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Actualités sur la voie glutamatergique
et la maladie d’Alzheimer
AVANT-PROPOS SOMMAIRE
Coordination : Régis Bordet*
La voie glutamatergique :
aspects physiologiques et pharmacologiques
du récepteur NMDA
G. Pickering
Maladie d’Alzheimer :
dualité des effets physiologiques
et pathologiques du glutamate
D. Deplanque
Glutamate et grandes fonctions cérébrales
A. Eusebio, J. Micallef-Roll
L
e glutamate est, avec l’acide γ-amino-butyrique
(GABA), l’un des deux principaux neuromédiateurs du cerveau puisque l’on estime que 90 %
des synapses utilisent du glutamate pour leur fonctionnement, seul ou en combinaison avec d’autres neuromédiateurs (Magistretti, J Exp Biol 2006;209:2304-11).
C’est un acide aminé excitateur, responsable d’une
activation neuronale par opposition à l’effet inhibiteur
du GABA. Le fonctionnement du glutamate est
complexe dans la mesure où, selon le niveau d’intensité
de libération, il peut présenter des effets aux conséquences opposées. À l’état physiologique, le glutamate
régule de nombreuses fonctions. Sa libération est indispensable à la survie cellulaire ; il est l’acteur principal
des phénomènes d’apprentissage et de mémorisation,
même s’il interagit avec d’autres neuromédiateurs, en
particulier l’acétylcholine, pour réguler le phénomène
de potentialisation à long terme dans l’hippocampe.
* Département de pharmacologie médicale, institut de médecine prédictive et
de recherche thérapeutique, université et CHU de Lille.
De plus, il est impliqué dans la régulation négative
de fonctions psycho-comportementales, régulation
négative contrebalancée par l’effet du GABA. Il joue
également un rôle important dans la régulation de la
motricité. Enfin, il peut, dans de nombreuses pathologies cérébrales, être libéré en excès et provoquer une
toxicité neuronale (excitotoxicité).
L’effet du glutamate est médié par de nombreux
récepteurs : des récepteurs canaux ou ionotropiques
(récepteurs N-méthyl-D-aspartate [NMDA], α-amino3-hydroxy-5 méthyl-4 isoxazole propionate [AMPA],
kaïnate), des récepteurs métabotropiques couplés à
une protéine G. Les récepteurs NMDA jouent un rôle
majeur dans les effets du glutamate, dont ils sont les
seuls récepteurs pharmacologiquement modulables.
Des données récentes montrent que les récepteurs
NMDA, par la diversité de leur composition moléculaire
et de leur localisation sur le neurone, contribuent à la
complexité des effets du glutamate. Si les récepteurs
NMDA exprimés à la synapse sont surtout impliqués
dans l’apprentissage, les récepteurs extra-synaptiques sont plus responsables de l’excitotoxicité. La
complexité des rôles des récepteurs NMDA, relatifs à
leur niveau d’activation, explique la diversité d’action
de ses antagonistes : les effets des récepteurs NMDA,
en effet, peuvent être variables selon leur affinité et
leur mode de blocage.
De par son caractère ubiquitaire et la diversité de ses
rôles fonctionnels, le glutamate est impliqué dans la
plupart des maladies neuropsychiatriques. Dans la
maladie d’Alzheimer, notamment, son implication est
double : physiopathologie des symptômes cognitifs
et psychocomportementaux, d’une part, initiation et
évolution du processus neuropathologique, d’autre part.
Cette implication peut conduire à un double intérêt
thérapeutique de la modulation du glutamate et de
ses récepteurs tant pour le traitement symptomatique
que pour d’éventuels effets disease-modifier.
■
La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 |
385
DOSSIER THÉMATIQUE
Voie glutamatergique
et maladie d’Alzheimer
La voie glutamatergique :
aspects physiologiques
et pharmacologiques
du récepteur NMDA
The glutamatergic system: physiology and pharmacology
of the NMDA receptor
G. Pickering*
L
* Centre de pharmacologie clinique,
CHU de Clermont-Ferrand.
a première démonstration du rôle clé du
glutamate comme neurotransmetteur du
système nerveux central a été faite à la fin des
années 1950, lorsque les propriétés excitatrices du
glutamate et d’autres acides aminés sur une grande
diversité de neurones centraux ont été mises en
évidence (1). Neurotransmetteur excitateur le plus
abondant du système nerveux central, le glutamate
joue un rôle ubiquitaire dans la plupart des circuits
neuronaux centraux. Les synapses glutamatergiques
comportent des canaux ioniques (nommés “récepteurs ionotropiques” ou IGlu) ou un couplage à un
messager secondaire impliquant la protéine G (récepteurs métabotropiques ou mGlu [1]). Les récepteurs
ionotropiques, NMDA (N-méthyl-D-aspartate),
AMPA (α-amino-3-hydroxy-5-méthyl-4-isoxazole
propionate) et kaïnate sont des tétramères ou pentamères couplés à des canaux ioniques permettant le
passage du sodium et, dans certaines circonstances,
Tableau. Caractéristiques des récepteurs ionotropiques.
Récepteur ionotropique
NMDA
Sous-unités
Type
NR1
NR1A à NR1H
NR2
NR2A à NR2D
NR3
NR3A et NR3B
AMPA
GLU 1 à GLU 4
Kaïnate
GLU 5 à GLU 7
KA1 et KA2
Récepteur métabotropique
mGLU 1 à mGLU 8
386 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 Groupes I, II, III
du calcium (2). Ils sont composés de plusieurs sousunités (tableau) dont les différentes combinaisons et
la distribution spatiale vont déterminer les propriétés
pharmacologiques de ces récepteurs (2). Parmi ces
quatre récepteurs, dont le rôle joué dans la transmission glutamatergique est de mieux en mieux cerné,
ce sont les récepteurs NMDA, les plus complexes des
récepteurs ionotropiques (3), qui jouent un rôle pivot
au sein du système nerveux central, où ils sont en
effet impliqués dans la transmission synaptique, la
plasticité neuronale et l’excitotoxicité.
