R evue de presse Une technique révolutionnaire permet d’utiliser des greffons hépatiques habituellement trop petits es auteurs ont mis au point une nouL velle technique de transplantation hépatique chez l’adulte permettant d’utiliser des greffons de petite taille. Afin d’éviter la congestion et les lésions endothéliales induites par l’hyperdébit imposé à ces petits greffons, une diversion complète du flux veineux mésentérique supérieur a été effectuée à l’aide d’un shunt mésocave avec ligature de la veine en aval du shunt. Le receveur a eu des suites postopératoires simples, avec une histologie et des tests biochimiques hépatiques normaux à cinq mois. Cette technique peut permettre d’utiliser des petits greffons gauches, habituellement difficilement utilisables chez des adultes de poids normal. Conclusion. Ces données confirment qu’une élévation de la CDT ne reflète plus l’existence d’une consommation excessive d’alcool chez les patients en insuffisance hépatique grave, particulièrement lorsque le score de Child-Pugh est 10. À ce stade de la maladie, la valeur de la CDT devient un marqueur du degré d’insuffisance hépatique, chez les alcooliques comme chez les non-alcooliques. Y. Calmus DiMartini A et al. Carbohydrate deficient transferrin in abstaining patients with end-stage liver disease. Alcohol Clin Exp Res 2001 ; 25 : 1729-33. Diabète chez le transplanté hépatique : plus de complications, plus de rejets, plus de cancers, plus de morts... Y. Calmus Boillot O et al. Small-for-size partial liver graft in an adult recipient ; a new transplant technique. Lancet 2002 ; 359 : 406-7. Transferrine désialylée : impossible de l’utiliser pour vérifier la tempérance chez le cirrhotique en attente de transplantation a transferrine désialylée (carbohyL drate deficient transferrin [CDT]) est un marqueur de consommation prolongée d’alcool. La CDT est synthetisée par le foie, de sorte que les niveaux sériques de CDT peuvent perdre leur valeur de marqueur de consommation alcoolique chez les patients porteurs d’une hépatopathie chronique. Les auteurs ont évalué les niveaux sériques de CDT chez 79 patients abstinents en liste d’attente de transplantation hépatique. Près de 50 % avaient une valeur de CDT de 2,6 % ou plus, c’est-à-dire dans une fourchette indiquant la positivité de la recherche. Il existait une corrélation entre la CDT et les anomalies biologiques, en particulier le score de Child-Pugh (r = 0,52 ; p = 0,0001). influence d’un diabète préexistant sur les résultats de la transplantation hépatique (TH) reste mal évaluée. Dans cette étude, les auteurs ont comparé la morbi-mortalité de 57 patients avec diabète préexistant à celle de 114 témoins sans diabète, appariés pour l’âge, le sexe et la race. Le diabète (critères de l’OMS) était de type II dans 54 cas ; 26 patients étaient sous insuline, 28 sous hypoglycémiants oraux et 3 sous régime seul au moment de la TH. L’ L’incidence des complications était plus élevée dans le groupe diabétique : infections traitées (54,4 % versus 29,8 % ; p = 0,002), complications cardiovasculaires (61,4 % versus 21,9 % ; p < 0,001), rénales (59,7 % versus 20,2% ; p < 0,001), respiratoires (24,6 % versus 7,0 % ; p = 0,001), neurologiques (31,6 % versus 7,0 % ; p < 0,001), hématologiques (19,3 % versus 2,6 % ; p = 0,001), ostéomusculaires (24,6 % versus 5,3 % ; p = 0,001), et cancers (22,8 % versus 10,5 % ; p = 0,03). La durée et le coût d’hospitalisation, le taux de retransplantation et la survie du greffon étaient similaires. L’incidence du rejet aigu était de 50,9 % chez les diabé- 177 tiques et de 25,4 % chez les témoins (p = 0,0009). La survie des patients à 1 an et 2 ans était similaire, mais la survie à 5 ans était plus faible chez les diabétiques (34,4 % versus 67,7 % ; p = 0,002). Conclusion. Le diabète préexistant est donc associé à une morbi-mortalité postTH plus élevée, suggérant que les diabétiques nécessitent une évaluation pré- et post-greffe plus rigoureuse. L’un des résultats inattendus de cette étude est la constatation d’une incidence anormalement élevée de rejets chez les diabétiques : la cause pourrait en être la réduction de l’immunosuppression chez ces patients ; une autre cause pourrait être l’existence d’une malabsorption par atteinte digestive liée