SARCOMES DES TISSUS MOUS

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Sarcomes
● E. Raymond*
SARCOMES DES TISSUS MOUS
Le résultat d’une analyse de la base de données de l’EORTC
STBSG (Soft Tissue and Bone Sarcoma Group) a été rapporté
lors des présentations orales à l’ASCO 2000. Cette analyse
concernait 464 patients, la plupart âgés de plus de 50 ans et
présentant en majorité un bon état général, avec un indice de
performance OMS à 87 %.
L’objectif de cette étude était d’évaluer l’impact du temps de
réponse à une première ligne de chimiothérapie contenant des
anthracyclines sur la survie des patients répondeurs.
Dans cette étude, 30 % des patients présentaient des léiomyosarcomes, 14 % des histiocytofibromes malins, 10 % des liposarcomes et 9 % des synoviosarcomes.
Dans 60 % des cas, la tumeur était de grade 3. Les sites métastatiques étaient représentés par des métastases pulmonaires
dans 60 % des cas et par des métastases hépatiques dans 9 %
des cas. L’évaluation de la réponse au traitement à base
d’anthracycline était effectuée toutes les deux cures.
Dans cette étude, présentée par Van Glabbeke (abstr. 2176), la
date de la réponse était dépendante du grade histopronostique,
et il a été mis en évidence que les répondeurs précoces avaient
une survie plus faible que les répondeurs tardifs. Cela amène à
plusieurs réflexions, notamment concernant la corrélation entre
la date de réponse et le grade, qui suggère que les tumeurs à
fort potentiel de prolifération, et donc à très haut risque d’évolution polymétastatique, sont également des tumeurs plus sensibles aux agents de chimiothérapie, car contenant plus de cellules en cycle cellulaire. Par ailleurs, un des biais les plus
importants de cette étude est que le volume tumoral initial n’a
pas été pris en compte dans l’analyse. Cela laisse entendre que
des tumeurs à croissance plus lente, et dont le volume tumoral
initial pouvait être également beaucoup plus élevé à l’entrée
dans l’étude, auront un délai d’obtention d’une réponse plus
important, et donc potentiellement une survie plus longue.
Cela nécessitera d’être pris en compte pour une analyse complète et définitive de cet essai rétrospectif.
Il existe peu de nouvelles molécules de chimiothérapie ayant
définitivement montré leur intérêt et leur impact sur l’évolution des sarcomes des tissus de l’adulte. L’apparition de nouveaux médicaments est donc fortement souhaitable.
* IGR, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif Cedex.
La Lettre du Cancérologue - volume IX - n° 3 - juin 2000
À propos des nouveaux agents pouvant avoir un effet sur les
sarcomes des tissus mous, on notera les présentations de Delaloge, Le Cesne et Demetri (abstr. 2181, 2182, 2177) concernant l’ET 743.
L’ET 743 est un agent alkylant d’origine marine ayant une
activité in vitro et in vivo sur des modèles animaux de sarcome
à des concentrations picomolaires. Cet agent fixe le petit sillon
de l’ADN et présente des propriétés d’interaction avec la tubuline. La dose habituellement utilisée est de 1 500 µg/m2 en perfusion continue de 24 heures toutes les trois semaines. Une
activité clinique a été observée chez des patients présentant des
sarcomes osseux et des tissus mous lors des études de phase I,
et confirmée ultérieurement par l’analyse des patients traités
en France à titre compassionnel, qui permet de retrouver une
activité antitumorale chez plusieurs d’entre eux.
Ce médicament présente une toxicité principalement hématologique, caractérisée par des leucopénies et des thrombopénies.
De façon exceptionnelle, mais difficilement prévisible, une
toxicité plus sévère s’accompagnant d’anomalies hépatiques et
d’insuffisance rénale a été rapportée.
Il est possible, d’après des travaux cumulant les données des
patients traités par ET 743, que le taux initial de phosphatases
alcalines soit un élément prédictif de la toxicité du médicament.
Ce médicament présente par ailleurs la particularité d’entraîner
des élévations transitoires des transaminases, qui nécessitent
rarement l’arrêt du traitement et diminuent progressivement au
cours des cures successives. Cela peut suggérer un métabolisme particulier de cette molécule.
En termes d’efficacité, l’analyse combinée des différents
patients traités pour des sarcomes des tissus mous permet de
retrouver un taux de réponse objective variant de 4 à 17,6 %
selon que les patients ont ou non été traités antérieurement par
chimiothérapie. Un nombre important de réponses mineures ou
de stabilisations est souvent retrouvé (en moyenne 44 %).
L’analyse de l’ensemble des résultats tend à montrer que, si le
patient a reçu plus d’une ligne de chimiothérapie, le taux de
réponse objective est de seulement 4,5 %, pour atteindre 8 %
lorsque le patient n’a reçu qu’une première ligne de chimiothérapie et 17,6 % lorsque le patient est chimio-naïf.
Ces données, obtenues sur un faible effectif, mériteront d’être
recontrôlées ultérieurement sur un plus grand nombre de
patients.
Ces résultats intéressants pour un nouveau médicament présentant un mode d’action original laissent espérer une augmentation de l’efficacité de nouvelles combinaisons de chimiothéra133
pie à base d’ET 743, éventuellement en association avec les
anthracyclines ou d’autres alkylants tels l’ifosfamide ou le cisplatine.