Structure
Les récepteurs NMDA sont composés d’associations de sous-unités et forment des hétéromultimères, contrairement aux AMPA ou kaïnate, et
sont distribués au niveau du cerveau, du cortex, de
l’hippocampe, du cervelet et de la moelle épinière,
en majorité en postsynaptique, mais aussi en présynaptique ainsi que dans la glie (2). Les sous-unités
NR1 existent sous huit isoformes et la plupart des
sous-unités NR2 (sauf NR2A) et NR3 ont également
plusieurs variantes (2, 3) [tableau]. Des études
d’hybridation in situ ont montré que les ARNm des
sous-unités des récepteurs NMDA présentent une
distribution spatiale et temporelle hétérogène (2, 4) :
si les sous-unités NR1 sont exprimées dans la plupart
des neurones du système nerveux central (SNC)
de l’âge embryonnaire à l’âge adulte, il existe des
Résumé
Le glutamate est le neurotransmetteur excitateur le plus abondant du système nerveux central des vertébrés, et, parmi les récepteurs glutamatergiques, les récepteurs NMDA jouent un rôle central dans la
communication neuronale et la transmission synaptique. Les récepteurs NMDA sont formés d’associations
de sous-unités groupées en di- ou trihétéromères ; la composition et la distribution spatiale de ces associations déterminent les caractéristiques pharmacologiques. De nombreux agents modulent la régulation
de l’activité des récepteurs NMDA ; or, leur activité physiologique est essentielle pour un fonctionnement
neuronal normal. La surstimulation de ces récepteurs est retrouvée lors d’atteintes neuronales aiguës et
chroniques comme l’ischémie cérébrale, la démence ou la douleur neuropathique. L’efficacité des antagonistes des récepteurs NMDA, en particulier non compétitifs, n’est pas démontrée cliniquement. Le risque
d’extrapolation est souvent limité par l’ampleur de leurs effets indésirables.
changements des sous-unités NR2 au cours du
développement postnatal.
Au stade embryonnaire, les sous-unités NR2A et
NR2C ne sont pas détectables alors que les sousunités NR2B et D peuvent l’être au niveau de la
moelle épinière et de l’hypothalamus puis du cortex
(4). En postnatal, il y a une tendance générale à un
remplacement de la sous-unité NR2B par NR2A (4),
changement qui a été impliqué dans l’accélération
de la disparition du courant postsynaptique lors
de la dépolarisation du canal NMDA, phénomène
souvent associé à la plasticité synaptique des circuits
neuronaux liée à l’activité. À l’âge adulte, les récepteurs NMDA contenant NR2C (ou D) sont localisés
essentiellement dans le cervelet et NR2B, dans
l’encéphale ; NR2A est localisé de manière ubiquitaire (4). Traditionnellement, les récepteurs NMDA
consistent en un dimère de dimères avec deux unités
NR1 (obligatoires) et deux unités NR2 (3). Toutefois,
de nombreux neurones expriment au moins deux
sous-unités NR2 qui peuvent former des di- ou/et des
trihétéromères dans la même cellule. Aujourd’hui,
la plupart des chercheurs désignent la population
des récepteurs NMDA comme constituée potentiellement des groupements di- et trihétéromériques
(NR1/NR2A et NR1/NR2A/NR2B) sous l’appellation
de “type NR2A” ou “récepteurs NMDA contenant
NR2A” (3). Au cours du vieillissement physiologique,
une diminution de l’expression protéique de certaines
sous-unités, en particulier de la sous-unité NR2B, a
été montrée au niveau du cortex cérébral préfrontal
et du noyau caudé (5). Il existe aussi des variations
dans la composition en sous-unités NR2 en différents sites d’une cellule. De plus, il faut noter que
la localisation des récepteurs n’est pas uniquement
neuronale, puisque les récepteurs NMDA sont
également présents dans les astrocytes et les
oligodendrocytes (responsables de la myélinisation)
[3, 6] ; en effet, le glutamate est l’un des éléments,
avec la D-sérine et via le récepteur NMDA, de la
communication neurogliale. Les récepteurs NMDA
sont localisés dans les régions synaptique et extrasynaptique ; certains sont en périsynaptique et sur la
membrane postsynaptique (3). Les sous-unités NR2B
et NR2D semblent majoritaires en extrasynaptique,
où leur activité excessive entraîne des dommages
neuronaux, tandis que les sous-unités NR2A seraient
Mots-clés
Glutamate
Récepteurs NMDA
Mémantine
préférentiellement synaptiques et essentielles pour
une fonction neuronale normale (3).
La structure du récepteur NMDA montre que l’unité
NR1 porte le site de liaison de la glycine. La sousunité NR2 porte le site de liaison du glutamate et
le type de sous-unité NR2 détermine les propriétés
additionnelles biophysiques et pharmacologiques
incluant les sites de liaison au zinc (Zn 2+), à l’ion
H+, aux polyamines, et le site de S-nitrosylation,
groupe sulfhydryle cystéine qui réagit avec l’oxyde
d’azote (NO) [4]. Quatre domaines transmembranaires ont été décrits. Ces récepteurs sont ancrés au
niveau membranaire par des protéines activées par
le stress, et il est suggéré que cet ancrage pourrait
être un moyen par lequel le stress lié à l’activité
neuronale accroît la transmission excitatrice en
réponse à un stimulus (4). De plus, le récepteur
NMDA ferait partie d’un complexe comprenant
au moins 100 protéines différentes. Le glutamate
libéré est rapidement éliminé de l’espace extracellulaire par un système de transport à haute affinité
présent au niveau des terminaisons nerveuses et
des cellules gliales environnantes. Ce système de
transport est considéré comme responsable de l’arrêt
de l’action du neurotransmetteur et de la prévention
de l’atteinte neuronale par activation excessive des
récepteurs du glutamate. Il existe également des
transporteurs vésiculaires du glutamate (comme
VGLUT1-3) enchâssés dans la membrane des
vésicules synaptiques par 10 domaines transmembranaires (3). Des expériences de transfection de
cellules ou de neurones non glutamatergiques ont
permis d’établir sans ambiguïté que l’expression de
VGLUT1 et de VGLUT2 suffit à induire une libération
de glutamate (7). Enfin, le glutamate est recapté au
niveau des terminaux glutamatergiques neuronaux
et des astrocytes qui entourent la fente synaptique.
Propriétés physiologiques
Activité des récepteurs NMDA
L’activité physiologique des récepteurs NMDA
est essentielle pour un fonctionnement neuronal
normal (8). La plupart des neurones (et aussi la glie)
contiennent des concentrations élevées de glutamate
La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 | 387
DOSSIER THÉMATIQUE
Voie glutamatergique
et maladie d’Alzheimer
La voie glutamatergique :
aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA
(10 mM). Après séquestration dans les vésicules
synaptiques, le glutamate est libéré en quelques
millisecondes pour permettre la communication
avec d’autres neurones via les terminaisons synaptiques (8). L’activité NMDA a besoin de glutamate, de
glycine et/ou, comme cela a été montré récemment,
de D-sérine, pour son activation et elle est modulée
par le magnésium extracellulaire, qui bloque de
manière voltage-dépendante le canal NMDA (8).
