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Revue de presse
R evue de presse
Dirigée par le Pr B. Combe
Tocilizumab
dans l’arthrite juvénile idiopathique
à début systémique
O
L’arthrite systémique est une arthrite
juvénile idiopathique (AJI) souvent
réfractaire aux traitements, notamment aux
agents anti-tumour necrosis factor α (TNFα).
Par ailleurs, ces derniers ainsi que ceux bloquant l’interleukine 1 (IL-1) n’empêchent pas,
dans certains cas, la survenue d’un syndrome
d’activation macrophagique (SAM), complication potentiellement fatale. Le blocage de
l’IL-6, autre cytokine inflammatoire impliquée
dans ce type d’AJI, par le tocilizumab, anticorps (Ac) monoclonal antirécepteur de l’IL-6,
a donné des résultats spectaculaires dans des
études ouvertes.
Afin de confirmer l’efficacité et la tolérance du
tocilizumab (1), une étude japonaise multicentrique, randomisée, conduite en double aveugle
et contrôlée contre placebo a été menée chez
56 enfants atteints d’AJI à début systémique,
réfractaires aux traitements conventionnels.
Les patients étaient éligibles s’ils étaient âgés
de 2 à 19 ans (avec un début de la maladie avant
16 ans) et atteints d’AJI à début systémique
(selon les critères de l’ILAR) active (définie par
une CRP ≥ 15 mg/l et par une corticorésistance
pour une dose équivalente de prednisolone
≥ 0,2 mg/kg depuis plus de 3 mois). Les traitements de fond, les infiltrations, les bolus cortisoniques et les agents anti-TNFα n’étaient
pas autorisés, respectivement, ni au cours de
la deuxième et de la douzième semaine précédant la première perfusion de tocilizumab
ni pendant l’étude. Une corticothérapie orale,
stable durant les 2 semaines précédant l’inclusion, était permise. L’étude comprenait 3 phases
successives : une phase ouverte de 6 semaines
durant laquelle tous les patients recevaient le
tocilizumab à la posologie de 8 mg/kg tous les
15 jours, soit 3 perfusions; une phase contrôlée
contre placebo de 12 semaines (ou jusqu’à
échappement) incluant les répondeurs ; une
phase d’extension de 48 semaines pour bénéficier de nouveau, en ouvert, du tocilizumab.
L’intervalle de 2 semaines entre les perfusions
pouvait, dans cette dernière phase, être réduit
progressivement jusqu’à une semaine en fonction des réponses ACR Pédiatrique (Pedi) et
de la CRP. Les patients étaient définis comme
répondeurs après la première et la deuxième
phase par l’obtention des critères ACR Pedi 30
et, respectivement, une CRP inférieure à 5 et
15. Les autres critères d’évaluation étaient les
6
réponses ACR Pedi 50 et 70, les manifestations
systémiques (fièvre, rash, adénopathies cervicales, axillaires et inguinales, hépatomégalie,
splénomégalie, sérites) comptabilisées par
un score (compris entre 0 et 8) et, pendant la
phase d’extension, l’épargne cortisonique. La
tolérance était évaluée cliniquement et biologiquement à l’aide de paramètres notamment
sériques (hématologiques, rénaux, hépatiques,
lipidiques). Des analyses immunologiques et
pharmacocinétiques (Ac anti-tocilizumab,
dosages sériques du tocilizumab, de l’IL-6 et
de son récepteur soluble) étaient aussi réalisées.
Les principales caractéristiques (moyenne
et médiane) des 56 patients étaient : le sexe
féminin (63 %), un âge moyen à l’inclusion
de 8,3 ans (4 patients entre 16 et 19 ans), un
âge moyen au début de la maladie de 4,3 ans,
une durée moyenne de la maladie de 4,5 ans,
un nombre moyen de traitements de fond
égal à 2, un nombre d’articulations actives
(définie par la présence d’une synovite et/ou
d’une limitation articulaire douloureuse) égal
à 4, une VS égale à 44,5 mm/h, une CRP égale
à 43,5, un score d’atteinte systémique égal à 1
(7 patients ont un score nul et donc sans fièvre,
40 patients ont un score égal à 1), de la fièvre
(49). Quant aux 43 patients finalement randomisés pour la deuxième phase, il n’y avait pas
de différences significatives entre les groupes
(tocilizumab versus placebo), notamment dans
les réponses ACR Pedi obtenues à la fin de la
première phase.
