TOPOLOGIE POUR ECONOMISTES Analyse, Preuves et Applications Daniel Mukoko Samba Jean Paul K. Tsasa Vangu 1ère édition 1ier draft 2012 2 Avant – propos Les grandes avancées constatées en sciences économiques ces cinquante dernières années sont dues essentiellement à une compréhension profonde et à une utilisation intelligente de l’outil mathématique. Depuis, l’économiste ne cesse de repousser les frontières de son imaginaire jusqu’à faire de l’analyse mathématique, selon les termes propre de R.E. Lucas, le seul moyen de faire de la théorie économique, tout le reste n’étant qu’images et débats ! A travers cet ouvrage, nous proposons aux économistes en herbe un arsenal d’outils d’analyse devant les préparer à affronter les sujets et thèmes de recherche traités au niveau de la frontière des connaissances. A l’effet de s’approcher pertinemment de cette frontière, il faut une initiation rigoureuse et surtout méthodique. Constatant quelques faiblesses et failles dans ce processus d’initiation au niveau national, nous avons résolu destiner la première édition de cet ouvrage aux universités locales afin de contribuer à l’amélioration de la qualité du capital humain, facteur important dans le développement et le progrès de toute société qui se veut ambitieuse. En intitulant cet ouvrage « Topologie pour économistes », nous désirons forger une nouvelle vision sur le plan académique et motiver une mise à jour du contenu du programme dans les facultés d’économie de nos universités locales. En effet, l’économie est une discipline relativement jeune, cependant son développement s’est fait à grande vitesse. A ce jour, force est de constater que la rigueur mathématique, en caractérisant la plupart de grandes théories économiques, a renvoyé la dimension philosophique essentiellement au niveau de la construction des hypothèses et de l’interprétation des résultats. Au regard de cette métamorphose, il est important que le contenu du programme en économie au sein de nos facultés soit dynamique afin de s’adapter à chaque fois à la nouvelle donne imposée par l’actualité scientifique. Nous estimons que c’est à ce prix que nos universités seraient à même de combler leur retard et absence sur la scène internationale. L’ouvrage « Topologie pour économistes » s’adresse, plus particulièrement, aux étudiants de premier et deuxième cycle en économie de nos universités locales. Il a pour objectif d’offrir les bases solides sur quelques notions en topologie qui semblent indispensables à une compréhension rigoureuse de nombreux concepts et notions fondamentaux utilisés couramment par l’économiste, tels que les limites, la continuité, le voisinage, la dérivée ou encore l’équilibre. Au-delà de ces considérations classiques, comme le note Carl P. Simon et Lawrence Blume, nous estimons également que pour le meilleur ou pour le pire, les Mathématiques sont devenues le langage des analyses économiques modernes. Cependant, force est de constater que l’attention accordée à certaines branches des Mathématiques comme la topologie ou la théorie de la mesure et de l’intégration dès le premier cycle, voire le second cycle en économie est trop faible et même quasi-neutre au sein des facultés de nos universités locales. 3 Comme les enseignements d’initiation à la logique, à la philosophie, au droit ou à l’éthique qui offrent chacun dans son domaine respectif, des bases nécessaires à l’étudiant dès son entrée à l’université, de même cet ouvrage se propose également d’initier l’étudiant au raisonnement rigoureux et de forger en lui, le reflexe et le souci de comprendre les fondements de différentes analyses rencontrées dans son parcours qui, pour la plupart, exige implicitement la maîtrise de quelques concepts et notions en topologie. Le contenu de cet ouvrage apparaît de ce fait, comme un complément indispensable aux enseignements de mathématiques générales et de théorie des probabilités qui, à ce jour, tels que présentés dans nos universités, apparaissent de plus en