Dans des conditions normales, pour permettre
l’entrée de calcium dans la cellule, il faut simultanément une libération présynaptique de glutamate
agissant sur le récepteur NMDA postsynaptique et
une dépolarisation de la membrane postsynaptique
(à – 40mV, par un autre stimulus, via des courants
initiés par les récepteurs non-NMDA, les récepteurs
AMPA par exemple), dépolarisation permettant la
levée du bloc Mg2+ au niveau du canal ionique du
récepteur NMDA, suivie de l’ouverture rapide du
canal du récepteur NMDA et de l’afflux de calcium
(et d’autres ions) dans la cellule (8). Une cinétique
très lente d’activation/désactivation caractérise
les récepteurs NMDA : au cours de la transmission
synaptique, leur activation génère un courant d’apparition et de disparition très lent (bien plus lent que le
courant au sein des récepteurs AMPA). Le récepteur
NMDA s’ouvre environ 10 millisecondes après que
le glutamate a été détecté dans la fente synaptique,
et continue de s’ouvrir et de se fermer pendant
plusieurs centaines de millisecondes, jusqu’à ce que le
glutamate se détache de son site de liaison. La disparition du courant postsynaptique excitateur médié
par le récepteur NMDA (20 millisecondes pour NR1/
NR2A versus plusieurs secondes pour les récepteurs
NR1/NR2D) et l’affinité apparente pour les récepteurs
du glutamate sont tous deux fortement influencés
par la nature des sous-unités NR2 impliquées (3).
L’augmentation de calcium est le déclencheur d’une
série d’événements, notamment de l’activation de
protéines kinases conduisant à la phosphorylation
des récepteurs et à l’augmentation de leur sensibilité.
Modulation des récepteurs NMDA
La modulation des récepteurs NMDA est faite par
de nombreux agents (2). Pour activer le canal, deux
molécules de glycine et deux molécules de glutamate
doivent se lier aux récepteurs NMDA de l’hippocampe (2). La fonction modulatrice du Mg 2+ est
complexe : des études de liaison ont montré qu’une
faible concentration de Mg2+ favorise la fixation
d’antagonistes comme le MK801 (3). Il en est de
388 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 même pour le Ca2+, qui module également l’activité
du récepteur NMDA. Le Zn2+ bloque le récepteur
NMDA de manière non compétitive et indépendante
du voltage ; il peut être considéré comme neuromodulateur, car l’activation de neurones glutamatergiques dans certaines régions du cerveau conduit à
la libération de Zn2+. Le plomb (Pb2+), métal lourd
et polluant environnemental ubiquitaire, a un effet
délétère sur l’apprentissage et la mémoire ; sa distribution dans le cerveau est similaire à celle du Zn2+.
En présence de concentrations faibles de glycine, le
Pb2+ potentialise l’activation du récepteur NMDA et
inversement avec des concentrations saturées. Le
Cu2+ influence fortement les réponses induites par
le récepteur NMDA dans des neurones en culture et
peut agir directement sur le site de reconnaissance du
NMDA. Un autre exemple de la régulation allostérique
du récepteur NMDA concerne l’action modulatrice
des polyamines. Présentes en fortes concentrations
à l’état physiologique dans les tissus et le cerveau,
les polyamines (spermine, spermidine, etc.) sont
produites en grandes quantités dans certains états
pathologiques (ischémie cérébrale, traumatisme).
De nombreux sites de liaison sur le récepteur NMDA
ont été proposés, mais leur mode d’action n’est pas
direct : ils potentialisent ou inhibent les réponses
médiées par le glutamate par des mécanismes
glycine et/ou voltage-dépendants. Le récepteur
NMDA est extrêmement sensible à l’ion H+, et une
forte acidification supprime l’activité du récepteur
NMDA : le pH de l’espace extracellulaire du système
nerveux central des vertébrés est très plastique
et peut devenir alcalin ou acide lors de l’activité
neuronale. NR1 est inhibé par le proton : l’étude des
huit isoformes de NR1 a confirmé que c’est l’exon 5
qui contrôle l’inhibition par H+ ; la coexpression de
NR1 et NR2 a montré que cela concerne NR1/NR2A,
NR1/NR2B, NR1/NR2D et ne concerne pas NR1/
NR2C. Cette modulation représente peut-être un
rétrocontrôle protecteur des neurones lors d’une
acidification de l’espace extracellulaire par l’acide
lactique dans des conditions d’hypoxie ou d’ischémie.
L’état d’oxydoréduction modulerait également le
récepteur NMDA : des agents sulfhydryles avec de
fortes propriétés oxydantes ou réductrices modulent
in vitro les réponses du récepteur NMDA. Cette
modulation se ferait au niveau d’un site redox sur le
récepteur NMDA, consistant en groupements thiols,
la réduction entraînant l’augmentation de l’activité
du récepteur NMDA, l’oxydation sa diminution, et
le monoxyde d’azote (NO) est reconnu aujourd’hui
comme un inhibiteur de la réponse NMDA. De plus,
les études moléculaires ont montré que la présence
En association dans le traitement de l’épilepsie partielle
de l’adulte avec ou sans généralisation secondaire
POUR ALLER DE L’AVANT
zonisamide
1 prise par jour possible
1 ou 2 prises par jour en phase d’entretien
• Certains patients traités par Zonegran® ont développé des calculs rénaux.
La prudence est recommandée en cas d'administration de Zonegran® à des
patients ayant des facteurs de risque de lithiase rénale. • Administration avec
prudence chez les patients traités de manière concomitante par des inhibiteurs
de l’anhydrase carbonique, par exemple le topiramate, car pas de données
suffisantes pour exclure la possibilité d'une interaction pharmacodynamique
• Des cas d’hypohidrose et d’hyperthermie ont été décrits, essentiellement chez
des patients pédiatriques. Une hyperthermie nécessitant une hospitalisation a
été diagnostiquée chez certains patients. • Il est recommandé de surveiller les
taux de lipase et d’amylase pancréatiques chez les patients qui développent
les symptômes et signes cliniques de pancréatite. • Si myalgies et/ou faiblesse
musculaire sévères avec ou sans fièvre : contrôler les marqueurs des lésions
musculaires, notamment les taux sériques de créatine phosphokinase et
d’aldolase. • Les femmes en âge de procréer doivent utiliser une méthode
contraceptive adéquate pendant le traitement et le mois suivant l’arrêt du
traitement • Les gélules de Zonegran® 100 mg contiennent un colorant jaune
appelé jaune soleil FCF (E110), qui peut provoquer des réactions allergiques.
