DOSSIER PEDAGOGIQUE IVRESSE(S) Création Textes de Falk Richter Lundi 7, mardi 8, mercredi 9 et jeudi 10 mars 2016 - Théâtre d’O (entrée sud) NOTE D’INTENTION Ce dossier pédagogique est décliné en deux parties complémentaires. La première partie est une approche non exhaustive du spectacle. Les pistes proposées permettent à l’enseignant de construire des séquences qui lui sont personnelles et/ou d’apporter quelques informations supplémentaires dans le cadre de recherches (TPE, exposés…) La seconde partie met en lumière le lien entre spectacle vivant et site patrimonial : le domaine d’O offre au spectateur-visiteur un parcours singulier qui le conduit de l’ancienne métairie du XVIIe siècle au lieu artistique dédié au spectacle vivant du XXIe siècle. Il nous semble enrichissant pour les élèves de « faire parler » le lieu d’accueil autant que les artistes, de présenter l’écrin au sein duquel le spectacle se livre, pour tâcher de les sensibiliser à la nécessité de l’espace théâtral comme lieu privilégié et partagé, lieu de divertissement décliné au passé, au présent et au futur qui accueille les patrimoines que constituent les textes, les musiques, les arts graphiques et visuels… Le domaine d’O représente plus qu’un lieu de spectacle vivant : son parc et ses jardins appartiennent au domaine public, et leur libre accès s’inscrit dans la politique culturelle de l’équipe du Domaine d’O, dont une des missions est de valoriser ce patrimoine architectural et naturel d’exception. Domaine d’O / Contacts Service Educatif Marion Blanchaud , enseignante missionnée Théâtre et Patrimoine [email protected] Jessica Ramassamy, enseignante missionnée Spectacle Vivant [email protected] Valérie Picq, responsable des relations publiques [email protected] 06 74 63 44 32 / 04 67 67 31 22 1 I / LE SPECTACLE : IVRESSE(S) ou comment ce système en crise, ce système de la crise, ce système qui jouit de la crise, vit en chacun de nous dans tous les instants de nos existences Lundi 7, Mardi 8, Mercredi 9 et jeudi 10 mars à 20h Théâtre d’O – Salle Paul Puaux / Entrée sud Durée estimée (création) : 2h / A partir de 16 ans Textes de Falk Richter (traduction Anne Montfort, L’Arche) Mise en scène Jean-Claude Fall Création vidéo Laurent Rojol Création sonore Eric Guenou Directeur technique Jean-Marie Deboffe Production La Manufacture Cie Jean-Claude Fall/Domaine d’O Avec Roxane Borgna, Denis Boyer, Jean-Marie Deboffe, Jean-Claude Fall, Zachary Fall, Isabelle Fürst, Nolwenn Peterschmitt, Laurent Rojol, Alex Selmane BIOGRAPHIE DE FALK RICHTER Né en 1969, Falk Richter étudie la mise en scène à l’Université de Hambourg, et se fait connaître comme metteur en scène, comme auteur et comme traducteur. Il s’intéresse aux processus de contamination du langage, et pose un regard critique sur le Politique. En 2003, Falk Richter lance un projet intitulé Le Système, expérience d’écriture et de mise en scène s’étendant sur plusieurs pièces. Cet ensemble dessine un paysage du monde contemporain et de ses contradictions, voire de ses aberrations. Le sous-titre en est « notre manière de vivre », « notre mode de vie », allusion directe à Georges Bush et à Gerhard Schröder, selon qui l’intervention en Afghanistan défendait « our way of living », « unsere Art zu leben ». Le Système comprend plusieurs pièces ou performances présentées en parallèle, qui adoptent toutes un point de vue, et traduisent une réaction. Ce projet incarne la démarche de l’auteur-metteur en scène Falk Richter : une écriture de plateau, héritière du théâtre postdramatique, où le travail théâtral et l’écriture