieurs phases se succédant : le choc, la colère, le déni, le marchandage, la dépression, et l’acceptation. Le déroulement de ce processus varie selon les personnes et les situations. Le déni est un mécanisme permettant au patient de nier une réalité trop difficile à vivre. Il va alors essayer de se protéger en modifiant sa réalité en une situation de moindre mal. Il est généralement transitoire (Mihura, & Erbaut, 2008). La dystrophie FSH se déclare très souvent à l’âge adulte, c’est pourquoi elle peut rompre des projets de vie. Claire-Cécile Michon explique que la variabilité des symptômes et de leur évolution ne permet pas aux patients de se préparer (Dupuy-Mauray, 2012). L’annonce de la pathologie peut engendrer différentes réactions. En effet, certains seront plutôt dépressifs, alors que d’autres auront des états d’hyperdynamismes, et ne demanderont aucune aide. De plus, les hommes et les femmes réagissent différemment. En effet, les femmes auront un sentiment de culpabilité, avec la peur de transmettre la pathologie à leurs enfants, et seront plus préoccupées par les conséquences de la maladie sur l’esthétique. Les hommes refuseront d’en parler, en général, ils acceptent plus facilement la maladie, et la minimalise. Selon Claire-Cécile Michon « une étude menée en 2009 en Italie à montré que les femmes ont un score de qualité de vie plus détériorée que les hommes » (Dupuy-Mauray, 2012, p.22). Plus la pathologie s’aggrave, moins ils sont agressifs. En effet, ils ont une plus grande compréhension. Cependant, la dépendance est souvent mal vécue. Selon le docteur Bernard Coic (2012), la souffrance n’est pas nécessairement en corrélation avec l’importance quantitative du déficit moteur. En général, les patients présentant un déficit facial porteront plus d’importance à cette atteinte. Il est important de ne pas négliger les conséquences de la pathologie car elles ont un impact au niveau de la qualité de vie. 45 Une étude (Bungener, Jouvent, & Delaporte, 1998) a évalué les perturbations psychopathologiques chez des patients atteints de dystrophie FSH. Ils étaient plus déprimés et plus anxieux que les sujets témoins. 4.10. Evolution de la pathologie : 4.10.1. Evolution classique : Les premiers signes de la dystrophie FSH apparaissent généralement entre 10 et 20 ans. Cependant, certaines formes sont plus précoces, et d’autres sont plus tardives. Dans la plupart des cas, l’évolution de la dystrophie musculaire FSH est lente, se déroulant sur plusieurs décennies, avec des périodes, de durées variables, où la pathologie ne progresse pas. Certaines personnes décrivent des poussées évolutives pendant lesquelles le déficit musculaire s’installe dans un territoire musculaire. Pour d’autres, il s’agit d’une progression continue de la pathologie dans les territoires musculaires déjà atteints (Karpati, Hilton-Jones & Griggs, (2001). En général, la dystrophie musculaire FSH évolue discrètement, selon un mode descendant. La pathologie débute généralement avec l’atteinte des muscles du visage. Celle-ci est classiquement discrète, et peu ou pas évolutive. C’est pourquoi, les personnes atteintes de dystrophie FSH consultent rarement pour cela. Le diagnostic est alors souvent retardé de plusieurs années. Les muscles de la ceinture scapulaire sont touchés précocement. Cette atteinte est souvent la première manifestation clinique de la dystrophie FSH. Cette atteinte musculaire évolue à des degrés différents, et varie beaucoup d’une personne à l’autre. 46 A un stade plus avancé, la pathologie touche les groupes musculaires plus distaux, tels que les membres supérieurs et inférieurs. Cette atteinte varie selon les individus. Dans certains cas, les muscles de la ceinture pelvienne sont atteints. Cette atteinte musculaire est un critère de sévérité entraînant des difficultés pour marcher. C’est pourquoi, certains sujets seront contraints d’utiliser une aide à la marche. Les muscles abdominaux sont atteints dans la moitié des cas de dystrophie FSH. Ils sont souvent touchés à un stade tardif de la myopathie. De plus, les atteintes extra-musculaires sont très variables d’un individu à l’autre, et elles peuvent être absentes. Les déformations squelettiques sont tardives, et elles sont principalement situées au niveau du rachis. La sévérité de l’atteinte auditive est variable. Le syndrome de Coats7 est rare. Les troubles respiratoires sont liés à la faiblesse de certains muscles, ou à une déformation de la colonne vertébrale, mais sont rares, et principalement présents dans les cas les plus graves. Selon Padberg & Zatz, la pathologie arriverait plus précocement et serait plus sévère chez les hommes (cité par Cooper & Upadhyaya, 2004). De plus, selon Chung & Morton, la différence dans l’âge de début de la maladie entre les hommes et les femmes serait liée à l’âge de la puberté qui est différente selon le sexe (cité par Diaz, 1998). Les risques obstétricaux sont peu connus dans la dystrophie FSH. Une étude (Ciafaloni & al, 2006) confirme que le poids à la naissance est un peu plus faible chez les enfants nés de patientes atteintes de dystrophie FSH. De plus, les accouchements nécessitent un peu plus d’interventions. En revanche, la grossesse se déroulait normalement. Dans 24 % des cas, une aggravation des symptômes suite à la grossesse a été constatée, ceux-ci ne régressaient pas par la suite. 7 La maladie de Coats est caractérisée par une télangiectasie (développement anormal des vaisseaux de la rétine), puis progressivement des dépôts d'exsudats peuvent provoquer un décollement de la rétine. 47 L’espérance de vie des patients atteints de dystrophie FSH est comparable à celle de la population générale. Cependant, lors de complications respiratoires, ou plus rarement, lors de complications cardiaques, l’espérance de vie sera diminuée (Urtizberea, 2007). 4.10.2. Formes infantiles : Cette forme de dystrophie FSH débute dans la petite enfance, parfois même dès la naissance. En moyenne, l’atteinte musculaire débute dans la première année de vie. L’évolution de la dystrophie FSH infantile est plus rapide, et plus invalidante. Cette forme est rare et représente environ 5% des sujets atteints de dystrophie FSH. On parle de formes infantiles lorsque l’atteinte des muscles du visage se manifeste avant l’âge de 5 ans, et que l’atteinte des muscles de la ceinture scapulaire et pelvienne se manifeste avant l’âge de 10 ans. Manifestations et évolution : Le plus souvent, le visage de l’enfant a un aspect de diplégie faciale, c'est-àdire que l’atteinte des muscles du visage se traduit par une paralysie du visage. Il est alors inexpressif, les lèvres sont éversées, les yeux ne se ferment pas complètement. Cette atteinte n’est pas évolutive. Quelques années plus tard, les signes de faiblesses musculaires au niveau de la ceinture scapulaire et du bassin apparaissent rendant le diagnostic plus aisé. De nombreux mouvements seront perturbés, comme marcher, monter les escaliers, lever les bras… Contrairement, aux formes adultes, l’atteinte musculaire est symétrique. La progression de la pathologie est plus rapide, c’est pourquoi ils seront plus confrontés aux risques de déformations de la colonne vertébrale (Lee & al., 2009). De plus, l’hyperlordose lombaire est très marquée. Bon nombre d’enfant atteints de dystrophie FSH infantile vont la conserver pour pouvoir continuer à marcher. La plupart de ces enfants seront contraints d’utiliser un fauteuil roulant avant l’âge de 10 ans. En moyenne, ils y auront recourt vers l’âge de 13-14 ans. Cependant, la perte de la marche n’est pas systématique dans cette forme de dystrophie. 48 Fréquemment, une perte auditive est observée dans les formes infantiles. Si elle apparait précocement, elle pourra affecter le développement normal du langage, l’apprentissage et provoquer une déficience cognitive (Darras & Tawil, 2013). Comme dans les formes classiques, une rétinopathie est souvent présente. Si les exsudats rétiniens ne sont pas traités, ils pourraient rendre le sujet aveugle à long terme. Le développement cognitif peut être affecté. Lorsque ce déficit intellectuel est présent, il est le plus souvent modéré. Cependant, il est difficile de savoir si ce déficit est conséquent à la pathologie elle-même, ou aux altérations des stimulations sensorielles. Certains enfants sont aussi atteints de crises d’épilepsies. 4.10.3. Formes à exacerbation tardive : Certains sujets atteints de dystrophie FSH ne présentent que des manifestations modérées au niveau des muscles du visage durant la première moitié de leur vie. Ensuite, en 2-3 ans, une détérioration rapide apparait, touchant les muscles de la ceinture scapulaire et pelvienne. Cela peut entraîner des difficultés à la marche (Diaz, 1998). 49 5. Diagnostic 5.1. Diagnostic de la dystrophie FSH : 5.1.1. L’examen clinique : Dans la plupart des cas, les personnes concernées consultent pour des difficultés en rapport avec leurs déficits musculaires. Par exemple, ils vont voir un médecin s’ils ne peuvent plus lever leurs bras, ou s’ils ont des difficultés lors de la marche. Il est rare que le patient y aille pour l’atteinte musculaire au niveau du visage, car elle passe souvent inaperçue. Parfois, le sujet atteint consulte pour la paralysie d’un membre ou d’une partie de membre qui s’est installée en quelques jours ou semaines et s’accompagnant parfois de douleurs. Grâce à l’examen clinique, le médecin suspecte en général assez facilement la dystrophie FSH (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). 5.1.2. Le test génétique : Depuis 1992, un test d’ADN est disponible. Le plus souvent, il permet d’établir le diagnostic de dystrophie FSH avec certitude. Ce test n’est pratiqué que dans des laboratoires spécialisés. Il consiste à rechercher le raccourcissement de la région D4Z4 au niveau du bras long du chromosome 4, à partir d’un prélèvement sanguin. Ce test est sensible et spécifique (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). Cependant, dans 2 à 5 % des cas, ce test donne un résultat négatif alors que la personne est atteinte de la dystrophie FSH (Urtizberea, 2007). La notion de négativité du test génétique peut être liée au fait : Il ne permet pas de détecter la totalité des raccourcissements de la région D4Z4. En effet, il peut y avoir un doute sur le diagnostic lorsque cette région est dite « grise » ou « frontière », c'est-à-dire que le nombre de répétitions est situé entre 10 et 12. 50 Remarque : lorsque le nombre de répétitions de la région D4Z4 est inférieur à 10, il n’y a pas ce problème, le test sera positif. Certains patients atteints de dystrophie FSH n’ont pas de raccourcissement de la région D4Z4. Une étude (Scionti & al., 2012) a permis de montrer que 3% de la population saine avait une diminution du nombre de répétitions dans la région D4Z4. Ce travail montre la limite des tests génétiques actuellement pratiqués pour diagnostiquer la dystrophie FSH et souligne l’importance des recherches visant à les améliorer. Cette étude suscite un questionnement : pourquoi des sujets sains portent l’anomalie génétique sans développer la maladie, et pose différentes hypothèses sur le déclenchement de la pathologie (médicaments ? agents toxiques ?). 5.1.3. Les examens complémentaires : 5.1.3.1. Examens complémentaires musculaires : Ces examens complémentaires musculaires ne sont pas indispensables au diagnostic de la dystrophie FSH, mais ils peuvent être utiles en cas de doutes (Urtizberea, 2007). Le dosage des enzymes musculaires dans le sang : il consiste à mesurer la quantité d'enzymes musculaires présentes dans le sang. Certaines enzymes, tels que la créatine phosphokinase (CPK), sont libérées dans la circulation sanguine lorsque des cellules musculaires sont abîmées ou détruites. Un taux élevé de CPK dans le sang est un signe de lésion musculaire. Le taux de CPK est normal à élevé chez les personnes atteintes de dystrophie FSH. Généralement il ne dépasse pas trois à cinq fois la limite supérieure à la normale (Lemmers, Miller, & van der Maarel, 2012). Si le taux de CPK dépasse de façon permanente la limite, un autre diagnostic devra être envisagé (Diaz, 1998). L’électromyogramme (EMG) : il consiste à recueillir à l'aide de fines aiguilles implantées dans le muscle des signaux électriques. Ces signaux sont émis par les nerfs ou par les fibres musculaires. L'EMG permet de 51 savoir si les difficultés motrices sont dues à une atteinte des muscles ou à une atteinte des nerfs. Elle peut aussi déceler une anomalie de l'excitabilité de la fibre musculaire, une altération de la transmission neuromusculaire ou mesurer la vitesse de conduction de certains nerfs. Chez les personnes atteintes de dystrophie FSH, des anomalies peuvent être détectées, mais elles sont souvent légères (Lemmers, Miller, & van der Maarel, 2012). L’imagerie musculaire (scanner ou résonance magnétique) : son principe est de rechercher d’éventuelles zones ou le muscle est remanié, et ainsi mettre en évidence et évaluer l’atteinte des différents groupes musculaires. Le scanner permet de visualiser le volume et la densité des muscles, ainsi que la symétrie de l’atteinte musculaire (Réveillère & al., 2010). L’IRM permet d’obtenir de meilleurs contrastes et détails au sein des tissus mous et du muscle. Elle est utilisée dans l’étude de pathologies musculaires car elle détecte des modifications précoces, objectivant ainsi leur évolution (Fournier-Mehouas & al., 2001). On utilise l’IRM lorsque l’on suspecte une composante inflammatoire associée à la myopathie. Elle permet de différencier les signaux liés à l’inflammation de ceux liés aux remaniements graisseux (Réveillère & al., 2010). La biopsie musculaire : elle consiste à prélever un fragment de tissu musculaire. Celui-ci est ensuite observé au microscope. La biopsie permet de mettre en évidence des anomalies au niveau des fibres musculaires, ou un déficit de certaines protéines. Chez les sujets atteints de dystrophie FSH, elle peut montrer des anomalies mineures. En effet, il est fréquent de retrouver de petites fibres musculaires arrondies et reparties de façon diffuses (figure 11) (Serratrice, Pellissier & Pouget, 1994). De plus, environ 40% des individus atteints de dystrophie FSH présentent des réactions inflammatoires dans les biopsies musculaires. Elle est uniquement effectuée chez les personnes chez qui la dystrophie FSH est suspectée mais non confirmée par un test génétique (figure 12) (Lemmers, Miller, & van der Maarel, 2012). 52 Figure 11 : Biopsie musculaire d'une personne atteinte de dystrophie FSH : fibres musculaires atrophiées, de tailles inégales (Serratrice, Pellissier & Pouget, 1994). Figure 12 : Biopsie musculaire d'une personne atteinte de dystrophie FSH : forme inflammatoire (Serratrice, Pellissier & Pouget, 1994). 53 Les contractures antalgiques sont secondaires à la douleur. En effet, les muscles se contractent pour créer une attitude posturale qui la réduit (Serratrice, 2003). Selon Sohier, il faut « soigner les contractures musculaires, en éliminant les bombardements nociceptifs qui proviennent de l’interligne articulaire. Après viennent les soins aux muscles » (Sohier, 2000, p13). Une chronologie inverse serait inadéquate. Le thérapeute testera les différentes articulations afin de mettre en évidence d’éventuels décentrages, et d’y remédier grâce aux réharmonisations articulaires. Lorsque le thérapeute rétablit la congruence articulaire, il s’en suit une décontracture musculaire (cf : 6.4.1.5.). 