> Actualités thérapeutiques > Traiter le cerveau malade en 2006 > S. Harrois (neuropsychologue, service de psychiatrie, CHU de Reims) C ette revue se propose d’exposer certains résultats d’études qui ont retenu toute notre attention de par leur originalité et/ou leur pertinence. Ces résultats mettent en avant l’efficacité de certaines molécules dans les pathologies du système nerveux central, l’importance des échelles cliniques ou des épreuves cognitives dans l’évaluation des déficits et l’avancée de certaines hypothèses de recherche, offrant ainsi l’occasion d’améliorer la qualité de vie du patient. Un manque d’effort chez le schizophrène La schizophrénie est associée à un déficit des fonctions cognitives, notamment de la mémoire. L’utilisation de tests neuropsychologiques afin de quantifier le déficit repose traditionnellement sur l’idée qu’un fonctionnement cérébral anormal sous-tend ce dysfonctionnement cognitif. Or, la performance aux épreuves cognitives ne requiert pas seulement un traitement de l’information, mais également un processus motivationnel, ou effort mental. Si les processus motivationnels tendent à être désorganisés, comme cela peut être le cas dans la plupart des pathologies mentales, la performance cognitive devient déficitaire, majorant ainsi l’impression d’une perturbation du traitement de l’information. Ainsi, M. Gorissen et al. ont voulu évaluer si les faibles résultats obtenus aux tests cognitifs chez le sujet schizophrène étaient dus ou non à ce qu’ils ont défini comme un effort mental insuffisant. Soixante-quatre sujets schizophrènes, 63 sujets souffrant de pathologies psychiatriques mais non psychotiques, 20 sujets présentant un trouble neurologique et 44 sujets sains étaient évalués par une batterie de tests neuropsychologiques mesurant l’attention, la mémoire et les fonctions exécutives (Digit Symbol Substitution Test [DSST] de la Wechsler Adult Intelligence Scale Revised [WAIS-R], test de Stroop, Trail Making Test versions A [TmT-A] et B [TmT-B], fluences verbales, California Verbal Learning Test, Wechsler mémoire et mots de Rey). L’effort mental était, quant à lui, mesuré par un test de mémoire de mots (Word Memory Test ou WMT). Ce test, bien qu’il se présente comme un test de mémoire, n’évalue pas les fonctions mnésiques en tant que telles. Il est d’ailleurs très faiblement corrélé au test de mémoire de Wechsler. Cette épreuve consiste en fait en l’apprentissage d’une liste de 20 paires de mots concrets reliés sémantiquement. Cette liste est présentée deux fois au sujet, avec pour consigne qu’il retienne le plus de mots possible. Une tâche de reconnaissance est à effectuer sitôt la seconde lecture de la liste. Chaque mot figure alors avec un distracteur sémantique, et le sujet doit dire quel était le mot lu initialement. Une deuxième tâche de reconnaissance est proposée 30 minutes après. Les performances des sujets schizophrènes étaient significativement plus faibles que celles des trois autres groupes à l’épreuve du WMT. Une hétérogénéité des scores aux différentes épreuves neuropsychologiques était observée chez ces sujets. Un quart des non-psychotiques obtenaient également des scores inférieurs au seuil normal. Ces faibles performances pourraient s’expliquer par un trouble du traitement sémantique, mais, dans ce cas, on s’attendrait à une corrélation forte entre WMT et symptômes positifs, notamment les désordres de la pensée formelle : il n’en est rien. Cela n’expliquerait pas non plus l’échec des non-psychotiques à l’épreuve d’effort mental. Malgré la variabilité des performances obtenues aux différentes épreuves neuropsychologiques, il semblerait donc que le manque d’effort explique ces résultats déficitaires. Il pourrait être lié aux symptômes négatifs de la schizophrénie, notamment l’apathie et l’avolition. Aussi, cet effort mental insuffisant pourrait être considéré comme un trouble dysexécutif, supposant une incapacité du sujet à contrôler ses propres performances, à corriger sa baisse d’attention. On peut également le considérer comme un problème motivationnel, ce qui corrobore l’idée que le feedback peut