Vous propose le dossier : Actualités sur la voie glutamatergique et la maladie d’Alzheimer AVANT-PROPOS SOMMAIRE Coordination : Régis Bordet* La voie glutamatergique : aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA G. Pickering Maladie d’Alzheimer : dualité des effets physiologiques et pathologiques du glutamate D. Deplanque Glutamate et grandes fonctions cérébrales A. Eusebio, J. Micallef-Roll L e glutamate est, avec l’acide γ-amino-butyrique (GABA), l’un des deux principaux neuromédiateurs du cerveau puisque l’on estime que 90 % des synapses utilisent du glutamate pour leur fonctionnement, seul ou en combinaison avec d’autres neuromédiateurs (Magistretti, J Exp Biol 2006;209:2304-11). C’est un acide aminé excitateur, responsable d’une activation neuronale par opposition à l’effet inhibiteur du GABA. Le fonctionnement du glutamate est complexe dans la mesure où, selon le niveau d’intensité de libération, il peut présenter des effets aux conséquences opposées. À l’état physiologique, le glutamate régule de nombreuses fonctions. Sa libération est indispensable à la survie cellulaire ; il est l’acteur principal des phénomènes d’apprentissage et de mémorisation, même s’il interagit avec d’autres neuromédiateurs, en particulier l’acétylcholine, pour réguler le phénomène de potentialisation à long terme dans l’hippocampe. * Département de pharmacologie médicale, institut de médecine prédictive et de recherche thérapeutique, université et CHU de Lille. De plus, il est impliqué dans la régulation négative de fonctions psycho-comportementales, régulation négative contrebalancée par l’effet du GABA. Il joue également un rôle important dans la régulation de la motricité. Enfin, il peut, dans de nombreuses pathologies cérébrales, être libéré en excès et provoquer une toxicité neuronale (excitotoxicité). L’effet du glutamate est médié par de nombreux récepteurs : des récepteurs canaux ou ionotropiques (récepteurs N-méthyl-D-aspartate [NMDA], α-amino3-hydroxy-5 méthyl-4 isoxazole propionate [AMPA], kaïnate), des récepteurs métabotropiques couplés à une protéine G. Les récepteurs NMDA jouent un rôle majeur dans les effets du glutamate, dont ils sont les seuls récepteurs pharmacologiquement modulables. Des données récentes montrent que les récepteurs NMDA, par la diversité de leur composition moléculaire et de leur localisation sur le neurone, contribuent à la complexité des effets du glutamate. Si les récepteurs NMDA exprimés à la synapse sont surtout impliqués dans l’apprentissage, les récepteurs extra-synaptiques sont plus responsables de l’excitotoxicité. La complexité des rôles des récepteurs NMDA, relatifs à leur niveau d’activation, explique la diversité d’action de ses antagonistes : les effets des récepteurs NMDA, en effet, peuvent être variables selon leur affinité et leur mode de blocage. De par son caractère ubiquitaire et la diversité de ses rôles fonctionnels, le glutamate est impliqué dans la plupart des maladies neuropsychiatriques. Dans la maladie d’Alzheimer, notamment, son implication est double : physiopathologie des symptômes cognitifs et psychocomportementaux, d’une part, initiation et évolution du processus neuropathologique, d’autre part. Cette implication peut conduire à un double intérêt thérapeutique de la modulation du glutamate et de ses récepteurs tant pour le traitement symptomatique que pour d’éventuels effets disease-modifier. ■ La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 | 385 DOSSIER THÉMATIQUE Voie glutamatergique et maladie d’Alzheimer La voie glutamatergique : aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA The glutamatergic system: physiology and pharmacology of the NMDA receptor G. Pickering* L * Centre de pharmacologie clinique, CHU de Clermont-Ferrand. a première démonstration du rôle clé du glutamate comme neurotransmetteur du système nerveux central a été faite à la fin des années 1950, lorsque les propriétés excitatrices du glutamate et d’autres acides aminés sur une grande diversité de neurones centraux ont été mises en évidence (1). Neurotransmetteur excitateur le plus abondant du système nerveux central, le glutamate joue un rôle ubiquitaire dans la plupart des circuits neuronaux centraux. Les synapses glutamatergiques comportent des canaux ioniques (nommés “récepteurs ionotropiques” ou IGlu) ou un couplage à un messager secondaire impliquant la protéine G (récepteurs métabotropiques ou mGlu [1]). Les récepteurs ionotropiques, NMDA (N-méthyl-D-aspartate), AMPA (α-amino-3-hydroxy-5-méthyl-4-isoxazole propionate) et kaïnate sont des tétramères ou pentamères couplés à des canaux ioniques permettant le passage du sodium et, dans certaines circonstances, Tableau. Caractéristiques des récepteurs ionotropiques. Récepteur ionotropique NMDA Sous-unités Type NR1 NR1A à NR1H NR2 NR2A à NR2D NR3 NR3A et NR3B AMPA GLU 1 à GLU 4 Kaïnate GLU 5 à GLU 7 KA1 et KA2 Récepteur métabotropique mGLU 1 à mGLU 8 386 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 Groupes I, II, III du calcium (2). Ils sont composés de plusieurs sousunités (tableau) dont les différentes combinaisons et la distribution spatiale vont déterminer les propriétés pharmacologiques de ces récepteurs (2). Parmi ces quatre récepteurs, dont le rôle joué dans la transmission glutamatergique est de mieux en mieux cerné, ce sont les récepteurs NMDA, les plus complexes des récepteurs ionotropiques (3), qui jouent un rôle pivot au sein du système nerveux central, où ils sont en effet impliqués dans la transmission synaptique, la plasticité neuronale et l’excitotoxicité. Structure Les récepteurs NMDA sont composés d’associations de sous-unités et forment des hétéromultimères, contrairement aux AMPA ou kaïnate, et sont distribués au niveau du cerveau, du cortex, de l’hippocampe, du cervelet et de la moelle épinière, en majorité en postsynaptique, mais aussi en présynaptique ainsi que dans la glie (2). Les sous-unités NR1 existent sous huit isoformes et la plupart des sous-unités NR2 (sauf NR2A) et NR3 ont également plusieurs variantes (2, 3) [tableau]. Des études d’hybridation in situ ont montré que les ARNm des sous-unités des récepteurs NMDA présentent