5.1.3.2. Examens auditifs : Plusieurs examens sont réalisés chez les personnes atteintes de dystrophie FSH pour contrôler l’audition. L’audiogramme : il permet de déterminer le type et le degré de surdité dont la personne est éventuellement atteinte. Cet examen est indiqué de façon systématique dans les cas de dystrophie FSH. Une perte auditive dans les hautes fréquences est fréquente dans la dystrophie FSH infantile. Si elle n’est pas détectée et traitée rapidement, elle pourra affecter le développement normal du langage, l’apprentissage et provoquer une déficience cognitive (Tawil, 2008). La mesure des potentiels évoqués auditifs (PEA) : elle suit l’activité électrique du cerveau en réponse à un signal sonore. Des sons brefs sont émis et on enregistre la réaction du cerveau grâce à des électrodes placées au sommet du crâne et sur les lobes des oreilles (Urtizberea, PenissonBesnier, & Lévy, 2011). 5.1.3.3. Examen ophtalmologique : Un examen ophtalmologique peut être pratiqué afin d’évaluer l’atteinte des vaisseaux sanguins qui irriguent l’œil (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). L’angiographie rétinienne à la fluorescéine : le spécialiste injecte un colorant, la fluorescéine, dans une veine du bras, qui arrive en quelques secondes au niveau du fond de l’œil. Cet examen permet de visualiser le réseau vasculaire rétinien en réalisant des clichés photographiques. Il permet ainsi de mettre en évidence une télangiectasie rétinienne. 54 5.1.3.4. Examens respiratoires : Les explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) permettent de faire le diagnostic d’une éventuelle insuffisance respiratoire. Elles consistent à mesurer le fonctionnement de l’appareil respiratoire (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). Elle comprend : Une spirométrie : c’est un test simple qui permet d’évaluer la fonction respiratoire. Elle vise à déterminer les volumes pulmonaires et les débits d’air, dans le but de diagnostiquer certaines pathologies respiratoires, et d’en observer l’évolution. En cas de déficit des muscles de la face chez les personnes atteintes de dystrophie FSH, un masque facial peut s’avérer utile afin d’éviter les fuites d’air qui pourraient fausser les résultats (Société de Pneumologie, 2011). Le test de marche des 6 minutes (TM6) : il consiste à mesurer la distance que peut parcourir la personne en 6 minutes, et permet d’observer si la saturation du sang en oxygène diminue pendant l’effort. Une ponction artérielle : le spécialiste pique une aiguille dans une artère, en général au poignet, en vue d’un prélèvement sanguin. Cela permet de mesurer la quantité d’oxygène dans le sang (pression artérielle en oxygène, PaO2), la quantité de dioxyde de carbone (PaCO2) et la saturation du sang en oxygène (SaO2). Cet examen permet de voir si l’altération de la fonction respiratoire retentit ou non sur l’oxygénation du sang. 5.1.3.5. Examens cardiaques : Un bilan cardiaque est réalisé par précaution au moment du diagnostic (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). Il comprend : Un électrocardiogramme (ECG) : il consiste à enregistrer l’activité cardiaque à l’aide d’électrodes. Une échocardiographie : elle permet de visualiser la structure du cœur et les éventuelles anomalies à l’aide d’ultrasons. 55 5.1.4. Diagnostic pré-symptomatique : Une personne asymptomatique mais dont un membre de sa famille est atteint de dystrophie FSH, peut faire le test génétique. Cependant, on risque de lui annoncer, par le biais du test, que l’anomalie génétique est présente chez elle et donc qu’elle risque de développer la pathologie et qu’elle risque de la transmettre à sa descendance. Ce diagnostic pré-symptomatique ne s’adresse qu’aux adultes. Il est uniquement réalisé si la personne le souhaite. En raison de ses implications psychologiques, il doit se faire en respectant un certain nombre de principes. La personne doit donner son accord après avoir reçu toutes les informations nécessaires sur le déroulement du test et ses conséquences. Les résultats doivent être confidentiels. Ils doivent uniquement être rendus à l’intéressé. Le test génétique est réalisé dans un cadre pluridisciplinaire, regroupant généticiens, neurologues, psychiatres et psychologues. La personne doit attendre un certain temps avant d’avoir le résultat. Il peut à tout moment renoncer à recevoir le résultat du test. Toutes ces précautions sont prises afin que le candidat ait le temps de réfléchir et de mesurer toutes les conséquences de cet examen puisque aucun traitement préventif n’est disponible à ce jour (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). 5.1.5. Diagnostic prénatal : Il est possible de réaliser un diagnostic prénatal (DPN) pour déterminer si l’enfant à naître est porteur de l’anomalie génétique responsable de la dystrophie FSH. Cependant, il faut que cette anomalie génétique soit clairement identifiée chez l’un des parents. Le DPN consiste à rechercher l’anomalie génétique en cause dans la dystrophie FSH en étudiant l’ADN du fœtus grâce à un prélèvement. Celui-ci est réalisé par choriocentèse ou par amniocentèse (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). Les cellules prélevées seront analysées en laboratoire pour établir le caryotype. 56 La choriocentèse ou biopsie trophoblaste consiste à prélever des cellules chorioniques, c'est-à-dire des cellules du futur placenta. L’avantage de cet examen est qu’il se pratique précocement au cours de la grossesse, généralement entre la 10ème et la 12ème semaine d’aménorrhée. Le prélèvement se fait par voie vaginale ou à travers la paroi abdominale de la mère, selon la position du placenta. L’amniocentèse consiste à prélever des cellules du liquide amniotique. Le prélèvement se fait à travers la paroi abdominale de la mère. Cet examen est proposé vers la 16ème semaine d’aménorrhée. Ces examens ont un faible risque de fausse couche. Le résultat est connu en une ou deux semaines Dans la dystrophie FSH, le DPN est un sujet délicat, car il existe des incertitudes sur la façon dont la maladie se manifeste : âge d’apparition des premières manifestations, sévérité et évolution de la pathologie, risque d’avoir un enfant plus atteint que soi-même… Des différences de point de vue peuvent exister entre les professionnels de la santé et au sein des familles concernant l'utilisation du dépistage prénatal, en particulier si le test est envisagé pour interrompre une grossesse (Lemmers, Miller, & van der Maarel, 2012). Chaque situation est toujours considérée au cas par cas, et le DPN n’est pas une procédure généralisée ni systématiquement proposée. (Urtizberea, PenissonBesnier, & Lévy, 2011). 5.1.6. Cas particulier : la dystrophie FSH infantile : Le diagnostic de la dystrophie FSH infantile est généralement fait avec retard. D’une part, à cause de sa rareté, les pédiatres ne diagnostiquent pas toujours cette pathologie. D’autre part, les manifestations cliniques sont communes à beaucoup de maladies neuromusculaires. C’est pourquoi d’autres diagnostics peuvent être avancés à tort, tel que : le syndrome de Moebius (maladie rare caractérisée par une diplégie faciale), la forme congénitale de la maladie de Steinert (maladie caractérisée par une hypotonie sévère, des séquelles psychointellectuelles), ou d’autres formes de myopathies congénitales. 57 Lorsque que le diagnostic de dystrophie FSH infantile est suspecté, le médecin fait réaliser un test génétique. Souvent, cette forme est conséquente à une mutation de novo, ou à un mosaïcisme parental. Le fragment de la région D4Z4 est généralement très court. Elle est à corréler avec la taille du segment D4Z4 et la sévérité de l’affection (Urtizberea, 2007). 5.2. Diagnostics différentiels : 5.2.1. Avant-propos : Certaines myopathies ont des manifestations cliniques qui ressemblent à celles observées dans la dystrophie musculaire FSH. C’est pourquoi, la dystrophie FSH peut être confondue avec d’autres pathologies tels que : la dystrophie musculaire des ceintures, les myopathies à corps d’inclusion, les myopathies myofibrillaires, les polymyosites, la myopathie myotonique proximale, la dystrophie myotonique de Steinert, et les myopathies congénitales. 5.2.2. La dystrophie musculaire des ceintures : La dystrophie musculaire des ceintures (DMC) se traduit par une atteinte musculaire progressive au niveau des ceintures pelviennes et scapulaires. Elle entraîne une faiblesse musculaire et des rétractions musculaires (Van der Kooi, A., 2004). C’est souvent grâce à une consultation spécialisée et au test génétique que les médecins font la différence avec la dystrophie FSH (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). 5.2.3. Les myopathies à corps d’inclusion : La dystrophie FSH peut être confondue avec certaines formes de myopathies dites à corps d’inclusion (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). Elles débutent généralement à l’âge adulte et se traduisent par une faiblesse musculaire progressive au niveau des muscles distaux, surtout au niveau des muscles des jambes et de l’avant-bras. 58 5.2.4. Les myopathies myofibrillaires : Les myopathies myofibrillaires peuvent être évoquées comme diagnostic différentiel de la dystrophie FSH (Lemmers, Miller, & van der Maarel, 2012). Les MMF sont caractérisées par des changements structuraux des myofibrilles. Les manifestations cliniques sont variables, la caractéristique majeure étant généralement une faiblesse musculaire qui progresse lentement (Budka, Gelpi, & Haberler, 2005). 5.2.5. Les polymyosites : Les polymyosites sont des maladies musculaires inflammatoires. Elles se traduisent par l'apparition d'une faiblesse musculaire touchant principalement les muscles proximaux des membres tels que les épaules, les bras, et les cuisses (Cherin, 2003). C’est pourquoi, il est possible de la confondre avec la dystrophie FSH (Lemmers, Miller, & van der Maarel, 2012). 5.2.6. La myopathie myotonique proximale : La dystrophie myotonique proximale est l’un des diagnostics différentiels de la dystrophie FSH (Lemmers, Miller, & van der Maarel, 2012). Elle est caractérisée par un déficit moteur de la ceinture scapulaire et de la ceinture pelvienne, des myalgies, parfois une atteinte faciale, une atteinte cardiaque avec des troubles du rythme et de conduction, et des tremblements (Bouhour, 2007). 5.2.7. La dystrophie myotonique de Steinert : La dystrophie FSH peut être confondue avec la dystrophie myotonique de Steinert. Elle est caractérisée par une atteinte des muscles de la main et de l’avantbras. Contrairement à la dystrophie FSH, l’atteinte musculaire est symétrique. Une insuffisance respiratoire conséquente à une atteinte des muscles respiratoires est souvent retrouvée. L’atteinte cardiaque est fréquente (Diaz, 1998). 59 5.2.8. Les myopathies congénitales : Les myopathies congénitales sont régulièrement évoquées comme un diagnostic différentiel de la dystrophie FSH à début précoce. Les patients présentent souvent une hypotonie précoce et prononcée, un déficit musculaire proximal, un visage atone, ainsi que des scolioses et pieds creux (Diaz, 1998). 60 6. Prise en charge 6.1. Avant-propos : La dystrophie FSH est une maladie très complexe au niveau des mécanismes mis en jeu, de la variabilité des symptômes et de son évolution. C’est pourquoi, il est difficile de décrire une prise en charge standard. Selon Bernard Coic (2012), elle doit être personnalisée, car chaque cas de dystrophie FSH est différent, et les conditions de vie sont variables d’un individu à un autre. Les options de prise en charge sont multiples : médicaments, kinésithérapie, appareillages, aides techniques, chirurgie, prise en charge auditive, ophtalmologique, respiratoire et psychologique. Les malades n’ont pas tous les mêmes besoins. De plus, ils ne répondent pas tous de la même manière aux divers traitements. Selon Guillaume Bassez « l’important est que les malades bénéficient de la prise en charge adéquate au bon moment » (Dupuy-Maury, 2012). C’est pourquoi, la prise en charge est symptomatique, et adaptée aux besoins de chaque patient. Un traitement précoce permet de prévenir les complications et vise à apporter la meilleure insertion possible du patient dans son cadre de vie. La prise en charge doit être réalisée par une équipe pluridisciplinaire, sous la direction d’un médecin coordinateur entouré de différents spécialistes (Gautheron, 2002). 6.2. Prévention et surveillance : 6.2.1. Bilans répétés : La surveillance des patients atteints de dystrophie FSH est annuelle et basée sur des bilans répétés. Ceux-ci sont réalisés de une à plusieurs fois par an selon l’évolution de la dystrophie FSH. (Diaz, 1998). 61 Elle comprend un examen physique qui a pour buts d’évaluer les déficits musculaires ainsi que leur évolution, et déceler l’existence d’éventuelles rétractions musculaires. De plus, les bilans musculaires permettent d’évaluer la force musculaire. Ils déterminent la balance agonisteantagoniste, l’ampleur du déficit musculaire, le rapport proximal-distal et l’asymétrie de l’atteinte. L’appareil d’isocinétisme peut être utilisé comme matériel d’évaluation. Ces principaux objectifs sont : d’évaluer la force musculaire, les ratios agonistes-antagonistes, le potentiel de fatigabilité musculaire et l’efficacité du traitement (Fournier-Mehouas & al., 2001). Chez les patients atteints de dystrophie FSH, les bilans ostéo-articulaires permettent de rechercher d’éventuelles déformations ostéo-articulaires tels que : l’hyperlordose lombaire, la scoliose… Les bilans cardio-respiratoires permettent de rechercher ou de surveiller les troubles des systèmes cardio-vasculaire et respiratoire. Ils sont réalisés tous les 2-3 ans. Cependant, si une anomalie est détectée, ils seront plus fréquents. Les bilans auditifs et ophtalmologiques permettent de rechercher ou de surveiller les atteintes auditives et visuelles. Ils sont réalisés lorsque le patient présente une gêne fonctionnelle. Concernant les formes infantiles sévères de dystrophie FSH, le suivi est plus fréquent, de 2 à 3 fois par an, et les bilans plus approfondis. La recherche d’un trouble de l’audition est systématique et réalisée dès l’annonce du diagnostic. Les bilans musculaires, orthopédiques et respiratoires sont réalisés tous les 6 mois minimum. Un électroencéphalogramme est effectué si une épilepsie est suspectée. De plus, des tests neuropsychologiques sont utilisés pour juger si la maladie a un retentissement sur les capacités intellectuelles (Urtizberea, 2007). 6.2.2. Obésité : La prévention de l’obésité et la lutte contre le surpoids est essentielle. Elle permet d’éviter la surcharge et l’épuisement musculaire, ainsi que de préserver son autonomie (Diaz, 1998). N. Pellegrini, médecin rééducateur, a observé que les personnes atteintes de dystrophie FSH peuvent perdre la marche à cause d’une surcharge pondérale (Dupuy-Maury, 2013). 62 Le surpoids survient d’autant plus facilement que les personnes se mobilisent peu. C’est pourquoi, il est important de lutter contre l’immobilisation. Il est conseillé de faire un peu d’exercice physique à doses modérées. De plus, certaines personnes atteintes de dystrophie FSH compensent leur pathologie par des apports alimentaires mal équilibrés ou exagérés. Des conseils diététiques et un suivi par un spécialiste sont conseillés (Diaz, 1998). 6.3. Traitement médicamenteux : 6.3.1. Appareil locomoteur : Il n’y a pas de traitement médicamenteux de fond. Les antalgiques sont fréquemment utilisés en cas de douleurs ostéo-articulaires, et tendineuses. Cependant, ils ont généralement peu d’effets sur les douleurs musculaires (Diaz, 1998). Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont aussi utilisés chez ces patients (Tawil, 2008). 6.3.2. Appareil oculaire : Les larmes artificielles ou les gels ophtalmiques sont utilisés en cas d’irritations oculaires répétées (Urtizberea, 2007). Ils permettent d’éviter les complications dues à l’occlusion incomplète des paupières. 6.3.3. Aspect psychologique : Les personnes atteintes de dystrophie FSH ont tendance à être plus déprimées et plus anxieuses que les sujets sains (Bungener, Jouvent, & Delaporte, 1998). Les antidépresseurs sont utilisés en cas de dépressions importantes. 6.3.4. Contre-indications : En général, il n’y a pas de contre-indications médicamenteuses particulières chez les patients atteints de dystrophie FSH (Diaz, 1998). 63 6.4. Prise en charge orthopédique : 6.4.1. Prise en charge kinésithérapique : 6.4.1.1. Avant-propos : Selon Jean-Claude Riou, kinésithérapeute conseil de L’AFM, la gravité de l’atteinte motrice et fonctionnelle est très variable d’un patient à l’autre. C’est pourquoi, il n’y a pas de bilans et de traitements spécifiques pour les personnes atteintes de dystrophie FSH. Le kinésithérapeute réalise des bilans individualisés. En fonction des résultats, il mettra en place un programme de traitement. Une évaluation régulière permet d’ajuster au mieux les orientations thérapeutiques. Le traitement est symptomatique. Il vise essentiellement à préserver l’autonomie du patient le plus longtemps possible, mais aussi à prévenir les déformations orthopédiques, les rétractions musculaires, les enraidissements, les conséquences fonctionnelles et respiratoires liées à l’évolution de la pathologie et à soulager les douleurs (Fort, 2001 ; Giraudeau, 2011). Son but n’est pas de redonner de la force musculaire au patient. La prise en charge kinésithérapique sera régulière, de 1 à 2 séances par semaine, en fonction des besoins, de l’évolution de la pathologie, de ses conséquences et du mode de vie du patient. Les séances ne doivent pas induire de douleurs, de fatigue, ou de stress. Elles peuvent être réalisées à domicile ou au cabinet du kinésithérapeute (Urtizberea, 2007). Une enquête de l’AFM (1995) a observé que : - 70% des patients atteints de dystrophie FSH sont suivis par des kinésithérapeutes, dont 63% tout au long de l’année. - 84% des patients sont satisfaits de leur prise en charge, et constatent des effets bénéfiques au niveau psychologique (amélioration de leur bien-être, du moral), et physique (amélioration de la mobilité articulaire, du tonus, effets antalgiques, diminution de la fatigue…) - 11% des patients utilisent un dispositif de compensation (attèle…). - 37% des patients ont une activité professionnelle, 30% ont eu recours à une reconversion professionnelle. 64 6.4.1.2. Anamnèse : L’anamnèse retrace l'historique de la ou des plaintes actuelles du patient, les antécédents médicaux, les résultats des différentes explorations déjà réalisées et les traitements entrepris. Les différentes questions que le kinésithérapeute devra poser au patient sont : - Quel est votre principal problème ? - Avez-vous des douleurs ? Localisation ? Constante ou inconstante ? Variable ? Profonde ? Type ? Depuis quand ? Comment se sont passés les derniers jours ? Suite à quoi est-elle apparue ? Ce qui l’aggrave et la soulage ? Son évolution au cours de la journée ? - Ressentez-vous une asymétrie de force musculaire ? Une fatigabilité ? Y-at-il des gestes qui vous gênent dans vos activités ? Lesquels ? Depuis quand ? Avez-vous des difficultés pour vous coiffer, pour vous occuper de votre visage, pour atteindre des objets en hauteur, est-ce-que vous utilisez votre bras, pour maintenir l’autre en hauteur ? Avez-vous des difficultés pour vous relever du siège, se redresser, utiliser les escaliers, marcher, courir ? Faites-vous couramment des chutes ? - Avez-vous des troubles respiratoires ? Des troubles du sommeil, des maux de tête matinaux, des hyper-somnolences diurnes qui seraient signes d’hypercapnie ? Êtes-vous encombré ? Utilisez-vous une aide ventilatoire la nuit ? - Avez-vous des attitudes vicieuses ou déformations squelettiques (scoliose ou attitude scoliotique ? hyperlordose lombaire ? pectus escavatum ?). - Avez-vous des troubles de l’audition ? Utilisez-vous une aide auditive ? - Avez-vous des troubles de la vision ? Avez-vous les yeux irrités et/ou secs ? Dormez-vous les yeux ouverts ? Avez-vous des difficultés pour fermer les yeux ? Etes-vous atteint d’une maladie oculaire ? Avez-vous subi une chirurgie de l’œil ? - Avez-vous des troubles du rythme cardiaque ? Une maladie cardiaque a-telle été diagnostiquée ? - Avez-vous des troubles au cours de l’alimentation ? 65 - Depuis combien de temps avez-vous été diagnostiqué ? Avez-vous une forme infantile de dystrophie FSH ? Est-ce que votre pathologie évolue rapidement ? Est-ce que les atteintes musculaires arrivent de manière progressive ou par poussées ? Comment les symptômes ont t-ils évoluées ? - Exercez-vous une profession ? Quels sont vos loisirs ? - Utilisez-vous des appareillages, aides techniques ? - Avez-vous réalisé des examens médicaux, imageries médicales ? - Antécédents familiaux : y-a-t-il d’autres membres de votre famille atteints par cette pathologie? - Antécédents médicaux, traitements médicaux en cours ? - Autres traitements en cours ? - Antécédents chirurgicaux ? 6.4.1.3. Bilans : 6.4.1.3.1. Evaluation de la douleur : Lors de la séance de kinésithérapie, il convient de poser la question de la présence ou non d’une douleur, et de préciser son intensité avant la séance. Si cette douleur devient trop intense au cours de la prise en charge, la séance devra être interrompue. Il convient également de demander si la séance a été source de douleurs, à quelle intensité, et de proposer si nécessaire des mesures antalgiques pour les séances suivantes. L’évaluation de la douleur est une étape complexe qui permet de préciser la nécessité d’un traitement antalgique (Delorme, 2001). Les douleurs peuvent être mesurées par l’EVA (échelle visuelle analogique), l’EVS (échelle verbale simple), l’EN (échelle numérique) (Annexe 1). 66 6.4.1.3.2. Examen statique : L’examen statique permet d’apprécier la morphologie générale, les anomalies de courbures, ainsi que de vérifier l’efficacité du traitement. Il est important car une attitude posturale perturbée s’accompagne de douleurs et de dysfonctions récidivantes (D’Haeyere, 2011). On observe de bas en haut, la symétrie des repères anatomiques de dos, de profil, de face, et de dessus. Chez les patients atteints de dystrophie FSH, on recherche principalement des signes d’attitudes vicieuses et de déformations squelettiques : une bascule du bassin, une inégalité des membres inférieurs, une scoliose ou attitude scoliotique, une hyperlordose lombaire, un abdomen proéminent, un pectus excavatum. 6.4.1.3.3. Bilan articulaire : Le bilan articulaire permet de quantifier les amplitudes articulaires, les déformations orthopédiques, d’observer les phénomènes douloureux et les sensations de fin de course. Associée aux autres bilans, il aide à établir un diagnostic, à mettre en œuvre un traitement adapté, de juger des progrès accomplis (Royer & Cecconello, 2004). La mesure des amplitudes articulaires peut se faire par valeurs angulaires à l’aide d’un goniomètre. La réduction des amplitudes peut être le témoin de douleurs, de perturbations articulaires, de rétractions musculaires. Leurs cotations régulières permettent d’observer l’évolution de la pathologie, de contrôler l’efficacité de la kinésithérapie (Thémar-Noël, 2001). Chez les sujets atteints de dystrophie FSH, il faudra s’intéresser en particulier aux amplitudes de la ceinture scapulaire. En effet, ces muscles sont souvent touchés à un stade précoce de la maladie. Lorsque le déficit musculaire des fixateurs de la scapula est trop important, l’antépulsion et l’abduction au-dessus de l’horizontale deviennent impossibles. Les autres articulations atteintes par la maladie devront aussi être quantifiées. 67 6.4.1.3.4. Bilan musculaire : L’examen palpatoire permet d’évaluer la consistance musculaire. De plus, un bilan musculaire est indispensable chez les patients atteints d’une maladie neuromusculaire. Il permet d’analyser la force musculaire, l’aspect trophique et le volume musculaire. Le bilan musculaire a un intérêt diagnostic. En effet, la topographie du déficit moteur est variable selon la maladie en cause et est caractéristique dans certaines affections (déficit proximal-distal symétriqueasymétrique). De plus, il est utile lors du suivi des patients, il permet d’évaluer l’évolution de la pathologie et l’efficacité du traitement (Fournier-Mehouas & al., 2001). Un article (Fournier-Mehouas & al., 2001) reprend différents outils d’évaluation qui pourraient être utilisés : - L’appareil d’isocinétisme : peut être utilisé comme matériel d’évaluation. Ces principaux objectifs sont : d’évaluer la force musculaire, les ratios agonistes et antagonistes, le potentiel de fatigabilité musculaire et l’efficacité du traitement. C’est un moyen sensible de quantification du déficit musculaire. Il est très reproductible intra et inter-examinateurs. Cependant, son utilisation est difficile chez les patients présentant un déficit majeur, car le sujet doit présenter une force suffisante pour mobiliser le dispositif, et son articulation durant toute la durée du mouvement - La mesure de la force pouce-index : le patient presse le dynamomètre avec la pince pouce-index, trois fois de suite et de chaque côté. Elle permet de mesurer l’évolution, de comparer la valeur par rapport à un sujet normal en fonction de l’âge du patient. - Les appareils de mesures isométriques : permettent de mesurer la force musculaire volontaire et l’évolution de celle-ci chez le patient. Cette technique présente un inconvénient : la mesure est statique et n’est pas directement liée à la fonction. 6.4.1.3.5. Evaluation des capacités motrices : La mesure de fonction motrice (MFM) est une échelle quantitative qui permet de mesurer les capacités fonctionnelles motrices chez une personne atteinte d'une maladie neuromusculaire (Bérard, & al, 2005). Elle a été validée en 68 2004 pour un grand nombre d’affections : la dystrophie de Duchenne, la myopathie de Becker, la dystrophie FSH, la myopathie des ceintures, la dystrophie myotonique, l’amyotrophie spinale infantile, les myopathies congénitales, la dystrophie musculaire congénitale, les neuropathies héréditaires. Elle a été utilisée chez les patients âgés de 6 à 62 ans (Pélissier & al., 2009). Elle permet : - d’évaluer la posture et les mouvements actifs de la tête, du tronc, des membres supérieurs et inférieurs, - de préciser la symptomatologie et l’évolution de ces maladies, - d’objectiver le retentissement des mesures thérapeutiques, - d’orienter les mesures rééducatives, - de faciliter la communication entre les différents acteurs de la prise en charge, - de sélectionner des groupes homogènes de patients en vue d'essais thérapeutiques. Elle comporte 32 items, répartis en 3 domaines8 (station debout et transferts ; motricité axiale et proximale ; motricité distale) (Annexe 2). Le score de Hammersmith (ou Hammersmith motor ability score) permet d’évaluer les capacités motrices des membres inférieurs. Il est applicable chez l’enfant à partir de 5 ans (Pélissier & al., 2009). Il est constitué de vingt mouvements réalisés successivement qui sont cotés de 0 à 2. Le score maximal étant de 40 (Annexe 3). 6.4.1.3.6. Bilans respiratoires : Il est important de surveiller l’atteinte respiratoire, car elle passe souvent inaperçue chez les patients atteints de dystrophie FSH. Il faut rechercher les signes cliniques de l’insuffisance respiratoire. Le patient ou son entourage doivent signaler l’existence d’une fatigabilité, d’infections respiratoires, de ronflements, de troubles du sommeil, de céphalées matinales, des difficultés de concentration, ou de somnolences diurnes. Exemple : Item 1 (domaine2) patient en couché dorsal, tête dans l’axe : maintenir la tête dans l’axe puis la tourner complètement d’un côté puis de l’autre. 8 69 L’auscultation permet de rechercher des signes d’encombrement bronchique, et d’asymétrie de murmure vésiculaire. De plus, il faut être attentif aux déformations rachidiennes, car elles peuvent engendrer une insuffisance respiratoire. L’hyperlordose lombaire peut perturber la synergie abdomino-diaphragmatique (Delaubier, 2001). Le kinésithérapeute pourra réaliser une EFR pour permettre de diagnostiquer ou de suivre l’évolution de l’atteinte respiratoire (Cf : 5.1.3.4). Chez les personnes atteintes de dystrophie FSH, un masque facial peut s’avérer utile afin d’éviter les fuites d’air qui pourraient fausser les résultats (Société de Pneumologie, 2011). C’est pourquoi, le thérapeute doit être attentif à cet aspect lors de la réalisation du test. 6.4.1.3.7. Mesure de la qualité de vie : Il est important de connaitre la perception subjective que la personne atteinte d’une maladie neuromusculaire a d’elle-même, de sa situation actuelle, de son handicap, de ses attentes et de ses buts de vie. Les questionnaires de qualité de vie permettent d’évaluer les aspects positifs et négatifs d’un traitement, d’évaluer l’efficacité et la qualité des soins, de montrer en quoi une maladie peut porter atteinte au bien-être subjectif, de mieux comprendre comment les personnes concernées évaluent leur santé à un moment donné, et de mieux orienter les soins (Benony, 2001). La qualité de vie peut être mesurée par : - - Le profil de qualité de vie subjectif (PQVS) : c’est un auto-questionnaire évaluant la qualité de vie subjective à travers 29 items. Il est validé, fiable, et sensible. Le WHOQOL-100 : permet d’évaluer la qualité de vie subjective. Il comporte 100 questions. Une version brève, le WHOQOL-26, comportant 26 questions a été validée. 6.4.1.3.8. Evaluation de l’équilibre, des transferts, et de la marche : Le kinésithérapeute va interroger le patient pour recueillir des informations sur la quantité et la qualité de la marche. Puis, il va observer la station debout, les transferts, et la marche du patient (Bergeau, 2004). 70 L’équilibre, les transferts, et la marche peuvent être mesurés à l’aide de tests cliniques : - Get up and go test : est un test validé qui évalue les transferts assis, debout, la marche, et les changements de direction du patient. Le sujet est assis sur un siège avec accoudoirs, il doit parcourir 3 mètres, faire demitour sans se tenir au mur puis retourner vers la chaise et s’assoir. La qualité de marche et la stabilité du patient sont cotées de 1 à 5. Un score supérieur à 2 traduit un risque important de chute. Si la durée du test est supérieure à 30 secondes, un test de Tinetti est nécessaire. - Le test de Tinetti : permet d’évaluer l’équilibre et la marche chez la personne âgée. Le score total est de 28 (16 points pour l’équilibre, 12 points pour la marche). Le risque de chute est très élevé si le score est inférieur à 20. De plus, l’équilibre peut être évalué sur des plateformes de forces (ex : SATEL). Elles permettent d’évaluer l’équilibre dans des conditions statiques et dynamiques, évaluer les adaptations posturales, de rééduquer les patients atteints de troubles de l’équilibre, et d’observer l’évolution du traitement. La marche peut être analysée grâce au locomètre. Il permet d’effectuer le bilan de la fonction locomotrice d’un sujet. 