revue de presse Revue de presse Xavier Girerd Les bêtabloquants augmentent le risque de survenue d’un diabète de type 2 S’ il a été suggéré que les diurétiques de type thiazidique et les bêtabloquants pouvaient favoriser la survenue d’un diabète de type 2, la réalisation d’études indiscutables sur le plan méthodologique restait encore à faire. À partir de la cohorte de 12 550 adultes de l’étude ARIC menée aux États-Unis, le suivi des sujets initialement non diabétiques et âgés de 45 à 64 ans permet d’apporter une réponse à cette question. La prise en compte initiale du statut “hypertension” comme étant un niveau de pression artérielle > 140/90 mmHg ou la prescription d’un antihypertenseur a permis une analyse ajustée sur ces facteurs de la survenue d’un diabète de type 2 dépisté sur une glycémie à jeun > 7 mmol/l après trois ans ou six ans de suivi. Si l’incidence du diabète était plus fréquente chez l’hypertendu (25 pour 1 000 sujets par an) que chez le normotendu (12 pour 1 000 sujets par an), les hypertendus traités par diurétique thiazidique, par IEC ou par antagoniste calcique présentaient le même risque de développer un diabète que les hypertendus sans traitement médicamenteux. Chez les 3 804 hypertendus traités, il a été en revanche observé que ceux sous bêtabloquants avaient un risque plus élevé de 28 % de développer un diabète de type 2. Ce résultat était obtenu après ajustement simultané pour l’âge, le sexe, la race, l’éducation, l’adiposité, les antécédents familiaux de diabète, le niveau d’activité physique et les maladies coexistantes. Aucune augmentation significative du poids n’était observée sous traitement bêtabloquant. Pour les auteurs de cette étude, les inquiétudes sur le risque de développement d’un diabète ne devraient pas empêcher la prescription d’un diurétique thiazidique. Concernant celle d’un bêtabloquant qui augmente ce risque, les bénéfices démontrés de cette classe vis-àvis de la prévention des complications cardiovasculaires chez l’hypertendu, incitent à poursuivre la recommandation de leur prescription mais à surveiller plus attentivement leur tolérance biologique au cours de cette prescription. – Gress TW et coll. Hypertension and antihypertensive therapy as risk factors for type 2 diabetes mellitus. N Engl J Med 2000 : 342 : 905-12. À quoi sert de dilater les sténoses athéromateuses des artères rénales ? À l’ère de l’angioplastie, du stent et de la théorie de l’artère ouverte, la question de l’intérêt de la dilatation des artères rénales sténosées par l’athérome peut sembler saugrenue. Répondre à cette question est difficile car elle impose un essai randomisé qui compare les effets du traitement médical à ceux de la dilatation de première intention. Deux essais randomisés, dont l’étude EMMA réalisée en France, avaient déjà indiqué que les bénéfices de la dilatation étaient modestes en particulier vis-à-vis du contrôle tensionnel. La publication de l’étude DRASTIC menée aux Pays-Bas sur 106 patients hypertendus présentant une sténose athéroscléreuse de l’artère rénale (définie par une diminution du diamètre luminal de plus de 50 %) et ayant moins de 200 µmol/l de créatinine, apporte une nouvelle réponse à la question de l’intérêt clinique de la dilatation de ces lésions. Si initialement les patients présentaient une pression artérielle à 179/104 mmHg, après trois mois, les pressions artérielles bien que plus basses (169/99 mmHg) étaient comparables entre le groupe “dilaté” et le groupe traitement “médical”. Toutefois, le nombre de médicaments antihypertenseurs prescrits était plus faible dans le groupe “dilaté” que dans le groupe “médical” (2,1 versus 3,2 doses quoti- 377 diennes). Il faut toutefois noter que dans le groupe “médical”, vingt-deux patients avaient subi une angioplastie après le troisième mois en raison d’une hypertension artérielle persistante en dépit d’un traitement avec trois médicaments ou plus ou en raison d’une détérioration de la fonction rénale. Après un suivi de douze mois, en intention de traiter, il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes, pour le niveau de la pression artérielle, les doses quotidiennes de médicaments, ou la fonction rénale. Les auteurs de l’étude DRASTIC concluent que pour traiter les patients présentant une hypertension et une sténose de l’artère rénale athéromateuse, il est prudent de restreindre l’angioplastie (avec ou sans la mise en place d’un stent) aux patients dont l’hypertension artérielle persiste malgré une trithérapie et chez ceux chez ceux qui ont une élévation de la créatinine ou une altération de la fonction rénale observée à la scintigraphie. Les “spécialistes” du traitement des sténoses artérielles devraient méditer ces recommandations avant de proposer un traitement par angioplastie des sténoses athéromateuses chez l’hypertendu. – Van Jaarsveld BC et coll. The effect of balloon angioplasty on hypertension in atherosclerotic renal artery stenosis. N Engl J Med 2000 ; 342 : 1007-14. L’utilisation du risque cardiovasculaire n’améliore pas la prise en charge des hypertendus L es recommandations sur la prise en charge des patients hypertendus sont toutes aujourd’hui basées sur l’estimation du risque cardiovasculaire absolu. S’il a été montré qu’une aide devait être apportée au médecin pour améliorer la précision de l’évaluation du risque (table de risque, calcul automatique), les consé- revue de presse Revue de presse quences de ces nouveaux critères de décision sur la qualité de la prise en