Période des inverses

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Période des inverses
Par un élève de Terminale S du lycée Fragonard de l’Isle Adam(2007-2008) :
Gustave Emprin
Enseignants : Dominique Baroiller et Annick Boisseau
Chercheur : Philippe Guillot
Le sujet : Si on examine le développement décimal de 1/n pour un entier naturel non nul
donné n, deux cas se présentent : soit le développement est fini (par exemple 1/2 = 0,5) , soit
il est constitué de chiffres qui se répètent à partir d’un certain moment : un cycle (par exemple
1/11 = 0,090909…). On s’intéresse au nombre de chiffres de ce cycle.
Introduction
Comme tous les nombres, les inverses des entiers naturels admettent une écriture décimale.
Par exemple pour 7, on observe un motif ou cycle de 6 chiffres qui se répète :
1
= 0,142857142857142857142857…
7
On remarque une périodicité du développement décimal. Il est facile de prouver que cette
périodicité existe pour l’inverse de tout entier.
Définition : On appellera ici période le nombre de chiffres du motif.
On cherche à déterminer cette période pour tous les inverses des entiers naturels non nuls.
Dans la suite, nous utilisons les notations suivantes :
un = 10n − 1
a | b signifie « a divise b »
a ≡ b [n] signifie « a et b ont même reste dans la division euclidienne par n »
p(x), la période de x, est le nombre de chiffres d’un cycle de
1
x
Par convention (personnelle), un nombre décimal a une période nulle car son développement
est fini.
Par exemple,
1
= 0,50000000000… p(1/2) = 0
2
1
= 0,25000000000… p(1/4) = 0
4
1
On remarque que les multiples d’une période sont aussi des périodes.
Par exemple :
1
= 0,142857142857142857…
7
a
6
6
6
Définition : La période d’un nombre est la plus petite période.
On définit donc 6 comme la période de 7 .
Conjecture : Les multiples de 6 : 12, 18, 24, etc. sont aussi des périodes de 7 (les autres).
I- Une suite très pratique
La définition « graphique » de la période étant difficile à utiliser, nos premiers efforts ont
porté sur la recherche d’un outil plus maniable.
En effet, on montre que :
Si n est période de x, alors la multiplication par 10n, c'est-à-dire un décalage de n chiffres
laisse le développement décimal périodique inchangé après la virgule. On s'en débarrasse à
1
l'aide d'une simple soustraction de . Le développement est alors fini, d'où :
x
10 n 1
− est un nombre décimal.
x
x
2α × 5 β × (10 n − 1)
C’est à dire, il existe des entiers α et β tels que
est un entier.
x
x
Ceci signifie que α
divise 10n-1 = un .
β
2 ×5
Dire que n est période de x signifie que
Conclusion :
x admet n pour période si, et seulement s'il existe α et β entiers tels que
x
divise un.
2 × 5β
α
De plus, comme un est premier avec 10, il est premier avec 2 et 5, on doit donc choisir α et β
x
pour que α
soit premier avec 10.
2 × 5β
Exemples :
•
6=2 × 3
2
6
= 3 et 3 divise 101-1 = 9
2
Donc 3 et 6 ont pour période 1.
•
P(7) = 6 et 10 6 ×
1
106 1
= 142857,142857... d’où
− = 142857,0...
7
7
7
106 − 1
est un entier, donc 10 6 − 1 est un multiple de 7.
7
En effet, u6 = 10 6 − 1 = 999999 = 142857 × 7.
•
De plus, u3 = 10 3 − 1 = 999 = 37 × 27
1
1
1
donc 3 est période de
,
et
(entre autres).
27 54
37
On supposera, pour la suite, que x est premier avec 2 et 5, et que n est la période de x.
II- Période et périodes
On a émis la conjecture que les multiples de la période sont des périodes. Quelles sont les
relations entre la période et les périodes ?
Soit n la période de x.
x divise 10n-1, donc 10n-1 est congru à 0 modulo x.
10n est congru à 1 modulo x donc pour tout entier k, 10knest congru à 1k modulo x.
Ceci signifie que si n est une période de x, alors kn l’est aussi.