Lors de la première phase, 6 patients sont
sortis de l’étude: 3 en raison du développement
d’Ac anti-tocilizumab (critère de sortie), 2 pour
événement indésirable et 1 pour inefficacité. À
la fin de la première phase, 6 patients ne répondaient pas aux critères qui auraient permis
leur randomisation pour la deuxième phase et
un (après randomisation) a dû être exclu à la
suite d’une erreur de procédure. Au cours de
cette phase randomisée, un patient de chaque
groupe est sorti en raison d’un événement
indésirable. Finalement, 50 patients ont été
inclus dans la dernière phase de l’étude, dont 2
sont sortis avant les 48 semaines en raison du
développement d’Ac anti-tocilizumab pour l’un
et d’un événement indésirable pour l’autre.
À la fin de la première phase, les réponses ACR
Pedi 30, 50 et 70 ont été obtenues par, respectivement, 91 % (51), 86 % et 68 % des 56 patients
initialement enrôlés et les critères d’inclusion
dans la phase randomisée par 79 % (44) d’entre
eux. L’efficacité a été rapide avec, notamment, une diminution de la CRP (< 5) dans
les 2 semaines qui ont suivi l’instauration du
tocilizumab, de la VS, de l’hyperleucocytose
et du Child Health Assessment Questionnaire
(entrant dans les critères ACR Pedi). En ce
qui concerne l’atteinte systémique, la proportion de patients avec un score supérieur ou
égal à 1 est passée de 88 % (49) à 59 %. À la
fin de la deuxième phase, les réponses ACR
Pedi 30 (critère principal, correspondant aussi
au nombre de patients terminant la phase),
50 et 70 associées à une CRP inférieure à 15
ont été obtenues par, respectivement, 80 %
(16), 80 % et 75 % des patients poursuivant la
prise de tocilizumab (20) contre, respectivement, 17 % (p < 0,0001), 17 % (4) et 13 % des
patients passés sous placebo (23). Étant donné
la diminution logique du nombre de patients
“contrôle”, les auteurs eux-mêmes signalent
que le critère principal de jugement aurait dû
être le délai d’échappement. Celui-ci (médiane)
est de 4,9 semaines sous placebo, et supérieur
à 12 semaines sous tocilizumab. L’absence de
différences constatée à 6 semaines fait envisager un effet rémanent du tocilizumab (pour
les patients du groupe placebo encore dans
l’étude). Sur 96 % des patients ayant complété
la phase d’extension, les réponses ACR Pedi 30,
50 et 70 ont été obtenues chez, respectivement,
98 % (47), 94 % et 90 % d’entre eux. La corticothérapie a pu être réduite de 30 et 50 % pour,
respectivement, 69 % (33) et 46 % des patients.
Les 21 patients ayant bénéficié précocement
(échappement lors de la phase randomisée)
du tocilizumab dans la phase d’extension ont
très rapidement répondu, ce qui est surprenant
pour les 3 patients qui étaient dans le groupe
tocilizumab (pas de précisions des auteurs à ce
sujet). Ainsi, les 18 patients du groupe placebo
qui avaient logiquement échappé ont rapidement atteint le niveau de réponse des patients
ayant continué de prendre le tocilizumab.
Concernant la tolérance, il y a eu, à la première
phase, une réaction anaphylactoïde (sans Ac
anti-tocilizumab) sur des antécédents de réactions allergiques à l’aspirine et à l’infliximab
et une hémorragie gastro-intestinale sur des
antécédents identiques. Des réactions légères
à la perfusion ont été notées chez 10 patients.
Lors de la deuxième phase sont survenues une
infection à virus Epstein-Barr (EBV) avec cytolyse hépatique et neutropénie sous tocilizumab,
une infection à virus herpès-zona (HZV) sous
placebo, n’ayant pas empêché l’inclusion
La Lettre du Rhumatologue - n° 343 - juin 2008
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ultérieure des patients dans la phase d’extension. Les autres effets étaient légers ou
modérés, surtout en rapport avec des infections
respiratoires hautes et des gastroentérites, sans
différences entre les groupes dans la phase randomisée. Lors de la troisième phase, les effets
sérieux (13) comprenaient aussi des infections
bronchiques (2) et gastro-intestinales (2) résolutives sous antibiotiques et un cas de réaction
anaphylactoïde (sortie d’étude). Parmi les effets
modérés, des cytolyses hépatiques précoces
étaient notées, s’atténuant au cours du traitement, ainsi que des augmentations légères
du cholestérol. Il n’y a pas eu de SAM ni de
tuberculose au cours de l’étude.