plus moins ambitieuses au regard de la dynamique de la science économique. Nous adressons également cet ouvrage aux enseignants et chercheurs locaux désirant œuvrer sur la frontière de la recherche. En effet, nous estimons que sans une bonne initiation à la manipulation des concepts et notions fondamentaux de topologie, de théorie de la mesure et de l’intégration, les chercheurs issus de facultés d’économie de nos universités locales et y œuvrant ne sauraient être internationalement compétitives, ou sinon devront réaliser plusieurs tours de passe pour y parvenir. En nommant cet ouvrage « Topologie pour économistes », une question double se pose implicitement : quel doit être le contenu d’un tel ouvrage et comment doit–il être présenté ? A la première phase de l’interrogation, nous estimons que le contenu d’un tel ouvrage doit posséder les caractéristiques suivantes, être à la fois : (i) synthétique (ii) démonstratif ; (iii) intuitif ; (iv) illustratif ; (v) facilement conciliable aux principaux concepts abordés dans la plupart de cours d’économie au niveau des cycles inférieurs (graduat et licence). Et la réponse à la deuxième phase de la question (cf. table des matières) permet d’atteindre les cinq objectifs décrits précédemment. In fine, dès les cycle inférieurs, l’économiste a intérêt à se familiariser aux concepts de topologie, ne serait – ce pour de raisons d’ordre historique. En effet, remarquons que la topologie a joué un rôle majeur dans l’avancée et le développement des sciences économiques. A titre illustratif, nous citons : (i) la dérivation formelle d’une solution en théorie des jeux à l’aide du théorème du point fixe de Kakutani (proposée en 1954 par Nash, Prix Nobel d’économie 1994) ; (ii) la preuve de la proposition d’existence d’équilibre général partant des équations de Walras (démonstration rendue possible en 1953 par Arrow, Prix Nobel d’économie 1972 ; Debreu, Prix Nobel d’économie 1983 et McKenzie, 1953) ; (iii) ou encore la transposition des équations de Bellman en analyse macroéconomique dès les années 1970 – 80 notamment par Sargent (Prix Nobel d’économie 2011) et par Lucas (Prix Nobel d’économie 1995). 4 Remarquons au passage, que la proposition de ces différents cadres formels d’analyse exigeait une connaissance raffinée, notamment sur le concept d’espaces et sur la manipulation des hypothèses fondant les preuves de théorèmes du point fixe. In fine, au regard de la place majeure qu’occupe la connaissance des concepts de topologie dans la compréhension de grands enjeux caractérisant le développement des sciences économiques, nous avons résolu d’intituler cet ouvrage « Topologie pour économistes », à l’instar de nombreux intitulés rencontrés sur le marché de livres, Mathématiques pour économistes, statistiques pour économistes, Probabilités pour économistes, etc. Daniel Mukoko Samba Professeur d’université Jean – Paul K., Tsasa PhD student 5 Sommaire Introduction Chapitre I : Eléments sur la théorie des ensembles I.1 : Introduction à la notion d’ensemble I.2 : Application et Fonction Chapitre II : Structure d’espace vectoriel II.1 : Espace vectoriel II.2 : Produit scalaire et Métrique Exercices Chapitre III : Applications linéaires III.1 : Morphisme III.2 : Théorème de rang et Kernel III.3 : Systèmes linéaires III.4 : Equations différentiels Exercices Chapitre IV : Nombres réels et Nombres complexes IV.1 : Ensemble des réels IV.2 : Ensemble des complexes Exercices Chapitre V : Suite et Cauchy-convergence V.1 : Suite, Métrique et Complétude V.2 : Critère de Cauchy V.3 : Règles de Cauchy et d’Alembert V.4 : Règle d’Abel Exercices Chapitre VI : Fonctions réelles VI.1 : Limites, Continuité et Différentiation VI.2 : Fonctions Exponentielle, logarithmique et trigonométriques VI.3 : concavité, Convexité et Quasi-concavité Exercices Chapitre VII : Espaces topologiques VII.1 : Construction d’une topologie VII.2 : Intérieur, Adhérence et Frontière d’une partie 6 VII.3 : Espaces séparables VII.4 : Continuité