et «patriotisme économique - Revue Française de Gestion

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ÉDITORIAL
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PAR JEAN-MARIE DOUBLET
Double discours
et « patriotisme
économique »
L
e printemps arrivant, on a assisté de par le monde
à un ballet des fusions ou acquisitions. C’est ainsi
qu’ont été envisagés successivement voire simultanément les rapprochements de géants comme Nasdaq, la
Bourse américaine de valeurs technologiques et du London Stock Exchange, du groupe pharmaceutique allemand
Merck et de Sheruq, de Natexis-Ixis, ou d’E.ON-Endesa,
de Old Mutual-Shandia sans oublier évidemment, en
France, la fusion annoncée de Suez et de Gaz de France et
de l’OPA lancée en janvier de Mittal Steel sur Arcelor.
Tout cela a dopé des marchés financiers très attentifs à tous
ces mouvements et a suscité de la part des politiques et de
l’opinion certains mouvements d’inquiétude.
C’est dans ce contexte que l’on a vu apparaître la notion
de ce « patriotisme économique ». Partisans et opposants
à ce mot d’ordre ont multiplié les déclarations « Dans la
mondialisation le patriotisme est une nécessité, sinon il
n’y a plus de repères. » proclame Jean-Louis Debré. À
quoi a répondu le député Hervé Navelli « la mondialisation, c’est la capacité à se projeter à l’extérieur, non pas
à se protéger ». Mario Manti, ancien commissaire européen à la concurrence a ajouté « Il faut se demander si les
intérêts de l’économie nationale, au sens large, c’est-àdire aussi l’intérêt des consommateurs, la création d’emplois à long terme, la compétitivité du pays sont toujours
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Revue française de gestion – N° 162/2006
les mieux protégés par la défense de la propriété nationale des entreprises. »
Plusieurs points doivent être pris en compte
dans ce débat.
La notion de « patriotisme économique » at-elle un sens dans une économie ouverte ou
tout au moins dans une économie européenne où les fusions entre les sociétés des
différents pays membres de l’Union ont été
les plus fortes en 2005 depuis 1999-2000 ?
Pourquoi une fusion entre deux sociétés
françaises est-elle préférable à une prise de
participation dans une entreprise française
par une société italienne ou par une société
allemande ? En fait, le « patriotisme économique », recouvre la notion de protectionnisme. Les gouvernements français et les
syndicats jugent que c’est encore la
meilleure arme pour développer des pôles
de croissance et contenir le chômage. Il faut
mobiliser les réflexes nationaux surtout
dans des domaines comme l’énergie, les
nouvelles technologies, et les services à
haute valeur ajoutée.
Tout cela est compréhensible de la part d’un
gouvernement qui cherche à relancer l’emploi et à empêcher les entreprises de se
délocaliser. Là où les choses se compliquent c’est lorsque les gouvernements pratiquent un double discours. La circulation
des biens, des services et des capitaux à travers l’Europe voire de par le monde, peut
être bénéfique lorsqu’elle sert nos intérêts.
On comprend alors que les entreprises françaises puissent obtenir des bénéfices dans le
monde entier, quitte à ce que ceux-ci soient
réinvestis sur le territoire national.
On doit noter que les groupes du CAC 40
de la Bourse de Paris ont dégagé un profit
net de 80 milliards d’euros soit une hausse
de plus de 20 % en un an. C’est dans les
pays étrangers, notamment dans le sud que
ces groupes ont vu leur chiffre d’affaires
progresser de 10 % en moyenne et leurs
profits de 20 %. Total pour ne parler que de
cette compagnie a réalisé 95 % de ses bénéfices à l’étranger.
En même temps que l’on proclame ces
résultats, on cherche à restreindre le plus
possible l’application en droit français des
directives européennes sur les OPA établies
par Bruxelles pour limiter les effets des
manœuvres de défense des gouvernements
et des entreprises. La France risque de donner un mauvais exemple qui sera suivi par
ses partenaires.
Tout laisse à penser que l’on va voir se multiplier les offres hostiles dans les mois qui
viennent, que le gouvernement le veuille ou
pas. La course à la taille critique, des taux
d’intérêt favorables, le manque de visibilité
de la stratégie de certaines entreprises, l’appât du gain des fonds d’investissement, la
sous-capitalisation de certaines entreprises,
autant de facteurs qui vont les favoriser.
