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Sommaire
• Chirurgie ambulatoire :
se poser les vraies questions
• Méthodes cœlioscopiques :
évaluation de la chirurgie digestive
• Infections du site opératoire :
des progrès sont enregistrés
• Hygiène : la préparation cutanée
• Circulations au bloc opératoire :
l’exemple de l’Hôpital américain
de Paris
• Douleur postopératoire :
désormais évitable
dans une intervention programmée
• Chirurgie de l’adulte : nutrition
artificielle selon les conférences
de consensus
• IADE et IBODE :
deux spécialisations pour le bloc
• Gaz anesthésiques : des risques
sous-estimés chez les soignants
Bloc opératoire
Crise insurmontable
ou salutaire mutation ?
Un rapport sur l’état de la chirurgie en France
a été remis au mois de février au ministre de la Santé
Jean-François Mattei. Il montre la crise profonde
de la spécialité, marquée par des bouleversements
technologiques, mais surtout par un manque de vocations.
ans un document d’une cinquantaine de
pages (“La chirurgie française en 2003”,
ministère de la Santé), le Pr Jacques
Domergue (CHU de Montpellier) et le
Pr Henri Guidicelli (CHU de Grenoble) appellent
les pouvoirs publics à réagir en urgence. Les raisons de la crise en chirurgie sont complexes, notamment parce qu’elles sont différentes selon les
secteurs d’activités chirurgicales et selon les spécialités. Par exemple, certaines spécialisations
comme l’ophtalmologie pourraient atteindre
40 % d’augmentation de l’activité alors que certaines interventions chirurgicales sont remplacées par des gestes percutanés.
« Les chirurgiens voient leur fonction dévalorisée, ce
qui se traduit dans le concret par des revenus qui ne
sont plus proportionnés à la pénibilité des tâches,
par les charges qui ont augmenté (en dernière date,
les primes d’assurance). A cela est venue s’ajouter
la judiciarisation de la profession, le praticien passant insidieusement d’une obligation de moyen à une
obligation de résultat tant la pression des malades
est forte », expliquent les chirurgiens auteurs du
rapport. Mais la pénibilité du métier se mesure
surtout par le poids de la solitude professionnelle, de la pression psychologique, des adaptations aux évolutions technologiques et de la crise
des cliniques.
Par ailleurs, des conflits entre pouvoirs médicaux et pouvoirs administratifs en raison des
contraintes de tous ordres sont de plus en plus
aigus. Quant à l’urgence médicale, elle se heurte
à différentes difficultés, dont la spécialisation de
plus en plus grande des praticiens (70 % des urgences sont assurées par des chirurgiens contractuels) et la mauvaise répartition des effectifs sur
le territoire. Certaines régions (Île-de-France,
D
PACA) ont une densité médicale double de celle
des régions sous-médicalisées (Centre, Picardie).
« La médecine en général et l’acte chirurgical en particulier tendent à devenir un produit consommable
que l’on souhaite se voir livré avec garantie et service après vente », constatent les auteurs du rapport. Cependant, la seule attribution de moyens
supplémentaires ne saurait remplacer la nécessité
de stratégies nouvelles concernant l’offre de soins
mais aussi la formation des chirurgiens et des
équipes qui rendent le bloc opératoire sûr, performant, en phase avec les besoins de la population. Il est intéressant de constater que ce rapport
rejoint celui du Projet hôpital 2007, qui souligne
les dysfonctionnements majeurs responsables de
la crise morale, démographique, financière et
managériale qui secoue l’hôpital. Ce sont : les
textes, règlements et autres contraintes sécuritaires ; la bureaucratie et l’augmentation des
poursuites judiciaires ; le manque de personnel
soignant, l’insuffisance des investissements en
matériels et, plus généralement, une pénurie
qu’ils n’ont pas créée et qu’ils doivent gérer ; la
réglementation des trente-cinq heures qui n’a fait
qu’aggraver une situation déjà précaire ; l’absence de prise en compte de la pénibilité et de la
responsabilité dans les rémunérations ; les difficultés d’information rencontrées par les malades
et leur famille (délais d’attente aux urgences et
pauvreté des établissements de soins de suite et
de long séjour). Mais les crises sont nécessaires
et portent, elles, leur solution. Encore faut-il que
le noble art se pratiquant plus que jamais en
équipe sache faire taire les intérêts individuels,
secouer les habitudes et devenir un domaine
ouvert à un monde extrêmement mouvant.
Andrée-Lucie Pissondes
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
19
Bloc opératoire
Chirurgie ambulatoire
Se poser les vraies questions
La chirurgie ambulatoire a connu un essor certain ces dernières années. Seule l’analyse clinique, épidémiologique et économique de la chirurgie ambulatoire peut favoriser le nécessaire respect de la qualité des soins et la maîtrise des coûts de la santé.
fin des années 1990, une intervention chiambulatoire était pratiquée pour
A3 %larurgicale
de la population en un an (1). La chirurgie
ambulatoire permet aux patients de regagner leur
domicile le jour même de l’intervention chirurgicale. Il s’agit d’actes équivalents par leur nature
à ceux habituellement effectués dans le cadre de
l’hospitalisation classique.
La notion de chirurgie ambulatoire apparaît dès
le début du XXe siècle dans la littérature. Mais ce
n’est que dans les années 1970 qu’elle commence
à se développer. Elle connaît une croissance rapide à partir des années 1980, en particulier aux
États-Unis. Les progrès en matière d’anesthésie,
de technologies médicales et chirurgicales et de
modalités thérapeutiques ont contribué à ce
développement.
L’analyse de l’Agence nationale d’accréditation et
d’évaluation en santé (ANAES) sur la nature des
actes effectués en ambulatoire a permis d’identifier ceux le plus souvent réalisés ainsi (2). En fait,
la plupart de ces procédures ne sont pas chirurgicales. Ce sont des actes que l’on a toujours réalisés sans hospitalisation : IVG, endoscopies digestives ou urinaires avec ou sans biopsie,
hystéroscopies, excisions de kystes ou de lésions
cutanées, poses de drains transtympaniques.
Parmi les procédures chirurgicales ambulatoires,
quatre spécialités permettent une réelle alternative à l’hospitalisation. Ce sont les chirurgies générale, ophtalmologique, orthopédique et gynécologique. Le rapport de l’ANAES s’appuie sur
l’analyse des procédures ayant fait l’objet d’évaluations publiées. Pour les hernies inguinales, il
ne semble pas y avoir d’obstacles majeurs au traitement par la chirurgie ambulatoire, en termes
de survenue de complications et de récidives.
Pour la chirurgie de la cataracte, l’analyse des
études a mis en évidence une absence de différence entre prise en charge ambulatoire et prise
en charge traditionnelle en termes de survenue
de complications et de résultats (acuité visuelle
à 6 mois).
Lors de la publication du rapport de l’ANAES, il
n’existait pas d’études pour la chirurgie du canal
20
carpien permettant de comparer la pratique de la
chirurgie ambulatoire et celle de la chirurgie traditionnelle. Pour la chirurgie des tumeurs du
sein, de nombreuses études soulignaient l’évolution actuelle vers la diminution de la durée d’hospitalisation, sans parler de chirurgie ambulatoire
proprement dite. Cette diminution de la durée
d’hospitalisation ne valait pas pour la ponctionbiopsie diagnostique. La pratique ambulatoire de
la chirurgie du sein a, par ailleurs, été beaucoup
décrite. Ces études ne mentionnaient pas de
complications particulières. Mais elles ne constituaient pas des études comparatives entre chirurgies ambulatoire et traditionnelle pour autant.
L’ANAES concluait, malgré le peu d’études disponibles, qu’“il apparaît possible de pratiquer ces
gestes en ambulatoire sans augmentation du
risque de complication ou de récidive”.
Économie
Les évaluations économiques menées sur ces
indications cliniques montrent que la prise en
charge ambulatoire mobilise moins de ressources
en termes de coût direct.
Quelques remarques sont toutefois nécessaires :
• Les études économiques comparatives retenues, faites aux États-Unis, au Canada et au
Royaume-Uni, posent des problèmes de transposition. Seules deux études françaises avaient
pu être retenues.
• Dans ces études, les gains de ressources mobilisées pour la chirurgie ambulatoire tiennent
surtout à la durée d’hospitalisation plus courte,
faute de valorisation pertinente d’autres éléments
d’arbitrage.
• La revue de la littérature économique permet
peu de préciser les coûts indirects et extrahospitaliers. Elle n’a pas non plus permis d’identifier des études coût-efficacité avec des calculs
de ratios.
Se voulant rigoureux, les experts de l’ANAES
ont dû conclure que “la synthèse des informations disponibles” ne rendait pas compte de “la
réalité des gains économiques à associer à la réalisation d’un acte opératoire en ambulatoire”. En
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
effet, certains éléments sont mal précisés. Ce
sont “les coûts directs dans une logique de filière
de soins en raisonnant en termes d’épisodes de
soins”, allant de la consultation préchirurgicale
à une période post-intervention restant à définir. Les arrêts de travail prescrits par le chirurgien, voire, en post-hospitalisation, par le médecin traitant, ne sont guère spécifiés. On
compte, parmi les éléments mal clarifiés, “les
coûts ‘imputables’ aux aides bénévoles et aux
ressources familiales mobilisées, l’unité pertinente d’analyse devant être la famille ou les
proches et pas seulement l’individu”.
Les experts soulignent malgré tout “l’importance
des critères d’éligibilité des patients pour l’une
ou l’autre des modalités de prise en charge”. Audelà de la nature de ses troubles, des critères cliniques et économiques, le patient doit pouvoir
prendre part au choix et donner son “consentement éclairé”, c’est-à-dire après avoir reçu une
information aussi complète que possible. “Enfin,
la préférence individuelle du patient devra toujours demeurer un élément d’arbitrage.”