s’influencent mutuellement. Le théâtre, comme le roman du post-11 septembre, a été amené à réintégrer des éléments à la fois empruntés au réel et au documentaire sur un événement déjà retravaillé par l’imagerie hollywoodienne. Falk Richter, dans Hôtel Palestine notamment, a travaillé sur une conférence de presse du gouvernement américain. L’auteur introduit de nombreuses informations dans un réel déjà mythologisé. « Plus le théâtre a lieu dans la politique et dans les medias, moins il y a lieu au théâtre » (Richter, 2003), déclare-t-il dans un entretien avec le sociologue Richard Sennett. À ses yeux, seul le théâtre peut expliquer et analyser les images que la télévision ne cesse de reproduire : « actuellement les professionnels de l’industrie cinématographique hollywoodienne conseillent les militaires américains pour élaborer de nouveaux scénarios d’attaque. Le passage de la ‘réalité virtuelle’ à la ‘réalité authentique’ disparaît. » (Richter, 2001). Face à une telle confusion entre authenticité et virtualité, le théâtre se doit, pour Falk Richter, de dénoncer ces stratégies de mise en scène et de réinsérer du réel sur les plateaux. 2 GENESE Ivresse(s) est un montage réalisé à partir de trois textes de Falk Richter : Ivresse (2012), Protect me et Play loud (extraits). Les thèmes les plus récurrents de l’œuvre de Falk Richter y sont déclinés : « système en crise, système de la crise », relations humaines, rapport à l’écriture théâtrale et à la représentation, révoltes, désirs, récupération… Tout d’abord travaillé dans le cadre d’un atelier, le texte est repris avec 7 comédiens-musiciens-danseurs pour trouver son aboutissement dans une mise en scène « libre de toute contrainte et de toute règle » (Jean-Claude Fall) ; LE POINT DE VUE DE JEAN-CLAUDE FALL (extrait du dossier de presse) « Cet ensemble de textes se présente, comme c’est souvent le cas chez Richter, sous forme de matériau à assembler, dissocier, pendant le processus de la répétition. (…) Pas de fiction autre que par bribes. Pas de continuité narrative ou discursive. Pas de continuité stylistique autre qu’une exigence extrême d’engagement physique (danse et musique). Un humour de tous les instants. Quelque chose de joyeux et d’iconoclaste. » (14 01 2015) QUELQUES INFORMATIONS SUR JEAN-CLAUDE FALL Directeur de compagnie, Jean-Claude Fall crée en 1982 le théâtre de la Bastille, lieu dédié à la création et à l’émergence théâtrale et chorégraphique. En 1989, il dirige le théâtre Gérard Philippe de SaintDenis où il accueille des compagnies en résidence, et monte ses propres recherches et de nombreuses productions. Il est nommé en 1998 à la tête du Théâtre des Treize Vents, où il crée une troupe de comédiens permanents. En 2010, il crée sa propre compagnie, La Manufacture - Compagnie JeanClaude Fall. Jean-Claude Fall privilégie les textes du XXème siècle, sa démarche artistique s’attachant à la responsabilité qui incombe à la prise de parole publique qu’est la représentation. Il est également comédien. LA MISE EN SCENE ET LE LIEN AVEC LE THEÂTRE NEO-DRAMATIQUE Les 7 participants sont aussi musiciens (instrumentistes et/ou chanteurs), équipés de Smartphones aussi utilisés comme torches électriques, caméras et micros. Le décor est constitué par un espace nu, trois portes au lointain ; écrans de projection disséminés, plusieurs vidéoprojecteurs et une caméra ; ordinateurs ou tablettes ; éclairage de service de la scène et de la salle. Les acteurs filment, enregistrent, éclairent et sonorisent eux-mêmes. Le théâtre postdramatique, proposait déjà un texte fragmentaire, hésitant