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mise au point
Le diagnostic et
le traitement des pneumonies
communautaires de l’enfant
Diagnosis and therapy of community-acquired pneumonia
in children
G. Labouret*
Épidémiologie
Étiologies
La détermination des germes incriminés dépend
des moyens diagnostiques mis en œuvre. Dans
près de 1/4 des cas, la nature de la pneumonie
reste indéterminée. Les causes virales sont prédominantes chez le nourrisson, puis, après 2 ans,
laissent la place aux bactéries. Des co-infections
sont retrouvées dans 16 à 30 % des pneumopathies. Dans les pays industrialisés, Streptococcus pneumoniae et Haemophilus influenzae
sont les plus fréquents avant l’âge de 5 ans ;
au-delà, Mycoplasma pneumoniae est le principal
germe retrouvé. Staphylococcus aureus est plus
rare. Le virus respiratoire syncytial, l’ influenzae
et le virus para-influenza sont les virus les plus
fréquents (1).
Impact de la vaccination
antipneumococcique
* Service de pédiatrie, CHU de
Toulouse.
Malgré l’utilisation du vaccin antipneumococcique
conjugué à 7 valences (Prevenar 7®), le pneumocoque reste un germe à prendre en compte en raison
de sa fréquence et de sa gravité potentielle. Il est
encore responsable de 45 % des pneumopathies
aiguës communautaires (PAC) de l’enfant, et de
63 à 73 % des infections bactériennes (1, 2).
L’introduction du vaccin polysaccharidique conjugué
heptavalent a eu plusieurs conséquences :
➤➤ une diminution rapide des infections invasives à
pneumocoque (bactériémies, méningites et pneumonies non compliquées) chez les jeunes enfants :
aux États-Unis, diminution de 69 % entre 1998 et
2001 chez les nourrissons de moins de 2 ans (3),
et de 35 % chez les enfants de moins de 5 ans (4) ;
➤➤ l’émergence de sérotypes non vaccinaux : diminution régulière du portage pharyngé des sérotypes
vaccinaux chez les enfants vaccinés (de 66 % en
2001 à 11 % en 2008 en France) [5] et chez les
adultes contacts (6) ; augmentation concomitante
du portage des sérotypes non vaccinaux (notamment
le 19A, qui est responsable de 28 % des méningites
et 30 % des bactériémies, et le 7F) ;
➤➤ une augmentation des pleuropneumopathies
chez les enfants de moins de 5 ans (+ 90 %) [4], et
de façon générale chez les enfants et adolescents
de moins de 18 ans (+ 70 %) [7].
Les données spécifiques sur les pneumopathies à
pneumocoque sont moins claires du fait de la difficulté
à obtenir une preuve bactériologique. Aux États-Unis,
on peut noter une diminution de 39 % des hospitalisations pour pneumopathie aiguë communautaire
chez les enfants de moins de 2 ans vaccinés (8).
L’efficacité du nouveau vaccin conjugué contenant
13 valences, et notamment le sérotype 19A, introduit
en France en 2010, sera également à évaluer.
Diagnostic
Le diagnostic repose sur l’association de signes
cliniques et radiologiques.
Diagnostic clinique
Le diagnostic clinique est classiquement posé devant
l’association d’une fièvre supérieure à 38,5 °C à des
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Résumé
Les pneumopathies aiguës communautaires (PAC) de l’enfant sont la conséquence d’une infection du parenchyme pulmonaire, acquise en dehors d’une structure de soins. Elles sont principalement virales chez le
nourrisson ; au-delà, le pneumocoque reste le germe principal à évoquer, du fait de sa gravité potentielle. La
vaccination antipneumococcique a permis de diminuer le portage des sérotypes vaccinaux ainsi que l’incidence des infections invasives à pneumocoque, mais on constate une augmentation des pleurésies dues à des
sérotypes non vaccinaux. La surveillance épidémiologique doit se poursuivre après l’introduction de Prevenar
13®. Les recommandations concernant l’antibiothérapie sont toujours celles éditées par l’Afssaps en 2005,
même si des durées plus courtes de traitement seraient possibles dans les formes non compliquées. Toute
pneumopathie doit être réévaluée cliniquement après 72 heures de traitement bien conduit. La radiographie
thoracique n’est plus contrôlée systématiquement à 1 mois dans les formes non compliquées.