Le tocilizumab est donc rapidement et durablement efficace d’un point de vue articulaire
et systémique (notamment la fièvre) et paraît
bien toléré dans cette forme d’AJI difficile à
traiter. Cependant, si le schéma de l’étude (avec
une phase ouverte initialement notamment)
répond évidemment à des règles éthiques de
même que les critères d’inclusion, la comparaison aurait pu aussi ne pas se faire avec un
placebo mais avec un traitement de fond (poursuivi), voire avec une biothérapie anti-TNFα,
en particulier pour la tolérance et la réflexion
stratégique optimale (2).
J.D. Cohen, Montpellier
1. Yokota S, Imagawa T, Mori M et al. Efficacy and safety of
tocilizumab in patients with systemic-onset juvenile idiopathic arthritis: a randomised, double-blind, placebo-controlled,
withdrawal phase III trial. Lancet 2008;371:998-1006.
2. Bongartz T. Tocilizumab for rheumatoid and juvenile idiopathic arthritis. Lancet 2008;371:961-2.
Efficacité comparative
des traitements
antiostéoporotiques
O
Les auteurs de cette revue ont recensé
les méta-analyses, les essais randomisés,
les revues de la littérature, les enquêtes castémoins et les études de cohorte publiés depuis
1966, afin de comparer l’efficacité et la tolérance des traitements antiostéoporotiques
(biphosphonates, calcitonine, estrogènes,
tériparatide, calcium, vitamine D, SERM) par
rapport à celles de médicaments appartenant
à la même classe ou à celles d’un placebo. Les
critères de jugement étaient la réduction du
nombre de fractures et les effets indésirables
observés pour chaque molécule. À partir des
La Lettre du Rhumatologue - n° 343 - juin 2008
24 méta-analyses et des 80 essais randomisés
retenus, il apparaissait que les biphosphonates (alendronate, étidronate, ibandronate,
risédronate, zolédronate), la calcitonine, les
estrogènes, le tériparatide et le raloxifène réduisaient le risque de fractures vertébrales (FV)
par rapport au placebo, avec un bon niveau de
preuve chez les patients à haut risque de fracture (ostéoporose fracturaire ou DMO < – 2,5).
De la même façon, l’alendronate, le risédronate, le zolédronate, les estrogènes ainsi que
le tériparatide prévenaient les fractures non
vertébrales (FNV). En revanche, le risque de
fracture de hanche (FH) paraissait diminué
seulement avec l’alendronate, le risédronate, le
zolédronate et les estrogènes. Chez les patients
à faible risque fracturaire, seul le raloxifène
diminuait le risque de FV alors que l’ibandronate diminuait tous les types de fractures. Le
pamidronate et le tamoxifène n’avaient aucun
effet antifracturaire et la calcitonine semblait
réduire le risque de FV, mais avec un niveau
de preuve moindre. Par rapport au placebo, le
calcium à lui seul ne permettait pas de diminuer le risque de fracture à cause du défaut
d’observance. Concernant la vitamine D, le
risque fracturaire, quel que soit le site osseux,
n’était pas diminué par rapport au placebo (RR
entre 0,33 [IC95 : 0,01 à 8,05] et 1,13 [IC95 : 0,05
à 2,55]) dans 4 méta-analyses. Toutefois, une
cinquième méta-analyse montrait des résultats
opposés puisque les FNV (RR : 0,77 ; IC95 : 0,68
à 0,87) et les FH (RR : 0,74 ; IC95 : 0,61 à 0,88)
étaient diminuées avec la vitamine D2 ou D3
utilisée à la dose de 700 à 800 UI/j par rapport
au placebo. Les analogues de la vitamine D
(1,25-hydroxyvitamine D et 1-hydroxyvitamine D) diminuaient le risque de FV (RR :
de 0,52 [IC95 : 0,41 à 0,67] à 0,64 [IC95 : 0,44 à
0,92]). Néanmoins, le risque de FNV ou de FH
était diminué dans seulement 4 études sur 7
