Sommaire • Chirurgie ambulatoire : se poser les vraies questions • Méthodes cœlioscopiques : évaluation de la chirurgie digestive • Infections du site opératoire : des progrès sont enregistrés • Hygiène : la préparation cutanée • Circulations au bloc opératoire : l’exemple de l’Hôpital américain de Paris • Douleur postopératoire : désormais évitable dans une intervention programmée • Chirurgie de l’adulte : nutrition artificielle selon les conférences de consensus • IADE et IBODE : deux spécialisations pour le bloc • Gaz anesthésiques : des risques sous-estimés chez les soignants Bloc opératoire Crise insurmontable ou salutaire mutation ? Un rapport sur l’état de la chirurgie en France a été remis au mois de février au ministre de la Santé Jean-François Mattei. Il montre la crise profonde de la spécialité, marquée par des bouleversements technologiques, mais surtout par un manque de vocations. ans un document d’une cinquantaine de pages (“La chirurgie française en 2003”, ministère de la Santé), le Pr Jacques Domergue (CHU de Montpellier) et le Pr Henri Guidicelli (CHU de Grenoble) appellent les pouvoirs publics à réagir en urgence. Les raisons de la crise en chirurgie sont complexes, notamment parce qu’elles sont différentes selon les secteurs d’activités chirurgicales et selon les spécialités. Par exemple, certaines spécialisations comme l’ophtalmologie pourraient atteindre 40 % d’augmentation de l’activité alors que certaines interventions chirurgicales sont remplacées par des gestes percutanés. « Les chirurgiens voient leur fonction dévalorisée, ce qui se traduit dans le concret par des revenus qui ne sont plus proportionnés à la pénibilité des tâches, par les charges qui ont augmenté (en dernière date, les primes d’assurance). A cela est venue s’ajouter la judiciarisation de la profession, le praticien passant insidieusement d’une obligation de moyen à une obligation de résultat tant la pression des malades est forte », expliquent les chirurgiens auteurs du rapport. Mais la pénibilité du métier se mesure surtout par le poids de la solitude professionnelle, de la pression psychologique, des adaptations aux évolutions technologiques et de la crise des cliniques. Par ailleurs, des conflits entre pouvoirs médicaux et pouvoirs administratifs en raison des contraintes de tous ordres sont de plus en plus aigus. Quant à l’urgence médicale, elle se heurte à différentes difficultés, dont la spécialisation de plus en plus grande des praticiens (70 % des urgences sont assurées par des chirurgiens contractuels) et la mauvaise répartition des effectifs sur le territoire. Certaines régions (Île-de-France, D PACA) ont une densité médicale double de celle des régions sous-médicalisées (Centre, Picardie). « La médecine en général et l’acte chirurgical en particulier tendent à devenir un produit consommable que l’on souhaite se voir livré avec garantie et service après vente », constatent les auteurs du rapport. Cependant, la seule attribution de moyens supplémentaires ne saurait remplacer la nécessité de stratégies nouvelles concernant l’offre de soins mais aussi la formation des chirurgiens et des équipes qui rendent le bloc opératoire sûr, performant, en phase avec les besoins de la population. Il est intéressant de constater que ce rapport rejoint celui du Projet hôpital 2007, qui souligne les dysfonctionnements majeurs responsables de la crise morale, démographique, financière et managériale qui secoue l’hôpital. Ce sont : les textes, règlements et autres contraintes sécuritaires ; la bureaucratie et l’augmentation des poursuites judiciaires ; le manque de personnel soignant, l’insuffisance des investissements en matériels et, plus généralement, une pénurie qu’ils n’ont pas créée et qu’ils doivent gérer ; la réglementation des trente-cinq heures qui n’a fait qu’aggraver une situation déjà précaire ; l’absence de prise en compte de la pénibilité et de la responsabilité dans les rémunérations ; les difficultés d’information rencontrées par les malades et leur famille (délais d’attente aux urgences et pauvreté des établissements de soins de suite et de long séjour). Mais les crises sont nécessaires et portent, elles, leur solution. Encore faut-il que le noble art se pratiquant plus que jamais en équipe sache faire taire les intérêts individuels, secouer les habitudes et devenir un domaine ouvert à un monde extrêmement mouvant. Andrée-Lucie Pissondes Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 19 Bloc opératoire Chirurgie ambulatoire Se poser les vraies questions La chirurgie ambulatoire a connu un essor certain ces dernières années. Seule l’analyse clinique, épidémiologique et économique de la chirurgie ambulatoire peut favoriser le nécessaire respect de la qualité des soins et la maîtrise des coûts de la santé. fin des années 1990, une intervention chiambulatoire était pratiquée pour A3 %larurgicale de la population en un an (1). La chirurgie ambulatoire permet aux patients de regagner leur domicile le jour même de l’intervention chirurgicale. Il s’agit d’actes équivalents par leur nature à ceux habituellement effectués dans le cadre de l’hospitalisation classique. La notion de chirurgie ambulatoire apparaît dès le début du XXe siècle dans la littérature. Mais ce n’est que dans les années 1970 qu’elle commence à se développer. Elle connaît une croissance rapide à partir des années 1980, en particulier aux États-Unis. Les progrès en matière d’anesthésie, de technologies médicales et chirurgicales et de modalités thérapeutiques ont contribué à ce développement. L’analyse de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES) sur la nature des actes effectués en ambulatoire a permis d’identifier ceux le plus souvent réalisés ainsi (2). En fait, la plupart de ces procédures ne sont pas chirurgicales. Ce sont des actes que l’on a toujours réalisés sans hospitalisation : IVG, endoscopies digestives ou urinaires avec ou sans biopsie, hystéroscopies, excisions de kystes ou de lésions cutanées, poses de drains transtympaniques. Parmi les procédures chirurgicales ambulatoires, quatre spécialités permettent une réelle alternative à l’hospitalisation. Ce sont les chirurgies générale, ophtalmologique, orthopédique et gynécologique. Le rapport de l’ANAES s’appuie sur l’analyse des procédures ayant fait l’objet d’évaluations publiées. Pour les hernies inguinales, il ne semble pas y avoir d’obstacles majeurs au traitement par la chirurgie ambulatoire, en termes de survenue de complications et de récidives. Pour la chirurgie de la cataracte, l’analyse des études a mis en évidence une absence de différence entre prise en charge ambulatoire et prise en charge traditionnelle en termes de survenue de complications et de résultats (acuité visuelle à 6 mois). Lors de la publication du rapport de l’ANAES, il n’existait pas d’études pour la chirurgie du canal 20 carpien permettant de comparer la pratique de la chirurgie ambulatoire et celle de la chirurgie traditionnelle. Pour la chirurgie des tumeurs du sein, de nombreuses études soulignaient l’évolution actuelle vers la diminution de la durée d’hospitalisation, sans parler de chirurgie ambulatoire proprement dite. Cette diminution de la durée d’hospitalisation ne valait pas pour la ponctionbiopsie diagnostique. La pratique ambulatoire de la chirurgie du sein a, par ailleurs, été beaucoup décrite. Ces études ne mentionnaient pas de complications particulières. Mais elles ne constituaient pas des études comparatives entre chirurgies ambulatoire et traditionnelle pour autant. L’ANAES concluait, malgré le peu d’études disponibles, qu’“il apparaît possible de pratiquer ces gestes en ambulatoire sans augmentation du risque de complication ou de récidive”. Économie Les évaluations économiques menées sur ces indications cliniques montrent que la prise en charge ambulatoire mobilise moins de ressources en termes de coût direct. Quelques remarques sont toutefois nécessaires : • Les études économiques comparatives retenues, faites aux États-Unis, au Canada et au Royaume-Uni, posent des problèmes de transposition. Seules deux études françaises avaient pu être retenues. • Dans ces études, les gains de ressources mobilisées pour la chirurgie ambulatoire tiennent surtout à la durée d’hospitalisation plus courte, faute de valorisation pertinente d’autres éléments d’arbitrage. • La revue de la littérature économique permet peu de préciser les coûts indirects et extrahospitaliers. Elle n’a pas non plus permis d’identifier des études coût-efficacité avec des calculs de ratios. Se voulant rigoureux, les experts de l’ANAES ont dû conclure que “la synthèse des informations disponibles” ne rendait pas compte de “la réalité des gains économiques à associer à la réalisation d’un acte opératoire en ambulatoire”. En Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 effet, certains éléments sont mal précisés. Ce sont “les coûts directs dans une logique de filière de soins en raisonnant en termes d’épisodes de soins”, allant de la consultation préchirurgicale à une période post-intervention restant à définir. Les arrêts de travail prescrits par le chirurgien, voire, en post-hospitalisation, par le médecin traitant, ne sont guère spécifiés. On compte, parmi les éléments mal clarifiés, “les coûts ‘imputables’ aux aides bénévoles et aux ressources familiales mobilisées, l’unité pertinente d’analyse devant être la famille ou les proches et pas seulement l’individu”. Les experts soulignent malgré tout “l’importance