D'autre part, soit k une période, et soient q et r le quotient et le reste de la division euclidienne
de k par n : k = qn + r ; 0 ≤ r < n
x | uk
x | 10qn+r –1
x | 10qn+r-10r+10r-1
x | 10r(10qn-1)+(10r-1)
x | 10r(uqn)+ur
Or x | uqn , donc x | 10r(uqn), c'est à dire, par différence
3
x divise ur
Comme n est la plus petite valeur non nulle telle que x | un , alors r = 0 .
Conclusion :
k est une période de x si et seulement si k est multiple de n.
La conjecture est vérifiée.
III- Composons les périodes
Afin de déterminer plus facilement la période d'un nombre composé, on cherche ici à
déterminer la période du produit, par exemple, de deux nombres premiers entre eux.
En effet, si x1 et x 2 , premiers entre eux, admettent respectivement pour période n1 et n2 ,
Alors ils divisent respectivement u n1 et u n 2 ,
Ainsi que, pour tous entiers k et k’, u kn1 et u k 'n 2 ,
Soit x = x1 × x 2 et n le plus petit commun multiple de n1 et n2
Alors x1 et x 2 divisent un , c'est-à-dire x | un car x1 et x 2 sont premiers entre eux
et n | PPCM ( n1 , n 2 )
Si k appartient à N* et est la plus petite valeur telle que x divise uk , alors
x1 divise x, donc x1 divise uk
De même x 2 divise uk, d’où :
p(x) = PPCM [p ( x1 ) ; p ( x 2 )]
Conclusion :
Soit x1 et x 2 deux entiers premiers entre eux, alors le produit x = x1 × x 2 a pour période
p(x) = PPCM [p ( x1 ) ; p ( x 2 )].
Exemple :
p (7) = 6
p (41) = 5
p (11) = 2
PPCM ( 2 ; 5 ) = 10
donc p (451) = 10
4
PPCM ( 2 ; 6 ) = 6
donc p (77) = 6
IV- Et les puissances ?
La propriété ci-dessus ne s'applique que pour n1 et n2 premiers entre eux, ce qui pose
problème dans le cas de la puissance d’un nombre, premier par exemple. Le calcul de cette
période, plus complexe, nécessite une démonstration plus étoffée.
a) Construire une conjecture.
On cherche la valeur de la période de différentes puissances de nombres premiers.
1
= 0,142857142857… p (7) = 6
7
D'après I-, 49 | uP(49)
Comme 7 divise 49, on a 7 divise uP(49) donc p (49) est une période de 7, c'est à dire (d'après
II-), p (7) divise p (49) .
Il suffit donc de tester des périodes multiples de 6. On trouve finalement p (49) = 42
On cherche de même la période de 343, pour laquelle on trouve p (343) = 294
On procède de même pour les puissances de 11, pour lesquelles on trouve :
p (11) = 2w
p (121) = 22w
p (1331) = 242
Une conjecture semble ressortir : p (xk) = p (x) × x k −1
On observe toutefois une exception pour 3 :
p (3) = 1
p (9) = 1
p (27) = 3
p (81) = 9w
p (243) = 27
5
Il apparaît que pour 3, on a p (xk) = nxk-2 !
La propriété définitive apparaîtra dans la démonstration réciproque de la conjecture, et diffère
sensiblement de cette dernière (d'où l'exception pour 3).
b) Démonstration démoniaque.
On utilise deux récurrences successives. La première définissant la multiplication ...
u2n = 102n -1
= (10n+1) (10n-1)
= (10 n + 1) u n
= 10n * un +1* un
2 −1
= ∑10in * u n
i =0
k −1
Si, pour une valeur de k, on a ukn=
∑ 10
i =0
in
* un
Alors u(k+1) n = ukn+n
= 10kn+n − 1
=10kn+n -10kn +10kn − 1
= 10kn(10n – 1) + 10kn − 1
= 10kn(un) + ukn
= 10kn(un) +
k −1
∑10
i =0
in
* un
k
=
∑10
i =0
in
* un
k −1
Donc, pour tous n et k naturels non nuls, ukn =
∑10
i =0
in
* un
… Et la seconde, utilisant la première, qui démontre en deux temps la conjecture :
•
Premier temps (démonstration directe) : n × x k −1 est période :
On définit m de N tel que xm | u.n et PGCD (x ;
x | u.n <=> 10n-1 ≡ 0 [x]
un
) =1,
xm
<=> 10n ≡ 1 [x]
6
<=> pour tout i de N, 10in ≡ 1i ≡1 [x]
x-1
<=> Σ(10in) ≡ x ≡ 0 [x] (par somme)
i=0
∑ (10 )
x −1
in
<=> x |
i =o
or xm | un <=> xm+1 |
∑ (10 )u
x −1
in
i =o
n
=> xm+1| unx
Si xk | u nx k − m
alors 10
donc 10
nx k −m
nx k − m
− 1 ≡ 0 [x]
≡ 1 [x]
donc pour tout i de N, 10
∑ (10
x −1
donc, par somme,
∑ (10
x −1
donc x |
donc x × xk |
inx k − m
i =0
inx k − m
i =0
or xk | unxk-m
inx k − m
∑ (10
x −1
) ≡ x ≡ 0 [x]
)
inx k − m
i =0
≡ 1i ≡ 1 [x]
)u
k-m
nx
c’est-à-dire xk+1 | unxk+1-m
Par récurrence, si x | un , alors xk | unxk-m
•
Second temps (démonstration réciproque) : n × x k −1 est la période.