améliorer les performances cognitives des sujets (1). Cela suggère aussi que les fonctions sous-considérées ne sont pas réellement “perdues” (2). Il faut donc se montrer très prudent dans l’interprétation des performances obtenues aux épreuves neuropsychologiques, notamment chez les sujets souffrant de troubles psychiatriques, et toujours prendre en considération l’aspect motivationnel des sujets. > Gorissen M, Sanz JC, Schmand B. Effort and cognition in schizophrenia patients. Schizophrenia Research 2005;78:199-208. La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 3 - juin 2006 25 > Actualités thérapeutiques Prise en charge des patients souffrant de schizophrénie au quotidien Si, dans les pays anglo-saxons, il existe de nombreux référentiels permettant d’optimiser la prise en charge des patients souffrant de schizophrénie, cette démarche est, en France, sinon confidentielle, du moins quasiment inexistante. Par ailleurs, ces référentiels s’appuient le plus souvent sur des avis d’experts, voire sur les études ayant servi à l’obtention de l’autorisation de mise sur le marché, ces dernières servant à démontrer une efficacité clinique et un rapport bénéfice/risque dans une situation donnée. Or, ces études sont réalisées dans un contexte “fermé” de population très homogène qui ne reflète en rien la réalité quotidienne de prescription. Aussi, pour remédier à ce manque, il est demandé que des études dites naturalistiques, observationnelles, se mettent en place pour apporter plus d’informations quant à la pertinence clinique en termes d’efficacité des molécules utilisées pour soigner, notamment, les patients souffrant de schizophrénie. C’est dans cette perspective que deux études observationnelles ont été mises en place aux États-Unis, à partir desquelles un certain nombre de résultats ont vu le jour en 2005. La première étude est un suivi observationnel, prospectif, réalisé aux ÉtatsUnis et qui mettait à contribution 57 sites de recrutement sur tout le territoire américain ; elle est appelée CATIE, pour Clinical Antipsychotic Trial of Intervention Effectiveness. Ce suivi de patients souffrant de schizophrénie a été initié pour répondre à une demande des pouvoirs publics américains concernant, d’une part, l’effectivité (effectiveness), c’est-à-dire l’effi- 26 cacité d’une thérapie en conditions naturalistiques, et d’autre part l’efficience (efficiency), c’est-à-dire la meilleure efficacité clinique au meilleur coût, des neuroleptiques atypiques dans des conditions de pratique courante.La deuxième est également une étude observationnelle, comparant trois neuroleptiques atypiques prescrits lors d’un premier épisode psychotique, en termes d’effectivité (effectiveness) et de tolérance ; elle est appelée étude CAFE, pour Comparison of Atypicals in First Episode Psychosis. L’étude CATIE et ses résultats C’est une étude en double aveugle ayant un suivi de plus de 18 mois, avec inclusion de 1 493 patients souffrant de schizophrénie, dont 1 432 dossiers analysés. Les traitements, attribués par randomisation, reposaient sur l’olanzapine à la dose moyenne de 20,1 mg (7,530 mg/j), la quétiapine à la dose moyenne de 543,4 mg (200-800 mg/j), la rispéridone à la dose moyenne de 3,9 mg (1,5-6 mg/j), la ziprasidone à la dose moyenne de 118,8 mg (40160 mg/j) ou la perphénazine, neuroleptique typique, à la dose moyenne de 20,8 mg (8-30 mg/j). Schématiquement, en fonction des résultats obtenus au cours de l’analyse en intention de traiter, les auteurs indiquent que, dans ce suivi observationnel : – les neuroleptiques atypiques étudiés ne sont pas plus “effectifs” que le seul neuroleptique typique prescrit, ce qui représente un biais d’interprétation non négligeable ; – globalement, les molécules neuroleptiques prescrites dans les conditions de cette étude se révèlent efficaces sur la symptomatologie schizophrénique ; – près de 74 % des patients (n = 1 061) ayant participé à ce suivi ont cessé de La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 3 - juin 2006 prendre l’un ou l’autre des traitements prescrits après 18 mois, en raison de leurs effets secondaires