Hémorragie digestive haute

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HEMORRAGIE DIGESTIVE HAUTE.
Définition, intérêt :
Saignement digestif extériorisé ou non, dont l’origine se situe sur le tractus digestif supérieur
(œsophage, estomac, grêle) au-dessus du ligament de Treitz, pouvant se manifester par une
hématémèse, un méléna, voire une apparente rectorragie.
Intérêt :
- Véritable urgence médicale dont le pronostic dépend du terrain, de la cause, mais aussi de la
qualité de la prise en charge (multidisciplinaire : médecin, réanimateur, endoscopiste,
chirurgien).
- Amélioration du pronostic :
. par la prise en charge rapide
. par la gestion de la complication hémodynamique
. par l’apport des antisécrétoitres et des vasoactifs
. par la place de la FOGD rapide (mais non urgente : après préparation)
. par la place de la chirurgie : si mauvais contrôle à 24 h après 6 CGR sur un ulcère
hémorragique.
Circonstances de découverte :
1) Hématémèse :
Prodromes à type de plénitude gastrique, nausées, lipothymies.
Puis au milieu d’efforts de vomissements : rejet d’un flot de sang rouge sombre, non aéré, mélé de
caillots et d’aliments (aisément distingué de l’hémoptysie ou de l’épistaxis déglutie et revomie).
Suivi de mélaena.
2) Mélaena :
Emission de selles noires, luisantes, fétides. Pose le problème de son origine.
3) Rectorragie :
Si hémorragie digestive haute très abondante, éliminée rapidement dans les selles.
Rare avec contexte hémodynamique dramatique.
4) Anémie ferriprive :
Si hémorragie distillante (patients sous antithrombotiques notamment).
Diagnostic positif :
Affirmé par l’existence d’une hématémèse (à différencier d’une hémoptysie ou d’une épistaxis
déglutie).
Sonde gastrique si hémorragie extériorisée par voie basse : simple, même si le geste est dangereux
dans la rupture de VO.
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Parfois le diagnostic est moins évident et il faut savoir y penser devant une anémie ferriprive, un
choc hypovolémique.
Diagnostic de gravité (+++) :
• Clinique :
- Quantité de sang extériorisée (souvent surestimé à l’interrogatoire) et retentissement clinique
avec signes de collapsus (tachycardie parfois masquée par β-bloquants, HTOS, puis tableau
caricatural avec chute TA < 80 mmHg, marbrures, état syncopal).
- Terrain : âge, antécédents coronariens et respiratoires, HTP (= tournant évolutif, médiane de
survie à 1 an).
• Paraclinique :
NFP : chute de l’hématocrite retardée.
Faire en urgence : ionogramme, coagulation, groupage (Rh, RAI).
Prise en charge :
Dans une structure spécialisée.
Voie d’abord de bon calibre. Macromolécules : même si hémorragie de faible abondance car peut
ressaigner à tout moment. Oxygène.
Sonde gastrique : souvent utile, permet d’estimer la persistance et l’abondance de l’hémorragie,
d’éviter vomissements et inhalation, de laver l’estomac à l’eau glacée en vue de la FOGD. Elle peut
s’avérer dangereuse dans des mains non expertes (volumineuses VO, entretien de vomissements).
Indice de gravité différée :
Persistance de l’hémorragie malgré un traitement en apparence adapté : UGD continuant à saigner
malgré le traitement antisécrétoire et 8 à 10 CGR → il faut confier le patient au chirurgien
précocement (10% de mortalité versus 30% si on attend).
Diagnostic différentiel :
- Epistaxis, gingivorragie, vomissement de vin rouge ou de betterave.
- Hémoptysie : sang rouge clair mousseux (mais peut être déglutie).
- Selles colorées : charbon, fer.
Diagnostic étiologique :
Se mène parallèlement à la restauration de l’état hémodynamique.
♦ Les moyens :
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Anamnèse :
Antécédents : alcoolisme, cirrhose, ulcère, hémorragie digestive, prothèse aortique.
Médicaments gastrotoxiques, anticoagulants.
Maladie hémorragique (épistaxis répétés et antécedents familiaux : maladie de Rendu-Osler).
Douleurs épigastriques et efforts de vomissements.
Examen clinique :
Hépatomégalie, signes d’HTP, signes d’IHC.
Point douloureux abdominal, masse épigastrique.
Malformations vasculaires cutanées.
Examens paracliniques :
Bilan hépatique, crase saguine.