des critères d’éligibilité des patients pour l’une ou l’autre des modalités de prise en charge”. Audelà de la nature de ses troubles, des critères cliniques et économiques, le patient doit pouvoir prendre part au choix et donner son “consentement éclairé”, c’est-à-dire après avoir reçu une information aussi complète que possible. “Enfin, la préférence individuelle du patient devra toujours demeurer un élément d’arbitrage.” L’équipe chirurgicale conserve un travail d’évaluation des critères cliniques. Le risque de complications infectieuses, nosocomiales et thromboemboliques doit être apprécié. On jugera moins du risque de survenue de complications peropératoires. Les techniques chirurgicales et anesthésiques utilisées sont en effet les mêmes en chirurgie ambulatoire et en chirurgie traditionnelle. En revanche, les dates de survenue des complications postopératoires seront étudiées, ainsi que les modalités de leur prise en charge. Le rapport de l’ANAES abordait aussi l’encadrement d’un développement harmonieux de la chirurgie ambulatoire. En France, on note un déséquilibre d’activité entre les secteurs privé et public. En effet, 30 % des actes chirurgicaux sont réalisés en ambulatoire dans le secteur privé, mais 5 % seulement dans le secteur public. Outre les différences de gravité des pathologies accueillies par les secteurs public et privé, cette dissymétrie serait liée aux modalités de tarification, leurs applications ne prenant guère en compte les possibilités de substitution qu’offre la chirurgie ambulatoire. Tout établissement souhaitant développer une activité ambulatoire devrait enfin considérer la densité de son environnement ou ses liens possibles avec des réseaux de soins. Marc Blin (1) Comment se soigne-t-on en France ? de Andrée et Arié Mizrahi, Presses universitaires de France, coll. “Médecine et société”, Paris, 2003. (2) La chirurgie ambulatoire, évaluation technologique et économique, ANAES, mai 1997. Méthodes cœlioscopiques Évaluation de la chirurgie digestive Les techniques cœlioscopiques ne cessent de se développer. En chirurgie digestive, les pratiquer ne suffit pas. Il importe de connaître les indications de ces méthodes, ainsi que les complications et la mortalité qu’occasionne leur usage. Une formation spécifique des chirurgiens à ces nouvelles procédures est indispensable. ANAES a fait le point sur les évaluations des méthodes cœlioscopiques en chirurgie L’ digestive (1). La cholécystectomie La cholécystectomie reste indiquée chez un patient souffrant d’une lithiase vésiculaire symptomatique ou compliquée. Elle n’est pas justifiée pour les patients porteurs d’une cholécystectomie asymptomatique. La cholécystectomie par cœlioscopie apporte des avantages que la chirurgie conventionnelle n’apporte pas : – diminution des complications médicales postopératoires ; – diminution de la durée du séjour hospitalier ; – meilleur confort du patient en termes de douleur et de mécanique ventilatoire. Cependant, ces techniques cœlioscopiques réclament une durée d’intervention globale supérieure à celle des opérations réalisées avec des méthodes conventionnelles. Une formation de qualité des chirurgiens aux interventions sous cœlioscopie est impérative avant qu’ils puissent les pratiquer. On sait en outre que la durée d’in- Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 ●●● 21 Bloc opératoire ●●● tervention, mais surtout les complications, diminuent avec l’expérience du praticien. L’appendicectomie Chez l’homme adulte et l’enfant, les bénéfices de l’appendicectomie par cœlioscopie n’ont pas été démontrés. La seule indication retenue reste à visée diagnostique chez la femme, afin de pouvoir éliminer une autre pathologie, en particulier gynécologique. La cure de hernie hiatale A quelques exceptions près, rien ne démontre que la cœlioscopie apporte un bénéfice dans le traitement de la hernie hiatale. Les études examinées par les experts de l’ANAES ne permettaient pas de le conclure. “La pose de plaque percœlioscopique est indiquée uniquement chez les patients porteurs d’une hernie bilatérale, d’une hernie récidivante, chez des obèses ou chez des patients porteurs d’une mauvaise paroi abdominale”. Vagotomies, chirurgie colorectale et de la hernie inguinale Lors de la publication de ce rapport, les données paraissaient insuffisantes aux auteurs pour bien évaluer les autres procédures : vagotomies, chirurgie de la hernie inguinale, chirurgie colorec- tale. Elles doivent toutefois respecter les recommandations en matière de “bonnes pratiques”. Ces procédures cœliochirurgicales doivent faire l’objet d’études scientifiques rigoureuses, en matière tant de faisabilité que d’efficacité. L’information du patient Ce rapport sur la chirurgie digestive est complété par un autre sur la cœlioscopie en chirurgie gynécologique (2). Un troisième rapport de l’ANAES porte sur les enjeux économiques de la diffusion de la chirurgie cœlioscopique en France (3). Rappelons enfin les recommandations de la Société française de chirurgie. Les patients pour lesquels une intervention chirurgicale abdominale est envisagée doivent être informés que “la méthode cœlioscopique comporte des avantages et inconvénients spécifiques, mais que, comme tout acte chirurgical, elle peut exposer à des complications graves”. Ils doivent savoir que “la conversion en chirurgie ouverte est une mesure de sécurité qui ne peut jamais être exclue a priori”. M.B. (1) Évaluation des méthodes cœlioscopiques en chirurgie digestive, ANAES, juin 1994 (12,20 euros). (2) Évaluation des méthodes cœlioscopiques en chirurgie gynécologique, ANAES, juin 1994 (12,20 euros). (3) Diffusion de la chirurgie cœlioscopique en France : quels enjeux économiques ? ANAES, juin 1994 (12,20 euros). Infections du site opératoire Des progrès sont enregistrés L’Institut de veille sanitaire (InVS) publie en 2003 les résultats de l’enquête nationale du Réseau national de surveillance des infections nosocomiales. Les infections du site opératoire (ISO) touchent 1,93 % des patients. ur les 162 151 personnes opérées, en 1999 et 2000, dans les services volontaires pour Sparticiper au Réseau d’alerte, d’investigation et de surveillance des infections nosocomiales (RAISIN), 3 129 ont déclaré une infection du site opératoire. La chirurgie digestive en tête Certains types de chirurgie présentent plus de risques d’infections du site opératoire. Le pourcentage de patients touchés est le suivant : – chirurgie digestive : 3,89 % ; 22 – chirurgie des polytraumatisés : 3,57 % ; – chirurgie thoracique : 3,04 % ; – chirurgie urologique : 2,87 % ; – chirurgie cardiaque : 2,21 % ; – chirurgie gynéco-obstétricale : 1,81 % ; – chirurgie vasculaire : 1,76 % ; – neurochirurgie : 1,74 % ; – chirurgie du système lymphatique : 1,67 % ; – chirurgie de peau et tissus mous : 1,52 % ; Les patients subissant certaines autres formes de chirurgie s’en tirent mieux : – chirurgie ORL et stomatologique : 1,19 % ; Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 – chirurgie orthopédique : 1,08 % ; – chirurgie du système endocrinien : 1,03 % ; – chirurgie ophtalmologique : 0,27 %. Les transplantations d’organes restent bien sûr hors catégorie, avec un taux élevé : 8,87 % des patients touchés par des infections nosocomiales. Une chute de 12 % en 5 ans Les enquêtes nationales de prévalence des infections nosocomiales menées en 1996 et 2001 avec 1 533 établissements permettent d’apprécier les progrès. On observe, avec l’enquête 2003, une diminution totale de 12 % du taux de patients infectés. Les auteurs soulignent une difficulté à laquelle ils se sont heurtés dans le recueil de ces données. Le suivi de ces patients ne couvre pas toujours les 30 jours après l’intervention, comme le recommandent les Centres interrégionaux de coordination des Comités de lutte contre les infections nosocomiales (C.CLIN). Ce manque de suivi est tempéré par le fait que 75 % des ISO surviennent dans les 17 jours qui succèdent à l’intervention. Mais le suivi des patients après la sortie reste recommandé. Au départ de l’établissement, une consultation avec le chirurgien doit systématiquement avoir été programmée. Cette recommandation est plus rarement mise en œuvre quand il s’agit de chirurgie légère ou ambulatoire. Au bout du compte, 59 % des infections recensées étaient superficielles, 26 % étaient profondes, et 14 % concernaient un organe, une cavité, un os. Ces résultats montrent que les ISO profondes représentent, en France, une proportion comparable à celle constatée aux États-Unis. Cet aspect est encourageant. Leur localisation atteste de la gravité potentielle de ces ISO. Elles sont accompagnées de fréquentes reprises opératoires, d’un allongement de la durée d’hospitalisation, d’une mortalité accrue. L’étude du RAISIN offre surtout un outil de référence pour les enquêtes à venir. Il permettra d’apprécier les résultats de la politique de lutte contre les maladies nosocomiales en France. M.B. Hygiène La préparation cutanée Certaines règles de préparation de l’opéré doivent être respectées pour contribuer à prévenir les infections nosocomiales. Cette préparation intervient dès la veille de l’intervention, puis, le jour même, dans le service et en salle d’opération. a préparation de l’opéré en chirurgie programmée vise à réduire le nombre de microLorganismes présents sur la peau en agissant le • On gardera la même gamme de produits jus- plus largement possible sur les flores transitoires et résidentes dans le but de diminuer le risque