L’ Après l’éradication de la variole..., celle des infections nosocomiales ?

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Après l’éradication de la variole..., celle des infections
nosocomiales ?
After smallpox..., is global eradication of health care associated
infections possible?
● B. Régnier*
institut Maurice-Rapin a pour objectif depuis quinze
ans, dans le respect d’une approche “médecine et
société”, d’approfondir la réflexion en éthique médicale, réanimation et infectiologie. Dans ce cadre, a été organisé, le 24 juin 2005, un colloque multidisciplinaire sur la “judiciarisation des infections nosocomiales”. Le compte rendu
figure en page 249. Cet éditorial rappelle le contexte du débat.
L’
DÉMOCRATISATION SANITAIRE
La santé évolue avec la société ! Les citoyens ont des droits (de
plus en plus nombreux et qu’ils connaissent de mieux en
mieux). Ils se tournent vers le juge pour les faire respecter. En
même temps, d’autres évolutions sont survenues. La santé est
devenue un objectif à part entière, une exigence sociale, “une
valeur suprême” mais aussi un droit (1, 2). Le patient est devenu
un usager ou un consommateur (1, 3). Le médecin “sorcier”
(4), qui annonçait la maladie perçue comme une fatalité et bénéficiait d’une relation de confiance, est devenu un professionnel, avec lequel est passé un “contrat” (4, 5) et dont on attend
une obligation de moyens, voire de résultat. La recherche du
risque nul (conforté par le discours politique autour du principe de précaution) est un fantasme de notre société surprotégée (3), à laquelle on n’enseigne pas le “risque de l’incertitude”
(6). L’absence de certitude est alors interprétée comme une
volonté de dissimulation et relayée par les médias. Par ailleurs,
dans nos sociétés, la notion d’“homme libre et responsable”
fait place à la responsabilité du groupe et au “statut de victime”
(2, 7).
* Service de réanimation médicale et infectieuse. hôpital Bichat-Claude
Bernard. 75018 Paris. Université Paris-VII.
La Lettre de l’Infectiologue - Tome XX - n° 6 - novembre-décembre 2005
Tous les pays développés connaissent, peu ou prou, la même
évolution. Elle a cependant été explosive en France. Est-ce la
conséquence de l’électrochoc du sang contaminé au pays des
droits de l’homme ? Et d’un pays sans tradition de santé
publique qui, brutalement, entend passer du rien au tout… ?
Judiciarisation de la médecine :
des bases anciennes, une évolution récente
Dans un contexte plus large de “judiciarisation de la société”,
il est demandé au juge de se prononcer sur des questions relevant plus de la métaphysique ou de sujets médicaux que du
droit (2). Et la jurisprudence ainsi établie devient la base des
lois et des règlements.
Par application d’un principe de droit commun qui prévoit la
réparation d’un préjudice lié à une activité humaine (article
1382 du Code civil : “Tout dommage impose à celui qui en est
l’auteur l’obligation de le réparer”), un acte médical dommageable peut être considéré comme une infraction non intentionnelle. Sur le fond, la “judiciarisation de la médecine” est
une sauvegarde des rapports humains réglés par le droit. Mais
on entend souvent, sous ce vocable, le recours abusif et intempestif aux tribunaux (1). Souhaitons que les nouvelles procédures de conciliation, mises en place par la loi de mars 2002,
limitent la dérive contentieuse.
Comment en est-on arrivé là ?
Historiquement, il est classique de faire débuter cette judiciarisation dès 1936 avec l’arrêt Mercier. Pour la première fois,
la Cour de cassation fondait la responsabilité du médecin sur
une base contractuelle dont la transgression pouvait constituer
une faute débouchant sur l’indemnisation de la victime. En
1942, la Cour de cassation (arrêt Teyssier) reconnaît la notion
de “droit du malade” en affirmant le principe du respect de son
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consentement préalable. Ainsi, et peu à peu, les droits acquis
par le citoyen, depuis la Révolution, de réparation d’un préjudice subi vont s’appliquer aux soins. L’activité médicale est
devenue semblable aux autres activités humaines ou considérées comme telles par la société.
La multiplication des affaires civiles soumises aux juridictions,
au cours des années 1960-1970 (2), lance en 1992 le débat de
“l’aléa”. En effet, pour indemniser les victimes, le juge devait
nécessairement rechercher une faute, parfois “artificiellement”.