au diabète. Il existait également, dans cette série, une incidence élevée de cancers dans le groupe diabétique. Y. Calmus John PR et al.Outcome of liver transplantation in patients with diabetes mellitus : a case-control study. Hepatology 2001 ; 34 : 889-95. Hépatite auto-immune de novo : une nouvelle entité ne dysfonction du greffon associée U à des signes d’hépatite auto-immune (HAI) a été récemment décrite après transplantation hépatique (TH) chez l’enfant, et dénommée dysfonction du greffon mimant une HAI, ou HAI de novo (HAIDN). Les auteurs décrivent 7 cas similaires chez l’adulte, survenant 4 mois à 7 ans après une TH pour une étiologie autre qu’une HAI, sur une série de plus de 1 000 patients. L’HAIDN est apparue après une médiane de 4,3 ans (extrêmes 0,3-7,2) après TH. Deux types d’HAIDN ont pu être individualisés, sur la base des autoanticorps présents : ✓ anticorps antimicrosomal (anti-liverkidney-microsome [LKM]) de titre élevé, associé à une forte élévation des transaminases ASAT (> 500) chez 3 patients ; ✓ association d’anticorps antinucléaires (AAN) et anti-muscle lisse (AML) Le Courrier de la Transplantation - Volume II - n o 4 - oct.-nov.-déc. 2002 R evue de presse > 1/80, associés à des activités plus faibles des transaminases, chez 4 patients. Les IgG étaient > 1,5 N dans tous les cas. L’histologie montrait des signes d’HAI classique (hépatite modérée à sévère, incluant une nécrose parcellaire, infiltrat portal et périportal comportant un pourcentage élevé de plasmocytes). Tous les receveurs atteint d’HAIDN étaient DRB*0301 ou ont reçu un greffon DRB*0301- ou DRB*0401-positif. L’appariement HLA ne modifiait pas le risque de développement de l’HAIDN. Dans deux cas, le diagnostic ayant été retardé ou ignoré, le greffon a été perdu. Dans les cinq autres cas, le diagnostic ayant été rapide, l’augmentation ou la réintroduction des corticoïdes, avec une réduction progressive à 10 mg/j en entretien, a permis de guérir les patients. Conclusion. L’assimilation de l’HAIDN au rejet chronique reste discutable : l’HAIDN est très sensible aux corticoïdes, alors que le rejet chronique ne l’est pas. Les auteurs suggèrent que l’HAIDN est une forme d’HAI. Il est probable qu’un terrain immunologique (allèles HLA particuliers, notamment) favorise cette complication. Le rôle déclenchant de virus, du rejet ou d’autres processus immunologiques reste à évaluer. Il est utile de rechercher régulièrement l’apparition d’autoanticorps (AAN, AML, A-LKM1) après TH, surtout en cas d’augmentation de l’activité des transaminases, et les patients atteints d’HAIDN doivent être traités rapidement par les corticoïdes. Y. Calmus Heneghan MA et al. Graft dysfunction mimicking auto-immune hepatitis following liver transplantation in adults. Hepatology 2001 ; 34 : 464-70. Attention au rejet en cas de syndrome lymphoprolifératif es biopsies hépatiques (n = 24) de L patients atteints de syndromes lymphoprolifératifs (SLP) extrahépatiques ont été revues. Des signes de rejet aigu ont été trouvés dans 20 cas (83,3 % des biopsies), de grade indéterminé pour 7 d’entre elles (35 %), de grade minime pour 3 (15 %) et modéré pour 10 (50 %). Le diagnostic d’hépatite à EBV était le diagnostic principal pour deux biopsies, et le diagnostic secondaire dans six autres cas. Quatre biopsies montraient la présence d’une hépatite non spécifique, et cinq une récidive de la maladie initiale. En immunohistochimie, l’infiltrat était fait essentiellement de lymphocytes T. La séquence d’ARN-EBV EBER a été détectée dans 58 % des échantillons, qu’il y ait ou non des signes de rejet. Le traitement antirejet a permis d’obtenir une réponse complète (36 % des cas) ou partielle (64 %) des 11 cas traités, même en présence du virus EBV. Au cours du suivi, des signes de rejet chronique débutant sont apparus chez 25 % des patients. Ces données indiquent que les signes le plus souvent constatée au niveau du greffon hépatique, en cas de SLP extrahépatique, sont des signes de rejet ; le rejet peut être efficacement traité, même en présence du virus EBV ; il existe un risque élevé d’évolution vers le rejet chronique, probablement lié à la réduction de l’immunosuppression dans ce contexte. Y. Calmus Randhawa P et al. Allograft liver biopsy in patients with