6.4.1.4. Traitement : 6.4.1.4.1 Avant-propos : La gravité de l’atteinte motrice et fonctionnelle, ainsi que l’évolution de la pathologie sont très variable d’un individu à l’autre. C’est pourquoi, il est difficile de décrire une prise en charge standard. De plus, elle doit être adaptée aux besoins de chaque patient. Le traitement est symptomatique et régulier. Son but est de préserver l’autonomie du patient le plus longtemps possible, de prévenir les déformations orthopédiques, les rétractions musculaires, les enraidissements, les conséquences fonctionnelles et respiratoires liée à l’évolution de la pathologie et à soulager les douleurs des patients (Fort, 2001 ; Giraudeau, 2011) 71 Le kinésithérapeute sera attentif aux besoins du patient, à l’évolution de la pathologie, de ses conséquences et du mode de vie du patient. De plus, les séances ne doivent pas induire de douleurs, de fatigue9, ou de stress. Les options de prise en charge kinésithérapique étant multiples, ce tableau permettra de synthétiser les objectifs, et les techniques de prise en charge, en fonction du degré de la pathologie. Prise en charge Précoce : Lorsque les atteintes sont encore légères, affectant principalement les muscles du visage et les muscles de la région scapulaire. Objectifs Techniques utilisées - Antalgique. - Massages, physiothérapie. - Lutter contre l’atrophie musculaire, entretien articulaire et musculaire. - Mobilisations actives ; ou activo-passives (si trop fatigiant) ; renforcement musculaire (endurance, exercices aérobie). - Diminuer, éviter tensions musculaires excessives. Lutter contre les attitudes néfastes. - Rééducation posturale. - Lutter contre les contractures musculaires. - Thérapie manuelle. - Stabiliser et rééquilibrer les articulations. - Stabiliser les articulations par un renforcement musculaire spécifique. La fatigue est un symptôme majeur dans ces maladies neuromusculaires (Kalkman & al., 2005). Associée aux autres atteintes fonctionnelles, elle entraîne une altération de la qualité de vie. C’est pourquoi, elle représente un problème à la fois clinique et social à prendre en compte dans la prise en charge des maladies neuromusculaires. 9 72 Moyenne : Lorsque les atteintes s’aggravent de plus en plus, affectant petit à petit les muscles des membres inférieurs. - Antalgique. - Massages, physiothérapie. - Entretenir la mobilité articulaire, suppléer l’insuffisance musculaire, lutter contre l’atrophie musculaire. - Mobilisations actives, et activo-passives, balnéothérapie. - Prévenir les risques de chutes, conserver la marche, préserver son autonomie. - Travail de l’équilibre, de la marche - Diminuer, éviter tensions musculaires excessives. Lutter contre les attitudes néfastes. Tardive : Lorsque le patient est en fauteuil roulant. - Rééducation posturale. - Lutter contre les contractures musculaires. - Thérapie manuelle. - Stabiliser et rééquilibrer les articulations. - Renforcement spécifique. - Antalgique. - Massages. Physiothérapie. - Entretenir la mobilité articulaire, prévenir les limitations articulaires et les rétractions, lutter contre les stases. - Mobilisations passives, et activo-passives, - Améliorer les amplitudes. - Etirements. - Entretien musculaire. - Electrostimulation. - Prévenir l’installation des troubles orthopédiques. - Verticalisation. - Améliorer la ventilation, distribution. - Travail respiratoire. - Rechercher des signes de trouble de la déglutition. - Adapter le temps buccal, la mastication 73 Ce tableau donne une idée du traitement qui pourrait être proposé à un certain moment de la maladie. Cependant, la priorité est de toujours individualiser la prise en charge. Il faut garder à l’esprit que chaque patient est unique tant au niveau de ses atteintes, de l’évolution de la maladie et de son mode de vie. Les points suivants retracent plus en détails les techniques pouvant être utilisées et leurs objectifs. 6.4.1.4.2. Massages : Concernant les maladies neuromusculaires, les techniques de massages doivent être douces. Elles ne doivent pas être douloureuses, c’est pourquoi, il est important de surveiller les réactions du patient (Paindestre & Mahé, 2001). Les manœuvres pouvant être utilisées sont : l’effleurage, la pression glissée, les vibrations, qui sont des techniques myorelaxante, défatigante. Le pétrissage peut être utilisé, mais avec précautions, de manière douce. Le massage agit sur la douleur, la souplesse, l’échauffement. Ses effets sont sédatifs et relaxants. Il entretient les téguments et le tissu conjonctif et favorise les échanges sanguins. De plus, il a des effets thermiques par vasodilatation locale. Il peut être utilisé en tant que traitement préventif et curatif. 6.4.1.4.3. Mobilisations : Les mobilisations passives sont importantes, dès que le diagnostic est posé. Elles doivent respecter les axes et plans physiologiques, et ne doivent pas provoquer de douleurs (David, & Pierrot, 2001). Elles auront pour buts d’entretenir la mobilité articulaire, d’étirer la capsule, les ligaments, les tendons et les muscles. Elles préviennent les limitations articulaires, combattent la tendance à la rétraction musculaire, maintiennent la nutrition, luttent contre les stases sanguines et lymphatiques. Les étirements lents, passifs provoquent un relâchement musculaire, afin d’augmenter l’amplitude articulaire. Ils sont indiqués pour lutter contre les rétractions musculaires (David, & Pierrot, 2001). Les mobilisations activo-passives permettent de suppléer l’insuffisance musculaire et de redonner confiance aux patients. 74 Les mobilisations actives auront pour buts de lutter contre l’atrophie musculaire, d’entretenir la mobilité articulaire et de maintenir la nutrition tissulaire (cf : 6.4.1.4.5 : Entraînement physique). Remarque : il faut adapter les mobilisations selon le ressenti du patient, car cellesci ne doivent pas provoquer de fatigue et de douleurs. Un entraînement trop intensif pourrait créer des lésions musculaires. Le kinésithérapeute privilégiera des exercices d’intensité modérée (il faut éviter de réaliser des efforts inutiles et des exercices intenses). Si cela fatigue trop le patient, le thérapeute peut opter pour des mobilisations activo-passives afin de suppléer à la déficience musculaire. En fonction de l’avancée de la pathologie et des capacités du patient, on choisira le type de mobilisations le plus adéquat. 6.4.1.4.4. Physiothérapie : La balnéothérapie chaude (au dessus de 35°C) combine les effets de l’immersion et de la chaleur (Paindestre, Mahé, 2001). - L’immersion dans l’eau procure une assistance au déplacement par la diminution du poids de tout ou d’une partie du corps. Il suffit donc de quelques unités motrices pour générer un mouvement. De plus, elle permet un balayage articulaire dans toute l’amplitude disponible, et d’agir contre l’enraidissement péri-capsulaire, intra et périmusculaire. Selon B. Coic (2012), la balnéothérapie peut être utilisée comme technique de renforcement musculaire, elle permet d’économiser de l’énergie, et procure un état de détente. - Quant à la chaleur, elle améliore l’extensibilité des muscles, facilitant ainsi les manœuvres passives de conservation ou de récupération des amplitudes articulaires. Les séances durent 20 à 30 minutes, et sont composées d’un échauffement, de travail passif, de travail actif et de détente. Il faut dépister d’éventuels signes de malaise, de fatigue, de pâleur, de tachycardie inhabituelle. Ses indications sont très larges (Kemoun & al., 2006). Elle a pour effets : - une diminution des douleurs, notamment les douleurs chroniques, - un relâchement musculaire, une diminution des contractures, 75 - un gain de mobilité articulaire, une facilitation des mouvements, une détente et relaxation, des effets circulatoires : améliorer l’évacuation des déchets métaboliques, une diminution des contraintes articulaires par un travail en décharge, un renforcement musculaire. L'entraînement par électrostimulation musculaire : est un traitement bien toléré et efficace dans la dystrophie FSH. La technique consiste à stimuler électriquement un groupe de muscles. Une étude (Colson & al, 2010) prospective, non contrôlée, a rapporté les effets et la tolérance de l'électrostimulation neuromusculaire chez 9 patients atteints de dystrophie FSH. Les patients suivaient un traitement de 5 séances de 20 minutes par semaine pendant 5 mois. La force musculaire des épaules et des extenseurs des genoux a été significativement améliorée ainsi que la distance parcourue lors du test de marche de 6 minutes. La majorité des patients ont ressenti après la période d'entraînement, une amélioration dans leurs activités de la vie journalières. Dans cet article, les effets du traitement par électrostimulation musculaire ne sont pas comparés à un groupe contrôle. Une étude contrôlée randomisée permettrait d’augmenter le niveau de preuve de cet article. Les courants périodiques de basses fréquences : (Paindestre & Mahé, 2001) le TENS conventionnel est utilisé sur le territoire douloureux pour son effet antalgique à une fréquence de 50 à 100 Hz. Son effet ne se prolonge pas dans le temps. L’Al-TENS, de 1 à 5 Hz, permet de déclencher une contraction. Ses effets sont excitomoteurs, mais aussi antalgiques par libération d’endorphines. Son effet se prolonge 30 minutes après la séance. D’autres modalités peuvent être utilisées, tels que les ondes radars qui ont un effet thermique ; les infrarouges provoquant un échauffement local ; les ondes courtes qui échauffent les muscles et augmentent la vascularisation ; les ultrasons qui ont un effet thermique, antalgiques, et de micromassages ; l’ionisation permettant de faire traverser des substances pharmacologiques (Paindestre & Mahé, 2001). 76 6.4.1.4.5. Entraînement physique : Selon B. Coic (2012), spécialiste en médecine physique et réadaptation, l’exercice est nécessaire à l’entretien de la trophicité. Chez les patients atteint de dystrophie FSH, il est important de renforcer, tout en évitant d’épuiser. En effet, le renforcement musculaire comporte plusieurs risques tels que : la fatigue et les douleurs. C’est pourquoi, le patient doit éviter de réaliser des efforts inutiles et des exercices intenses. L’entrainement physique dépend de la personnalité du patient et de l’évolution de sa pathologie. Il est important que les patients atteints de dystrophie FSH pratiquent de l’exercice physique. L’objectif d’une thérapie par l’entraînement physique consiste à modifier le mode de vie, et y introduire progressivement et de façon durable l’activité physique (Verney & Féasson, 2009). - Les programmes d’entraînement en endurance (exemple : bicyclette) semblent être mieux tolérés, ils n’aggravent pas les symptômes, et génèrent des adaptations bénéfiques (cardio-respiratoire, musculaire). - Les programmes d’entraînement en musculation ont pour but principal d’améliorer la force, et si possible d’augmenter la masse musculaire. Ce type d’entraînement ne semble pas nocif pour le tissu musculaire. Cependant, les améliorations fonctionnelles ne sont pas systématiques. Il doit être proposé à un stade précoce, ou pour les groupes musculaires les plus préservés. Il est préférable de privilégier les programmes d’entraînement en endurance aux programmes d’entraînement en musculation. De plus, l’entretien musculaire a des conséquences bénéfiques au niveau cardio-vasculaire, respiratoire, osseux, musculaire, et sur la désadaptation musculaire. Une étude (Olsen & al., 2005) a permis de démontrer l’efficacité et la bonne tolérance d'un entraînement de type aérobie chez des patients atteints de dystrophie FSH pendant 12 semaines. Les auteurs ont conclu que l'entraînement aérobie est une méthode sûre pour augmenter les performances chez les patients atteints de FSH. Bien que l’entraînement aérobie soit une méthode plus adéquate chez les patients atteints de dystrophie FSH, il faut rester prudent, car l’exercice physique ne doit pas engendrer de fatigue et de douleurs. 77 Une étude (Van der Kooi & al., 2005) a conclu que l’entraînement physique de type aérobie et d’intensité modérée n’est pas néfaste pour les patients atteints de dystrophie FSH. L’entraînement physique est nécessaire pour entretenir la qualité musculaire. Cependant, il ne faut pas épuiser le patient. C’est pourquoi, il est préférable de réaliser des exercices d’intensité modérée. Depuis 2010, une étude menée par le myologue Léonard Féasson (Haquin, 2011) est en cours. Elle a pour objectif de démontrer les intérêts de l’entraînement physique chez 30 personnes atteintes de dystrophie FSH. L’étude est randomisée, un tirage au sort détermine quel participant suit le programme d'entraînement de 24 semaines et qui ne le suit pas (groupe contrôle). L’entraînement consiste à suivre un programme d’activité physique modérée, comportant 3 séances hebdomadaires de 35 minutes, sur bicyclette ergométrique, en combinant travail de renforcement musculaire et endurance. Les participants font l’objet de nombreuses évaluations au cours du protocole : tests de force, de fatigabilité, d’endurance, biopsies du quadriceps, d’IRM. 6.4.1.4.6. Verticalisation : La verticalisation doit être proposée dès que le temps passé debout n’est plus satisfaisant et avant l’installation des troubles orthopédiques. Elle est importante chez les patients en fauteuil roulant. Les objectifs de la verticalisation sont (Cornu, 2001 ; Fort, 2001): - Préserver le développement squelettique, préserver l’alignement. - Harmonisation de la croissance du bassin et des membres inférieurs. - Prévention des déformations des membres inférieurs : le flexum de hanches et de genoux. - Amélioration de la fonction respiratoire. - Prévention de l’ostéoporose, réduction de la décalcification osseuse. - Digestion facilitée, amélioration du transit intestinal et urinaire. - Prévention des risques d’escarres. - Diminution des contractures musculaires. La verticalisation ne doit pas induire ou aggraver un trouble orthopédique. Il est indispensable de personnaliser le matériel pour assurer le confort. 78 6.4.1.4.7. Kinésithérapie respiratoire : Moins de 5% des personnes atteintes de dystrophie FSH ont des difficultés respiratoires (Urtizberea, Pénisson-Besnier, & Lévy, 2011). Cette atteinte passe souvent inaperçue. C’est pourquoi, il faut y être attentif, en particulier si les patients présentent des signes s’insuffisance respiratoire (fatigabilité, infections respiratoires, ronflements, troubles du sommeil, céphalées matinales, difficultés de concentration, ou somnolences diurnes) ou des déformations rachidiennes. Stübgen et Schultz (2009) ont observé qu’il n’est pas nécessaire de surveiller régulièrement la fonction ventilatoire chez les patients ambulants ne présentant aucun signe d’insuffisance respiratoire. Jean-Claude Riou, kinésithérapeute, conseille des exercices de gymnastique respiratoire, et si nécessaire d’aider au désencombrement bronchique. Les différents buts des exercices gymniques respiratoires sont de détendre, assouplir, corriger, amplifier, renforcer, améliorer la ventilation, la distribution et l’homogénéisation de l’air. 6.4.1.4.8. Rééducation de l’équilibre et de la marche : La faiblesse musculaire des membres inférieurs et de la sangle abdominale provoque des altérations de la posture, de la marche, et de l’équilibre, augmentant ainsi le risque de chutes. Une étude (Aprile & al, 2012) a montré que les patients atteints de dystrophie FSH présentaient un équilibre statique (posture) et dynamique (à la marche) anormal. Ils utilisaient des stratégies de compensations pour éviter de tomber. Le kinésithérapeute va rééduquer l’équilibre et la marche, si des troubles ont été mis en évidence lors de l’évaluation. La prise en charge des troubles de l’équilibre vise à améliorer la stabilité du sujet pour toutes ses activités et prévenir les chutes. Le thérapeute pourra travailler l’équilibre grâce à différents exercices : - Exercices avec déséquilibres intrinsèques : élever les membres supérieurs, mobiliser la tête, le tronc par exemple … - Exercices avec déséquilibres extrinsèques : poussées au niveau thoracique, utilisation de plans instables (coussin Airex, planche de Freeman)… 79 L’équilibre peut aussi être rééduqué sur les plateformes de forces (Ex : SATEL). Concernant la marche, elle doit être conservée le plus longtemps possible pour que le patient puisse garder son autonomie. Une étude (Di Marco & al, 2013) a montré qu’une rééducation de l’équilibre, de la marche, et de la force musculaire chez 24 patients atteints de dystrophie FSH améliore les paramètres de marche et d’équilibre. Chaque patient a bénéficié de 20 séances avec de la kinésithérapie (renforcement musculaire, équilibre sur plateau instable, endurance), balnéothérapie et ergothérapie. Aucun gain n’est observé sur la vitesse de marche rapide et la force musculaire du quadriceps dominant. 