charge ne sont pas connues. Des médecins généralistes anglais ont accepté de comparer dans un étude randomisée les conséquences de la prise en compte initiale du risque cardiovasculaire chez des hypertendus. L’évaluation a été réalisée après un an de suivi, et il a été comparé le pourcentage de patients dont le risque cardiovasculaire restait supérieur à 10 % à cinq ans, le niveau de la pression artérielle et le nombre de médicaments antihypertenseurs prescrits. Le principal résultat de cette étude est qu’il n’a été observé aucune différence sur le pourcentage de patients à risque élevé à un an en fonction du critère de décision initialement fixé (calcul informatique, table de risque ou soin habituel). Un nombre plus important de médicaments étaient prescrits chez les patients dont le risque était évalué par une table, mais la pression artérielle diastolique était comparable entre les groupes. Cette étude indique que l’information apportée par le risque cardiovasculaire ne change pas la qualité de la prise en charge d’hypertendus suivis en médecine générale. Ce résul- tat suggère que ces nouveaux critères de décision de prise en charge des patients hypertendus ne vont rien changer à la qualité de la pratique des médecins. Il doivent faire réfléchir à la nécessité d’accompagner ces nouvelles recommandations d’une formation adéquate des médecins pour qu’ils associent à ces nouveaux critères de décisions de nouvelles stratégies de prise en charge thérapeutique des patients. La formation ne fait que commencer, il faut retrousser nos manches. – Montgomery AA et coll. Evaluation of computer based clinical decision support system and risk chart for management of hypertension in primary care : randomised controlled trial. BMJ 2000 ; 320 : 686-90. La consommation d’AINS expose au risque de décompensation cardiaque L es AINS inhibent la synthèse des prostaglandines et les actions sur les résistances vasculaires périphériques et sur la perfusion rénale sont authentifiées. Les conséquences défavorables de la prescrip- tion des AINS sur l’hémodynamique cardiovasculaire sont connues et chez des patients fragilisés, les complications rénales sont à craindre. Une étude castémoin réalisée sur plus de 1 000 sujets indique que, chez des sujets hospitalisés pour un premier épisode de décompensation cardiaque, l’utilisation d’un AINS (autre que l’aspirine à faible dose) dans la semaine qui précédait l’épisode de décompensation, s’accompagnait d’un risque relatif de 2,1 de faire une décompensation cardiaque et que ce risque augmentait à 10,5 chez ceux ayant une cardiopathie connue. Ce risque était lié à la dose d’AINS consommée et était plus important avec les AINS de longue demivie. Selon cette étude, la consommation d’AINS serait responsable de 19 % des cas d’admission pour décompensation cardiaque. Cette observation, si elle nécessite d’être confirmée par d’autres études, doit conduire à entourer de précaution la prescription des AINS, en particulier chez les sujets ayant une cardiopathie. – Page J et coll. Consumption of NSAIDs and the development of congestive heart failure in elderly patients. An under recognized public health problem. Arch Intern Med 2000 ; 160 : 777-84. Courrier des courrier des lecteurs courrier deslecteurs lec Monsieur et cher confrère, J’ai apprécié votre éditorial dans le numéro 2 d’Hypertension et prévention cardiovasculaire. Vous retenez donc dans les études STOP-2 et CAPPP que la prévention des complications cardiovasculaires chez l’hypertendu dépend essentiellement de la baisse tensionnelle induite, et non pas du moyen thérapeutique utilisé pour l’obtenir. Puisque les différentes médications sont équivalentes, pourquoi ne privilégierait-on pas les moins onéreuses et plus classiques d’efficacité affirmée depuis très longtemps, diurétique et bêtabloquant éventuellement combinées. Avez-vous une explication pour cette pudeur qui empêche de faire intervenir dans les choix thérapeutiques équivalentes des coûts de traitement... d’autant qu’il semble que selon votre même article les effets secondaires sont plutôt moindres dans le groupe diurétique et bêtabloquant qu’IEC ou antagoniste calcique. Très cordialement. Dr J.D. Berthou 378 Réponse au courrier du Dr J.D. Berthou : Si le coût du traitement est un élément du choix d’un médicament antihypertenseur, il faut rappeler que le traitement antihypertenseur par rapport à un placebo est coût-efficace mais que le ratio est plus favorable chez les sujets ayant le risque le plus élevé de complication cardiovasculaire (les hommes âgés avec une pression artérielle élevée). Les données qui comparent, d’un point de vue médico-économique, les monothérapies sont peu nombreuses et dans ces travaux ce sont les bêtabloquants qui indiquent un ratio coût-efficacité le plus favorable. Ce type de résultat peut-il conduire à ne prescrire qu’une seule classe médicamenteuse chez l’hypertendu ? Cette décision pourrait sans doute être prise par un décideur de santé publique qui n’est pas confronté à la réalité de la prise en charge des hypertendus. En effet, pour moi la principale difficulté reste de trouver chez chaque patient les moyens médicamenteux permettant d’obtenir une baisse tensionnelle optimale avec la meilleure tolérance possible. Je serai très intéressé de correspondre avec le médecin qui arrive à équilibrer tous ses patients hypertendus avec les médicaments d’une seule famille thérapeutique. Xavier Girerd S’il lit ces lignes qu’il n’hésite pas à m’écrire.