globale et continuité locale Exercices Chapitre VIII : Métriques et Contraction VIII.1 : Equation de Bellman VIII.2 : Condition de Blackwell VIII.4 : Théorème du point fixe de Banach Exercices Chapitre IX : Fonction continue IX.1 : Compacité IX.2 : Continuité IX.3 : Théorème d’existence d’un maximum IX.4 : Théorème du point fixe de Brouwer Exercices Chapitre X : Correspondance continue X.1 : Hémi–continuité X.2 : Théorème du maximum de Berge X.3 : Théorème du point fixe de Kakutani Exercices Chapitre XI : Espaces euclidiens XI.1 : Orthogonalité XI.2 : Projection orthogonale XI.3 : Problème des moindres carrés XI.3 : Espaces euclidiens XI.4 : Transformation de Fourier Exercices Chapitre XII : Intégrale de Riemann XII.1 : Théorie de l’intégration de Cauchy XII.2 : Intégrales impropres XII.3 : Lemme d’Abel XII.4 : Intégrale de Riemann Exercices Chapitre XIII : Intégrale de Lebesgue XIII.1 : Tribu, Ensemble mesurable et Espace mesurable XIII.2 : Mesure, Espace mesuré et Fonction mesurable 7 XIII.3 : Construction de l’intégrale de Lebesgue XIII.4 : Théorèmes de Lebesgue XIII.5 : Limites de l’intégrale de Lebesgue Exercices Chapitre XIV : Généralisation des Espaces Euclidiens XIV.1 : De Euclide à Banach XIV.2 : Espaces de Banach XIV.3 : Bases hilbertiennes XIV.4 : Théorème de décomposition de Wold Exercices Chapitre XV : Espaces linéaires XV.1 : Espaces linéaires XV.2 : Opérateurs et Fonctions linéaires XV.3 : Théorème et Valeur de Shapley XV.4 : indice de pouvoir de Shapley – Shubick Exercices Chapitre XVI : Initiation à la dynamique XVI.1 : Problème de croissance optimal déterministe XVI.2 : Problème de croissance optimal stochastique Exercices 8 Chapitre II Structure d’espace vectoriel II.1 : Espace vectoriel II.1.1 : La structure de groupe A l’âge de dix-sept ans, Evariste Galois introduit la notion de groupe, un concept mathématique qui est à la base des notions telles que les anneaux, les corps, les matrices, les espaces vectoriels. En effet, un groupe opération est un ensemble auquel est associé une de la loi de composition, vérifiant quatre propriétés : pour tout pour tout il existe pour tout Un ensemble i.e. est une loi de composition interne ; i.e. la loi tel que et il existe est associative ; i.e. est l’élément neutre ; tel que i.e. est l’inverse de soit est un groupe abélien ou groupe commutatif, du nom du mathématicien norvégien Niels Henrik Abel, lorsque sa loi de composition interne est commutative si : Remarques 2.1 : l’élément est unique ; un élément ne possède qu’un seul inverse. Par exemple : et sont des groupes commutatifs ; sont des groupes commutatifs ; et et ne sont pas des groupes, où et sont respectivement la multiplication et l’addition multiple. Une partie est un sous-groupe de Ainsi, un sous-groupe Par exemple : Soit plus petit sous-groupe de Exercice 2. 1. Soit est ; est un groupe est un sous-groupe de un groupe et si : on a ; on a avec la loi induite par celle de ; un sous-ensemble de est un sous-groupe de Le sous-groupe engendré par est le contenant et Montrer que le sous-groupe engendré par l’ensemble 9 Astuce : Montrer que est un sous-groupe et tel que si est un autre sous-groupe contenant 2, II.1.2 : La structure d’anneau Les structures d’anneau et de corps sont des enrichissements de celle de groupe. En effet, un anneau ou un corps est un groupe muni d’une deuxième loi interne. Alors que la structure d’anneau est généralement rencontrée dans l’analyse des ensembles de fonctions et de matrices, celle de corps est généralement sollicitée dans l’analyse des ensembles et munis de leurs lois additives et multiplicatives. Soit un ensemble possédant deux lois de composition internes l’addition et la multiplication. Alors, le triplet et respectivement est une structure d’anneau si et seulement : est un groupe commutatif (groupe abélien) ; la loi est associative ; la loi est distributive par rapport à l’addition. Si de plus, il existe un élément neutre dans de l’anneau, alors l’anneau pour la loi