L’équipe chirurgicale conserve un travail d’évaluation des critères cliniques. Le risque de complications infectieuses, nosocomiales et thromboemboliques doit être apprécié. On jugera
moins du risque de survenue de complications
peropératoires. Les techniques chirurgicales et
anesthésiques utilisées sont en effet les mêmes en
chirurgie ambulatoire et en chirurgie traditionnelle. En revanche, les dates de survenue des
complications postopératoires seront étudiées,
ainsi que les modalités de leur prise en charge.
Le rapport de l’ANAES abordait aussi l’encadrement d’un développement harmonieux de la
chirurgie ambulatoire. En France, on note un
déséquilibre d’activité entre les secteurs privé et
public. En effet, 30 % des actes chirurgicaux
sont réalisés en ambulatoire dans le secteur
privé, mais 5 % seulement dans le secteur public. Outre les différences de gravité des pathologies accueillies par les secteurs public et privé,
cette dissymétrie serait liée aux modalités de tarification, leurs applications ne prenant guère
en compte les possibilités de substitution
qu’offre la chirurgie ambulatoire. Tout établissement souhaitant développer une activité ambulatoire devrait enfin considérer la densité de son
environnement ou ses liens possibles avec des
réseaux de soins.
Marc Blin
(1) Comment se soigne-t-on en France ? de Andrée et Arié Mizrahi,
Presses universitaires de France, coll. “Médecine et société”, Paris, 2003.
(2) La chirurgie ambulatoire, évaluation technologique et économique,
ANAES, mai 1997.
Méthodes cœlioscopiques
Évaluation de la chirurgie digestive
Les techniques cœlioscopiques ne cessent de se développer. En chirurgie digestive,
les pratiquer ne suffit pas. Il importe de connaître les indications de ces méthodes,
ainsi que les complications et la mortalité qu’occasionne leur usage. Une formation
spécifique des chirurgiens à ces nouvelles procédures est indispensable.
ANAES a fait le point sur les évaluations
des méthodes cœlioscopiques en chirurgie
L’
digestive (1).
La cholécystectomie
La cholécystectomie reste indiquée chez un
patient souffrant d’une lithiase vésiculaire
symptomatique ou compliquée. Elle n’est pas
justifiée pour les patients porteurs d’une cholécystectomie asymptomatique. La cholécystectomie par cœlioscopie apporte des avantages
que la chirurgie conventionnelle n’apporte pas :
– diminution des complications médicales postopératoires ;
– diminution de la durée du séjour hospitalier ;
– meilleur confort du patient en termes de douleur et de mécanique ventilatoire.
Cependant, ces techniques cœlioscopiques réclament une durée d’intervention globale supérieure à celle des opérations réalisées avec des
méthodes conventionnelles. Une formation de
qualité des chirurgiens aux interventions sous
cœlioscopie est impérative avant qu’ils puissent
les pratiquer. On sait en outre que la durée d’in-
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Bloc opératoire
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tervention, mais surtout les complications, diminuent avec l’expérience du praticien.
L’appendicectomie
Chez l’homme adulte et l’enfant, les bénéfices de
l’appendicectomie par cœlioscopie n’ont pas été
démontrés. La seule indication retenue reste à
visée diagnostique chez la femme, afin de pouvoir éliminer une autre pathologie, en particulier gynécologique.
La cure de hernie hiatale
A quelques exceptions près, rien ne démontre
que la cœlioscopie apporte un bénéfice dans le
traitement de la hernie hiatale. Les études examinées par les experts de l’ANAES ne permettaient pas de le conclure. “La pose de plaque
percœlioscopique est indiquée uniquement chez
les patients porteurs d’une hernie bilatérale,
d’une hernie récidivante, chez des obèses ou
chez des patients porteurs d’une mauvaise paroi
abdominale”.
Vagotomies, chirurgie colorectale
et de la hernie inguinale
Lors de la publication de ce rapport, les données
paraissaient insuffisantes aux auteurs pour bien
évaluer les autres procédures : vagotomies, chirurgie de la hernie inguinale, chirurgie colorec-
tale. Elles doivent toutefois respecter les recommandations en matière de “bonnes pratiques”.
Ces procédures cœliochirurgicales doivent faire
l’objet d’études scientifiques rigoureuses, en matière tant de faisabilité que d’efficacité.
L’information du patient
Ce rapport sur la chirurgie digestive est complété par un autre sur la cœlioscopie en chirurgie gynécologique (2). Un troisième rapport de
l’ANAES porte sur les enjeux économiques de
la diffusion de la chirurgie cœlioscopique en
France (3).
Rappelons enfin les recommandations de la
Société française de chirurgie. Les patients pour
lesquels une intervention chirurgicale abdominale est envisagée doivent être informés que “la
méthode cœlioscopique comporte des avantages et inconvénients spécifiques, mais que,
comme tout acte chirurgical, elle peut exposer à
des complications graves”. Ils doivent savoir que
“la conversion en chirurgie ouverte est une mesure
de sécurité qui ne peut jamais être exclue a priori”.
M.B.
(1) Évaluation des méthodes cœlioscopiques en chirurgie digestive,
ANAES, juin 1994 (12,20 euros).
(2) Évaluation des méthodes cœlioscopiques en chirurgie gynécologique, ANAES, juin 1994 (12,20 euros).
(3) Diffusion de la chirurgie cœlioscopique en France : quels enjeux
économiques ? ANAES, juin 1994 (12,20 euros).
Infections du site opératoire
Des progrès sont enregistrés
L’Institut de veille sanitaire (InVS) publie en 2003 les résultats de l’enquête nationale
du Réseau national de surveillance des infections nosocomiales. Les infections du site
opératoire (ISO) touchent 1,93 % des patients.
ur les 162 151 personnes opérées, en 1999
et 2000, dans les services volontaires pour
Sparticiper
au Réseau d’alerte, d’investigation et
de surveillance des infections nosocomiales
(RAISIN), 3 129 ont déclaré une infection du site
opératoire.
La chirurgie digestive en tête
Certains types de chirurgie présentent plus de
risques d’infections du site opératoire. Le pourcentage de patients touchés est le suivant :
– chirurgie digestive
: 3,89 % ;
22
– chirurgie des polytraumatisés
: 3,57 % ;
– chirurgie thoracique
: 3,04 % ;
– chirurgie urologique
: 2,87 % ;
– chirurgie cardiaque
: 2,21 % ;
– chirurgie gynéco-obstétricale
: 1,81 % ;
– chirurgie vasculaire
: 1,76 % ;
– neurochirurgie
: 1,74 % ;
– chirurgie du système lymphatique : 1,67 % ;
– chirurgie de peau et tissus mous : 1,52 % ;
Les patients subissant certaines autres formes de
chirurgie s’en tirent mieux :
– chirurgie ORL et stomatologique : 1,19 % ;
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– chirurgie orthopédique
: 1,08 % ;
– chirurgie du système endocrinien : 1,03 % ;
– chirurgie ophtalmologique
: 0,27 %.
Les transplantations d’organes restent bien sûr
hors catégorie, avec un taux élevé : 8,87 % des
patients touchés par des infections nosocomiales.
Une chute de 12 % en 5 ans
Les enquêtes nationales de prévalence des infections nosocomiales menées en 1996 et 2001
avec 1 533 établissements permettent d’apprécier les progrès. On observe, avec l’enquête
2003, une diminution totale de 12 % du taux de
patients infectés.
Les auteurs soulignent une difficulté à laquelle
ils se sont heurtés dans le recueil de ces données. Le suivi de ces patients ne couvre pas toujours les 30 jours après l’intervention, comme
le recommandent les Centres interrégionaux de
coordination des Comités de lutte contre les infections nosocomiales (C.CLIN). Ce manque de
suivi est tempéré par le fait que 75 % des ISO
surviennent dans les 17 jours qui succèdent à
l’intervention. Mais le suivi des patients après
la sortie reste recommandé. Au départ de l’établissement, une consultation avec le chirurgien
doit systématiquement avoir été programmée.
Cette recommandation est plus rarement mise
en œuvre quand il s’agit de chirurgie légère ou
ambulatoire.
Au bout du compte, 59 % des infections recensées étaient superficielles, 26 % étaient profondes, et 14 % concernaient un organe, une cavité, un os. Ces résultats montrent que les ISO
profondes représentent, en France, une proportion comparable à celle constatée aux États-Unis.
Cet aspect est encourageant. Leur localisation atteste de la gravité potentielle de ces ISO. Elles
sont accompagnées de fréquentes reprises opératoires, d’un allongement de la durée d’hospitalisation, d’une mortalité accrue.
L’étude du RAISIN offre surtout un outil de référence pour les enquêtes à venir. Il permettra d’apprécier les résultats de la politique de lutte contre
les maladies nosocomiales en France.
M.B.
Hygiène
La préparation cutanée
Certaines règles de préparation de l’opéré doivent être respectées pour contribuer
à prévenir les infections nosocomiales. Cette préparation intervient dès la veille de
l’intervention, puis, le jour même, dans le service et en salle d’opération.
a préparation de l’opéré en chirurgie programmée vise à réduire le nombre de microLorganismes
présents sur la peau en agissant le
• On gardera la même gamme de produits jus-
plus largement possible sur les flores transitoires
et résidentes dans le but de diminuer le risque
infectieux.
antiseptique est indiqué.
Des explications doivent être données au patient.
• S’il est porteur de prothèse dentaire ou auditive, ou de lentilles de contact, le futur opéré
sera prévenu qu’il devra les ôter le jour de
l’intervention.
• Une femme ne se maquillera pas et ne portera
pas de vernis ce jour-là.
• Le rôle préventif et le déroulement de la
douche seront expliqués.
