Mouvement d'un point matériel sous l'action d'une force centrale I. Position du problème. On s'intéresse au mouvement d'un point matériel M de masse m, en mouvement dans un repère galiléen (O,x,y,z) sous l'action d'une force unique ⃗ F telle que : ⃗ F = f ( r)⋅⃗ ur . Remarque : un « point matériel » ou « masse ponctuelle » : cela n'existe pas ! C'est un mo­ dèle physique applicable aux solides dont les dimensions sont négligeables devant les autres dimensions du problème et dont l'énergie cinétique de rotation propre est négli­ geable. Cette deuxième condition, souvent oubliée, est importante. Imaginons par exemple une boule de masse m qui roule sans glisser sur un plan, le mouvement de son centre d'inertie G étant rectiligne ; aussi petit que puisse être le rayon de la boule, son énergie ci­ 7 1 ⋅m⋅V G2 , pas ⋅m⋅V 2G ! nétique est toujours 10 2 Cette force ne dépendant que de la position, on peut lui associer une énergie potentielle Ep telle que : ⃗ F = −⃗ grad ( Ep) . De l'expression du gradient en coordonnées sphériques : ⃗ grad E P= ∂EP ∂r . u⃗r + ∂EP 1 ∂EP 1 u⃗θ + u⃗ϕ r ∂θ r . sin(θ) ∂ ϕ on déduit : ∂ EP ∂E ∂E = −f (r ) ; ∂θP = 0 ; ∂ ϕP = 0. ∂r Ainsi Ep ne dépend que de r et est l'opposé d'une primitive de f(r). Remarque : le fait qu'une primitive soit défi­ nie à une constante près n'est pas gênant dans la mesure où seules les variations d'énergie potentielle ont un sens physique. II. Planéité de la trajectoire. Le moment cinétique au point O du point matériel M est, par définition : ⃗ = m⋅r⋅⃗ σ⃗O = m⋅⃗ OM ∧V ur∧V⃗ . ⃗ désigne le vecteur vitesse de M dans le repère d'étude. où V Le théorème du moment cinétique indique que la dérivée par rapport au temps de ce vecteur moment cinétique en O est égal au moment en O de la force de vecteur ⃗ F : d σ⃗0 = r⋅⃗ ur ∧ ⃗ F . dt Les vecteurs ⃗ F et ⃗ u r étant, par définition de la force centrale, colinéaires, on obtient : d σ⃗0 = 0 ∀ t soit : σ⃗0 : vecteur constant . dt Le vecteur moment cinétique en O a donc une direction et un sens fixes. Orientons le repère de sorte que : σ⃗0 = σ0⋅⃗ uy . Les propriétés du produit vectoriel et la définition du vecteur moment cinétique en O imposent : σ⃗0 ⊥⃗ OM et σ⃗0 ⊥ V⃗ . Le point M se déplace nécessairement dans le plan (Ozx). Plus généralement, on peut dire que, lorsqu'un point matériel est soumis à la seule action d'une force centrale, sa trajectoire est le plan orthogonal au vec­ teur moment cinétique contenant le centre attracteur O. Remarque : c'est pour cette raison que les satellites artificiels de la terre, dans la mesure où les attractions des autres astres sont négligeables, décrivent dans un repère géocen­ trique, des orbites dont les plans contiennent le centre de la terre. III. Loi des aires. Maintenant que nous avons montré que la tra­ jectoire est plane, nous pouvons repérer la posi­ tion de M par ses coordonnées polaires (r,) conformément au schéma ci­dessous. L'expression du vecteur vitesse est ainsi : ⃗ = dr ⋅u⃗r +r⋅d θ⋅u⃗θ . V dt dt L'expression du vecteur moment cinétique en O devient : dr dθ dθ σ⃗0 = m⋅r⋅u⃗r ∧ ⋅u⃗r + r⋅ ⋅u⃗θ = m⋅r 2⋅ ⋅u⃗y . dt dt dt Le vecteur moment cinétique étant constant, sa norme est une constante. La masse étant évi­ demment constante, nous obtenons : 2 dθ r⋅ = C : constante au cours du mouvement . dt ( ) Soit M la position du point matériel à la date t et ⃗ dl le déplacement élémentaire du point matériel entre les instants de date t et (t+dt). Ce vecteur a pour expression : ⃗ ⃗ dl = V⋅dt = dr⋅⃗ ur +r⋅d θ⋅⃗ uθ . L'aire élémentaire dS balayée par le vecteur position entre les instants de dates t et (t+dt) OM ∧ ⃗ dl . est la demie norme du produit vectoriel ⃗ 1 ⃗ ⃗ 1 2 dS = ⋅|OM∧ dl| = ⋅r ⋅d θ . 