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Régénération myocardique
par thérapie cellulaire :
risques et résultats
e traitement consistant à transplanter des
cellules vivantes dans le myocarde pathologique entraînerait un processus de régénération capable de réduire la fibrose ventriculaire survenue lors d’un infarctus du
myocarde. Cette approche devient progressivement une nouvelle voie thérapeutique de la
défaillance ventriculaire postischémique.
Le développement de la biologie cellulaire et
moléculaire permet ainsi d’envisager cette stratégie. L’objectif de la thérapie cellulaire, appelée aussi “cardiomyoplastie cellulaire”, est
d’obtenir une régénération du myocarde lésé
par injection de cellules issues du même malade
(autologues), afin de limiter et de rendre réversible le remodelage postischémique, et éventuellement de restaurer la contractilité ventriculaire. Il faut tenir compte du fait que les
cardiomyocytes, passé le stade fœtal du développement, perdent leur faculté de prolifération.
Une lésion d’infarctus myocardique ne peut
donc se réparer par la prolifération des cardiomyocytes adultes, car le nombre de cellules
souches myocardiques est très limité.
Dans des essais cliniques actuels, soit des myoblastes squelettiques autologues cultivés in vitro
pendant trois semaines sont utilisés afin d’induire une “myogenèse”, soit des cellules
souches de moelle osseuse sont utilisées fondamentalement dans des protocoles “d’angiogenèse”. L’objectif de la cardiomyoplastie cellulaire est ainsi de régénérer le myocarde par le
biais d’une myogenèse et/ou d’une angiogenèse.
Cependant, des complications graves ont été
observées, car les cellules musculaires squelettiques (myoblastes) cultivées dans du sérum de
veau fœtal (SVF) et utilisées dans la régénération myocardique ont provoqué des arythmies
ventriculaires sévères et parfois des morts
subites, nécessitant l’implantation de défibrillateurs. Ainsi, dans les essais cliniques en cours
en France, l’implantation d’un défibrillateur est
devenue obligatoire. En revanche, l’expérience
clinique internationale (plus de 80 cas) n’a
jamais démontré d’effets arythmogéniques après
implantation dans le myocarde de cellules issues
de la moelle osseuse ; dans cette approche, les
cellules ne sont pas cultivées ex vivo.
Une étude européenne a exploré l’hypothèse
selon laquelle le contact des cellules avec le SVF
pendant trois semaines entraînerait une fixation
de protéines sur les myoblastes, responsables de
réactions immunologiques à l’origine d’arythmies sévères. Chez 12 patients, des myoblastes
autologues prélevés des muscles squelettiques
ont été cultivés avec du sérum autologue et
ensuite injectés à ces malades porteurs d’une car-
L
diomyopathie ischémique. Les cellules ont été
cultivées pendant trois semaines sans facteurs de
croissance, dans des milieux de culture complètement autologues préparés à partir du sérum du
même malade, utilisant des techniques de plasmaphérèse. Les injections de myoblastes ont été
réalisées sur des lésions non viables d’infarctus,
au cours de la chirurgie coronarienne destinée à
la revascularisation d’autres zones du cœur.
Tous les patients ont survécu à l’intervention.
Dans le suivi à long terme, il n’y a pas eu de mortalité. La surveillance rythmologique par Holter
n’a pas montré d’arythmies ventriculaires significatives. Des améliorations objectives à long
terme ont été observées dans la fraction d’éjection du ventricule gauche ainsi que dans les
études de contractilité régionale de zones traitées
par les cellules. La viabilité myocardique des
zones infarcies a été améliorée significativement.
Conclusion. L’utilisation d’un procédé de culture cellulaire totalement autologue a permis de
réduire le risque d’arythmie ventriculaire sévère
ainsi que celui de mort subite. L’implantation
de défibrillateurs a été évitée. Un autre bénéfice de cette méthode est d’éviter tout risque de
contamination virale, par prions ou zoonoses.
Le milieu de culture utilisant le sérum de veau
fœtal semblerait être lié à l’induction de phénomènes inflammatoires et d’antigénicité, responsables de complications rythmologiques
sévères chez les malades soumis à l’implantation intramyocardique de myoblastes.
