I N F O R M A T I O N S “Heart Failure” 1999 ● Ph. Duc* L e congrès sur l’insuffisance cardiaque organisé par le Groupe de la Société européenne de cardiologie s’est tenu à Göteborg (Suède). Il a réuni près de 2 000 médecins, avec une participation américaine importante. Certaines sessions ont été sélectionnées pour leur intérêt. LES FEMMES ET L’INSUFFISANCE CARDIAQUE Plusieurs études sont en faveur d’un meilleur pronostic chez les femmes, notamment l’étude de Framingham. Les estrogènes jouent un rôle important dans la protection du système cardiovasculaire. Ils améliorent le profil lipidique aussi bien pour les triglycérides que pour le cholestérol. Certaines études ont montré que le traitement substitutif chez les femmes ménopausées pouvait diminuer de 50 % les atteintes coronaires. Enfin, les estrogènes agissent directement sur le myocarde, notamment en diminuant l’apoptose par l’intermédiaire d’une diminution de la caspase 3. L’épidémiologie des atteintes cardiovasculaires chez les femmes est difficile à apprécier du fait de l’absence d’une définition reconnue par tous. Les données varient ainsi considérablement selon les critères retenus. La prévalence n’est pas très différente entre les hommes et les femmes selon les tranches d’âge, sauf pour la tranche la plus élevée, où la prévalence semble deux fois plus importante chez la femme (16 % versus 8 %). Mais il est à noter, alors que la définition retient habituellement des critères cliniques, avec au premier rang la dyspnée, que, chez les femmes de 55-64 ans, la dyspnée à partir de deux étages est un symptôme plus fréquent (38 % versus 18 % chez les hommes). Les données sur les différences de pronostic entre les femmes et les hommes sont contradictoires. Certaines sont en faveur d’un meilleur pronostic chez les femmes (Ho et coll., Schocker et coll., Adams et coll.), mais d’autres sont en faveur d’un pronostic égal (De Maria et coll.), voire moindre chez les femmes (Bourassa et coll.). A. Maggioni a présenté l’étude Italian Network Congestive Heart Failure, qui a permis un suivi de 6 428 patients dans 133 centres. À un an, le suivi a été possible pour 3 327 patients, dont 26 % de femmes. L’âge moyen des patients était de 65 ± 12 ans chez les femmes et de 62 ± 11 ans chez les hommes (p < 0,05). Il existait des différences significatives entre les femmes et les hommes, aussi bien pour certaines caractéristiques de base (tableau I) que pour les traitements, avec un pourcentage moindre d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion et d’antiarythmiques chez les femmes. * Service de cardiologie A, hôpital Bichat, Paris. La Lettre du Cardiologue - n° 318 - octobre 1999 En revanche, la mortalité et les hospitalisations à un an étaient similaires entre les deux groupes. La différence de pronostic entre les sexes est variable selon les études. Cette variabilité des résultats provient probablement des différences de recrutement, notamment s’il s’agit d’études épidémiologiques ou thérapeutiques. Tableau I. Étude Italian Network Congestive Heart Failure. Hommes Femmes p Fraction d’éjection (%) 20,9 39,6 < 0,05 Fibrillation auriculaire (%) 20,9 27,9 < 0,05 Tachycardie ventriculaire (%) 29,1 20,7 < 0,05 Mortalité globale à un an (%) 16,4 15,9 NS pour les cardiopathies ischémiques 17,9 19,2 NS pour les cardiomyopathies dilatées 14,3 11,8 NS 24,9 23 NS Hospitalisation à un an (%) FACTEURS PRONOSTIQUES Ils sont relativement peu nombreux, avec des limitations importantes pour la plupart d’entre eux et des résultats variables en fonction des populations qui ont servi à l’étude. La valeur prédictive d’un facteur pronostique dépend, en outre, du stade de la maladie (tableau II). Tableau II. Valeur des facteurs pronostiques selon la sévérité de l’insuffisance cardiaque (IC). Âge Étiologie Fraction d’éjection Neurohormones Hyponatrémie Comorbidité Bilirubine IC légère IC modérée + + + + - + + + + + - IC sévère + + + + + Parmi les facteurs neurohormonaux, le facteur natriurétique est celui qui a le risque relatif le plus élevé (tableau III). Les facteurs neurohormonaux interviennent dans une boucle complexe associant facteurs neurohormonaux et hémodynamiques (figure 1). 