2 2 On définit alors la vitesse aérolaire A : dS 1 2 dθ 1 A = = ⋅r ⋅ = ⋅C . dt 2 dt 2 On vient donc ainsi de démontrer la loi des aires : la vitesse aérolaire étant une constante, les aires balayées par le vecteur position pendant des durées successives égales sont égales. Remarque : la vitesse aérolaire s'exprime simplement en fonction de C ; C est souvent ap­ pelée : constante des aires. IV. Formules de Binet. Il s'agit d'exprimer la vitesse et l'accélération en fonction des dérivées de r par rapport à , le temps disparaissant explicitement des expressions en remplaçant dθ C par 2 . dt r d (1/r ) dr dr d θ C dr ; = ⋅ = 2⋅ = −C⋅ dt d θ dt dθ r dθ dθ C ; r⋅ = dt r D'où la première formule de Binet : 1 ⃗ = C⋅ −d (1/r )⋅⃗ V ur + ⋅⃗ u . dθ r θ Remarque : cette relation est souvent utilisée pour exprimer l'énergie cinétique du point matériel : ( ) [( 2 ] d (1/r ) 1 1 1 ⋅m⋅v 2 = ⋅m⋅C2⋅ + 2 . 2 2 dθ r On obtient le vecteur accélération en dérivant par rapport au temps l'expression de la vi­ tesse. Dans la mesure où la force est centrale, la seconde loi de Newton impose que le vec­ teur accélération ⃗ a ait seulement une composante suivant ⃗ u r . Les termes suivant ⃗ uθ doivent nécessairement s'annuler entre eux et ne vont pas être explicités dans la démons­ tration ci­dessous. −d (1 /r ) −d (1 /r ) d ⋅⃗ ur d dθ dθ d u⃗r = ⋅⃗ ur + terme colinéaire à soit terme colinéaire à u⃗θ ; dt dt dt Nous l'avons montré pour la vitesse : dériver par rapport à t revient à dériver par rapport C à tout en multipliant par 2 : r −d (1 /r ) d 2 dθ C d (1/r ) ⋅⃗ ur = − 2 ⋅ ⋅⃗ ur ; dt r d θ2 1 d ⋅⃗ u r θ 1 d u⃗ = terme colinéaire à u⃗θ + ⋅ θ ; dt r dt d u⃗θ dθ C = − ⋅⃗ u = − 2⋅⃗ ur . dt dt r r Au final, en ne conservant que les termes colinéaires à ⃗ u r , on obtient la seconde formule de Binet : 2 C 2 d (1/ r ) 1 a = − 2⋅ ⃗ + ⋅u⃗r . r r d θ2 Ec = ( ) ( ) ) ( ) ( ) ( ) V. Cas particuliers des forces centrales gravitationnelles et électriques. V.1. Les constantes du mouvement. Nous allons maintenant nous limiter aux forces centrales telles que : k f (r ) = − 2 avec k : constante . r La source d'un tel champ de force peut être une distribution de matière à symétrie sphé­ rique de masse totale Mt dont le centre est le point O ; par exemple : un astre dont la ré­ partition de masse est à symétrie sphérique. Si on néglige l'influence de l’aplatissement de la terre à ses pôles, cela peut s'appliquer à l'étude des satellites de la terre dans un re­ père géocentrique. Cela peut aussi s'appliquer à l'étude d'une planète autour du soleil dans un repère héliocentrique si on néglige l'influence des autres planètes du système so­ laire…. Dans ce cas : k = G.Mt.m selon la loi de Newton sur la gravitation. La source peut aussi être une distribution de charges électriques à symétrie sphérique dont le centre est O et la charge totale Qt ; par exemple : une boule uniformément char­ gée en volume, une boule uniformément chargée en surface, une charge quasi ponctuelle… Si q désigne la charge portée par la particule ponctuelle de masse m, on ob­ tient , selon la loi de Coulomb : Qt⋅q . k =− 4⋅π⋅ϵ 0 Dans ces cas, l'énergie potentielle vérifie la relation : dE p d (1/ r 2 ) k = −f ( r) donc : E p = k⋅ = − . dr dr r Remarque : en considérant la constante d'intégration comme nulle, on choisit arbitraire­ ment le niveau d'énergie potentielle nulle à l'infini. Au cours du mouvement de la masse ponctuelle, nous avons donc deux grandeurs qui res­ tent constantes au cours du temps : Le moment cinétique en O ou plus simplement, l'expression de la constante des aires : 2 dθ ; C = r⋅ dt L'énergie mécanique dont l'expression peut s'écrire : 2 d (1 /r ) 1 1 k Em = ⋅m⋅C 2⋅ + 2 − . 2 dθ r r [( ) ] V.2. Les trajectoires possibles. Montrons d'abord que la trajectoire est nécessairement une conique dont O est un foyer. La seconde loi de Newton conduit à : 2 m⋅C 2 d (1/r ) 1 k m⋅⃗ a = − 2 ⋅ + ⋅u⃗r = − 2⋅⃗ ur . 2 r r dθ r Après simplification, nous sommes amenés à résoudre une équation différentielle du second ordre : d 2 (1/r ) 1 k + = ; 2 r dθ m⋅C2 1 k Solution particulière : ; = 2 rp m⋅C Solution de l'équation homogène (terme de droite nul) : 1 = A⋅cos (θ−ϕ) avec A et ϕ : constantes ; rh D'où la solution générale : 2 A⋅m⋅C 1+ ⋅cos (θ−ϕ) 1 k k = + A⋅cos(θ−ϕ) = . r m⋅C 2 m⋅C 2 k Il est toujours possible de choisir A > 0, le signe étant ajusté en fonction des conditions initiales grâce à la variable ϕ . On pose alors : ( ( ) ) m⋅C 2 = p : paramètre de la trajectoire ; k A⋅m⋅C 2 = e excentricité de la trajectoire . k L'équation polaire est alors de la forme : p . r = 1+e⋅cos (θ−ϕ) Nous obtenons bien l'équation polaire d'une conique. L'angle ϕ représente l'angle entre l'axe (Oz) et la directrice de la conique. V.3. Énergie mécanique du point matériel M. d (1/ r) e⋅sin(θ−ϕ) . = − dθ p L'expression de l'énergie mécanique déjà démontrée devient : m⋅C 2 2 Em = [ e ⋅sin2 (θ−ϕ)+ 1+ e2⋅cos2 (θ−ϕ)+ 2⋅e⋅cos (θ−ϕ) ]− kp⋅(1+e⋅cos( θ−ϕ)) . 2 2⋅p On remarque : k k2 m⋅C 2 k2 = et : = p m⋅C 2 p2 m⋅C 2 et : cos 2(θ−ϕ)+sin2 (θ−ϕ) = 1 . D'où l'expression générale de l'énergie : 2 k Em = ⋅(e 2−1) . 2 2⋅m⋅C Remarque : bien évidemment, cette expression ne dépend ni de r ni de puisque l'énergie mécanique se conserve au cours du mouvement. On peut ainsi distinguer trois cas : * Em > 0 ; alors e > 1 : la trajectoire est une branche d'hyperbole ; * Em = 0 ; alors e = 1 : la trajectoire est une parabole ; * Em < 0 ; alors 1>e⩾0 : la trajectoire est une ellipse ou un cercle dans le cas particulier : e = 0. On s'intéresse maintenant au cas particulier fréquent de la trajectoire elliptique. En supposant que l'axe (Oz) soit le grand axe de l'ellipse et que la situation = 0 corresponde au périgée de la trajectoire, on obtient : ϕ = 0 . D'où l'équation de la trajectoire : p r = . 1+e⋅cos (θ) p La distance de M à O au périgée vaut : r min = ; 1+ e p La distance de M à O à l'apogée vaut : r max = . 1−e 2⋅p La longueur a du demi grand axe vérifie : 2⋅a = r max + r min = . 1−e2 Donc : p m⋅C2 2 . e −1 = − = − a k⋅a Cela permet d'obtenir une expression simplifiée de l'énergie mécanique en fonction de a : k Em = − . 2⋅a