Fibroscopie œsogastroduodénale (+++) :
. idéalement dans les 6 premières heures jusqu’à 24h ;
. sur un malade conscient avec bon équilibre hémodynamique ;
. sur un tractus digestif ne saignant plus ou quasiment plus ;
. après lavage à l’eau glacée ;
. avec un endoscope à double canal.
La normalité de la fibroscopie n’élimine aucune cause. Elle doit être complète et non
traumatique.
♦ Les grands cadres étiologiques :
Rupture de VO :
Mise au point sur la prise en charge des RVO : Février 2002
Attendue chez un cirrhotique où elle marque un tournant évolutif de la maladie ; parfois révélatrice
de la maladie.
La FOGD affirme les VO : cordons bleutés sinueux des derniers cm de l’œsophage. L’endoscopie
montre soit un saignement actif, soit un caillot rouge ou blanc sur une VO, soit des signes de
saignement récent mais non actif (caractère certain, probable ou possible). Le diagnostic est
parfois retenu en l’absence de toute autre cause devant des VO de taille importante sans signe
hémorragique direct.
Parfois il s’agit d’une rupture de varices cardio-tubérositaires ou duodénales. Les gastropathies
d’HTP (en mosaïque ou par ectasies antrales) saignent en nappe.
Ulcère gastro-duodénal (maladie ulcéreuse) :
L’HD révèle la maladie dans 1/3 des cas, la complique dans 1/2 cas.
Une prise récente de médicaments gastrotoxiques est retrouvée dans la moitié des cas
d’hémorragies ulcéreuses.
La FOGD : montre la lésion (pylorique ou bulbaire), apprécie la taille, le caractère creusant ou
non, le caractère unique ou multiple, le statut du saignement (hémorragie visible, caillot récent).
Risque de récidive des ulcères de la face postérieure du bulbe.
Gastrite aiguë :
Les lésions aiguës de la muqueuse gastrique peuvent être déclenchées dans 2 circonstances
particulières : prise de médicaments agressifs pour la muqueuse gastrique (AINS +++) et stress
(psychologique, métabolique, infectieux, chirurgical, réanimation...).
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Il peut s’agir d’ulcérations multiples, de saignement en nappe ou d’une ulcération simple de
Dieulafoy (sous cardiale).
Autres :
- Syndrome de Mallory-Weiss : fissurations longitudinale du cardia secondaires à des efforts de
vomissement.
- Oesophagite peptique : rare.
- Tumeurs gastriques : les tumeurs bénignes saignent plus volontiers que les malignes.
- Ampullome watérien : hémobilie.
- Angiodysplasie de la maladie de Rendu-Osler.
- Kaposi du VIH.
- Fissuration d’une prothèse aortique, ou d’un volumineux anévrisme aortique.
Traitement :
1. Les buts :
Corriger les désordres hémodynamiques.
Traiter la cause.
Prévenir les récidives.
2. Les moyens :
Ils sont d’ordre médicamenteux, endoscopique ou chirurgical
Chaque étiologie recquiert un traitement spécifique adapté, couplé au traitement symptomatique.
Laisser le patient à jeun strict (+++).
3. Les indications :
• En urgence : macromolécules, transfusion.
• Si HTP : 60% des HD par rupture de VO s’arrêtent spontanément, mais le risque de récidive
impose de réaliser une sclérothérapie ou une LVO.
La sclérose est précédée d’un traitement vasoactif : vasopressine (1 mg/4h x 24h) +
nitrés en patch, ou somatostatine (bolus de 250 µg, puis 250 µg/h(ou 6 mg/J au PSE)),
suivi d’une sclérose en semi-différé.
Traitements associés : prévention de la décompensation de la cirrhose (surinfections,
encéphalopathie).
• Si gastrite aiguë : traitement médical + lavage + traitement de la cause.
• Si ulcère : traitement médical = anti-H2 (Ranitidine IV 250 mg/j PSE, Oméprazole 20 mg/j IV)
± traitement instrumental : coagulation, injection de vasoconstricteur ou de
sclérosant. Si échec à 24 h avec transfusions de plus de 8 à 10 CGR → chirugie.
• Au décours de l’urgence :
Pour des VO : prophylaxie secondaire par sclérothérapie, β-bloquants, voire association.
Pour un ulcère : traitement antisécrétoire de fond ; si récidive, chirurgie à discuter.
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Conclusion :
Si le diagnostic étiologique précis et le traitement spécifique nécessitent un avis spécialisé, la prise en
charge précoce peut incomber à tout médecin.
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