7 I N F O R M A T I O N S Tableau III. Facteurs neurohormonaux et risque relatif. Risque relatif p Norépinéphrine 1,25 < 0,05 Arginine vasopressine 1,28 < 0,05 Facteur natriurétique 1,91 < 0,05 Activité rénine plasmatique 1,30 < 0,05 NO Peptides natriurétiques Prostaglandines Cardiotoxicité Apoptose Remodelage Rétention hydrosodée Vasoconstriction Stress oxydatif Les bêtabloquants ont montré qu’ils amélioraient les caractéristiques physiopathologiques (fraction d’éjection, volume télédiastolique) et la morbi-mortalité (études MDC, CIBIS I et II, MERIT-HF). L’amélioration observée est d’autant plus importante que les patients sont traités par une association comprenant IEC, antagoniste de l’angiotensine II et bêtabloquant. La spironolactone a montré, à travers les études RALES, le bénéfice de son association dans les stades sévères (classes III et IV de la NYHA) sans augmentation importante de l’insuffisance rénale ou de l’hyperkaliémie. Une méta-analyse a montré la réduction significative (29 %) des fibrillations ventriculaires et des décès rythmiques. La digoxine a montré qu’elle diminuait les hospitalisations sans aggraver la mortalité, contrairement aux autres inotropes positifs (vesnarinone...). Débit cardiaque Congestion Système adrénergique Système RAA Vasopressine Endothéline Vasodilatation Rétention hydrosodée Apoptose Cardioprotection Figure 1. Facteurs neurohormonaux. Enfin, l’approche globale et concertée permet une réduction très significative des réhospitalisations. Du fait de la complexité du traitement, notamment pharmacologique, S. Yusuf suggère l’implantation de “cliniques” de l’insuffisance cardiaque permettant d’optimiser la prise en charge globale sous la direction du médecin traitant et du cardiologue. Malgré les nombreux essais cliniques, le traitement actuel de la plupart des patients n’est pas optimal, du fait des difficultés diagnostiques et de la sous-utilisation des médicaments, en raison principalement de la crainte des effets indésirables. RÉSULTATS DES GRANDES ÉTUDES CLINIQUES STRESS OXYDATIF Lors de l’insuffisance cardiaque, les cellules apoptotiques augmentent. En effet, le stress oxydatif est augmenté et stimule l’apoptose. Ce phénomène est observé que l’étiologie soit ischémique ou non. La vitamine C par voie orale ou parentérale diminue les radicaux libres lipidiques, qui réaugmentent après son arrêt. De même, elle améliore la fonction endothéliale et la sensibilité des barorécepteurs. Seules des études sur des effectifs plus importants pourront nous indiquer quel est le retentissement clinique de la vitamine C (les études n’ont été effectuées que chez quelques dizaines de patients). LES ESSAIS CLINIQUES EN PRATIQUE S. Yusuf a exposé les principaux enseignements des études portant sur l’insuffisance cardiaque. La prévention des facteurs de risque (hypertension artérielle, dyslipidémies, tabagisme) permet de diminuer de manière très importante l’incidence de l’insuffisance cardiaque, avec des traitements qui ont montré leur efficacité et leur bonne tolérance. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) ont montré qu’ils amélioraient la morbi-mortalité, mais certains éléments témoignent des limites de leurs effets : blocage imparfait du système rénine-angiotensine, augmentation des bradykinines avec une éventuelle toux, échappement thérapeutique au long cours. Certaines études, notamment l’étude RESOLVD, sont en faveur d’une synergie entre les IEC et les antagonistes de l’angiotensine II. 8 ✔ L’étude MERIT-HF a testé l’effet sur la mortalité globale du métoprolol chez des insuffisants cardiaques en classe II à IV de la NYHA. Les caractéristiques des patients sont indiquées dans le tableau IV. Tableau IV. Caractéristiques des patients sous métoprolol de l’étude MERIT-HF. Âge moyen (années) 64 Sexe masculin (%) 77 Classe II/III/IV (%) 41/56/3 Fraction d’éjection (%) 28 Dose moyenne de métoprolol 159 mg Arrêt du métoprolol (%) 13,9 Mortalité 7,2 versus 11 % dans le groupe placebo, soit une réduction de 34 % Réduction de la mortalité par IC (%) 49 Réduction de la mortalité par mort subite (%) 41 ✔ L’analyse des sous-groupes a montré que l’effet bénéfique observé était indépendant de l’âge, du sexe, de l’étiologie ischémique, du tabagisme et du diabète. L. Tavazzi a montré les résultats à six mois d’une étude pragmatique de l’utilisation des bêtabloquants (bisoprolol, métoprolol et carvédilol) auprès de La Lettre du Cardiologue - n° 318 - octobre 1999 I 2 950 patients recrutés pendant un mois dans toute l’Italie. L’âge moyen des patients était de 61 ans, avec 83 % des patients qui étaient encore sous