6.4.1.5 Contracture reflexe et thérapie manuelle : 6.4.1.5.1 Avant-propos : D’une part, nous allons définir les différentes contractures musculaires que nous pouvons rencontrer. D’autre part, nous expliquerons, la relation entre la contracture antalgique et la Kinésithérapie Analytique. Enfin, nous justifierons l’approche que nous pourrions entreprendre lors d’une prise en charge. 6.4.1.5.2 Contractures musculaires : Serratrice définit la contracture musculaire comme « un raccourcissement involontaire, transitoire ou durable, douloureux ou non, d’un ou plusieurs muscles striés » (Serratrice, 2003, p1). Elles sont classées en trois groupes distincts en fonction de leur physiopathologie : - Les contractures antalgiques : elles sont secondaires à la douleur qu’elles compensent. En effet, les muscles se contractent pour créer une attitude posturale qui diminue la douleur. Le plus souvent, elles résultent d’une lésion articulaire. Lorsque l’articulation lésée est relâchée, la contracture s’atténue ou disparait. A l’inverse, toute action mécanique exercée sur l’articulation va provoquer ou exacerber la contracture. 80 - Les contractures algiques : elles sont à l’origine de la douleur. Le point de départ de la contracture est lié au muscle ou a une activité anormale du système nerveux central. - Les contractures analgiques : il y a absence de douleur. Elles réunissent deux formes de contractures. La contracture myostatique : elle correspond à la rétraction musculaire. La contracture myotatique : elle est caractéristique de la spasticité et de la rigidité. 6.4.1.5.3 Contracture antalgique et Kinésithérapie Analytique : Nous allons nous intéresser à la contracture antalgique. La Kinésithérapie Analytique se base sur la même théorie. Selon le Concept Sohier (2000), l’essentiel des états pathomécaniques des articulations provient des forces prédominantes que la fonction engendre. Ces incartades mécaniques perturbent le proprioceptif et déterminent la réponse musculaire, suivi par la contracture indolore des muscles stabilisateurs de l’articulation. Lorsque le thérapeute rétablit la congruence articulaire, il s’en suit une décontracture musculaire. C’est pourquoi, selon Sohier « il faut soigner les contractures musculaires, en éliminant les bombardements nociceptifs qui proviennent de l’interligne articulaire. Après viennent les soins aux muscles. Une chronologie inverse est inadéquate » (Sohier, 2000, p13). Dans le cas de la dystrophie FSH : Chez les personnes atteintes de dystrophie FSH, la faiblesse de certains muscles peut diminuer la stabilité de l’articulation. Les forces et la gestuelle prédominantes peuvent engendrer des décentrages des surfaces articulaires perturbant ainsi les informations proprioceptives. La conséquence de ces troubles articulaires est la contracture musculaire. Celle-ci est le reflet de la nociception. On peut émettre l’hypothèse que l’excès de tension de celle-ci pourrait accélérer la dégénérescence musculaire. En partant de cette théorie, si le thérapeute rétablit la congruence articulaire, il pourrait y avoir une influence sur la pathologie. 81 Remarque : exemple par rapport aux muscles de l’épaule : Chez les patients atteints de dystrophie FSH, les muscles supra-épineux et infraépineux peuvent être atteints au stade tardif de la pathologie. Ce sont des muscles stabilisateurs de l’articulation scapulo-humérale. Le muscle supra-épineux a un rôle important dans la fixation de l’articulation. Une atteinte de ces muscles entraîne une instabilité de l’articulation. C’est pourquoi, une insuffisance du supra-épineux et de l’infra-épineux se traduit par une ascension de la tête humérale. La conséquence du décentrage est la contracture musculaire. On peut émettre l’hypothèse que les contractures peuvent augmenter la toxicité au niveau du muscle. 6.4.1.5.4 Approche thérapeutique : 1- Rééducation posturale précoce : Une correction de la posture précoce permettra de diminuer, ou d’éviter les tensions excessives de certains muscles, et ainsi, réduire les attitudes néfastes. Cette rééducation posturale sera personnalisée en fonction du patient et de ses atteintes. 2- Approche articulaire : Selon Sohier (2000), il faut commencer par une approche articulaire, pour ensuite se concentrer sur une approche musculaire. Nous allons expliquer l’approche articulaire selon la Kinésithérapie Analytique. Les patients atteints de dystrophie FSH sont sujets à des décentrages articulaires. Ceux-ci sont conséquents à la faiblesse de certains muscles et aux forces prédominantes des muscles restés sains. Ces décentrages peuvent être à l’origine de contractures musculaires. Le thérapeute va réaliser un testing des différentes articulations. Comme les atteintes musculaires sont variables d’un individu à l’autre, le kinésithérapeute, réalisera un testing en fonction de chaque patient. Si lors du test de fin de course, des états pathomécaniques sont mis en évidence, ils seront corrigés grâce aux réharmonisations articulaires. Lorsque le thérapeute rétablit la congruence articulaire, il s’en suit une décontracture musculaire. Cette technique peut être utilisée précocement en prévention. 82 Récupérer une cinématique articulaire normale a pour conséquences : - d’équilibrer les tensions capsulo-ligamentaires, de diminuer l’excès de tension musculo-tendineuse, de lever les contractures musculaires, de réduire la nociception, de réduire les déséquilibres vasomoteurs, d’améliorer le rendement fonctionnel, le rendement immédiat en force. Le traitement commence par des mobilisations spécifiques visant à libérer l’interligne articulaire de ses décentrages et coincements. Remarque : une étude (Boisdequin, 2001) retrace les résultats de plusieurs travaux expérimentaux réalisés sur un échantillon représentatif de sportifs. Ces travaux objectivent une amélioration statistiquement significative et immédiate de la force musculaire après réharmonisation des articulations de l’épaule et de la hanche selon le Concept Sohier. Concernant les patients atteints de dystrophie FSH, aucune étude n’a été réalisée. Cependant, si la force est améliorée après réharmonisation articulaire chez des sportifs, il est possible qu’elle ait des effets similaires chez les sujets atteints d’une myopathie. C’est pourquoi, il serait intéressant d’analyser les conséquences de la réharmonisation articulaire sur la force musculaire chez des personnes atteintes de dystrophie FSH. 3- Approche musculaire : Si des tensions musculaires persistent, nous pourrions opter pour une approche musculaire. En phase précoce de la pathologie, lorsque les atteintes sont encore légères, un travail de renforcement musculaire serait plus approprié. De plus, des techniques d’inhibitions musculaires pourront être utilisées pour lever les contractures musculaires et diminuer la douleur : le strain-counterstrain (ou technique de Jones) par exemple. Cette technique consiste à obtenir un relâchement musculaire, et un gain de mobilité, par raccourcissement passif du muscle responsable de la restriction de mouvement (Barette & al, 2012)(Annexe 4). En phase tardive, le thérapeute optera pour des techniques d’assouplissements. 83 4- Stabiliser les articulations : Un renforcement musculaire spécifique permettra de rééquilibrer et de stabiliser les articulations. De plus, il réduira l’apparition de futurs décentrages. Cependant, il faut rester attentif au fait que le renforcement ne doit pas engendrer de douleur ou de fatigue, si c’est le cas, il faudra arrêter l’exercice. Chez les patients atteints de dystrophie FSH, quelques exercices de stabilisation seraient intéressants : - Renforcement musculaire du dentelé antérieur : Les muscles dentelés antérieurs des patients atteints de dystrophie FSH sont faibles ce qui provoque des scapulas alatas. Ce signe reflète l’hypotonie des dentelés antérieurs. Selon R. Sohier (1985), la musculation contre résistance est d’une grande efficacité, en peu de temps, elle réapplique les « ailes d’anges » au thorax. - Stabilisation de l’épaule : Son but est de rééquilibrer les forces, et ainsi limiter l’apparition de nouveaux décentrages et les contractures musculaires (ce sont les forces prédominantes qui en engendrent les décentrages articulaires). Un renforcement musculaire des muscles de la coiffe des rotateurs sera intéressant pour sa composante coaptatrice. - Renforcement de la sangle abdominale (travail du transverse) : Les muscles abdominaux peuvent être atteints dans la dystrophie FSH. Le déficit musculaire majore la bascule du bassin et l’hyperlordose lombaire entraînant par la suite un abdomen proéminant. C’est pour cela qu’il est important de les tonifier. Le muscle transverse de l’abdomen participe à la stabilité de la colonne vertébrale. C’est un muscle qui joue un rôle de ceinture abdominale, et permet de maintenir le bas du dos. De plus, c’est l’un des principaux muscles expirateur. La tonification du transverse s’obtient par des exercices d’expiration résistée (Sohier, 1999). - Exercice de stabilisation au niveau du rachis : Chez certains patients atteints de dystrophie FSH, la faiblesse des muscles spinaux peut provoquer une hypercyphose de la charnière cervico-dorsale et une hyperlordose cervicale. Des exercices de stabilisation peuvent être proposés au patient afin de redonner de la lordose cervicale, et de travailler au niveau de la charnière cervico-dorsale. 84 6.4.2. Appareillages et aides techniques : 6.4.2.1. Appareillages : Les personnes atteintes de dystrophie FSH pourront être amenées à utiliser un appareillage. Leurs objectifs sont de prévenir les déformations orthopédiques, les attitudes vicieuses, et ralentir la perte de force musculaire entraînant des rétractions musculaires. Les déformations orthopédiques ont des répercussions néfastes sur l’autonomie et la qualité de vie (Kieny, 2001). L’appareillage doit être ni trop lourd, ni trop contraignant car les capacités fonctionnelles restantes du patient doivent être respectées. Pour éviter le steppage, un appareillage peut être proposé pour suppléer la faiblesse musculaire des releveurs du pied. En effet, la personne peut glisser un dispositif dans la chaussure qui permettra de maintenir la cheville à angle droit. Cependant, il peut présenter des inconvénients, tels que des difficultés pour se lever, des difficultés à la marche, et entraîner des troubles de l’équilibre. Dans certains cas, le port de chaussures montantes peut suffire à éviter le steppage car elles permettent un bon maintien du pied (Orphanet, 2013). Pour lutter contre le recurvatum des genoux, des orthèses anti-recurvatum sont parfois proposées au patient. Pour éviter une hyperlordose lombaire trop importante, un corset peut être proposé pour maintenir la colonne vertébrale dans la meilleure position possible. Cependant, ils sont souvent mal tolérés par les patients. Le risque est de modifier l’équilibre à la marche, et de restreindre la capacité vitale. De plus, un lombostat est parfois utile, mais il ne contient pas suffisamment l’hyperlordose lombaire, car il est plus souple et moins haut. L’objectif de ces appareillages est de limiter l’amplitude de l’hyperlordose pour permettre de diminuer la douleur et limiter les déformations de la colonne vertébrale (Diaz, 1998 ; Urtizberea, PenissonBesnier, & Lévy, 2011). Pour pallier le déficit des muscles fixateurs de la scapula : une orthèse stabilisant la scapula peut être proposée. Elle permet aux muscles préservés d’exercer un mouvement effectif, d’améliorer la fonction et la tolérance à l’effort, et de diminuer les douleurs. L’orthèse doit pouvoir supporter les forces requises afin d’éviter le décollement de la scapula et 85 elle doit être confortable (Kieny, 2001). Fournier-Mehouas & al. (2008) ont proposé une orthèse de fixation scapulaire. Ils ont observés que l’utilisation de cette orthèse entraîne une amélioration de l’abduction et de l’antépulsion de 20°. De plus, elle permet de réduire les symptômes douloureux, et donc la quantité d’antalgiques utilisée. Elle augmente l’endurance en flexion antérieure et améliore le fonctionnement des membres supérieurs. Néanmoins, il existe des limites, telles que l’inconfort, la difficulté à porter l’orthèse ou des limites psychologiques. Pour lutter contre les cervicalgies : une minerve peut être utilisée, en particulier chez les personnes âgées ou en fauteuil (Diaz, 1998). 6.4.2.2. Aides techniques : Lors de la prescription d’une aide technique, une discussion avec le patient est nécessaire. Le patient a parfois des difficultés à accepter le fait d’avoir recours à une aide technique. En effet, il peut être difficile d’admettre qu’une incapacité existe, et de rendre celle-ci visible au regard des autres (Diaz, 1998). Une aide à la marche est proposée lorsque les chutes sont fréquentes. Elle permet au patient de rester autonome dans ses déplacements. Il existe de nombreuses aides selon le déficit du patient, telles que la canne, le déambulateur, le fauteuil roulant manuel, le scooter électrique, le fauteuil roulant électrique (Orphanet, 2013). Remarque : Le fauteuil roulant manuel peut être difficile à utiliser en raison de la faiblesse musculaire des membres supérieurs. 6.4.3. Chirurgie : 6.4.3.1. Membres supérieurs : Les conséquences de la pathologie se traduisent par une limitation de l’abduction et de l’antépulsion du bras, ainsi qu’une scapula alata (conséquente à l’atteinte des fixateurs de la scapula : dentelé antérieur, rhomboïdes, grand dorsal, faisceau inférieur du trapèze). Ce déficit peut être compensé par un balancement du bras permettant ainsi d’élever le membre supérieur, en revanche cela ne permet pas de maintenir la position. 