L’idée est alors émise de répartir la charge financière des accidents médicaux selon qu’ils relèvent d’une faute ou du risque
(aléa). Ce dernier, appelé aléa médical, relèverait de la solidarité nationale. Une autre coupure est intervenue avec le scandale du sang contaminé et de l’hépatite C, dans les années 1980,
puis de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, à la fin des années 1990
(1). La loi DMOS de décembre 1991 ouvre le droit à indemnisation des personnes contaminées par le VIH à la suite d’une
transfusion. En avril 1993, le Conseil d’État (arrêt Bianchi)
ouvre des possibilités d’indemnisation pour des victimes d’accidents thérapeutiques d’une extrême gravité. On est passé de
l’obligation de moyens à l’obligation de (sécurité) de résultats !
Les infections nosocomiales :
un régime d’exception fondé sur la jurisprudence
Il semble que l’infection nosocomiale (IN), tout en s’inscrivant
dans l’évolution de la judiciarisation de la médecine, ait été traitée “à part”. En fait, son histoire jurisprudentielle démarre dès
1960, avec un premier arrêt du Conseil d’État condamnant l’Assistance publique de Marseille pour le cas d’un enfant admis
pour rougeole en 1952 et mort de variole, transmise par son
voisin de chambre… ! Tout se passe comme si l’évolution
jurisprudentielle allait considérer, au cours des quatre
décennies qui allaient suivre, que les infections nosocomiales,
comme la variole, étaient complètement éradicables !
Dans le cas de cet enfant, il y avait clairement eu négligence
(faute), dont la preuve a été facilement apportée. Par la suite,
il s’avérera qu’il peut être très difficile pour la victime de
démontrer la faute d’un médecin ou d’un établissement de santé
(ES). Une nouvelle étape sera franchie en 1988 par le Conseil
d’État (arrêt Cohen) qui condamnera l’AP-HP à la suite d’une
méningite postopératoire à La Pitié-Salpêtrière (Paris). Aucune
faute ne sera retrouvée, mais le Conseil d’État estimera que la
survenue d’une infection traduit une faute dans l’organisation
du service public hospitalier (8). C’est le principe de la faute
présumée. Il y a aussi renversement de la charge de la preuve,
l’ES ne pouvant s’exonérer qu’en démontrant l’absence de
faute, mission quasi impossible… En 1996, la Cour de cassation (arrêt Bouchard) étend ce principe de la responsabilité
pour faute présumée aux établissements privés. Enfin, en 1999
et à l’occasion de trois arrêts rendus le 29 juin 1999, la Cour
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de cassation décide que les ES privés et les médecins sont tenus
à une obligation de sécurité de résultats (8). Le patient doit
apporter la preuve de la nature nosocomiale de l’infection. L’ES
est alors considéré comme responsable et devra en réparer les
conséquences dommageables. Il ne pourra en être exonéré que
s’il démontre une “cause étrangère” – par exemple que l’infection est totalement “étrangère” au séjour hospitalier et était
de “force majeure” – c’est-à-dire imprévisible et irrésistible
[inévitable] (9). Cette jurisprudence pour les ES privés rejoint,
de fait, celle des ES publics (arrêt Cohen de 1988), avec le
concept de “faute présumée” (8).
C’est l’ensemble de cette jurisprudence qui inspirera la législation.
En effet, la loi des droits du malade du 4 mars 2002, qui précise les modalités d’indemnisation des conséquences des
“risques sanitaires”, indique (article L.1142-1) que les ES sont
responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales. Parmi les accidents médicaux, l’IN apparaît donc, a
priori, comme le seul “fautif”. Mais l’idée de faute n’est-elle
pas devenue une fiction vide de sens (2) ?
Pourquoi ce régime d’exception ?
Les IN seraient-elles toutes et toujours évitables ?