• Il existe peu de données d’études cliniques chez des patients pesant moins de
40 kg. La prudence est donc recommandée pour le traitement de ces patients.
• Zonegran® peut provoquer une perte de poids. Interactions avec d’autres
médicaments et autres formes d’interactions*. Grossesse et allaitement*.
Effets sur l’aptitude à conduire des véhicules et à utiliser des machines*.
Effets indésirables* : Effets indésirables observés le plus fréquemment dans les
essais contrôlés du Zonegran® administré en association : somnolence, vertiges
et anorexie. Effets indésirables associés observés lors des études cliniques et
en pharmacovigilance : Très fréquents (≥ 1/10) : Anorexie, Agitation Irritabilité,
Etats confusionnels, Dépression, Ataxie, Vertiges, Troubles de la mémoire,
Somnolence, Diplopie, Diminution des bicarbonates • Fréquents (≥ 1/100
< 1/10) : Ecchymose, Hypersensibilité, Labilité émotionnelle, Anxiété, Insomnies,
Troubles psychotiques, Bradyphrénie, Troubles de l’attention, Nystagmus,
Paresthésies, Troubles d’élocution, Tremblement, Douleurs abdominales,
Constipation, Diarrhées, Dyspepsie, Nausées, Eruption, Lithiase rénale, Fatigue,
Syndrome pseudo-grippal, Pyrexie, Perte de poids • Peu Fréquents (≥ 1/1 000
< 1/100) : Pneumonie, Infection des voies urinaires, Hypokaliémie, Nervosité,
Agressivité, Idées suicidaires, Tentative de suicide, Convulsions, Vomissements,
Cholécystite, Lithiase biliaire, Calculs urinaires • Très rares (< 1/10 000
y compris cas isolés) : Agranulocytose, Anémie aplasique, Leucocytose,
Leucopénie, Lymphadénopathie, Pancytopénie, Thrombocytopénie, Acidose
métabolique, Hallucinations, Amnésie, Coma, Crises tonico-cloniques,
Syndrome myasthénique, Syndrome malin des neuroleptiques, Etat de mal
épileptique, Dyspnée, Pneumonie de déglutition, Troubles respiratoires,
Pancréatite, Lésions hépatocellulaires, Anhidrose, Erythème multiforme, Prurit,
Syndrome de Stevens-Johnson, Nécro-épidermolyse bulleuse aiguë (syndrome
de Lyell), Rhabdomyolyse, Hydronéphrose, Insuffisance rénale, Anomalies
urinaires, Elévation de la créatine-phosphokinase (CPK), Hypercréatininémie,
Augmentation de l’urée sanguine, Anomalies des tests hépatiques, Coup de
chaleur • Des cas isolés de mort subite inexpliquée chez des patients
épileptiques (SUDEP: Sudden Unexplained Death in Epilepsy Patients) ont
également été décrits chez des sujets traités par Zonegran®. Informations
complémentaires pour les populations particulières : L’examen des données de
pharmacovigilance suggère que les patients âgés de 65 ans ou plus signalent
une plus grande fréquence des effets suivants par rapport à l’ensemble de la
population : syndrome de Stevens-Johnson et syndrome d’hypersensibilité
médicamenteuse. Surdosage*. PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES :
Le zonisamide est un dérivé du benzisoxazole. C’est un antiépileptique avec
une faible activité anhydrase carbonique in vitro. Sa structure chimique n’est pas
apparentée à d’autres antiépileptiques. Propriétés pharmacodynamiques* :
Antiépileptique • Le mécanisme d’action du zonisamide n’est pas totalement
élucidé, mais il semblerait qu’il agisse sur les canaux sodiques et calciques
voltage-dépendants, en bloquant les décharges neuronales synchrones, en
réduisant la propagation des décharges épileptiques et en interrompant ainsi
l’activité épileptique qui en résulte. Le zonisamide possède également un effet
modulateur sur l’inhibition neuronale dans laquelle le GABA sert de médiateur.
Propriétés pharmacocinétiques*. Données de sécurité précliniques*.
DONNEES PHARMACEUTIQUES : Liste des excipients* - Durée de
conservation : 3 ans. Précautions particulières de conservation :
A conserver à une température ne dépassant pas 30°C. Nature et contenance de
l’emballage extérieur - Présentations et n° d’identification administrative Prix : ZONEGRAN® 25 mg : EU/1/04/307/001 - AMM n° 365 942.6 :
14 gélules (blanc-blanc) sous plaquettes thermoformées PVC/PVDC/aluminium.
- 15,12€. ZONEGRAN® 50 mg : EU/1/04/307/010 -AMM n° 369 203.3 : 14 gélules
(blanc-gris) sous plaquettes thermoformées PVC/PVDC/aluminium. - 15,12€.
ZONEGRAN® 100 mg : EU/1/04/307/004 -AMM n° 365 945.5 : 56 gélules (blancrouge) sous plaquettes thermoformées PVC/PVDC/aluminium. - 54,97 €. - DATE
DE PREMIERE AUTORISATION/ RENOUVELLEMENT : 10 Mars 2005. CONDITIONS DE PRESCRIPTION ET DE DELIVRANCE : Liste I. Rbsé Sec.Soc.
65%. Coll. - TITULAIRE DE L’AMM : Eisai Limited, European Knowledge Centre,
Mosquito Way, Hatfield, Hertfordshire, AL10 9SN, Royaume-Uni. Représentant
local en France / Information médicale : EISAI S.A.S. - Tour Manhattan - 5/6,
place de l’Iris - 92095 PARIS LA DEFENSE 2 : 01.47.67.00.05. INFORMATION
REVISEE EN : 11 juin 2009.
ZON 107-05/09
DENOMINATION : ZONEGRAN® 25 mg, gélules (blanches). ZONEGRAN® 50 mg,
gélules (blanc-gris). ZONEGRAN® 100 mg, gélules (blanc-rouge).
COMPOSITION : ZONEGRAN® 25 mg : zonisamide 25 mg. ZONEGRAN® 50 mg :
zonisamide 50 mg. ZONEGRAN® 100 mg : zonisamide 100 mg. Excipient q.s.p.
DONNEES CLINIQUES : Indications thérapeutiques : En association chez le
patient adulte dans le traitement de l’épilepsie partielle avec ou sans
généralisation secondaire. Posologie et mode d’administration* : Voie orale.