Cela est d’autant plus vrai que le développement externe est de loin privilégié aujourd’hui par les entreprises. Vu la léthargie de
l’économie, pour la plupart des sociétés
françaises qui connaissent des marges
faibles, il n’y a de croissance qu’en externe.
Enfin, l’engouement pour les fusions et
acquisitions pose un problème, celui de
l’objectivité des marchés financiers. On sait
que les Bourses constituent un des lieux du
financement des entreprises qui doit s’effectuer en fonction des variations de certains fondamentaux. Or on constate que
lorsqu’il y a une OPA la valeur de l’entreprise peut changer brutalement en fonction
du montant de l’offre et non pas en fonction
de ce qu’elle produit. Ces sauts quantitatifs
doivent rendre perplexes les analystes
financiers et les professeurs de finance.
SOMMAIRE
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numéro 162
mars 2006
7
Éditorial – Jean-Marie Doublet
11
Ont contribué à ce numéro
15
Management : les constructeurs
François Perroux : visionnaire de notre monde interactif
Sylvain Wickham
21
L’appréciation des personnels. Évaluer n’est pas expliciter
Jean-Paul Dumond
35
Critique de la notion de flexibilité
Bruno Maggi
51
La « cuillère d’E. » ou de la nécessité d’un management du design
Nicolas Minvielle
63
Gestion des risques et information endogène
Gildas Appéré
77
Pratiques des banques françaises en termes d’analyse du risque-pays
Bernard Marois, Pierre Syssau
Dossier – Recherche marketing : nouvelles tendances
Sous la direction de Michelle Bergadaà
95
Quoi de neuf dans la recherche en marketing ?
Michelle Bergadaà
99
Expériences de consommation et marketing expérientiel
Antonella Carù, Bernard Cova
115
Vers un renforcement de la proximité des relations client
Maud Dempérat
127
Le risque alimentaire perçu comme risque vital de consommation
Émergence, adaptation et gestion
Michelle Bergadaà, Bertrand Urien
145
Alternatives marketing pour les produits de terroir
Fatiha Fort, François Fort
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10
Revue française de gestion – N° 162/2006
161
L’influence de la perception du temps sur l’achat
par catalogue
Souad Djelassi, Jean-Marc Ferrandi
177
Actualité des livres
185
Summary
189
Note aux auteurs
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ONT CONTRIBUÉ À CE NUMÉRO
Gildas APPÉRÉ est maître de conférences en sciences économiques à l’université de Bretagne-Occidentale et dirige
(septembre 2005) le département de
sciences économiques et de gestion. Ses
travaux de recherches portent d’une part,
sur les questions de comportements individuels face à des risques sanitaires (travaux
menés au sein du GRID, Cachan) et d’autre
part, sur des questions d’évaluation et de
gestion de projets ayant une dimension
environnementale (travaux menés au sein
du CEDEM, Brest).
Michelle BERGADAÀ est professeur à
HEC, université de Genève, où elle dirige
l’Observatoire de vente et stratégies du
marketing (OVSM). Ses recherches touchent au domaine du cadre temporel de
l’action individuelle, de l’éthique, du don,
des activités culturelle et de la relation
entreprise-société. Elles se situent principalement dans des contextes de découverte et
elles s’appuient sur des méthologies enracinées dans les faits.
Antonella CARÙ est professeur à l’université L. Bocconi de Milan. Son champ de
recherche privilégié est le marketing des
services et notamment le marketing des arts
et de la culture. Elle a publié sur ce thème
dans des revues comme l’International
Journal of Arts Management et l’International Journal of Service Industry Management. Son ouvrage Consuming Experiences
(en collaboration, Routledge, 2006) propose un panorama des types d’expérience
de consommation.
Bernard COVA est professeur à Euromed Marseille-École de management et
professeur visitant à l’université L. Bocconi
de Milan. Ses recherches portent sur les
évolutions des tendances de consommation
et les nouvelles démarches marketing qui
en résultent. On lui doit notamment le développement du marketing tribal. Son dernier
ouvrage (en collaboration) Alternatives
Marketing. Réponses marketing aux nouveaux consommateurs est publié chez
Dunod.
Maud DAMPÉRAT est professeure
adjointe en marketing à HEC Montréal et
membre de l’OVSM (Obvervatoire de
ventes et stratégies du marketing) ainsi que
du laboratoire du CERAG/CNRS (Centre
d’études et de recherches appliquées à la
gestion). Ses travaux concernent principalement la relation client et la satisfaction sur
les marchés aux entreprises et aux particuliers.
