La prostate métastatique : de la biologie à la clinique dossier thématique Cabozantinib, un nouveau venu ? Cabozantinib: a brand newcomer? » Dans une étude de phase II randomisée, le cabozantinib, double inhibiteur de MET et de VEGFR-2, permet d’obtenir, dans les cancers de la prostate métastatiques résistants à la castration, avec un profil de tolérance similaire aux autres inhibiteurs de tyrosine kinase anti-VEGFR : 68 % de contrôle objectif (RO + stabilisation) à 12 semaines ; 74 % de régression des cibles mesurables ; 76 % de résolution complète ou partielle des foyers d’hyperfixations à la scintigraphie osseuse ; 67 % d’amélioration chez les patients présentant des douleurs en début de traitement ; 29 semaines de SSP médiane. M. Hussain a présenté à l’ASCO® 2011 les résultats d’une étude randomisée de phase II concernant des patients traités par cabozantinib (XL184) pour un cancer de la prostate métastatique résistant à la castration (CPMRC) [1]. Mécanisme d’action MET HGF HIF-1α From a randomized phase II trial, cabozantinib, a double inhibitor of MET and VEGFR-2, administreted in castrate resistant prostate cancer patients, allowed, together with identical tolerance that of tyrosin kinase inhibitor antiVEGFR: a 68% objective control of the disease in 12 weeks of treatment, a 74% reduction of measurable targets,a 76% complete or partial bone fixations resolution on bone scan a 67% improvement of initial pain achieved a median 29 week PFS. Keywords: Cabozantinib – MET double inhibitor – VEGFR-2. Mots-clés : Cabozantinib – Double inhibiteur MET – VEGFR-2. * Institut Paoli-Calmettes, Marseille. Summary Résumé G. Gravis* Mobilité, invasion, métastases Cabozantinib VEGF Cellule tumorale hypoxique Mécanisme d'action Le cabozantinib est un inhibiteur des récepteurs à tyrosine kinase (ITK) du VEGFR-2, de MET et de RET (figure 1) [2, 3]. MET, dont le ligand est l’HGF (Hepatocyte Growth Factor), est surexprimé dans de nombreux cancers, dont le cancer de la prostate. Il est impliqué dans la croissance tumorale, l’angiogenèse, l’invasion tumorale et l’évolution métastatique. La synergie de MET et du VEGFR favorise l’angiogenèse. L’expression de MET est stimulée par l’hypoxie par l’intermédiaire de HIF-1α. Les études précliniques ont retrouvé avec le cabozantinib un effet antitumoral et antiangiogénique dans de nombreux modèles tumoraux (4, 5). Schéma de l'étude Néo-angiogenèse Anti-VEGF Figure 1. Cabozantinib (XL184) : mécanisme d’action (d’après Gordon MS et al., ASCO® 2011, abstr. 3010). 174 COU-12 + pubs.indd 174 Dans cette étude de phase II, les patients avaient un CPMRC avec une maladie mesurable en progression (critères RECIST), déjà traitée (maximum 1 ligne) ou non. Le traitement était administré à la dose Correspondances en Onco-Urologie - Vol. II - no 4 - octobre-novembre-décembre 2011 13/12/11 15:58 Cabozantinib, un nouveau venu ? 70 50 Patients chimio-naïfs Patients prétraités par docétaxel 30 * 10 * Acétate d’abiratérone ou MDV3100 antérieurs * – 10 * * ** ** – 30 * ** * – 50 – 70 de 100 mg/j pendant 12 semaines ; une évaluation tumorale était réalisée toutes les 6 semaines. À l’issue des 12 semaines, les patients en progression ont arrêté le traitement, ceux avec une maladie stable ont été randomisés entre un placebo ou la poursuite du traitement et les répondeurs ont poursuivi le cabozantinib. Après l'inclusion de 171 patients, l’étude a été suspendue en raison du bénéfice observé. Les patients présentaient pour 87 % d’entre eux des métastases ganglionnaires, pour 37 % des métastases viscérales et pour 87 % des métastases osseuses. Les traitements antérieurement reçus étaient du docétaxel (43 %), de l’acétate d'abiratérone ou du MDV3100 (9 %) ou un autre traitement (22 %). Après les 12 premières semaines de traitement, seuls 32 % des patients étaient