et doutant de son « autorité », gagnant en épaisseur de sens induit. Le développement des technologies de la scène, créant de nouvelles esthétiques (ce qu’on a parfois appelé « art transversal »), constitue la suite de cette remise en question du texte théâtral : chorégraphie, arts de l’image, arts plastiques, compositions musicales, jeu de l’acteur, texte et narration logique sont alors convoqués ensemble comme différents moyens porteurs de sens sur scène, tout en sollicitant l’inventivité du spectateur, dont il s’agit d’éveiller la perception. L’essentiel réside dans la façon dont est organisé l’espace scénique, qui doit faire naître des émotions signifiantes. Les metteurs en scène se tournent dès lors vers les écritures poétiques, pour leur force suggestive comme pour leur aspect fragmentaire, permettant une réécriture scénique englobant les aspects textuels, scénographiques et les problématiques liées au jeu des comédiens. Cette redéfinition des genres correspond à une remise en question des statuts d’auteur et de metteur en scène : ils ne dépendent plus l’un de l’autre mais se confondent. Le metteur en scène devient l’auteur de ce qui se passe sur scène, et l’auteur le metteur en scène, le scénographe, de son matériau textuel. L’héritage du théâtre postdramatique se traduit aujourd’hui dans l’ « écriture de plateau » (Bruno Tackels, 2001), non exclusivement textuelle, prise en charge par la mise en scène qui inclut l’ensemble des médias constituant le spectacle. Le « théâtre néo-dramatique » désigne une théâtralité où un texte, des personnages et une fiction restent à la base du travail scénique, et ce même si le texte est déstructuré, les personnages disloqués, la fiction mise en doute. Les textes de Falk Richter et Anja Hilling relèvent de ces catégories (Richter, 2008 ; Hilling, 2009). 3 E XTRAITS DU TEXTE AU DÉBUT : OÙ ES-TU ? - j’aimerais tellement écrire sans sujet sans direction sans tous ces matériaux et masses de textes, notes, sensations, déceptions et angoisses, lentement oser pénétrer dans des instants que je n’ai encore jamais vécus, dans des rencontres que je n’ai pas encore faites, j’aimerais tant parler tout doucement, afin que tu sois obligé de venir tout près de moi pour m’entendre et peut-être que je parlerai dans une langue que tu ne comprends pas, qui te semble étrangère et étrange, tout doucement, très calmement, sans hâte, sans précipitation (…) (…) Silence. Il faut juste que je me retrouve. Mais que vais-je trouver en moi? Oh là. Rien du tout. Je ne veux pas me souvenir. Je ne veux pas savoir qui je suis ici et maintenant. Je ne veux pas de tout ça. Je ne sais absolument pas ce que je veux. TOUT EST SI ATROCEMENT TRISTE ET SOLITAIRE Et il regarde son propre corps qui n’a en fait plus d’énergie. MAIS OÙ EST-ELLE PASSÉE CETTE ÉNERGIE AU COURS DES DERNIÈRES ANNÉES? MAIS QU’EST-CE QUE J’AI FAIT DE MA VIE? OÙ EST-ELLE? MAIS OÙ EST DONC PASSÉE MA VIE? ET POURQUOI JE N’Y AI PLUS ACCÈS? Il va dans sa chambre et allume son téléphone en cachette. Deux cents appels en absence. Cent cinquante six sms non lus. QU’ILS ME LAISSENT TOUS TRANQUILLE Il faut juste que je parle à quelqu’un, quelqu’un qui soit PROCHE de moi, mais qui ça pourrait être? Il ne pense à personne Il fait défiler la liste de contacts de son iPhone Rien que des contacts professionnels. Soudain il tombe sur un numéro qu’il avait complètement oublié 4 Là il y avait quand même un truc (bref silence) il appelle sa petite amie. Que nous allons appeler ici Alexandra. Une actrice. (…) TOUT EST SI ATROCEMENT TRISTE ET SOLITAIRE pense-t-il et C’est