noté et appelé élément unité est dit unitaire. Par la suite, on utilisera le mot anneau pour anneau unitaire. Exercice 2.2. Soient et deux éléments permutables d’un anneau Montrer que pour tout c’est-à-dire tel que : Remarques 2.2 : Le neutre pour l’addition est L’ensemble des parties d’un ensemble muni de la différence symétrique et de l’intersection est un anneau commutatif appelé anneau de Boole. Un anneau est di commutatif, si la deuxième loi de l’anneau est commutative. II.1.3 : Le corps La formalisation de la structure d’un espace vectoriel passe généralement par la prise en compte de la notion de corps, c’est-à-dire un ensemble dont la structure comprend deux lois de compositions interne : la première loi de composition interne, notée la composition Puisque associe à deux éléments est une loi de composition interne, les propriétés suivantes : - la loi est commutative, - la loi est associative, - il existe un élément neutre ; ; tel que ; et de possède 10 - tout élément du corps admet un inverse, noté la deuxième loi de composition interne, notée l’élément tel que ; associe à deux éléments de caractérisé par les propriétés suivantes : - la loi est commutative, - la loi est associative, ; ; - il existe un élément neutre ou élément unité tel que - sauf l’élément neutre un ensemble ; et ; de la loi de composition interne admet un inverse, noté Soient et tout élément du corps tel que deux lois de composition internes sur Alors, le triplet possède une structure de corps commutatif si : a une structure d’anneau commutatif unitaire ; a une structure de groupe abélien de neutre noté Par exemple, et sont des corps commutatifs. Exercice 2.3. (i) La structure est-elle un corps commutatif ? (ii) Montrer que tout corps fini est commutatif (théorème de Wedderburn). La combinaison des lois et est commutative et distributive : Remarques 2.3 : Les corps classiques qui feront l’objet des analyses de la série topologie concernent les ensembles réels et complexes avec l’addition et la multiplication, respectivement des réels et des complexes. Soit un corps, alors est intègre car ne possédant pas de diviseurs de Exercice 2.4. Montrer que si un corps n’est pas intègre, ce que la définition d’un corps n’a plus de sens. II.1.4 : Les suites Une suite dans un ensemble non-vide terme de la suite est un élément de ou parfois représenté par dans est égal à Une sous-suite est un ensemble Généralement la suite et définie par la fonction avec pour ordonné, tel que chaque est notée par telle que Ainsi, l’ensemble de toutes les suites couramment noté d’une suite est est une suite qui contient les termes de apparaissant dans la sous-suite suivant le même ordre que dans telle que : 11 où est une suite dans tel que vient qu’une sous-suite En recourant à d’une suite est une fonction de la forme est strictement croissant, i.e. Par exemple, pour tout définie par l’expression tel que et où avec est une sous-suite de une fonction la notion de fonction, il représente représente la fonction avec pour chaque Une suite double dans est une matrice infinie où chacun des termes est un élément de Formellement, elle est définie à l’aide d’une fonction dans telle que Une suite double peut également être vue comme une suite de suites dans c’est-à-dire comme une suite dans Comme dans le cas des suites, nous représentons cette fonction par l’expression égal à définie par où L'ensemble de toutes les suites doubles de est également désigné par s’écrire comme Ainsi, une suite double est peut ou encore comme II.1.5 : Les vecteurs Un dans est un vecteur de dimension représentée par où pour tout Exercice 2.5. Vérifiez que Le de définie par la fonction si et seulement si est donné par l’expression et pour tout De même pour l’espace des réels, on peut noter II.1.6 : Les matrices Une matrice de format où et dans un ensemble non-vide entiers positifs. La fonction pour tout matrice et est une fonction est représentée par ou simplement par la notation peut être considérée comme un