A B S T R A C T S Analyses de la littérature Hormonothérapie substitutive post-infarctus À partir de l’étude CARS (Coumadin Aspirin Reinfarction Study) comportant une randomisation 3 à 21 jours après un infarctus du myocarde (IDM) pour évaluer les traitements par aspirine et warfarine, les auteurs considèrent rétrospectivement le suivi concernant 1 857 femmes ménopausées en individualisant trois groupes : 111 femmes ayant une hormonothérapie substitutive initiée lors de la période post-infarctus (nouvelles utilisatrices), 413 femmes ayant une hormonothérapie au moment de la randomisation ou ayant pris ce traitement lors des deux années précédentes (utilisatrices récentes ou actuelles), 1 333 femmes ne prenant pas d’hormonothérapie (non-utilisatrices). Parmi les complications répertoriées pour CARS pendant le suivi moyen de 15 mois, ont été évalués en particulier les récidives d’IDM, les décès cardiovasculaires, la mortalité de toutes causes, les angors instables, les procédures de revascularisation myocardique (tableau). Les nouvelles utilisatrices ont un taux plus élevé de décès/IDM/angor instable (41 % contre 29 % pour les non-utilisatrices, p = 0,001), en grande partie dû à l’augmentation de survenue de l’angor instable (39 % contre 20 %, p = 0,001), et le risque reste plus élevé après ajustement (risque relatif = 1,44). Parallèlement, les nouvelles utilisatrices sont plus souvent adresTableau. Taux (%) des complications cardiaques observées pendant le suivi de 15 mois post-IDM en fonction de la prise d’une hormonothérapie substitutive. Complications Non-U (n = 1 333) U (n = 413) Nlles U n = 111) Décès/IDM/AI Décès IDM AI ATL PAC 29 % 6% 9% 20 % 10 % 7% 28 % 2 %* 8% 24 % 15 %* 7% 41 %* 0 %* 4 %** 39 %* 23 %* 7% * p 0,01 - ** p 0,05 (comparaison par rapport aux non-utilisatrices). Non-U : non-utilisatrices - U : utilisatrices récentes ou actuelles - Nlles U : nouvelles utilisatrices - IDM : infarctus du myocarde - AI : angor instable - ATL : angioplastie transluminale - PAC : pontage aorto-coronaire. La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001 sées pour angioplastie coronaire que les non-utilisatrices (23 % contre 10 %, p = 0,001). Les utilisatrices récentes ou actuelles au moment de leur IDM ne présentent pas d’excès de risque (taux décès/IDM/angor instable = 28 %). Les estroprogestatifs paraissent moins nocifs que les seuls estrogènes (risque relatif pour les décès, IDM, angors instables = 0,56). Commentaires. Cette étude rétrospective confirme l’augmentation du risque d’événements cardiaques combinés (décès, IDM, angor instable) pour les patientes ménopausées venant de constituer un IDM et chez lesquelles est initiée une hormonothérapie substitutive en post-IDM. Cela est essentiellement dû ici à la survenue plus fréquente d’angors instables par rapport aux nonutilisatrices et aux utilisatrices récentes ou actuelles lors de la randomisation 3 à 21 jours après l’IDM. L’étude HERS avait surtout authentifié un risque d’IDM accru l’année suivant l’initiation du traitement hormonal, divergence qui tenait sans doute aux différences de projets des deux études, l’étude CARS n’étant pas initialement dévolue à l’étude de l’hormonothérapie substitutive et comportant des effectifs inégaux entre les trois groupes et des populations dissemblables (les femmes sous hormonothérapie sont plus jeunes, ont moins de facteurs de risque, sont plus souvent sous bêtabloquants, ont moins fréquemment des lésions coronaires tritronculaires que les non-utilisatrices). De plus, le nombre d’événements décès et IDM est trop restreint pour conclure. En dépit des divergences de méthodologies, les différentes études parues sur ce sujet aboutissent à un message clair : une hormonothérapie substitutive post-ménopause ne doit pas être initiée en post-IDM dans le but de prévenir les accidents coronaires. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Initiation of hormone replacement therapy after acute myocardial infarction is associated with more cardiac events during follow-up. Alexander KP, Newby LK, Hellkamp AS et al. ● J Am Coll Cardiol 2001 ; 38 : 1-7. 