Dualité : Résultats sur la dimension de l’espace dual Jean-Baptiste Campesato 1er juin 2009 Il est aisé de démontrer que l’espace dual d’un espace vectoriel de dimension finie est aussi de dimension finie et de même dimension. L’enjeu de cette note est de présenter des résultats sur la dimension de l’espace dual d’un espace vectoriel de dimension infinie. Dans toute la suite K désigne un corps commutatif pour les lois + et ×. Lorsque l’on considérera un espace vectoriel E sur K, on notera indifférement la première loi du corps K et la loi de composition interne de E par +, le contexte determinant de quelle loi il s’agit. La loi de composition externe à gauche de E sera notée . mais pour simplifier les écritures les signes . et × pourront être ommis, le contexte donnant le sens. 1 Rappels et cas de la dimension finie Définition Soit E un espace vectoriel sur K. On nomme forme linéaire de E toute application linéaire de E dans K. Définition - Notation Soit E un espace vectoriel sur K. L’ensemble des formes linéaires de E est noté E ∗ et se nomme espace dual de E. Proposition 1 Soit E un espace vectoriel sur K. Alors E ∗ est un espace vectoriel sur K pour les lois de compositions respectivement interne et externe à gauche suivantes : • ∀(f, g) ∈ E ∗ 2 , (f +∗ g) = (x 7→ f (x) + g(x)) ∈ E ∗ (de neutre l’application nulle) • ∀(λ, f ) ∈ K × E ∗ , (λ.∗ g) = (x 7→ λ.g(x)) ∈ E ∗ Dans la suite les lois +∗ et .∗ seront aussi notées + et ., le contexte determinant s’il s’agit des lois de E ou de E ∗ (ou de K pour +). De même, le signe .∗ pourra etre ommis. L’application nulle sera notée 0 tout comme les neutres de K et de E par leurs lois +. Démonstration facile et laissée au lecteur. Proposition 2: Cas de la dimension finie Soit E un espace vectoriel sur K de dimension finie. Alors E ∗ est aussi de dimension finie et dim E = dim E ∗ Démonstration Soient n = dim E et (ei )i∈J1;nK une base de E. Dualité : dim E ∗ - Jean-Baptiste Campesato - Page 2/8 E −→ K où [x]i est la composante de x selon x 7−→ [x]i ∗ ei . On montre aisément que les ei sont linéaires et donc que (e∗i )i∈J1;nK est une famille de E ∗ . Pour tout i ∈ J1; nK posons e∗i : Soit (λ1 , . . . , λn ) ∈ K n tel que n X λi e∗i = 0. i=1 Pour tout j ∈ J1; nK on a 0 = n X ! λi e∗i (ej ) = λj ej ⇒ λj = 0. i=1 Donc (e∗i )i∈J1;nK est une famille libre de E ∗ . Soit f ∈ E ∗ . Pour tout x ∈ E on a par linéarité de f : n n n X X X f (x) = [x]i f (ei ) = e∗i (x)f (ei ) = f (ei )e∗i (x) (il s’agit d’éléments de K qui i=1 i=1 i=1 est un corps commutatif). n X Donc f = f (ei )e∗i . i=1 Donc (e∗i )i∈J1;nK est une famille génératrice de E ∗ . Donc (e∗i )i∈J1;nK est une base de E ∗ , on en déduit que E ∗ est de dimension finie et que dim E ∗ = n = dim E. 2 Cas de la dimension infinie Notons que l’existence d’une base en dimension infinie nécéssite le lemme de Zorn et donc l’axiome de choix. Nous admettons donc l’axiome du choix. 