A l’issue de sa consultation, une ordonnance
pour le savon antiseptique est remise au patient,
ainsi qu’une fiche technique sur la douche.
La douche obéit à quelques règles.
• Le vernis des ongles est retiré.
La veille de l’intervention
La veille de l’intervention, le patient prendra une
douche et un shampooing, avec ses savons et
shampooing personnels (neufs de préférence) ou
avec un savon antiseptique (Bétadine Scrub® ou
Hibiscrub® si contre-indication).
• Il est recommandé de ne pas utiliser de rasoir
pour la dépilation.
• En matière de savon antiseptique, on prendra
garde aux éventuels risques d’allergie pour le
patient.
qu’au bloc opératoire.
• En cardiologie, comme en orthopédie, le savon
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
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Bloc opératoire
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• Le patient est douché en commençant par le
haut du corps pour finir par le bas.
Le matériel
• La tête, les cheveux et l’ensemble du corps
sont soigneusement mouillés sous la douche, et
savonnés.
• On insiste sur les oreilles, les mains, les aisselles,
le nombril, les organes génitaux, le pli interfessier, et les pieds, en particulier entre les orteils.
Il faut respecter le temps de contact de l’antiseptique (indiqué sur le flacon) : 1 minute avec
Hibitane® alcoolique, 30 secondes avec Bétadine® dermique ou l’alcool iodé.
• Le patient est rincé abondamment.
• Il est séché avec une serviette propre.
• On l’aide à mettre des vêtements propres.
• Les ongles sont coupés et curés.
Dans le service, le jour de l’intervention
Le moins de temps possible avant l’intervention,
et avant la prémédication, le site opératoire du
patient sera dépilé. Puis ce dernier prendra une
douche.
La dépilation
L’infirmière se lave les mains (lavage simple). Elle
manipulera la tondeuse comme un stylo, afin de
tondre la surface préalablement déterminée par
l’équipe chirurgicale et consignée sur un schéma
selon le type de l’intervention. Elle peut tendre la
peau pour les zones difficile d’accès. Elle coupe
le poil à contresens (ou à l’envers si la zone à dépiler le nécessite). Elle jettera la lame, après usage,
dans le container réservé aux objets tranchants.
La douche
La douche du patient est réalisée sous la responsabilité de l’infirmière. Un savonnage complet du
corps est fait, toujours de haut en bas.
• Un lavage des cheveux est effectué avec un
shampooing doux ou un savon antiseptique selon le type de chirurgie.
• Pour le visage, on insiste sur le nez et les
oreilles.
• Le patient est douché en veillant aux points
stratégiques :
– thorax ;
– membres supérieurs : insister sur les aisselles ;
– abdomen : insister sur l’ombilic ;
– toilette génitale soigneuse ;
– membres inférieurs : creux poplités ; entre les
orteils ; plis inguinaux.
Cette douche est complétée par un brossage des
dents.
Après la douche, il faut :
– vérifier la dépilation ;
– s’assurer du passage aux toilettes ;
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• Le matériel de dépilation comprend :
– une tondeuse ;
– une lame à usage unique ;
– alcool et compresses ;
– une protection (pour éviter les souillures de
l’environnement) ;
– une poubelle (pour les déchets).
• Lors de la douche, on utilise :
– un savon antiseptique : Bétadine® Scrub, ou
Hibiscrub® si contre-indication.
– proposer une chemise et un lit (drap + alèze)
propres ;
– dispenser la prémédication à l’horaire déterminé par l’anesthésiste ;
– consigner le type de préparation cutanée sur
la fiche de liaison avec le bloc.
En salle d’opération
La préparation du patient en salle d’opération
comprend quatre étapes :
• La panseuse lave le champ opératoire avec
Bétadine Scrub® (ou Hibiscrub®) en faisant appel au même produit que celui utilisé lors de la
douche.
• Elle rince le champ à l’eau stérile et le sèche.
• Le premier champ stérile est badigeonné de
Bétadine® dermique (ou Hibitane® champ) par la
panseuse.
• Le deuxième champ est badigeonné de Bétadine® (ou Hibitane®) sous la responsabilité du
chirurgien.
En cas d’utilisation du brancard, on aura soin de
nettoyer le brancard avec Alkaspray®, et de changer l’alèse entre chaque patient.
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M.B.
Nettoyage et décontamination
de la tondeuse
Après chaque
utilisation :
– ouvrir la tête
de la tondeuse ;
– brosser la tête ;
– la nettoyer
avec de l’alcool ;
– remettre
en charge.
En fin de journée :
– ouvrir la tête
de la tondeuse ;
– brosser la tête ;
– la frotter avec
une compresse imbibée
d’Alkazyme® ;
– rincer ;
– sécher ;
– remettre en charge.
Circulations au bloc opératoire
L’exemple de l’Hôpital américain de Paris
De nombreux apports des nouvelles technologies et de l’ergonomie sont mises en œuvre
à l’Hôpital américain de Paris pour innover en matière de sécurité anti-infectieuse.
tique. Les pendules, les interphones, les télécommandes sont également intégrés. Les murs sont totalement lisses. » Ces conditions permettent un
nettoyage complet et rapide entre chaque intervention, sans perturber les blocs voisins.
Dans les salles d’opération, l’air provient du plafond. Il passe par une double filtration et parvient parfaitement stérile au-dessus du champ
opératoire.
a pris de l’avance sur toutes les normes saen vigueur en France », affirme le
ODr nnitaires
Roland Chiche, chirurgien urologue président du Comité d’utilisation des structures invasives de l’Hôpital américain de Paris. Seule les
personnes munies de codes peuvent entrer au
bloc. Passé l’entrée, où il faut ainsi montrer
patte blanche, tout est filtré : les personnes, le
matériel, l’eau et l’air. Le sas de sécurité s’ouvre
sur un univers aseptisé.
Le brancard, la table et le patient
Le patient pénètre sans son brancard dans le bloc.
Il passe sur un tapis roulant, le “plateau de transfert”, afin d’éviter les contaminations. Puis il est
installé sur une table d’opération mobile. Elle sera
par la suite fixée à un pied, dans la salle d’opération. L’opéré restera sur cette table. Il ne la quittera pas jusqu’à sa sortie du bloc opératoire. Alors
seulement, l’intervention terminée, la table est
ôtée pour être lavée et décontaminée dans une
machine prévue à cet effet. « Très peu d’hôpitaux
français sont équipés de ce système, précise Albert
Halter, responsable des projets hospitaliers chez
Maquet, l’un des premiers fabricants mondiaux
d’équipements médicaux. Il est entièrement démontable, permettant l’intervention rapide en maintenance ou l’ajout aisé de nouveau matériel. »
La conception du bloc
Le bloc de cinq salles d’opération de l’Hôpital américain et toutes les annexes occupent 1 300 m2. L’espace et l’ergonomie priment. Les rangements, le
double vestiaire, la salle d’analyse des dossiers,
comme les huit boxes de la salle de réveil ou la salle
réservée aux anesthésies locorégionales sont vastes.
Les couloirs de circulation sont larges ; les zones
d’attente pour les patients sont calmes.
Les salles d’opération sont éclairées par de
grandes fenêtres. Elles sont spacieuses. La plus
grande fait 55 m2. Cela favorise l’installation de
tout le matériel, notamment les robots, la vidéo
et les microscopes. Cela facilite aussi les mouvements des soignants. « Quant à la circulation des
personnes et des matériels, explique Albert Halter,
le sale ne croise jamais le propre. »
Afin que toutes les salles d’opération puissent être
désinfectées après chaque intervention, plafonds
et cloisons sont constitués de panneaux étanches
en acier inox. « Tout le matériel est encastré dans les
murs, explique le Dr Roland Chiche. C’est le cas
des prises d’air, des colonnes vidéo et de l’informa-
© Lj Com
«
Les soignants
En arrivant, les soignants, hommes et femmes, se
dirigent vers leurs vestiaires respectifs. Il s’y
déshabillent et revêtent un pyjama stérile. Le matériel et les médicaments nécessaires aux interventions chirurgicales transitent par une “zone
de déboîtage”.
Avant de pénétrer dans la zone stérile, les patients,
le personnel et les matériels passent à travers un
système de sas. Cela permet de ne pas laisser rentrer d’air contaminé dans la zone stérile.
Dans la salle d’eau, une imposante horloge rappelle aux chirurgiens qu’un lavage des mains
dure au moins trois minutes. Les vasques de lavage des mains sont équipées de filtres à eau stérilisée. Pour une hygiène meilleure encore, l’ouverture automatique des portes peut se faire par
commande au pied ou au genou.
M.B.
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Bloc opératoire
Douleur postopératoire
Désormais évitable dans une intervention programmée
Selon les spécialistes, la douleur après une intervention programmée est une douleur
qui doit devenir rare. En effet, si l’interrogatoire est bien mené, si le patient est bien
informé, les manifestations de la douleur doivent entrer dans un protocole de prévisions qui s’adaptent à chaque patient et chaque type d’interventions.
une enquête menée en 1993, plus de
45 % des personnes opérées dans les cinq anSnéeselon
précédentes se souvenaient en termes négatifs de leur intervention, principalement à
cause des suites opératoires, de la douleur surtout. Cependant, dans les motifs de crainte des
patients à se faire opérer, la douleur postopératoire vient en deuxième, derrière le risque d’accident d’anesthésie, mais devant la peur d’une
faute technique chirurgicale.
Dans la même enquête, mais tournée cette fois vers
les soignants, les anesthésistes avouaient ne pas
être toujours très attentifs à soulager la douleur,
pendant que les infirmières affirmaient être mal
formées pour répondre à la demande des patients.
Enfin, 20 % des opérés affirment ne pas avoir signalé la douleur, la considérant comme normale.