17 A B S T R A C T S Stent coronaire à partir de 80 ans À partir de six études multicentriques réalisées de septembre 1995 à mars 1999, les auteurs comparent les résultats de la pose de stents coronaires sur 304 lésions traitées chez 301 patients âgés de 80 ans et sur 5 909 lésions traitées chez 5 885 patients plus jeunes. Les patients 80 ans (301 patients, soit 4,9 % des sujets inclus) ont plus souvent des lésions multitronculaires (16,5 % contre 9,6 %, p = 0,001), un angor instable (50,8 % contre 42,1 %, p = 0,003), des lésions coronaires calcifiées (30,4 % contre 15,3 %, p = 0,001, ce qui explique l’emploi plus fréquent du rotablator), des diamètres vasculaires plus petits (2,90 mm contre 2,98 mm, p = 0,004). Le taux de succès de la procédure est comparable pour les deux groupes de patients ( 80 ans ou < 80 ans), respectivement Tableau. Complications observées à long terme. Suivi moyen Complications Décès IDM –Q – non Q Revx/stent Complications vx Hémorragie grave* AVC 80 ans (n = 301) < 80 ans (n = 5 885) p 262 ± 95 j 283 ± 84 j 0,81 5,65 % 10,63 % 0,33 % 10,3 % 8,3 % 5,32 % 4,98 % 0,66 % 1,41 % 8,55 % 0,46 % 7,53 % 10,9 % 1,63 % 1,14 % 0,51 % < 0,001 0,21 1 0,09 0,19 < 0,001 < 0,001 0,67 * nécessitant une transfusion. IDM : infarctus du myocarde ; Q : transmural ; non Q : non transmural ; Revx : revascularisation ; vx : vasculaire ; AVC : accident vasculaire cérébral. de 97,4 % et de 98,5 %, p = 0,14. Parmi les événements considérés, la mortalité hospitalière (1,33 % contre 0,1 %, p = 0,001), les complications hémorragiques (4,98 % contre 1 %, p < 0,001) et la mortalité à un an (5,65 % contre 1,41 %, p < 0,001) sont significativement plus élevées pour les sujets 80 ans (tableau). Le taux de resténose est identique pour les deux groupes (11,19 % contre 11,93 %, p = 0,78). L’âge élevé, la présence d’un diabète, un antécédent d’infarctus du myocarde, des lésions coronaires tritronculaires constituent des facteurs indépendants prédictifs de mortalité à long terme. Conclusion. La pose de stents coronaires chez des patients âgés 80 ans est réalisée avec un taux de succès > 97 %, en dépit de vaisseaux plus petits et plus souvent calcifiés, d’où le recours plus habituel au rotablator. Le taux de resténose n’est pas influencé par l’âge. Cependant, les sujets âgés ont un pronostic moins favorable que leurs cadets, avec un taux de mortalité hospitalière et à un an plus important, et davantage de complications vasculaires post-procédure et hémorragiques. L’âge constitue un facteur prédictif de mortalité, mais aussi la diffusion des lésions coronaires plus fréquente pour les patients 80 ans (avec pour corollaire une revascularisation souvent incomplète). C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Coronary artery stenting in the aged. Chauhan MS, Kuntz RE, Ho KKL et al. 2001 ; 37 : 856-62. ● J Am Coll Cardiol Multitronculaires : pontage aorto-coronaire ou angioplastie avec stent Environ 60 % des patients revascularisés par angioplastie coronaire sont des patients multitronculaires pour lesquels les deux options thérapeutiques sont envisageables. Le choix est donc ouvert, et l’étude Arterial Revascularization Therapies Study a pour but une comparaison randomisée concernant 1 205 patients multitronculaires accessibles aux deux traitements (600 sont assignés au stent et 605 au pontage). Le critère de jugement principal est l’absence à 12 mois de complications incluant les décès, accidents vasculaires cérébraux et accidents ischémiques transitoires, infarctus du myocarde (IDM) non fatals, nouvelles procédures de revascularisation myocardique. 18 L’intervalle entre la randomisation et la procédure de revascularisation a été plus court pour l’angioplastie avec stent (11 ± 16 jours contre 27 ± 39 jours). Au total, 99 % des patients randomisés dans le groupe stent et 96 % des patients randomisés dans le groupe pontage ont effectivement reçu le traitement auquel ils étaient assignés. Pour le groupe stent, 40 % des complications majeures survenues lors des 30 premiers jours sont dues à une thrombose de stent (1,1 % des lésions traitées et 2,8 % des patients). Une des complications recherchées est observée pour 157 des 600 patients du groupe stent (26,2 %) et pour 74 des 605 patients du groupe pontage (12,2 %), p < 0,001 : la différence est le fait La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001 A des nouvelles revascularisations (au total, 21 % pour le groupe stent contre 3,8 % pour le groupe pontage), un nombre équivalent de sujets de chaque groupe étant en vie à un an et indemne d’accident neurologique ou d’IDM. Le groupe opéré est mieux protégé contre