• Adultes : En association au traitement en cours avec adaptation de la
posologie en fonction de la réponse clinique. Des posologies quotidiennes de
300 mg à 500 mg se sont révélées efficaces, bien que certains patients,
particulièrement ceux qui ne prennent pas de médicaments inducteurs du
CYP3A4, puissent répondre à des doses inférieures. Dose initiale recommandée :
50 mg/j en deux prises. La dose peut être augmentée à 100 mg/j après une
semaine et la posologie peut ensuite être augmentée tous les sept jours, par
paliers de 100 mg au maximum. Insuffisant rénal, insuffisant hépatique ou patients
non traités par des inducteurs du CYP3A4 : Respecter un intervalle de deux
semaines. Administration possible en une ou deux prises quotidiennes après la
phase d’augmentation de posologie (CTJ : 2.94 € - 4.91 €) • Personnes âgées :
Peu de données. Prudence lors de l’instauration du traitement. Le profil de
sécurité doit également être considéré. • Enfants et adolescents : Administration
non recommandée. • Insuffisance rénale : Prudence recommandée ; il peut
être nécessaire d’augmenter plus lentement la posologie. • Insuffisance
hépatique : L’administration aux patients présentant une insuffisance hépatique
sévère n’est pas recommandée. La prudence est recommandée chez les
patients ayant une insuffisance hépatique légère à modérée ; il peut être
nécessaire d'augmenter plus lentement la posologie. • Effet des aliments :
Zonegran® peut être pris au cours ou en dehors des repas. • Arrêt du traitement
par Zonegran® : Interruption progressive. Contre-indications : Hypersensibilité
au zonisamide, à l’un des excipients ou aux sulfamides. Mises en garde
spéciales et précautions d’emploi* : • Eruptions cutanées graves, y compris
des cas de syndrome de Stevens-Johnson • L’arrêt éventuel chez les patients
épileptiques doit se faire de manière progressive pour limiter les risques de
crises convulsives à l’arrêt du traitement. • Zonegran® est un dérivé du
benzisoxazole qui comporte un radical sulfamide. Les effets indésirables
graves d’origine immunitaire qui sont associés aux médicaments contenant
un radical sulfamide incluent des éruptions cutanées, des réactions allergiques,
et des troubles hématologiques graves, notamment des anémies aplasiques
pouvant être mortelles dans de très rares cas. • Des cas d’agranulocytose, de
thrombopénie, de leucopénie, d’anémie aplasique, de pancytopénie et de
leucocytose ont été signalés. Les données permettant d’évaluer la relation, le
cas échéant, entre la dose et la durée du traitement et ces événements sont
insuffisantes. • Des idées et comportements suicidaires ont été rapportés chez
des patients traités par des antiépileptiques dans plusieurs indications.
*Pour une information complète,
consulter le RCP disponible sur demande.
DOSSIER THÉMATIQUE
Voie glutamatergique
et maladie d’Alzheimer
La voie glutamatergique :
aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA
de deux cystéines au niveau de la sous-unité NR1 est
nécessaire pour la modulation redox et suggèrent
que l’état redox de ces cystéines entraîne des changements conformationnels du récepteur NMDA assez
similaires aux changements induits par d’autres
modulateurs allostériques, H + et spermine. La
modulation du récepteur NMDA passe aussi et
surtout par la phosphorylation des protéines. La
protéine kinase C (PKC) potentialise le récepteur
NMDA (phosphorylation sur NR1), la protéine
tyrosine kinase (PTK) module l’activité NMDA
(phosphorylation sur NR2) et la protéine tyrosine
phosphatase (PTP) la diminue. Enfin, l’actine, composante du cytosquelette, la dopamine et l’hista­mine
sont également des modulateurs. Comme pour la
majorité des récepteurs membranaires, la désensibilisation concerne également le récepteur NMDA,
avec un rôle probable des concentrations de Ca 2+
et de glycine, mais ce phénomène est encore très
mal connu (3).
Physiopathologie du récepteur NMDA
De très nombreuses études se sont intéressées à
l’implication des récepteurs NMDA dans la survie et
la maturation neuronales, la migration neuronale,
la plasticité synaptique, l’induction de la potentialisation à long terme (PLT) avec un rôle dans
l’apprentissage de tâches, la mémoire et la neuro­
dégénérescence (2). Les études de souris transgéniques pour différentes sous-unités de récepteur
NMDA ont apporté des informations sur les pathologies psychiatriques : alors que l’inactivation
complète du gène codant la sous-unité NR1 est létale
en période néonatale immédiate, la réduction de
l’expression de cette protéine (à 5 % de la valeur
normale) induit des symptômes retrouvés chez les
patients schizophrènes (diminution des interactions
sociales et sexuelles, augmentation des stéréotypies et de l’activité motrice) [5]. D’autre part, la
sur­expression par transgenèse du gène codant pour
la sous-unité NR2B procure de meilleures capacités
d’apprentissage et de mémorisation. Pendant
l’apprentissage et la mémorisation, de grandes
concentrations de glutamate synaptique sont libérées
de façon transitoire. Le canal du récepteur NMDA
serait un substrat biochimique de l’apprentissage.
Toutefois, la présence en quantité trop importante
ou pour une durée trop prolongée de glutamate peut
être délétère et exciter la cellule jusqu’à la mort
neuronale (excitotoxicité) [8, 9]. Une libération
excessive de glutamate au sein du système nerveux et
390 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 une excitotoxicité peuvent être dues à de nombreuses
agressions, qu’elles soient aiguës, comme un accident
ischémique cérébral, un traumatisme crânien ou
une épilepsie, ou chroniques, comme les maladies
chroniques neurodégénératives incluant la maladie
d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, la maladie de
Huntington, la sclérose latérale amyotrophique, la
démence associée au sida, la sclérose en plaques et
la sensibilisation centrale de la douleur (8, 2).
Toutes ces pathologies, d’étiologies différentes, ont
une voie finale commune, l’atteinte neuronale, par
surstimulation des récepteurs glutamatergiques, en
particulier ceux de type NMDA. Les mécanismes sont
légèrement différents selon leur caractère aigu ou
chronique (8). Lors d’une atteinte aiguë, la libération
de grandes quantités de glutamate entraîne une
dépolarisation des cellules, qui, en mourant par
nécrose (ou, plus lentement, par apoptose), libèrent
encore plus de glutamate. Cela entraîne une série
d’événements autodestructeurs et une mort cellulaire pouvant durer des heures et même des jours
après la lésion initiale. Lors de maladies chroniques
neurodégénératives, il semble que ce soit l’exposition chronique à des concentrations modérément
élevées de glutamate ou à une hyperactivité des
récepteurs au glutamate qui entraîne une mort
cellulaire par apoptose (8). La réponse du récepteur
NMDA est fonction non seulement de la concentration en glutamate ou en agoniste mais aussi de
la cinétique on-off dans le récepteur. L’hyperactivité
des récepteurs NMDA peut être présente avec des
concentrations en glutamate normales et fait suite
à une atteinte des neurones qui se dépolarisent, ce
qui lève le blocage du récepteur par l’ion Mg2+ (8).