86 Selon Tawil (2008), lorsque le deltoïde, qui permet l'élévation du bras si la scapula est stabilisée sur le thorax, garde une bonne fonction, on peut envisager une chirurgie de fixation de la scapula contre le gril costal, aussi appelée scapulopexie. Son but est de compenser la faiblesse des muscles qui fixent la scapula à la cage thoracique afin d’améliorer la mobilité du bras. Cette technique invasive est plus efficace que les traitements orthopédiques conservateurs de type orthèse. Cependant, la scapulopexie ne doit pas être envisagée chez les patients présentant une maladie stable ou progressant lentement, ainsi que chez les patients qui ont préservé une bonne mobilité du bras. Une étude (Giannini & al, 2007) rapporte une expérience concernant 13 personnes atteintes de dystrophie FSH opérées des deux côtés en une seule opération. Cette étude confirme le bon résultat fonctionnel d’une telle chirurgie. Un examen préopératoire est capital, on va y réaliser la manœuvre d’Horwitz. Elle consiste à plaquer manuellement et énergiquement la scapula contre le gril costal par l’examinateur tandis que le patient réalise une abduction du bras. Elle est dite positive si on note un gain notable d’abduction (figure 13,14). Figure 13 : Patient de 18 ans atteint de dystrophie FSH : abductions actives des membres supérieurs limitées (Giannini & al., 2007). 87 Figure 14 : Patient de 18 ans atteint de dystrophie FSH : manœuvre d'Horwitz positive, gain à l'abduction de membre supérieur (Giannini & al., 2007). La technique employée était une scapulopexie sans arthrodèse (figure 15). Cette technique chirurgicale consiste à passer des fils métalliques entre les côtes, et à travers des trous au niveau de la scapula. Cet étude souligne l’intérêt d’une telle chirurgie et insiste sur la nécessité de la proposer plus fréquemment qu’auparavant (annexe 5). Figure 15 : Dessin illustrant la scapulopexie (Giannini & al., 2007). 88 La fixation de la scapula à la cage thoracique permet d’utiliser au mieux la force du muscle deltoïde. Cela redonne de meilleures amplitudes dans les mouvements d’abduction et d’antépulsion. Elle permet également de diminuer les douleurs et la prise d’antalgiques (Griffet & Fournier, 2010). 6.4.3.2. Membres inférieurs : Une arthrodèse tibio-tarsienne fixant la cheville à angle droit peut être proposée lorsque le déficit musculaire des releveurs du pied est important, provoquant ainsi des chutes fréquentes quand le pied accroche le sol. Elle consiste à bloquer la mobilité de l’articulation en réalisant une fusion des deux pièces osseuses. Cette intervention chirurgicale est peu recommandée car la fixation définitive de la cheville diminue sa souplesse. Celle-ci étant indispensable à la marche. 6.4.3.3. Colonne vertébrale : Une arthrodèse vertébrale est parfois proposée dans les cas graves de scoliose chez de jeunes sujets. Elle permet d’immobiliser et de stabiliser définitivement l’articulation dans une position donnée. 6.4.3.4. Anesthésie : Concernant l’anesthésie, il n’y a pas de précautions particulières à prendre, sauf en cas d’atteinte respiratoire avérée ou suspectée. 6.5. Prise en charge auditive : La prise en charge de la surdité chez les patients atteints de dystrophie FSH passe par l’utilisation d’appareillages spécifiques qui permettent de compenser la perte de l’audition (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011) : L’audioprothèse : cet appareil est placé derrière l’oreille du patient. Il permet d’amplifier électroniquement le volume du son. Il est systématiquement proposé aux patients atteints de trouble de l’audition mais le gain auditif est limité. 89 L’implant cochléaire : cet appareil est de plus en plus souvent proposé. C’est un appareil électronique composé de fils implantés dans l’oreille interne par une intervention chirurgicale. Ils connectent le nerf auditif à un appareil qui convertit le son en impulsions électriques. Il va stimuler le nerf auditif, permettant ainsi d’envoyer des impulsions au cerveau. L’implant cochléaire permet de retrouver une perception auditive. Cependant, il ne remplace pas l’ouïe et nécessite une rééducation auditive importante. Une intervention précoce permet aux jeunes enfants d’être plus rapidement entourés d’un univers sonore, ce qui facilite leur apprentissage et améliore leur qualité de vie. D’autres outils peuvent aider les personnes atteintes de trouble de l’audition. En effet, les patients peuvent utiliser des systèmes d’alertes lumineux, par exemple lorsque qu’une personne sonne, une lumière s’allume pour les avertir. 6.6. Prise en charge ophtalmologique : Afin d’éviter les décollements de la rétine dans certains cas de dystrophie FSH, un traitement par photocoagulation des télangiectasies et des microanévrismes de la rétine est parfois nécessaire (Diaz, 1998). Remarque : La photocoagulation au laser est un traitement qui consiste à utiliser l’effet cicatrisant et coagulant d’un laser dont le rayon est focalisé précisément sur la rétine. Les objectifs de cette technique sont de créer un accolement des différentes couches de la rétine, coaguler les vaisseaux anormaux, et détruire les zones malades de la rétine qui, sans traitement, pourraient entraîner une diminution de la vision. 6.7. Prise en charge respiratoire : La ventilation en pression positive biphasique (ou BiPAP) peut être nécessaire pour les patients présentant une hypoventilation (Lemmers, Miller, & Van der Maarel, 2012). Remarque : La BiPAP (Bilevel Positive Airway Pressure) apporte deux pressions différentes lors de l’inspiration et de l’expiration. 90 - L’application d’une pression expiratoire qui permet d’ouvrir les voies aériennes supérieures. L’application d’une pression inspiratoire qui permet de compenser l’hypoventilation. 6.8. Soutien psychologique : La survenue d’une pathologie neuromusculaire entraîne des bouleversements émotionnels. Pour gérer les conséquences de la maladie au quotidien, il est nécessaire de trouver du soutien autour de soi (famille, amis, association) ou parfois auprès d’un psychologue (Schanen-Bergot, 2009). En effet, un accompagnement psychologique est souvent utile chez les patients atteints de dystrophie FSH, et pas uniquement au moment de l’annonce du diagnostic. Chaque personne vit sa maladie de manière différente selon son histoire, sa personnalité, l’évolution de la pathologie, ses relations familiales, sociales et professionnelles. Cette consultation offre un espace où déposer sa souffrance, ses émotions, ses doutes et espoirs. Elle aide à poser un nouveau regard sur la maladie. Le vécu de la pathologie et de ses conséquences n’est pas forcément à corréler avec l’intensité du déficit moteur. Face aux difficultés, certains patients souhaitent en parler avec des personnes qui ont traversé la même épreuve, au sein d’associations, par exemple. Pour certains, un soutien psychologique temporaire permet de traverser des périodes plus difficiles, comme l’annonce du diagnostic ou lorsque l’évolution de la maladie empêche de continuer une activité. Pour d’autres, une aide psychologique régulière tout au long de leur vie sera nécessaire pour affronter la maladie (Urtizberea, Penisson-Besnier, & Lévy, 2011). Cependant, décider de consulter un psychologue reste difficile pour certains patients. Lors des consultations pluridisciplinaires neuromusculaires, une rencontre avec le psychologue de l’équipe peut être proposée au cours du suivi médical (Schanen-Bergot, 2009). 91 6.9. Prise en charge multidisciplinaire : 6.9.1. Objectifs : La prise en charge des patients atteints de dystrophie FSH est fondée sur la multidisciplinarité. Les tableaux cliniques sont variés, faisant appel à de nombreux intervenants médicaux et paramédicaux. Cette prise en charge va permettre de mettre en commun les visions propres de chaque discipline. Elle permet d’optimiser le diagnostic et la prise en charge (Fort, 2001). Les objectifs de cette prise en charge sont : - prévenir les complications et leurs conséquences, favoriser l’autonomie du patient, favoriser la qualité de vie, le confort du patient et de l’entourage, informer le patient ainsi que l’entourage vis-à-vis de la pathologie, intégrer le patient à l’éducation dans les soins, accompagner le patient, apporter les meilleurs soins possibles, individualiser le traitement. La prise en charge doit intégrer les conséquences physiques, psychologiques et sociales. La diversité et la complexité des différentes situations imposent de ne pas s’enfermer dans un schéma thérapeutique unique. 6.9.2. Les acteurs de la prise en charge multidisciplinaire : Il s’agit d’un travail en équipe avec le patient et son entourage. La consultation multidisciplinaire est composée de personnel médical et paramédical (Fort, 2001) : - neurologue, chirurgien orthopédique, cardiologue, anesthésiste, kinésithérapeute, orthoprothésiste, psychologue, ophtalmologue… - pédiatre, - médecin, - pneumologue, - généticien, - ergothérapeute, - nutritionniste, - médecin ORL, 92 Chacun des intervenants réalise une évaluation et définit des objectifs de traitement. Il est important qu’un praticien expérimenté annonce le diagnostic, informe le patient en ce qui concerne l’évolution et les conséquences de la pathologie. 6.10. Modèle biopsychosocial : Une approche selon le modèle biopsychosocial pourrait être intéressante lors de la prise en charge de patients atteints de dystrophie FSH. C’est une approche « dans laquelle les facteurs biologiques, psychologiques et sociaux sont considérés comme participant simultanément au maintien de la santé ou au développement de la maladie » (Berquin, 2010, p 1512). Dans le cadre du modèle biopsychosocial, deux caractéristiques sont essentielles : - Un élargissement des perspectives : les déterminants de la santé et de la maladie sont multiples et divers. Le bon fonctionnement biopsychosocial implique que les dimensions biologique, psychologique et sociale soient abordées de manières simultanées. Un travail en interdisciplinarité permet de le compléter. De plus, le thérapeute sera sensible à une évaluation des attitudes, des croyances, des attentes, des comportements, des facteurs émotionnels et relationnels, du contexte social, culturel et professionnel du patient. - La participation active du patient : elle est essentielle. Les croyances et attentes du patient influencent directement les résultats des traitements. 6.11. Associations : En Belgique, l’association belge contre les maladies neuromusculaires (ABMM) a pour but de lutter contre les maladies neuromusculaires. Elle permet de promouvoir le bien-être des personnes qui en sont atteintes. Elle organise des conférences, une écoute téléphonique, un service social, un service psychologique, un conseil scientifique, une aide financière à la recherche et aux membres… L’ABMM édite régulièrement un bulletin de liaison appelé « coup de plume ». Elle organise une campagne de récoltes de fonds, le Téléthon en Belgique. 93 L’association « AMIS FSH » gère un site d’informations sur la dystrophie FSH. Elle accueille un forum d’échanges entre les personnes atteintes ou concernées par cette pathologie. Cette association a pour but de constituer et d’animer une communauté de patients à dimension européenne dans la perspective de : - Soigner et guérir cette maladie. - Mettre à disposition des informations et témoignages. - Promouvoir les recherches qui permettent de comprendre la maladie, la mise au point de traitements, et la prévention. - Sensibiliser l’opinion publique, les pouvoirs publics et tous les organismes, au plan national ou international, aux problèmes de recherches, de soins, de prévention et de guérison. - Apporter une aide matérielle, morale et technique aux malades, favoriser leur intégration sociale et défendre leurs intérêts. L’association « FSHD Europe » a pour objectif principal d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de dystrophie FSH. Elle permet aussi de : - Sensibiliser la population, - Améliorer la compréhension et la connaissance de la dystrophie FSH, - Encourager et promouvoir les meilleurs soins, le bien-être, le soutien et le diagnostic pour les sujets atteints de dystrophie FSH et leurs familles, - Stimuler, encourager et soutenir les recherches en vue de trouver un remède à la dystrophie FSH. - Recueillir et gérer des fonds pour la recherche, - Créer des programmes de soutien, - Travailler avec d'autres organisations FSHD nationales et internationales. L’organisation « FSH Society » est le plus grand réseau de patients atteint de dystrophie FSH, et de chercheurs dans le monde. Elle est dédiée à traiter et guérir la dystrophie FSH. Elle permet de promouvoir les recherches en assurant un accès aux patients, des ressources et des fonds. Depuis le milieu des années 1990, elle soutient les recherches. Cette organisation permet de soutenir les patients et leur entourage à travers le monde. 94 7. Etudes de cas : 7.1. Avant-propos : Dans le cadre de ce travail de fin d’étude, nous avons pris contact avec quelques personnes atteintes de dystrophie FSH, afin de mieux comprendre les patients et leur pathologie. Nous avons pu rencontrer certaines personnes atteintes par cette maladie, et nous les avons interviewées sur différents aspects tels que : le diagnostic, l’évolution de la pathologie, les manifestations cliniques, la prise en charge, et leur ressenti. Nous avons aussi pris contact avec des personnes atteintes de dystrophie FSH venant de France. Comme nous ne pouvions pas les interviewer, ils ont reçu un questionnaire auquel ils pouvaient répondre. Ce questionnaire était basé sur les mêmes questions que lors des interviews (Annexe 6). Les tableaux suivants retracent les différents aspects évoqués avec les sujets atteints de dystrophie FSH. 95 Monsieur A ; 66 ans ; ingénieur industriel jusqu'à sa retraite. Diagnostic - FSH de type 1. - Vers 40 ans, - Autres personnes atteintes dans la famille : sœur (peu affectée), nièce, grand-mère côté paternel (suspicion). Evolution - Bébé : atteinte faciale, difficultés à téter 1er manifestation. - Adolescence : pectus excavatum, difficultés pour la gymnastique. - Vers 40 ans : fatigue musculaire des membres inférieurs, difficultés à la marche, chutes plus fréquentes, marche de plus en plus lente ; trouble du sommeil ( diagnostic). - Vers 50 ans : de plus en plus de difficultés pour se lever. - Vers 60 ans : 3 décollements successifs de la rétine. - Maintenant : périmètre de marche d’environ 50 mètres. - Evolution : assez lente, par poussées évolutives. Symptômes - Atteinte faciale : dort les yeux ouverts, yeux secs, irrités, trois décollements successifs de la rétine opération. - Atteinte des membres supérieurs : difficultés pour lever les bras au-dessus de la tête, objets en hauteur impossible à atteindre, scapula alata (ne veut pas être opéré opération lourde) - Atteinte des membres inférieurs : difficultés pour utiliser les escaliers, s’assoir et se lever ; steppage ; recurvatum des genoux. - Coté droit plus atteint. - Gênes : s’assoir, se lever, atteindre les zones basses et en hauteurs, se retourner, rapports sexuels. - Autres : diminution audition, troubles ophtalmologiques. - Douleurs : loge antérieur des membres inférieurs, omoplates ; ↘ à l’activité, séances de kinésithérapie, bains chauds ; ↗ au repos, nuit. Prise en charge - Traitement médicamenteux : larmes artificielles. Ressenti - Accepte la maladie : « il faut faire avec ». - Rester le plus autonome possible ; reconnaissant envers sa femme et sa famille qui l’acceptent comme il est. - Pour se donner du courage : bénévolat personne de référence concernant la dystrophie FSH ; aide pour des enfants qui ont des difficultés scolaires ; atelier de bricolage ; scoutisme ; chorale… - Suivi : centre de référence neuromusculaire : Saint-Luc (Bruxelles) check up 1 fois/an (neurologue, kinésithérapeute, ergonome, ergothérapeute, psychologue…). - Aide à la marche : 2 cannes (maison) ; fauteuil roulant électrique ; scooter électrique (extérieure). - Orthèse : anti-recurvatum. - Opération : contre les décollements de la rétine. - Kinésithérapie : 2 fois/semaine. 