qui en fait ce Stefan Il a 10 ans de moins que moi et fait ces performances complètement déjantées publie de courtes proses tellement radicales sur son site et il est sensible intelligent provocateur innovant drôle beau a un grand succès et baise super bien et moi Moi Moi Moi pas Il regarde par la fenêtre de son petit pavillon thaï dans le LIEU DE CURE INTERNATIONAL « PROTECT ME ! » Des consultants bien gras épuisés font du taïchi dans le soleil du soir. Cet endroit est un hôpital militaire ! Il regarde un groupe d’hommes épuisés d’environ quarante ans allongés au bord de la piscine avec un ENERGY BOOSTER fraîchement pressé qui se laissent totalement vibrer et ré-harmoniser l’intérieur au son des gongs. On hospitalise ici tous ces spéculateurs de la finance et gérants de hedge funds grièvement blessés afin de les remettre sur pied grâce à des méthodes thérapeutiques bouddhistes, pour ces guerres économiques qui vont remettre l’Europe à feu et à sang, ET ÇA ME DÉGOÛTE. Il veut appeler son meilleur ami. Mais il n’a pas de meilleur ami il n’a que des gens qu’il paie. Alors il essaie d’appeler son psy TOM LE PSY SKYPE joignable à toute heure et partout. La thérapie en illimité - une super affaire avec la liberté de parler à l’infini pour 2750 euros par mois il peut joindre Tom par portable ou par skype à toute heure et partout. Il veut juste pleurer se vider et raconter combien tout ça est triste et solitaire et merdique. Et parler de ce sentiment qu’il éprouve actuellement. C’EST LA GUERRE. CES GUERRES FINANCIÈRES SONT AUSSI DES GUERRES. Et il y a là tous ces gens blessés et mutilés de guerres économiques et on les remet sur pied grâce à des méthodes thérapeutiques bouddhistes. 5 Ici et maintenant c’est un état de guerre et Il faut faire quelque chose. Ces spéculateurs financiers font tous ici du yoga et de la thérapie watsu avec l’argent public des fonds de sauvetage. Ils sont tous couchés là à se reposer et Mais il faut faire quelque chose et nous ne faisons rien et Ils prétendent juste que l’ensemble de l’économie va s’effondrer si les gouvernements ne les sauvent pas à coups de milliards d’impôts et ça me met dans une colère folle et je ne sais pas comment canaliser ma colère (…) LA FIN parfois j’aimerais juste être couché là avec toi, à écouter de la musique et parler si doucement que tu sois obligée de venir tout près de moi, dans une langue que tu ne comprends pas, que tu ne puisses faire attention qu’au son et que tout ce que je dis soit pour toi comme de la musique et que tu me regardes et que tu me tiennes ma main et que tu écoutes ce son cette mélodie et que je dise toi et moi, maintenant là, rien que ça, rien de plus et nous ne sommes pas une promesse sur l’avenir et nous n’augmentons pas notre valeur et nous n’avons pas de projet nous ne parlons pas de limites ni de possibilités de retrait nous ne parlons pas de ce qui nous dérange, de ce dont on n’arrive pas à se sortir, et du fait que l’autre peut nous donner plus d’espace nous ne voulons pas augmenter notre potentiel nous n’aspirons à aucune croissance tu ne me dis pas tout ce qui te gêne en moi je ne te dis pas tout ce qui me gêne en toi en quoi je t’ai blessée en quoi je t’ai fait du tort en quoi je ne suis pas vraiment allé vers toi en quoi je n’ai pas vraiment écouté hiver dehors nuit la neige tombe quelque part quelqu’un joue du piano perdu pour toujours pas ici pas notre vie quelque part quelqu’un dit CE LIEU ICI, CETTE RÉGION, CE TERRITOIRE ENTRE TOI ET MOI EST UNE ZONE NON-COMMERCIALE, EST UN LIEU OÙ ON NE SPÉCULE PAS, OÙ ON NE NÉGOCIE PAS, OÙ ON NE FAIT PAS DE BUSINESS, OÙ TOUTES LES LOIS ET NON-LOIS DU LIBRE ÉCHANGE NE SONT PLUS EN VIGUEUR PENDANT UNE FRACTION DE SECONDE, UNE NUIT PEUT-ÊTRE, OUI PEUT-ÊTRE MÊME UNE NUIT ENTIÈRE ET CETTE NUIT NOUS APPARTIENT ET NOUS NE SAVONS RIEN DE PLUS RIEN DU TOUT, ET NOUS NE VOULONS D’AILLEURS RIEN SAVOIR. 