bêtabloquants à six mois. Aucun bénéfice clinique n’était observé à six mois. Cela pourrait être expliqué par la brièveté du délai, qui comprenait la période de mise en route. ✔ L’étude RUSSLAN a analysé les effets du levosimendan chez des patients ayant une dysfonction ventriculaire dans les suites d’un infarctus du myocarde (moins de cinq jours) et nécessitant un traitement par inotrope positif. Le levosimendan est un calcium-sensibilisateur qui augmente le débit cardiaque et diminue la pression capillaire pulmonaire sans aggravation de la consommation d’oxygène du myocarde. Plus de 500 patients ont été étudiés, avec 5 groupes (un groupe placebo et 4 doses de levosimendan). L’objectif principal de l’étude était la survenue d’une hypotension ou d’une ischémie cliniquement significative. Aucune détérioration n’a été observée avec le levosimendan par rapport au placebo. Pour les critères secondaires, une amélioration significative a été constatée avec le levosimendan (dyspnée, mortalité, aggravation de l’insuffisance cardiaque, et mortalité pendant les 72 premières heures ou les 14 premiers jours). Certains points restent néanmoins à préciser : la fonction ventriculaire n’a pas été mesurée, et on ne sait donc pas la part des dysfonctions systoliques ; le pourcentage de patients du groupe placebo ayant finalement nécessité un inotrope positif a été de seulement 5 %, ce qui pose le problème de l’indication même du traitement. Cette première étude portait principalement sur la tolérance. Il faudra attendre les études sur l’efficacité. ✔ L’étude MOXCON a testé les effets de la moxonidine sur la mortalité globale de patients en insuffisance cardiaque en classe II à IV de la NYHA. Cette étude a inclus 2 449 patients dont la majorité était en classe II/III de la NYHA, provenant de 425 centres et avec une posologie de moxonidine qui variait de 0,25 à 1,25 mg/jour. Les principaux résultats sont indiqués dans le tableau V. Les résultats n’étaient pas en faveur d’un bénéfice de la moxonidine et, bien que le comité de surveillance des données n’ait pas envisagé l’interruption de l’étude, le promoteur a décidé son arrêt. La noradrénalinémie a diminué de moitié dans le groupe moxonidine. L’explication de l’augmentation de la morbi-mortalité n’est pas claire : diminution trop importante de la noradrénalinémie, titration trop rapide, doses trop élevées ? Il faudra attendre les Tableau V. Principaux résultats de l’étude MOXCON. Placebo Moxonidine Mortalité globale (%) 2,8 5 Aggravation de l’insuffisance cardiaque (%) 4,0 5,1 Infarctus du myocarde (%) 0,5 0,7 Effets indésirables graves cardiaques (%) 2,2 4,5 Ensemble des événements (%) 9,5 15,3 La Lettre du Cardiologue - n° 318 - octobre 1999 N F O R M A T I O N S résultats définitifs, mais il n’est pas sûr que l’analyse complète des données permette de déterminer les mécanismes en jeu. R. Doughty a présenté les résultats d’une prise en charge globale et concertée de patients adressés pour insuffisance cardiaque (Auckland Heart Failure Management Study). L’objectif principal était les décès, les réadmissions et la qualité de vie mesurée selon le questionnaire Minnesota (Minnesota Living With Heart Failure Questionnaire). Les patients étaient randomisés entre prise en charge habituelle et prise en charge “globale”. La prise en charge comprenait l’éducation des patients et des consultations régulières programmées. Le suivi a été de 12 mois (tableau VI). Tableau VI. Résultats de l’étude Auckland Heart Failure Management. Nombre de patients Âge moyen (ans) Sexe féminin (%) Fibrillation auriculaire (%) À un an réhospitalisations 1/ 2 nombre total de journées d’hospitalisation Coût en dollars Prise en charge globale Prise en charge usuelle 97 72,5 36 34 90 73,5 40 31 27/32 27/37 528 733 456 255 467 180 Ces résultats ne montrent pas d’amélioration dans le groupe “prise en charge globale” pour les paramètres mesurés, notamment la classe NYHA et les décès. Les raisons de cette absence d’amélioration ne sont pas encore élucidées, car seuls les résultats préliminaires ont été présentés. L’inclusion de patients ayant une insuffisance cardiaque peu grave et le faible effectif expliquent probablement cette absence de différence significative, alors que la plupart des études publiées démontrent une amélioration des patients, notamment pour ce qui concerne les réhospitalisations. ENDOTHÉLINES L’endothéline