Des questions restent posées quant aux mécanismes d’action de cette thérapie cellulaire,
en particulier sur l’existence d’un couplage
électromécanique avec le tissu myocardique
environnant, car les myoblastes squelettiques
ne se contractent pas spontanément.
J.C. Chachques, Paris
Herreros J et al. Autologous intramyocardial injection of cultured skeletal muscle-derived stem cells in
patients with non-acute myocardial infarction. Eur
Heart J 2003 ; 24 : 2012-20.
Short and long term outcomes
of combined cardiac
and renal transplantation
with allografts from
a single donor
et article rapporte l’expérience de l’hôpital Papworth des transplantations comC
binées cœur-rein à partir d’un même donneur
réalisées dans ce centre. Ces transplantations
sont rares, puisqu’elles ne concernent que 5 à
6 patients par an en France, mais leur indication est souvent difficile, surtout lorsqu’il
s’agit de proposer une transplantation rénale
chez des patients devant subir une nouvelle
transplantation cardiaque.
58
De 1986 à 2002, 13 patients âgés en moyenne
de 45 ans ont ainsi nécessité une transplantation
combinée cœur-rein. Les étiologies des insuffisances rénales terminales sont variées. Trois de
ces 13 patients avaient une néphrotoxicité à la
ciclosporine en raison d’une transplantation cardiaque antérieure et devaient subir une nouvelle
transplantation cardiaque pour rejet chronique.
Avant cette transplantation combinée,
9 patients étaient en dialyse péritonéale, 2 seulement en hémodialyse et les 2 patients dont
l’insuffisance rénale était secondaire à l’administration prolongée de ciclosporine n’avaient
aucune technique d’épuration extrarénale. Malheureusement, aucune donnée n’est disponible
quant à la date de début de l’épuration par rapport à la date de transplantation combinée.
Quatre patients sont décédés, 3 très précocement et un tardivement (879 jours post-transplantation), de dysfonction précoce du greffon cardiaque, de sepsis, de défaillance
multiviscérale ou d’insuffisance cardiaque.
Parmi les 3 patients ayant eu une retransplantation cardiaque, un est décédé au 13e jour postopératoire, et les deux autres sont encore en vie
plus de 2 et 3 ans après cette retransplantation.
La survie actuarielle globale est de 77 % à un
an et de 67 % à 10 ans, survie comparable à
celle des 760 autres transplantations cardiaques réalisées durant la même période par
cette équipe (82 % à un an et 58 % à 10 ans).
Le nombre moyen de rejets aigus cardiaques
pour 100 patients-jours a été significativement moins élevé par comparaison avec les
transplantations cardiaques isolées (0,04 versus 0,4 ; p = 0,01) et seul un épisode de rejet
aigu rénal a nécessité un traitement, fréquence
de rejet aigu rénal plus faible que celle décrite
après transplantation cadavérique.
L’immunosuppression était celle utilisée par le
centre pour les transplantations cardiaques isolées
avec, de 1986 à 1994, une induction systématique
par RATG, puis, dans plus de 50 % des cas, les
années ultérieures. Le traitement immunosuppresseur de fond comprenait ciclosporine, azathioprine
(ou mycophénolate mofétil chez 2 patients) et une
corticothérapie stoppée au 18e mois postopératoire.
Seule la compatibilité de groupe sanguin était prise
en compte pour le choix du donneur sans appariement HLA. Pour expliquer cette moindre incidence
de rejet, diverses hypothèses sont soulevées : temps
d’ischémie plus court pour le rein par rapport à une
transplantation cadavérique, existence d’une certaine tolérance en raison de la combinaison de la
greffe de deux organes…
Le taux moyen de créatinine était de 724 µmol/l en
préopératoire, de 158 µmol/l à la sortie de l’hôpital
et de 123 µmol/l tardivement avec un suivi médian
de 2,637 jours, sans aucune perte fonctionnelle du
greffon rénal chez les 9 patients survivants.
Le Courrier de la Transplantation - Volume IV - n o 1 - janvier-février-mars 2004
R evue
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Les auteurs concluent à la faisabilité de ces
transplantations combinées après une sélection rigoureuse des candidats, même lorsqu’il
s’agit d’un patient ayant déjà eu une transplantation cardiaque antérieure.