6 PISTES DE REFLEXION (PROPOSITIONS NON EXHAUSTIVES) 1. Théâtre : l’esthétique néo-dramatique au théâtre ; la relation auteur – metteur en scène – acteur ; la mise en scène et l’ « art transversal » ; 2. Philosophie : le réel et sa représentation ; soi et autrui ; la violence de la société ; 3. Français : l’histoire de l’esthétique du théâtre au XXème siècle (du théâtre de l’absurde au théâtre néo-dramatique) ; la relation entre poésie et texte théâtral ; les réécritures scéniques ; 4. Arts visuels : la mise en scène d’un texte contemporain ; la question de la narration ; 5. Allemand : la traduction de Anne Montfort. APRES LE SPECTACLE - : SUJETS DE REFLEXION L’espace scénique : pourquoi avoir privilégié un espace nu ? quels sont les outils nécessaires à la représentation ? La représentation du réel : une société en crise. Le jeu des acteurs : quelles interprétations ? En quoi le choix de faire appel à plusieurs technologies redéfinit-il le texte théâtral ? Texte théâtral ou texte poétique ? La mise en scène : comment dire/jouer le texte ? l’interaction avec le public. Quel(s) passage(s) vous ont marqué/e ? Décrivez et expliquez votre choix. POUR ALLER PLUS LOIN ITW de Falk Richter : http://www.falkrichter.com/FR/article/33/ Ivresses : http://culturebox.francetvinfo.fr/danse/livresse-du-monde-vue-par-falk-richter-et-anoukvan-dijk-au-carreau-de-forbach-146971 Play Loud : https://www.youtube.com/watch?v=q1RH9vKmi2A 7 II / LE PATRIMOINE : LE PARC DU DOMAINE D'O A la recherche du .... ... XVIIIème siècle Photo Dominique Binet Photo Luc Jennepin Photo Marie Caroline Lucat Plusieurs noms pour un site 1722 : Monsieur Charles-Gabriel Le Blanc, parisien d'origine et contrôleur général des gabelles* en Languedoc, acquiert la métairie* du XVIIe s de la famille Saporta, sur le site appelé Puech Villa. Il s’agit d’un ensemble de mas et des terres dépendantes - dont une oliveraie -, que Le Blanc va transformer en château ; on appelle couramment « folie» ce type de belle maison de campagne. Le château de Puech Villa, d‘une architecture sobre, est entouré de terres cultivées irriguées par deux sources, deux puits et le ruisseau des Molières, collecteur d’eaux pluviales. *Gabelle : impôt sur le sel *Métairie : domaine agricole géré par un métayer ; les propriétaires délèguent au métayer l’exploitation et l’entretien du domaine, à charge pour eux d’en tirer des bénéfices. Dans la première partie du XVIIIe s., Le Blanc procède à de grands travaux, qui concernent tant les bâtiments que les terres environnantes, plantées principalement de vignes. La circulation de l'eau, essentielle aux cultures comme au jardin d''agrément, est au centre des premières préoccupations du nouveau maître des lieux, qui fait édifier un vaste réseau de canalisations et un grand bassin de rétention. Le projet est d'aménager un parc et un jardin d’agrément selon la mode de l'époque : arbres fruitiers, bosquets, bassins et fontaines, statues et bancs... Le nom actuel Domaine d’O reflète l’importance revêtue par la présence de l’eau ; en effet, lorsque l’intendant Guignard de Saint-Priest acquiert le domaine en 1762, il fait aménager une prise d’eau sur l’aqueduc - conduisant l’eau au Peyrou - qui traverse sa propriété. Le domaine de Puech Villa devient le Château d’Eau. Au XIXe