délétères ou de leur inefficacité ; – la durée au terme de laquelle le traitement était arrêté, soit par manque d’efficacité, soit par décision du patient, était plutôt favorable à l’olanzapine, comparativement aux autres traitements. En revanche, en ce qui concerne ces neuroleptiques atypiques, les auteurs ont mis en évidence d’autres effets indésirables aussi délétères que peuvent l’être les effets neurologiques. Il était notamment observé davantage de syndromes métaboliques avec l’olanzapine et davantage de syndromes extrapyramidaux avec la perphénazine qu’avec les neuroleptiques atypiques. Enfin, dans un contexte de système de santé anglo-saxon, cette étude confirme que le coût lié aux traitements est, d’une part, élevé pour les neuroleptiques atypiques et, d’autre part, relativement différent entre molécules. Ainsi, à dose équivalente, le coût mensuel de chaque produit a été estimé à 60 $ pour la perphénazine, à 250 $ pour la rispéridone, à 290 $ pour la ziprasidone, à 450 $ pour la quétiapine et à 520 $ pour l’olanzapine. Ce suivi naturalistique doit encore fournir de nombreuses données en ce qui concerne la prise en charge des patients schizophrènes, celles-ci pouvant permettre, si elles sont prises en compte, d’améliorer la qualité des soins, dans un contexte ou les quatre neuroleptiques atypiques prescrits dans cette étude représentent un chiffre d’affaires de 10 millions de dollars par an au total et, toutes molécules confondues, 90 % de ce marché aux États-Unis. > Lieberman JA, Stroup TS, McEvoy JP et al. Effectiveness of Antipsychotic Drugs in Patients with Chronic Schizophrenia (CATIE). N Engl J Med 2005;353:1209-23. L’étude CAFE et ses résultats L’objectif de cette étude mise en place par Astra-Zeneca a été d’évaluer, lors d’un suivi naturalistique d’un an, d’une part l’effectivité de la quétiapine, de l’olanzapine et de la rispéridone chez des patients âgés de 16 à 40 ans présentant un premier épisode psychotique et, d’autre part, la ou les causes d’arrêt du traitement. Pour cette étude, 26 centres aux ÉtatsUnis et au Canada ont inclus au total 400 patients. Au cours de ce suivi d’un an, les patients ont été évalués au moyen des échelles PANSS (The Positive and Negative Syndrome Scale) et Calgary Depression, par le questionnaire CGI et par deux batteries de tests mesurant les fonctions cognitives. Les différents types d’effet secondaire pouvant survenir étaient également recueillis. Les résultats obtenus montrent que, en ce qui concerne l’aspect clinique, il n’existe pas de différence significative entre les traitements. De la même manière, aucune différence n’est notée lors de l’évaluation des différentes fonctions cognitives appréhendées (à l’inclusion, à 3 mois et à 1 an), excepté, peut-être, selon les investigateurs, chez les patients traités par rispéridone et chez ceux traités par quétiapine, chez qui la mémoire de travail et la fluence verbale, respectivement, semblent meilleurs. À un an, le pourcentage d’arrêts de traitement, quelle qu’en soit la cause, est similaire entre les traitements (70,9 % pour la quétiapine, 68,4 % pour l’olanzapine et 71,4 % pour la rispéridone). En ce qui concerne la tolérance, le pourcentage d’effets secondaires semble identique, quel que soit le traitement. Une prise de poids est constatée chez pratiquement tous les patients. Toutefois, elle apparaît significativement plus importante chez ceux traités par olanzapine. Près de 80 % des patients traités par olanzapine présentaient, en effet, une prise de poids supérieure ou égale à 7 % depuis leur inclusion, contre 57,6 % de ceux traités par rispéridone et 50 % de ceux recevant de la quétiapine. En résumé, R. Keefe, présentant les résultats de cette étude, concluait que, dans ces conditions, les trois produits prescrits – olanzapine (dose moyenne de 11,7 mg), rispéridone (2,4 mg) et quétiapine (506 mg) – étaient aussi “effectifs“ dans la prise en charge des patients présentant un premier épisode, tant sur le plan de l’efficacité que de la tolérance, et notamment en ce qui concerne la préservation des fonctions cognitives. Il conclut également à l’intérêt