En 1996, le rapport de Claude Evin sur les droits de la personne
malade au Conseil économique et social, préconisant notamment l’indemnisation de l’aléa thérapeutique par la solidarité
nationale, enclenche la genèse de la loi de 2002. Après de difficiles discussions, liées en particulier au financement du dispositif, Bernard Kouchner présente le projet de loi en septembre
2001. Adoptée en première lecture par le Parlement en
novembre, la loi relative aux droits des malades et à la qualité
du système de santé sera signée le 4 mars 2002. Concernant les
événements indésirables ou les accidents médicaux, la loi a deux
objectifs : l’obligation de signalement à des fins d’alerte et de
vigilance et les règles de réparation des conséquences dommageables. Si l’accident est “fautif”, il engage la responsabilité de
l’ES et sera indemnisé par l’assureur ; s’il n’y a pas eu de faute,
mais simplement risque ou “aléa”, il relèvera d’un fonds de solidarité nationale : l’ONIAM (Office national d’indemnisation
des accidents médicaux). Ce sont les CRCI (Commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales)
qui s’assurent de la réalité et de la gravité du préjudice, du lien
de causalité avec un accident médical et statuent sur sa nature
“fautive versus aléa”. Ces risques sanitaires liés au “fonctionnement du système de santé” sont distingués en accident médical, affection iatrogène et infection nosocomiale (les “événements indésirables liés aux produits de santé” sont souvent
traités à part) . Le projet de loi initial prévoyait que chacun
d’entre eux puisse être qualifié de fautif ou d’aléa, mais un
La Lettre de l’Infectiologue - Tome XX - n° 6 - novembre-décembre 2005
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amendement de Claude Evin, validé en commission parlementaire, a conduit à sortir l’IN de l’aléa (10). La raison en est la
jurisprudence constante de la Cour de cassation (et du Conseil
d’État) sur la présomption de faute et l’obligation de sécurité
de résultats avec son corollaire : l’indemnisation dans le cadre
de la responsabilité pour faute (avec une garantie d’indemnisation plus importante pour les victimes). Il semble que les débats
aient été très difficiles, à la fois en commission parlementaire,
en commission des affaires sociales du Sénat puis en commission mixte paritaire. Plusieurs versions seront proposées car le
ministre, Bernard Kouchner, estimera que le texte manquait de
clarté… (10). Il convient de reconnaître qu’en l’absence de définitions médicales et/ou épidémiologiques consensuelles des
accidents médicaux et affections iatrogènes, qui peuvent comprendre les IN (!), et en raison des “frontières” floues entre accidents fautifs et aléas, le législateur a dû “tenter de se débrouiller”
seul… Le débat terminologique autour des accidents médicaux,
des IN et de la iatrogénie reprendra d’ailleurs un an plus tard,
avec la rédaction de la loi de Santé publique du 9 août 2004
(puis celle de l’Assurance maladie du 13 août 2004) et avec des
variations des termes employés (“événements indésirables
graves liés à des soins réalisés lors d’investigations, de traitements ou d’actions de prévention”… et, dans la liste des objectifs : “iatrogénie”, qui englobe les IN) qui persistent encore à
ce jour. Concernant la responsabilité, les rédacteurs de la loi, ne
disposant pas de références scientifiques sur les IN fautives versus inévitables (aléatoires), se sont fondés sur la jurisprudence.
C’est donc parce que les juges avaient estimé, depuis plus de
15 ans, que les IN (toutes…) traduisaient (par définition… ?)
un dysfonctionnement de l’ES, que la loi de mars 2002 a retenu
ce principe. Néanmoins, deux problèmes sont apparus : le maintien de la cause étrangère comme déchargeant l’ES de sa responsabilité pour IN, et la réaction des assureurs !
En effet, la jurisprudence, si elle affirmait la responsabilité de
l’ES en cas d’IN, prévoyait néanmoins qu’il puisse en être exonéré s’il apportait la preuve d’une cause étrangère [principe
ancien et général du droit] (10). En conséquence, dans la rédaction finale de l’article l.1142-1, le premier alinéa indique que
“Les ES sont responsables des dommages résultant d’IN, sauf
s’ils apportent la preuve d’une cause étrangère” (alors que,
pour les autres accidents, c’est à la victime de prouver la faute).
Le deuxième alinéa précise que “lorsque la responsabilité d’un
ES n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une IN ouvrent droit à la réparation des préjudices au
titre de la solidarité nationale”.
Au regard de l’extrême difficulté de prouver la “cause étrangère” d’une IN, les assureurs ont vivement réagi [vis-à-vis de
la loi, et pas seulement pour l’IN] (11, 12). Après une concertation avec l’ensemble des acteurs, le partage des conséquences
financières des IN sera redéfini (loi About du 30 décembre
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2002). Lorsque le préjudice lié à une IN est grave (invalidité
supérieure à 25 %) et qu’aucune faute n’a été prouvée, c’est
l’ONIAM qui indemnise la victime au titre de la solidarité
nationale. On voit donc que, pour la même IN et en l’absence
de faute documentée, l’ES est responsable si l’invalidité est
inférieure à 25 % et la victime indemnisée par l’assureur, alors
que si l’invalidité est supérieure à 25 %, l’ONIAM indemnise.