[RR : de 0,16 [IC95 : 0,04 à 0,69] à 0,87 [IC95 :
0,29 à 2,59]), d’où l’impossibilité de conclure
formellement à l’intérêt de tels dérivés. Les
études ayant comparé différents agents antiostéoporotiques entre eux ne montraient pas la
supériorité d’une molécule sur une autre pour
la prévention des fractures. Les effets indésirables étaient analysés à partir de 493 articles
de la littérature. Sur le plan cardiovasculaire,
le risque de fibrillation auriculaire était augmenté avec le zolédronate (1,3 % versus 0,5 % ;
p < 0,001] et l’alendronate (OR: 1,26; IC95 : 0,96
à 1,66) par rapport au placebo. Les accidents
cérébro-vasculaires étaient augmentés avec
les estrogènes par rapport au placebo (OR :
1,34 ; IC95 : 1,07 à 1,68). Le raloxifène, quant à
lui, augmentait le risque d’embolie pulmonaire
(OR : 6,26 ; IC95 : 1,55 à 54,80), le risque d’événements thromboemboliques (OR : 2,08 ; IC95 :
1,47 à 3,02) ainsi que la survenue de certaines
manifestations cardiaques mineures (tachycardie, douleur thoracique, palpitations, vasodilatation) [OR : 1,53 ; IC95 : 1,01 à 2,35]. Enfin,
les estrogènes augmentaient aussi le risque
d’accidents thromboemboliques par rapport
au placebo (OR : 1,36 ; IC95 : 1,01 à 1,86). À
l’exception de l’acide zolédronique, toutes les
études rapportaient des ulcérations digestives
avec les biphosphonates, mais une seule étude
démontrait l’augmentation significative du
risque de complications digestives (ulcération,
perforation et saignement) avec l’étidronate
par rapport au placebo (OR : 1,32 ; IC95 : 1,04 à
1,67). À l’inverse, deux études montraient que
la prise quotidienne d’ibandronate diminuait
le risque d’accidents digestifs (OR : 0,33 ; IC95 :
0,14 à 0,74). Les effets indésirables digestifs
mineurs (reflux, irritation œsophagienne,
nausées, vomissements) étaient surtout rapportés avec l’étidronate (OR : 1,33 ; IC95 : 1,21
à 1,46) et le pamidronate (OR : 3,14 ; IC95 : 1,93
à 5,21). Enfin, le risque de survenue de cancer
du sein avec les estrogènes était diminué dans
5 essais (OR : 0,79 ; IC95 : 103 à 1,60), mais augmenté dans 3 autres études (OR : 1,28 ; IC95 :
1,03 à 1,60). Par ailleurs, le risque de cancer
colique était diminué chez les femmes prenant
des estrogènes dans une étude (OR: 0,64 ; IC95 :
0,43 à 0,95).
Cette méta-analyse montre qu’il est très difficile d’évaluer le bénéfice-risque de ces traitements chez les patients à faible risque de
fracture et dans des populations particulières
(transplantés, hommes…), car les effectifs
doivent être importants et la période de suivi
très longue. Par ailleurs, l’analyse des essais
portant sur le ranélate de strontium n’a pas été
incluse dans cette revue. Cette étude a donc
juste confirmé l’efficacité des traitements antiostéoporotiques dans la prévention des fractures sans pour autant démontrer la supériorité
d’un traitement par rapport à l’autre.
T. Lequerré, Rouen
» MacLean C, Newberry S, Maglione M et al. Systematic review:
comparative effectiveness of treatments to prevent fractures in
men and women with low bone density or osteoporosis. Ann
Intern Med 2008;148:197-213.
7
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Des corticoïdes
à libération retardée
dans la polyarthrite rhumatoïde
O
Malgré leurs nombreux effets indésirables, les corticoïdes apportent souvent
un bénéfice non négligeable dans la polyarthrite rhumatoïde (PR), notamment au début
de la maladie, à tel point que, ensuite, il est
souvent difficile d’effectuer un sevrage total.