une distribution spatiale et temporelle hétérogène (2, 4) : si les sous-unités NR1 sont exprimées dans la plupart des neurones du système nerveux central (SNC) de l’âge embryonnaire à l’âge adulte, il existe des Résumé Le glutamate est le neurotransmetteur excitateur le plus abondant du système nerveux central des vertébrés, et, parmi les récepteurs glutamatergiques, les récepteurs NMDA jouent un rôle central dans la communication neuronale et la transmission synaptique. Les récepteurs NMDA sont formés d’associations de sous-unités groupées en di- ou trihétéromères ; la composition et la distribution spatiale de ces associations déterminent les caractéristiques pharmacologiques. De nombreux agents modulent la régulation de l’activité des récepteurs NMDA ; or, leur activité physiologique est essentielle pour un fonctionnement neuronal normal. La surstimulation de ces récepteurs est retrouvée lors d’atteintes neuronales aiguës et chroniques comme l’ischémie cérébrale, la démence ou la douleur neuropathique. L’efficacité des antagonistes des récepteurs NMDA, en particulier non compétitifs, n’est pas démontrée cliniquement. Le risque d’extrapolation est souvent limité par l’ampleur de leurs effets indésirables. changements des sous-unités NR2 au cours du développement postnatal. Au stade embryonnaire, les sous-unités NR2A et NR2C ne sont pas détectables alors que les sousunités NR2B et D peuvent l’être au niveau de la moelle épinière et de l’hypothalamus puis du cortex (4). En postnatal, il y a une tendance générale à un remplacement de la sous-unité NR2B par NR2A (4), changement qui a été impliqué dans l’accélération de la disparition du courant postsynaptique lors de la dépolarisation du canal NMDA, phénomène souvent associé à la plasticité synaptique des circuits neuronaux liée à l’activité. À l’âge adulte, les récepteurs NMDA contenant NR2C (ou D) sont localisés essentiellement dans le cervelet et NR2B, dans l’encéphale ; NR2A est localisé de manière ubiquitaire (4). Traditionnellement, les récepteurs NMDA consistent en un dimère de dimères avec deux unités NR1 (obligatoires) et deux unités NR2 (3). Toutefois, de nombreux neurones expriment au moins deux sous-unités NR2 qui peuvent former des di- ou/et des trihétéromères dans la même cellule. Aujourd’hui, la plupart des chercheurs désignent la population des récepteurs NMDA comme constituée potentiellement des groupements di- et trihétéromériques (NR1/NR2A et NR1/NR2A/NR2B) sous l’appellation de “type NR2A” ou “récepteurs NMDA contenant NR2A” (3). Au cours du vieillissement physiologique, une diminution de l’expression protéique de certaines sous-unités, en particulier de la sous-unité NR2B, a été montrée au niveau du cortex cérébral préfrontal et du noyau caudé (5). Il existe aussi des variations dans la composition en sous-unités NR2 en différents sites d’une cellule. De plus, il faut noter que la localisation des récepteurs n’est pas uniquement neuronale, puisque les récepteurs NMDA sont également présents dans les astrocytes et les oligodendrocytes (responsables de la myélinisation) [3, 6] ; en effet, le glutamate est l’un des éléments, avec la D-sérine et via le récepteur NMDA, de la communication neurogliale. Les récepteurs NMDA sont localisés dans les régions synaptique et extrasynaptique ; certains sont en périsynaptique et sur la membrane postsynaptique (3). Les sous-unités NR2B et NR2D semblent majoritaires en extrasynaptique, où leur activité excessive entraîne des dommages neuronaux, tandis que les sous-unités NR2A seraient Mots-clés Glutamate Récepteurs NMDA Mémantine préférentiellement synaptiques et essentielles pour une fonction neuronale normale (3). La structure du récepteur NMDA montre que l’unité NR1 porte le site de liaison de la glycine. La sousunité NR2 porte le site de liaison du glutamate et le type de sous-unité NR2 détermine les propriétés additionnelles biophysiques et pharmacologiques incluant les sites de liaison au zinc (Zn 2+), à l’ion H+, aux polyamines, et le site de S-nitrosylation, groupe sulfhydryle cystéine qui réagit avec l’oxyde d’azote (NO) [4]. Quatre domaines transmembranaires ont été décrits. Ces récepteurs sont ancrés au niveau membranaire par des protéines activées par le stress, et il est suggéré que cet ancrage pourrait être un moyen par lequel le stress lié à l’activité neuronale accroît la transmission excitatrice en réponse à un stimulus (4). De plus, le récepteur NMDA ferait partie d’un complexe comprenant au moins 100 protéines différentes. Le glutamate libéré est rapidement éliminé de l’espace extracellulaire par un système de transport à haute affinité présent au niveau des terminaisons nerveuses et des cellules gliales environnantes. Ce système de transport est considéré comme responsable de l’arrêt de l’action du neurotransmetteur et de la prévention de l’atteinte neuronale par activation excessive des récepteurs du glutamate. Il existe également des transporteurs vésiculaires du glutamate (comme VGLUT1-3) enchâssés dans la membrane des vésicules synaptiques par 10 domaines transmembranaires (3). Des expériences de transfection de cellules ou de neurones non glutamatergiques ont permis d’établir sans ambiguïté que l’expression de VGLUT1 et de VGLUT2 suffit à induire une libération de glutamate (7). Enfin, le glutamate est recapté au niveau des terminaux glutamatergiques neuronaux et des astrocytes qui entourent la fente synaptique. Propriétés physiologiques Activité des récepteurs NMDA L’activité physiologique des récepteurs NMDA est essentielle pour un fonctionnement neuronal normal (8). La plupart des neurones (et aussi la glie) contiennent des concentrations élevées de glutamate La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 | 387 DOSSIER THÉMATIQUE Voie glutamatergique et maladie d’Alzheimer La voie glutamatergique : aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA (10 mM). Après séquestration dans les vésicules synaptiques, le glutamate est libéré en quelques millisecondes pour permettre la communication avec d’autres neurones via les terminaisons synaptiques (8). L’activité NMDA a besoin de glutamate, de glycine et/ou, comme