Comment mieux définir la douleur ? Quels en sont
les caractères et les facteurs d’apparition ? Ceux-ci
sont liés au patient. C’est aux âges extrêmes de la
vie que la douleur est le plus mal évaluée par les
soignants parce qu’elle est mal exprimée. Longtemps, la douleur du nouveau-né a été niée alors
que, si son arbre neurologique est complet à la
naissance, les mécanismes physiologiques d’inhibition de la douleur ne sont pas en place. Un nouveau-né peut donc ressentir des manifestations no-
Textes législatifs
• Circulaire ministérielle du 6 mai 1995
« La prise en compte de la dimension douloureuse
physique et psychologique des patients et le soulagement de la souffrance doivent être une préoccupation constante de tous les intervenants. »
• Décret du 15 mars 1993
relatif aux actes professionnels
et à l’exercice de la profession d’infirmier
« L’infirmier a le devoir de prévenir et d’évaluer la
souffrance et la détresse des personnes et de participer à leur soulagement. »
26
ciceptives autant, si ce n’est plus, qu’un adulte.
Chez la personne âgée, il semble que la douleur
chronique soit mieux supportée que la douleur aiguë. Il s’agirait d’un phénomène de presbyalgésie.
Quel que soit l’âge, la douleur postopératoire doit
être reconnue, combattue et prévenue.
Le score d’Amiel-Tison et l’échelle Chéops sont
spécifiques des douleurs postopératoires respectivement chez le tout-petit et le jeune enfant. En
dehors des signes subjectifs, une modification
du rythme cardiaque, de la pression artérielle ou
de la fréquence respiratoire est aussi un indicateur de douleur à interpréter dans le temps.
Si le sexe n’a pas d’influence sur le risque d’apparition d’une douleur, l’anxiété, elle, est un facteur prédisposant et aggravant. Parmi les facteurs
personnels, l’origine ethnique joue un rôle. La
douleur, plus masquée chez les gens du Nord,
sera plus facilement extériorisée chez ceux originaires du Sud. Enfin, les patients qui ont des difficultés ou qui n’arrivent pas à communiquer
avec le personnel soignant souffrent davantage.
A côté des facteurs personnels existent également
ceux liés au type de l’intervention : selon le site, il
est possible de prévoir l’intensité de la douleur postopératoire. Sont considérées comme les plus algogènes : les interventions sur le thorax, sur l’abdomen susombilical mais aussi les opérations sur les
grosses articulations et sur la colonne vertébrale de
même que l’hémorroïdectomie ou la réduction d’un
hallux valgus, particulièrement algiques. Selon la
voie d’abord, la douleur est également différente :
elle est ainsi nettement plus importante à la suite
d’une laparotomie qu’à celle d’une cœliochirurgie.
Il ne faut pas oublier les douleurs résultant de la
mise en place de sondes, de cathéters et de redons.
La douleur est en outre particulièrement intense
lors du retrait d’un corps étranger.
Moyens thérapeutiques
L’OMS a classé les médicaments antalgiques en trois
niveaux, selon une puissance d’action croissante.
En dehors des voies orales possibles, l’analgésie
contrôlée par le patient (ACP) est efficace. En
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
postopératoire, la morphine est l’un des meilleurs antalgiques. Son inconvénient est sa rapidité de résorption, qui en limite la prescription
excepté si on l’intègre dans l’ACP. Le patient
adapte lui-même, sans avoir besoin d’appeler
un soignant, les doses de morphine en fonction
de sa douleur. Les doses à ne pas dépasser
sont prescrites par le médecin quotidiennement.
Les études montrent que, généralement, les
doses autoinjectées sont inférieures à ce qu’elles
auraient été si les injections avaient été pratiquées par le personnel soignant. Un personnel
L’ACP pratique
Les trois paramètres à déterminer au départ sont :
1. la dose délivrée à chaque injection, soit le bolus (entre 0,5 et 1,5 mg en moyenne) ;
2. la durée de la période réfractaire pendant
laquelle aucune autre dose ne peut être autoinjectée (en moyenne entre 7 et 10 minutes) ;
3. la dose maximale journalière (en moyenne 16 à
24 mg pour 4 heures).
●●●
Score Amiel-Tison pour l’enfant de 0 à 3 mois
Score enfant éveillé
au moment de l’examen
Sommeil pendant
les 30 minutes précédentes
0
1
2
Non
Courtes périodes
> 5 mn
Sommeil calme
> 10 mn
Mimique douloureuse
Qualité du cri
Marquée permanente
Répétitif, aigu, douloureux
Peu marquée intermittente
Normal, modulé
Calme et détendue
Pas de cri
Motricité spontanée
Excitabilité spontanée
Agitation incessante
Trémulation, clonies, Moro spontané
Agitation modérée
Réactivité excessive
Motricité normale
Calme
Crispation des doigts, mains, pieds
Très marquée, globale
Non, quelques mouvements
anarchiques
Peu marquée, dissociée
Discontinue, interrompue
par des cris
Absente
Forte, rythmée,
pacifiante
Évaluation globale du tonus
Consolabilité
Très hypertonique
Non après 2 mn d’effort
Modérément hypertonique
Calmable après 1 mn d’effort
Normal pour l’âge
Calmable en moins de 1 mn
Sociabilité
Absente
Difficile à obtenir
Facile, prolongée
Succion
Score OPS de douleur postopératoire de l’enfant de 1 à 5 ans
Observations
Pression artérielle
Critères
± 10 % de valeur préopératoire
± 10 à 20 % de valeur préopératoire
± 20 à 30 % de valeur préopératoire
Pleurs
Absents
Présents, mais enfant consolable
Présents, enfant inconsolable
Absents
Intermittents modérés
Permanents
Enfant calme, endormi
Modérée
Hystérique
Pas de douleur exprimée, enfant calme
Douleur modérée
Douleur localisée verbalement ou par attitude
Nécessité d’un traitement antalgique
Mouvements
Agitation
Évaluation verbale ou corporelle
Si score > 3
Scores
0
1
2
0
1
2
0
1
0
0
1
2
0
1
2
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
27
Bloc opératoire
●●●
soignant qui, comme nous l’affirme Gaëlle, infirmière en chirurgie viscérale, « ne se sent pas
brimé de ne pas contrôler les doses administrées, ni
même spolié d’une partie de pouvoir thérapeutique.
Au contraire, le temps libéré nous permet d’être plus
présent auprès d’un malade moins assisté et plus autonome à condition de bien l’avoir renseigné sur son
état et sur son traitement. »
Surveillance d’un traitement morphinique
La dose en toutes lettres, la date et l’heure de début
de traitement, le nom et la signature du prescripteur doivent toujours être soigneusement notés.
En cas de branchement en Y, on posera une valve
anti-reflux.
Comme tout traitement antalgique majeur, la
morphine est susceptible d’avoir des effets se-
condaires. Il convient d’en détecter les signes.
Parmi les paramètres étudiés, on vérifiera toutes
les heures :
– la fréquence respiratoire : si elle devient inférieure à 8 cycles par minute, il convient d’appeler un médecin ;
– la pression artérielle et la fréquence cardiaque ;
– le degré de sédation à l’aide d’une échelle
d’évaluation ou sur des items définis plus haut.
Doivent aussi être notés pour être rapidement jugulés : les nausées et les vomissements, les difficultés mictionnelles, les troubles du transit, les
éruptions cutanées, un prurit.
En fonction du résultat des données, le médecin
pourra, au mieux, adapter les doses de morphine,
et combattre, si besoin, les effets secondaires.
Jacques Bidart
Chirurgie de l’adulte
Nutrition artificielle selon les conférences de consensus
La nutrition artificielle est une thérapeutique de substitution de l’alimentation orale.
Ses performances dépendent d’une prescription adaptée aux besoins du patient et bien
surveillée. Non justifiée, elle peut lui faire courir un risque inutile.
nutrition artificielle constitue un élément
de la prise en charge de certains maLladesacrucial
chirurgicaux. Elle est définie comme “un
apport calorico-azoté exogène équivalent aux besoins du patient”, selon la Conférence de consensus sur la nutrition artificielle en chirurgie (1).
Elle comporte “au moins deux des trois grands
types de macronutriments (glucides, lipides,
protides), des électrolytes, des vitamines et des
oligo-éléments”.
Pour appréhender cette dénutrition, on compare
la perte de poids du patient et le poids habituel
du sujet en bonne santé. Par ailleurs, l’indice de
Buzby (Nutrition risk index, ou NRI) fournit une
meilleure évaluation clinique de la dénutrition.
Il obéit à une règle de calcul précise (NRI =
1,519 x albuminémie g.L-1 + 0,417 x poids actuel/poids usuel x 100). Une dénutrition grave
est alors caractérisée par un NRI inférieur à 83,5.
Des non-indications
La nutrition artificielle périopératoire couvre une
période de deux semaines avant l’intervention
chirurgicale et deux semaines après celle-ci.
Cette nutrition artificielle est inutile chez les in28
dividus peu dénutris ou ne l’étant pas, et pouvant, dès la semaine suivant l’intervention, reprendre une alimentation couvrant 60 % des besoins. On peut considérer que ces malades sont
exposés, sans bénéfice thérapeutique, à un risque
de complications de l’ordre de 10 %.
Chez les malades sévèrement dénutris (NRI inférieur à 83,5), une nutrition artificielle est recommandée avant de subir une intervention chirurgicale majeure. Mais le type d’intervention ne
constitue pas, à lui seul, une indication de nutrition artificielle préopératoire.