C’est pourquoi de nouveaux corticoïdes avec
une plus forte action anti-inflammatoire et
moins d’action minéralo-corticoïde sont en
cours de développement. À défaut de disposer
de telles molécules aujourd’hui, des corticoïdes
à libération retardée (CR : 4 heures après leur
ingestion) plus adaptés au rythme circadien
des surrénales et aux manifestations douloureuses d’horaire inflammatoire de la PR sont
disponibles. Ainsi les auteurs de cette étude
de phase III multicentrique, randomisée,
conduite en double aveugle et contrôlée, intitulée CAPRA-1 (Circadian Administration
of prednisone in Rheumatoid arthritis), ont
évalué l’efficacité et la tolérance des CR en
les comparant à celles des corticoïdes conventionnels (CC) à libération immédiate chez des
patients atteints de PR. L’objectif principal
de cette étude était de montrer, après 3 mois
de suivi, que les CR administrés le soir au
coucher réduisent davantage le dérouillage
matinal (DM) que les CC pris le matin. Étaient
inclus 288 patients atteints de PR (selon les
critères ACR) active avec un DM d’au moins
45 minutes, une douleur supérieure à 30 mm
sur une échelle visuelle analogique (EVA),
au moins 3 articulations douloureuses et
une gonflée, et un syndrome inflammatoire
biologique (vitesse de sédimentation [VS]
> 30 mm/1re heure ou protéine C réactive
[CRP] > 1,5 normale). Avant randomisation,
les patients devaient avoir une dose stable
d’équivalent prednisone (2,5-10 mg) depuis
1 mois et de DMARD (à l’exclusion des agents
biologiques) depuis au moins 3 mois. Après
randomisation, les patients recevaient soit le
CC (n = 144) au réveil (entre 6 h et 8 h), soit le
CR (n = 144) au coucher (21 h 30-22 h 30). La
dose administrée avant randomisation restait
inchangée pendant les 3 mois de suivi de
l’étude. Par ailleurs, les patients appartenant
au groupe CR prenaient un placebo le matin et
ceux du groupe CC prenaient leur placebo le
soir afin d’être en double aveugle. Les patients
devaient remplir quotidiennement un questionnaire (heure de réveil, présence ou non
8
d’un DM, durée du DM, qualité de sommeil
sur une EVA, intensité de la douleur maximale
de la journée, prise d’antalgiques). Les deux
groupes (CC contre CR) étaient comparables en termes de DM : 164,1 min (± 101,4)
contre 182,5 min (± 125) ; de DAS28 : 5,8
(± 0,8) contre 5,9 (± 0,9) ; de dose moyenne
de prednisone : 6,5 contre 6,7 mg. En intention de traiter, la durée moyenne du DM à
12 semaines par rapport à l’inclusion était
diminuée de 22,7 % dans le groupe CR,
contre 0,4% dans le groupe CC (différence de
22,4 % ; IC95 : 0,49-44,30 ; p = 0,045). En valeur
absolue, la durée du DM des patients traités
par CR était diminuée de 43,96 min (± 136,6),
contre seulement 22,68 min (± 138,1) chez les
patients traités par CC soit une différence de
29,2 min entre les deux groupes (IC95 : – 2,5961,09 ; p = 0,072) en faveur du groupe CR.
La différence de DM entre les deux groupes
était perçue dès la deuxième semaine et
significative dès la quatrième semaine de
traitement. À l’exception de l’IL-6, toutes
les autres variables (DAS28, HAQ, SF36, VS,
CRP, IL-6, ostéocalcine, EVA médecin) diminuaient après 12 semaines de traitement de
façon très modérée dans les deux groupes
et sans différence significative. En termes de
tolérance, les groupes CR et CC étaient comparables avec 13 % (n = 19) et 11 % (n = 11)
d’effets indésirables respectivement. L’effet
indésirable le plus fréquemment observé
était l’aggravation de la PR quel que soit le
groupe (c’était de surcroît le motif le plus
fréquent conduisant à l’arrêt de l’étude). Les
événements indésirables graves étaient peu
fréquents : 2 ou 3 % dans chaque groupe, avec
un seul effet rapporté à la prise de prednisone.