cela a été montré récemment, de D-sérine, pour son activation et elle est modulée par le magnésium extracellulaire, qui bloque de manière voltage-dépendante le canal NMDA (8). Dans des conditions normales, pour permettre l’entrée de calcium dans la cellule, il faut simultanément une libération présynaptique de glutamate agissant sur le récepteur NMDA postsynaptique et une dépolarisation de la membrane postsynaptique (à – 40mV, par un autre stimulus, via des courants initiés par les récepteurs non-NMDA, les récepteurs AMPA par exemple), dépolarisation permettant la levée du bloc Mg2+ au niveau du canal ionique du récepteur NMDA, suivie de l’ouverture rapide du canal du récepteur NMDA et de l’afflux de calcium (et d’autres ions) dans la cellule (8). Une cinétique très lente d’activation/désactivation caractérise les récepteurs NMDA : au cours de la transmission synaptique, leur activation génère un courant d’apparition et de disparition très lent (bien plus lent que le courant au sein des récepteurs AMPA). Le récepteur NMDA s’ouvre environ 10 millisecondes après que le glutamate a été détecté dans la fente synaptique, et continue de s’ouvrir et de se fermer pendant plusieurs centaines de millisecondes, jusqu’à ce que le glutamate se détache de son site de liaison. La disparition du courant postsynaptique excitateur médié par le récepteur NMDA (20 millisecondes pour NR1/ NR2A versus plusieurs secondes pour les récepteurs NR1/NR2D) et l’affinité apparente pour les récepteurs du glutamate sont tous deux fortement influencés par la nature des sous-unités NR2 impliquées (3). L’augmentation de calcium est le déclencheur d’une série d’événements, notamment de l’activation de protéines kinases conduisant à la phosphorylation des récepteurs et à l’augmentation de leur sensibilité. Modulation des récepteurs NMDA La modulation des récepteurs NMDA est faite par de nombreux agents (2). Pour activer le canal, deux molécules de glycine et deux molécules de glutamate doivent se lier aux récepteurs NMDA de l’hippocampe (2). La fonction modulatrice du Mg 2+ est complexe : des études de liaison ont montré qu’une faible concentration de Mg2+ favorise la fixation d’antagonistes comme le MK801 (3). Il en est de 388 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 même pour le Ca2+, qui module également l’activité du récepteur NMDA. Le Zn2+ bloque le récepteur NMDA de manière non compétitive et indépendante du voltage ; il peut être considéré comme neuromodulateur, car l’activation de neurones glutamatergiques dans certaines régions du cerveau conduit à la libération de Zn2+. Le plomb (Pb2+), métal lourd et polluant environnemental ubiquitaire, a un effet délétère sur l’apprentissage et la mémoire ; sa distribution dans le cerveau est similaire à celle du Zn2+. En présence de concentrations faibles de glycine, le Pb2+ potentialise l’activation du récepteur NMDA et inversement avec des concentrations saturées. Le Cu2+ influence fortement les réponses induites par le récepteur NMDA dans des neurones en culture et peut agir directement sur le site de reconnaissance du NMDA. Un autre exemple de la régulation allostérique du récepteur NMDA concerne l’action modulatrice des polyamines. Présentes en fortes concentrations à l’état physiologique dans les tissus et le cerveau, les polyamines (spermine, spermidine, etc.) sont produites en grandes quantités dans certains états pathologiques (ischémie cérébrale, traumatisme). De nombreux sites de liaison sur le récepteur NMDA ont été proposés, mais leur mode d’action n’est pas direct : ils potentialisent ou inhibent les réponses médiées par le glutamate par des mécanismes glycine et/ou voltage-dépendants. Le récepteur NMDA est extrêmement sensible à l’ion H+, et une forte acidification supprime l’activité du récepteur NMDA : le pH de l’espace extracellulaire du système nerveux central des vertébrés est très plastique et peut devenir alcalin ou acide lors de l’activité neuronale. NR1 est inhibé par le proton : l’étude des huit isoformes de NR1 a confirmé que c’est l’exon 5 qui contrôle l’inhibition par H+ ; la coexpression de NR1 et NR2 a montré que cela concerne NR1/NR2A, NR1/NR2B, NR1/NR2D et ne concerne pas NR1/ NR2C. Cette modulation représente peut-être un rétrocontrôle protecteur des neurones lors d’une acidification de l’espace extracellulaire par l’acide lactique dans des conditions d’hypoxie ou d’ischémie. L’état d’oxydoréduction modulerait également le récepteur NMDA : des agents sulfhydryles avec de fortes propriétés oxydantes ou réductrices modulent in vitro les réponses du récepteur NMDA. Cette modulation se ferait au niveau d’un site redox sur le récepteur NMDA, consistant en groupements thiols, la réduction entraînant l’augmentation de l’activité du récepteur NMDA, l’oxydation sa diminution, et le monoxyde d’azote (NO) est reconnu aujourd’hui comme un inhibiteur de la réponse NMDA. De plus, les études moléculaires ont montré que la présence En association dans le traitement de l’épilepsie partielle de l’adulte avec ou sans généralisation secondaire POUR ALLER DE L’AVANT zonisamide 1 prise par jour possible 1 ou 2 prises par jour en phase d’entretien • Certains patients traités par Zonegran® ont développé des calculs rénaux. La prudence est recommandée en cas d'administration de Zonegran® à des patients ayant des facteurs de risque de lithiase rénale. • Administration avec prudence chez les patients traités de manière concomitante par des inhibiteurs de l’anhydrase carbonique, par exemple le topiramate, car pas de données suffisantes pour exclure la possibilité d'une interaction pharmacodynamique • Des cas d’hypohidrose et d’hyperthermie ont été décrits, essentiellement chez des patients pédiatriques. Une hyperthermie nécessitant une hospitalisation a été diagnostiquée chez certains patients. • Il est recommandé de surveiller les taux de lipase et d’amylase pancréatiques chez les patients qui développent les symptômes et signes cliniques de pancréatite. • Si myalgies et/ou faiblesse musculaire sévères avec ou sans fièvre : contrôler les marqueurs des lésions musculaires, notamment les taux sériques de créatine phosphokinase