l’angor (absent pour 90 % des sujets pontés contre 79 % après stent) et utilise moins de médicaments antiangineux (p < 0,001). En termes de coût, l’option chirurgicale reste plus onéreuse, en relation directe avec la procédure et la durée de l’hospitalisation. Conclusion. Sur un suivi d’une année, il n’y a pas de différence significative concernant la survie, les complications neurologiques et la constitution d’IDM non fatals, que les patients multitronculaires aient été traités par stents ou pontages aortocoronaires. En faveur de la chirurgie, on observe pour le groupe pontage aorto-coronaire moins de nouvelles revascularisations myocar- B S T R A C T S diques, moins d’angor et moins de prises de traitements antiangineux, différences significatives à un an par rapport au groupe stent (p < 0,001). Le groupe stent bénéficie d’une récupération plus rapide à un mois et d’une prise en charge globale moins onéreuse. Ces arguments sont à considérer entre praticien et patient pour le traitement des lésions coronaires multitronculaires justifiant une procédure de revascularisation et se prêtant aux deux modalités... C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Comparison of coronary artery bypass surgery and stenting for the treatment of multivessel disease. Serruys PW, Unger F, Sousa JE et al., for the Arterial Revascularization Therapies Study Group ● N Engl J Med 2001 ; 344 : 1117-24. Ticlopidine ou aspirine après infarctus du myocarde Dans la pratique courante, l’aspirine représente le traitement antiagrégant standard utilisé en post-infarctus. L’étude italienne STAMI multicentrique, randomisée, en double aveugle, compare l’efficacité et la sécurité des traitements par aspirine ou ticlopidine pour les patients ayant constitué un infarctus du myocarde (IDM) initialement thrombolysé. De mars 1995 à janvier 1997, 1 470 patients ont été randomisés entre aspirine (160 mg/jour - 736 patients) et ticlopidine (250 mg x 2/jour - 734 patients). Sur un suivi de 6 mois, les complications suivantes ont été répertoriées : décès cardiovasculaire ou d’autre cause, IDM non fatal, accident vasculaire cérébral (AVC), angor avec ischémie myocardique documentée. Cent dix-huit patients (59 de chacun des deux groupes, soit 8 %) ont présenté au moins un de ces événements (p = 0,97) (tableau). Un décès vasculaire a été constaté pour complication initiale chez 5 patients sous aspirine et 6 patients sous ticlopidine. Les courbes de survenue des complications létales sont identiques pour les Tableau. Fréquence (%) des complications observées sous aspirine (736 patients) ou sous ticlopidine (734 patients) lors des 6 mois suivant un IDM thrombolysé. Complications Décès cardiovasculaire Décès non cardiovasculaire IDM non fatal AVC non fatal Angor Total Aspirine Ticlopidine 0,7 % – 2,4 % 0,4 % 4,5 % 0,8 % 0,1 % 1,1 % 0,5 % 5,4 % 8% 8 % (p = 0,97) La Lettre du Cardiologue - n° 350 - décembre 2001 deux groupes (p = 0,56). En ce qui concerne les IDM non fatals, on observe une divergence à 20 jours, qui se maintient par la suite, en faveur du traitement par ticlopidine (p = 0,049). Les courbes concernant l’angor et les AVC divergent à la fin du premier mois, mais convergent au terme du suivi (p = 0,34). Le taux de revascularisation est similaire pour les deux groupes (13 %). Cent cinquante-deux patients sous aspirine et 181 sous ticlopidine ont abandonné l’étude avant son terme. Soixante-douze patients (9,8 %) sous aspirine et 90 patients (12,3 %) sous ticlopidine ont présenté au moins un effet secondaire du traitement. Conclusion. Si le risque de récidive d’IDM non fatal paraît moindre sous ticlopidine (en raison peut-être d’une meilleure protection contre les réocclusions sur sténose coronaire résiduelle sévère), l’analyse combinée des complications secondaires postIDM thrombolysé ne met pas en évidence de différence significative entre les deux groupes aspirine-ticlopidine à 6 mois. Les effets secondaires des deux traitements sont également répartis, avec en premier lieu des troubles gastro-intestinaux (7,3 % des patients sous aspirine, 8,7 % sous ticlopidine). C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Ticlopidine versus aspirin after myocardial infarction (STAMI) trial. Scrutinio D, Cimminiello C, Marubini E, Pitzalis MV, Di Biase M, Rizzon P, on behalf of the STAMI group ● J Am Coll Cardiol 2001 ; 37 : 1259-65. 19