d’avoir une variété de molécules aussi efficaces les unes que les autres, afin de répondre aux besoins “individuels” des patients, ce qui renforce l’idée d’une optimisation du traitement. > Keefe R. Comparison of atypicals in first-episode psychosis (CAFE): a randomized, 52-week comparison of olanzapine, quetiapine and risperidone. Breaking news session at the 18th ECNP congress, The Netherlands, 2005 (october,25). Les chaussures à talons dans la schizophrénie Il y a plus de 1 000 ans que les hommes ont commencé à porter des chaussures à talons ; fait du hasard ou non, c’est également à cette période que les premiers cas de schizophrénie ont été rapportés. Étrangement, l’industrialisation de la production de chaussures, des ÉtatsUnis à l’Angleterre, à l’Allemagne et au reste de l’Europe de l’Ouest, a laissé dans son sillage une importante augmentation du nombre de sujets souffrant de schizophrénie. Des taux élevés de schizophrénie ont été observés dans la première génération de migrants venant des régions chaudes vers des régions à climat froid, où l’utilisation des chaussures devenait plus fréquente. Un nombre encore plus élevé a été noté dans la seconde génération issus de ces premiers immigrés, pour laquelle l’utilisation des chaussures s’était faite dès l’apprentissage de la marche. L’hypothèse avancée par J. Flensmark est que, durant la marche, les stimuli traités au niveau des mécanorécepteurs favoriseraient l’augmentation de l’activité des récepteurs NMDA (N-methyl-Daspartate) au niveau des voies mésocorticales et tubéro-infundibulaires. Porter des chaussures à talons diminuerait donc la stimulation des fonctions dopaminergiques de ces voies neuronales. L’activité corticale réduite entraînerait un dysfonctionnement des systèmes dopaminergiques, lesquels sont impliqués dans diverses structures et systèmes neuronaux comme les ganglions de la base, la voie nigro-striée et mésolimbique, etc., dont on sait qu’ils présentent un dysfonctionnement chez le sujet souffrant de schizophrénie. Au vu de ces résultats, faut-il induire une stimulation par électrodes au niveau des différentes voies incriminées pour rétablir une fonction dopaminergique normale, ou faire marcher les patients pieds nus ? > Flensmark J. Is there an association between the use of heeled footwear and schizophrenia? Medical Hypotheses 2004;63(4):740-7. Qualité de vie et schizophrénie : le point de vue du patient À l’heure actuelle, le point de vue du patient est de plus en plus important pour l’évaluation de la qualité de vie, La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 3 - juin 2006 27 > Actualités thérapeutiques que ce soit en pathologie mentale (particulièrement chez le sujet schizophrène) ou en santé publique. Son utilisation est destinée à évaluer non seulement la perception qu’a un sujet de sa propre vie dans un contexte qui lui est propre, mais également l’impact que peuvent avoir ses traitements et sa maladie. La qualité de vie est donc un des éléments principaux qui doivent contribuer à la décision médicale. Toutefois, il paraît nécessaire de redéfinir ce qu’est la qualité de vie chez le sujet schizophrène et la pertinence des instruments d’évaluation utilisés jusqu’à présent. C’est dans ce contexte qu’une nouvelle échelle de qualité de vie, fondée sur le point de vue du patient et utilisable sous forme d’autoquestionnaire, a été créée et validée. Trois étapes majeures ont été réalisées. La première a consisté à identifier et à faire interviewer par des psychologues un panel de 100 patients souffrant de schizophrénie (DSM-IV), le personnel soignant (n = 20) et la famille (n = 20). Dans un deuxième temps, le verbatim ainsi constitué a servi de base de travail à un groupe de 25 experts qui a, in fine, consensuellement proposé une première version (VF1) constituée de 133 items répartis en 17 domaines. À partir des données de J0 et d’un suivi prospectif observationnel, 337 psychiatres ont inclus près de 700 sujets afin de permettre la validation et la mise en évidence des propriétés psychométriques de cet instrument. Par ailleurs, une cohorte indépendante de 100 