et d’aldolase. • Les femmes en âge de procréer doivent utiliser une méthode contraceptive adéquate pendant le traitement et le mois suivant l’arrêt du traitement • Les gélules de Zonegran® 100 mg contiennent un colorant jaune appelé jaune soleil FCF (E110), qui peut provoquer des réactions allergiques. • Il existe peu de données d’études cliniques chez des patients pesant moins de 40 kg. La prudence est donc recommandée pour le traitement de ces patients. • Zonegran® peut provoquer une perte de poids. Interactions avec d’autres médicaments et autres formes d’interactions*. Grossesse et allaitement*. Effets sur l’aptitude à conduire des véhicules et à utiliser des machines*. Effets indésirables* : Effets indésirables observés le plus fréquemment dans les essais contrôlés du Zonegran® administré en association : somnolence, vertiges et anorexie. Effets indésirables associés observés lors des études cliniques et en pharmacovigilance : Très fréquents (≥ 1/10) : Anorexie, Agitation Irritabilité, Etats confusionnels, Dépression, Ataxie, Vertiges, Troubles de la mémoire, Somnolence, Diplopie, Diminution des bicarbonates • Fréquents (≥ 1/100 < 1/10) : Ecchymose, Hypersensibilité, Labilité émotionnelle, Anxiété, Insomnies, Troubles psychotiques, Bradyphrénie, Troubles de l’attention, Nystagmus, Paresthésies, Troubles d’élocution, Tremblement, Douleurs abdominales, Constipation, Diarrhées, Dyspepsie, Nausées, Eruption, Lithiase rénale, Fatigue, Syndrome pseudo-grippal, Pyrexie, Perte de poids • Peu Fréquents (≥ 1/1 000 < 1/100) : Pneumonie, Infection des voies urinaires, Hypokaliémie, Nervosité, Agressivité, Idées suicidaires, Tentative de suicide, Convulsions, Vomissements, Cholécystite, Lithiase biliaire, Calculs urinaires • Très rares (< 1/10 000 y compris cas isolés) : Agranulocytose, Anémie aplasique, Leucocytose, Leucopénie, Lymphadénopathie, Pancytopénie, Thrombocytopénie, Acidose métabolique, Hallucinations, Amnésie, Coma, Crises tonico-cloniques, Syndrome myasthénique, Syndrome malin des neuroleptiques, Etat de mal épileptique, Dyspnée, Pneumonie de déglutition, Troubles respiratoires, Pancréatite, Lésions hépatocellulaires, Anhidrose, Erythème multiforme, Prurit, Syndrome de Stevens-Johnson, Nécro-épidermolyse bulleuse aiguë (syndrome de Lyell), Rhabdomyolyse, Hydronéphrose, Insuffisance rénale, Anomalies urinaires, Elévation de la créatine-phosphokinase (CPK), Hypercréatininémie, Augmentation de l’urée sanguine, Anomalies des tests hépatiques, Coup de chaleur • Des cas isolés de mort subite inexpliquée chez des patients épileptiques (SUDEP: Sudden Unexplained Death in Epilepsy Patients) ont également été décrits chez des sujets traités par Zonegran®. Informations complémentaires pour les populations particulières : L’examen des données de pharmacovigilance suggère que les patients âgés de 65 ans ou plus signalent une plus grande fréquence des effets suivants par rapport à l’ensemble de la population : syndrome de Stevens-Johnson et syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse. Surdosage*. PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES : Le zonisamide est un dérivé du benzisoxazole. C’est un antiépileptique avec une faible activité anhydrase carbonique in vitro. Sa structure chimique n’est pas apparentée à d’autres antiépileptiques. Propriétés pharmacodynamiques* : Antiépileptique • Le mécanisme d’action du zonisamide n’est pas totalement élucidé, mais il semblerait qu’il agisse sur les canaux sodiques et calciques voltage-dépendants, en bloquant les décharges neuronales synchrones, en réduisant la propagation des décharges épileptiques et en interrompant ainsi l’activité épileptique qui en résulte. Le zonisamide possède également un effet modulateur sur l’inhibition neuronale dans laquelle le GABA sert de médiateur. Propriétés pharmacocinétiques*. Données de sécurité précliniques*. DONNEES PHARMACEUTIQUES : Liste des excipients* - Durée de conservation : 3 ans. Précautions particulières de conservation : A conserver à une température ne dépassant pas 30°C. Nature et contenance de l’emballage extérieur - Présentations et n° d’identification administrative Prix : ZONEGRAN® 25 mg : EU/1/04/307/001 - AMM n° 365 942.6 : 14 gélules (blanc-blanc) sous plaquettes thermoformées PVC/PVDC/aluminium. - 15,12€. ZONEGRAN® 50 mg : EU/1/04/307/010 -AMM n° 369 203.3 : 14 gélules (blanc-gris) sous plaquettes thermoformées PVC/PVDC/aluminium. - 15,12€. ZONEGRAN® 100 mg : EU/1/04/307/004 -AMM n° 365 945.5 : 56 gélules (blancrouge) sous plaquettes thermoformées PVC/PVDC/aluminium. - 54,97 €. - DATE DE PREMIERE AUTORISATION/ RENOUVELLEMENT : 10 Mars 2005. CONDITIONS DE PRESCRIPTION ET DE DELIVRANCE : Liste I. Rbsé Sec.Soc. 65%. Coll. - TITULAIRE DE L’AMM : Eisai Limited, European Knowledge Centre, Mosquito Way, Hatfield, Hertfordshire, AL10 9SN, Royaume-Uni. Représentant local en France / Information médicale : EISAI S.A.S. - Tour Manhattan - 5/6, place de l’Iris - 92095 PARIS LA DEFENSE 2 : 01.47.67.00.05. INFORMATION REVISEE EN : 11 juin 2009. ZON 107-05/09 DENOMINATION : ZONEGRAN® 25 mg, gélules (blanches). ZONEGRAN® 50 mg, gélules (blanc-gris). ZONEGRAN® 100 mg, gélules (blanc-rouge). COMPOSITION : ZONEGRAN® 25 mg : zonisamide 25 mg. ZONEGRAN® 50 mg : zonisamide 50 mg. ZONEGRAN® 100 mg : zonisamide 100 mg. Excipient q.s.p. DONNEES CLINIQUES : Indications thérapeutiques : En association chez le patient adulte dans le traitement de l’épilepsie partielle avec ou sans généralisation secondaire. Posologie et mode d’administration* : Voie orale. • Adultes : En association au traitement en cours avec adaptation de la posologie en fonction de la réponse clinique. Des posologies quotidiennes de 300 mg à 500 mg se sont révélées efficaces, bien que certains patients, particulièrement ceux qui ne prennent pas de médicaments inducteurs du CYP3A4, puissent répondre à des doses inférieures. Dose initiale recommandée : 50 mg/j en deux prises. La dose peut être augmentée à 100 mg/j après une semaine et la posologie peut ensuite être augmentée tous les sept jours, par paliers de 100 mg au maximum. Insuffisant rénal, insuffisant hépatique ou patients non traités par des