Epstein-Barr virus-associated post-transplant lymphoproliferative disease. Am J Surg Pathol 2001 ; 25 : 324-30. Lymphocytes T cytotoxiques anti-virus d’Epstein-Barr : des cellules allogéniques peuvent être utilisées es syndromes lymphoprolifératifs L (SLP), le plus souvent associés au virus d’Epstein-Barr (EBV), sont la conséquence d’une prolifération incontrôlée de lymphocytes B présentant une infection persistante par l’EBV, qui est d’autant plus importante que la fonction lymphocytaire T cytotoxique, contrôlant normalement l’infection virale EBV, est effondrée, sous l’effet de l’immuno-suppression. Le traitement des 178 SLP repose sur la réduction de l’immunosuppression, l’utilisation d’anticorps monoclonaux dirigés contre des protéines membranaires du lymphocyte B (notamment les anticorps anti-CD20) ou sur la chimiothérapie conventionnelle. Depuis quelques années, l’injection de lymphocytes T cytotoxiques (CTL) générés ex vivo, et capables de détruire les lymphocytes B infectés par l’EBV, a été proposée comme une alternative efficace et grevée de peu d’effets indésirables. L’idéal est de disposer de CTL autologues, produits à partir de cellules du receveur. Dans cette étude, les auteurs ont utilisé des CTL allogéniques, partiellement appariés au système HLA du receveur. Ils montrent pour la première fois l’efficacité de ces CTL dans le traitement d’un lymphome EBV-induit. Le patient traité était un enfant ayant reçu, à l’âge de 9 mois, une greffe combinée foie + intestin. Neuf mois après la transplantation, l’enfant a présenté un SLP. La biopsie obtenue sur un ganglion cervical et sur le greffon iléal montrait une prolifération polyclonale B, EBVpositive (EBER-positive en hybridation in situ). La création de CTL EBV-spécifiques a été réalisée de la façon suivante : des cellules mononucléées sanguines périphériques (PBMC) de donneurs sains ont été infectées in vitro par l’EBV jusqu’à obtention d’une lignée lymphoblastoïde immortalisée. Des PBMC sains ont été incubés en présence de cellules immortalisées irradiées, en présence d’IL-2, jusqu’à obtention de lignées CTL. Les CTL d’un donneur, partiellement apparié HLA avec le receveur et montrant une forte cytotoxicité spécifique contre une lignée lymphoblastoïde du receveur, ont été perfusés à la dose de 106 cellules/kg. Aucun effet indésirable n’a été enregistré. À J7, les adénopathies ont disparu. Le patient n’a pas présenté de récidive après 24 mois de surveillance. Les précurseurs CTL EBVspécifiques dirigés contre la lignée du receveur, absents avant injection, persistaient juqu’à 11 semaines après injection. Le Courrier de la Transplantation - Volume II - n o 4 - oct.-nov.-déc. 2002 R evue de presse Conclusion. La création de CTL spécifiques de virus est probablement une importante voie d’avenir pour le traitement des complications viro-induites post-greffe. L’idéal est probablement de disposer de lignées autologues, créées à partir de PBMC du patient lui-même. Cependant, cette création est laborieuse, nécessitant plusieurs semaines. Les auteurs ont utilisé des cellules allogéniques. Une banque comportant des lignées de phénotype HLA connu pourrait être créée. Il suffirait de tester la cytotoxité des lignées les mieux appariées au patient sur une lignée immortalisée EBVinduite du patient, pour sélectionner les cellules les plus efficaces. Plusieurs lignées pourraient être utilisées. Y. Calmus Haque T et al. Complete regression of posttransplant lymphoproliferative disease using partially HLAmatched Epstein Barr virus-specific cytotoxic T cells. Transplantation 2001 ; 72 : 1399-402. Traitement curatif par ganciclovir oral de la maladie à cytomégalovirus en transplantation rénale e traitement de première intention de L la maladie à CMV consistait jusqu’à présent en deux à trois semaines de perfusion intraveineuse biquotidienne de ganciclovir. Cette voie parentérale est efficace, mais contraignante, et a un coût élevé. Le traitement par ganciclovir oral était réservé à la prophylaxie de l’infection à CMV. Dans une étude pilote ouverte et non contrôlée, Jordan et al. ont rapporté l’efficacité du traitement curatif par ganciclovir oral (1 g x 3/j, à adapter à la fonction rénale) chez 15 patients transplantés rénaux atteints de maladie à CMV. La maladie