96 Monsieur B ; 47 ans ; sans travail Impossibilité. Diagnostic - FSH de type 1 - à 33 ans, - Diagnostiqué chez sa mère donc il a réalisé le test positif. - Autres personnes atteintes dans la famille : mère, grand-mère côté maternel (suspicion). Evolution - Vers 28 ans : scapula alata ; faiblesse des membres supérieurs. - Vers 33 ans : faiblesse des membres inférieurs, impossibilité de courir. - Vers 44 ans : faiblesse des releveurs du pied. - Evolution : progressive ; forte dégénérescence musculaire suite à l’opération de la scapula gauche pendant 2 ans environ. Symptômes - Atteinte faciale : dors les yeux ouverts. - Atteinte des membres supérieurs : lève les bras à l’horizontale ; scapula alata. - Atteinte des membres inférieurs : marche sans aide, monter les escaliers avec rampe, difficultés pour se lever. - Tronc : abdomen proéminant, hyperlordose lombaire. - Autres : troubles auditifs, sommeil perturbé (sieste la journée). - Membre inférieur et poignet droit plus faible, biceps plus faible à gauche. - Gênes : quand il y a des marches (ex : bus, train…), atteindre les zones basses et en hauteurs, fatigue physique et psychique. - Pas de douleurs. Prise en charge - Traitement médicamenteux : vitamines. - Suivi au CHU de Esneux. - Consultation chez un spécialiste en médecine physique. - Attèle : releveurs du pied, chaussures MBT. - Opération : de la scapula gauche, ne veut pas faire d’opération à droite car complications. - Kinésithérapie : 2 fois/semaine, depuis 2009. Ressenti - Incompréhension de l’entourage. 97 Monsieur C ; 76 ans ; ingénieur civil à la retraite. Diagnostic - FSH de type1, - vers 55-60ans. - Autres personnes atteintes dans la famille : mère (suspicion), frère (suspicion, mais il ne veut pas faire le test génétique). Evolution - Vers 55 ans : faiblesse des membres inférieurs et fatigue. - A partit du diagnostic : il a fait plus attention aux autres atteintes : atteinte faciale, des membres supérieurs. - 70 ans : ne marche plus que quelques pas, steppage. - Evolution : progressive. Symptômes - Atteinte faciale : yeux secs, irrités, dort les yeux ouverts, difficultés pour fermer les lèvres, boire avec une paille. - Atteinte des membres supérieurs : lève les mains au-dessus de la tête en pliant les bras, difficultés pour se coiffer, scapula alata. - Atteinte des membres inférieurs : impossibilité de marcher, déficit des releveurs, difficultés pour se lever. - Autres : troubles audition, de la déglutition (y être attentif). - Membre inférieur gauche plus faible. - Gênes : transferts. - Douleurs : liées à l’arthrose. Prise en charge - Traitement médicamenteux : gel ophtalmique. - Suivi : par le médecin traitant ; inscrit dans un centre de référence neuromusculaire Saint Luc (Bruxelles), mais il ne veut plus y aller; ergothérapeute pour trouver du matériel. - Aide à la marche : scooter électrique, fauteuil roulant manuel. - Opération : aucune. - Kinésithérapie : 3 fois/semaines, depuis 2000. Ressenti - « Pourquoi se plaindre alors que certaines personnes ont des atteintes plus grave ». - « C’est la faute à pas de chance ». 98 Madame D ; 60 ans ; professeur de sport à temps plein. Diagnostic - FSH de type 1, - à 34 ans, - Autres personnes atteintes dans la famille : mère ; sœur (sur les 6 enfants, elles étaient 2 à être atteintes) Evolution - 25 ans : atteinte scapulaire gauche ; puis atteinte à droite quelques années plus tard. - Quelques années plus tard : atteinte faciale gauche. - 57 ans : faiblesse des releveurs (surtout à gauche), steppage. - Evolution : progressive. Symptômes - Atteinte faciale : yeux secs, irrités, dort les yeux entrouverts, difficultés pour siffler, boire avec une paille. - Atteinte des membres supérieurs : impossibilité de lever les mains au-dessus de la tête, scapula alata. - Atteinte des membres inférieurs : faiblesse des releveurs, marche sans aide. - Tronc : abdomen proéminant. - Coté gauche plus faible. - Gênes : lever les bras. - Douleurs : dans les jambes ; constantes ; ↘ : massage ; ↗ : fatigue. Prise en charge - Traitement médicamenteux : Aucun. - Suivi : par un neurologue, 1 fois/an. - Aides à la marche, opération : aucune. - Kinésithérapie : 2 fois/semaine, depuis plusieurs années. Ressenti - Il faut vivre avec. - S’adapter dans les activités de la vie journalière. 99 Madame E ; 37 ans ; responsable planification en reconversion. Diagnostic - FSH de type 1, - à 32 ans, - Autres personnes atteintes dans la famille : mère, frère (suspicion), 2 cousins du côté maternel, 2 tantes (porteuses, asymptomatiques). Evolution - 25 ans : fatigue, faiblesse musculaire des membres inférieurs. - 30 ans : difficulté pour reprendre le sport après ses 2 grossesses. - 35 ans : beaucoup de perte de force suite à sa 3ème grossesse. - Evolution : lente, progressive. Symptômes - Atteinte faciale et des membres supérieurs : aucune. - Atteinte des membres inférieurs : monte les escaliers à l’aide d’une rampe, faiblesse des releveurs, - Mollet droit plus faible, cuisse gauche plus faible. - Gênes : escaliers, s’accroupir, se relever du sol, marcher longtemps, terrains irréguliers, se lever d’une chaise, courir. - Douleurs : au niveau des jambes ; sensation de brûlure et de gêne ; s’accentue avec les années ; ↗ à l’activité, station debout prolongée, la nuit, avec le stress, la fatigue ; ↘ à la marche, changement de position, antalgiques, après les séances de kinésithérapie. Prise en charge - Traitement médicamenteux : antalgiques. - Suivi dans un centre spécialisé pour les maladies neuromusculaires à Marseille, 1 à 2 fois/an. - Aide à la marche, opération : aucune. - Kinésithérapie : 3 fois/semaine, depuis 4 ans. Ressenti - Après le diagnostic : « ils doivent se tromper, c’est impossible ». - Puis : « ce n’est pas grave, je vais me remuscler », elle a ressenti beaucoup de colère quand elle a su que ce n’était pas possible, alors qu’elle était une grande sportive. - Ensuite le déni, faire semblant de ne rien avoir à s’en épuiser jusqu’au burn-out. - Maintenant : elle s’investit pour se sentir active participe aux essais cliniques, récolte des fonds pour Amis FSH, don de tissus lors de son dernier accouchement pour que la recherche avance… Elle veut montrer à ses enfants que l’on peut faire des choses même en étant malade. - Relativise sa situation certaines personnes sont plus atteintes. - Sentiment d’impuissance car malgré les efforts, la maladie avance doucement. Elle cache à ses proches ce qu’elle ressent pour ne pas qu’ils s’inquiètent, et qu’ils se sentent impuissants. - Elle espère ne pas être un jour en fauteuil. - Colère car le handicap est mal pris en charge en France et il faut se battre vraiment pour tout, pour faire reconnaitre ses droits. 100 Madame F ; 49 ans, ancienne serveuse arrêt suite à la maladie. Diagnostic - à 49 ans. - Diagnostic génétique en cours. - Autres personnes atteintes dans la famille : mère (suspicion). Evolution - 16-17ans : scapula alata à droite, puis progressivement à gauche. - à 47 ans : steppage, impossibilité pour lever les bras au-dessus de la tête. Symptômes - Atteinte faciale : aucune. - Atteinte des membres supérieurs : impossibilité de lever les bras au-dessus de la tête, difficultés pour se coiffer, scapula alata. - Atteinte des membres inférieurs : faiblesse des releveurs du pied, steppage. - Autres : aucune. - Pas de douleurs. - Coté droit plus faible. - Gênes : atteindre les objets en hauteur, porter des charges lourdes, nettoyer les vitres, marche lente. Prise en charge - Traitement médicamenteux : aucun. - Suivi : par un institut de myopathie (Paris). - Kinésithérapie : 3 fois/semaine, dont 2 séances de balnéothérapie par semaine ; depuis novembre 2013. - Ergothérapie : prochainement. - Aide à la marche : canne. - Opération : aucune. Ressenti - Inquiétude, angoisse, anxiété. - Détresse. - Impuissance face à la maladie. - Motivation pour la kinésithérapie. 101 Monsieur G ; 56 ans ; technicien de bureau. Diagnostic - à 15 ans, - Diagnostiqué chez son père donc il a réalisé le test positif. - Autres personnes atteintes dans la famille : grand-mère paternel, père, sœur, et deux de ses frères. Evolution - à 13 ans : impossibilité de monter à la corde à nœuds. - Evolution : lente et progressive. Symptômes - Atteinte faciale : difficultés pour siffler, boire avec une paille. - Atteinte des membres supérieurs : impossibilité de lever les mains au-dessus de la tête, difficulté pour manger, se coiffer, scapula alata. - Atteinte des membres inférieurs : marche environ 30 minutes sans aide, difficulté pour se relever d’une chaise (besoin d’un appui), impossibilité de se lever seul du sol. - Autres : trouble auditif perte de 50% dans les sons aigus. - Coté gauche plus faible. - Gênes : lever les bras, impossibilité de se baisser pour ramasser un objet, difficultés pour sortir des toilettes. - Douleurs : genou gauche, depuis 3 ans ; s’aggrave à la marche ; ↘ au repos ; ↗ le matin et le soir. Prise en charge - Traitement médicamenteux : aucun. - Suivi : aucun. - Kinésithérapie : aucune. - Aide à la marche : canne pour aller à l’extérieur, déambulateur pour se relever d’une chaise (appui). - Opération : aucune. Ressenti - Ne se sent pas handicapé. - Peur de devoir utiliser un jour le fauteuil roulant. 102 Madame H ; 45 ans ; sans travail impossibilité. Diagnostic - FSH de type 1, - à 30 ans, - Autres personnes atteintes dans la famille : mère qui est porteuse de l’anomalie génétique mais asymptomatique. Evolution - vers 6-8 ans : impossibilité de gonfler un ballon, siffler. - vers 30 ans : atteinte des membres supérieurs. - 37 ans : besoin du fauteuil roulant, marche de plus en plus difficile, diminution du périmètre de marche. Symptômes - Atteinte faciale : incapacité de siffler, boire avec une paille, gonfler un ballon. - Atteinte des membres supérieurs : impossibilité de lever les mains au-dessus de la tête, difficultés pour manger, se coiffer ; scapula alata - Atteinte des membres inférieurs : impossibilité pour se lever d’un siège sans aide, monter les escaliers, marcher sur les talons. - Membre supérieur gauche plus faible ; membre inférieur droit plus faible. - Gênes : pour marcher, monter une marche, se relever (d’une chaise, et du sol), se maquiller, faire un shampooing, se coiffer, s’habiller, impossibilité de porter des objets de plus de 2-3 kg. - Evolution : rapide à partir de ses 30 ans. - Douleurs : douleurs musculaires au niveau des membres inférieurs, surtout dans les cuisses, parfois au niveau des bras, le matin au réveil, puis diminution dans la matinée ; tensions dans les jambes, le soir et la nuit ; ↗ : position statique, chaleur ; douleurs dorsales et cervicales, entre les scapulas, constantes, ↗ lors du travail au bureau, ↘: piscine, séance de kinésithérapie, port d’un gilet pour redresser les épaules. - Autres atteintes : aucune. Prise en charge - Traitement médicamenteux : antioxydants, magnésium. - Suivi : centre de Perharidy (Bretagne)1 fois tous les 2 ans, depuis 5 ans. - Kinésithérapie : 1 fois/semaine, depuis 5 ans, - Aide la marche : fauteuil roulant manuel, et électrique ; possibilité de marcher sans aide, port de chaussures orthopédiques. - Opération : aucune. Ressenti - La fatigue est l’aspect le plus handicapant Difficultés pour commencer une journée joyeusement quand on se sent fatigué. - La pathologie est considérée à tort dans la littérature comme évoluant lentement et peu grave ; dystrophie infantile négligée dans la littérature. 103 Madame I ; 33 ans ; travail dans les ressources humaines. Diagnostic - FSH de type 1, - à 28 ans, - Autres personnes atteintes dans la famille: aucune. Evolution - 15 ans : atteinte faciale. - 25 ans : arrêt de l’activité sportive (danse et salle de sport) et prise de poids (environ 10kg). - 30 ans : fatigue, douleurs. - 33 ans : se sent de plus en plus handicapée. - Evolution : lente entre 15 ans et 25 ans puis rapide à partir de 25 ans, évolution très rapide après sa première grossesse pendant environ 1 an. Symptômes - Atteinte faciale : yeux rouges, irrités, secs, dort les yeux ouverts, impossibilité de siffler, difficulté pour boire avec une paille. - Atteinte des membres supérieurs : possibilité de lever les mains au-dessus de la tête en pliant les bras, difficultés pour manger (les aliments peuvent sortir de la bouche) et pour se coiffer, scapula alata. - Atteinte des membres inférieurs : marche lente, monte les escaliers avec l’aide d’une rampe. - Autres : troubles auditifs de 7 à 12 ans (liée ?). - Membre inférieur droit et membre supérieur gauche plus faibles. - Gênes : s’accroupir, monter les escaliers, se relever, porter des charges, prendre un objet en hauteur, se laver les cheveux. - Douleurs : au niveau de la ceinture scapulaire et pelvienne ; au quotidien, depuis l’arrêt de son activité sportive, constantes depuis l’accouchement ; ↗ : avec le port de charges ; ↘ : massages, chaleur, repos ; s’aggravent au cours de la journée. Prise en charge - Traitement médicamenteux : aucun. - Suivi : par un docteur en médecine physique et réadaptation, 1 fois par an (Poitou-Charentes). - Kinésithérapie : 2 fois/semaine, depuis 2011. - Aide à la marche : canne. - Attèle : pour les releveurs du pied. - Opération : aucune. Ressenti - Manque d’autonomie, - Aggravation des douleurs suite à la grossesse, donc n’envisage pas d’avoir d’autres enfants, - Fatigue quotidienne, - Ces différents points rendent la vie difficile déprime. 104 Madame J ; 40 ans ; sans travail impossibilité. Diagnostic - FSH de type 1, - à 15 ans, - Autres personnes atteintes dans la famille : mère (apparition des symptômes à partir de 65 ans), son fils. Evolution - 15ans : impossibilité de lever les bras pour écrire au tableau, difficultés pour courir, utiliser les escaliers, s’accroupir, se relever, scapula alata à droite, fatigue. - 16 ans : chutes de plus en plus fréquentes. - 30 ans : 2ème grossesse épuisement. - 31 ans : impossibilité d’utiliser les escaliers. - 35 ans : difficultés à la marche. - 38 ans : scapula alata à gauche. - Evolution : rapide depuis 2009 (choc émotionnel). Symptômes - Atteinte faciale : yeux irrités et secs, en amandes, elle dort les yeux ouverts, impossibilité de siffler, boire avec une paille. - Atteinte des membres supérieurs : impossibilité de porter les mains à la bouche, impossibilité pour manger seul, se coiffer, scapula alata, faiblesse des extenseurs des doigts. - Atteinte des membres inférieurs : incapacité à utiliser les escaliers, impossibilité de se relever seule, marche avec un déambulateur (maximum 30 minutes), atteinte des releveurs du pied, fatigue. - Tronc : abdomen proéminant. - Coté droit plus faible. - Gêne : se relever d’une chaise, du sol, lever les bras, porter des charges, se baisser. - Douleurs : sensation de lourdeur dans les mollets, quotidienne, ↗ le soir, lors des mouvements, ↘ repos, massages. - Autres atteintes : aucunes. Prise en charge - Traitement médicamenteux : aucun. - Suivi : depuis 2012 au centre de référence des maladies neuromusculaires de Lille, 1 fois/an ; médecin traitant ; ergothérapie : 3 fois/an pour évaluer les besoins ; aide de deux auxiliaires de vie : 2 fois/jours. - Kinésithérapie : prescription de 5fois/semaine ; depuis ses 15 ans, pour le moment plus de traitement kinésithérapique impossibilité de trouver un thérapeute qui se rende à son domicile. - Aide à la marche : déambulateur, fauteuil roulant manuel (mais une personne doit la pousser). - Opération : aucune. - Autre : diagnostic (Paris)taux de CPK élevé ; biopsie musculaire ; test génétique. 