inducteurs du CYP3A4 : Respecter un intervalle de deux semaines. Administration possible en une ou deux prises quotidiennes après la phase d’augmentation de posologie (CTJ : 2.94 € - 4.91 €) • Personnes âgées : Peu de données. Prudence lors de l’instauration du traitement. Le profil de sécurité doit également être considéré. • Enfants et adolescents : Administration non recommandée. • Insuffisance rénale : Prudence recommandée ; il peut être nécessaire d’augmenter plus lentement la posologie. • Insuffisance hépatique : L’administration aux patients présentant une insuffisance hépatique sévère n’est pas recommandée. La prudence est recommandée chez les patients ayant une insuffisance hépatique légère à modérée ; il peut être nécessaire d'augmenter plus lentement la posologie. • Effet des aliments : Zonegran® peut être pris au cours ou en dehors des repas. • Arrêt du traitement par Zonegran® : Interruption progressive. Contre-indications : Hypersensibilité au zonisamide, à l’un des excipients ou aux sulfamides. Mises en garde spéciales et précautions d’emploi* : • Eruptions cutanées graves, y compris des cas de syndrome de Stevens-Johnson • L’arrêt éventuel chez les patients épileptiques doit se faire de manière progressive pour limiter les risques de crises convulsives à l’arrêt du traitement. • Zonegran® est un dérivé du benzisoxazole qui comporte un radical sulfamide. Les effets indésirables graves d’origine immunitaire qui sont associés aux médicaments contenant un radical sulfamide incluent des éruptions cutanées, des réactions allergiques, et des troubles hématologiques graves, notamment des anémies aplasiques pouvant être mortelles dans de très rares cas. • Des cas d’agranulocytose, de thrombopénie, de leucopénie, d’anémie aplasique, de pancytopénie et de leucocytose ont été signalés. Les données permettant d’évaluer la relation, le cas échéant, entre la dose et la durée du traitement et ces événements sont insuffisantes. • Des idées et comportements suicidaires ont été rapportés chez des patients traités par des antiépileptiques dans plusieurs indications. *Pour une information complète, consulter le RCP disponible sur demande. DOSSIER THÉMATIQUE Voie glutamatergique et maladie d’Alzheimer La voie glutamatergique : aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA de deux cystéines au niveau de la sous-unité NR1 est nécessaire pour la modulation redox et suggèrent que l’état redox de ces cystéines entraîne des changements conformationnels du récepteur NMDA assez similaires aux changements induits par d’autres modulateurs allostériques, H + et spermine. La modulation du récepteur NMDA passe aussi et surtout par la phosphorylation des protéines. La protéine kinase C (PKC) potentialise le récepteur NMDA (phosphorylation sur NR1), la protéine tyrosine kinase (PTK) module l’activité NMDA (phosphorylation sur NR2) et la protéine tyrosine phosphatase (PTP) la diminue. Enfin, l’actine, composante du cytosquelette, la dopamine et l’hista­mine sont également des modulateurs. Comme pour la majorité des récepteurs membranaires, la désensibilisation concerne également le récepteur NMDA, avec un rôle probable des concentrations de Ca 2+ et de glycine, mais ce phénomène est encore très mal connu (3). Physiopathologie du récepteur NMDA De très nombreuses études se sont intéressées à l’implication des récepteurs NMDA dans la survie et la maturation neuronales, la migration neuronale, la plasticité synaptique, l’induction de la potentialisation à long terme (PLT) avec un rôle dans l’apprentissage de tâches, la mémoire et la neuro­ dégénérescence (2). Les études de souris transgéniques pour différentes sous-unités de récepteur NMDA ont apporté des informations sur les pathologies psychiatriques : alors que l’inactivation complète du gène codant la sous-unité NR1 est létale en période néonatale immédiate, la réduction de l’expression de cette protéine (à 5 % de la valeur normale) induit des symptômes retrouvés chez les patients schizophrènes (diminution des interactions sociales et sexuelles, augmentation des stéréotypies et de l’activité motrice) [5]. D’autre part, la sur­expression par transgenèse du gène codant pour la sous-unité NR2B procure de meilleures capacités d’apprentissage et de mémorisation. Pendant l’apprentissage et la mémorisation, de grandes concentrations de glutamate synaptique sont libérées de façon transitoire. Le canal du récepteur NMDA serait un substrat biochimique de l’apprentissage. Toutefois, la présence en quantité trop importante ou pour une durée trop prolongée de glutamate peut être délétère et exciter la cellule jusqu’à la mort neuronale (excitotoxicité) [8, 9]. Une libération excessive de glutamate au sein du système nerveux et 390 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 une excitotoxicité peuvent être dues à de nombreuses agressions, qu’elles soient aiguës, comme un accident ischémique cérébral, un traumatisme crânien ou une épilepsie, ou chroniques, comme les maladies chroniques neurodégénératives incluant la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, la maladie de Huntington, la sclérose latérale amyotrophique, la démence associée au sida, la sclérose en plaques et la sensibilisation centrale de la douleur (8, 2). Toutes ces pathologies, d’étiologies différentes, ont une voie finale commune, l’atteinte neuronale, par surstimulation des récepteurs glutamatergiques, en particulier ceux de type NMDA. Les mécanismes sont légèrement différents selon leur caractère aigu ou chronique (8). Lors d’une atteinte aiguë, la libération de grandes quantités de glutamate entraîne une dépolarisation des cellules, qui, en mourant par nécrose (ou, plus lentement, par apoptose), libèrent encore plus de glutamate. Cela entraîne une série d’événements autodestructeurs et une mort cellulaire pouvant durer des heures et même des jours après la lésion initiale. Lors de maladies chroniques neurodégénératives, il semble que ce soit l’exposition chronique à des concentrations modérément élevées de glutamate ou à une hyperactivité des récepteurs au glutamate qui entraîne une mort cellulaire par apoptose (8). La réponse du récepteur