Cette étude montre que la libération retardée
de prednisone permet de diminuer la durée
du DM chez les patients atteints de PR sans
modifier l’activité de la maladie avec, en outre,
une bonne tolérance. La réduction du DM
observée chez les patients traités avec un CR
est consécutive à la diminution de la production de certaines cytokines telles que l’IL-6,
dont la sécrétion suit un rythme nycthéméral
à l’origine de l’horaire inflammatoire de certains symptômes (raideur et douleur) observés
dans la PR. Les résultats de cette étude sont
par ailleurs compatibles avec un travail dans
lequel la prise systématique de prednisone
à libération immédiate à 2 heures du matin
permettait de mieux contrôler l’activité de la
maladie (DM, douleur articulaire). La prise de
CR semble donc apporter un bénéfice certain
sur le DM et donc pour la fonction, notamment pour les gestes de la vie quotidienne.
T. Lequerré, Rouen
» Buttgereit F, Doering G, Schaeffler A et al. Efficacy of modified-release versus standard prednisone to reduce duration of
morning stiffness of the joints in rheumatoid arthritis (CAPRA-1):
a double-blind, randomised controlled trial. Lancet 2008;371:
205-14.
La discectomie chirurgicale
réalisée pour sciatique
est-elle efficace sur la lombalgie ?
Résultats des données
de l’essai SPORT
O
La discectomie lombaire a montré son
efficacité pour améliorer la douleur
radiculaire chez la majorité des patients. Les
données disponibles concernant l’évolution
des lombalgies après discectomie lombaire
sont contradictoires. Peu de données sur la
lombalgie des patients non opérés de leur
hernie discale pour lombosciatique sont
disponibles.
Les relations entre la lombalgie, la localisation
de la hernie et sa morphologie sont incertaines.
Le but de ce travail était, à partir des données
de l’étude SPORT (Spine Patient Outcomes
Research Trial), de caractériser la lombalgie
des patients candidats à la discectomie, de
déterminer si le traitement par discectomie
améliore plus la lombalgie que la poursuite du
traitement médical, de déterminer si la localisation et la morphologie de la hernie discale
influencent la lombalgie.
L’essai SPORT a été mis en place pour comparer le traitement chirurgical et le traitement
médical des hernies discales. Cet essai comprenait deux populations : un essai randomisé
et un suivi d’une cohorte de patients.
Pour être inclus dans l’essai, les patients
devaient avoir plus de 18 ans, une lombo-radiculalgie persistante depuis plus de 6 semaines
associée à une imagerie (IRM ou scanner) de
hernie discale concordante. Après explication,
les patients avaient le choix entre participer
à la cohorte (traitement au choix du patient
après information) ou à l’essai randomisé
(traitement tiré au sort). Les patients étaient
traités médicalement (traitement usuel, laissé à
l’appréciation du médecin, incluant des AINS,
des conseils, des infiltrations, une thérapie
physique, etc.) ou par une discectomie chirurLa Lettre du Rhumatologue - n° 343 - juin 2008
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gicale standard. Tous les patients devaient être
revus à 3, 6, 12 et 24 mois. Le critère principal de l’essai d’évaluation était la composante “fonction physique” et la composante
“douleur du SF36” et une version américaine de
l’échelle d’évaluation de la fonction Oswestry.
La douleur lombaire et radiculaire (intensité
et fréquence sur la semaine précédente) a été
évaluée à l’inclusion, à 3 mois, à 1 et à 2 ans par
des échelles de Likert graduées de 0 à 6.
Des IRM étaient disponibles pour 97 % des
patients et des scanners pour les 3 % restants.
La localisation de la hernie (centrale, postérolatérale, foraminale, ou très latérale) et sa morphologie (protrusion, extrusion, exclusion)
ont été enregistrées. Dans l’essai randomisé,
l’adhésion au traitement n’a pas été bonne
puisque seuls 40 % des patients assignés au
traitement chirurgical ont été opérés dans
les 2 ans suivant la randomisation et 45 % des
patients assignés au traitement médical ont
été opérés sur la même période. Étant donné
ces taux très élevés de non-adhésion au traitement attribué, l’analyse a été conduite sur
les données des deux populations en tenant
compte du traitement effectivement reçu.
Pour les patients opérés, 3 mois après la randomisation, les auteurs ont pris en compte
les scores de douleurs juste avant la chirurgie
et reconsidéré le temps de suivi à partir de la
date de la chirurgie. Parmi les 1 244 patients
ayant accepté de participer à l’essai, 501 ont
participé à l’essai randomisé (245 assignés au
traitement chirurgical et 256 au traitement
médical) et 743 à la cohorte (521 ont choisi
la chirurgie et 222 le traitement médical).