signes respiratoires : tachypnée, signes de lutte,
anomalies auscultatoires (foyer de crépitants,
diminution du murmure vésiculaire, parfois souffle
tubaire). La tachypnée a une excellente valeur prédictive négative : son absence est le meilleur critère
permettant d’infirmer le diagnostic de pneumopathie (9). Les tableaux cliniques varient en fonction
du germe incriminé (tableau I).
Deux grands tableaux cliniques prédominent chez l’enfant et gardent leur valeur en pratique quotidienne :
➤➤ une fièvre élevée à début brutal, une altération
de l’état général, une douleur thoracique, souvent
une douleur abdominale, associées à des signes
auscultatoires en foyer, sont des signes évocateurs
d'une pneumonie à pneumocoque ;
➤➤ après l’âge de 3 ans, un début progressif, une
fièvre modérée, un état général conservé et une
toux prolongée sont évocateurs de M. pneumoniae.
Des manifestations associées articulaires, cutanées,
hématologiques (anémie hémolytique) peuvent
renforcer le diagnostic. Cependant, la distinction
entre mycoplasme et virus est parfois difficile.
Radiographie thoracique
La radiographie thoracique permet de confirmer la
pneumopathie. Sa réalisation n’est pas systématique
pour les patients ambulatoires, lorsque la clinique
est évocatrice et que l’enfant ne présente pas de
complications. Elle doit en revanche être réalisée
chez tous les enfants hospitalisés afin de confirmer
la pneumopathie, son siège et son extension, et de
rechercher des complications éventuelles. Le cliché
doit être réalisé de face, debout si possible, en inspiration. Le profil n’est pas utile en première intention.
Le diagnostic de pneumopathie repose sur la présence
d’une opacité parenchymateuse alvéolaire. Une
opacité systématisée segmentaire ou lobaire avec
un bronchogramme aérique est évocatrice d’un pneumocoque (figure 1, p. 176). Les pneumopathies à
mycoplasme sont moins typiques et peuvent revêtir
plusieurs aspects : un infiltrat hétérogène interstitiel périhilaire le plus souvent avec “cœur hirsute”
(figure 2, p. 176), une opacité alvéolaire systématisée, une pneumonie ronde, ou même, plus rarement, un épanchement pleural. Les pneumopathies
virales se présentent sous la forme d’opacités alvéolaires infiltratives diffuses, bilatérales, hétérogènes,
mal limitées. Enfin, les pneumopathies à S. aureus
revêtent souvent des formes excavées et nécrosantes.
La radiographie peut être normale dans les
72 premières heures suivant le début des symptômes.
La radiographie de contrôle à distance de l’épisode n’est
plus recommandée de façon systématique en cas de
guérison clinique complète dans les PAC non compliquées, que ce soit par la Haute Autorité de santé en
2009 (10) ou par les recommandations américaines (11).
Tableau I. Tableaux cliniques en fonction de l’étiologie.
Bactérienne
Étiologie
Virale
Streptococcus
pneumoniae
Mycoplasma
pneumoniae
Staphylococcus
aureus
Épidémiologie
Épidémique
Sporadique
Épidémique
Sporadique
Âge
Tout âge
Tout âge
À partir de 3 ans
Nourrisson
Début
Progressif
Brutal
Progressif
Brutal
Fièvre
Variable
Très élevée ± frissons
Variable
Élevée
Signes
respiratoires
Rhinite, pharyngite,
conjonctivite, toux,
ronchi, sibilants
Toux sèche, signes en foyer
(crépitants, souffle tubaire,
matité)
Toux paroxystique,
ronchi, sibilants
Détresse respiratoire
aiguë, hémoptysies
possibles
Signes extrarespiratoires
Éruption, diarrhée,
myalgies
Altération de l’état général,
méningisme, douleurs abdominales, rougeur des pommettes
Éruption, myalgies,
arthralgies
Météorisme abdominal,
atteinte cutanée
Tolérance
Bonne
Bonne
Mauvaise
Mauvaise
Mots-clés
Pneumopathies
Enfant
Pneumocoques
Antibiotiques
Summary
Childhood acute communityacquired pneumonia (CAP) is
caused by an infection in the
lung parenchyma, acquired
outside a healthcare institution. In infants, the disease is
generally viral; in older children,
a pneumococcal origin should
be sought, due to its potential
seriousness.
