“ C Cardiologues et neurologues vasculaires : dans le même bateau !

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ÉDITORIAL
Cardiologues et neurologues
­vasculaires : dans le même bateau !
Cardiologists and vascular neurologists:
in the same boat!
“
C
e numéro est intitulé “Quand le cerveau est un problème pour
les cardiaques”. Il est consacré au thème des complications
neurologiques des maladies ou des traitements cardiologiques. Il
y a en effet de nombreux motifs d’interaction entre la cardiologie moderne
et la neurologie vasculaire.
Pr Philippe-­
Gabriel Steg
Service de cardiologie, hôpital
Bichat-Claude-Bernard, Paris ;
rédacteur en chef de La Lettre du
Cardiologue.
1. Amarenco P, Lavallée PC,
Labreuche J et al. Coronary
artery disease and risk of
major vascular events after
cerebral infarction. Stroke
2013;44(6):1505-11.
2. Calvet D, Touzé E, Varenne
O, Sablayrolles JL, Weber S,
Mas JL. Prevalence of asymptomatic coronary artery disease
in ischemic stroke patients: the
PRECORIS study. Circulation
2010;121(14):1623-9.
Les causes des accidents aigus sont souvent communes : la maladie
athérothrombotique est une cause commune à l’infarctus du myocarde
et à une partie importante (même si ce n’est pas la totalité) des infarctus
cérébraux ; en outre, les embolies d’origine cardiaque, notamment sur
fibrillation auriculaire, sont une autre cause fréquente d’infarctus cérébral.
Plusieurs équipes françaises, notamment celle de Pierre Amarenco, se sont
particulièrement intéressées au risque partagé d’accident coronarien
et cérébral chez les patients athérothrombotiques. L’étude prospective
AMISTAD (1) a notamment mis en lumière l’importance
du chevauchement entre athérome cérébral et athérome coronaire,
et le caractère hautement pronostique de la coexistence de lésions
coronaires, même silencieuses, chez les patients survivant à un infarctus
cérébral. De même, les données de l’étude PRECORIS, évaluant
systématiquement la présence de lésions coronaires au scanner après
accident vasculaire cérébral ischémique, ont confirmé qu’au moins
un cinquième de ces patients sont porteurs de lésions coronaires
évoluées (2). Des travaux complémentaires sont nécessaires pour savoir s’il
faut rechercher activement ces localisations après tout accident vasculaire,
cérébral ou pas, et si une revascularisation systématique modifierait
le pronostic. Plus généralement, le risque coronarien des patients ayant
fait un accident vasculaire cérébral ischémique est élevé, et assez proche
de celui des coronariens avérés, de telle sorte que, par analogie
avec le diabète, on peut soutenir que l’existence d’une maladie
cérébrovasculaire est un équivalent, en termes de risque cardiovasculaire,
de maladie coronaire (3).
Les traitements cardiologiques sont potentiellement sources
de complications cérébrales, qu’il s’agisse du risque d’hémorragie
intracrânienne sous anticoagulants, sous antiplaquettaires, notamment
chez les patients fragiles, du fait de leur âge ou de leurs antécédents, ou
qu’il s’agisse du risque de complication neurovasculaire des thérapeutiques
invasives (chirurgie cardiaque, voire remplacement valvulaire percutané
de la valve aortique par technique TAVI [Transcatheter Aortic Valve
6 | La Lettre du Cardiologue • n° 468 - octobre 2013
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Implantation]). Avec le développement considérable du TAVI, la sécurité – et notamment
la prévention des complications cérébrovasculaires – est devenue un enjeu majeur.
Dans l’infarctus du myocarde, comme dans l’infarctus cérébral, la thrombose joue un rôle
clé, et les traitements antithrombotiques, qu’il s’agisse des antiplaquettaires,
des anticoagulants, voire des thrombolytiques, ont une place dans la prise en charge
en urgence, et en particulier pour les antiplaquettaires, dans la prévention secondaire (4).
3. Amarenco P, Steg PG. Stroke
is a coronary heart disease risk
equivalent: implications for
future clinical trials in secondary stroke prevention. Eur
Heart J 2008;29(13):1605-7.
4. Steg PG, Dorman SH,
Amarenco P. Atherothrombosis
and the role of antiplatelet
therapy. J Thromb Haemost
2011;9(suppl 1):325-32.
L’auteur déclare ne pas avoir
de liens d’intérêts.
Il y a bien d’autres similitudes et zones de chevauchement entre cardiologie et neurologie
vasculaire : la prise en charge de l’infarctus cérébral ressemble de plus en plus à celle
de l’infarctus du myocarde, avec la nécessité d’un traitement ultrarapide pour recanaliser
les artères cérébrales et sauver du cerveau, même si les risques hémorragiques,
et notamment ceux liés à la fragilité ou à la destruction de la barrière hématoencéphalique,
font que les traitements utilisés en neurologie sont souvent beaucoup moins agressifs que
ceux qui sont quotidiens en cardiologie. Il manque également aux neurologues un équivalent
pour le cerveau de ce qu’est l’électrocardiogramme en cardiologie, qui donne de façon non
invasive et quasi-immédiate le diagnostic d’infarctus du myocarde en voie de constitution,
avant même le transfert dans un centre spécialisé, alors que pour l’accident vasculaire
cérébral (AVC), seule l’imagerie en urgence permet de porter un diagnostic de certitude.
Nous n’en sommes pas encore à l’angioplastie primaire de l’AVC, même si cela est déjà tenté
dans le cadre d’essais cliniques, pour l’instant encore décevants. En tous cas, la proximité
thématique et les problèmes cliniques et scientifiques communs contribuent à rapprocher
au quotidien neurologues et cardiologues : ils sont bien dans le même bateau !
”
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La Lettre du Cardiologue • n° 468 - octobre 2013 | 7 
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