Dans l’analyse considérée, 775 patients ont
été opérés dans les 2 ans et 416 ont reçu un
traitement médical.
Des améliorations plus importantes de la
douleur radiculaire et lombaire ont été
observées dans le groupe chirurgie que dans
le groupe traitement médical, et le résultat se
maintient à 2 ans. L’amélioration de la douleur
radiculaire était plus importante que la douleur
lombaire dans les deux groupes. Les patients
opérés avaient plus de chances de ne pas souffrir de lombalgie que les patients non opérées
à 3 mois (28,0 % versus 12,0 % ; p < 0,001) et à
12 mois (25,5 % versus 17,6 % ; p < 0,009).
À l’inclusion, les patients ayant une hernie
centrale avaient des lombalgies plus intenses
que les patients avec une hernie latérale.
L’effet global de la chirurgie ne variait pas en
fonction de la localisation de la hernie. Les
La Lettre du Rhumatologue - n° 343 - juin 2008
patients opérés d’une hernie latérale avaient
plus de chances de ne pas souffrir de lombalgie
que les patients opérés d’une hernie centrale
à 3 mois (29,6 % versus 12,2 % ; p < 0,05) et à
12 mois (25,5 % versus 18,0 % ; p < 0,05).
L’effet global de la chirurgie ne variait pas en
fonction de la morphologie de la hernie. Les
patients opérés d’une protrusion avaient plus
de chances de ne pas souffrir de lombalgie que
les patients non opérés à 3 mois (25,1 % versus
10,6 % ; p < 0,006) et à 12 mois (23,9 % versus
11,1 % ; p < 0,016). Les patients opérés d’une
extrusion ou d’un exclusion avaient plus de
chances de ne pas souffrir de lombalgie que
les patients non opérés à 3 mois (28,3 % versus
12,0 % ; p < 0,001) et à 12 mois (24,7 % versus
19,5 % ; p < 0,15).
Cette étude complémentaire des données de
l’essai SPORT montre que la discectomie améliore davantage la lombalgie que le traitement
non chirurgical et que cette différence se maintient à 2 ans quelles que soient la localisation
et la morphologie des hernies discales.
Ces résultats fournissent des informations
intéressantes pour la pratique. Cependant,
aucune analyse multivariée n’a été conduite et
cela paraît tout à fait étonnant compte tenu de
la notoriété des auteurs. En effet, il aurait été
intéressant d’analyser, dans un modèle unique,
l’influence des caractéristiques des patients,
des données cliniques, des caractéristiques
de la hernie discale et du traitement reçu sur
la survenue de lombalgie postopératoire. En
outre, il n’est pas fait mention de la taille de
la hernie discale.
M. Marty, Créteil
» Pearson AM, Blood EA, Frymoyer JW et al. SPORT lumbar
intervertebral disk herniation and back pain. Does treatment,
location, or morphology matter? Spine 2008;33:428-5.
Les croyances des médecins
n’influencent pas leur prescription
d’arrêt de travail pour lombalgie
O
Des preuves scientifiques montrent que
les facteurs psychologiques ont un rôle
majeur pour prédire l’absence au travail liée à la
lombalgie non spécifique (LNS) ou commune.
Une attention particulière a été mise en évidence sur le modèle d’évitement lié à la peur
(Fear Avoidance Model) dans lequel les patients
ont des pensées et croyances en faveur de l’effet
néfaste de l’activité sur leur douleur. En outre,
il a été suggéré que les patients acquièrent ces
pensées et croyances à travers une large variété
d’influences incluant la société, la famille
mais aussi les informations données par les
soignants et les attitudes de ces derniers. Les
attitudes et croyances des soignants influenceraient leurs recommandations sur l’activité. Les
soignants ayant une croyance plus marquée
pour le modèle biomédical conseilleraient plus
souvent des restrictions d’activité et prescriraient plus d’arrêts de travail. Mais ces données
ont été obtenues à partir de corrélations établies entre les croyances et attitudes évaluées
par des questionnaires et des cas cliniques
hypothétiques et non en situation réelle. Le
questionnaire PABS (Pain Attitude and Beliefs
Scale) a été développé dans le but d’évaluer les
croyances des soignants (kinésithérapeutes) en
matière de LNS chronique et comprend une
composante à orientation biomédicale et une
autre à orientation bio-psychosociale.