Quant à la nutrition artificielle après l’intervention, elle est indiquée dans plusieurs cas :
– chez tous les patients ayant reçu une nutrition
artificielle préopératoire ;
– chez les malades présentant un état de dénutrition majeur, même s’ils n’ont pas reçu de nutrition artificielle préopératoire ;
– chez tout patient présentant une complication
postopératoire précoce, à l’origine d’un hypermétabolisme et de la prolongation du jeûne ;
(1) “Nutrition artificielle périopératoire en chirurgie programmée de
l’adulte”, Conférence de consensus, avec la participation de l’ANAES,
décembre 1994.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
– chez les malades incapables de retrouver
une alimentation couvrant 60 % de leurs besoins nutritionnels au cours de la semaine après
l’intervention.
Les modalités
Les besoins caloriques (estimés à 1,5 fois ceux
calculés par les équations de Harris et Benedict)
approchent 30 kcal.kg.j-1 (par kg de poids corporel du patient et par jour) chez les patients alités. Ils avoisinent 35 kcal.kg-1.j-1 chez les patients ambulatoires.
Les apports énergétiques sont assurés à 50-70 %
par des glucides et à 30-50 % par des lipides. Le
rapport des calories glucidiques à l’ensemble
des calories glucidolipidiques doit être compris
entre 0,5 et 0,7.
Les apports requis
Les besoins azotés recommandés vont de 150
à 200 mg.kg.j-1 avant l’intervention chirurgicale. Ils avoisinent 250 à 300 mg.kg.j-1 après
l’intervention.
Un rapport calorico-azoté compris entre 150
et 200 kcal.g-1 d’azote est recommandé. Les apports azotés sont “assurés par une solution
d’acides aminés essentiels et non essentiels”. Selon cette conférence de consensus, les solutions
enrichies en acides aminés à chaîne ramifiée “n’ont
pas fait la preuve d’une efficacité supérieure”.
Les besoins en glucides sont habituellement couverts par un apport de 3 à 4 g.kg-1.j-1. Ils ne doivent pas excéder 5 g.kg-1.j-1.
Les besoins en lipides dépendent des besoins énergétiques et des apports en glucides. Les apports en
lipides varient entre 1,5 et 2 g.kg.j-1. La conférence
de consensus précise qu’“ils sont bien assurés par
des émulsions de triglycérides à chaînes longues à
20 %, perfusées en 18 à 20 heures”.
Les besoins en phosphore et magnésium sont
plus élevés après l’opération. La nutrition artificielle concerne aussi les besoins en vitamines et
oligo-éléments : vitamines A, B1, B6, C, E, acide
folique (B9). Ils impliquent souvent une supplémentation en zinc et en sélénium.
La voie entérale
La voie entérale doit être utilisée, en première intention, si l’état anatomique du tube digestif le
permet. Son efficacité ne diffère pas significativement de celle de la voie parentérale et son coût
lui est inférieur.
Le plus souvent, elle utilise une sonde nasogastrique. Dans certains cas particuliers, de durée
prolongée, une gastrotomie perendoscopique ou
une jéjunostomie chirurgicale lui sera préférée.
Les principaux risques à surveiller sont les régurgitations (risque d’inhalation) et l’intolérance digestive. Les complications infectieuses
et métaboliques sont plus rares que par la voie
parentérale.
La voie parentérale
La voie parentérale est indiquée quand le tube digestif ne peut être exploité. Une voie veineuse
centrale est souvent préférée. Les principales
complications sont liées au cathéter central :
complications mécaniques, surtout infectieuses
ou thromboemboliques. Les complications métaboliques, ainsi qu’une surcharge hydrique, doivent être évitées par une surveillance attentive.
Durée de la nutrition artificielle
périopératoire
“La durée optimale d’une nutrition artificielle préopératoire permettant une amélioration nutritionnelle objective ne semble pas devoir être inférieure à sept jours”, souligne la conférence de
consensus. Cette durée sera plus longue en cas de
situation pathologique. Elle sera raccourcie si un
traitement chirurgical est rapidement nécessaire.
“La durée optimale d’une nutrition artificielle
postopératoire ne semble pas devoir être inférieure à 7 jours”, rappellent ces recommandations. Cette durée sera prolongée “si la dénutrition préopératoire était sévère, si la reprise de
l’alimentation orale est retardée, ou s’il survient
une complication postopératoire responsable
d’un hypermétabolisme ou de la prolongation de
l’état de jeûne”.
Les complications
Les recommandations de l’ANAES accordent une
large place aux risques et complications de l’alimentation artificielle.
Complications de la nutrition artificielle
préopératoire
• La pesée quotidienne et la recherche des
œdèmes constituent la base de toute surveillance.
• On répondra aux réactions d’intolérance digestives précoces, telles que nausées, vomissements
et diarrhées (13 à 37 %), et de régurgitation, avec
leurs risques d’inhalation insidieuse.
• Le reflux sanguin dans le cathéter veineux périphérique sera vérifié régulièrement. Associée à des
signes inflammatoires, une douleur sur le point de
ponction ou sur le trajet doit conduire au retrait.
Une fièvre survenant chez un malade porteur d’un
cathéter central fera suspecter une infection.
Des éléments biologiques simples seront surveillés régulièrement.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
●●●
29
Bloc opératoire
●●●
• Chez le grand dénutri, ce sont les suivants :
glycémie, natrémie, kaliémie et phosphorémie.
• Chez l’insuffisant hépatique, une recherche de
cholestase et de cytolyse, un dosage des triglycérides de la phosphorémie seront effectués.
• Chez l’insuffisant rénal, un ionogramme sanguin, une calcémie et une numération globulaire
seront effectués.
• Une gazométrie sera faite chez l’insuffisant
respiratoire.
Sans être interrompue, la nutrition artificielle
peut être modifiée en cas de troubles hydroélectrolytiques cliniques ou biologiques, surtout
chez l’insuffisant cardiaque ou rénal.
Tolérance et complications
de la nutrition artificielle postopératoire
La tolérance et les complications peuvent être
liés aux apports nutritionnels ou aux techniques
d’administration. Une surveillance très codifiée
concernera des éléments cliniques, biologiques
et spécifiques au cathéter.
Le contrôle de l’hydratation et de son retentissement éventuel sur les fonctions cardiaque, respiratoire et rénale, constituent la surveillance clinique. La surveillance du transit digestif permet
de juger de la tolérance de la nutrition entérale.
La surveillance biologique concerne le bilan électrolytique, ainsi que les métabolismes des glucides, lipides et protides.
• On veillera au contrôle de la kaliémie et de la
phosphorémie (pour le retentissement de ces ions
sur la fonction musculaire et diaphragmatique).
• La surveillance de la glycémie permet d’éviter
les hyperosmolarités chez ces patients en phase
de résistance à l’insuline.
• Le contrôle de la lactescence du sérum et le
dosage, deux fois par semaine, des triglycérides
plasmatiques permettent d’estimer l’usage correct des substrats lipidiques et une éventuelle
surcharge.
• La fonction rénale est appréciée grâce aux dosages quotidiens de l’azotémie, de la créatininémie, de l’urée urinaire et de la mesure du volume
urinaire.
• Le risque d’atteinte hépatobiliaire est surveillé
une fois par semaine au moyen de tests de cholestase et de cytolyse.
Les principales complications de la nutrition parentérale, liées au cathéter, sont mécaniques, infectieuses et thromboemboliques. Cela souligne
l’importance de la qualité de la mise en place du
cathéter, de la surveillance de sa position correcte
(radiographie), du respect des règles d’asepsie et
ce, tout au long de l’utilisation de la voie veineuse
centrale.
L’intolérance digestive est une cause d’échec de la
nutrition entérale continue par jéjunostomie. Elle
est souvent causée par le non-respect du protocole de progression des apports nutritionnels. Les
complications vraies (obstruction de la sonde, fistule, occlusion, péritonite) restent rares avec les
équipes entraînées. Leur dépistage dépend de
l’examen clinique de l’abdomen effectué deux fois
par jour. Enfin, des complications septiques, respiratoires et rénales peuvent obliger à modifier la
quantité et la qualité des apports nutritifs.
M.B.
IADE et IBODE
Deux spécialisations pour le bloc
Combien sont-ils et que font-ils ? Parmi les plus de 20 000 infirmiers spécialisés, il y aurait 3 941 infirmiers spécialisés de bloc opératoire et 5 636 infirmiers anesthésistes. Afin
de mieux cerner leur rôle, voici l’“Iliade” des IADE et l’“Odyssée” des IBODE.
n compte 19 719 infirmiers salariés spécialisés, selon la SAE (Statistique annuelle des étaOblissements,
1999). Ils représentent 6,8 % d’un
total de 288 504 infirmiers. Les infirmiers spécialisés seraient 20 165 selon un recensement plus
récent. Celui-ci émane du fichier ADELI des professionnels de santé, géré par les Directions départementales et régionales des affaires sanitaires
30
et sociales (DDASS et DRASS). Le fichier de 2001
recense 333 095 infirmiers, y compris les cadres.
Il est ainsi possible de tenter un portrait de deux
spécialisations : les infirmiers anesthésistes et
ceux de bloc opératoire, dont la répartition figure
dans le tableau ci-contre.
On compte 5 636 infirmiers anesthésistes. Ils
représentent 1,7 % de la profession infirmière.
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
Parmi eux, 74 % sont des femmes et 16 % des
hommes.
On compte 3 941 infirmiers spécialisés de bloc
opératoire. Ils représentent 1,3 % de la profession
infirmière. Parmi eux, 89 % sont des femmes et
11 % des hommes.
Les IBODE
La formation d’IBODE permet à un infirmier de
bloc opératoire d’exercer les rôles :
– d’infirmier circulant ;
– d’instrumentiste ;
– d’aide-opératoire.
Un infirmier de bloc opératoire est apte à prendre
en compte la gestion des risques liée à son activité comme à son environnement, notamment la
lutte contre les infections nosocomiales.