à CMV était définie par l’association d’une virémie positive à CMV ou d’une PCRCMV supérieur à 10 copies/µg ADN aux signes suivants : fièvre, leucopénie, thrombopénie, cytolyse hépatique, infection gastro-intestinale à CMV, pneumopathie à CMV. L’efficacité du traitement était jugée sur la négativité de la réplication virale mesurée par PCR quantitative. Les auteurs ont montré que 8 patients sur 15 (53 %) ont une disparition rapide de leurs symptômes cliniques avec une négativation de la PCR en 10 jours, alors que 6 patients (40 %) ont une réponse plus lente, avec négativation de la PCR et disparition des signes cliniques en 2 à 3 semaines. Un patient n’a pas répondu et a été traité efficacement par ganciclovir en intraveineux. Dans l’ensemble, la PCRCMV s’est négativée en 3 à 4 semaines. Les résultats prometteurs de cette étude pilote devront être confirmés par une étude randomisée comparant le ganciclovir oral au ganciclovir par voie intraveineuse. Cependant, cette étude suggère que la mise sur le marché du valganciclovir, prodrogue du ganciclovir dont la biodisponibilité est très supérieure à celle du ganciclovir, devrait permettre de pouvoir traiter par voie orale, efficacement et rapidement, la plupart des infections à CMV post-transplantation rénale. E. Morelon Jordan SC et al. Treatment of active cytomegalovirus disease with oral ganciclovir in renal allograft recipients : monitoring efficacy with quantitative cytomegalovirus polymerase chain reaction. Am J Transplant 2002 : 671-3. Transplantation rénale sans inhibiteurs de la calcineurine a néphrotoxicité des inhibiteurs de la L calcineurine reste un problème pour la survie des greffons au long cours chez les transplantés rénaux. L’association de nouvelles molécules immunosuppressives non néphrotoxiques pourrait constituer une alternative particulièrement intéressante en transplantation rénale. Dans une étude prospective randomisée portant sur 61 patients transplantés rénaux pour la première fois, Flechner et al. ont comparé le sirolimus à la ciclosporine dans une association comprenant du CellCept®, des stéroïdes et un traitement d’induction par le Simulect®. Le sirolimus est donné avec une dose de charge de 15 mg, puis de 5 mg/j pour obtenir un taux rési- 179 duel de 10-12 ng/ml pendant les six premiers mois, puis de 5-10 ng/ml. La ciclosporine est donnée pour viser un taux résiduel de 200 à 250 ng/ml. Avec un suivi moyen de 18 mois, les auteurs ont montré qu’il n’y a pas de différence significative dans la survie des greffons et des patients à un an. De plus, le pourcentage de rejet aigu n’est pas différent dans les deux groupes (6,4 % dans le groupe sirolimus versus 16,6 % dans le groupe ciclosporine). En revanche, comme cela a déjà été constaté dans d’autres études comparant le sirolimus et la ciclosporine, la fonction rénale des patients sous sirolimus est significativement meilleure à 6 mois et à un an que celle des patients sous ciclosporine. Les effets indésirables ne sont pas différents en nombre dans les deux bras. Dans les deux groupes, on note une augmentation de la cholestérolémie et de la triglycéridémie, avec un taux comparable pour le cholestérol total, HDL et LDL-cholestérol dans les deux bras. En revanche, un nombre significativement plus grand de patients du groupe sirolimus sont traités par des statines. Les autres effets indésirables n’étaient pas différents entre les deux groupes. Par conséquent, cette étude confirme que le sirolimus, associé au CellCept® et aux corticoïdes et avec un traitement d’induction, offre une alternative aux inhibiteurs de la calcineurine. À court terme, la survie des greffons et l’incidence des rejets aigus sont comparables sous ciclosporine et sous sirolimus. Malheureusement, cette étude n’offre pas de biopsie systématique pour juger l’effet de ces deux drogues sur la néphropathie chronique du greffon. Seules des études à plus long terme permettront de mieux définir la place du sirolimus dans l’arsenal thérapeutique actuel. E. Morelon Flechner SM et al. Kidney transplantation without calcineurin inhibitor drugs : a prospective, randomized trial of sirolimus versus cyclosporine. Transplantation 2002 ; 74 : 1070-6. Le Courrier de la Transplantation - Volume II - n o 4 - oct.-nov.-déc. 2002