sujets a été constituée afin d’évaluer la fiabilité de l’échelle au travers de deux évaluations (J0 et J7). Un total de 686 patients présentant un diagnostic de schizophrénie (85,1 %) ou de type schizo-affectif (14,9 %) ont été inclus. La structure de l’échelle de qualité de vie (SOL) après une analyse exploratoire (ACP) a permis d’identifier 28 74 items répartis en 14 dimensions, avec une valeur d’alpha de Cronbach comprise entre 0,75 et 0,95, signifiant une bonne cohérence interne. La validité concourante a été établie en corrélation avec l’échelle BPRS et le questionnaire CGI (aspect clinique), l’échelle EAPS (aspect social) et une échelle générique de qualité de vie RFS. Le coefficient de corrélation est significatif pour tous les facteurs, excepté pour deux avec la BPRS et trois avec la CGI. L’analyse test/retest indique une bonne fiabilité et une bonne reproductibilité pour chaque facteur, avec un coefficient de corrélation pour le plus bas égal à 0,53. Les auteurs concluent que cette échelle de qualité de vie, basée sur le point de vue du patient, est un instrument valide, multidimensionnel, pertinent et de bonne acceptabilité permettant d’évaluer les conséquences de la maladie sur la qualité de vie des patients souffrant de schizophrénie. > Martin P, Caci H, Azorin JM et al. Création et validation d’un autoquestionnaire mesurant la qualité de vie de patients souffrant de schizophrénie : l’échelle Schizophrenia Quality of Life (SOL). L’Encéphale 2005;31:559-66. Comment traiter l’enfant dépressif ? Chez l’enfant, un épisode dépressif majeur doit être considéré comme une pathologie sérieuse qui peut avoir des répercussions sur son développement social, émotionnel et scolaire. Il est par conséquent important de pouvoir identifier une médication efficace et peu génératrice d’effets secondaires permettant de traiter ce trouble chez les sujets jeunes. Seuls certains inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS) comme la fluoxétine, la sertraline et le citalo- La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 3 - juin 2006 pram ont démontré une efficacité supérieure à celle du placebo, comme résumé ci-dessous. Les résultats de l’étude de Emsy et al. (1997), portant sur 96 enfants et adolescents âgés de 7 à 17 ans qui présentaient une dépression majeure, ont montré une différence significative au score de la CDRS-R (échelle de dépression pour enfants). Le groupe recevant de la fluoxétine 20 mg avait de meilleurs résultats au bout de huit semaines que le groupe placebo. Le taux de rémission sous fluoxétine était supérieur à celui observé sous placebo (31 % versus 23 %). L’étude Team (2004) montrait également des résultats meilleurs à la CDRS-R pour les enfants traités par fluoxétine et suivant une thérapie cognitivo-comportementale (TCC) que pour les enfants recevant soit de la fluoxétine seule soit une TCC seule. Un traitement par fluoxétine obtenait aussi des scores supérieurs par rapport à une TCC seule. Les effets secondaires observés étaient principalement des troubles gastrointestinaux et de l’insomnie. Concernant les effets de la sertraline, l’étude de Wagner et al (2003) portait sur 376 enfants et adolescents âgés de 6 à 17 ans présentant un épisode dépressif majeur, et comparait l’action de la sertraline (50 à 200 mg/j) à un placebo pendant 10 semaines. Malgré quelques effets secondaires (vomissements, diarrhée, agitation, anorexie, etc.), une supériorité de l’action de la sertraline était notée au score de la CRDS-R. Le citalopram a également fait l’objet d’une étude montrant ses effets positifs chez les enfants et les adolescents, alors que, dans une autre, les effets observés étaient plutôt négatifs chez les adolescents. D’autres études ont, quant à elles, mis en avant des résultats négatifs avec d’autres molécules, comme la paroxétine (Keller et al., 2001), la venlafaxine (Emsy et al., 2004), l’escitalopram (Wagner et al., 2004), la néfazodone (Rynn et al., 2002 ; FDA, 2004), la mirtazapine (FDA, 2004), le bupropion et les antidépresseurs imipraminiques (Kye et al., 1996 ; Geller et al., 1990). En revanche, il existe peu