Agriculture française et coût de l`énergie

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Académie d’Agriculture de France
Résultats des travaux du groupe
« énergie »réalisés en 2007
L’agriculture française face à
une forte augmentation du coût
de l’énergie
Présentation de G. Bazin
Professeur AgroParisTech
SOMMAIRE
• Le contexte pétrolier et les hypothèses de travail
du groupe (moyen terme)
• Le bilan énergétique de l’agriculture française
• Consommation d’énergie par systèmes de
production agricole
• Des économies d’énergie sont possibles en
agriculture
• Le développement et les limites des énergies de
substitution
• Vers des délocalisations de productions?
• Quelques propositions et recommandations
Introduction : l’offre et la demande pétrolières en perspective
Cours du baril de pétrole (159l) en $ constants et $ courants
Révolution
iranienne
Guerre
du
Kippour
Tendance à la hausse
30$ en 2003 à 100 $
début 2008
Notre hypothèse de
travail: 150 $ à moyen
terme avec une forte
volatilité?
1. Bilan énergétique global de l’agriculture française
1. La consommation d’énergie directe de l’agriculture
En 2005 : 3,5 Mtep: (dont 2,8 pour produits pétroliers et 0,5 pour
électricité)
Consommation stabilisée depuis quelques années
2. La consommation d’énergie indirecte de l’agriculture
En 2005 : 5,7 Mtep: (dont 2,5 engrais azotés, 2 matériels et
bâtiments, 0,7 fabrication aliments bétail, 0,5 phytos)
Consommation d’énergie énergies directes + indirectes = 9,2
Mtep/an soit :5,7 % de la consommation d’énergie finale (161
Mtep/an)
3. Les IAA consomment 5,3 Mtep d’énergie directe en
2006
 Les postes énergie, carburants et engrais azotés sont
les plus sensibles à la hausse du prix du pétrole (il faut
l’équivalent d’un litre de pétrole pour produire 1kg de N)
Ils ont augmentés de 611 millions € entre 2004 et 2006
(+10% alors que les volumes baissent) et de1935
millions € entre 2006 et 2008 (+31%) avec des volumes
d’engrais en hausse de 8%
 Toute hausse de 1% de ces charges en valeur
correspond à une baisse comprise entre 0,4 et 0,5% du
revenu net agricole (aux prix agricoles 2006)
Avec un baril à 150 dollars le poste énergie augmente
de 50% et engrais de 30% par rapport à 2006 (avec du
pétrole à 60 dollars). Le revenu serait amputé d’au moins
2,5 milliards d’euros (20%) toutes choses égales par
ailleurs.
La maîtrise et la réduction de ces postes est donc
2. Consommation d’énergie par systèmes de production agricole
21. Description des bilans énergétiques PLANETE
PLANETE = Pour L’ANalyse énergETique de l’Exploitation agricole
Groupe de travail réunissant fin des années 90 plusieurs institutions (SOLAGRO,
ADEME, ENESAD, CIVAM…) avec pour objectif l’élaboration d’un outil
permettant l’analyse énergétique des exploitations agricoles
Outil qui évalue les consommations directes et indirectes de
l’exploitation par poste (entrées) en équivalents litres de fioul ainsi
que le bilan énergétique de l’exploitation (sorties/entrées)
Permet d’évaluer les émissions de GES (CO2, N2O, NH4)
Environ 1000 bilans PLANETE réalisés depuis sa conception
Regroupement d’exploitations volontaires qui ne constituent pas un
échantillon représentatif (83 hectares de moyenne et 2,1UTA en 2006)
Consommation moyenne des intrants par
exploitation (2006)
• 7 800 l de fioul (environ 100 l/ha SAU)
Mais 12000l en grandes cultures
• 21 900kwh d’électricité
• 4500kg N achetés et 1500kg de P et K
• 275 t d’aliments concentrés et 110t de
fourrages
Énergie directe et indirecte (2006)
(moyenne 562 EQF/ha Équivalent Fuel par hectare)
•
•
•
•
•
•
•