tableau rectangulaire à que l’élément générique Pour tout apparaît dans la l’expression ligne et traduit le produit de par lignes et où Ainsi, une colonnes, tel colonne de ce tableau. où est un défini comme suit : L'ensemble de tous les ou plus généralement par dans l’ensemble est désigné par l’expression 12 II.1.7 : La structure d’espace vectoriel Un espace vectoriel sur un corps appelé auusi est un ensemble dont les éléments sont des vecteurs. Il s’agit d’un ensemble non-vide muni de deux lois : une loi de composition interne, c’est-à-dire une application de une loi de composition externe, c’est-à-dire une application de dans dans : : D’où, le triplet Axiome 1 : la loi de composition interne qui, à deux élément appelé est commutative, est associative, de associe l’élément vérifie les propriétés suivantes : et ; ; il existe un élément neutre tout élément de tel que ; admet un symétrique ou un opposé tel que : Axiome 2 : la loi de composition externe pour dériver un élément de dans associe un scalaire et (produit scalaire) caractérisé par les propriétés suivantes : Distributivité par rapport aux scalaires, : Distributivité par rapport aux vecteurs, : Associativité des scalaires par rapport aux scalaires, Neutralité vis-à-vis de l’élément unité du corps ; ; : ; Par exemple : (i) est un espace vectoriel sur le corps vectoriel sur elle-même. (iii) De même, l’ensemble des forment un espace vectoriel sur le corps où la loi avec : ; (ii) la ligne est un espace réels ordonnés tel que : est une opération de multiplication (produit scalaire). (iv) Tout plan passant par l’origine dans est un espace vectoriel. 13 Figure 2.1 : Plan passant par l’origine dans Un espace vectoriel est un ensemble muni d’une structure permettant d’effectuer des combinaisons linéaires. Si un espace vectoriel sur un corps La combinaison linéaire des vecteurs alors on note avec les éléments du corps est donnée par l’expression : où est un scalaire, c’est-à-dire un nombre réels multipliant un vecteur dans un espace vectoriel. Proposition 2.1. si toute combinaison linéaire avec des scalaires du corps appartient à ; où le vecteur est une homothétie de l’extrémité de Démonstration. Par l’axiome 2, si avec et avec alors par l’axiome 1, on établit que Soit un entier supérieur ou égal à l’unité. Posons donc un avec où et Un élément est : Loi de composition interne : si et Loi de composition externe : si L’élément neutre de la loi interne est le vecteur nul est un réel alors : et alors : et le symétrique de est Exercices 2.6. (i) Vérifier les propriétés qui font de un qu’un plan ne contenant pas l’origine n’est pas un espace vectoriel. (ii) Montrer 14 Remarque 2.4 : Un ensemble des matrices à d’une structure de lignes et colonnes à coefficients dans est muni En effet, la loi interne est l’addition de deux matrices. La loi externe est la multiplication d’une matrice par un scalaire. L’élément neutre pour la loi interne est la matrice nulle, et la symétrique de la matrice Par extension, Un ensemble coefficients dans est la matrice des matrices à lignes et colonnes à est un II.2 : Structure des sous-espaces vectoriels II.2.1 : Les sous-espaces vectoriels Un sous-espace vectoriel est un espace vectoriel. Soit est un sous-espace vectoriel de un L’ensemble si : ; pour tout Ainsi, pour tout et est stable pour l’addition ; Ainsi, est stable pour la multiplication par un scalaire. Par exemple, l’ensemble effet : (i) est un sous-espace vectoriel de ; (ii) pour tout alors conséquent : a En et ; (iii) pour tout Par et on Donc : Exercices 2.7. Montrer que respectivement : les ensembles (i) (ii) ; ne sont pas des sous-espaces vectoriels du plan Théorèmes 2.1. Soient Alors un et est lui-même un un sous-espace vectoriel de pour les lois induites par Démonstration. Soit un sous-espace vectoriel d’un espace vectoriel La stabilité de l’ensemble pour l’addition et le produit scalaire permet de munir cet ensemble d’une loi de composition interne et d’une loi de composition externe, tout