2.1 En se passant du lemme 1, le théorème d’Erdös-Kaplansky se présente aussi sous la forme suivante : si E est un espace vectoriel sur K de dimension infinie ayant une base indexée par I, alors dim E ∗ = card (K I ) = (card K)card I . K I est l’ensemble des applications de I dans K. On suppose connu que K I est un espace vectoriel sur K. Théorème Ce théorème est nommé théorème d’Erdös-Kaplansky dans Algèbre 1-3 de N. Bourbaki (chapitre II, Exercices, p193). La démonstration suivante est une adaptation de celle de B. Gostiaux dans son Cours de mathématiques spéciales, tome 1 : algèbre pour rester accessible avec seulement les outils mathématiques du niveau bac+2 actuel (la version du livre fait appel à des résultats étudiés dans les chapitres précédents). Théorème 1: Théorème d’Erdös-Kaplansky Soit E un espace vectoriel sur K de dimension infinie. Alors dim E ∗ = card E ∗ . La démonstration de ce théorème requiert plusieurs lemmes : Lemme: lemme 1 Soient E un espace vectoriel sur K de dimension infinie, I un ensemble tel que card I = dim E. Alors E ∗ est isomorphe à K I . Dualité : dim E ∗ - Jean-Baptiste Campesato - Page 3/8 Démonstration du lemme 1 Il existe une base de E de la forme (ei )i∈I . E ∗ −→ KI Soit θ : . ϕ 7−→ (i 7→ ϕ(ei )) • θ linéaire : soient (ϕ, ψ) ∈ E ∗ 2 et (λ, µ) ∈ K 2 . Alors ∀i ∈ I, (θ(λϕ + µψ))(i) = (λϕ+µψ)(ei ) = λϕ(ei )+µψ(ei ) = λ(θ(ϕ))(i)+µ(θ(ψ))(i) = (λ(θ(ϕ))+µ(θ(ψ)))(i). Et donc θ(λϕ + µψ) = λ(θ(ϕ)) + µ(θ(ψ)). • θ injective : θ(ϕ) = 0 ⇒ ∀i ∈ I, ϕ(ei ) = 0 ⇒ ϕ = 0 (car une application linéaire est caractérisée par son image sur une base). • θ surjective : soit ψ ∈ K I , nous allons encore utiliser le fait qu’une application linéaire est caractérisée par son image sur une base. En effet si on pose E −→ X K ∗ ϕ : x 7−→ [x]i ψ(i) , on a bien ϕ ∈ E et ψ = θ(ϕ). i∈I Lemme: lemme 2 K I est l’ensemble des applications de I dans K. On suppose connu que K I est un espace vectoriel sur K. Soient I un ensemble non vide et (ak )k∈J1;nK une famille finie d’éléments distincts de KI . Alors il existe une partie de I de cardinal fini non nul, J, telle que pour tout k ∈ J1; nK, les éléments de (ak (i))i∈J ∈ K card J soient distincts. Démonstration du lemme 2 Rappelons qu’une paire est composée de deux éléments distincts. Pour tout (k, l) ∈ J1; nK2 tel que k 6= l, ak et al sont distinctes, il existe donc au moins un jk,l ∈ I tel que ak (jk,l ) 6= al (jk,l ) (ie pour chaque couple d’éléments k et l distincts de J1; nK, on se donne un élément jk,l (axiome du choix), dont on a justifié l’existence, vérifiant ak (j[ k,l ) 6= al (jk,l )). Posons alors J = {jk,l }. {k,l} paire de J1;nK Alors J ⊂ I, J 6= ∅, card J ≤ n(n−1) et pour tout k ∈ J1; nK les éléments de 2 (ak (i))i∈J ∈ K card J sont distincts. Rappelons que si P ∈ K[XX 1 , . . . , Xn ] (polynôme à n indéterminées et à coefficients dans K) alors P (X1 , . . . , Xn ) = uj1 ,...,jn X1j1 . . . Xnjn (j1 ,...,jn )∈Nn Lemme: lemme 3 Le lemme 3 signifie simplement que toute partie finie de Kn est un ensemble algébrique affine en géométrie algébrique. Soient n ∈ N \ {0} et (bi )i∈J1;kK une famille