LIBÉRALE C

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LIBÉRALE
Toxicomanie
Une prise en charge complexe
Prendre en charge un patient toxicomane n’est pas
facile. Ce type de patient désoriente les soignants. La
demande de traitement de substitution signale
l’ébauche d’une volonté de guérir, mais...
C
ertaines enquêtes récentes signalent le
remplacement d’une dépendance par
une autre. Il est bon de rappeler que les
traitements de substitution sont des outils thérapeutiques qui permettent aux toxicomanes de
sortir de la clandestinité et aux soignants d’initier une prise en charge. Ils ont pour vocation
de faciliter le sevrage de la ou des substances
opiacées consommées par le toxicomane. Mais
ce sevrage ne peut être qu’extrêmement progressif. La seule distribution du traitement de
substitution ne peut conduire qu’à un échec, et
cela peut même parfois être dangereux.
Médicaments de substitution
La méthadone, ou chlorhydrate de méthadone,
est un agoniste spécifique des récepteurs morphiniques. Ce médicament est prescrit pour
une durée maximale de sept jours sur une
ordonnance sécurisée. Le traitement est obligatoirement initié par un centre de soins spécialisé. Dans un second temps, la méthadone peut
être prescrite par un médecin de ville et délivrée
par un pharmacien d’officine.
Le traitement peut être déstabilisé par la prescription d’autres médicaments ou la consommation d’alcool, de cocaïne, etc.
La buprénorphine haut dosage est un agoniste
partiel des récepteurs morphiniques. Elle peut
être prescrite en première intention par tout
médecin, par périodes maximales de sept jours.
Mais si, dans certains cas, le prescripteur le mentionne explicitement sur l’ordonnance sécurisée,
la prescription peut aller jusqu’à vingt-huit
jours. Le caractère antagoniste de la buprénorphine limite les effets dépresseurs des fonctions
cardio-respiratoires.
L’association de ces traitements à un opiacé peut
se solder par une compétition pharmacologique
précipitant un syndrome de manque. De même,
l’arrêt brutal du traitement expose à un syndrome de manque retardé (souvent au début du
troisième jour). Pour cela, il est important que
l’attention des soignants soit orientée sur le respect de la régularité et de la durée des prises des
médicaments.
La persistance importante d’une appétence
pour les opiacés peut faire discuter d’un traitement mieux adapté ou nécessite une analyse
plus approfondie des difficultés rencontrées par
le patient (situation sociale, familiale, contexte
psychologique, co-dépendance, etc.), analyse
qui entraînera une prise en charge plus large.
D’où l’importance de délivrer le médicament de
façon contrôlée par un pharmacien ou un infirmier, notamment au début du traitement car,
comme avec la méthadone, un accompagnement psychosocial doit être proposé au patient.
Des pathologies multiples
Un grand nombre de toxicomanes présentent des troubles somatiques ou psychiatriques
et, souvent, des problèmes sociaux et familiaux. Du seul point de vue médical, outre des
dépendances souvent associées (tabac, alcool,
médicaments...), diverses pathologies cohabitent aussi chez les toxicomanes, notamment
l’hépatite C. De très nombreux toxicomanes
sont porteurs du virus mais ignorent leur
sérologie.
La prise en charge d’un toxicomane demande
une stricte définition des compétences et la délimitation des domaines d’intervention de chacun des partenaires. Le multipartenariat ouvre
la possibilité d’une série de dialogues triangulaires et offre au toxicomane un ou des espaces
de liberté ou de négociation. Car les traitements
de substitution sont avant tout un maillon
important de resocialisation des toxicomanes.
Les dérives constatées chez ces personnes soulignent que l’objectif sous-jacent est l’arrêt des
produits illicites. Cet arrêt ne peut intervenir
favorablement que si la prise en charge est globale, pluridisciplinaire et spécifique à chaque
individu.
Anne Cormi
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 29 - septembre 2001
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