Comme on le voit, la logique est politique et financière, alors
que la cohérence en termes de responsabilité médicale est plus
discutable…
Depuis la loi de mars 2002, que s’est-il passé ?
Il semble possible, au travers de certains jugements récents ou
d’avis de CRCI, de discerner des tentatives d’interprétation de
la “cause étrangère”. D’une part, via la discussion infections
endogènes (flore du patient) versus exogènes, d’autre part, par
la prise en compte de l’état antérieur du patient. Il a parfois été
considéré que la présence du germe microbien dans l’organisme du patient avant l’hospitalisation pouvait constituer une
cause étrangère… ! Par ailleurs, la gravité de l’état de santé de
certains patients a pu être considérée comme le déterminant
essentiel de l’infection, répondant aux clauses “d’irrésistibilité”, voire “d’extériorité” de la cause étrangère. On voit bien
l’extrême difficulté de ces considérations. Leur incohérence
parfois aussi, puisqu’en aucun cas la nature endogène de l’infection ne peut, en soi, amener à conclure à l’inévitabilité, ni
même à l’absence de faute. La variabilité suggérée de ces avis
démontre le besoin de mieux définir les IN non liées à la qualité des soins. Il semble donc bien exister aussi un “aléa juridique”, avec des divergences de la jurisprudence (13).
Cette problématique est actuellement débattue par le CTINILS
(Comité technique national des infections nosocomiales et des
infections liées aux soins). Dans le cadre du programme national de lutte contre les infections nosocomiales 2005-2008, des
indicateurs de performance des ES ont été définis, dont les taux
de certaines IN. Ces taux seront publics (public reporting) et
permettraient un “hit-parade” des ES ! Dans ce contexte, ainsi
qu’en raison des objectifs de la loi de Santé publique (août
2004), a émergé la question de cibler les IN dont la survenue
était clairement liée à la qualité des soins (et donc évitable…).
Un groupe de travail a commencé à y réfléchir, et il faut souhaiter que ses conclusions puissent influencer les décisions à
venir des juridictions et des CRCI.
Il serait aussi souhaitable que la société (notamment les associations d’usagers et les médias) participent au débat et à la “pédagogie du risque” (6). Donner des droits et des possibilités de recours
aux citoyens suppose aussi leur éducation. À ce titre, il est intéressant de noter dans l’hebdomadaire Le Point daté du 25 août
2005 et consacré au “Palmarès 2005 des hôpitaux”, que dans l’apo-
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logie du CHU de Bordeaux (classé premier de tous les ES… !) il
est dit que son service d’hygiène “gère chaque année 7 000 cas
d’IN, dans leur majorité bénignes et inévitables”… Prémice d’une
prise de conscience ? (Cet hebdomadaire avait publié, début 2005,
la “liste noire des hôpitaux” en hygiène hospitalière…).
Les raisons pour lesquelles les IN, parmi l’ensemble (très
large…) des événements indésirables liés aux soins (dont elles
ne représentent que 20 %), sont les seules à être considérées
comme systématiquement fautives par la jurisprudence, ne sont
pas claires. On peut émettre plusieurs hypothèses à l’origine
de ce régime d’exception :
✓ La part prépondérante, dans la jurisprudence, des IN “évitables”, notamment des infections postopératoires en chirurgie
orthopédique “propre”, à l’origine d’une généralisation abusive ?
✓ La difficulté des expertises judiciaires, peut-être insuffisamment spécialisées au regard de la complexité des situations
et de l’évolution rapide des connaissances ? [Récemment, la
Société américaine des maladies infectieuses a diffusé des
recommandations relatives aux conditions requises pour optimiser l’expertise] (14).
✓ La nature même de l’accident médical, une infection (“attraper un microbe”, “transmettre un germe”) par rapport aux autres
(effets indésirables d’un médicament, perforation percolonoscopique très rare mais “inévitable”, pour laquelle c’est le défaut
d’information qui est mis en cause, etc.), avec mauvaise compréhension de la physiopathologie et de la circulation des germes ?
“Il faut que les usagers sachent que les IN ne disparaîtront pas,
en tout cas pas complètement”, écrivait, en janvier 2004,
Jean Carlet, président du CTIN (15).
✓ La confusion induite par une terminologie devenue inadaptée (infection “nosocomiale” versus “liée aux soins”) ?
