D Donald Floyd Gleason, grading du cancer de la prostate

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d
né
it
histoire
Donald Floyd Gleason,
l’inventeur du grading
du cancer de la prostate
D.R.
P. Camparo*, L. Egevad**
D
onald Floyd Gleason est né le 20 novembre
1920 à Spencer (Iowa) et a grandi à Lichfield
(Minnesota) où son père tenait une quincaillerie et où sa mère était institutrice. Il effectue son
internat à l’université du Maryland (Baltimore) en tant
que lieutenant dans le corps des médecins de l’US Army.
L’essentiel de sa carrière s’effectuera ensuite dans le
service de pathologie de l’hôpital d’administration des
vétérans (VAMC) de Minneapolis (Minnesota).
De la sorte, Gleason propose un score (de 2 à 10) fondé
sur la somme des 2 grades précédemment observés, et
montre que cette somme est le meilleur des éléments
prédictifs de la maladie (1).
À partir de 1959, une série d’études portant sur le
cancer de la prostate est mise en place par le Veteran’s
Administration Cooperative Urological Research Group
(VACURG). Mené par le Dr ­Georges ­Mellinger, chef du
département d’urologie du VAMC, ce projet a pour
objectif de comparer l’efficacité versus placebo des différents traitements alors disponibles dans le cancer de
la prostate. Il devient rapidement évident que l’absence
d’un système de classification histologique consensuel
constitue un obstacle majeur à l’appréciation de l’efficacité thérapeutique.
Afin de faciliter l’apprentissage de son score, Gleason
fait réaliser par un artiste présent à l’hôpital un dessin
qui résume les résultats dans ce qui est maintenant
considéré comme le classique schéma de Gleason. Ce
dessin a contribué de façon indiscutable à la popularité du système de grading de Gleason. Beaucoup
plus agréable à utiliser que la plupart des grading antérieurs, qui nécessitaient l’examen à fort grossissement
de la morphologie nucléaire et du compte de mitoses,
le score de Gleason est un exemple de beauté et de
simplicité. Il permet d’expliquer clairement la manière
d’appréhender des tumeurs dont les aspects morphologiques sont notoirement hétérogènes.
Gleason est donc chargé d’analyser une série de prélèvements histologiques de cancers de la prostate, sans
être informé du devenir des patients. La première idée
de Gleason est de décrire les différents aspects architecturaux que peuvent prendre ces tumeurs. Il demande
à un statisticien de corréler ces résultats à la survie du
patient. Certaines de ces associations présentant un
pronostic équivalent, il les regroupe pour réduire le
nombre d’aspects architecturaux à 5 (ou grades de
Gleason).
* Service d’anatomopathologie, hôpital Foch,
Suresnes.
** Karolinska Institute,
Stockholm.
40
Il observe également que certains de ces aspects
peuvent être associés au sein d’une même tumeur. Sa
seconde idée est alors de noter l’aspect morphologique
prédominant et de l’associer au deuxième aspect le plus
fréquemment observé dans chaque cas. Le pronostic
des patients avec 2 grades associés se révèle être intermédiaire entre les patients présentant un seul grade
pris séparément.
Le grading de Gleason est présenté en 1966 et en 1967
dans 3 articles regroupant les cas de 280 patients ­(2-4).
L’étude se prolonge ensuite jusqu’en 1974. Quatre mille
patients ont alors été inclus (5).
Cependant, il fallut quelques années pour que le
grading de Gleason soit officiellement reconnu. Il n’est
présenté, pour la première fois, que dans la deuxième
édition de la classification des tumeurs de l’OMS en
2002 à côté du grading de Mostofi ; il apparaît comme
seule recommandation pour le grading des cancers de
la prostate dans la troisième édition de cette même
organisation.
Dans une récente étude de l’European Network of
Uropathology, 99,5 % des pathologistes européens
indiquent utiliser le système de Gleason (6). La valeur
pronostique et la corrélation avec d’autres facteurs
pronostiques ainsi que la reproductibilité du grading
de Gleason ont été largement étudiées ces dernières
décennies. Le fait que ce score n’ait pas été modifié
durant près de 40 ans montre sa robustesse et son
Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 1 - avril-mai-juin 2010
L’inventeur du grading du cancer de la prostate
impact auprès des cliniciens. La plus importante des
révisions n’est intervenue qu’en 2005 à San Antonio
(Texas) par l’International Society of Urologic Pathology
(ISUP). Cette révision s’est essentiellement intéressée à
des aspects architecturaux particuliers du cancer de la
prostate, ainsi qu’à leur interprétation et aux indications
à apporter dans les comptes-rendus de pathologie (7).
Le développement de nouveaux outils, notamment
de biologie moléculaire, modifiera sans doute les
éléments d’appréciation du cancer de la prostate (8).
Cependant, la préservation de l’architecture glandulaire
et la disparition partielle ou totale de la différenciation
morphologique, comme décrit par Gleason, restent
les éléments déterminants du pronostic prédictif de
cette classification.
Donald Floyd Gleason est décédé le 28 décembre
2008, à l’âge de 88 ans. Il laisse son épouse, Nancy,
avec laquelle il a partagé 62 ans de sa vie, trois filles,
neuf petits-enfants et une contribution immense à la
pathologie prostatique. Il est remarquable en effet que,
près d’un demi-siècle après son intervention, ce système
de grading demeure le principal outil à partir duquel
des éléments pronostiques déterminants sont établis
sur des prélèvements biopsiques réalisés dans le cancer
de la prostate.
■
Références
1. Phillips JL, Sinha AA. Patterns, art, and context: Donald
Floyd Gleason and the development of the Gleason grading
system. Urology 2009;74:497-503.
2. Bailar JC, Mellinger GT, Gleason DF. Survival rates of patients
with prostatic cancer, tumor stage, and differentiation preliminary report. Cancer Chemother Rep 1966;50:129-36.
3. Gleason DF. Classification of prostatic carcinomas. Cancer
Chemother Rep 1966;50:125-8.
4. Mellinger GT, Gleason D, Bailar J. The histology and prognosis of prostatic cancer. J Urol 1967;97:331-7.
tatic adenocarcinoma by combined histological grading and
clinical staging. J Urol 1974;111:58-64.
6.
8. Camparo P, Vieillefond A. Molecular aspects of prostate
Egevad L, Algaba F, Berney DM et al. Handling
and reporting of radical prostatectomy specimens in
Europe: a web-based survey by the European Network
www.edimark.fr
no
uv
ea
7.
Epstein JI, Allsbrook WC, Amin MB et al. The 2005
International Society of Urological Pathology (ISUP) consensus conference on Gleason grading of prostatic carcinoma.
Am J Surg Pathol 2005;29:1228-42.
5. Gleason DF, Mellinger GT. Prediction of prognosis for pros-
Abonnez-vous
sur
of Uropathology (ENUP). Histopathology 2008;53:333-9.
c­ ancer: recent data from the literature. Bull Cancer 2007;
94:F77-88.
Au sommaire du prochain numéro
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