infectieux. antiseptique est indiqué. Des explications doivent être données au patient. • S’il est porteur de prothèse dentaire ou auditive, ou de lentilles de contact, le futur opéré sera prévenu qu’il devra les ôter le jour de l’intervention. • Une femme ne se maquillera pas et ne portera pas de vernis ce jour-là. • Le rôle préventif et le déroulement de la douche seront expliqués. A l’issue de sa consultation, une ordonnance pour le savon antiseptique est remise au patient, ainsi qu’une fiche technique sur la douche. La douche obéit à quelques règles. • Le vernis des ongles est retiré. La veille de l’intervention La veille de l’intervention, le patient prendra une douche et un shampooing, avec ses savons et shampooing personnels (neufs de préférence) ou avec un savon antiseptique (Bétadine Scrub® ou Hibiscrub® si contre-indication). • Il est recommandé de ne pas utiliser de rasoir pour la dépilation. • En matière de savon antiseptique, on prendra garde aux éventuels risques d’allergie pour le patient. qu’au bloc opératoire. • En cardiologie, comme en orthopédie, le savon Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 ●●● 23 Bloc opératoire ●●● • Le patient est douché en commençant par le haut du corps pour finir par le bas. Le matériel • La tête, les cheveux et l’ensemble du corps sont soigneusement mouillés sous la douche, et savonnés. • On insiste sur les oreilles, les mains, les aisselles, le nombril, les organes génitaux, le pli interfessier, et les pieds, en particulier entre les orteils. Il faut respecter le temps de contact de l’antiseptique (indiqué sur le flacon) : 1 minute avec Hibitane® alcoolique, 30 secondes avec Bétadine® dermique ou l’alcool iodé. • Le patient est rincé abondamment. • Il est séché avec une serviette propre. • On l’aide à mettre des vêtements propres. • Les ongles sont coupés et curés. Dans le service, le jour de l’intervention Le moins de temps possible avant l’intervention, et avant la prémédication, le site opératoire du patient sera dépilé. Puis ce dernier prendra une douche. La dépilation L’infirmière se lave les mains (lavage simple). Elle manipulera la tondeuse comme un stylo, afin de tondre la surface préalablement déterminée par l’équipe chirurgicale et consignée sur un schéma selon le type de l’intervention. Elle peut tendre la peau pour les zones difficile d’accès. Elle coupe le poil à contresens (ou à l’envers si la zone à dépiler le nécessite). Elle jettera la lame, après usage, dans le container réservé aux objets tranchants. La douche La douche du patient est réalisée sous la responsabilité de l’infirmière. Un savonnage complet du corps est fait, toujours de haut en bas. • Un lavage des cheveux est effectué avec un shampooing doux ou un savon antiseptique selon le type de chirurgie. • Pour le visage, on insiste sur le nez et les oreilles. • Le patient est douché en veillant aux points stratégiques : – thorax ; – membres supérieurs : insister sur les aisselles ; – abdomen : insister sur l’ombilic ; – toilette génitale soigneuse ; – membres inférieurs : creux poplités ; entre les orteils ; plis inguinaux. Cette douche est complétée par un brossage des dents. Après la douche, il faut : – vérifier la dépilation ; – s’assurer du passage aux toilettes ; 24 • Le matériel de dépilation comprend : – une tondeuse ; – une lame à usage unique ; – alcool et compresses ; – une protection (pour éviter les souillures de l’environnement) ; – une poubelle (pour les déchets). • Lors de la douche, on utilise : – un savon antiseptique : Bétadine® Scrub, ou Hibiscrub® si contre-indication. – proposer une chemise et un lit (drap + alèze) propres ; – dispenser la prémédication à l’horaire déterminé par l’anesthésiste ; – consigner le type de préparation cutanée sur la fiche de liaison avec le bloc. En salle d’opération La préparation du patient en salle d’opération comprend quatre étapes : • La panseuse lave le champ opératoire avec Bétadine Scrub® (ou Hibiscrub®) en faisant appel au même produit que celui utilisé lors de la douche. • Elle rince le champ à l’eau stérile et le sèche. • Le premier champ stérile est badigeonné de Bétadine® dermique (ou Hibitane® champ) par la panseuse. • Le deuxième champ est badigeonné de Bétadine® (ou Hibitane®) sous la responsabilité du chirurgien. En cas d’utilisation du brancard, on aura soin de nettoyer le brancard avec Alkaspray®, et de changer l’alèse entre chaque patient. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 M.B. Nettoyage et décontamination de la tondeuse Après chaque utilisation : – ouvrir la tête de la tondeuse ; – brosser la tête ; – la nettoyer avec de l’alcool ; – remettre en charge. En fin de journée : – ouvrir la tête de la tondeuse ; – brosser la tête ; – la frotter avec une compresse imbibée d’Alkazyme® ; – rincer ; – sécher ; – remettre en charge. Circulations au bloc opératoire L’exemple de l’Hôpital américain de Paris De nombreux apports des nouvelles technologies et de l’ergonomie sont mises en œuvre à l’Hôpital américain de Paris pour innover en matière de sécurité anti-infectieuse. tique. Les pendules, les interphones, les télécommandes sont également intégrés. Les murs sont totalement lisses. » Ces conditions permettent un nettoyage complet et rapide entre chaque intervention, sans perturber les blocs voisins. Dans les salles d’opération, l’air provient du plafond. Il passe par une double filtration et parvient parfaitement stérile au-dessus du champ opératoire. a pris de l’avance sur toutes les normes saen vigueur en France », affirme le ODr nnitaires Roland Chiche, chirurgien urologue président du Comité d’utilisation des structures invasives de l’Hôpital américain de Paris. Seule les personnes munies de codes peuvent entrer au bloc. Passé l’entrée, où il faut ainsi montrer patte blanche, tout est filtré : les personnes, le matériel, l’eau et l’air. Le sas de sécurité s’ouvre sur un univers aseptisé. Le brancard, la table et le patient Le patient pénètre sans son brancard dans le bloc. Il passe sur un tapis roulant, le “plateau de transfert”, afin d’éviter les contaminations. Puis il est installé sur une table d’opération mobile. Elle sera par la suite fixée à un pied, dans la salle d’opération. L’opéré restera sur cette table. Il ne la quittera pas jusqu’à sa sortie du bloc opératoire. Alors seulement, l’intervention terminée, la table est ôtée pour être lavée et décontaminée dans une machine prévue à cet effet. « Très peu d’hôpitaux français sont équipés de ce système, précise Albert Halter, responsable des projets hospitaliers chez Maquet, l’un des premiers fabricants mondiaux d’équipements médicaux. Il est entièrement démontable, permettant l’intervention rapide en maintenance ou l’ajout aisé de nouveau matériel. » La conception du bloc Le bloc de cinq salles d’opération de l’Hôpital américain et toutes les annexes occupent 1 300 m2. L’espace et l’ergonomie priment. Les rangements, le double vestiaire, la salle d’analyse des dossiers, comme les huit boxes de la salle de réveil ou la salle réservée aux anesthésies locorégionales sont vastes. Les couloirs de circulation sont larges ; les zones d’attente pour les patients sont calmes. Les salles d’opération sont éclairées par de grandes fenêtres. Elles sont spacieuses. La plus grande fait 55 m2. Cela favorise l’installation de tout le matériel, notamment les robots, la vidéo et les microscopes. Cela facilite aussi les mouvements des soignants. « Quant à la circulation des personnes et des matériels, explique Albert Halter, le sale ne croise jamais le propre. » Afin que toutes les salles d’opération puissent être désinfectées après chaque intervention, plafonds et cloisons sont constitués de panneaux étanches en acier inox. « Tout le matériel est encastré dans les murs, explique le Dr Roland Chiche. C’est le cas des prises d’air, des colonnes vidéo et de l’informa- © Lj Com « Les soignants En arrivant, les soignants, hommes et femmes, se dirigent vers leurs vestiaires respectifs. Il s’y déshabillent et revêtent un pyjama stérile. Le matériel et les médicaments nécessaires aux interventions chirurgicales transitent par une “zone de déboîtage”. Avant de pénétrer dans la zone stérile, les patients, le personnel et les matériels passent à travers un système de sas. Cela permet de ne pas laisser rentrer d’air contaminé dans la zone stérile. Dans la salle d’eau, une imposante horloge rappelle aux chirurgiens qu’un lavage des mains dure au moins trois minutes. Les vasques de lavage des mains sont équipées de filtres à eau stérilisée. Pour une hygiène meilleure encore, l’ouverture automatique des portes peut se faire par commande au pied ou au genou. M.B. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 25 Bloc opératoire Douleur postopératoire Désormais évitable dans une intervention programmée Selon les spécialistes, la douleur après une intervention programmée est une douleur qui doit devenir rare. En effet, si l’interrogatoire est bien mené, si le patient est bien informé, les manifestations de la douleur doivent entrer dans un protocole de prévisions qui s’adaptent à chaque patient et chaque type d’interventions. une enquête menée en 1993, plus de 45 % des personnes opérées dans les cinq anSnéeselon précédentes se souvenaient en termes négatifs de leur intervention, principalement à cause des suites opératoires, de la douleur surtout. Cependant, dans les motifs de crainte des patients à se faire opérer, la douleur postopératoire vient en deuxième, derrière le risque d’accident d’anesthésie, mais devant la peur d’une faute technique chirurgicale. Dans la même enquête, mais tournée cette fois vers les soignants, les anesthésistes avouaient ne pas être toujours très attentifs à soulager la douleur, pendant que les infirmières affirmaient être mal formées pour répondre à la demande des patients. Enfin, 20 % des opérés affirment ne pas avoir signalé la douleur, la considérant comme normale. Comment mieux définir la douleur ? Quels en sont les caractères et les facteurs d’apparition ? Ceux-ci sont liés au patient. C’est aux âges extrêmes de la vie que la douleur est le plus mal évaluée par les soignants parce qu’elle est mal exprimée. Longtemps, la douleur du nouveau-né a été niée alors que, si son arbre neurologique est complet à la naissance, les mécanismes physiologiques d’inhibition de la douleur ne sont pas en place. Un nouveau-né peut donc ressentir des manifestations no- Textes législatifs • Circulaire ministérielle du 6 mai 1995 « La prise en compte de la dimension douloureuse physique et psychologique des patients et le soulagement de la souffrance doivent être une préoccupation constante de tous les intervenants. » • Décret du 15 mars 1993 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession d’infirmier « L’infirmier a le devoir de prévenir et d’évaluer la souffrance et la détresse des personnes et de participer à leur soulagement. » 26 ciceptives autant, si ce n’est plus, qu’un adulte. Chez la personne âgée, il semble que la douleur chronique soit mieux supportée que la douleur aiguë. Il s’agirait d’un phénomène de presbyalgésie. Quel que soit l’âge, la douleur postopératoire doit être reconnue, combattue et prévenue. Le score d’Amiel-Tison et l’échelle Chéops sont spécifiques des douleurs postopératoires respectivement chez le tout-petit et le jeune enfant. En dehors des signes subjectifs, une modification du rythme cardiaque, de la pression artérielle ou de la fréquence respiratoire est aussi un indicateur de douleur à interpréter dans le temps. Si le sexe n’a pas d’influence sur le risque d’apparition d’une douleur, l’anxiété, elle, est un facteur prédisposant et aggravant. Parmi les facteurs personnels, l’origine ethnique joue un rôle. La douleur, plus masquée chez les gens du Nord, sera plus facilement extériorisée chez ceux originaires du Sud. Enfin, les patients qui ont des difficultés ou qui n’arrivent pas à communiquer avec le personnel soignant souffrent davantage. A côté des facteurs personnels existent également ceux liés au type de l’intervention : selon le site, il est possible de prévoir l’intensité de la douleur postopératoire. Sont considérées comme les plus algogènes : les interventions sur le thorax, sur l’abdomen susombilical mais aussi les opérations sur les grosses articulations et sur la colonne vertébrale de même que l’hémorroïdectomie ou la réduction d’un hallux valgus, particulièrement algiques. Selon la voie d’abord, la douleur est également différente : elle est ainsi nettement plus importante à la suite d’une laparotomie qu’à celle d’une cœliochirurgie. Il ne faut pas oublier les douleurs résultant de la mise en place de sondes, de cathéters et de redons. La douleur est en outre particulièrement intense lors du retrait d’un corps étranger. Moyens thérapeutiques L’OMS a classé les médicaments antalgiques en trois niveaux, selon une puissance d’action croissante. En dehors des voies orales possibles, l’analgésie contrôlée par le patient (ACP) est efficace. En Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 postopératoire, la morphine est l’un des meilleurs antalgiques. Son inconvénient est sa rapidité de résorption, qui en limite la prescription excepté si on l’intègre dans l’ACP. Le patient adapte lui-même, sans avoir besoin d’appeler un soignant, les doses de morphine en fonction de sa douleur. Les doses à ne pas dépasser sont prescrites par le médecin quotidiennement. Les études montrent que, généralement, les doses autoinjectées sont inférieures à ce qu’elles auraient été si les injections avaient été pratiquées par le personnel soignant. Un personnel L’ACP pratique Les trois paramètres à déterminer au départ sont : 1. la dose délivrée à chaque injection, soit le bolus (entre 0,5 et 1,5 mg en moyenne) ; 2. la durée de la période réfractaire pendant laquelle aucune autre dose ne peut être autoinjectée (en moyenne entre 7 et 10 minutes) ; 3. la dose maximale journalière (en moyenne 16 à 24 mg pour 4 heures). ●●● Score Amiel-Tison pour l’enfant de 0 à 3 mois Score enfant éveillé au moment de l’examen Sommeil pendant les 30 minutes précédentes 0 1 2 Non Courtes périodes > 5 mn Sommeil calme > 10 mn Mimique douloureuse Qualité du cri Marquée permanente Répétitif, aigu, douloureux Peu marquée intermittente Normal, modulé Calme et détendue Pas de cri Motricité spontanée Excitabilité spontanée Agitation incessante Trémulation, clonies, Moro spontané Agitation modérée Réactivité excessive Motricité normale Calme Crispation des doigts, mains, pieds Très marquée, globale Non, quelques mouvements anarchiques Peu marquée, dissociée Discontinue, interrompue par des cris Absente Forte, rythmée, pacifiante Évaluation globale du tonus Consolabilité Très hypertonique Non après 2 mn d’effort Modérément hypertonique Calmable après 1 mn d’effort Normal pour l’âge Calmable en moins de 1 mn Sociabilité Absente Difficile à obtenir Facile, prolongée Succion Score OPS de douleur postopératoire de l’enfant de 1 à 5 ans Observations Pression artérielle Critères ± 10 % de valeur préopératoire ± 10 à 20 % de valeur préopératoire ± 20 à 30 % de valeur préopératoire Pleurs Absents Présents, mais enfant consolable Présents, enfant inconsolable Absents Intermittents modérés Permanents Enfant calme, endormi Modérée Hystérique Pas de douleur exprimée, enfant calme Douleur modérée Douleur localisée verbalement ou par attitude Nécessité d’un traitement antalgique Mouvements Agitation Évaluation verbale ou corporelle Si score > 3 Scores 0 1 2 0 1 2 0 1 0 0 1 2 0 1 2 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 27 Bloc opératoire ●●● soignant qui, comme nous l’affirme Gaëlle, infirmière en chirurgie viscérale, « ne se sent pas brimé de ne pas contrôler les doses administrées, ni même spolié d’une partie de pouvoir thérapeutique. Au contraire, le temps libéré nous permet d’être plus présent auprès d’un malade moins assisté et plus autonome à condition de bien l’avoir renseigné sur son état et sur son traitement. » Surveillance d’un traitement morphinique La dose en toutes lettres, la date et l’heure de début de traitement, le nom et la signature du prescripteur doivent toujours être soigneusement notés. En cas de branchement en Y, on posera une valve anti-reflux. Comme tout traitement antalgique majeur, la morphine est susceptible d’avoir des effets se- condaires. Il convient d’en détecter les signes. Parmi les paramètres étudiés, on vérifiera toutes les heures : – la fréquence respiratoire : si elle devient inférieure à 8 cycles par minute, il convient d’appeler un médecin ; – la pression artérielle et la fréquence cardiaque ; – le degré de sédation à l’aide d’une échelle d’évaluation ou sur des items définis plus haut. Doivent aussi être notés pour être rapidement jugulés : les nausées et les vomissements, les difficultés mictionnelles, les troubles du transit, les éruptions cutanées, un prurit. En fonction du résultat des données, le médecin pourra, au mieux, adapter les doses de morphine, et combattre, si besoin, les effets secondaires. Jacques Bidart Chirurgie de l’adulte Nutrition artificielle selon les conférences de consensus La nutrition artificielle est une thérapeutique de substitution de l’alimentation orale. Ses performances dépendent d’une prescription adaptée aux besoins du patient et bien surveillée. Non justifiée, elle peut lui faire courir un risque inutile. nutrition artificielle constitue un élément de la prise en charge de certains maLladesacrucial chirurgicaux. Elle est définie comme “un apport calorico-azoté exogène équivalent aux besoins du patient”, selon la Conférence de consensus sur la nutrition artificielle en chirurgie (1). Elle comporte “au moins deux des trois grands types de macronutriments (glucides, lipides, protides), des électrolytes, des vitamines et des oligo-éléments”. Pour appréhender cette dénutrition, on compare la perte de poids du patient et le poids habituel du sujet en bonne santé. Par ailleurs, l’indice de Buzby (Nutrition risk index, ou NRI) fournit une meilleure évaluation clinique de la dénutrition. Il obéit à une règle de calcul précise (NRI = 1,519 x albuminémie g.L-1 + 0,417 x poids actuel/poids usuel x 100). Une dénutrition grave est alors caractérisée par un NRI inférieur à 83,5. Des non-indications La nutrition artificielle périopératoire couvre une période de deux semaines avant l’intervention chirurgicale et deux semaines après celle-ci. Cette nutrition artificielle est inutile chez les in28 dividus peu dénutris ou ne l’étant pas, et pouvant, dès la semaine suivant l’intervention, reprendre une alimentation couvrant 60 % des besoins. On peut considérer que ces malades sont exposés, sans bénéfice thérapeutique, à un risque de complications de l’ordre de 10 %. Chez les malades sévèrement dénutris (NRI inférieur à 83,5), une nutrition artificielle est recommandée avant de subir une intervention chirurgicale majeure. Mais le type d’intervention ne constitue pas, à lui seul, une indication de nutrition artificielle préopératoire. Quant à la nutrition artificielle après l’intervention, elle est indiquée dans plusieurs cas : – chez tous les patients ayant reçu une nutrition artificielle préopératoire ; – chez les malades présentant un état de dénutrition majeur, même s’ils n’ont pas reçu de nutrition artificielle préopératoire ; – chez tout patient présentant une complication postopératoire précoce, à l’origine d’un hypermétabolisme et de la prolongation du jeûne ; (1) “Nutrition artificielle périopératoire en chirurgie programmée de l’adulte”, Conférence de consensus, avec la participation de l’ANAES, décembre 1994. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 – chez les malades incapables de retrouver une alimentation couvrant 60 % de leurs besoins nutritionnels au cours de la semaine après l’intervention. Les modalités Les besoins caloriques (estimés à 1,5 fois ceux calculés par les équations de Harris et Benedict) approchent 30 kcal.kg.j-1 (par kg de poids corporel du patient et par jour) chez les patients alités. Ils avoisinent 35 kcal.kg-1.j-1 chez les patients ambulatoires. Les apports énergétiques sont assurés à 50-70 % par des glucides et à 30-50 % par des lipides. Le rapport des calories glucidiques à l’ensemble des calories glucidolipidiques doit être compris entre 0,5 et 0,7. Les apports requis Les besoins azotés recommandés vont de 150 à 200 mg.kg.j-1 avant l’intervention chirurgicale. Ils avoisinent 250 à 300 mg.kg.j-1 après l’intervention. Un rapport calorico-azoté compris entre 150 et 200 kcal.g-1 d’azote est recommandé. Les apports azotés sont “assurés par une solution d’acides aminés essentiels et non essentiels”. Selon cette conférence de consensus, les solutions enrichies en acides aminés à chaîne ramifiée “n’ont pas fait la preuve d’une efficacité supérieure”. Les besoins en glucides sont habituellement couverts par un apport de 3 à 4 g.kg-1.j-1. Ils ne doivent pas excéder 5 g.kg-1.j-1. Les besoins en lipides dépendent des besoins énergétiques et des apports en glucides. Les apports en lipides varient entre 1,5 et 2 g.kg.j-1. La conférence de consensus précise qu’“ils sont bien assurés par des émulsions de triglycérides à chaînes longues à 20 %, perfusées en 18 à 20 heures”. Les besoins en phosphore et magnésium sont plus élevés après l’opération. La nutrition artificielle concerne aussi les besoins en vitamines et oligo-éléments : vitamines A, B1, B6, C, E, acide folique (B9). Ils impliquent souvent une supplémentation en zinc et en sélénium. La voie entérale La voie entérale doit être utilisée, en première intention, si l’état anatomique du tube digestif le permet. Son efficacité ne diffère pas significativement de celle de la voie parentérale et son coût lui est inférieur. Le plus souvent, elle utilise une sonde nasogastrique. Dans certains cas particuliers, de durée prolongée, une gastrotomie perendoscopique ou une jéjunostomie chirurgicale lui sera préférée. Les principaux risques à surveiller sont les régurgitations (risque d’inhalation) et l’intolérance digestive. Les complications infectieuses et métaboliques sont plus rares que par la voie parentérale. La voie parentérale La voie parentérale est indiquée quand le tube digestif ne peut être exploité. Une voie veineuse centrale est souvent préférée. Les principales complications sont liées au cathéter central : complications mécaniques, surtout infectieuses ou thromboemboliques. Les complications métaboliques, ainsi qu’une surcharge hydrique, doivent être évitées par une surveillance attentive. Durée de la nutrition artificielle périopératoire “La durée optimale d’une nutrition artificielle préopératoire permettant une amélioration nutritionnelle objective ne semble pas devoir être inférieure à sept jours”, souligne la conférence de consensus. Cette durée sera plus longue en cas de situation pathologique. Elle sera raccourcie si un traitement chirurgical est rapidement nécessaire. “La durée optimale d’une nutrition artificielle postopératoire ne semble pas devoir être inférieure à 7 jours”, rappellent ces recommandations. Cette durée sera prolongée “si la dénutrition préopératoire était sévère, si la reprise de l’alimentation orale est retardée, ou s’il survient une complication postopératoire responsable d’un hypermétabolisme ou de la prolongation de l’état de jeûne”. Les complications Les recommandations de l’ANAES accordent une large place aux risques et complications de l’alimentation artificielle. Complications de la nutrition artificielle préopératoire • La pesée quotidienne et la recherche des œdèmes constituent la base de toute surveillance. • On répondra aux réactions d’intolérance digestives précoces, telles que nausées, vomissements et diarrhées (13 à 37 %), et de régurgitation, avec leurs risques d’inhalation insidieuse. • Le reflux sanguin dans le cathéter veineux périphérique sera vérifié régulièrement. Associée à des signes inflammatoires, une douleur sur le point de ponction ou sur le trajet doit conduire au retrait. Une fièvre survenant chez un malade porteur d’un cathéter central fera suspecter une infection. Des éléments biologiques simples seront surveillés régulièrement. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 ●●● 29 Bloc opératoire ●●● • Chez le grand dénutri, ce sont les suivants : glycémie, natrémie, kaliémie et phosphorémie. • Chez l’insuffisant hépatique, une recherche de cholestase et de cytolyse, un dosage des triglycérides de la phosphorémie seront effectués. • Chez l’insuffisant rénal, un ionogramme sanguin, une calcémie et une numération globulaire seront effectués. • Une gazométrie sera faite chez l’insuffisant respiratoire. Sans être interrompue, la nutrition artificielle peut être modifiée en cas de troubles hydroélectrolytiques cliniques ou biologiques, surtout chez l’insuffisant cardiaque ou rénal. Tolérance et complications de la nutrition artificielle postopératoire La tolérance et les complications peuvent être liés aux apports nutritionnels ou aux techniques d’administration. Une surveillance très codifiée concernera des éléments cliniques, biologiques et spécifiques au cathéter. Le contrôle de l’hydratation et de son retentissement éventuel sur les fonctions cardiaque, respiratoire et rénale, constituent la surveillance clinique. La surveillance du transit digestif permet de juger de la tolérance de la nutrition entérale. La surveillance biologique concerne le bilan électrolytique, ainsi que les métabolismes des glucides, lipides et protides. • On veillera au contrôle de la kaliémie et de la phosphorémie (pour le retentissement de ces ions sur la fonction musculaire et diaphragmatique). • La surveillance de la glycémie permet d’éviter les hyperosmolarités chez ces patients en phase de résistance à l’insuline. • Le contrôle de la lactescence du sérum et le dosage, deux fois par semaine, des triglycérides plasmatiques permettent d’estimer l’usage correct des substrats lipidiques et une éventuelle surcharge. • La fonction rénale est appréciée grâce aux dosages quotidiens de l’azotémie, de la créatininémie, de l’urée urinaire et de la mesure du volume urinaire. • Le risque d’atteinte hépatobiliaire est surveillé une fois par semaine au moyen de tests de cholestase et de cytolyse. Les principales complications de la nutrition parentérale, liées au cathéter, sont mécaniques, infectieuses et thromboemboliques. Cela souligne l’importance de la qualité de la mise en place du cathéter, de la surveillance de sa position correcte (radiographie), du respect des règles d’asepsie et ce, tout au long de l’utilisation de la voie veineuse centrale. L’intolérance digestive est une cause d’échec de la nutrition entérale continue par jéjunostomie. Elle est souvent causée par le non-respect du protocole de progression des apports nutritionnels. Les complications vraies (obstruction de la sonde, fistule, occlusion, péritonite) restent rares avec les équipes entraînées. Leur dépistage dépend de l’examen clinique de l’abdomen effectué deux fois par jour. Enfin, des complications septiques, respiratoires et rénales peuvent obliger à modifier la quantité et la qualité des apports nutritifs. M.B. IADE et IBODE Deux spécialisations pour le bloc Combien sont-ils et que font-ils ? Parmi les plus de 20 000 infirmiers spécialisés, il y aurait 3 941 infirmiers spécialisés de bloc opératoire et 5 636 infirmiers anesthésistes. Afin de mieux cerner leur rôle, voici l’“Iliade” des IADE et l’“Odyssée” des IBODE. n compte 19 719 infirmiers salariés spécialisés, selon la SAE (Statistique annuelle des étaOblissements, 1999). Ils représentent 6,8 % d’un total de 288 504 infirmiers. Les infirmiers spécialisés seraient 20 165 selon un recensement plus récent. Celui-ci émane du fichier ADELI des professionnels de santé, géré par les Directions départementales et régionales des affaires sanitaires 30 et sociales (DDASS et DRASS). Le fichier de 2001 recense 333 095 infirmiers, y compris les cadres. Il est ainsi possible de tenter un portrait de deux spécialisations : les infirmiers anesthésistes et ceux de bloc opératoire, dont la répartition figure dans le tableau ci-contre. On compte 5 636 infirmiers anesthésistes. Ils représentent 1,7 % de la profession infirmière. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 Parmi eux, 74 % sont des femmes et 16 % des hommes. On compte 3 941 infirmiers spécialisés de bloc opératoire. Ils représentent 1,3 % de la profession infirmière. Parmi eux, 89 % sont des femmes et 11 % des hommes. Les IBODE La formation d’IBODE permet à un infirmier de bloc opératoire d’exercer les rôles : – d’infirmier circulant ; – d’instrumentiste ; – d’aide-opératoire. Un infirmier de bloc opératoire est apte à prendre en compte la gestion des risques liée à son activité comme à son environnement, notamment la lutte contre les infections nosocomiales. L’IBODE peut exercer les fonctions d’infirmier panseur, instrumentiste et aide-opératoire au bloc opératoire et dans les secteurs où sont pratiqués les actes invasifs à visées diagnostique et thérapeutique. La fonction d’infirmier circulant, ou panseur, relève du rôle autonome, ou “rôle propre”, de l’infirmier diplômé d’État pendant la période périopératoire. risques liés au patient et à l’intervention, et nuisant à la sécurité de l’opéré : risques d’infections nosocomiales, risques liés à l’environnement technique et technologique (électriques...). Il est responsable de l’adéquation des besoins en matériel et en personnel. • L’IBODE peut gérer et coordonner l’entretien et la maintenance des locaux, matériels et instrumentations nécessaires au bon déroulement de l’intervention, dans un but de sécurité pour les opérés et le personnel. • L’IBODE est habilité à élaborer et à rédiger les documents garantissant les différentes vigilances et la traçabilité en salle d’intervention (feuille de suivi du patient, feuille d’ouverture de salle, de vérification de la table d’opération...). Il réalise la gestion administrative de l’intervention. • L’IBODE joue un rôle spécifique dans l’encadrement et la formation des personnels, afin de réduire les risques infectieux et ceux liés à l’environnement technique et technologique, pour le patient comme pour les personnels évoluant dans les secteurs opératoires (blocs opératoires, services d’endoscopies ou d’explorations chirurgicales...). L’IBODE est habilité à participer, avec un pharmacien, à la stérilisation des dispositifs médicaux, à l’organiser et à la contrôler. Rôle en phase périopératoire Au stade périopératoire, l’IBODE est responsable de la mise en œuvre d’une démarche de soins personnalisée. Elle comprendra en particulier la consultation, ou visite préopératoire, contribuant ainsi à : l’information de la personne soignée, l’accueil et la préparation du patient, l’organisation, la réalisation et la coordination des soins et leur évaluation postopératoire. • L’IBODE est responsable de l’élaboration et de la mise en œuvre des protocoles infirmiers en bloc opératoire dans le cadre d’une démarche qualité. • L’IBODE est habilité à identifier et à gérer les Rôle en phase périopératoire Un médecin pouvant intervenir à tout moment, l’IBODE est habilité à gérer les risques liés à l’environnement, au patient et à l’intervention : il participe à son installation en position opératoire, à la mise en place d’un dispositif électrochirurgical, etc. Il agit alors de façon autonome, se référant à ses connaissances. • Il répond aux besoins de l’équipe chirurgicale soit sur prescription, soit en se référant à des protocoles (mise à disposition de matériel, éclairage, etc.). ●●● La répartition des infirmiers selon leur spécialisation Nombre de femmes Nombre d’hommes Total femmes + hommes Rapport infirmières spécialisées/ IDE femmes (289 768) Rapport infirmiers spécialisés/ IDE hommes (43 327) Rapport infirmiers spécialisés (tous)/ IDE totaux (333 095) Puériculture 10 065 (99 %) 77 (1 %) 10 142 Anesthésie 4 165 (74 %) 1 471 (16 %) 5 636 Bloc opératoire 3 495 (89 %) 446 (11 %) 3 941 Total 17 725 (89,9 %) 1 994 (10,1 %) 19 719 4% 1,4 % 1,2 % 6,6 % 0,2 % 3,4 % 1% 4,6 % 3% 1,7 % 1,3 % 6% Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 31 Bloc opératoire ●●● • Avec le pharmacien, il joue un rôle spécifique dans la gestion et la dispensation des dispositifs médicaux stériles. La fonction d’instrumentiste relève du rôle de l’IBODE pendant la période péri- et peropératoire. L’infirmier DE est habilité à exercer la fonction d’instrumentiste. Elle concerne son rôle propre pour la préparation et la gestion de l’instrumentation, la prise en charge des risques infectieux (gestion des temps opératoires infirmiers, notamment temps septiques). L’instrumentiste agit à la demande de l’opérateur et de sa propre initiative pour offrir à l’opérateur et à son aide l’instrumentation requise pour le bon déroulement de l’intervention. La présence de l’opérateur est effective. L’instrumentiste est responsable avec l’opérateur du respect des règles d’asepsie de l’équipe chirurgicale. La fonction d’aide opératoire, quant à elle, relève du rôle de l’infirmier diplômé d’État pendant la période peropératoire. L’IBODE est habilité à exercer les fonctions d’aide opératoire en présence effective de l’opérateur, du médecin ou du chirurgien si l’intervention est chirurgicale. Son action est complémentaire de celle de l’opérateur, en sa présence, pour aider à la réalisation des gestes d’exploration ou de l’acte chirurgical. Sa formation lui permet d’appliquer les prescriptions du médecin. Mais il agit avec initiative sur la prévention des risques liés aux infections nosocomiales ou aux technologies. Ces fonctions sont réservées en priorité aux IBODE. Seuls les infirmiers possédant le diplôme d’État de bloc opératoire peuvent exercer les fonctions de cadre dans les blocs opératoires, secteurs d’endoscopie et de stérilisation. Ils le peuvent sous réserve de répondre aux obligations d’exercice de la fonction cadre (en particulier diplôme de cadre de santé). Les étudiants se formant en école d’infirmiers de bloc opératoire sont autorisés à exercer ces fonctions, sous réserve d’encadrement d’un infirmier de bloc diplômé d’État et selon leur niveau d’acquisition de compétences. sation de tâches clairement précisées, qui leur sont confiées en fonction de leur compétence propre. L’infirmier anesthésiste peut, en présence du médecin anesthésiste-réanimateur, procéder à l’induction d’une anesthésie générale suivant la prescription du médecin ou le protocole établi. Le médecin anesthésiste-réanimateur peut lui confier la surveillance du patient en cours d’anesthésie à la condition expresse de rester à proximité immédiate et de pouvoir intervenir sans délai. Le médecin anesthésiste-réanimateur doit être obligatoirement et immédiatement informé de la survenue de toute anomalie. L’IADE participe à la réalisation des anesthésies locorégionales. Il est habilité à pratiquer des réinjections par la voie du dispositif mis en place par le médecin anesthésiste-réanimateur, suivant les prescriptions écrites de ce dernier. La participation de l’IADE à l’anesthésie du patient ambulatoire obéit aux mêmes règles. Face à une urgence extrême et vitale, l’IADE est tenu de mettre en œuvre les gestes d’urgence et de survie relevant de sa compétence. Des protocoles couvrant ces situations seront établis dans chaque service ou équipe d’anesthésie-réanimation. L’IADE rédige alors un compte rendu destiné aux responsables concernés du service d’anesthésie-réanimation. La présence d’un IADE en salle de surveillance postinterventionnelle (SSPI) se justifie par son aptitude à évaluer les signes de réveil, à reconnaître les accidents susceptibles de se produire et à mettre en œuvre sans délai les gestes techniques indispensables (aspiration, intubation, ventilation...). La présence d’un IADE au moins en SSPI est recommandée. L’IADE doit être réellement présent en SSPI. Il ne peut être simulta- Les IADE Les infirmiers anesthésistes diplômés d’État (IADE) sont les proches collaborateurs des médecins anesthésistes-réanimateurs. Infirmiers spécialisés, ils sont habilités à réaliser les actes relevant de leur seule compétence. Ils ne remplacent pas les médecins anesthésistes-réanimateurs, mais les assistent. La nature de leur travail tient à la fois de l’exécution de prescriptions médicales et de la réali32 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 L’IADE et les services d’urgences L’IADE est précieux dans les Services mobiles d’urgences et de réanimation, les Services d’accueil des urgences. En raison de ses connaissances et de sa pratique des gestes d’urgence ou de survie (intubation, cathétérisme veineux périphérique, maniement des appareils de ventilation et de surveillance, etc.), l’IADE est le collaborateur idéal du médecin dans la prise en charge des patients en état grave et de leur transport intra- ou extrahospitalier. En revanche, la présence d’un IADE ne dispense en aucune manière de celle d’un médecin, en particulier d’un médecin anesthésiste-réanimateur si une anesthésie est nécessaire. nément affecté dans une salle du bloc opératoire. En unités de soins intensifs et en réanimation chirurgicale, la présence d’un IADE en réanimation en même temps que des IDE n’est pas indispensable. L’IADE peut néanmoins apporter un complément de compétence pour la préparation et la maintenance des appareils de réanimation. Il peut le faire aussi pour les gestes de première urgence, en attendant l’arrivée du médecin. Il participe à la mise en œuvre et à la surveillance des techniques d’analgésie (analgésie contrôlée par le patient ou PCA, analgésie péridurale continue, transferts intrahospitaliers de patients en état grave...). L’IADE est habilité, de façon spécifique, à prendre en charge un poste d’encadrement dans ces unités. M.B. Gaz anesthésiques Des risques sous-estimés chez les soignants Infertilité, avortements spontanés, anomalies congénitales, génotoxicité, risque de cancer et de sclérose en