Antipneumococcal vaccination has made it possible to
decrease the number of serotype vaccine carriers, as well as
the incidence of invasive pneumococcal infections, but the
number of cases of pleurisy due
to nonvaccine serotypes has
been rising. Epidemiological
surveillance must continue
after the introduction of
Prevenar 13®. AFSSAPS antibiotic therapy recommendations
are to be followed, although
shorter treatment regimens
may be possible in uncomplicated forms of the disease.
Any pulmonary disease should
be clinically re-evaluated after
72 hours of assiduous treatment. Chest X-rays are no
longer systematically repeated
at 1 month in uncomplicated
forms.
Keywords
Pneumonia
Child
Streptococcus pneumoniae
Antibiotics
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mise au point
Le diagnostic et le traitement des pneumonies communautaires de l’enfant
pathies bactériennes, mais parfois aussi lors d’infections virales (adénovirus surtout). L’interprétation
de ces marqueurs doit être confrontée aux aspects
cliniques et radiologiques, et ils ne doivent pas être
utilisés comme seuls déterminants pour différencier
une étiologie bactérienne d’une étiologie virale.
Figure 1. Pneumopathie franche lobaire aiguë du lobe
supérieur droit à pneumocoque.
Figure 2. Pneumopathie à mycoplasme.
La radiographie doit toutefois impérativement être
réalisée en cas d’absence d’amélioration après 48 à
72 heures de traitement bien conduit. Elle est également
systématique 4 à 6 semaines après le début du traitement en cas de complications, de pneumopathies récidivantes, d’adénopathies ou de pneumopathies rondes.
Examens biologiques
et microbiologiques
Les examens biologiques et microbiologiques ne
sont pas indiqués en ambulatoire dans le cadre d’une
pneumopathie non compliquée.
◆◆ Bilan inflammatoire
Une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles
ainsi qu’une élévation de la protéine C réactive et de
la procalcitonine sont présentes dans les pneumo-
◆◆ Examens microbiologiques spécifiques
➤➤ Hémocultures : elles doivent être pratiquées en
hospitalisation. Elles représentent le seul examen
permettant de poser avec certitude l’étiologie bactérienne, mais ne sont positives que dans 10 % des cas de
pneumonie bactérienne suspectée. Elles permettent
d’établir la sensibilité du germe aux antibiotiques.
➤➤ Examen cytobactériologique des crachats : il est
difficile à réaliser chez l’enfant et n’est pas utilisé en
pratique courante. Il peut être indiqué chez l’enfant
hospitalisé avec expectorations productives (11).
➤➤ Prélèvement nasopharyngé : l’aspiration nasopharyngée chez le jeune enfant permet un diagnostic
rapide de pneumopathie virale par PCR, immunofluorescence, ou culture, ainsi que le diagnostic de
mycoplasme par PCR.
➤➤ Antigène urinaire : la recherche de l’antigène
soluble urinaire pneumococcique (polysaccharide C, antigène de paroi commun à tous les pneumocoques) est de réalisation facile, mais n’est pas
recommandée en raison d’une mauvaise spécificité
(faux positifs au cours d’un simple portage nasopharyngé, et l’antigène reste positif 2 mois après une
infection à pneumocoque) [11].
➤➤ Sérologies : leur apport est important, notamment dans le diagnostic d’infections à M. pneumoniae ou Chlamydia pneumoniae, mais rétrospectif.
La présence initiale d’immunoglobulines (Ig) M et/
ou une élévation des IgG sur 2 sérologies à 15 jours
d’intervalle sont évocatrices d’une infection.