L’IBODE peut exercer les fonctions d’infirmier
panseur, instrumentiste et aide-opératoire au
bloc opératoire et dans les secteurs où sont pratiqués les actes invasifs à visées diagnostique et
thérapeutique.
La fonction d’infirmier circulant, ou panseur, relève du rôle autonome, ou “rôle propre”, de l’infirmier diplômé d’État pendant la période périopératoire.
risques liés au patient et à l’intervention, et nuisant à la sécurité de l’opéré : risques d’infections
nosocomiales, risques liés à l’environnement
technique et technologique (électriques...). Il est
responsable de l’adéquation des besoins en matériel et en personnel.
• L’IBODE peut gérer et coordonner l’entretien
et la maintenance des locaux, matériels et instrumentations nécessaires au bon déroulement
de l’intervention, dans un but de sécurité pour
les opérés et le personnel.
• L’IBODE est habilité à élaborer et à rédiger les
documents garantissant les différentes vigilances
et la traçabilité en salle d’intervention (feuille de
suivi du patient, feuille d’ouverture de salle, de
vérification de la table d’opération...). Il réalise la
gestion administrative de l’intervention.
• L’IBODE joue un rôle spécifique dans l’encadrement et la formation des personnels, afin de réduire les risques infectieux et ceux liés à l’environnement technique et technologique, pour le
patient comme pour les personnels évoluant dans
les secteurs opératoires (blocs opératoires, services
d’endoscopies ou d’explorations chirurgicales...).
L’IBODE est habilité à participer, avec un pharmacien, à la stérilisation des dispositifs médicaux, à l’organiser et à la contrôler.
Rôle en phase périopératoire
Au stade périopératoire, l’IBODE est responsable
de la mise en œuvre d’une démarche de soins
personnalisée. Elle comprendra en particulier la
consultation, ou visite préopératoire, contribuant
ainsi à : l’information de la personne soignée, l’accueil et la préparation du patient, l’organisation,
la réalisation et la coordination des soins et leur
évaluation postopératoire.
• L’IBODE est responsable de l’élaboration et de la
mise en œuvre des protocoles infirmiers en bloc
opératoire dans le cadre d’une démarche qualité.
• L’IBODE est habilité à identifier et à gérer les
Rôle en phase périopératoire
Un médecin pouvant intervenir à tout moment,
l’IBODE est habilité à gérer les risques liés à l’environnement, au patient et à l’intervention : il
participe à son installation en position opératoire, à la mise en place d’un dispositif électrochirurgical, etc. Il agit alors de façon autonome,
se référant à ses connaissances.
• Il répond aux besoins de l’équipe chirurgicale
soit sur prescription, soit en se référant à des
protocoles (mise à disposition de matériel,
éclairage, etc.).
●●●
La répartition des infirmiers selon leur spécialisation
Nombre de femmes
Nombre d’hommes
Total femmes + hommes
Rapport infirmières spécialisées/
IDE femmes (289 768)
Rapport infirmiers spécialisés/
IDE hommes (43 327)
Rapport infirmiers spécialisés (tous)/
IDE totaux (333 095)
Puériculture
10 065 (99 %)
77 (1 %)
10 142
Anesthésie
4 165 (74 %)
1 471 (16 %)
5 636
Bloc opératoire
3 495 (89 %)
446 (11 %)
3 941
Total
17 725 (89,9 %)
1 994 (10,1 %)
19 719
4%
1,4 %
1,2 %
6,6 %
0,2 %
3,4 %
1%
4,6 %
3%
1,7 %
1,3 %
6%
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
31
Bloc opératoire
●●●
• Avec le pharmacien, il joue un rôle spécifique
dans la gestion et la dispensation des dispositifs
médicaux stériles.
La fonction d’instrumentiste relève du rôle
de l’IBODE pendant la période péri- et peropératoire.
L’infirmier DE est habilité à exercer la fonction
d’instrumentiste. Elle concerne son rôle propre
pour la préparation et la gestion de l’instrumentation, la prise en charge des risques infectieux
(gestion des temps opératoires infirmiers, notamment temps septiques). L’instrumentiste agit
à la demande de l’opérateur et de sa propre initiative pour offrir à l’opérateur et à son aide l’instrumentation requise pour le bon déroulement
de l’intervention. La présence de l’opérateur est
effective. L’instrumentiste est responsable avec
l’opérateur du respect des règles d’asepsie de
l’équipe chirurgicale.
La fonction d’aide opératoire, quant à elle, relève
du rôle de l’infirmier diplômé d’État pendant la
période peropératoire.
L’IBODE est habilité à exercer les fonctions d’aide
opératoire en présence effective de l’opérateur,
du médecin ou du chirurgien si l’intervention est
chirurgicale. Son action est complémentaire de
celle de l’opérateur, en sa présence, pour aider à
la réalisation des gestes d’exploration ou de l’acte
chirurgical. Sa formation lui permet d’appliquer
les prescriptions du médecin. Mais il agit avec
initiative sur la prévention des risques liés aux infections nosocomiales ou aux technologies. Ces
fonctions sont réservées en priorité aux IBODE.
Seuls les infirmiers possédant le diplôme d’État
de bloc opératoire peuvent exercer les fonctions
de cadre dans les blocs opératoires, secteurs
d’endoscopie et de stérilisation. Ils le peuvent
sous réserve de répondre aux obligations d’exercice de la fonction cadre (en particulier diplôme
de cadre de santé).
Les étudiants se formant en école d’infirmiers de
bloc opératoire sont autorisés à exercer ces fonctions, sous réserve d’encadrement d’un infirmier
de bloc diplômé d’État et selon leur niveau d’acquisition de compétences.
sation de tâches clairement précisées, qui leur
sont confiées en fonction de leur compétence
propre.
L’infirmier anesthésiste peut, en présence du médecin anesthésiste-réanimateur, procéder à l’induction d’une anesthésie générale suivant la
prescription du médecin ou le protocole établi.
Le médecin anesthésiste-réanimateur peut lui
confier la surveillance du patient en cours d’anesthésie à la condition expresse de rester à proximité immédiate et de pouvoir intervenir sans délai. Le médecin anesthésiste-réanimateur doit
être obligatoirement et immédiatement informé
de la survenue de toute anomalie.
L’IADE participe à la réalisation des anesthésies
locorégionales. Il est habilité à pratiquer des réinjections par la voie du dispositif mis en place
par le médecin anesthésiste-réanimateur, suivant
les prescriptions écrites de ce dernier.
La participation de l’IADE à l’anesthésie du patient ambulatoire obéit aux mêmes règles.
Face à une urgence extrême et vitale, l’IADE est
tenu de mettre en œuvre les gestes d’urgence et
de survie relevant de sa compétence. Des protocoles couvrant ces situations seront établis dans
chaque service ou équipe d’anesthésie-réanimation. L’IADE rédige alors un compte rendu destiné aux responsables concernés du service
d’anesthésie-réanimation.
La présence d’un IADE en salle de surveillance
postinterventionnelle (SSPI) se justifie par son
aptitude à évaluer les signes de réveil, à reconnaître les accidents susceptibles de se produire et
à mettre en œuvre sans délai les gestes techniques indispensables (aspiration, intubation,
ventilation...). La présence d’un IADE au moins
en SSPI est recommandée. L’IADE doit être réellement présent en SSPI. Il ne peut être simulta-
Les IADE
Les infirmiers anesthésistes diplômés d’État
(IADE) sont les proches collaborateurs des médecins anesthésistes-réanimateurs. Infirmiers
spécialisés, ils sont habilités à réaliser les actes relevant de leur seule compétence. Ils ne remplacent pas les médecins anesthésistes-réanimateurs, mais les assistent.
La nature de leur travail tient à la fois de l’exécution de prescriptions médicales et de la réali32
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
L’IADE et les services d’urgences
L’IADE est précieux dans les Services mobiles d’urgences et de réanimation, les Services d’accueil
des urgences. En raison de ses connaissances et
de sa pratique des gestes d’urgence ou de survie
(intubation, cathétérisme veineux périphérique,
maniement des appareils de ventilation et de surveillance, etc.), l’IADE est le collaborateur idéal du
médecin dans la prise en charge des patients en
état grave et de leur transport intra- ou extrahospitalier. En revanche, la présence d’un IADE ne dispense en aucune manière de celle d’un médecin,
en particulier d’un médecin anesthésiste-réanimateur si une anesthésie est nécessaire.
nément affecté dans une salle du bloc opératoire.
En unités de soins intensifs et en réanimation
chirurgicale, la présence d’un IADE en réanimation en même temps que des IDE n’est pas indispensable. L’IADE peut néanmoins apporter un
complément de compétence pour la préparation
et la maintenance des appareils de réanimation.
Il peut le faire aussi pour les gestes de première
urgence, en attendant l’arrivée du médecin. Il
participe à la mise en œuvre et à la surveillance
des techniques d’analgésie (analgésie contrôlée
par le patient ou PCA, analgésie péridurale continue, transferts intrahospitaliers de patients en
état grave...).
L’IADE est habilité, de façon spécifique, à
prendre en charge un poste d’encadrement dans
ces unités.
M.B.