s., la graphie fait apparaître l’appellation château d’O (faute d’orthographe ou premier texto ?), ou château d’Ô. 8 A l’origine, la folie de Puech Villa La métairie est en partie démolie et reconstruite selon la mode de l’époque, et ses accès réaménagés (pont, chemins, portail). Pour Claude-Gabriel Le Blanc, il s’agit d’afficher son train de vie luxueux, comme les autres riches Montpelliérains. Le bâtiment lui-même est modifié au fil des ans : façade, fronton, fenêtres à l’italienne, toitures, rénovations intérieures, communs…. Simultanément, un premier réseau hydraulique est construit depuis la source de l’Euze et le ruisseau des Molières, dont les eaux sont réunies dans un réservoir recouvert. L’eau est ensuite distribuée par des canalisations en poterie ou en plomb, et arrive dans un bassin situé devant la métairie. Une fontaine couverte est bâtie pour fermer le jardin. Charles-Gabriel Le Blanc fait alors planter l’oliveraie, le verger (abricotiers, poiriers, pêchers, pommiers), le potager (asperges, fraisiers, groseilliers) et le jardin d‘agrément (buis). Devant le bâtiment principal deux grands axes Nord-Sud et Ouest-Est se croisent. Ces deux allées perpendiculaires permettent l'accès au domaine et se ramifient en de nombreuses allées plus modestes, qui quadrillent l'espace aménagé. 1735 : Claude-Gabriel Le Blanc acquiert la propriété des Jésuites, au sud, qu'il transforme en chais. C'est l'emplacement actuel du Théâtre d'Ô. L’achèvement de la restauration du château et l’extension du domaine lui permettent de réaménager le jardin et le parc : nouveau parterre face au château, plates-bandes et broderie de buis, bassin en pierre et deux fontaines à cascades, bosquets de mûriers et de noyers, cabinets de verdure avec bancs, allée de grenadiers, bassin décoré d’une coquille de marbre, grille encadrée par deux piliers surmontés de lions. Dans sa partie nord, le parc abrite des marronniers alternant avec des buis, des peupliers et se clôt par une haie de cyprès ; au sud, lauriers-tins et lauriers-cerise, carrés de luzerne, marronniers et buis. Des platanes ont remplacé les mûriers au XIXe s. Les essences actuelles ne correspondent pas nécessairement aux plantations d’origine, remplacées par des pins, des micocouliers et des troènes ; les cyprès et les platanes ne sont pas non plus les arbres plantés par Claude-Gabriel Le Blanc. LE JEU DE PISTE 1/ Sur l'ensemble du domaine : distinguez les jardins d'agrément, les bâtiments, les plantations et le parc (cf. plan). Repérez-vous par rapport aux axes Nord-Sud et Est-Ouest. 2/ Dans la partie sud du parc, retrouvez : - Sur l'axe Sud-Nord : • "l'allée de sortie en droite ligne de la façade du château", avec deux piliers surmontés de lions en pierre. Ils marquent l'entrée du Domaine d'Ô côté ville ; • les fontaines, le bassin décoré d'une coquille ; • les "broderies" de buis ; les plates-bandes garnies de plantes décoratives ; • le puits ; • les marches de pierre qui conduisent à une allée plantée ; • les bosquets, qui forment des cabinets de verdure avec des bancs, de part et d'autre de l'axe SudNord ; • les statues dédiées à la musique : le faune Syrinx (la flûte), la joueuse de tambourin, la Muse, Bacchus ; • le grand bassin ; le grand banc ; 9 • le mur d'enceinte qui clôture le parc et les jardins. - Sur l'axe Est-Ouest : • le petit pont qui enjambe le ruisseau des Molières, une des ressources en eau du Domaine ; les statues des Sphinges ; • les allées transversales ; • les oliveraies ; • le mur d'enceinte qui clôture le parc et les jardins. Photo Luc Jennepin Photo Jean de Pena 10