finie de n-uplets distincts. Il existe alors P ∈ K[X1 , . . . , Xn ] tel que P (b1 ) 6= 0 et ∀i ∈ J2; kK, P (bi ) = 0. Démonstration du lemme 3 On note pour tout i ∈ J1; kK, bi = (bi,1 , . . . , bi,n ). On justifie le lemme par récurrence sur k le cardinal de la famille : Initialisation : au rang k = 2. Comme b1 et b2 sont distincts, il existe j ∈ J1; nK tel que b1,j 6= b2,j . Considérons alors le polynôme P (X1 , . . . , Xn ) = Xj − b2,j alors P (b1 ) 6= 0 et P (b2 ) = 0. Hérédité : supposons la propriété vraie à un certain rang k alors : Soit (bi )i∈J1;k+1K une famille de n-uplets distincts. D’après l’hypothèse de récurrence il existe Q ∈ K[X1 , . . . , Xn ] tel que Q(b1 ) 6= 0 et ∀i ∈ J2; kK, Q(bi ) = 0. Dualité : dim E ∗ - Jean-Baptiste Campesato - Page 4/8 Puis d’après l’étude au rang k = 2 il existe R ∈ K[X1 , . . . , Xn ] tel que R(b1 ) 6= 0 et R(bk+1 ) = 0. Alors P = QR vérifie la propriété pour toute la famille (bi )i∈J1;k+1K . Le lemme suivant nécéssite l’introduction d’une nouvelle notion : Soit I un ensemble et S = {Xi , i ∈ I} un ensemble d’indéterminées indexées par I. On pose AI = K[S]. Ce qui signifie donc que P ∈ AI ⇔ ∃n ∈ N, ∃I 0 = (i1 , . . . , in ) ⊂ I, P ∈ K[Xi1 , . . . , Xin ]. (ie il existe une partie finie I 0 de I tel que P soit un polynôme par rapport aux indéterminées Xi , i ∈ I 0 ). Notons qu’on pourrait montrer que AI est une algèbre. Lemme: lemme 4 Le lemme 4 est une conséquence du théorème de Dedekind d’indépendance des caractères. Soient I un ensemble et a ∈ K I . AI −→ K Soit δa : . P (Xi1 , . . . , Xir ) 7−→ P (a(i1 ), . . . , a(ir )) Alors (δa )a∈K I est une famille libre de A∗I , l’espace dual de AI . Démonstration du lemme 4 Pour simplifier les notations, pour un polynôme P (Xi1 , . . . , Xir ) de AI et une application a de K I , on notera P (a) = P (a(i1 ), . . . , a(ir )). Soit (ai )i∈J1;kK une famille finie d’éléments distincts de K I . Il s’agit d’une famille d’éléments de A∗I : Pour tout p ∈ J1; kK, pour tout (P, Q) ∈ AI 2 et pour tout (λ, µ) ∈ K 2 , δap (λP + µQ) = (λP + µQ)(ap ) = λP (ap ) + µQ(ap ) = λδap (P ) + µδap (Q). Et même d’une famille libre : k X Soit (λ1 , . . . , λk ) ∈ K k tel que λp δap = 0 (l’application nulle). p=1 Supposons par l’absurde les λp non tous nuls. Fixons par exemple λ1 6= 0, quitte à réorganiser l’ordre des indices (grâce à la commutativité de la loi + de K). Alors d’après le lemme 2 il existe une partie J de I, de cardinal fini n, vérifiant pour tout p ∈ J1; kK que les éléments de (ap (i))i∈J ∈ K n sont distincts. On pose désormais pour tout p ∈ J1; kK, bp = (ap (i))i∈J ∈ K n . Si on écrit J = {i1 , . . . , in } ⊂ I alors d’après le lemme 3 il existe P un polynôme par rapport aux indéterminées (Xi1 , . . . , Xin ) (et donc P ∈ AI car J ⊂ I) vérifiant P (b1 ) 6= 0 et ∀p ∈ J2; kK, P (bp ) = 0. On remarque que ∀p ∈ J1; kK, P (ap ) = δap (P ) et donc δa1 (P ) 6= 0 et ∀p ∈ J2; kK, δap (P ) = 0. k X Donc λp δap (P ) = λ1 δa1 (P ) = 0 avec λ1 6= 0 ce qui est absurde. | {z } p=1 6=0 Lemme: lemme 5 Soit I un ensemble de cardinal infini. Alors pour tout k ∈ N l’ensemble des parties à k éléments de I a le même cardinal que I. ie ∀k ∈ N, card {J ∈ P(I), card J = k} = card I. Démonstration du lemme 5 Soit k ∈ N et Ik = {J ∈ P(I), card J = k}. card I ≤ card Ik : Fixons k − 1 éléments distincts de I : {i1 , . . . , ik−1 }. Dualité : dim E ∗ - Jean-Baptiste Campesato - Page 5/8 Pour obtenir un élément de Ik il suffit de compléter l’ensemble fixé avec un k-ème élément pris dans I \ {i1 , . . . , ik−1 }. On a donc card I − (k − 1) = card I (car I est de cardinal infini) choix possible. Donc Ik admet au moins card I éléments. On a donc card Ik ≥ card I. card Ik ≤ card I : k! Pour tout J ∈ Ik nous savons qu’il y a (k−k)! = k! injections de J1; kK dans J ⊂ I. Ce qui nous donne k! injections de J1; kK dans I que l’on peut numéroter avec les entiers de J1; k!K : pour une de ces injections f , on note IJ (f ) l’indice lui correspondant. {Injections de J1; kK dans I} −→ Ik × J1; k!K On considère alors l’application Φ : . f 7−→ (J = f (J1; kK), IJ (f )) Φ est bijective du fait de l’unicité de l’indice des injections une fois que leur image par J1; kK est connu. Ainsi : card {Injections de J1; kK dans Ik } = card (Ik × J1; k!K) ⇒ k!card Ik = card {Injections de J1; kK dans I} ≤ card {applications de J1; kK dans I} = (card I)k car une application est caractérisée par le k-uplet formé des valeurs qu’elle prend. = card I (car I est de cardinal infini). Puis on a vu dans le premier point que card I ≤ card Ik avec I de cardinal infini, donc Ik est aussi de cardinal infini. On a donc k!card Ik = card Ik . Finalement on obtient card Ik ≤ card I. Lemme: lemme 6 Le coeur de la bizarrerie du théorème d’Erdös-Kaplansky réside dans le lemme 6 : la K−algèbre AI = K[Xi , i ∈ I] est seulement de dimension card I (alors que R[X, Y ] est de dimension bien plus grande que 2, mais 2 n’est pas infini). Merci à Georges Elencwajg pour cette remarque. Soient E un espace vectoriel de dimension infinie et B = (ei )i∈I une base de E. Alors E est isomorphe à l’espace vectoriel AI défini ci-dessus. Démonstration du lemme 6 S Soit M = {1} {Xip11 . . . Xipkk ; k ∈ N∗ , {i1 , . . . , ik } partie finie de I de cardinal k, (p1 , . . . , pk ) ∈ (N∗ )k }. M est une base de AI car un polynôme de AI est combinaison linéaire des monômes Xip11 . . . Xipkk et il s’agit d’une famille libre car une combinaison linéaire de monômes est identiquement nulle si et seulement si chaque coefficient est nul. I −→ M L’application est injective, donc card M ≥ card I. Donc card M est i 7−→ Xi aussi de cardinal infini. Donc si on pose M0 = M \ {1}, M0 est aussi de cardinal infini et card M0 = card M. Soit J = {i 1 , . . . , ik} une partie finie de I de cardinal k ∈ N. J Alors card (N∗ ) = (card N∗ )k = (card N)k = card N car N est de cardinal infini. Donc pour toute partie finie J de I, on peut se donner (axiome du choix) une bijection J θJ : (N∗ ) → N. ie à chaque partie finie J de I on assigne une unique bijection