Cette hyperactivité et l’influx de Ca2+ entraînent des
processus délétères, avec une surcharge calcique au
niveau mitochondrial, une stimulation de l’enzyme
oxyde nitrique synthétase (NOS) conduisant à une
production importante de NO et de peroxynitrite,
une formation de radicaux libres, une stimulation
de MAP kinase p38 activatrice des facteurs de transcription qui agissent sur le noyau et vont influencer
l’apoptose (2, 8).
Les processus physiologique et physiopathologique
se rejoignent au niveau de la plasticité synaptique au
cours de la PLT et de la sensibilisation centrale de la
douleur. Le modèle de la PLT place le récepteur NMDA
au cœur de la plasticité synaptique dans les phénomènes d’apprentissage et de mémorisation au niveau
de l’hippocampe (10), avec plus de cent molécules
impliquées comme médiatrices ou modulatrices.
Beaucoup d’entre elles sont aussi impliquées dans la
sensibilisation centrale spinale et dans la genèse de
l’hypersensibilité à la douleur. Les similarités entre ces
deux formes de plasticité synaptique sont frappantes,
en particulier la régulation post-traductionnelle des
récepteurs AMPA et NMDA, la circulation des récepteurs AMPA, l’activation de la voie ERK-CREB. Il existe
toutefois des différences qui méritent d’être étudiées
de plus près, de même que les rôles spécifiques joués
par NK1 et COX-2 dans le phénomène de sensibilisation à la douleur et non dans la PLT.
Propriétés pharmacologiques
Récepteur NMDA et PLT
Les études pharmacologiques concernant les récepteurs NMDA se sont intéressées à la PLT et à la
suractivation du récepteur. L’approche actuelle
d’exploration des mécanismes sous-tendant la
PLT utilise de plus en plus le champ de la biologie
moléculaire avec des souris génétiquement
modifiées (11). Toutefois, l’approche pharmacologique a permis de manipuler la PLT et d’évaluer
ses effets sur l’apprentissage et sur la mémoire. En
particulier, a été utilisé un antagoniste compétitif du
récepteur NMDA, l’AP5 (acide 2-amino-5-phosphopentanoïque). Les résultats obtenus ont affiné le rôle
important des récepteurs NMDA dans la mémoire
de travail spatiale et non spatiale ; leur rôle dans
l’apprentissage au niveau de l’hippocampe n’est pas
encore bien établi (11).
Récepteur NMDA et excitotoxicité
Le récepteur NMDA a été la cible pharmacologique de nombreux traitements, en particulier des
antagonistes dans le contexte de l’excitotoxicité.
Ces antagonistes peuvent être classés en grands
groupes pharmacologiques selon le site d’action sur
le récepteur NMDA (12) : site de reconnaissance du
NMDA (agoniste), site glycine (co-agoniste), canal
ionique, sites modulateurs incluant les sites redox,
proton, Zn2+ et polyamines (8, 13). Pour être acceptable en clinique, une thérapie antiexcitotoxique
devrait bloquer l’activation excessive du récepteur
NMDA en maintenant intacte la fonction normale,
en particulier sur les fonctions cognitives, et cela
sans effets indésirables (8). Les antagonistes compétitifs du glutamate ou de la glycine sur leur site
agoniste et les antagonistes non compétitifs du site
canalaire bloquent la fonction normale du récepteur
et entraînent des effets secondaires psychodyslep-
tiques avec agitation, hallucinations, altération
de la perception, catatonie et très communément
nausées et vomissements (13). Ces médicaments ont
également un effet sympathomimétique entraînant
une hypertension artérielle (13). Des antagonistes
compétitifs (tels que le selfotel ou le gavestinel)
ont été utilisés au cours d’essais cliniques dans
l’accident vasculaire cérébral (AVC) et le traumatisme
crânien (TC), mais les résultats obtenus n’étaient pas
probants. D’une part, leurs effets indésirables étaient
trop sérieux, d’autre part la méthodologie utilisée
pour certaines études était inadéquate, le nombre
de sujets étant insuffisant ou les critères d’évaluation mal définis. Le groupe des antagonistes non
compétitifs bloqueurs du canal NMDA a eu plus de
succès dans les essais cliniques. Un antagonisme non
compétitif est défini comme un mécanisme d’inhibition dont l’action dépend de l’activation préalable
du récepteur par l’agoniste (8). Ces médicaments
bloquent le canal lorsqu’il est ouvert et sont particulièrement efficaces lors d’une activité excessive et
pathologique du récepteur NMDA. Les détails de la
cinétique du blocage (en particulier la vitesse de fin
d’action [off-rate]) [8] sont déterminants pour éviter
les effets indésirables. MK801 est un antagoniste non
compétitif à haute affinité ; c’est un bon bloqueur de
l’excitotoxicité, mais il a un off-rate lent, et bloque
progressivement les fonctions normales (8). Il en
est de même pour la phencyclidine (PCP) et pour
la kétamine, qui entraînent l’une des hallucinations
et l’autre une somnolence (8). La cinétique rapide
on-off et l’affinité modérée de la mémantine ont
été mises en avant pour expliquer son efficacité
dans la maladie d’Alzheimer (13). En effet, le temps
de présence de la mémantine dans le récepteur est
suffisant pour bloquer les effets du glutamate en
excès, tout en préservant l’activation physiologique
du récepteur NMDA requise pour l’apprentissage et
la mémoire lorsqu’elle s’en retire rapidement.
Dans l’épilepsie, la maladie de Huntington, la
maladie de Parkinson et la fatigue, les antagonistes
du récepteur NMDA ont été testés avec des degrés
variables de rigueur et d’efficacité (13).
Récepteur NMDA et douleur
De nombreux essais ont exploré le rôle de la kétamine
dans l’antalgie, en particulier postopératoire (14).