P. Chevalier, Paris
Luckraz H et al. J Heart Lung Transplant 2003 ; 22 :
1318-22.
Vers une meilleure
connaissance
du syndrome hépatopulmonaire...
e syndrome hépatopulmonaire (SHP) est
défini par la présence d’un gradient
L
d’oxygène alvéolo-artériel et d’une dilatation
vasculaire intrapulmonaire, en présence d’une
maladie hépatique. Il s’agit d’une complication rare des maladies du foie, longtemps
considérée comme une contre-indication à la
transplantation hépatique (TH) du fait du
risque de mortalité postopératoire lié à l’hypoxie. Il a été récemment suggéré que le SHP
était réversible après TH, de sorte que, depuis
une dizaine d’années, certains centres considèrent le SHP comme une indication à la TH,
même lorsque la maladie hépatique n’est pas
très évoluée. Le présent travail rapporte l’expérience des centres de la région parisienne
sur dix ans. Le diagnostic de SHP a été fondé
sur la présence d’une PaO2 < 70 mmHg, ou
d’un gradient alvéolo-artériel de plus de
20 mmHg en air ambiant, associé à un retard
(plus de trois cycles cardiaques) sur l’échocardiographie de contraste.
Sur la période, quatre des six centres ont transplanté 23 patients adultes (14 à 64 ans) atteints
de SHP (parmi 2 265 TH). Tous les patients
étaient atteints d’hypertension portale, avec un
épisode au moins d’hémorragie digestive. Au
moment de l’évaluation prégreffe, la PaO2 allait
de 32 à 67 mmHg, avec une médiane de
52 mmHg. À l’épreuve de ventilation en oxygène pur, la PaO2 médiane était de 310 mmHg
(74 à 663). Le shunt isotopique était en moyenne
de 33 % (0 à 80 %). Le shunt mesuré en oxymétrie allait de 2 à 34 % (en médiane de 19 %).
Dans tous les cas, la maladie hépatique avait été
diagnostiquée avant le SHP. Le temps médian
entre les deux était de 60 mois. Le temps médian
entre le diagnostic de SHP et la TH était de
12 mois ; 43,5 % des patients avaient une PaO2
de moins de 50 mmHg et 13 nécessitaient une
oxygénothérapie continue au moment de la TH.
Il n’a pas été constaté de relation entre la PaO2
en air ambiant et la PaO2 en oxygène pur. Le
shunt isotopique était corrélé à la PaO2 en air
ambiant, mais pas à la PaO2 mesurée en oxygène pur. Il existait une corrélation négative entre
l’âge et la PaO2 (R = -0,61 ; p = 0,004). Il n’y
avait pas de corrélation entre le score de Child et
la PaO2 (il existait même une corrélation paradoxale inverse, non statistiquement significative).
Parmi les 23 patients de cette série, deux sont
décédés dans les 3 mois du fait d’une hypoxie
réfractaire, avec défaillance multi-organe. Cinq
autres sont décédés plus tardivement. La durée
médiane de ventilation postopératoire a été de
2 jours et la médiane d’hospitalisation en unité
de soins intensifs de 14 jours. Quatre patients
ont nécessité une trachéotomie. En analyse univariée, aucun des paramètres préopératoires du
SHPn’était associé à la mortalité postopératoire.
En revanche, en postopératoire, les patients ventilés pendant plus de 2 jours ou ayant nécessité
une trachéotomie ont eu une mortalité plus élevée que le reste du groupe. Par ailleurs, la présence d’un shunt significatif lors de l’épreuve
d’hyperoxie prégreffe était associée à une durée
plus longue de ventilation mécanique et d’hospitalisation en unité de soins intensifs.