plaques, neurotoxicité... On oublie trop les risques des anesthésiques, que l’on connaît pourtant de mieux en mieux. infirmières d’un grand hôpital public exrécemment leurs craintes à proLposesprimaient de leur exposition aux anesthésiques volatils (1). Elles soulignaient la nécessité de faire le point sur l’état des connaissances. Une revue bibliographique fut menée, qui mettait en exergue la probabilité des risques pour la reproduction. Une étude épidémiologique a mis en évidence une prévalence élevée “de symptômes en relation avec une exposition excessive”. Une étude des postes et des pratiques a ensuite été réalisée. Des mesures des concentrations d’halogénés et de protoxyde d’azote dans l’atmosphère ont été faites ainsi qu’une observation des postes et des pratiques anesthésiques. Les résultats confirment le risque. “Plus de 43 % des mesures d’halogénés et 75 % des mesures de protoxydes d’azote sont supérieures aux seuils français recommandés, notent les auteurs. Des facteurs techniques et des pratiques anesthésiques responsables de ces expositions excessives ont été repérés. Ce processus a permis d’engager l’hôpital dans un plan d’amélioration comme dans le suivi de son exécution.” La longue marche de la prévention « Nous avons mené une étude sur le lien entre avortements spontanés et anomalies congénitales des enfants, d’une part, et sur l’exposition des mères aux anesthésiques dans les blocs opératoire, d’autre part », rappelle Madeleine Estryn-Béhar. Dirigée par des médecins du travail, elle portait sur 85 % des soignants paramédicaux de quinze blocs opératoires d’hôpitaux de la région parisienne, soit 418 infirmières associées à des soignants non exposés de mêmes âge, grade et ancienneté. Quelques années plus tard, Madeleine EstrynBéhar a participé au groupe de travail de la CRAMIF sur les expositions professionnelles aux gaz et vapeurs anesthésiques. Les travaux de ce groupe (1) ont montré que les dangers des anesthésiques seraient réduits par la mise en place de bons systèmes d’évacuation des gaz anesthésiques (SEGA) (2). Toutefois, une approche globale et la vigilance s’imposent. Même avec les systèmes SEGA, les traces de gaz détectés peuvent en effet excéder les limites recommandées. Madeleine Estryn-Béhar a effectué plusieurs synthèses des résultats des recherches menées dans le monde sur les anesthésiques. Les premières ont été publiées pour les infirmières et les équipes de soins (3). Plus récemment, une mise à jour de l’état de ces connaissances sur les soignants ont fait l’objet d’un chapitre dans son manuel sur la santé au travail des médecins (4). Fertilité Des études ont été menées sur l’issue des grossesses de femmes anesthésistes, infirmières, sages-femmes ou assistantes dentaires. Les tableaux les résumant ont été réalisés à partir de ceux effectués pour cette récente synthèses (4). Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 ●●● 33 Bloc opératoire Fertilité et exposition aux gaz anesthésiques rejetés Auteurs et pays Résultats Knill-Jones et al. 1972 États-Unis Infertilité de plus de 2 ans chez 12 % de ces femmes anesthésistes exposées, et 6 % du groupe témoin Rachootin et Olsen 1983 Danemark Réduction significative de la fertilité chez les femmes exposées aux anesthésiques, constatée lors de cette étude cas-témoins de couples suivis pour ce problème Rowland et al. 1995 États-Unis Réduction significative de la fertilité, parmi 7 000 assistantes dentaires, chez celles exposées à des niveaux de protoxyde d’azote supérieurs à 500 ppm plus de cinq heures par semaine Ahlborg et al. 1996 Suède Pas d’effet de l’exposition au protoxyde d’azote chez 3 985 sages-femmes, sauf si elles assistent à plus de 30 accouchements par mois avec usage de protoxyde d’azote Avortements spontanés et exposition aux anesthésiques volatils 34 Auteurs et pays Résultats Guirguis et al. 1990 Canada Avortements spontanés deux fois plus fréquents (odds-ratio : 2,0) chez les 10 232 femmes exposées de 75 hôpitaux de l’Ontario Estryn-Béhar et al. 1993 France Avortements spontanés deux fois plus fréquents (odds-ratio : 1,9) chez 418 infirmières de bloc opératoire (627 grossesses) que chez 418 témoins Saurel-Cubizolles et al. 1994 France Avortements spontanés plus fréquents encore (odds-ratio : 2,6) chez celles exposées aux anesthésiques, au formaldéhyde et aux rayons X Klebanoff et al. 1991 États-Unis Avortements spontanés près de deux fois plus fréquents (odds-ratio : 1,7) chez les anesthésistes que chez les femmes médecins residents non exposées Axelsson et al. 1994 Suède L’utilisation du protoxyde d’azote (dans plus de 50 % des accouchements) n’était pas associée de façon statistiquement significative à une augmentation du risque d’avortements spontanés Rowland et al. 1995 États-Unis Fort risque relatif d’avortements spontanés (RR = 2,6), parmi 7 000 assistantes dentaires, chez celles qui sont exposées au protoxyde d’azote plus de trois heures par semaine dans des pièces sans système d’extraction spécifique Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 Les avortements spontanés « Les premières études réalisées sur les avortements spontanés liés aux anesthésiques avaient un taux de réponses faible, explique Madeleine EstrynBéhar. Le plus souvent, des facteurs de risque importants n’étaient pas contrôlés. » En 1985, Tannenbaum et Goldberg ont réalisé une méta-analyse sur douze enquêtes menées au Danemark, en Grande-Bretagne et aux États-Unis (5). « Cette synthèse confirmait, pour neuf d’entre elles, un risque d’avortements spontanés plus élevé chez les personnes exposées aux gaz anesthésiques rejetés que chez les témoins non exposés. Des recherches plus rigoureuses ont confirmé ces résultats. » En 1997, une méta-analyse réalisée par Boivin visait à estimer aussi le risque relatif d’avortement spontané. « Cette étude n’a pas montré d’augmentation du risque quand les gaz étaient évacués par un système approprié ou quand l’exposition restait faible. Aucune étude n’incluait de prélèvements atmosphériques. La méta-analyse a inclus vingt-quatre comparaisons entre femmes exposées et non exposées, issues de dix-neuf enquêtes. » Le risque relatif d’ensemble n’est pas négligeable (RR = 1,48). Il apparaît plus élevé (RR = 1,9) dans les six études les plus rigoureuses. Anomalies congénitales « Les premières études sur les malformations congénitales avaient aussi un taux de réponses faible, et, le plus souvent, de forts facteurs de risque non contrôlés », note Madeleine Estryn-Béhar. En 1985, la synthèse de Tannenbaum et Goldberg a montré que quatre études sur douze trouvent un risque significatif augmenté de malformations congénitales, allant de 1,2 à 4,2, entre les populations exposées et le témoin. De récentes et rigoureuses études sont préoccupantes. Génotoxicité et carcinogénicité La génotoxicité et la carcinogénicité des gaz anesthésiques rejetés demeurent controversées. En 1987, les preuves de carcinogénicité restaient insuffisantes pour le protoxyde d’azote, selon l’Agence internationale pour la recherche sur le cancer. Elles étaient absentes pour les agents halogénés. Cependant, les études sur les avortements spontanés suggèrent des dommages génétiques au fœtus survenant pendant la grossesse. Une mutation de l’ADN liée à l’exposition aux gaz anesthésiques pourrait en être l’origine. Une fine évaluation de la mutagénicité consiste à mesurer le nombre d’échanges entre deux chromatides d’un chromosome de cultures de lymphocytes humains. « Un nombre augmenté de ces échanges de chromatides sœurs reflète l’influence des produits mutagènes, explique Madeleine Estryn -Béhar. Il est aussi possible de compter le nombre de micronuclei comme mesure quantitative pour les aberrations chromosomiques structurelles et numériques. » Des anomalies ont été mises en évidence par des études menées chez des salariés très exposés. On note : – une augmentation significative du taux d’aberrations chromosomiques dans les cellules urinaires (6) ; – une augmentation des aberrations chromosomiques et des échanges de chromatides sœurs dans les cellules périphériques (7). ●●● Anomalies congénitales et exposition aux anesthésiques volatils Auteurs et pays Résultats Guirguis et al. 1990 - Canada Le risque est plus grand pour les 10 232 grossesses de femmes exposées travaillant à l’hôpital que pour les 3 656 femmes non exposées (RR = 2,2) Estryn-Béhar et al. 1993 - France Anomalies congénitales deux fois plus fréquentes (RR = 1,4) chez 418 infirmières de bloc opératoire (627 grossesses) que chez 418 témoins Saurel-Cubizolles et al. 1994 - France Anomalies congénitales plus fréquentes encore (RR = 3,5) chez celles exposées aux anesthésiques, au formaldéhyde et aux rayons X Zadeh et Briggs 1997 Anomalies congénitales plus fréquentes chez 504 chirurgiens orthopédiques (288,2 pour 10 000 naissances) et 1 597 obstétriciens et gynécologues (232,4 pour 10 000 naissances), liées non pas aux rayons X, mais à l’exposition à d’autres facteurs de l’environnement du bloc opératoire Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 35 Bloc opératoire ●●● cinq infirmières ont répondu et rempli un questionnaire. Parmi elles, treize étaient infirmières anesthésistes. Leur nombre total dans le pays a été estimé à partir du registre national et de celui de l’association des infirmières. Les données d’incidence de la sclérose en plaques pour les femmes, dans la région de Gothenburg et pour l’ensemble du Danemark, ont été utilisées comme référence pour estimer le risque