d’informations sur la durée maximale du traitement. D.S. Pine, dans une étude longitudinale réalisée en 2002, montrait l’efficacité de l’antidépresseur chez l’enfant quand il était pris pendant un an, avec éventuellement mise en place d’une médication libre en période de stress. Les études sur les traitements à long terme sont donc nécessaires pour déterminer la durée de traitement optimale et évaluer les effets à long terme des antidépresseurs chez les enfants. > Dineen Wagner K. Pharmacotherapy for major depression in children and adolescents. Progr Neuropsychopharmacol 2005;29:819-26. La dépression tardive : un facteur prédictif de la maladie d’Alzheimer ? Cette étude s’est proposé de comparer deux groupes de sujets âgés qui présentaient un antécédent de dépression : 23 sujets qui avaient développé une “dépression tardive” (LOD) versus 22 qui avaient eu une “dépression précoce” (EOD). Sept ans après le premier suivi des sujets, le nombre de maladies d’Alzheimer (MA) diagnostiquées était plus élevé pour le groupe LOD que pour le groupe EOD, avec un risque deux fois plus élevé pour les sujets LOD. Nous savons que le diagnostic précoce de la MA est très important pour le trai- tement des déficits cognitifs sousjacents. Bien qu’il n’apporte pas de réelle guérison, il contribue au maintien des acquis pendant un temps. Ce temps sera plus ou moins long en fonction de la précocité de ce diagnostic. Si le risque de développer la MA est plus élevé chez les sujets ayant souffert de dépression tardive, ces derniers pourraient faire l’objet de “cibles” pour des programmes de détection de cette pathologie. > Van Reekum R, Binns M, Clarke D et al. Late life depression increases risk for Alzheimer’s disease. Int J Geriatric Psychiatry 2005;20:80-2. Comment prendre du poids en un rien de temps ? Si les neuroleptiques atypiques, en ce qui concerne les effets secondaires neurologiques, sont généralement mieux tolérés par les patients que les neuroleptiques typiques, ils entraînent en revanche d’autres effets délétères, comme une perturbation du système métabolique, qui se traduit, notamment, par une prise de poids importante. Ces effets iatrogènes pourraient même être considérés comme plus graves, de par leur retentissement en termes de santé publique. En effet, cette prise de poids importante entraîne des répercussions physiques, en favorisant l’augmentation du risque cardiovasculaire par exemple, avec parfois présence d’hypertension, de troubles cardiaques, d’hyperlipidémie ; mais elle a aussi un impact sur l’estime de soi, le fonctionnement social et la réalisation d’une activité physique. Cette étude a voulu comparer les effets de l’olanzapine et de la rispéridone sur les troubles des conduites alimentaires chez des sujets sains. Quarante-huit sujets ont donc reçu, pendant deux semaines, de l’olanzapine, de la rispéridone ou un placebo. L’augmentation des doses de traitement était progressive, et l’on atteignait, au bout de six jours et jusqu’à la fin de l’essai, une dose de 10 mg/j pour l’olanzapine versus 4 mg/j pour la rispéridone. Dès le sixième jour et jusqu’à la fin de l’étude, les résultats objectivaient une hausse significative du poids des sujets traités par olanzapine par rapport au groupe placebo. Au final, il était également observé une prise de poids significativement plus importante pour le groupe olanzapine (deux fois plus) que pour le groupe rispéridone. De plus, les sujets traités par olanzapine avaient davantage d’appétit au petit déjeuner et consommaient davantage de calories au dîner que les deux autres groupes. En plus des effets indésirables qu’elles génèrent, l’olanzapine et la rispéridone entraînent toutes deux une prise de poids rapide chez les sujets traités. Elles peuvent majorer l’appétit et, de ce fait, la consommation calorique. Toutefois, il est dommage que les auteurs n’aient pas recherché les antécédents familiaux pour tenter de mettre en évidence une prédisposition éventuelle à cette prise de poids. > Roerig JL, Mitchell JE, De Zwaan M et al. A comparison of the effects of olanzapine and risperidone versus placebo on eating