θJ que l’on conserve pour la suite. Rappelons que card N est le plus petit cardinal infini (pour la définition de F ). Notons F = {(i1 , . . . , ik ) ∈ I k , k ∈ N∗ } l’ensemble des sous familles finies de I (non vides). M0 −→ F ×N Soit θ : . p1 Xi1 . . . Xipkk 7−→ (J = (i1 , . . . , ik ), θJ (il 7→ pl )) Comme les monômes de M0 sont caractérisés par leurs indices (i1 , . . . , ik ) des indéterminées et leurs puissances associées (p1 , . . . , pk ) et comme les θJ sont bijectifs, θ est une bijection. On a donc card F · card N = card M0 = card M. Et comme card F · card N = card F du fait que card N est le plus petit cardinal infini, on a card F = card M. Dualité : dim E ∗ - Jean-Baptiste Campesato - Page 6/8 Posons ∀k ∈ N, Ik = {J ∈ P(I), card J = k}. Puis d’après le lemme 5, ∀k ∈ N, card Ik = card I, donc ∀k ∈ N il existe une bijection ϕk : Ik → I (axiome du choix, dans toute la suite, pour chaque k on garde le même ϕk ). F −→ N∗ × I Posons alors ϕ : . J 7−→ (card J, ϕcard J (J)) Comme pour chaque k, ϕk est bijective, on peut exhiber une réciproque. ϕ est donc bijective. On a ainsi card F = card N∗ · card I = card I car card N∗ = card N est le plus petit cardinal infini. On a donc montré que card M = card F = card I. Ce qui signifie que E et AI ont des bases équipotentes et sont donc isomorphes. Lemme: lemme 7 Si deux espaces vectoriels sont isomorphes alors leurs espaces duals sont aussi isomorphes. Démonstration du lemme 7 Ces résultats découlent d’une adaptation de l’étude de l’orthogonalité dans la théorie de la dualité (à ne pas confondre avec celle des espaces préhilbertiens) et de la notion de transposée dans cette dernière. On peut en trouver une introduction dans le livre de B. Gostiaux. Soient E et F deux espaces vectoriels sur K. Pour tout u ∈ L(E, F ) on considère la transposée de u défini ainsi : F ∗ −→ E ∗ t u: . ϕ 7−→ ϕ ◦ u t ∗ ∗ u ∈ L(F , E ) : Soient (ϕ, ψ) ∈ (F ∗ )2 et (λ, µ) ∈ K 2 alors : t u(λϕ + µψ) = (λϕ + µψ) ◦ u = λϕ ◦ u + µψ ◦ u = λt u(ϕ) + µt u(ψ). u surjective ⇒ t u injective : (La réciproque est vraie mais inutile ici) Comme u est surjective, Imu = F , ce qui signifie que lorsque x parcourt E entièrement, u(x) parcourt F entièrement et donc : ϕ ∈ Kert u ⇒ ∀x ∈ E, ϕ ◦ u(x) = 0 ⇒ ∀y ∈ F, ϕ(y) = 0 ⇒ ϕ = 0. Donc Kert u = {0}, ce qui implique que t u est injective. u injective ⇒ t u surjective : (La réciproque est vraie mais inutile ici) On peut restreindre l’ensemble d’arrivée de u pour obtenir une surjection et donc une bijection. On note cette restriction ũ : E → Imu. Notons que ũ est toujours linéaire : on a un isomorphisme de E dans Imu, qui est un sous espace vectoriel de F . Soit ψ ∈ E ∗ . Imu est un sous espace Lvectoriel de F et admet donc un supplémentaire S dans F . On a ainsi : F = Imu S. Donc ∀x ∈ F, ∃!