à travers le ratio d’incidence standardisé (SIR). Dix cas ont été diagnostiqués entre 1980 et 1999. Cela traduit une augmentation significative du SIR, proche d’un triplement par rapport aux cas attendus, les infirmières anesthésistes n’ayant pas plus de sclérose en plaques que l’ensemble de femmes de Gothenburg ou du Danemark. Ce ratio est en effet de 2,9 par rapport aux femmes de la région de Gothenburg et de 2,8 par rapport à celles du Danemark. Dans ce récent article, publié dans la plus prestigieuse des revues de pathologies professionnelles, les auteurs concluent que cette étude, bien qu’approximative, fournit des arguments pour considérer qu’il existe un excès de sclérose en plaques parmi les infirmières anesthésistes. Ce risque peut même être supérieur à celui constaté dans cette étude basés sur les seules volontaires. De nouvelles étude sont nécessaires. En 1999, Hoegrauf et son équipe ont étudié la fréquence des échanges de chromatides sœurs dans les lymphocytes périphériques de personnels de salles d’opération exposés à des traces de concentrations d’isoflurane et de protoxyde d’azote (8). L’exposition professionnelle a été enregistrée. « Les fréquences d’échanges de chromatides sœurs ont été mesurées dans les cultures de lymphocyte de 27 soignants non fumeurs travaillant en salles d’opération et 27 sujets témoins non fumeurs », note Madeleine Estryn-Béhar. Le personnel était exposé sur huit heures à une moyenne pondérée de 11,8 ppm de protoxyde d’azote et de 0,5 ppm d’isoflurane. Après l’exposition, la fréquence des échanges de chromatides sœurs a augmenté de façon significative chez les personnels exposés par rapport au groupe témoin. Pour les auteurs, l’exposition régulière aux gaz anesthésiques, même rejetés à l’état de simples traces, peut causer des dommages génétiques comparables à ceux de 20 à 11 cigarettes fumées par jour. © Phovoir La sclérose en plaques La composition chimique des anesthésiques volatils est voisine de celle des solvants organiques utilisés dans l’industrie. On savait que l’exposition aux solvants industriels peut augmenter l’incidence de la sclérose en plaques. Afin d’examiner le risque de contracter cette pathologie parmi les infirmières anesthésistes, Flodin et son équipe ont fait paraître un appel dans le journal de l’Union des infirmières suédoises et le magazine de l’Associations des patients atteints de pathologies neurologiques en Suède (9). Quatre-vingt 36 Neurotoxicité L’exposition à de fortes concentrations de gaz anesthésiques peut causer des effets neurocomportementaux certains chez les soignants de salle d’opération. Il s’agit d’exposition à plus de 500 ppm de protoxyde d’azote et plus de 15 ppm d’halothane et d’enflurane. De récentes études ont porté sur des concentrations plus faibles. Elles montrent que ces dernières peuvent aussi entraîner une dégradation des performances neurocomportementales. Pour de fortes expositions professionnelles, plusieurs auteurs ont décrit des manifestations neurologiques périphériques à type de dysesthésies chez les agents. Dès 1980, Cohen et son équipe ont trouvé un excès de troubles de la sensibilité des extrémités (dysesthésies) et une diminution de la force musculaire chez le personnel exposé au protoxyde d’azote dans un hôpital dentaire. Un effet-dose est évoqué, les symptômes étant d’autant plus souvent rapportés que le niveau d’exposition est élevé (de 1,8 à 4,4 fois plus fréquents). La même année, Edling a montré un excès de dysesthésies chez les infirmières anesthésistes. « En France, notre étude menée avec 418 infirmières de bloc opératoire et un groupe témoin sur le dérou- Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003 lement et l’issue de leurs grossesses a montré que les premières décrivaient deux fois plus de dysesthésies que les secondes. De même, les soignantes exposées décrivaient de façon plus fréquente et significative des signes de fatigue. Nous avons identifié la survenue de syndromes neuropsychologiques, c’est-à-dire au moins deux des trois signes suivants : céphalées, vertiges, ralentissement des réactions. » Sa survenue est corrélée à l’intensité de l’exposition, appréciée à partir de l’activité opératoire, ainsi qu’au taux de renouvellement de l’air de la salle (0 à 5 renouvellements d’air par heure, 6 à 15, et plus de 15 renouvellements). Dans les blocs étudiés, les conditions d’évacuation des gaz étaient loin d’être excellentes. « Nous avons mesuré les concentrations atmosphériques, explique Madeleine Estryn-Béhar. En chirurgie pédiatrique, les expositions étaient les plus élevées. Les soignants étaient exposés à des concentrations atteignant, pour l’halothane, 32 ppm pour les anesthésistes et 8 ppm pour les chirurgiens et infirmières. » La réglementation française Une circulaire du ministère de la Santé recommande un bon usage des anesthésiques. Elle stipule que “les salles où se font des anesthésies doivent être équipées de dispositifs assurant l’évacuation des gaz et vapeurs anesthésiques” (1). • Cette circulaire fixe les valeurs limites à 25 ppm en phase d’entretien de l’anesthésie pour le protoxyde d’azote, et à 2 ppm pour les halogénés. • La Commission locale de surveillance des gaz doit s’assurer que des mesures de contrôle de l’exposition sont faites. Le médecin anesthésiste vérifie les installations comme la formation du personnel. • La réglementation précise que “l’atmosphère des salles d’opération et de réveil doit recevoir un apport en air neuf au régime minimal de 15 volumes par heure par salle, avec un apport minimum de 50 m3/ heure/personne” (2). • Le médecin du travail doit être informé de la nature comme de la composition et des modalités d’emploi des produits utilisés (art. R. 242-11). Cela rend possible la surveillance médicale des soignants, comme son rôle de conseil sur les aménagements des postes de travail. • Les hépatites liées à l’halothane sont indemnisées dans le cadre du tableau 89 des maladies professionnelles. (1) Circulaire DGS/3A/667 du 10 octobre 1985. (2) Bulletin du J.O. "Établissements recevant du public. Sécurité contre l’incendie. Établissements de soins”. (Article 114-4). En Allemagne, Hagemann et son équipe ont interrogé 102 anesthésistes (10). Ils ont recueilli les plaintes suivantes : fatigue (chez 68 % d’entre eux), épuisement général (53 %), irritabilité (26 %), difficultés à conduire (19 %), céphalées (17 %), troubles de la concentration (8 %). La pollution était surtout élevée en pédiatrie. Durant trois jours, les auteurs de cette étude ont réalisé électroencéphalogrammes et débits sanguins cérébraux chez des anesthésistes. Dans les régions occipitales, ils ont mis en évidence une augmentation croissante des ondes alpha entre début et fin de poste et entre le premier et le troisième jour. Lucchini a comparé 30 personnes travaillant en salle d’opération et 20 soignants d’autres départements (11). Il les a examinés à l’aide de tests neurocomportementaux. Le groupe travaillant au bloc opératoire fut testé pendant des anesthésies avec et sans anesthésiques volatils. Pendant le travail avec anesthésiques volatils, les concentrations atmosphériques moyennes de protoxyde d’azote sont passées de 50,9 ppm, le premier jour de la semaine de travail, à 54,2 ppm le dernier jour de la semaine. Les concentrations urinaires moyennes de protoxyde d’azote sont passées de 21,54 microgrammes à 25,6 microgrammes par litre, entre le début et la fin de la semaine. Les temps de réaction étaient plus lents en fin de semaine chez les soignants de salle d’opération effectuant des anesthésies inhalatoires que chez ceux n’en utilisant pas ou que dans le groupe de contrôle. M.B. (1) Ravgues S et al. Évaluation de l’exposition aux anesthésiques volatils des infirmières anesthésistes. Archives des maladies professionnelles 2002 ; 63 (8) : 664. (2) CRAMIF. Guide pour prévenir les expositions professionnelles aux gaz et vapeurs anesthésiques. 1996, 60 pages. (3) Estryn-Béhar M. Le Guide des risques professionnels du personnel des services de soins. Paris : Lamarre, 1991, 377 p. (4) Estryn-Béhar M. Risques professionnels et santé des médecins. Paris : Masson, 2002, 177 p. (5) Tannenbaum TN, Goldberg RJ. Exposure to anesthetic gases and reproductive outcome. J Occup Environ Med 1985 ; 27 : 659-68. (6) Lamberti L, Bigatti P, Ardito G, Armellito F. Chromosome analysis in operating room personel. Mutagenesis 1989 ; 4 (2) : 95-7. (7) Nartarajan D, Santhiya ST. Cytogenetic damage in operation theatre personnel. Anesthesia 1990 ; 54 : 574-7. (8) Hoegrauf HK, Wiesner G, Schroegendorfer KF, Jobst BP, Spacek A, Harth M, Sator-Katzenschlager S, Rudiger HW. Waste anesthetic gases induce sister chromatid exchanges in lymphocytes of operating room personnel. Br J Anaesth 1999 ; 82 (5) : 764-6. (9) Flodin U, Landtblom AM, Axelson O. Multiple sclerosis in nurse anaesthetists. Occup Environ Med 2003 ; 60 : 66-8. (10) Hageman H, Hartmann B, Winter CG, Schellenberg R. Danger of exposition to volatile anaesthetic gases for operating room personnel, paru dans Occupational Health for Health Care Workers - International congress on Occupational Health, dirigé par Hagberg M, Hofmann F, Stössel U, Westlander. Landsberg/Lech : Ecomed, Allemagne, 1993 ; 256-61. (11) Lucchini R, Placidi D, Toffoletto F, Alessio L. Neurotoxicity in operating room personnel working with gaseous and nongaseous anesthesia. Int Arch Occup Environ Health 1996 ; 68 (3) : 188-92. 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