L’objectif de cette étude était d’étudier la validité et la reproductibilité du questionnaire
PABS chez des médecins généralistes et d’évaluer si la prescription d’arrêt de travail (AT)
pour LNS de médecins généralistes (MG) était
corrélée à leur croyance en matière de LNS
et/ou à leur propension à prescrire des AT
pour d’autres pathologies.
Tous les MG de l’île de Jersey ont été invités à
participer à cette étude. Une version du PABS
adaptée au MG leur a été adressée. Tous les
AT de plus de 2 jours prescrits par ces MG en
2005 (nécessairement enregistrés dans la base
du département administratif des AT) ont été
analysés. Les AT en rapport avec une LNS, une
maladie mentale commune (anxiété, dépression, stress, attaque de panique) ou une maladie
pulmonaire mineure ont été analysés. Les propriétés psychométriques (structure interne,
indice d’asymétrie) du PABS ont été étudiées.
Une analyse en régression multiple a étudié les
relations entre les différentes caractéristiques
des MG et la prescription d’AT pour LNS.
Sur les 99 MG contactés, les données ont pu être
analysées pour 83 (74% d’hommes, 39,5 heures
de travail par semaine en moyenne, 17,8 ans
d’installation en moyenne, 15,3 patients avec
une LNS vus par mois).
Une réduction du nombre de questions du
questionnaire PABS a été nécessaire pour qu’il
conserve une structure interne et une reproductibilité acceptable.
En 2005, les MG ont prescrit 4 280 AT
pour LNS, 7 025 pour une maladie mentale
commune et 7 891 pour une maladie pulmonaire mineure.
9
Revue de presse
R evue de presse
Dirigée par le Pr B. Combe
Les MG dont le nombre d’heures travaillées
par semaine est le plus important ont les scores
les plus élevés sur la composante biomédicale.
Il n’a pas été mis en évidence de relation entre
les scores au PABS et le nombre d’AT pour
LNS. Les nombres d’AT prescrits pour les trois
affections sont corrélés.
Cette étude a permis d’adapter le PABS au
MG. Réalisée sur des données réelles de prescription, elle montre que les croyances des
soignants en matière de LNS chronique ne
sont pas prédictives de la prescription d’arrêt
de travail pour LNS. Ce fait pourrait paraître
contradictoire avec les connaissances actuelles,
mais les auteurs l’expliquent par les probables
différences entre les comportements explicites (ceux issus de questionnaires et résultant de la réflexion) et implicites (ceux issus
des pratiques, plus automatiques). En effet, la
corrélation des nombres d’AT pour les trois
affections laisse penser que la prescription
d’AT serait plutôt liée à des facteurs intrinsèques au médecin plutôt qu’à des croyances
liées à telle ou telle affection.
M. Marty, Créteil
» Watson PJ, Bowey J, Purcell-Jones, Gales T. General practitioner sickness absence certification for low back pain is not
directly associated with beliefs about low back pain. Eur J Pain
2008;12:314-20.
Courrier des lecteurs
Au Dr André Chambat, 81200 Mazamet
Cher Confrère,
Vous proposez dans le “Courrier des lecteurs” du numéro de mai 2008 de La Lettre du Rhumatologue de remplacer l’appellation “Rhumatologie” par “Ostéo-arthrologie”. Je ne suis pas sûr
que cela serait un avantage et, surtout, que cela définirait mieux notre domaine d’activité tel
qu’il ressort de ce que nous voyons dans notre pratique quotidienne. L’ostéo-arthrologie ne
représente en effet que la partie “dure” de l’appareil locomoteur, et elle ignore la partie “molle”
(muscles, tendons et leurs annexes, nerfs périphériques, racines nerveuses rachidiennes,
etc.) essentielle à l’animation des structures ostéo-articulaires et motif de consultation au
moins aussi fréquent.
Bien cordialement,
Pr Joël Dehais,
service de rhumatologie, hôpital Pellegrin, CHU de Bordeaux,
33076 Bordeaux Cedex
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10
La Lettre du Rhumatologue - n° 343 - juin 2008
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