en restreignant à les opérations définies dans Ainsi, les propriétés de commutativité et d’associativité de l’addition et les axiomes relatifs à la loi de composition externes sont vérifiés, car ils sont satisfaits dans donc en particulier dans puisque L’existence d’un élément neutre découle de la définition de sous-espace vectoriel. Montrons à présent que pour Puisque noté – tel que conséquent : – et que – et le symétrique de noté – appartient à Soit est un espace vectoriel, alors il existe un élément de Etant donné que alors pour Et par 15 Théorèmes 2.2. homogènes à Soient et un système d’équations linéaires variables : alors l’ensemble des vecteurs solutions est un sous-espace vectoriel de Démonstration. Soit l’ensemble des vecteurs solutions de l’équation est un sous-espace vectoriel de le vecteur En effet : est élément de ; est stable par addition : si et donc Montrons à présent que sont des vecteurs solutions, alors d’où ; est stable par multiplication par un scalaire : si vient que pour tout et est un vecteur solution, alors il et Par conséquent, II.2.2 : Les combinaisons linéaires Soient un entier naturel et vecteurs d’un espace vectoriel Tout vecteur de la forme : est appelé combinaison linéaire des vecteurs et où les scalaires sont appelés coefficients de la combinaison linéaire. Pour que le vecteur des vecteurs le vecteur et 2.3 Alors pour tout (Caractérisation d’un sous-espace et et et Par la définition de sous-espace vectoriel : Réciproquement : En posant - En posant notion de une sous-ensemble non-vide si et seulement si : En effet : et n’est pas vide, posons on a ainsi Alors ; ; ; on trouve : Exercice 2.8. Montrer que dans le colinéaire au vecteur la appartient à Démonstration. Soient un sous-espace vectoriel, - par C’est-à-dire si et seulement si toute combinaison linéaire de deux éléments de Puisque vectoriel un est un sous-espace vectoriel de - est une combinaison linéaire En effet : combinaison linéaire). Soient de et on dit est colinéaire à Par exemple, dans le Théorèmes on a que le vecteur n’est pas 16 II.2.3 : L’intersection de deux sous-espaces vectoriels Soient de et et deux sous-espaces vectoriels d’un le sous-ensemble de noté On appelle intersection et défini par : Exercice 2.9. Soient et que l’intersection est également un sous-espace vectoriel de Astuce : (i) Montrer que Montrer que deux sous-espaces vectoriels d’un contient ; Montrer que Montrer est stable par addition ; (iii) est stable par produit externe. Considérons à présent un sous-ensemble de l’espace vectoriel défini par : tel qu’on a : Montrons que de et est un sous-espace vectoriel de deux sous-ensembles de En effet, l’ensemble est l’intersection définis respectivement par : et Puisque les plans alors, et sont deux sous-espaces vectoriels de est également un sous-espace vectoriel de car passant par l’origine, C’est une droite vectorielle. II.2.4 : La réunion et la somme de deux sous-espaces vectoriels Soient et et deux sous-espaces vectoriels d’un le sous-ensemble de noté et défini par : On appelle réunion de 17 Contrairement à l’opération d’intersection, la réunion de deux sous-espaces vectoriels n'est un sous-espace que lorsque l'un de deux sous-espaces est inclus dans l'autre. Dans le cas contraire, cette réunion n'est pas stable par addition. Propositions 2.2. Soient et deux sous-espaces vectoriels d’un Alors : est un sous-espace vectoriel de est le plus petit sous-espace vectoriel contenant à la fois Démonstration. Tout d’abord, montrons que Puisque Soient et et est un sous-espace vectoriel. En effet : donc des éléments de Comme Puisque il existe alors il existe et conséquent : Soient et Il existe car Pour tout Si et En effet : peut s’écrire comme : où puisque Soient Donc, et éléments tels que Par et tels que Alors : et étant un sous-espace Il en est de même pour tout élément de est un sous-espace vectoriel contenant effet, si et tels que et contient respectivement vectoriel, on a aussi et car un élément de L’ensemble