105 Ressenti - Au début : ne pas dire aux autres que l’on est malade, puis témoignage soulagement, se redonner de la force. - Difficile à vivre car son fils est atteint. Son combat = pour son fils ainé. - Incompréhension du reste de la famille et des amis. - Soutien de la part de son mari et de ses enfants. - Colère : car aucun kinésithérapeute ne peut la prendre en charge. - Remerciement envers le soutien que lui apporte l’AFM défend les intérêts des patients. - Investissement pour le téléthon besoin de se battre pour son fils, besoin d’entraide. - Sentiment de douleur. 7.2. Conclusion : Suite à ces échanges avec les personnes atteintes de dystrophie FSH, on comprend mieux cette notion de variabilité : concernant l’évolution de la maladie, les manifestations cliniques, la prise en charge et le ressenti de chacun. Continuer à travailler est parfois impossible. Cela dépend de la gravité de leurs manifestations cliniques ou du type de métier réalisé. Certains arrêtent leur activité professionnelle, car ils sont dans l’impossibilité de continuer à travailler. D’autres réduisent leur temps de travail, car la maladie les fatigue ; ou change de secteur. Certaines personnes atteintes de dystrophie FSH continuent leur activité professionnelle jusqu'à la retraite, bien qu’il soit de plus en plus difficile de travailler en fin de carrière, suite à l’évolution des symptômes. Les besoins de chacun sont différents. C’est pourquoi, la prise en charge est adaptée à la gravité des atteintes motrices, fonctionnelles, et aux demandes des patients. Les options de prise en charge sont donc multiples. Certaines personnes atteintes de dystrophie FSH nous expliquent être satisfaites du suivi dans les centres neuromusculaires. D’autres patients se sentent délaissés une fois le diagnostic posé, et préfèrent donc le suivi de leur médecin traitant. Concernant le traitement kinésithérapique, la plupart d’entre eux étaient suivis chaque semaine (de une à plusieurs fois). La principale difficulté 106 rencontrée par les kinésithérapeutes est le manque d’informations concernant cette pathologie. C’est pourquoi, quelques personnes atteintes de dystrophie FSH ont expliqué que les séances étaient trop fatigantes, car elles reposaient essentiellement sur du renforcement musculaire trop intensif. Une personne a décidé d’arrêter cette prise en charge car elle aggravait les symptômes. En général, les personnes étaient satisfaites des effets positifs du traitement. De plus, plusieurs patients étaient investis dans leur prise en charge et essayaient d’informer au mieux leur kinésithérapeute des options de prise en charge. Les aides à la marche utilisées sont différentes d’un individu à l’autre. Le fauteuil roulant manuel est parfois difficile à utiliser en raison de l’atteinte des membres supérieurs. Les aides techniques sont variées d’un sujet à l’autre, ils sont adaptés aux besoins de chaque personne. Pour les sujets atteints de dystrophie FSH, il est souvent difficile d’accepter d’utiliser des aides techniques car ils exposent leur handicap à la vue de tous. Les atteintes sont variées et ne sont pas vécues de la même manière selon les personnes concernées. L’évolution de la maladie accentue le sentiment d’impuissance face à celleci, mais aussi l’angoisse, l’inquiétude, la peur de devoir utiliser un fauteuil roulant et de perdre son autonomie. Les personnes atteintes ont décrit un moment de colère et de déni après l’annonce du diagnostic, le besoin de travailler jusqu’à en être épuisé pour se sentir comme les autres. D’autres personnes acceptent leur maladie, la relativise en se disant que cela aurait pu être pire. Pour se donner du courage, certaines personnes atteintes de dystrophie FSH s’investissent pour aider les autres sujets atteints, être à leur écoute, faire avancer la recherche… Le soutien des proches est très important pour les personnes atteintes de dystrophie FSH. Cependant, certains d’entre eux, nous expliquent que leur entourage ne comprend pas toujours leur maladie, et le fait qu’ils soient fatigués dans certaines activités. 107 Discussion La dystrophie FSH reste à ce jour une maladie très complexe et difficile à comprendre. L’ensemble des travaux réalisés permet petit à petit de mieux comprendre les mécanismes moléculaires en cause dans le développement de la pathologie. Van der Maarel & al. (2012) considèrent la suppression incomplète du gène DUX4 dans le muscle comme la cause la plus probable de la dystrophie FSH. Mais, de nombreux autres gènes pourraient être impliqués dans la pathologie. De plus, afin d’étudier la prévalence des différentes maladies neuromusculaires en Belgique, faire avancer la recherche clinique, et développer des traitements, un registre belge des maladies neuromusculaires a été mis en place. Désormais, il y a 6 centres neuromusculaires en Belgique. Avant cette période, il était difficile pour les patients atteints d’une maladie neuromusculaire d’arriver à un diagnostic, et d’être correctement suivis et traités. Cependant, il y a encore beaucoup de sujets qui ne sont pas inscrits dans un centre ou dans le registre. La prise en charge : En dépit des progrès scientifiques récents dans la connaissance de cette maladie, il n’existe aujourd’hui aucun traitement médical curatif. C’est pourquoi, la prise en charge est essentiellement symptomatique. Les manifestations cliniques et l’évolution de la pathologie étant variables, cette maladie nécessite une prise en charge qui réponde aux besoins spécifiques des patients. Selon Guillaume Bassez « l’important est que les malades bénéficient de la prise en charge adéquate au bon moment » (Dupuy-Maury, 2012). C’est pourquoi, il faut s’adapter au patient, à ses atteintes, à l’évolution de la pathologie et à son mode de vie. Un traitement précoce permettra de prévenir les complications et visera à apporter la meilleure insertion possible du patient dans son cadre de vie. Alors qu’une prise en charge plus tardive aura pour objectif de limiter l’installation des troubles orthopédiques, d’entretien articulaire et musculaire. 108 La prise en charge des patients atteints de dystrophie FSH doit être réalisée par une équipe pluridisciplinaire (Gautheron, 2002). Elle va permettre de mettre en commun les visions propres de chaque discipline. Elle a pour buts d’optimiser le diagnostic et la prise en charge, de prévenir les complications et leurs conséquences, de favoriser l’autonomie et la qualité de vie, d’informer le patient ainsi que l’entourage vis-à-vis de la pathologie, d’intégrer le patient aux soins, d’apporter les meilleurs soins possibles, et d’individualiser le traitement (Fort, 2001 ; Giraudeau, 2011). Une approche selon le modèle biopsychosocial pourrait être intéressante lors de la prise en charge de patients atteints de dystrophie FSH. En effet, elle prend en compte simultanément les facteurs biologiques, psychologiques et sociaux (Berquin, 2010). De plus, la lourdeur du handicap, son évolution, les implications rééducatives, éducatives impliquent la famille, l’environnement amical, professionnel ou scolaire. C’est pourquoi, on ne peut imaginer aujourd’hui une prise en charge qui ne prenne pas en compte ces multiples facteurs. Selon Jean-Claude Riou, kinésithérapeute conseil de L’AFM, il n’y a pas de bilans et de traitements spécifiques pour les personnes atteintes de dystrophie FSH. C’est pourquoi, le thérapeute devra réaliser des bilans individualisés. Puis, en fonction des résultats, il mettra en place un programme de traitement. Une évaluation régulière permettra d’ajuster au mieux les orientations thérapeutiques. Le traitement symptomatique visera essentiellement à préserver l’autonomie du patient le plus longtemps possible, mais aussi à prévenir les déformations orthopédiques, les rétractions musculaires, les enraidissements, les conséquences fonctionnelles et respiratoires liées à l’évolution de la pathologie et à soulager les douleurs (Giraudeau, 2011). La prise en charge kinésithérapique sera régulière et en fonction de l’évolution de la pathologie, de ses conséquences, des besoins et du mode de vie du patient. Le kinésithérapeute doit garder en tête que tous les patients ne répondent pas de la même manière aux divers traitements (Dupuy-Maury, 2012). Les difficultés des patients augmentent avec le temps, et justifient une intensification des soins. Un aspect important doit toujours être respecté lors de la prise en charge de patients atteints de dystrophie FSH : il ne faut pas que les séances induisent de douleurs, de fatigue, ou de stress (Par exemple : lors d’un renforcement musculaire). 109 Nous allons désormais justifier l’intérêt d’une technique qui n’est pas reprise dans la littérature pour soigner les patients atteints de dystrophie FSH, mais qui pourrait être une option de prise en charge intéressante : la Kinésithérapie Analytique. Chez les patients atteints de dystrophie FSH, nous pouvons supposer que le déficit de certains muscles diminue la stabilité de l’articulation. De plus, les hypersollicitations des autres muscles peuvent engendrer des décentrages articulaires. Ceux-ci seront à l’origine des contractures musculaires qui sont le reflet de la nociception. On peut émettre l’hypothèse que l’excès de tension de celle-ci pourrait accélérer la dégénérescence musculaire. En partant de cette théorie, si le thérapeute rétablit la congruence articulaire, il induira une décontracture musculaire qui pourra influencer la pathologie. L’aspect important de cette technique est qu’elle peut être utilisée en prévention. Les études de cas : Afin de mieux comprendre les patients atteints de dystrophie FSH ainsi que leur pathologie, nous avons questionné certaines personnes atteintes par la maladie sur différents aspects tels que : le diagnostic, l’évolution de la pathologie, les manifestations cliniques, la prise en charge, et leur ressenti. Différents aspect ont retenu notre attention lors de ces échanges. Tout d’abord, les manifestations cliniques et l’évolution de la pathologie étaient vraiment différentes d’une personne à l’autre. Tant au niveau des territoires musculaires atteints, qu’au niveau des symptômes extra-musculaires. C’est pourquoi, on comprend mieux que la prise en charge doit être individualisée et qu’elle doit répondre aux besoins spécifiques de chacun. De plus, les patients nous ont confiés que l’une des principales difficultés rencontrées par les kinésithérapeutes était le manque d’informations concernant la pathologie. C’est pourquoi, il était parfois difficile de mettre en place une prise en charge la plus adéquate possible. Certains patients étaient investis et essayaient d’informer au mieux leur kinésithérapeute des options de prise en charge. 110 Concernant le suivi en centre neuromusculaire, les avis divergent. En effet, certains patients étaient satisfaits de leur prise en charge, et d’autres se sentaient délaissés une fois le diagnostic posé et préféraient donc le suivi de leur médecin traitant. Les aides à la marche utilisées sont différentes d’un individu à l’autre. Cependant, un aspect n’était pas repris dans la littérature : l’atteinte des muscles des membres supérieurs rend difficile, voire impossible l’utilisation du fauteuil roulant manuel (par le patient seulement). Il est vrai que lorsque certains patients n’ont plus la force de lever les membres supérieurs au-dessus de l’horizontale, on les imagine mal faire avancer le fauteuil roulant avec la force de leurs bras. Un fauteuil électrique serait alors plus adapté à cette pathologie. De plus, il est souvent difficile pour les patients d’accepter d’utiliser des aides techniques car ils exposent à la vue de tous leur handicap. Concernant l’activité professionnelle exercée, elle est tributaire de la gravité de leurs symptômes ou du type de métier réalisé. Certains ont arrêté leur activité professionnelle, car ils étaient dans l’impossibilité de continuer. D’autres, se sont adaptés à la maladie et ont diminué leur temps de travail ou changé de secteur d’activité. Ou bien certains ont continué leur profession jusqu'à la retraite, bien qu’ils aient confié qu’il était de plus en plus difficile de travailler en fin de carrière. Enfin, les conséquences de la pathologie ont des répercussions au niveau psychologique, qui ne sont pas vécues de la même manière selon les patients. De nombreux mots qualifient les sentiments de chacun : impuissance, angoisse, inquiétude, peur de perdre son autonomie, colère, déni, acceptation, prendre du recul, investissement, incompréhension, besoin de soutien… Tant de mots qui reflètent la difficulté pour les patients d’être atteint par une maladie neuromusculaire. C’est pourquoi, le rôle de kinésithérapeute ne sera pas seulement de soigner le corps, mais aussi de toujours rester à leur écoute, afin de pouvoir les soutenir dans leur quotidien. 111 Conclusion Bien que la dystrophie facio-scapulo-humérale soit une maladie rare, les malades restent nombreux. La recherche a donc un rôle important dans la connaissance de la pathologie. A l’heure d’aujourd’hui et en dépit des progrès scientifiques récents dans la connaissance de cette maladie, il n’existe aucun traitement médical curatif. C’est pourquoi, la prise en charge est essentiellement symptomatique, et basée sur la pluridisciplinarité. Suite aux recherches dans la littérature, aux échanges avec des personnes atteintes par la maladie et des kinésithérapeutes, on peut conclure que la prise en charge kinésithérapique a effectivement un rôle important pour préserver l’autonomie du patient, prévenir les déformations orthopédiques, les rétractions musculaires, les enraidissements, les conséquences fonctionnelles et respiratoires (Fort, 2001 ; Giraudeau, 2011). Cependant, le kinésithérapeute a aussi un rôle social, et doit rester à l’écoute de son patient. Différents points sont importants dans leur prise en charge : Elle doit être individualisée, car les manifestations cliniques, l’évolution de la pathologie, les besoins des patients sont variables. Il n’y a pas de bilans et de traitements spécifiques : le kinésithérapeute devra réaliser des bilans personnalisés, puis en fonction des résultats, il mettra en place un programme de traitement. Les patients doivent bénéficier de la bonne prise en charge au bon moment. Les séances ne doivent pas induire de douleurs, de fatigue, ou de stress. Une prise en charge fondée sur la multidisciplinarité permettra d’optimiser le diagnostic et la prise en charge, de prévenir les complications et leurs conséquences, de favoriser l’autonomie et la qualité de vie, d’informer le patient ainsi que l’entourage vis-à-vis de la pathologie, d’intégrer le patient aux soins, d’apporter les meilleurs soins possibles, et d’individualiser le traitement. 112 Pour conclure, ce travail de fin d’étude a été très enrichissant. Il m’a permis de découvrir grâce à deux méthodes différentes une pathologie que je ne connaissais pas : L’étude de la littérature m’a donné une vision plus théorique de la maladie et de sa prise en charge. Les échanges avec les patients m’ont fait prendre conscience de l’aspect plus social de la prise en charge, et de leur ressenti face à la maladie. « Aucune maladie n'est trop rare pour ne pas mériter attention » (Orpha.net) 113 Bibliographie : Amis FSH. (s.d.). En ligne http://www.fshd-group.eu/, consulté le 8 janvier 2014. 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