Comme adjuvant, la kétamine a montré un effet
antalgique modeste, avec une réduction de la
consommation de morphine mais avec un risque
faiblement augmenté d’hallucinations (13, 14). Le rôle
La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 | 391
DOSSIER THÉMATIQUE
Voie glutamatergique
et maladie d’Alzheimer
La voie glutamatergique :
aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA
exact de la kétamine dans la douleur n’a pu être défini
sur la base de ces données (13). Dans le cadre de
l’antalgie préventive, la kétamine et le dextrométhorphane ont montré un effet antalgique (13-15). Dans le
traitement de la douleur chronique et neuropathique,
les résultats avec ces médicaments, comme avec
l’amantadine, sont variables, avec des effets indésirables souvent limitants. On ne peut conclure à leur
efficacité (13). Le magnésium, bloqueur naturel mais
faible (contrairement au MK801) du canal NMDA,
a fait l’objet de recherches précliniques (16). Il a
également été utilisé dans plusieurs essais cliniques
sur la douleur, avec des résultats variables, le plus
souvent défavorables (13). Certains antagonistes du
récepteur NMDA ont un profil pharmacologique plus
large que la seule action sur le récepteur NMDA :
l’éliprodil (spécifique de NR2) et le rémacémide sont
des bloqueurs des canaux sodiques (13) ; le dexanabinol est un cannabinoïde de synthèse présentant
des propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes
(13). La part exacte jouée par le récepteur NMDA
dans la réponse thérapeutique obtenue n’est pas
clairement déterminée (13).
Vers des antagonistes
du récepteur NMDA sur mesure ?
C’est pourquoi, afin de mieux comprendre les
mécanismes physiologiques et pathologiques
des récepteurs NMDA et de pouvoir développer
des traitements, il est important d’approfondir
nos connaissances concernant le lien entre ces
mécanismes et les sous-unités des récepteurs
NMDA. Il serait important d’étudier les antagonistes spécifiques de chaque sous-unité, mais cela
n’a été fait aujourd’hui que pour les récepteurs NR1
et NR2B (3).
Les antagonistes non compétitifs bloqueurs du
canal, comme la phencyclidine, l’amantadine, la
mémantine, le MK801, le felbamate, et, à un moindre
degré, les antagonistes compétitifs (AP5, D-CCPene,
conantokine G, DAP-7, NVP-AAM077) ont une sélectivité modérée pour certaines combinaisons de sousunités (3). La sensibilité à MK801, antagoniste non
compétitif à haute affinité, est plus grande pour les
recombinants des récepteurs NR1/NR2A et NR1/
NR2B que pour NR1/NR2C. L’ifenprodil, antagoniste non compétitif (activité-dépendant, voltageindépendant), se lie à NR2B au niveau du domaine
N-terminal leucine/isoleucine/valine-binding protein
(LIVBP) [3]. Son IC50 (concentration conduisant à la
moitié de l’inhibition maximale) est 400 fois plus
392 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 basse pour les récepteurs contenant NR2B que
pour ceux contenant NR2A, C ou D. La kétamine
et la mémantine ne semblent pas avoir de spécificité pour un sous-type particulier de récepteur
NMDA. Plusieurs phényléthanolamines, l’halopéridol et les dérivés de l’ifenprodil (Ro 25-6981 et
CP-101,606 [traxoprodil]) antagonisent également
NR1/NR2B, certains de manière encore plus marquée
que l’ifenprodil, probablement en augmentant leur
sensibilité à l’inhibition par l’ion H + (3). Le zinc
(inhibiteur non compétitif) se lie au domaine LIVBP
de la sous-unité NR2A avec une sélectivité 50 fois
plus grande que pour NR2B, mais avec un degré
d’inhibition partiel de 70 à 80 % similaire à celui
de l’ifenprodil et de ses dérivés sur les récepteurs
NR2B. Cependant, ces antagonistes non compétitifs
des récepteurs NMDA ont une préférence pour les
sous-types NR2 correspondants supérieure à celle
de tous les antagonistes compétitifs, tels que la
conantoxine G, le DAP-7 ou le NVP-AAM077 (3).
Lorsque le récepteur NMDA se présente sous forme
trihétéromérique (NR1/NR2A/NR2B), la présence
d’un seul NR2A (pour le zinc) ou NR2B (pour
l’ifenprodil) est suffisante pour assurer une grande
affinité, avec toutefois une inhibition maximale
moindre que pour des récepteurs dihétéromériques (3). Des travaux récents montrent qu’il est
impossible de bloquer efficacement des récepteurs
NMDA trihétéromériques (17) et suggèrent qu’il
faudra d’abord trouver des antagonistes sélectifs
pour NR1/NR2A, NR1/NR2B, NR1/NR2C (3). En
effet, peu de pistes pharmacologiques existent
encore pour bloquer NR2A, C et D : on citera PPDA
([±]-cis-1-[phenanthren-2yl-carbonyl]piperazine2,3-dicarboxylic acid), un inhibiteur compétitif de
NR2C et NR2D ou TPEN (N,N,N’,N’-tetrakis-[2pyridylmethyl]-ethylenediamine), un chélateur de
l’ion Zn2+ qui agit au niveau de NR2A (17).
Collaboration entre récepteurs
du système glutamatergique
Au sein du système glutamatergique, le récepteur
NMDA est le médiateur principal de la transmission
excitatrice rapide de la plupart des neurones
centraux. Les autres récepteurs au glutamate,
AMPA, kaïnate et les récepteurs métabotropiques
ont un rôle propre de mieux en mieux connu dans
la transmission synaptique (2), et leur collaboration déterminante avec les récepteurs NMDA
est un domaine de recherche très actif, dont nous
citerons deux exemples. Dans le domaine de la PLT,
la plasticité synaptique au niveau de l’hippocampe
requiert les récepteurs NMDA pour son induction
et les AMPA glutamate receptor A (GLuR-A) pour
son expression continue (12). Dans le domaine de la
douleur et de la sensibilisation centrale, l’hypothèse
prévalente était que l’activation de kinases dépendait
du flux intracellulaire de calcium après activation
des récepteurs AMPA et, en cas de persistance du
stimulus, des récepteurs NMDA (16). Des travaux
récents ont montré que les signes de la sensibilisation centrale, l’hyperalgie (douleur excessive en
réaction à un stimulus douloureux) et l’allodynie
(douleur en réaction à un stimulus normalement
non douloureux) mettent en jeu les récepteurs
métabotropiques du groupe I (et également d’autres
récepteurs couplés à la protéine G) au niveau de
la corne dorsale de la moelle et que ceux-ci sont
couplés au récepteur NMDA (16). Les récepteurs
métabotropiques du glutamate entraînent ainsi un
enchaînement de traduction du signal qui implique
les tyrosine kinases Src, protéines régulatrices des
récepteurs NMDA. La douleur est corrélée à la
phosphorylation de la tyrosine de NR2B. L’initiation
et le maintien de la plasticité spinale dans la douleur
dépendent de la modulation transcriptionnelle,
traductionnelle et post-traductionnelle des sousunités des récepteurs des acides aminés excitateurs,
et de la collaboration entre ces récepteurs (16).