✓ L’électrochoc du sang contaminé, suivi des scandales de
l’hépatite C et du Creutzfeldt-Jakob ?
Où allons-nous ?
Sans remettre en cause un seul instant les progrès potentiels dus
à la loi de mars 2002 et à l’implication des usagers dans la qualité des soins, il paraît nécessaire de faire évoluer la jurisprudence et la législation, d’optimiser et d’harmoniser les avis des
CRCI. Dans le domaine des IN, les politiques ont donné une
impulsion qui a contribué à ce que notre pays enregistre des progrès remarquables. Tout en maintenant cette dynamique, il
convient de demeurer “conforme à l’état des connaissances”. En
janvier 2004, le président du CCNE (Comité consultatif national d’éthique), Didier Sicard, dans un article intitulé “Protéger
les malades ou s’en protéger !” (16), mettait en garde contre une
dérive contentieuse : “Les procès, le plus souvent injustes, sont
insupportables car ils témoignent de la méconnaissance d’une
réalité toujours plus complexe qui finira par décourager les
meilleures équipes”, un risque déjà formulé par d’autres (5). Fin
2004, le juge Marie-Odile Bertella-Geffroy, évoquant les rap-
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ports justice-santé, soulignait l’incompréhension mutuelle de ces
deux mondes et concluait que “tout était à construire, ensemble”
(17). Sans nul doute, la communauté médicale y est prête.
Néanmoins, pour “construire ensemble”, il conviendrait de disposer de données robustes, notamment d’un suivi des avis des
CRCI et d’un recueil des expertises judiciaires et des jugements
rendus par les tribunaux. Il est curieux de constater, en l’absence de registre exhaustif (13), que les magistrats peuvent
avoir des estimations très différentes des affaires. Certains évoquent une multiplication des “affaires”, alors que d’autres
considèrent que le contentieux médical reste marginal au regard
du volume de l’activité médicale (13), au point de conclure :
“la judiciarisation de la médecine, mythe et réalité” (18). Espérons que la CNAM (Commission nationale des accidents médicaux) joue le rôle d’observatoire du risque médical, amiable et
contentieux (13), et permette de faire la part entre mythe et réalité, entre dérive contentieuse et “crise de confiance” des assureurs (13, 18), et de comprendre l’argumentaire des expertises
et avis rendus. Dans le souci du patient, la priorité est de préserver (restaurer… ?) la relation de confiance (même s’il y a
“contrat”) entre le malade et le médecin (1).
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É F É R E N C E S
B I B L I O G R A P H I Q U E S
1. Vignaud F (avocat). La judiciarisation de la médecine. Comparaison entre
droit français et droit américain. In : 13e Journée d’Éthique médicale de l’Institut
Maurice-Rapin 2003. La judiciarisation de la médecine : www.institutmauricerapin.org
2. Turcey V (vice-président du tribunal de grande instance de Reims). 13e Journée
d’Éthique médicale de l’Institut Maurice-Rapin 2003. La judiciarisation de la
médecine : www.institutmauricerapin.org
3. Burgelin JF (procureur général Cour de cassation). La judiciarisation de la
médecine. 13e Journée d’Éthique médicale de l’Institut Maurice-Rapin 2003. La
judiciarisation de la médecine : www.institutmauricerapin.org
4. Beloucif S. 2e journée de formation Maurice-Rapin. Paris 24 juin 2005.
www.institutmauricerapin.org
5. Saadoun D. La médecine saisie par le droit. 13e Journée d’Éthique médicale
de l’Institut Maurice-Rapin 2003. La judiciarisation de la médecine : www.institut mauricerapin.org
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8. Sargos P. Infections nosocomiales et responsabilité : la nouvelle jurisprudence
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FMC de la SRLF (Société de réanimation de langue française), Paris, 26 avril 2001.
10. Thouvenin D. 2e Journée de formation Maurice-Rapin. Paris 24 juin 2005.
www.institutmauricerapin.org
11. Duplessis AS. Aléa thérapeutique : l’indemnisation contestée. Le Généraliste,
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12. Benkimoun P. Le casse-tête de l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux. Le Monde, 17 février 2000.
13. Garay A (avocat à la cour d’appel de Paris) Vous avez dit “judiciarisation”
de la pratique médicale ? 13e Journée d’Éthique médicale de l’Institut MauriceRapin 2003. La judiciarisation de la médecine : www.institutmauricerapin.org
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Revue Sève – Les tribunes de la santé – 2004;39-46.
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