([x]u , [x]S ) ∈ Imu × S, x = [x]u + [x]S . F −→ K On définit alors ϕ : . x 7−→ ψ ◦ ũ−1 ([x]u ) Comme ψ ◦ ũ−1 est linéaire par composition d’applications linéaires, ϕ l’est aussi : soient (x, y) ∈ F 2 et (λ, µ) ∈ K 2 alors ϕ(λx+µy) = ψ◦ ũ−1 (λ[x]u +µ[y]u ) = λψ◦ ũ−1 ([x]u )+µψ◦ ũ−1 ([y]u ) = λϕ(x)+µϕ(y). Puis soit x ∈ E alors comme u(x) = [u(x)]u on a ϕ◦u(x) = ψ◦ũ−1 ([x]u )◦u(x) = ψ(x). On a ainsi montré que pour tout ψ ∈ E ∗ , ∃ϕ ∈ F ∗ , ψ = t u(φ). Donc t u est surjective. Supposons donc E et F isomorphes, alors il existe u un isomorphisme de E dans F , u est donc un isomorphisme de F ∗ dans E ∗ , ce qui implique que E ∗ est F ∗ sont isomorphes. t Dualité : dim E ∗ - Jean-Baptiste Campesato - Page 7/8 Démonstration du théorème : (enfin !) dim E ∗ ≥ card E ∗ : Soit (ei )i∈I une base de E alors d’après le lemme 6 E et AI sont isomorphes. Et donc d’après le lemme 7 E ∗ et A∗I sont aussi isomorphes. Puis d’après le lemme 4 (δa )a∈K I est une famille libre de A∗I . On a donc : dim E ∗ = dim A∗I ≥card ((δa )a∈K I )) = card K I . Or d’après le lemme 1 card K I = card E ∗ . On obtient : dim E ∗ ≥ card E ∗ . card E ∗ ≥ dim E ∗ : Soit B une base de E ∗ alors comme B ⊂ E ∗ on a : dim E ∗ = card B ≤ card E ∗ . 2.2 Deuxième proposition Proposition 3 Soit E un espace vectoriel sur K de dimension infinie. Alors E et E ∗ ne sont pas isomorphes (⇔ dim E 6= dim E ∗ ). La démonstration de cette propriété nécessite encore un lemme : Lemme: lemme {0; 1}I est l’ensemble des applications de I dans {0; 1}. Soit I un ensemble non vide alors il n’y pas d’injection de {0; 1}I dans I. Démonstration du lemme On retrouve en fait le théorème de Cantor. En effet on montre que 2card I > card I or card P(I) = 2card I , d’où card P(I) > card I. Supposons par l’absurde l’existence d’une application injective Ψ : {0; 1}I → I. Nous pouvons restreindre l’ensemble d’arrivée de Ψ à son image pour obtenir une surjection et donc une bijection. Notons Ψ̃ : {0; 1}I → ImΨ cette nouvelle application. Soit ϕ ∈ {0; 1}I défini ainsi : ( 1 si i ∈ ImΨ et Ψ̃−1 (i) (i) = 0 ∀i ∈ I, ϕ(i) = 0 sinon Puis posons m = Ψ(ϕ) ∈ I, on a alors que m ∈ ImΨ et que Ψ̃−1 (m) = ϕ (d’après la bijectivité de Ψ̃). • Si ϕ(m) = 1 alors, par définition de ϕ, on a Ψ̃−1 (m) (m) = 0 et, par définition de m, on a Ψ̃−1 (m) (m) = ϕ(m) = 1. D’où une première contradiction. • Si ϕ(m) = 0, comme m ∈ ImΨ, on a, par définition de ϕ, que Ψ̃−1 (m) (m) = 1 or Ψ̃−1 (m) (m) = ϕ(m) = 0. D’où une seconde contradiction. Il ne peut donc y avoir d’injection de {0; 1}I dans I. Démonstration de la proposition Comme K est un corps il admet au moins deux éléments distincts (les neutres des deux lois de compositions internes, qui sont bien distincts par définition d’un corps), on a ainsi card K ≥ 2. Soit I un ensemble tel que card I = dim E. D’après le premier lemme du théorème on a card E ∗ = card (K I ) et d’après le théorème précédent on a dim E ∗ = card E ∗ . Donc dim E ∗ = card E ∗ = (card K)card I ≥ 2card I . Ensuite d’après le lemme ci-dessus on a 2card I = (card {0; 1})card I > card I. Dualité : dim E ∗ - Jean-Baptiste Campesato - Page 8/8 On a ainsi dim E ∗ ≥ 2card I > card I = dim E. E et E ∗ sont donc de dimensions différentes et ne sont donc pas isomorphes.