Gaz anesthésiques
Des risques sous-estimés chez les soignants
Infertilité, avortements spontanés, anomalies congénitales, génotoxicité, risque de
cancer et de sclérose en plaques, neurotoxicité... On oublie trop les risques des anesthésiques, que l’on connaît pourtant de mieux en mieux.
infirmières d’un grand hôpital public exrécemment leurs craintes à proLposesprimaient
de leur exposition aux anesthésiques volatils (1). Elles soulignaient la nécessité de faire
le point sur l’état des connaissances. Une revue
bibliographique fut menée, qui mettait en
exergue la probabilité des risques pour la reproduction. Une étude épidémiologique a mis
en évidence une prévalence élevée “de symptômes en relation avec une exposition excessive”. Une étude des postes et des pratiques a
ensuite été réalisée. Des mesures des concentrations d’halogénés et de protoxyde d’azote
dans l’atmosphère ont été faites ainsi qu’une observation des postes et des pratiques anesthésiques. Les résultats confirment le risque. “Plus
de 43 % des mesures d’halogénés et 75 % des
mesures de protoxydes d’azote sont supérieures
aux seuils français recommandés, notent les auteurs. Des facteurs techniques et des pratiques
anesthésiques responsables de ces expositions
excessives ont été repérés. Ce processus a permis d’engager l’hôpital dans un plan d’amélioration comme dans le suivi de son exécution.”
La longue marche de la prévention
« Nous avons mené une étude sur le lien entre avortements spontanés et anomalies congénitales des
enfants, d’une part, et sur l’exposition des mères
aux anesthésiques dans les blocs opératoire, d’autre
part », rappelle Madeleine Estryn-Béhar. Dirigée
par des médecins du travail, elle portait sur
85 % des soignants paramédicaux de quinze
blocs opératoires d’hôpitaux de la région parisienne, soit 418 infirmières associées à des
soignants non exposés de mêmes âge, grade et
ancienneté.
Quelques années plus tard, Madeleine EstrynBéhar a participé au groupe de travail de la
CRAMIF sur les expositions professionnelles
aux gaz et vapeurs anesthésiques. Les travaux
de ce groupe (1) ont montré que les dangers des
anesthésiques seraient réduits par la mise en
place de bons systèmes d’évacuation des gaz
anesthésiques (SEGA) (2). Toutefois, une approche globale et la vigilance s’imposent. Même
avec les systèmes SEGA, les traces de gaz détectés peuvent en effet excéder les limites recommandées.
Madeleine Estryn-Béhar a effectué plusieurs
synthèses des résultats des recherches menées
dans le monde sur les anesthésiques. Les premières ont été publiées pour les infirmières et
les équipes de soins (3). Plus récemment, une
mise à jour de l’état de ces connaissances sur les
soignants ont fait l’objet d’un chapitre dans son
manuel sur la santé au travail des médecins (4).
Fertilité
Des études ont été menées sur l’issue des grossesses de femmes anesthésistes, infirmières,
sages-femmes ou assistantes dentaires. Les tableaux les résumant ont été réalisés à partir de
ceux effectués pour cette récente synthèses (4).
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
●●●
33
Bloc opératoire
Fertilité et exposition aux gaz anesthésiques rejetés
Auteurs et pays
Résultats
Knill-Jones et al.
1972
États-Unis
Infertilité de plus de 2 ans
chez 12 % de ces femmes anesthésistes exposées,
et 6 % du groupe témoin
Rachootin et Olsen
1983
Danemark
Réduction significative de la fertilité
chez les femmes exposées aux anesthésiques,
constatée lors de cette étude cas-témoins de couples suivis pour ce problème
Rowland et al.
1995
États-Unis
Réduction significative de la fertilité,
parmi 7 000 assistantes dentaires, chez celles exposées
à des niveaux de protoxyde d’azote supérieurs
à 500 ppm plus de cinq heures par semaine
Ahlborg et al.
1996
Suède
Pas d’effet de l’exposition au protoxyde d’azote chez 3 985 sages-femmes,
sauf si elles assistent à plus de 30 accouchements par mois
avec usage de protoxyde d’azote
Avortements spontanés
et exposition aux anesthésiques volatils
34
Auteurs et pays
Résultats
Guirguis et al.
1990
Canada
Avortements spontanés deux fois plus fréquents
(odds-ratio : 2,0) chez les 10 232 femmes exposées
de 75 hôpitaux de l’Ontario
Estryn-Béhar et al.
1993
France
Avortements spontanés deux fois plus fréquents
(odds-ratio : 1,9) chez 418 infirmières de bloc opératoire (627 grossesses)
que chez 418 témoins
Saurel-Cubizolles et al.
1994
France
Avortements spontanés plus fréquents encore
(odds-ratio : 2,6) chez celles exposées aux anesthésiques,
au formaldéhyde et aux rayons X
Klebanoff et al.
1991
États-Unis
Avortements spontanés près de deux fois plus fréquents
(odds-ratio : 1,7) chez les anesthésistes
que chez les femmes médecins residents non exposées
Axelsson et al.
1994
Suède
L’utilisation du protoxyde d’azote (dans plus de 50 % des accouchements)
n’était pas associée de façon statistiquement significative à une augmentation
du risque d’avortements spontanés
Rowland et al.
1995
États-Unis
Fort risque relatif d’avortements spontanés (RR = 2,6),
parmi 7 000 assistantes dentaires, chez celles qui sont exposées
au protoxyde d’azote plus de trois heures par semaine
dans des pièces sans système d’extraction spécifique
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
Les avortements spontanés
« Les premières études réalisées sur les avortements
spontanés liés aux anesthésiques avaient un taux
de réponses faible, explique Madeleine EstrynBéhar. Le plus souvent, des facteurs de risque importants n’étaient pas contrôlés. » En 1985, Tannenbaum et Goldberg ont réalisé une méta-analyse sur douze enquêtes menées au Danemark,
en Grande-Bretagne et aux États-Unis (5). « Cette
synthèse confirmait, pour neuf d’entre elles, un
risque d’avortements spontanés plus élevé chez les
personnes exposées aux gaz anesthésiques rejetés que
chez les témoins non exposés. Des recherches plus rigoureuses ont confirmé ces résultats. »
En 1997, une méta-analyse réalisée par Boivin
visait à estimer aussi le risque relatif d’avortement spontané. « Cette étude n’a pas montré
d’augmentation du risque quand les gaz étaient évacués par un système approprié ou quand l’exposition restait faible. Aucune étude n’incluait de prélèvements atmosphériques. La méta-analyse a inclus
vingt-quatre comparaisons entre femmes exposées et
non exposées, issues de dix-neuf enquêtes. » Le
risque relatif d’ensemble n’est pas négligeable
(RR = 1,48). Il apparaît plus élevé (RR = 1,9)
dans les six études les plus rigoureuses.
Anomalies congénitales
« Les premières études sur les malformations congénitales avaient aussi un taux de réponses faible, et,
le plus souvent, de forts facteurs de risque non
contrôlés », note Madeleine Estryn-Béhar. En
1985, la synthèse de Tannenbaum et Goldberg a
montré que quatre études sur douze trouvent un
risque significatif augmenté de malformations
congénitales, allant de 1,2 à 4,2, entre les populations exposées et le témoin. De récentes et rigoureuses études sont préoccupantes.
Génotoxicité et carcinogénicité
La génotoxicité et la carcinogénicité des gaz
anesthésiques rejetés demeurent controversées.
En 1987, les preuves de carcinogénicité restaient
insuffisantes pour le protoxyde d’azote, selon
l’Agence internationale pour la recherche sur le
cancer. Elles étaient absentes pour les agents halogénés.
Cependant, les études sur les avortements spontanés suggèrent des dommages génétiques au
fœtus survenant pendant la grossesse. Une mutation de l’ADN liée à l’exposition aux gaz anesthésiques pourrait en être l’origine. Une fine évaluation de la mutagénicité consiste à mesurer le
nombre d’échanges entre deux chromatides d’un
chromosome de cultures de lymphocytes humains. « Un nombre augmenté de ces échanges de
chromatides sœurs reflète l’influence des produits
mutagènes, explique Madeleine Estryn -Béhar. Il
est aussi possible de compter le nombre de micronuclei comme mesure quantitative pour les aberrations
chromosomiques structurelles et numériques. »
Des anomalies ont été mises en évidence par des
études menées chez des salariés très exposés.
On note :
– une augmentation significative du taux
d’aberrations chromosomiques dans les cellules
urinaires (6) ;
– une augmentation des aberrations chromosomiques et des échanges de chromatides sœurs
dans les cellules périphériques (7).
●●●
Anomalies congénitales et exposition aux anesthésiques volatils
Auteurs et pays
Résultats
Guirguis et al.
1990 - Canada
Le risque est plus grand pour les 10 232 grossesses de femmes exposées
travaillant à l’hôpital que pour les 3 656 femmes non exposées (RR = 2,2)
Estryn-Béhar et al.
1993 - France
Anomalies congénitales deux fois plus fréquentes (RR = 1,4)
chez 418 infirmières de bloc opératoire (627 grossesses) que chez 418 témoins
Saurel-Cubizolles et al.
1994 - France
Anomalies congénitales plus fréquentes encore (RR = 3,5) chez celles exposées
aux anesthésiques, au formaldéhyde et aux rayons X
Zadeh et Briggs
1997
Anomalies congénitales plus fréquentes chez 504 chirurgiens orthopédiques
(288,2 pour 10 000 naissances) et 1 597 obstétriciens et gynécologues
(232,4 pour 10 000 naissances), liées non pas aux rayons X,
mais à l’exposition à d’autres facteurs de l’environnement du bloc opératoire
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
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Bloc opératoire
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cinq infirmières ont répondu et rempli un questionnaire. Parmi elles, treize étaient infirmières
anesthésistes. Leur nombre total dans le pays a été
estimé à partir du registre national et de celui de
l’association des infirmières. Les données d’incidence de la sclérose en plaques pour les femmes,
dans la région de Gothenburg et pour l’ensemble
du Danemark, ont été utilisées comme référence
pour estimer le risque à travers le ratio d’incidence standardisé (SIR).
Dix cas ont été diagnostiqués entre 1980 et 1999.
Cela traduit une augmentation significative du
SIR, proche d’un triplement par rapport aux cas
attendus, les infirmières anesthésistes n’ayant pas
plus de sclérose en plaques que l’ensemble de
femmes de Gothenburg ou du Danemark. Ce ratio est en effet de 2,9 par rapport aux femmes de
la région de Gothenburg et de 2,8 par rapport à
celles du Danemark.