behaviors. J Clin Psychopharmacol 2005;25:5. Différentes échelles pour détecter la dépression dans la maladie d’ Alzheimer La dépression est une condition fréquente chez le sujet souffrant de MA, et elle n’est pas toujours facile à diagnostiquer. En effet, les symptômes observés dépendent-ils de la pathologie démentielle ou d’une dépression isolée ? La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 3 - juin 2006 29 > Actualités thérapeutiques L’objectif de T. Muller-Thomsen et al. était d’évaluer la prévalence de la dépression en fonction de la sévérité de la démence, au moyen de quatre échelles : la Geriatric Depression Scale (GDS), la Montgomery and Aspey Depression Scale (MADRS), la Cornell Scale for Depression in Dementia (CSDD) et la Nurses Observation Scale for Geriatric Patients (NOSGER). Trois cent seize patients atteints de la maladie d’Alzheimer étaient divisés en deux groupes, ceux pour qui la Mini Mental State Evaluation (MMSE) était supérieure ou égale à 18 et ceux pour qui elle était inférieure. La prévalence de la dépression était comprise entre 27,5 et 53,4 % pour le groupe 1 (MMSE 18) et entre 36,3 et 68,4% pour le groupe 2 (MMSE 18). La cohérence interne (c’est-à-dire la validité des dimensions explorées) demeurait satisfaisante pour les quatre échelles. Concernant la MADRS et la CSDD, elle était indépendante du degré de sévérité de la MA. En revanche, pour la GDS et la NOSGER, elle diminuait avec la sévérité de la démence. La corrélation entre les échelles était meilleure pour le groupe 1 que pour le groupe 2. Les meilleurs résultats concernaient la corrélation entre la MADRS et la CSDD dans les deux groupes. La CSDD et la MADRS seraient, par conséquent, deux outils relativement 30 fins dans l’évaluation de la dépression chez le malade atteint de MA, et ce indépendamment du degré de sévérité de la démence. > Muller-Thomsen T, Arlt S, Mann U. Detecting depression in Alzheimer’s disease: evaluation of four different scales. Arch Clin Neuropsychol 2005;20(2):271-6. L’attaque du World Trade Center : traitement non, consultation oui Cette étude a montré que, globalement, l’utilisation des services de santé mentale par la population générale de New York n’a pas significativement augmenté depuis l’attaque terroriste du World Trade Center (WTC), le 11 septembre 2001. Un an après ces attentats, les auteurs mettaient en place un recueil de données téléphoniques auprès de 2 368 adultes vivant à New York au moment des faits. Les résultats ont montré que, durant l’année suivant l’attaque du WTC, 8,6 % des New-Yorkais consultaient davantage en psychiatrie et 5,3 % recevaient un nouveau traitement. En 2003, près de 20 % des New-Yorkais consultaient et 8,1 % utilisaient des psychotropes ; 12,9 % rapportaient une ou plusieurs visites liées aux attentats du WTC. La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 3 - juin 2006 Les consultations psychiatriques liées à l’attaque du WTC concernaient des épisodes de panique, l’anxiété, le stress post-traumatique, des épisodes dépressifs et une diminution de l’estime de soi. Concernant les traitements médicamenteux mis en place à la suite de ces événements, ils concernaient davantage les jeunes gens, les femmes, les sujets ayant été exposés aux attentats, les sujets ayant déjà vécu des événements de vie négatifs ainsi que les sujets anxieux et présentant une faible estime d’eux-mêmes. Tandis que le pourcentage de New-Yorkais nécessitant un traitement après les attentats n’a pas augmenté significativement, le nombre des consultations a, quant à lui, augmenté substantiellement. ■ > Boscarino JA et al. WTC attack didn’t increase mental health service use by general population-post-traumatic stress disorder. General Hospital Psychiatry 2004;26(5):346-58. Références bibliographiques 1. Kern RS, Green MF, Marshall Jr BD et al. Risperidone versus haloperidol on secondary memory can newer medications aid learning? Schizophr Bull 1999;25:223-32. 2. Danion JM, Gokalsing E, Robert P et al. Defective relationship between subjective experience and behaviour in schizophrenia. Am J Psychiatry 2001;158: 2064-6.