On pose b le plus petit entier non nul tel que : xk | unb
Comme xk | unxk-m, on a : b < xk-m
<=> xk | unb
<=> xk |
∑ (10 )u
b −1
in
i =o
n
Comme x est premier avec
un
, xk-m |
m
x
b −1
∑ (10
in
)
i =0
7
b −1
C’est à dire
∑ (10
in
) ≡ 0 [xk-m]
i =0
b −1
Or
∑ (10
in
) ≡ b [xk-m]
i =0
Donc b ≡ 0 [xk-m]
Donc xk-m | b
Donc b > xk-m
Or xk | u nx k − m
Donc b = xk-m
Comme x ne divise que les u de la forme ubn ,
1
nx k-m est la période de .
x
Exemple :
Détermination de p(137)
p(13) = 12
p(13²) ≠ 12 donc m = 1
p(137) = 12 × 13 6
V- Nombres premiers
Les propriétés énoncées ci-dessus permettent de calculer la période de tout nombre composé,
mais sont inutilisables avec les nombres premiers (dont on utilise la période pour trouver celle
de leurs multiples…)
Le petit théorème de Fermat :
Soit p un entier premier. Pour tout entier a non divisible par p, a p−1 ≡ 1 [ p] .
nous vient en aide et permet d’affirmer que :
si n est un nombre premier différent de 2 et 5, donc premier avec 10,
alors 10n-1 ≡ 1 [n]
<=> 10n-1 − 1 ≡ 0 [n]
<=> un-1 ≡ 0 [n]
<=> n | un-1
<=> p(n) | n − 1
Exemple :
Détermination de p(11)
On sait déjà que p(11) divise 10. Les valeurs possibles sont donc p(11) ∈ {1 ; 2 ; 5 ; 10 }
On teste les diviseurs en commençant par les plus grands (à l’exception de 10, car on sait déjà
qu’il est période).
8
5 n’est pas période, donc 5 n’est pas multiple de la période, donc la période ne divise pas 5,
donc P(11) ∈ { 2 ; 10 }
On teste les valeurs restantes : 2 est période, donc 2 est la période.
VI- Calcul de p(x)
Utilisation de la méthode trouvée pour déterminer la période d’un entier x sur un exemple.
1) Décomposer x
x = 28350 = 2 × 3 4 × 5 2 × 7
2) Mettre à l’écart les facteurs 2 et 5
2 × 3 4 × 5 2 × 7 a 34 × 7
3) Chercher la période du (des) facteurs premier(s)
p(3) divise 2
Comme 3 | 101 − 1 , p(3)=1
p(7) | 6
Comme 7 ne divise ni u2 = 99 ni u3 = 999, alors p(7) = 6
4) Calculer la période de la (des) puissance(s) du (des) nombre(s) premier(s)
p(3)=1
9 | 101 − 1 , mais 27 ne divise que 103 − 1 , donc m = 2 et p(81) = 1 × 3² = 9
5) Calculer la période de x
P(28350) = PPCM [ P(7) ; P(81) ] = PPCM ( 6 ; 9 ) = 18
Pour finir, une remarque :
Toutes ces propriétés sont vraies pour toute base a de
{2 ; 5} par l’ensemble des diviseurs premiers de a.
à condition de remplacer 10 par a et
9
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