Conclusion
La connaissance du système glutamatergique
constitue un grand chantier de recherches extrêmement dynamique, au cœur duquel le récepteur
NMDA a suscité beaucoup d’espoir mais aussi causé
des déceptions thérapeutiques quant au rapport
bénéfice/risque de nombreuses molécules. Parmi
les pistes d’avenir, les ligands à faible affinité du
canal NMDA, la mémantine, le site de liaison de
l’ifenprodil, les sites modulateurs, comme le site
des polyamines, sont encore à explorer plus avant.
La sous-unité NR2B constitue un centre d’intérêt
croissant comme cible thérapeutique de nombreuses
pathologies du système nerveux central, avec une
discrimination entre les sous-types de NR2B pour
obtenir des molécules avec un profil thérapeutique
satisfaisant en ce qui concerne les effets indésirables, en particulier psychomimétiques. La localisation extrasynaptique de NR2B et sa modification
protéique, en particulier par la phosphorylation de
la tyrosine, représentent des axes de recherche
thérapeutique très stimulants. Connaissant le rôle
clé des sous-unités NR2B dans la cognition et au
cours du développement, un suivi de l’utilisation à
long terme d’antagonistes sera bien sûr un corollaire
indispensable à l’évaluation pendant les phases de
développement clinique de ces molécules (13). ■
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La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 | 393
DOSSIER THÉMATIQUE
Voie glutamatergique
et maladie d’Alzheimer
La voie glutamatergique :
aspects physiologiques et pharmacologiques du récepteur NMDA
Mécanisme d’action de la mémantine
mémantine pour le récepteur NMDA est beaucoup
plus faible que celle des autres antagonistes du
récepteur NMDA (phencyclidine, kétamine, MK801) :
il faut une concentration de mémantine largement
supérieure à celle des autres antagonistes pour
occuper la même proportion de récepteurs NMDA.
Aux concentrations cérébrales thérapeutiques, la
mémantine se fixe préférentiellement sur 50 % des
récepteurs NMDA exprimés. L’effet antagoniste de
la mémantine se distingue aussi de celui des autres
La mémantine est un antagoniste non compétitif
réversible et voltage-dépendant (c’est-à-dire qu’elle
ne se fixe pas sur le même site que le glutamate) des
effets du glutamate au niveau du récepteur NMDA.
Ce dernier est un récepteur canal, à conductance
principalement calcique, composé de deux sousunités (NR1 et NR2) [fi gure 1]. La mémantine se
fixe préférentiellement sur un site de fixation de
la sous-unité NR2 (fi gure 2). L’affinité (Ki) de la
Na+/Ca2+
1
1
antagonistes (phencyclidine, kétamine, MK801) par
la cinétique de blocage : la mémantine reste moins
longtemps piégée dans le récepteur NMDA que la
phencyclidine ou le MK801. Cette cinétique s’explique par la plus faible affinité de la mémantine
mais aussi par le caractère voltage-dépendant de
l’effet antagoniste : dès que le neurone s’active
(dépolarisation), la mémantine se dissocie du récepteur NMDA (fi gure 3).
R. Bordet
2A
2B
NH2
1
2B
K+
COOH
Figure 1. Le récepteur NMDA est un récepteur canal composé de quatre sous-unités dont il existe deux isoformes (NR1 et NR2).
NMDA
K+
Glycine
Polyamines
Zn2+
NR2
NR1
Mg2+
Ca2+
Na+
394 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010
Figure 2. Le récepteur NMDA
doit être co-activé par la glycine
pour être fonctionnel. Il est régulé
par différentes substances, dont
des ions (magnésium et zinc). Il
possède un site de fixation (flèche
rouge) situé dans le canal sur lequel
peuvent venir interagir les principaux antagonistes NMDA.
Ca2+
– 70 mV
– 50 mV
– 20 mV
Mg2+
Mémantine
MK801
Interactions pharmacodynamiques
de la mémantine*
Les interactions médicamenteuses de la mémantine sont
essentiellement pharmacodynamiques et résultent de deux
phénomènes neurobiologiques : le blocage du récepteur
NMDA au niveau d’un site commun aux principaux antagonistes utilisés en thérapeutique humaine ; la modulation par
le glutamate de la transmission d’autres neurotransmetteurs,
comme la dopamine.
L’association de la mémantine à d’autres antagonistes des
récepteurs NMDA (amantadine, kétamine, dextrométhorphane) expose à un risque de psychose pharmacotoxique,
dans la mesure où l’association de ces médicaments entraîne
un blocage massif des récepteurs NMDA, empêchant toute
transmission glutamatergique (fi gure 4). Cela est renforcé
par le fait que ces antagonistes peuvent agir sur le même site
de fixation mais sur des isoformes différentes de la sous-unité
NR2, ce qui explique l’effet additif de leur blocage NMDA.
Le glutamate régule l’activité des neurones striataux, en
particulier via la sous-unité NR2B, qui subit des modifications au cours la maladie de Parkinson. Cela explique que
le blocage de cette sous-unité NR2B vienne potentialiser
les effets des médicaments antiparkinsoniens, qu’ils soient
dopaminergiques (L-dopa, agonistes dopaminergiques) ou
anticholinergiques.
R. Bordet
* Interactions médicamenteuses de la mémantine : L-dopa, agonistes
dopaminergiques, anticholinergiques, barbituriques, neuroleptiques,
dantrolène, baclofène, amantadine, kétamine, dextrométhorphane,
phénytoïne, cimétidine, ranitidine, procaïnamide, quinidine, quinine,
nicotine, hydrochlorothiazide, warfarine, anticoagulants oraux. Il n’y a
pas d’interaction médicamenteuse entre la mémantine et le donépézil
ou la galantamine.
A
Figure 3. L’effet antagoniste de la mémantine
(comme celui du magnésium) est un phénomène
dépendant de l’état électrique du neurone : quand
le neurone se dépolarise (quand il devient moins
négatif), donc quand il s’active, l’effet antagoniste
disparaît car la mémantine (ou le magnésium)
se dissocie du récepteur. L’effet antagoniste d’un
composé de référence comme le MK801 est indépendant de l’état d’activation du neurone.
B
Figure 4. Administrée à la posologie recommandée, la mémantine (en vert) occupe
50% des récepteurs NMDA, compte tenu de son degré d’affinité (en A). Lorsqu’un
autre antagoniste (en rouge) est administré simultanément, l’ensemble des récepteurs NMDA est bloqué, ce qui a un effet plus intense et comportant un risque de
réactions psycho-comportementales anormales.
La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 11 - décembre 2010 |
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