Aliments achetés
21% 116 EQF/ha
Fioul
20% 112 EQF/ha
Fertilisation
19% 109 EQF/ha
Électricité
15%
82 EQF/ha
Amortissement
9%
49 EQF/ha
Autres
17% 94 EQF/ha
Soit 212 EQF/ha énergie directe (38%) et 350
EQF/ha énergie indirecte (62%) avec une très
forte variabilité (76% entre 250 et 1000 EQF/ha)
2. Consommation d’énergie par systèmes de production
agricole (grandes cultures et bovins lait)
2.2 Grandes cultures
Les résultats PLANETE 2006 comprennent 96 exploitations de
grandes cultures ; la SAU moyenne est de 120 ha
Diversité d’assolement relativement forte : 3 à 8 cultures
Consommation d’énergie moyenne : 472 EQF / ha SAU et 98
EQF par tonne de MS
Mais grande variabilité (de 300 EQF/ha chez les plus
économes à 625 EQF/ha chez les plus énergétivores)
 1er poste de consommation : la fertilisation (45%)
2ème poste de consommation : le carburant (23%)
Consommation d’énergie par systèmes de production agricole
Grandes cultures
Répartition des exploitations selon la consommation d’énergie et le
rendement moyen
Le rendement
n’explique pas à lui
seul la variabilité de la
consommation
d’énergie par tonne de
matière sèche
Source : SOLAGRO PLANETE 2006
3.
L’influence des pratiques agricoles
Comparaison des consommations (entrées) et des productions (sorties) d’énergie
en EQF / Ha entre pratiques économes et intensives en énergie (Grandes Cultures
et Lait)
GC économe GC intensif Bovin lait économe Bovin lait intensif
94
130
61
219
Fioul consommé
24
140
79
162
Electricité + Irrigation
0
0
23
239
Achats aliments
99
230
9
242
Fertilisation
41
53
38
68
Matériels
42
72
46
95
Autres
Entrées
300
625
256
1025
0
0
301
649
Lait
0
0
33
66
Viande
1429
2072
0
0
COP
79
146
0
0
Autres
Sorties
1508
2218
335
715
Efficacité énergétique
5
3,5
1,3
0,7
COP = Céréales, Oléoprotéagineux
L’influence des pratiques agricoles
Efficacité énergétique des exploitations = Sorties / Entrées
Meilleure efficacité énergétique dans les systèmes « économes » que dans les
systèmes très consommateurs d’énergie:
 En grandes cultures : l’efficacité énergétique varie de 40% (les systèmes en
AB ne semblent pas plus économes)
 En bovin lait : l’efficacité énergétique varie de 80% mais les systèmes
achetant peu d’aliments sont plus économes
 Les résultats énergétiques des systèmes dépendent de la bonne gestion de
l’ensemble des postes et de l’organisation globale des systèmes de production
Des économies d’énergie sont envisageables à la
fois sur la bonne utilisation des équipements ou des
intrants, mais aussi sur le choix du système de
production (plus ou moins intensif en énergie)
Exemple d’économies possibles
I. La
consommation de carburant par les machines agricoles
Consommation de fioul carburant (moyenne par exploitation)
(7800 litres/ ex en 2005)
Grandes cultures et herbivores
Polyélevage à orientation herbivores
Polyculture
Ovins, caprins et autres herbivores
Bovins lait, élevage et viande
Bovins élevage et viande
Bovins lait
Fruits et autres cultures permanentes
Fleurs et horticulture diverse
Maraîchage
Autres grandes cultures
Céréales, oléagineux, protéagineux
Moyenne
0
2 000
4 000
6 000
8 000
10 000
12 000
en litres / exploitation
Source : RICA 2005
14 000
Ventilation des consommations de carburant pour les opérations
culturales annuelles en grandes cultures
Litres/ha
Déchaumages
Labour
Préparations + semis
Fertilisation + traitements
Récoltes + transports
Total carburants/ha
TCS = Techniques Culturales Simplifiées
Labour
10
25
20
15
30
100
TCS
10
0
15
17
30
72
Semis Direct
5
0
8
17
30
60
Source : Estimation SOLAGRO