Dans ce récent article, publié dans la plus prestigieuse des revues de pathologies professionnelles,
les auteurs concluent que cette étude, bien qu’approximative, fournit des arguments pour considérer qu’il existe un excès de sclérose en plaques
parmi les infirmières anesthésistes. Ce risque peut
même être supérieur à celui constaté dans cette
étude basés sur les seules volontaires. De nouvelles étude sont nécessaires.
En 1999, Hoegrauf et son équipe ont étudié la
fréquence des échanges de chromatides sœurs
dans les lymphocytes périphériques de personnels de salles d’opération exposés à des traces de
concentrations d’isoflurane et de protoxyde
d’azote (8). L’exposition professionnelle a été enregistrée. « Les fréquences d’échanges de chromatides sœurs ont été mesurées dans les cultures de lymphocyte de 27 soignants non fumeurs travaillant en
salles d’opération et 27 sujets témoins non fumeurs »,
note Madeleine Estryn-Béhar. Le personnel était
exposé sur huit heures à une moyenne pondérée
de 11,8 ppm de protoxyde d’azote et de 0,5 ppm
d’isoflurane. Après l’exposition, la fréquence des
échanges de chromatides sœurs a augmenté de
façon significative chez les personnels exposés
par rapport au groupe témoin. Pour les auteurs,
l’exposition régulière aux gaz anesthésiques,
même rejetés à l’état de simples traces, peut causer des dommages génétiques comparables à
ceux de 20 à 11 cigarettes fumées par jour.
© Phovoir
La sclérose en plaques
La composition chimique des anesthésiques volatils est voisine de celle des solvants organiques
utilisés dans l’industrie. On savait que l’exposition aux solvants industriels peut augmenter l’incidence de la sclérose en plaques. Afin d’examiner le risque de contracter cette pathologie parmi
les infirmières anesthésistes, Flodin et son équipe
ont fait paraître un appel dans le journal de
l’Union des infirmières suédoises et le magazine
de l’Associations des patients atteints de pathologies neurologiques en Suède (9). Quatre-vingt
36
Neurotoxicité
L’exposition à de fortes concentrations de gaz
anesthésiques peut causer des effets neurocomportementaux certains chez les soignants de salle
d’opération. Il s’agit d’exposition à plus de
500 ppm de protoxyde d’azote et plus de 15 ppm
d’halothane et d’enflurane. De récentes études
ont porté sur des concentrations plus faibles.
Elles montrent que ces dernières peuvent aussi
entraîner une dégradation des performances
neurocomportementales.
Pour de fortes expositions professionnelles,
plusieurs auteurs ont décrit des manifestations
neurologiques périphériques à type de dysesthésies chez les agents. Dès 1980, Cohen et son
équipe ont trouvé un excès de troubles de la
sensibilité des extrémités (dysesthésies) et une
diminution de la force musculaire chez le personnel exposé au protoxyde d’azote dans un hôpital dentaire. Un effet-dose est évoqué, les
symptômes étant d’autant plus souvent rapportés que le niveau d’exposition est élevé (de 1,8
à 4,4 fois plus fréquents). La même année, Edling a montré un excès de dysesthésies chez les
infirmières anesthésistes.
« En France, notre étude menée avec 418 infirmières
de bloc opératoire et un groupe témoin sur le dérou-
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 48 - août-septembre 2003
lement et l’issue de leurs grossesses a montré que les
premières décrivaient deux fois plus de dysesthésies
que les secondes. De même, les soignantes exposées
décrivaient de façon plus fréquente et significative des
signes de fatigue. Nous avons identifié la survenue de
syndromes neuropsychologiques, c’est-à-dire au
moins deux des trois signes suivants : céphalées, vertiges, ralentissement des réactions. » Sa survenue
est corrélée à l’intensité de l’exposition, appréciée
à partir de l’activité opératoire, ainsi qu’au taux
de renouvellement de l’air de la salle (0 à 5 renouvellements d’air par heure, 6 à 15, et plus de
15 renouvellements). Dans les blocs étudiés, les
conditions d’évacuation des gaz étaient loin d’être
excellentes. « Nous avons mesuré les concentrations
atmosphériques, explique Madeleine Estryn-Béhar.
En chirurgie pédiatrique, les expositions étaient les
plus élevées. Les soignants étaient exposés à des
concentrations atteignant, pour l’halothane, 32 ppm
pour les anesthésistes et 8 ppm pour les chirurgiens
et infirmières. »
La réglementation française
Une circulaire du ministère de la Santé recommande un bon usage des anesthésiques. Elle
stipule que “les salles où se font des anesthésies
doivent être équipées de dispositifs assurant l’évacuation des gaz et vapeurs anesthésiques” (1).
• Cette circulaire fixe les valeurs limites à 25 ppm
en phase d’entretien de l’anesthésie pour le protoxyde d’azote, et à 2 ppm pour les halogénés.
• La Commission locale de surveillance des gaz
doit s’assurer que des mesures de contrôle de l’exposition sont faites. Le médecin anesthésiste vérifie les installations comme la formation du personnel.
• La réglementation précise que “l’atmosphère
des salles d’opération et de réveil doit recevoir un
apport en air neuf au régime minimal de 15 volumes par heure par salle, avec un apport minimum de 50 m3/ heure/personne” (2).
• Le médecin du travail doit être informé de la nature comme de la composition et des modalités
d’emploi des produits utilisés (art. R. 242-11).
Cela rend possible la surveillance médicale des
soignants, comme son rôle de conseil sur les aménagements des postes de travail.
• Les hépatites liées à l’halothane sont indemnisées dans le cadre du tableau 89 des maladies
professionnelles.
(1) Circulaire DGS/3A/667 du 10 octobre 1985.
(2) Bulletin du J.O. "Établissements recevant du public. Sécurité
contre l’incendie. Établissements de soins”. (Article 114-4).
En Allemagne, Hagemann et son équipe ont interrogé 102 anesthésistes (10). Ils ont recueilli les
plaintes suivantes : fatigue (chez 68 % d’entre
eux), épuisement général (53 %), irritabilité
(26 %), difficultés à conduire (19 %), céphalées
(17 %), troubles de la concentration (8 %). La pollution était surtout élevée en pédiatrie. Durant
trois jours, les auteurs de cette étude ont réalisé
électroencéphalogrammes et débits sanguins cérébraux chez des anesthésistes. Dans les régions
occipitales, ils ont mis en évidence une augmentation croissante des ondes alpha entre début et
fin de poste et entre le premier et le troisième jour.
Lucchini a comparé 30 personnes travaillant en
salle d’opération et 20 soignants d’autres départements (11). Il les a examinés à l’aide de tests neurocomportementaux. Le groupe travaillant au bloc
opératoire fut testé pendant des anesthésies avec et
sans anesthésiques volatils. Pendant le travail avec
anesthésiques volatils, les concentrations atmosphériques moyennes de protoxyde d’azote sont
passées de 50,9 ppm, le premier jour de la semaine
de travail, à 54,2 ppm le dernier jour de la semaine. Les concentrations urinaires moyennes de
protoxyde d’azote sont passées de 21,54 microgrammes à 25,6 microgrammes par litre, entre le
début et la fin de la semaine. Les temps de réaction
étaient plus lents en fin de semaine chez les soignants de salle d’opération effectuant des anesthésies inhalatoires que chez ceux n’en utilisant pas
ou que dans le groupe de contrôle.
M.B.
(1) Ravgues S et al. Évaluation de l’exposition aux anesthésiques volatils
des infirmières anesthésistes. Archives des maladies professionnelles
2002 ; 63 (8) : 664.
(2) CRAMIF. Guide pour prévenir les expositions professionnelles aux gaz
et vapeurs anesthésiques. 1996, 60 pages.
(3) Estryn-Béhar M. Le Guide des risques professionnels du personnel
des services de soins. Paris : Lamarre, 1991, 377 p.
(4) Estryn-Béhar M. Risques professionnels et santé des médecins.
Paris : Masson, 2002, 177 p.
(5) Tannenbaum TN, Goldberg RJ. Exposure to anesthetic gases and
reproductive outcome. J Occup Environ Med 1985 ; 27 : 659-68.
(6) Lamberti L, Bigatti P, Ardito G, Armellito F. Chromosome analysis in
operating room personel. Mutagenesis 1989 ; 4 (2) : 95-7.
(7) Nartarajan D, Santhiya ST. Cytogenetic damage in operation theatre
personnel. Anesthesia 1990 ; 54 : 574-7.
(8) Hoegrauf HK, Wiesner G, Schroegendorfer KF, Jobst BP, Spacek A,
Harth M, Sator-Katzenschlager S, Rudiger HW. Waste anesthetic gases
induce sister chromatid exchanges in lymphocytes of operating room
personnel. Br J Anaesth 1999 ; 82 (5) : 764-6.
(9) Flodin U, Landtblom AM, Axelson O. Multiple sclerosis in nurse anaesthetists. Occup Environ Med 2003 ; 60 : 66-8.
(10) Hageman H, Hartmann B, Winter CG, Schellenberg R. Danger of
exposition to volatile anaesthetic gases for operating room personnel,
paru dans Occupational Health for Health Care Workers - International
congress on Occupational Health, dirigé par Hagberg M, Hofmann F,
Stössel U, Westlander. Landsberg/Lech : Ecomed, Allemagne, 1993 ;
256-61.
(11) Lucchini R, Placidi D, Toffoletto F, Alessio L. Neurotoxicity in operating room personnel working with gaseous and nongaseous anesthesia. Int Arch Occup Environ Health 1996 ; 68 (3) : 188-92.
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