est une neurohormone particulièrement importante dans la physiopathologie de l’insuffisance cardiaque. Son taux est d’autant plus augmenté que la pathologie est grave. La mortalité est d’autant plus importante que les taux d’endothéline 1 ou de big-endothéline sont augmentés. Ainsi, l’endothéline est un bon facteur pronostique. Les antagonistes, notamment le bosentan, ont montré qu’ils amélioraient les courbes pression-volume, le taux de mortalité et les taux de norépinéphrine dans un modèle expérimental d’insuffisance cardiaque chez le rat. Chez l’homme, les études préliminaires, notamment l’étude REACH-1 chez des insuffisants cardiaques sévères (classes IIIb et IV de la NYHA), ont montré une amélioration des symptômes et des durées d’hospitalisation. Malheureusement, la mauvaise tolérance hépatique de 9 I N F O R M A T I O N S cette molécule a entraîné l’arrêt prématuré de l’étude. Chez les patients qui ont pu être traités pendant plusieurs mois, le bosentan a amélioré la symptomatologie. La question reste ouverte de la meilleure approche thérapeutique entre antagonistes spécifiques des récepteurs A ou des récepteurs A et B de l’endothéline. un an) montrent une amélioration significative du gradient sousaortique au repos et à l’effort, des symptômes, de la classe NYHA, de l’épaisseur du septum interventriculaire. Le remodelage est particulièrement visible dans le territoire infarci. Aucune augmentation des arythmies ventriculaires n’est notée, et la fraction d’éjection ventriculaire est conservée. Les indications sont principalement limitées aux formes asymétriques avec un gradient sous-aortique significatif et qui restent symptomatiques malgré le traitement médical. ■ ABLATION SEPTALE PAR INJECTION D’ALCOOL DE LA PREMIÈRE SEPTALE Certaines équipes ont l’expérience de cette procédure depuis quelques années. Les résultats à court et moyen terme (jusqu’à A B O N N E Z - V O U S ! Tarif 1999 Merci d’écrire nom et adresse en lettres majuscules ❏ Collectivité ................................................................................. à l’attention de .............................................................................. ❏ Particulier ou étudiant Dr, M., Mme, Mlle ........................................................................... Prénom .......................................................................................... Pratique : ❏ hospitalière ❏ libérale FRANCE / DOM-TOM / Europe ÉTRANGER (autre qu’Europe) ❐ 580 F collectivités (88,42 €) ❐ 700 F collectivités (127 $) ❐ 460 F particuliers (70,12 €) ❐ 580 F particuliers (105 $) ❐ 290 F étudiants (44,21 €) ❐ 410 F étudiants (75 $) joindre la photocopie de la carte ❏ autre.......................... POUR RECEVOIR LA RELIURE ❐ 70 F avec un abonnement ou un réabonnement ❐ 140 F par reliure supplémentaire (franco de port et d’emballage) ...................................................................................................... Code postal ................................................................................... MODE DE PAIEMENT Ville ................................................................................................ ❐ par carte Visa Pays................................................................................................ ou Eurocard Mastercard Signature : Tél.................................................................................................. Avez-vous une adresse E-mail : oui ❏ non ❏ Sinon, êtes-vous intéressé(e) par une adresse E-mail : oui ❏ non ❏ Merci de joindre votre dernière étiquette-adresse en cas de réabonnement, changement d’adresse ou demande de renseignements. (10,67 €, 13 $) (21,34 €, 26 $) N° Date d’expiration ❐ par virement bancaire à réception de facture (réservé aux collectivités) ❐ par chèque (à établir à l'ordre de La Lettre du Cardiologue) EDIMARK - 62-64, rue Jean-Jaurès - 92800 Puteaux Tél. : 01 41 45 80 00 - Fax : 01 41 45 80 25 - E-mail : [email protected] Votre abonnement prendra effet dans un délai de 3 à 6 semaines à réception de votre ordre. Un justificatif de votre règlement vous sera adressé quelques semaines après son enregistrement. Recevez régulièrement toutes nos parutions et bénéficiez de nos services gracieux 10 La Lettre du Cardiologue - n° 318 - octobre 1999 LC 318 Adresse..........................................................................................