Économies de 40 L de fuel soit 19 € / ha en 2007
Avec un pétrole à 150 $ l’économie dépasse 45 €/ha
En 2001, surfaces cultivées sans labour : 2 500 000 ha
En 2005 : 4 600 000 ha
Semis direct = technique la plus économe en fuel mais :
 Non applicable à tous types de terrains
 Contrôle des adventices et maladies plus difficile
 Période de transition de 5 à 15 ans
 Couverture végétale permanente (destruction chimique consommatrice
d’herbicides et de carburants)
Beaucoup d’autres économies d’énergie possibles:
Réglage et fonctionnement des tracteurs (10% d’économie)
Économie de chauffage des bâtiments et des serres
Gestion des rotations et des fertilisants (particulièrement de N)
Développement des légumineuses (les protéagineux sont en forte baisse!).
Fabrication des aliments à la ferme…
Utilisation des énergies renouvelables (bois, huile végétale pure, biogaz,
solaire, géothermie….)
Mais ces économies seront limitées en cas de hausse des prix
agricoles qui pousse à l’intensification des cultures (cf 2008)
5. Augmentation des coûts énergétiques : vers une
relocalisation de certaines productions?
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•
•
•
•
•
Les hausses du prix de l’énergie se répercuteront sur
l’ensemble des filières agroalimentaires depuis la production,
la transformation et la distribution et seront finalement payées
par les consommateurs
Ceci risque d’accentuer les inégalités entre catégories sociales
et entre pays (importateurs ou exportateurs) et d’accroître les
tensions géopolitiques (émeutes de la faim…)
Les transports les plus coûteux (fruits, fleurs, légumes par
avion notamment risquent d’être remis en cause)
Les systèmes les plus énergétivores (légumes sous serre
chauffée, élevage hors sol…) risquent de davantage se
délocaliser
Les comportements des consommateurs peut se réorienter
vers les commerces de proximité (ou achat par internet?)
Il ne semble cependant pas que la répartition des grandes
productions mondiales soit fondamentalement modifiée, le
transport par bateau renforçant sa compétitivité
6. Quelques propositions et recommandations
Soutien à la recherche de nouvelles technologies
 La recherche de biocarburants de 2e génération et
d’autres sources d’énergie doit être considérée comme
prioritaire
 La mise au point de nouvelles variétés moins
gourmandes en N (ou fixatrices de N)
 La promotion d’une agriculture de précision productive
et économe en énergie
 La revalorisation de la production de légumineuses en
grandes cultures comme en élevage
Mise en place de dispositifs (stockage, TIPP
flottante…) permettant de limiter les fluctuations
conjoncturelles de prix et d’approvisionnement du
pétrole
Quelques propositions et recommandations
Adaptation des outils de politique agricole afin de favoriser
les systèmes plus économes en énergie et plus respectueux
de l’environnement
 Les modalités d’attribution des aides directes PAC doivent
avantager les systèmes économes en énergie
 La politique agricole doit soutenir les investissements
permettant de réduire la consommation d’énergie des
exploitations
 Aider le développement des productions agricoles et les
filières agricoles de proximité à l’échelle régionale (yc la
mobilisation du bois énergie qui pourrait augmenter de 3
Mtep soit 30%)
 Encourager l’autonomie énergétique des exploitations (huiles
végétales, digesteur…) et la gestion de la forêt paysanne
 La concurrence alimentation/biocarburants doit être gérée par
la PAC afin d’assurer prioritairement la sécurité alimentaire de
l’Europe
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