Soins Libéraux 37 Les céphalées quotidiennes Le handicap est sous-estimé Souvent méconnues, les céphalées chroniques quotidiennes (CCQ) sont à l’origine d’un handicap important pour le patient. Elles demeurent une entité nosologiques insuffisamment connues des professionnels comme de la population en général. L es céphalées chroniques quotidiennes demeurent une entité nosologique insuffisamment connue des professionnels de santé comme du grand public. Dans 80 % des cas, il s’agit des migraineux épisodiques dont la migraine s’est transformée du fait de l’abus médicamenteux entraînant un cercle vicieux sur un terrain anxiodépressif. Plus rarement, surviennent les CCQ de novo. Dans ce cas, le patient entre dans la chronicité sans passer par la période de céphalées épisodiques. Il faut donc rechercher la conjonction de l’abus médicamenteux et d’antécédents de migraine ou de céphalée de tension. L’usage abusif d’antalgiques pour des douleurs chroniques chez les sujets non céphalalgiques n’entraîne pas de CCQ. Trois tableaux cliniques Des traitements mis en cause Les CCQ sont définies comme des céphalées présentes de 15 jours par mois pendant plus de 3 mois, avec une durée quotidienne supérieure à 4 heures sans traitement, Mais en réalité la majorité des patients souffre de maux de tête tous les jours. Bien entendu, il faut éliminer une céphalée symptomatique par un examen général et neurologique et éventuellement par des investigations complémentaires. Trois tableaux cliniques des CCQ sont possibles : – migraine chronique (douleur pulsatile aggravée à l’effort physique de routine, avec des nausées et vomissements), – céphalées de tension chroniques (douleur à type pression et d’étau mais pas d’aggravation par les activités physiques), – migraine transformée, associant un fond céphalalgique permanent auquel s’ajoutent des crises d’allure migraineuse. Il s’agit de migraineux qui ont vu leur migraine s’aggraver et qui ont continué à consommer de plus en plus des médicaments antalgiques. Du fait d’un phénomène de rebond, la céphalée réapparaît dès que le médicament ne fait plus d’effet. Tous les traitements de crise peuvent être en cause. Les molécules actuellement les plus utilisées en cas de CCQ par abus médicamenteux sont le paracétamol, la caféine, la codéine et les triptans. L’évaluation des facteurs psychopathologiques s’impose. En consultation spécialisée, un trouble anxieux est présent chez un patient sur deux, et un trouble de l’humeur chez 1 patient sur 3. Il faut prendre aussi en considération l’effet psychotrope de certaines molécules (caféine, codéine, dextropropoxyphène, tramadol) et la susceptibilité individuelle au développement d’une addiction. De même, les facteurs musculo-squelettiques peuvent favoriser la chronicisation des céphalées, étant donné que les tensions musculaires peuvent être en rapport avec l’anxiété, des facteurs posturaux professionnels ou des facteurs traumatiques. La prise en charge de CCQ doit comporter un sevrage en ambulatoire ou en hospitalisation (de 5 à 10 jours) en cas d’abus multiples ou associé de psychotropes, de comorbidité psychiatrique sévère ou d’un environnement familial défavorable. L’amitriptyline est recommandée en première intention, et en cas d’intolérance d’autres options thérapeutiques sont envisagées telles que les myorelaxants et le valproate de sodium (d’autres anticomitiaux sont en cours d’évaluation). Le patient bénéficie d’une prise en charge psychothérapique (soutien, relaxation, thérapie cognitivo-comportementale) et d’une éducation concernant la gestion de ses crises de migraine. L’ordonnance délivrée à la fin de sevrage précise la nécessité de ne pas dépasser 2 prises par semaine de façon régulière, en s’aidant de moyens non médicamenteux. Migraine de tension Lorsque le patient souffre d’une migraine ou d’une céphalée de tension, quelles sont les situations laissant craindre le développement d’une CCQ ? Tout d’abord une augmentation de la fréquence des céphalées et une surconsommation de traitement de crise. D’autres sonnettes d’alarme sont une inefficacité successive de plusieurs traitements prophylactiques de la migraine, des événements de vie à forte composante émotionnelle et la présence d’une comorbidité psychiatrique. Les migraines surviennent dans 90 % des cas entre la l’âge de 30 et 60 ans. Il peut toutefois arriver que de jeunes enfants soient victimes de ces très douloureux maux de tête. Chez l’enfant et l’adolescent il y a moins d’abus médicamenteux, mais plus des CCQ ayant débuté d’emblée sur le mode chronique (21 %). L’âge moyen est de 12 ans et une maladie migraineuse sous-jacente est diagnostiquée dans 80 % des cas. L’accent est mis sur la recherche des facteurs déclenchants et notamment l’abus des caféine sous forme de soda. Dans plusieurs hôpitaux, il existe aujourd’hui des services spécifiques de consultation migraine. Ludmila Couturier Infos ... Deux formes de migraines On distingue deux grands types de migraines. La première forme, la plus fréquente, est appelée migraine commune. Elle est le plus souvent localisé sur les côtés de la tête au début de la crise, mais elle peut ensuite s’étendre à l’ensemble du crâne. L’autre forme de migraine est dite avec aura. Lorsque la migraine est installée, l’aura disparaît. Professions Santé Infirmier Infirmière N° 63 • mai 2005