Après un suivi médian de 17 mois, il a été constaté
une amélioration des paramètres oxymétriques
chez les 21 patients survivant à la période périopératoire. Le seuil de 70mmHg de PaO2, utilisé
comme marqueur de guérison, a été franchi chez
15 des patients après 6 mois. La durée médiane
d’oxygénothérapie a été de 3 mois chez les
11 patients qui nécessitaient ce traitement en préopératoire. Deux patients de ce sous-groupe ont
secondairement développé une insuffisance respiratoire chronique, liée à une fibrose pulmonaire
idiopathique dans un cas et à une bronchopathie
chronique obstructive dans un autre. La réduction de 50 % du gradient alvéolo-artériel était plus
longue chez les sujets dont la PaO2 préopératoire
était inférieure à 52 mmHg que chez les autres
(RR = 3,6 ; p = 0,001), et chez les sujets dont le
gradient alvéolo-artériel était inférieur à
66 mmHg (RR = 3,1 ; p = 0,03). La récupération
était également plus longue chez les sujets porteurs d’une cirrhose alcoolique (RR = 5,2 ;
p = 0,007) et chez les sujets de plus de 48 ans que
chez les plus jeunes (RR = 3 ; p = 0,04). Cependant, aucun de ces paramètres n’était associé à la
récupération en analyse multivariée.
Le SHP est donc une complication rare de la cirrhose : 1 % de l’ensemble des patients bénéficiant
d’une TH dans la région parisienne. La mortalité
a été relativement modérée dans cette série, et
aucun des paramètres préopératoires n’était corrélé avec la mortalité. Cependant, deux des patients
décédés précocement sont morts d’hypoxie réfractaire, ce qui suggère que la présence d’une PaO2
très basse en préopératoire est probablement un
facteur de risque, ce qui a pu être sous-évalué sur
la totalité du travail. La majorité des patients ont
récupéré au moins partiellement leur fonction respiratoire. Enfin, l’absence de corrélation entre les
paramètres oxymétriques et la survie postopératoire suggère que la présence d’un SHP n’est pas
59
un argument pour inscrire précocement les patients
cirrhotiques sur liste d’attente.
Y. Calmus, Paris
Taillé C et al. Liver transplantation for hepatopulmonary syndrome : ten-years experience in Paris,
France. Transplantation 2003 ; 75 : 1482-9.
Du nouveau dans l’utilisation
des anticorps anti-CD40
ligand pour l’induction
d’une tolérance
epuis une dizaine d’années, de très
nombreux travaux ont montré que
D
l’induction d’une tolérance en transplantation
était possible chez des animaux adultes, en bloquant le signal de costimulation lymphocytaire.
Dès 1996, dans un article publié dans la revue
Nature, Larsen et al. montraient qu’on pouvait
induire la tolérance à une greffe de cœur et à
une greffe de peau dans un modèle de greffe
allogénique en bloquant le CD28 et le CD40
ligand, deux des principaux récepteurs impliqués dans la costimulation lymphocytaire. Ces
résultats très excitants ont conduit au développement d’anticorps anti-CD40 ligand humanisés pour une utilisation chez l’homme. De très
nombreux articles ont confirmé l’intérêt du blocage de la costimulation pour induire la tolérance. Les mécanismes impliqués sont supposés être le blocage du signal 2 de costimulation,
en présence d’un signal de stimulation (signal
1) intact, conduisant à un état d’anergie lymphocytaire. Dans un article récent publié dans
la revue Nature Medicine, Monk et al. ont étudié les mécanismes d’action des anticorps antiCD40 ligand (anti-CD40L) dans l’induction
d’une tolérance. En utilisant le même type d’approche que celle de Larsen 7 ans plus tôt, ils
montrent que l’induction d’une tolérance à la
greffe de peau par les anticorps anti-CD40L est
dépendante de la fraction Fc de ces anticorps et
de la présence du complément. De plus, le traitement par les anticorps anti-CD40L induit une
diminution du nombre de cellules allogéniques.
Dans l’ensemble, ces travaux suggèrent que les
anticorps anti-CD40Linduisent la tolérance, non
pas en bloquant le cosignal d’activation lymphocytaire, mais en induisant une déplétion des
lymphocytes CD8 alloréactifs activés par la présence de l’alloantigène. Ces données posent à
nouveau la question de la meilleure stratégie
pour induire la tolérance et donnent du poids aux
stratégies de déplétion lymphocytaire.
E. Morelon, Paris
Monk NJ et al. Fc-dependent depletion of activated
T cells occurs through CD40L-specific antibody
rather than costimulatory blockade. Nature Med
2003 ; 9, 10 : 1275-80.
Le Courrier de la Transplantation - Volume IV - n o 1 - janvier-février-mars 2004
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