Prise en charge et traitement
Critères d’hospitalisation
La plupart des pneumopathies sont traitées en
ambulatoire. Certains critères doivent mener à une
hospitalisation (tableau II).
Antibiothérapie
Elle est systématique à tout âge en cas de signes de
gravité. Avant 2 ans, on peut tempérer l’attitude thérapeutique en fonction de la tolérance clinique en raison
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mise au point
Tableau II. Critères d’hospitalisation selon les recommandations de l’Afssaps (12).
Terrain
Âge < 6 mois
Pathologie sous-jacente : déficit immunitaire, mucoviscidose,
dysplasie bronchopulmonaire, drépanocytose, asthme sévère,
cardiopathie congénitale
Conditions socio-économiques précaires
Signes respiratoires
Tachypnée : fréquence respiratoire > 60/mn chez les patients
de plus de 2 ans ; > 70/mn chez les patients de moins
de 2 ans
SpO2 ≤ 92 %
Signes de lutte : battement des ailes du nez, balancement
thoraco-abdominal, tirage intercostal, geignements
Signes d’hypercapnie : sueurs, HTA
Signes digestifs
Difficultés d’alimentation
Vomissements
Déshydratation
Fièvre mal tolérée, aspect toxique
Signes radiologiques
Épanchement pleural
Abcès
Pneumopathie intéressant plus de 2 lobes
de la fréquence des bronchopneumopathies virales.
L’antibiothérapie est essentiellement probabiliste,
tenant compte de l’épidémiologie bactérienne. Sa
cible privilégiée reste le pneumocoque, à tout âge,
en cas de tableau compatible, à cause de son risque
infectieux. En l’absence de tableau évocateur, on
privilégie une antibiothérapie antipneumococcique
avant 3 ans ; au-delà, on vise plutôt les germes
atypiques. Dans tous les cas, l’enfant sera réévalué
au bout de 48 heures, et en l’absence d’amélioration,
l’antibiothérapie sera modifiée.
◆◆ Pneumopathie à pneumocoque
Le traitement recommandé par l’ANSM est toujours
l’amoxicilline, avec une posologie de 80 à 100 mg/kg/j
en 3 prises (12). Les Américains conseillent 2 prises, ce
qui améliore l’observance (11). Le dernier rapport du
centre national de référence indique une stabilité du
pourcentage de souches de pneumocoques de sensibilité diminuée à la pénicilline : 31,8 % en 2008 (5).
Pour l’amoxicilline, les souches de sensibilité diminuée
(CMI > 0,5 μg/ml) représentaient 18,1 % en 2008,
et 10 % pour le céfotaxime (légère augmentation).
En revanche, les souches résistantes restent rares :
0,6 % pour l’amoxicilline, 0,2 % pour le céfotaxime.
En cas d’allergie à la pénicilline, une hospitalisation est
préférable avant l’âge de 6 ans pour traiter de manière
adaptée par voie intraveineuse (céphalosporines de
troisième génération en l’absence d’allergie croisée).
Chez le grand enfant et l’adolescent, les alternatives
sont la pristinamycine, le linézolide ou les nouvelles
fluoroquinolones (lévofloxacine, moxifloxacine).
Une durée de traitement de 10 jours est actuellement recommandée, mais des traitements plus
courts, de 5 voire 3 jours, seraient aussi efficaces
dans les formes non compliquées (13, 14).
◆◆ Pneumopathie à M. pneumoniae
À partir de 3 ans, le mycoplasme peut être évoqué
si le tableau clinique est compatible. Les germes
atypiques sont naturellement résistants aux bêtalactamines. Les macrolides représentent le traitement de choix : josamycine 50 mg/kg/j en 2 prises
pendant 14 jours ou clarithromycine 15 mg/kg/j en
2 prises pendant 10 jours (autorisation de mise sur le
marché) [12]. Les Américains recommandent plutôt
l’azithromycine à 10 mg/kg/j le premier jour, puis
5 mg/kg/j 1 fois par jour pour un total de 5 jours. Une
étude réalisée sur 59 enfants atteints d’une pneumopathie atypique rapportait une efficacité supérieure
d’un traitement par azithromycine de 3 jours par
rapport à 14 jours d’érythromycine (15). La Cochrane
conclut même qu’il n’y a aucune évidence quant à
l’efficacité d’un traitement antibiotique quel qu’il
soit dans les infections à mycoplasme (16).