en progression. Proportion sans progression (%) Figure 2. Effets du cabozantinib sur les lésions mesurables des tissus mous (151 patients évaluables). Patients chimio-naïfs (n = 90) Patients prétraités par docétaxel (n = 64) 100 Médiane SSP 29 semaines 24 semaines 75 50 25 Médiane SSP globale : 29 semaines Exclusion des patients randomisés dans le bras placebo 0 0 10 20 30 SSP par mRECIST (semaines) Patients chimio-naïfs Patients prétraités par docétaxel 40 70 SSP (IC95) Événements (24, NE) (18, 33) 21 25 Figure 3. SSP selon le traitement préalable ou non par docétaxel (n = 154) [1]. Pour les patients évaluables, si le taux de réponse partielle était faible (4 %), la maladie était classée stable chez 79 % des sujets, avec cependant une régression tumorale objectivée dans 74 % des cas (figure 2). Ce bénéfice était observé que les patients aient déjà été traités ou non, avec une médiane de survie sans progression (SSP) de 29 semaines pour les patients n'ayant jamais reçu de chimiothérapie et de 26 semaines pour les patients prétraités par docétaxel (figure 3). Concernant les 31 patients dont la maladie était stable à l’issue des 12 semaines et randomisés entre le cabozantinib et le placebo, la médiane de SSP était respectivement de 21 et 6 semaines (p = 0,0007). Parmi 108 patients évaluables, sur la scintigraphie osseuse, 19 % ont eu une disparition complète des lésions et 56 % une disparition partielle (figure 4). Une diminution des douleurs osseuses a été observée chez 67 % des patients évaluables et 56 % ont réduit Correspondances en Onco-Urologie - Vol. II - no 4 - octobre-novembre-décembre 2011 COU-12 + pubs.indd 175 175 13/12/11 15:58 La prostate métastatique : de la biologie à la clinique dossier thématique Figure 4. Cabozantinib dans les CPMRC. Réponses précoces spectaculaires au niveau des scintigraphies osseuses, corrélées avec une baisse des phosphatases alcalines, mais pas avec le PSA (d’après Hussain M et al., ASCO® 2011, abstr. 4516 actualisé). ou arrêté les morphiniques. Une réduction du taux de phosphatases alcalines (PAL) et le C-télopeptide du collagène de type I − marqueurs de la résorption ostéoclastique et de la formation ostéoblastique − a été observée. La toxicité était modérée, les effets indésirables de grade 3/4 étaient la fatigue (16 %), l'hypertension artérielle (6 %), et les dysesthésies palmoplantaires (6 %). Conclusion Ces premiers résultats sont très encourageants. La plus grande surprise est la rapide disparition des lésions osseuses et la normalisation de la scintigraphie osseuse faisant penser à une action antitumorale associée à une action sur le remodelage osseux confirmée par les taux de PAL. Ces résultats doivent être confirmés par les études en cours aux États-Unis. ■ Références 1. Hussain M, Smith MR, Sweeney MR et al. Cabozantinib 3. Sennino B, Naylor RM, Tabruyn SP et al. Reduction of tumor 5. You WK, Sennino B, Williamson CW et al. VEGF and c-Met (XL184) in metastatic castration-resistant prostate cancer (mCRPC): results from a phase II randomized discontinuation trial. J Clin Oncol 2011;29: Proc ASCO, abstr. 4516. invasiveness and metastasis and prolongation of survival of RIP-Tag2 mice after inhibition of VEGFR plus c-Met by XL184. Mol Cancer Ther 2009;8:A13. blockade amplify angiogenesis inhibition in pancreatic islet cancer. Cancer Res 2011;71(14):4758-68. 2. Joly A. Simultaneous blockade of VEGF and HGF receptors 4. Kurzrock R, Sherman SI, Ball DW et al. Activity of XL184 results in potent anti-angiogenic and anti-tumor effects. Eur J Cancer 2006;(Suppl.4):35. (cabozantinib), an oral tyrosine kinase inhibitor, in patients with medullary thyroid cancer. J Clin Oncol 2011;29(19):2660-6. 176 COU-12 + pubs.indd 176 Correspondances en Onco-Urologie - Vol. II - no 4 - octobre-novembre-décembre 2011 13/12/11 15:58