NMDA est fonction non seulement de la concentration en glutamate ou en agoniste mais aussi de la cinétique on-off dans le récepteur. L’hyperactivité des récepteurs NMDA peut être présente avec des concentrations en glutamate normales et fait suite à une atteinte des neurones qui se dépolarisent, ce qui lève le blocage du récepteur par l’ion Mg2+ (8). Cette hyperactivité et l’influx de Ca2+ entraînent des processus délétères, avec une surcharge calcique au niveau mitochondrial, une stimulation de l’enzyme oxyde nitrique synthétase (NOS) conduisant à une production importante de NO et de peroxynitrite, une formation de radicaux libres, une stimulation de MAP kinase p38 activatrice des facteurs de transcription qui agissent sur le noyau et vont influencer l’apoptose (2, 8). Les processus physiologique et physiopathologique se rejoignent au niveau de la plasticité synaptique au cours de la PLT et de la sensibilisation centrale de la douleur. Le modèle de la PLT place le récepteur NMDA au cœur de la plasticité synaptique dans les phénomènes d’apprentissage et de mémorisation au niveau de l’hippocampe (10), avec plus de cent molécules impliquées comme médiatrices ou modulatrices. Beaucoup d’entre elles sont aussi impliquées dans la sensibilisation centrale spinale et dans la genèse de l’hypersensibilité à la douleur. Les similarités entre ces deux formes de plasticité synaptique sont frappantes, en particulier la régulation post-traductionnelle des récepteurs AMPA et NMDA, la circulation des récepteurs AMPA, l’activation de la voie ERK-CREB. Il existe toutefois des différences qui méritent d’être étudiées de plus près, de même que les rôles spécifiques joués par NK1 et COX-2 dans le phénomène de sensibilisation à la douleur et non dans la PLT. Propriétés pharmacologiques Récepteur NMDA et PLT Les études pharmacologiques concernant les récepteurs NMDA se sont intéressées à la PLT et à la suractivation du récepteur. L’approche actuelle d’exploration des mécanismes sous-tendant la PLT utilise de plus en plus le champ de la biologie moléculaire avec des souris génétiquement modifiées (11). Toutefois, l’approche pharmacologique a permis de manipuler la PLT et d’évaluer ses effets sur l’apprentissage et sur la mémoire. En particulier, a été utilisé un antagoniste compétitif du récepteur NMDA, l’AP5 (acide 2-amino-5-phosphopentanoïque). Les résultats obtenus ont affiné le rôle important des récepteurs NMDA dans la mémoire de travail spatiale et non spatiale ; leur rôle dans l’apprentissage au niveau de l’hippocampe n’est pas encore bien établi (11). Récepteur NMDA et excitotoxicité Le récepteur NMDA a été la cible pharmacologique de nombreux traitements, en particulier des antagonistes dans le contexte de l’excitotoxicité. Ces antagonistes peuvent être classés en grands groupes pharmacologiques selon le site d’action sur le récepteur NMDA (12) : site de reconnaissance du NMDA (agoniste), site glycine (co-agoniste), canal ionique, sites modulateurs incluant les sites redox, proton, Zn2+ et polyamines (8, 13). Pour être acceptable en clinique, une thérapie antiexcitotoxique devrait bloquer l’activation excessive du récepteur NMDA en maintenant intacte la fonction normale, en particulier sur les fonctions cognitives, et cela sans effets indésirables (8). Les antagonistes compétitifs du glutamate ou de la glycine sur leur site agoniste et les antagonistes non compétitifs du site canalaire bloquent la fonction normale du récepteur et entraînent des effets secondaires psychodyslep- tiques avec agitation, hallucinations, altération de la perception, catatonie et très communément nausées et vomissements (13). Ces médicaments ont également un effet sympathomimétique entraînant une hypertension artérielle (13). Des antagonistes compétitifs (tels que le selfotel ou le gavestinel) ont été utilisés au cours d’essais cliniques dans l’accident vasculaire cérébral (AVC) et le traumatisme crânien (TC), mais les résultats obtenus n’étaient pas probants. D’une part, leurs effets indésirables étaient trop sérieux, d’autre part la méthodologie utilisée pour certaines études était inadéquate, le nombre de sujets étant insuffisant ou les critères d’évaluation mal définis. Le groupe des antagonistes non compétitifs bloqueurs du canal NMDA a eu plus de succès dans les essais cliniques. Un antagonisme non compétitif est défini comme un mécanisme d’inhibition dont l’action dépend de l’activation préalable du récepteur par l’agoniste (8). Ces médicaments bloquent le canal lorsqu’il est ouvert et sont particulièrement efficaces lors d’une activité excessive et pathologique du récepteur NMDA. Les détails de la cinétique du blocage (en particulier la vitesse de fin d’action [off-rate]) [8] sont déterminants pour éviter les effets indésirables. MK801 est un antagoniste non compétitif à haute affinité ; c’est un bon bloqueur de l’excitotoxicité, mais il a un off-rate lent, et bloque progressivement les fonctions normales (8). Il en est de même pour la phencyclidine (PCP) et pour la kétamine, qui entraînent l’une des hallucinations et l’autre une somnolence (8). La cinétique rapide on-off et l’affinité modérée de la mémantine ont été mises en avant pour expliquer son efficacité dans la maladie d’Alzheimer (13). En effet, le temps de présence de la mémantine dans le récepteur est suffisant pour bloquer les effets du glutamate en excès, tout en préservant l’activation physiologique du récepteur NMDA requise pour l’apprentissage et la mémoire lorsqu’elle s’en retire rapidement. Dans l’épilepsie, la maladie de Huntington, la maladie de Parkinson et la fatigue, les antagonistes du récepteur NMDA ont été testés avec des degrés variables de rigueur et d’efficacité (13). Récepteur NMDA et douleur De nombreux essais ont exploré le rôle de la kétamine dans l’antalgie, en particulier postopératoire (14). Comme adjuvant, la kétamine a montré un effet antalgique modeste, avec une réduction de la consommation de morphine mais avec un risque faiblement augmenté d’hallucinations (13, 14). Le rôle La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 | 391 DOSSIER THÉMATIQUE Voie glutamatergique et maladie d’Alzheimer