◆◆ Autres
Avant 5 ans, une vaccination incomplète notamment contre l’Haemophilus influenzae de type B ou la
coexistence d’une otite moyenne aiguë peuvent faire
suspecter une infection à H. influenzae. Ce germe peut
être résistant aux bêtalactamines (environ 15 % des
souches) [17]. Ainsi, le traitement de première intention
d’une pneumopathie à H. influenzae est l’association
amoxicilline + acide clavulanique. Il est identique pour
les pneumopathies à Moraxella catarrhalis.
Le choix de l’antibiothérapie doit également tenir
compte des germes moins fréquents, mais responsables d’infections généralement sévères. Ainsi, les
pneumopathies à S. aureus nécessitent généralement une hospitalisation pour antibiothérapie par
voie intraveineuse. La plupart sont sensibles à la
méticilline : le traitement de choix, en cas d’infection prouvée, est la pénicilline M injectable, avec un
relais oral par l’association amoxicilline + acide clavulanique. En présence d’une pneumopathie nécrosante
ou de signes toxiniques faisant évoquer un staphylocoque sécréteur de toxine leucocidine de PantonValentine (LPV), il faut y ajouter la clindamycine.
Les streptocoques pyogènes du groupe A sont également sensibles à l’amoxicilline.
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MIse Au POInT
Le diagnostic et le traitement des pneumonies communautaires de l’enfant
Surveillance
C’est principalement l’apyrexie qui est attendue dans
les 48 à 72 heures suivant le début du traitement.
L’absence d’amélioration doit faire rechercher une
mauvaise observance, un traitement inadapté (dosage
insuffisant, inefficacité liée au germe), une complication, une affection sous-jacente. La radiographie de
thorax doit alors toujours être contrôlée. En l’absence
de critère de gravité ou de complications, l’hospitalisation n’est pas nécessaire et l’antibiothérapie est modifiée. Il n’y pas d’indication à une bithérapie d’emblée.
Complications
Pleuropneumopathie
Les pleurésies purulentes représentent les complications les plus fréquentes des pneumopathies
bactériennes de l’enfant : elles compliquent 1/4 des
pneumonies à pneumocoque chez les patients
hospitalisés. Leur incidence est en augmentation
depuis l’introduction du vaccin antipneumococcique,
surtout chez les enfants de moins de 5 ans (4, 7).
Dans une étude française de 2007, 66 % des pneumocoques responsables de pleuropneumopathies
étaient des sérotypes non vaccinaux (18).
Le diagnostic est évoqué devant une fièvre élevée
persistante associée à une douleur pleurale. L’examen
retrouve une diminution du murmure vésiculaire, une
matité à la percussion. La radiographie thoracique de
face confirme le diagnostic en mettant en évidence
un épanchement liquidien d’importance variable
(figure 3). La ponction pleurale à visée diagnostique est
obligatoire, éventuellement guidée par l’échographie. Si
elle est réalisée avant toute antibiothérapie, la culture
est positive dans 20 à 50 % des cas ; la recherche d’antigènes solubles est positive dans plus de 2/3 des cas.
L’antibiothérapie doit être initialement intraveineuse, probabiliste, active contre les germes les
plus fréquemment rencontrés : le pneumocoque
est le germe prédominant, mais le streptocoque
pyogène du groupe A et S. aureus peuvent également être retrouvés (moins de 10 % des cas). Ainsi, le
traitement de choix est l’association céphalosporine
de troisième génération + vancomycine ou rifampicine. Les aminosides et la fosfomycine ne sont pas
recommandés (mauvaise diffusion pleurale). En cas
de signes de gravité ou de signes toxiniques, la clindamycine peut être ajoutée. Il n’y a pas de consensus
concernant la durée de l’antibiothérapie par voie
intraveineuse : elle est généralement maintenue
jusqu’à l’amélioration clinique (apyrexie) et biologique, soit une quinzaine de jours, puis relayée par
la voie orale pour une durée totale de 4 à 6 semaines.