et alors en particulier cat et on peut montrer que En De même, si Et alors est un sous-espace vectoriel, alors deux sous-espaces vectoriels du où espaces vectoriels est un élément de et et notée : et un élément de L’ensemble de tous les est appelé somme des sous- 18 Exercice 2.10. Déterminer l’expression vectoriels de dans le cas où tels que et sont les sous-espaces et et Par exemple, considérons et deux sous-espaces vectoriels de : et Montrons que Graphiquement, on a que : En effet, par définition de on a que tout élément de Réciproquement, si est un élément quelconque de avec et est dans alors Remarques 2.5 : Un élément de ne s’écrit pas forcément de façon unique. par exemple, tel que : 19 L’intersection de deux sous-espaces vectoriels La réunion de deux sous-espaces vectoriels et et est un sous-espace vectoriel. n’est pas en général un sous- espace vectoriel. Si un élément de de s’écrit d’une manière unique comme la somme d’un élément et d’un élément de alors pour tout et et et on a : Intéressons-nous enfin, à la notion de somme directe des sous-espaces. En effet, deux sous-espaces vectoriels et sont en somme directe dans le si : ; On note alors : II.2.5 : Les sous-espaces vectoriels supplémentaires Si les sous-espaces vectoriels et sont en somme directe, alors et sont des sous- espaces vectoriels supplémentaires dans le Propositions 1.3. Soient et deux sous-espaces vectoriels du supplémentaires dans si et seulement si tout élément de comme la somme d’un élément de Démonstration. Supposons Alors et sont s’écrit de façon unique et d’un élément de : Montrons que tout élément se décompose de manière unique. En effet : - Soient et avec et - Comme - De même, puisque - D’où : - Or par définition d’espaces supplémentaires On alors : est un sous-espace vectoriel, alors est un sous-espace vectoriel, alors donc : et Soit Ainsi, conclut-on que Montrons que - et En effet : Montrons que Si il peut donc s’écrire : et c’est-à-dire soit comme somme d’un élément de soit comme celle de Par l’unicité de la décomposition, Puisque par hypothèse, tout élément se décompose en avec et alors on a que : Par exemple, considérons les sous-espaces vectoriels que : et et du tels 20 Déterminons si et sont supplémentaires dans Tout d’abord, vérifions que coordonnées de En effet, si l’élément alors les vérifient les expressions respectives suivantes : car ; car D’où : Montrons à présent que déterminer des éléments Soit de et de la forme et l’élément seulement si et où un élément quelconque de tels que En effet, l’élément de la forme Il faut doit être de Ainsi, on a : si et Donc : et D’où, Exercices 2.11. Soient et que : et deux sous-espaces vectoriels du tels Montrer que Note : Deux droites distinctes du plan passant par l’origine forment des sous-espaces supplémentaires. II.2.6 : Les sous-espaces engendrés Soient sont des vecteurs du Alors, on appelle sous-espace engendré l’ensemble de toutes les combinaisons linéaires de ces vecteurs. C’est un sousespace vectoriel de et on le note Pour tout tel que on a : Théorème 2.4 (Théorème de structure de l’ensemble des combinaisons linéaires). Soit un ensemble fini de vecteurs d’un Alors : 21 l’ensemble des combinaisons linéaires des vecteurs est un sous- espace vectoriel de C’est le plus petit sous-espace vectoriel de (au sens de l’inclusion) contenant les vecteurs Démonstration. Soit l’ensemble des combinaisons linéaires des vecteurs car Si Alors : contient la combinaison linéaire particulière alors il existe tels que et tels que Ainsi, on déduit que De même, D’où : Si est un sous-vectoriel. est un sous-espace vectoriel contenant l’ensemble des combinaisons linéaires des vecteurs alors : Il est stable par combinaison linéaire. Donc, il contient toute combinaison linéaire des vecteurs D’où, est le plus petit sous-espace contenant Ainsi, puisque car est le plus petit sous-espace de alors s’il existe un sous-espace vectoriel de contenant les vecteurs contenant aussi les vecteurs par conséquent II.3 : Produit