La voie glutamatergique : aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA exact de la kétamine dans la douleur n’a pu être défini sur la base de ces données (13). Dans le cadre de l’antalgie préventive, la kétamine et le dextrométhorphane ont montré un effet antalgique (13-15). Dans le traitement de la douleur chronique et neuropathique, les résultats avec ces médicaments, comme avec l’amantadine, sont variables, avec des effets indésirables souvent limitants. On ne peut conclure à leur efficacité (13). Le magnésium, bloqueur naturel mais faible (contrairement au MK801) du canal NMDA, a fait l’objet de recherches précliniques (16). Il a également été utilisé dans plusieurs essais cliniques sur la douleur, avec des résultats variables, le plus souvent défavorables (13). Certains antagonistes du récepteur NMDA ont un profil pharmacologique plus large que la seule action sur le récepteur NMDA : l’éliprodil (spécifique de NR2) et le rémacémide sont des bloqueurs des canaux sodiques (13) ; le dexanabinol est un cannabinoïde de synthèse présentant des propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes (13). La part exacte jouée par le récepteur NMDA dans la réponse thérapeutique obtenue n’est pas clairement déterminée (13). Vers des antagonistes du récepteur NMDA sur mesure ? C’est pourquoi, afin de mieux comprendre les mécanismes physiologiques et pathologiques des récepteurs NMDA et de pouvoir développer des traitements, il est important d’approfondir nos connaissances concernant le lien entre ces mécanismes et les sous-unités des récepteurs NMDA. Il serait important d’étudier les antagonistes spécifiques de chaque sous-unité, mais cela n’a été fait aujourd’hui que pour les récepteurs NR1 et NR2B (3). Les antagonistes non compétitifs bloqueurs du canal, comme la phencyclidine, l’amantadine, la mémantine, le MK801, le felbamate, et, à un moindre degré, les antagonistes compétitifs (AP5, D-CCPene, conantokine G, DAP-7, NVP-AAM077) ont une sélectivité modérée pour certaines combinaisons de sousunités (3). La sensibilité à MK801, antagoniste non compétitif à haute affinité, est plus grande pour les recombinants des récepteurs NR1/NR2A et NR1/ NR2B que pour NR1/NR2C. L’ifenprodil, antagoniste non compétitif (activité-dépendant, voltageindépendant), se lie à NR2B au niveau du domaine N-terminal leucine/isoleucine/valine-binding protein (LIVBP) [3]. Son IC50 (concentration conduisant à la moitié de l’inhibition maximale) est 400 fois plus 392 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 basse pour les récepteurs contenant NR2B que pour ceux contenant NR2A, C ou D. La kétamine et la mémantine ne semblent pas avoir de spécificité pour un sous-type particulier de récepteur NMDA. Plusieurs phényléthanolamines, l’halopéridol et les dérivés de l’ifenprodil (Ro 25-6981 et CP-101,606 [traxoprodil]) antagonisent également NR1/NR2B, certains de manière encore plus marquée que l’ifenprodil, probablement en augmentant leur sensibilité à l’inhibition par l’ion H + (3). Le zinc (inhibiteur non compétitif) se lie au domaine LIVBP de la sous-unité NR2A avec une sélectivité 50 fois plus grande que pour NR2B, mais avec un degré d’inhibition partiel de 70 à 80 % similaire à celui de l’ifenprodil et de ses dérivés sur les récepteurs NR2B. Cependant, ces antagonistes non compétitifs des récepteurs NMDA ont une préférence pour les sous-types NR2 correspondants supérieure à celle de tous les antagonistes compétitifs, tels que la conantoxine G, le DAP-7 ou le NVP-AAM077 (3). Lorsque le récepteur NMDA se présente sous forme trihétéromérique (NR1/NR2A/NR2B), la présence d’un seul NR2A (pour le zinc) ou NR2B (pour l’ifenprodil) est suffisante pour assurer une grande affinité, avec toutefois une inhibition maximale moindre que pour des récepteurs dihétéromériques (3). Des travaux récents montrent qu’il est impossible de bloquer efficacement des récepteurs NMDA trihétéromériques (17) et suggèrent qu’il faudra d’abord trouver des antagonistes sélectifs pour NR1/NR2A, NR1/NR2B, NR1/NR2C (3). En effet, peu de pistes pharmacologiques existent encore pour bloquer NR2A, C et D : on citera PPDA ([±]-cis-1-[phenanthren-2yl-carbonyl]piperazine2,3-dicarboxylic acid), un inhibiteur compétitif de NR2C et NR2D ou TPEN (N,N,N’,N’-tetrakis-[2pyridylmethyl]-ethylenediamine), un chélateur de l’ion Zn2+ qui agit au niveau de NR2A (17). Collaboration entre récepteurs du système glutamatergique Au sein du système glutamatergique, le récepteur NMDA est le médiateur principal de la transmission excitatrice rapide de la plupart des neurones centraux. Les autres récepteurs au glutamate, AMPA, kaïnate et les récepteurs métabotropiques ont un rôle propre de mieux en mieux connu dans la transmission synaptique (2), et leur collaboration déterminante avec les récepteurs NMDA est un domaine de recherche très actif, dont nous citerons deux exemples. Dans le domaine de la PLT, la plasticité synaptique au niveau de l’hippocampe requiert les récepteurs NMDA pour son induction et les AMPA glutamate receptor A (GLuR-A) pour son expression continue (12). Dans le domaine de la douleur et de la sensibilisation centrale, l’hypothèse prévalente était que l’activation de kinases dépendait du flux intracellulaire de calcium après activation des récepteurs AMPA et, en cas de persistance du stimulus, des récepteurs NMDA (16). Des travaux récents ont montré que les signes de la sensibilisation centrale, l’hyperalgie (douleur excessive en réaction à un stimulus douloureux) et l’allodynie (douleur en réaction à un stimulus normalement non douloureux) mettent en jeu les récepteurs métabotropiques du groupe I (et également d’autres récepteurs couplés à la protéine G) au niveau de la corne dorsale de la moelle et que ceux-ci sont couplés au récepteur NMDA (16). Les récepteurs métabotropiques du glutamate entraînent ainsi un enchaînement de traduction du signal qui implique les tyrosine kinases Src, protéines régulatrices des récepteurs NMDA. La douleur est corrélée à la phosphorylation de la tyrosine de NR2B. L’initiation et le maintien de la plasticité spinale dans la douleur dépendent de la modulation