La prise en charge de l’épanchement n’est pas codifiée : le drainage est généralement réservé aux formes
de grande abondance ou mal tolérées. La limitation
des indications du drainage aux formes de mauvaise
tolérance ne modifierait pas l’évolution à court et
à long terme, et notamment ne diminuerait pas la
durée de l’antibiothérapie par voie intraveineuse (19).
L’évolution à long terme est bonne chez l’enfant, sans
séquelles pleurales.
Abcès pulmonaire
L’abcès pulmonaire est rare chez l’enfant. Il est dû à
une nécrose tissulaire au sein d’une condensation,
avec la formation d’une cavité à paroi épaisse. Il est
à évoquer devant une hyperthermie persistante associée à une toux productive. La radiographie met en
évidence un niveau liquidien au sein d’une opacité
arrondie. Les germes habituellement en cause sont
S. aureus, les germes anaérobies (pathologies d’inhalation), K. pneumoniae, les streptocoques du groupe
A et P. aeruginosa.
Pneumopathie nécrosante
Figure 3. Pleuropneumopathie droite.
Il s’agit d’une nécrose du parenchyme au sein d’une
condensation responsable de la formation de cavités
multiples remplies d’air. Elle survient malgré un traitement bien conduit et explique la persistance du
syndrome inflammatoire. Elle s’accompagne souvent
d’un épanchement pleural. Les cavités peuvent
parfois s’étendre à la plèvre, avec la formation d’un
pyopneumothorax. Les germes en cause sont habituellement le staphylocoque, le streptocoque du
groupe A et le pneumocoque.
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Pneumatocèle
Il s’agit d’une cavité à parois fines remplie d’air
consécutive à la destruction des alvéoles et des
bronchioles. Elle peut se compliquer d’un pneumothorax ou d’un pyopneumothorax. L’évolution
est favorable, avec une régression spontanée dans
les 6 mois.
■
L’auteur déclare ne pas avoir de liens
d’intérêts.
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Pediatr Surg Int 2006;22:357-62.
Au sommaire
du prochain numéro
à paraître en décembre 2013
ÉDITORIAL
Les nouveaux anticoagulants
O. Sanchez
spécialiste
le courrier du
Faut-il effectuer une radiographie
pulmonaire chez tout patient suspect
de PAC en ambulatoire ?
FICHE
E
ONCO-PNEUMOLOGI
La thermoplastie
bronchique
dans l’asthme
Le cancer
bronchopulmonaire
changements
en France : quels
en 10 ans ?
C. Mayaud
MISE AU POINT
AU
Éditorial & MISE
nouveaux anticoagulants dans
la maladie thromboembolique veineuse
POINT
isième main” :
Le tabagisme “de tro
réel
fantasme ou danger
pour la santé ?
Société éditrice : EDIMARK
SAS
Toute l’actualité
sur
de votre spécialité
– ISSN : 1292-5977
CPPAP : 0913 T 81245
PÉRIODIQUE DE FORMATION
EN LANGUE FRANÇAISE
www.edimark.tv
Bimestriel
€
Prix du numéro : 27
F. Couturaud
Prise en charge des hernies
diaphragmatiques
Transplantation pulmonaire :
état des lieux en 2013
C. Gomez
DONNÉES
NOUVELLES
Épigénétique dans les maladies
chroniques des voies aériennes
A. Bergougnoux , A. Bourdin
ONCO-PNEUMOLOGIE
La stratégie de maintenance
est-elle devenue un standard ?
M. Pérol
A. Deschildre, A. Benachi
ark.fr
www.edim
N° 5
Sept.-oct. 2013
octobre 2013.indd
LPN5 septembre-
24/10/13 12:53
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La Lettre du Pneumologue • Vol. XVI - n° 5 - septembre-octobre 2013 |
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