Des études devraient débuter prochainement dans ce sens.
SARCOMES OSSEUX
Une étude a évalué l’impact sur la survie à long terme des chimiothérapies néoadjuvantes pour le traitement d’ostéosarcomes localisés des extrémités chez 570 patients, dont 58 %
étaient âgés de moins de 17 ans.
Le siège de la tumeur primitive était le fémur dans 55 % des
cas, le tibia/péroné dans 31 % des cas, l’humérus/radius ou
cubitus dans 14 % des cas ; dans 43 % des cas, les tumeurs
étaient proximales.
Soixante-dix pour cent des patients avaient présenté une mauvaise réponse initiale à la chimiothérapie et 29 % des patients
avaient dû avoir une chirurgie par amputation, contre 65 % un
traitement conservateur.
Dans cette analyse cumulée présentée par Whelan (abstr.
2175), la survie à 50 mois était de 56 %, avec un plateau à la
cinquième année. Le site de rechute était pulmonaire dans
33 % des cas, et survenait dans un délai médian d’un an. Parmi
les paramètres pronostiques, celui qui semblait être le plus
important en termes de survie était la mauvaise réponse initiale
à une chimiothérapie d’induction.
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La Lettre du Cancérologue - volume IX - n° 3 - juin 2000
Les mélanomes
● E. Raymond*
Le repérage d’un ganglion sentinelle fait tour à tour appel à
l’identification de la lésion cutanée et à l’injection de bleu de
méthylène, au repérage ganglionnaire, à la visualisation de la
tumeur primitive et du premier relais ganglionnaire et à l’injection, alors, d’un traceur radioactif.
Lors de l’intervention chirurgicale, la sonde de détection de
radioactivité permet de localiser la zone marquée dans laquelle
se situe le ganglion sentinelle. L’exérèse de la lésion primitive
et celle du ganglion sentinelle sont réalisées dans le même
temps opératoire.
Une étude présentée par Gershenwald et une autre présentée
par Leong (abstr. 2169, 2170) ont évalué l’incidence et la
signification de la présence d’un ganglion sentinelle en fonction de l’épaisseur de la tumeur primitive et de la présence ou
non d’une ulcération.
La figure 1 reprend l’incidence du ganglion sentinelle dans
une population de 900 patients en fonction de l’épaisseur de la
tumeur primitive. On s’aperçoit que cette incidence augmente
avec la profondeur de l’atteinte et est plus importante en cas de
mélanome ulcéré. Par ailleurs, la présence d’un ganglion sentinelle double le risque de récidive et de décès, à épaisseur
égale, dans une population de 357 patients ; elle représente
ainsi un facteur prédictif de la survie.
Un autre aspect plus thérapeutique concernait une étude randomisée monocentrique réalisée au MD Anderson et présentée
par Eton (abstr. 2174). Cette dernière comparait une chimiothérapie associant cisplatine, vinblastine et dacarbazine à la
même chimiothérapie à laquelle étaient associés interféron
α2b et interleukine 2 chez des patients porteurs de mélanomes
métastatiques. Les doses d’interféron étaient de trois millions
d’unités par mètre carré en sous-cutané associées à l’interleukine 2 à neuf millions d’unités par mètre carré pendant quatre
jours en perfusion continue.
* IGR, 39, rue Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif Cedex.
La Lettre du Cancérologue - volume IX - n° 3 - juin 2000
Tout mélanome (900 patients)
Mélanome ulcéré
Mélanome non ulcéré
% ganglions sentinelles positifs
A
u cours de l’ASCO 2000, plusieurs études se sont focalisées sur l’intérêt de la mise en évidence du ganglion
sentinelle dans le mélanome.
58,8
60
45,5
50
37
40
31,2
28,5
30
23,1
23,6
20
11,4
10
3,2
5,9
9,4
3
0
≤ 1,00 mm
1,01-2,00 mm
2,01-4,00 mm
> 4,00 mm
Épaisseur de la tumeur primitive
Figure 1. Incidence du ganglion sentinelle de mélanome en fonction de
l’épaisseur de la tumeur primitive et de la présence d’une ulcération.
Dans cette étude, le taux de réponse objective était de 48 %
dans le groupe recevant une immunothérapie, contre 25 %
dans le groupe n’en recevant pas (p = 0,001). Ces résultats sont
associés à une augmentation de la survie sans maladie et de la
survie globale de respectivement 4,9 mois et 11,9 mois dans le
groupe recevant une immunothérapie, contre 2,4 mois et
9,2 mois dans le groupe traité seulement par chimiothérapie.
Le corollaire, dans le groupe traité par immunothérapie, était
une toxicité très importante. Par ailleurs, le coût estimé du traitement incluant l’immunothérapie était significativement plus
élevé.
Les résultats de ces études, bien que très intéressants et favorables à l’association d’une immunothérapie à la chimiothérapie, ne peuvent néanmoins être étendus à une population de
patients plus large, moins sélectionnée, dans le cadre d’une
étude multicentrique. La plus grande prudence s’impose donc
dans les tentatives de reproduction de cet essai thérapeutique
hors cadre protocolaire.
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