scalaire et Métrique dans un espace vectoriel Le produit scalaire est une opération qui permet, d’une part, de conférer à l’espace vectoriel un caractère métrique et d’autre part, de préciser les définitions d’orthogonalité et de colinéarité. Considérons un corps noté tel que qui associe deux vecteurs de l’espace vectoriel De Le produit scalaire est une opération à un nombre réel : il suit que : Des expressions et on peut dériver l’inégalité triangulaire : Proposition. Le produit scalaire est distributif : et sont des scalaires indépendants. où 22 Démonstration. (i) Si ; (ii) Alors (iii) Et donc, ; où puisque Le produit scalaire étant distributif, on a pour : Définissons à présent les notions d’indépendance linéaire et de base d’un espace vectoriel. Précédemment, nous avons évoqué la nécessité de disposer d’un repère comprenant deux vecteurs non colinéaires dans le plan : ou par extension, ou plus généralement, Les vecteurs n’étant pax colinéaires : Ainsi, éléments d’un espace vectoriel sur le corps et seulement si les sont linéairement indépendants si forment une famille libre : Si : les forment une famille liée. Parallèlement, si un seul est alors égale à Pour Soit une famille libre le rang tel que telle que : de ce système est égal à 1. Et si on obtient : le rang 23 La famille libre d’engendrer tout constitue une base de l’espace en faisant varier les scalaires si et seulement si elle permet : La base canonique d’un espace vectoriel est une famille de vecteurs à la fois libre (linéairement indépendant) et génératrice c’est-à-dire dont les combinaisons linéaires permettent de construire tous les autres vecteurs de l’espace. Tableau 1 : Illustration de la base canonique Espace Base canonique …; Une base canonique de est composée de vecteurs tels que : avec : où désigne un symbole de Kronecker, du nom du mathématicien allemand Leopold Kronecker. Ainsi, la base canonique du plan comprendra deux éléments, celle de l’espace trois éléments, ainsi de suite jusqu’à En considérant une base le produit scalaire telle que : peut s’écrire en fonction de leurs composantes. Ainsi, on a : 2 Si l’on considère le cas spécifique des bases orthonormées, le produit scalaire devient : 2 Le symbole * désigne la conjugaison complexe, le produit scalaire dans un espace vectoriel sur le corps complexe étant défini par : Il ressort donc que l’ordre, dans ces deux opérations, est de rigueur, et que par ailleurs le produit scalaire est sesquilinéaire c’est – à – dire à la fois linéaire par rapport au second vecteur du couple et antilinéaire par rapport au premier. 24 et donc : D’où, norme de dans l’espace vectoriel Dès lors, on peut extraire de l’analyse la notion de distance En effet, une distance est une application de dans telle que les propriétés suivantes sont satisfaites : (i) (ii) (iii) (symétrie) ; (séparation) ; (inégalité triagulaire). Un espace vectoriel où une distance est définie, est désigné espace métrique. Lorsque ce dernier est doté d’un produit scalaire sesquilinéaire, l’espace métrique est dit préhibertien. De même, plus loin, nous distinguerons d’autres cas spécifiques d’espaces métriques, selon qu’ils seront munis de telle ou telle autre caractéristique ou structure remarquable. Ainsi, par exemple, un espace métrique sera dit proprement euclidien lorsqu’on y déterminera une norme définie positive telle que seul le vecteur nul possède une norme nulle. 25 Référence bibliographique ABEL Niels H., 1839, Œuvres complètes de N. H. Abel, mathématicien: avec des notes et développements, (Rédigées par ordre du Roi par Bernt Michael HOLMBOE), Tome Premier, Christiana, 479p. ACEMOGLU Daron, 2009, Introduction to Modern Economic Growth, Princeton University Press, New Jersey, 990p. ADDA Jérôme and Russell COOPER, 2003, Dynamic Economics (Quantitative Methods and Applications), The Massachusetts Institute of Technology Press, Cambridge, Massachusetts, 279p. AIGNER Martin et Günter M. 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