transcriptionnelle, traductionnelle et post-traductionnelle des sousunités des récepteurs des acides aminés excitateurs, et de la collaboration entre ces récepteurs (16). Conclusion La connaissance du système glutamatergique constitue un grand chantier de recherches extrêmement dynamique, au cœur duquel le récepteur NMDA a suscité beaucoup d’espoir mais aussi causé des déceptions thérapeutiques quant au rapport bénéfice/risque de nombreuses molécules. Parmi les pistes d’avenir, les ligands à faible affinité du canal NMDA, la mémantine, le site de liaison de l’ifenprodil, les sites modulateurs, comme le site des polyamines, sont encore à explorer plus avant. La sous-unité NR2B constitue un centre d’intérêt croissant comme cible thérapeutique de nombreuses pathologies du système nerveux central, avec une discrimination entre les sous-types de NR2B pour obtenir des molécules avec un profil thérapeutique satisfaisant en ce qui concerne les effets indésirables, en particulier psychomimétiques. La localisation extrasynaptique de NR2B et sa modification protéique, en particulier par la phosphorylation de la tyrosine, représentent des axes de recherche thérapeutique très stimulants. Connaissant le rôle clé des sous-unités NR2B dans la cognition et au cours du développement, un suivi de l’utilisation à long terme d’antagonistes sera bien sûr un corollaire indispensable à l’évaluation pendant les phases de développement clinique de ces molécules (13). ■ Références bibliographiques 1. Watkins JC. L-Glutamate as a central neurotransmitter: looking back. Biochem Soc Trans 2000;28(4):297-309. 2. Cacabelos R, Takeda M, Winblad B. The glutamatergic system and neurodegeneration in dementia: preventive strategies in Alzheimer’s disease. Int J Geriatr Psychiatry 1999;14:3-47. 3. Köhr G. NMDA receptor function: subunit composition versus spatial distribution. Cell Tissue Res 2006;326: 439-46. 4. Monyer H, Burnashev N, Laurie DJ, Sakmann B, Seeburg PH. 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L’effet antagoniste de la mémantine se distingue aussi de celui des autres La mémantine est un antagoniste non compétitif réversible et voltage-dépendant (c’est-à-dire qu’elle ne se fixe pas sur le même site que le glutamate) des effets du glutamate au niveau du récepteur NMDA. Ce dernier est un récepteur canal, à conductance principalement calcique, composé de deux sousunités (NR1 et NR2) [fi gure 1]. La mémantine se fixe préférentiellement sur un site de fixation de la sous-unité NR2 (fi gure 2). L’affinité (Ki) de la Na+/Ca2+ 1 1 antagonistes (phencyclidine, kétamine, MK801) par la cinétique de blocage : la mémantine reste moins longtemps piégée dans le récepteur NMDA que la phencyclidine ou le MK801. Cette cinétique s’explique par la plus faible affinité de la mémantine mais aussi par le caractère voltage-dépendant de l’effet antagoniste : dès que le neurone s’active (dépolarisation), la mémantine se dissocie du récepteur NMDA (fi gure 3). R. Bordet 2A 2B NH2 1 2B K+ COOH Figure 1. Le récepteur NMDA est un récepteur canal composé de quatre sous-unités dont il existe deux isoformes (NR1 et NR2). NMDA K+ Glycine Polyamines Zn2+ NR2 NR1 Mg2+ Ca2+ Na+ 394 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 Figure 2. Le récepteur NMDA doit être co-activé par la glycine pour être fonctionnel. Il est régulé par différentes substances, dont des ions (magnésium et zinc). Il possède un site de fixation (flèche rouge) situé dans le canal sur lequel peuvent venir interagir les principaux antagonistes NMDA. Ca2+ – 70 mV – 50 mV – 20 mV Mg2+ Mémantine MK801 Interactions pharmacodynamiques de la mémantine* Les interactions médicamenteuses de la mémantine sont essentiellement pharmacodynamiques et résultent de deux phénomènes neurobiologiques : le blocage du récepteur NMDA au niveau d’un site commun aux principaux antagonistes utilisés en thérapeutique humaine ; la modulation par le glutamate de la transmission d’autres neurotransmetteurs, comme la dopamine. L’association de la mémantine à d’autres antagonistes des récepteurs NMDA (amantadine, kétamine, dextrométhorphane) expose à un risque de psychose pharmacotoxique, dans la mesure où l’association de ces médicaments entraîne un blocage massif des récepteurs NMDA, empêchant toute transmission glutamatergique (fi gure 4). Cela est renforcé par le fait que ces antagonistes peuvent agir sur le même site de fixation mais sur des isoformes différentes de la sous-unité NR2, ce qui explique l’effet additif de leur blocage NMDA. Le glutamate régule l’activité des neurones striataux, en particulier via la sous-unité NR2B, qui subit des modifications au cours la maladie de Parkinson. Cela explique que le blocage de cette sous-unité NR2B vienne potentialiser les effets des médicaments antiparkinsoniens, qu’ils soient dopaminergiques (L-dopa, agonistes dopaminergiques) ou anticholinergiques. R. Bordet * Interactions médicamenteuses de la mémantine : L-dopa, agonistes dopaminergiques, anticholinergiques, barbituriques, neuroleptiques, dantrolène, baclofène, amantadine, kétamine, dextrométhorphane, phénytoïne, cimétidine, ranitidine, procaïnamide, quinidine, quinine, nicotine, hydrochlorothiazide, warfarine, anticoagulants oraux. Il n’y a pas d’interaction médicamenteuse entre la mémantine et le donépézil ou la galantamine. A Figure 3. L’effet antagoniste de la mémantine (comme celui du magnésium) est un phénomène dépendant de l’état électrique du neurone : quand le neurone se dépolarise (quand il devient moins négatif), donc quand il s’active, l’effet antagoniste disparaît car la mémantine (ou le magnésium) se dissocie du récepteur. L’effet antagoniste d’un composé de référence comme le MK801 est indépendant de l’état d’activation du neurone. B Figure 4. Administrée à la posologie recommandée, la mémantine (en vert) occupe 50% des récepteurs NMDA, compte tenu de son degré d’affinité (en A). Lorsqu’un autre antagoniste (en rouge) est administré simultanément, l’ensemble des récepteurs NMDA est bloqué, ce qui a un effet plus intense et comportant un risque de réactions psycho-comportementales anormales. La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 | 395