1 L’éthique du Care : Entre sollicitude et soins, dispositions et pratiques Fabienne Brugière Fiche 4 : cette fiche a pour ambition de sensibiliser sur l’apport des doctrines contemporaines sur les valeurs de confiance, d’attention, de prise en charge de la vulnérabilité ou de la dépendance qui peuvent renvoyer autant à la sollicitude dans la vie courante qu’au soin dans un monde libéral tant sur le plan politique qu’économique. Le soin est compris comme un ensemble d’activité ou de pratiques sociales qui consiste à prendre soin ET à recevoir le soin (voir plus loin le bon care). La sollicitude : «Lorsque le respect n’est pas adossé à la sollicitude, il risque de manquer l’altérité des personnes, de ne plus viser l’autre mais le même.» Guillaume Le Blanc Pour évoquer à la capacité à la sollicitude ( le care) on peut se référer - Soit aux travaux de Carol Gilligan( spécialiste de la psychologie du développement) qui défend que cette éthique du care est généralement portée par les femmes par opposition à la morale d’inspiration Kantienne réactualisée par le libéralisme politique qui est l’apanage plutôt des hommes à figures d’individus autonomes qui sert de fondement à une éthique de la justice. - Soit à Ceux e Joan Tronto dont l’engagement théorique se fait dans le cadre du soin qui est plus prudent quant à la relation du care avec la psychologie des femmes et qui a par contre bien développé la relation entre le care et les politiques. Pour elle le Care concerne toute activité ou pratique de soin : il existe alors plusieurs éthiques du soin selon que le curseur se trouve plus du côté de la sollicitude ou de celui du soin. 2 Le care enraciné dans la conception d’un individu relationnel, interdépendant et vulnérable suppose de laisser une place à la capacité d’être affecté par la relation humaine) (cf compassion, sympathie des fiches précédentes) Le Care compris comme sollicitude désigne un talent à prendre en charge un corps fragile, il exprime une intelligence sensible au service d’un autre dans le besoin sans tomber dans un sacrifice de soi déstabilisant. Nous ne sommes pas tous également mobilisés par le spectacle de la grande vulnérabilité : le Care est la capacité à la fois de s’émouvoir mais aussi de savoir ensuite agir. L’action accomplie n’est pas proprement héroïque ou grandiose mais appropriée à la situation et s’avère nécessaire et fondamentale quant à ses conséquences pour la vie de l’autre en danger. C’est souvent les personnes les moins qualifiées, les moins reconnues socialement qui prêtent le plus attention à celui dont la vie est en danger…. (Aide-soignante > infirmière > médecin >) Lien entre la Care et les pratiques : Le care doit être analysé par référence au travail, ce qui suppose d’aborder la question de la compétence et de la place accordée au travail dans les sociétés capitalistes et néolibérales : c’est quoi le bon care ? Penser l’impact social et politique de la relation soignant soigné dans nos sociétés ! le bon care n’est donc plus seulement le care : il s’agit alors ( 4 niveaux) - se soucier de : attention comme reconnaissance à un besoin qui demande à être satisfait - prendre en charge : concevoir les moyens de satisfaire ce besoin - prendre soin : mise en avant du travail effectif - recevoir le soin : la capacité à recevoir / capacité de réponse du bénéficiaire détermine le bon care ! 3 Théorie critique e du Care. Quelles sont les mécanismes sociaux ( politiques) par lesquels se sont opérés dans nos sociétés une marginalisation du care, principalement des personnes qui le fournissent qui sont souvent les personnes les moins reconnues par la société. cette analyse ne peut-elle pas expliquer en partie la réticence des internes formés comme des techniciens de santé au modèle choisi dans notre département ? il est donc nécessaire de penser au contexte idéologique du Care Plus le Care s’éloigne de la prise en charge sur le modèle du médecin qui prend en charge de manière prescriptive ce qu’il faut faire (soignant savant) et plus il prend la forme du souci de préoccupations privées ou intimes du malade (soignant compétent), plus il est délaissé par les puissants. Par exemple les tâches de nettoyage liées aux fonctions corporelles, éléments centraux des soins aux personnes les plus dépendantes sont assurées par les femmes, les moins qualifiées, les personnes de couleurs, les classes ouvrières…. regarder qui fait le boulot le plus ingrat et aussi le plus proche du care dans les institutions de santé Le Care est l’objet d’un travail mal rémunéré alors qu’il constitue un rouage essentiel du fonctionnement de la société Cette dévalorisation systématique du care pose la question de la relation entre morale et politique (voir le travail de Joan Tronto)