Souad DJELASSI est maître de conférences à l’IUT « C » de Lille II et membre
de l’équipe de recherche GERME de l’université de Lille II. Ses recherches portent
sur les perceptions du temps, le comportement de fréquentation des points de vente,
le comportement d’achat. Elle a été coordinatrice d’une journée sur le thème : « Temps
et Comportement du consommateur » à
l’IUT de Lille II en mars 2005.
Jean-Paul DUMOND est enseignantchercheur en GRH, théorie des organisations et conduite de projet à l’ENSP (École
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Revue française de gestion – N° 162/2006
nationale de la santé publique), au LAPSS
(Laboratoire d’analyse des politiques
sociales et de santé) et associé à l’IRG (Institut de recherche en gestion-Paris XII). Il a
fait une thèse sur le don et la coopération
dans les situations de travail (HEC). Ses
thèmes de recherche sont l’évaluation des
personnels et les transformations de la relation d’emploi, les évolutions organisationnelles et la santé mentale au travail.
Jean-Marc FERRANDI est maître de
conférences à l’IUT de Dijon. Membre du
CERMAB, ses recherches portent non seulement sur la mesure de l’influence des
variables culturelles sur le comportement
du consommateur, mais aussi sur la personnalité de la marque.
Fatiha FORT est ingénieur d’études à
l’ENSAM et mène ses activités de
recherche au sein de l’UMR MOISA (Unité
mixte de recherche marchés organisations, institution et stratégies d’acteurs) et
du CREGO (université de Montpellier II).
Ses recherches s’inscrivent à l’interface
« filières et institutions » et ses travaux sur
le marketing des produits alimentaires et du
développement territorial.
E-mail : [email protected]
François FORT est professeur à l’université Montpellier I, chercheur à l’Institut du
management de la recherche et de l’innovation (IMRI-université Paris-Dauphine) et
chercheur associé au CGS École des
Mines de Paris. Il travaille sur les problématiques de l’innovation managériale. Ses
recherches concernent des domaines tels
que la qualité totale, le marketing et l’émer-
gence de nouveaux concepts de GRH dans
les organisations de R&D.
Bruno MAGGI est professeur titulaire
de théorie de l’organisation à la faculté
d’économie de l’université de Bologne et à
la faculté de droit de l’université des études
de Milan. Il dirige des recherches interdisciplinaires sur le changement organisationnel et sur les rapports entre travail et bienêtre. Il a été professeur invité dans de
nombreuses écoles et université françaises
(universités Paris I, Paris V, Toulouse II,
Aix-en-Provence, HEC, CNAM, CSOCNRS). Il a notamment publié : De l’agir
organisationnel (Octarès Éditions, 2003) ;
L’atelier de l’organisation (l’Harmattan,
2001), Le travail collectif dans l’industrie
à risque (avec V. Lagrange, Octarès Éditions, 2002).
Bernard MAROIS est professeur honoraire au Groupe HEC-Paris, où il a enseigné
pendant de nombreuses années la finance
internationale. Il a publié divers ouvrages,
dont Le risque pays (coll. « Que sais-je ? »),
Managing risk in international business
(coll. International Thomson Publishing) et
Le management des risques internationaux
(Economica). Il écrit, par ailleurs régulièrement dans de nombreuses revues spécialisées et est consultant auprès de grandes
banques et président du Club Finance Internationale.
Nicolas MINVIELLE est diplômé de
l’université Impériale de Kyushu au Japon,
de l’Institut d’études politiques de Strasbourg, de l’EHESS, et a été lauréat de la
Chancellerie des universités de Paris. Res-
Ont contribué à ce numéro
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ponsable des licences et de la propriété
industrielle de Philippe Starck depuis cinq
ans, il mène en parallèle des activités de
recherche sur les problématiques liées au
management du design.
Pierre SYSSAU est diplômé du mastère
en management des risques internationaux
de HEC-Paris ainsi que du DEA en management des activités internationales de
l’IAE de Lyon III. Il a également obtenu en
2002 le titre de Diplom-Kaufmann à la
Fachhochschule de Aachen (Allemagne) et
est lauréat du Concours Aftalion 2001 en
macroéconomie (deuxième prix). Il occupe
actuellement un poste d’analyste crédit au
sein de la banque de financement et d’investissement d’une banque française de
premier rang.
13
Bertrand URIEN est professeur de
sciences de gestion à l’IAE de BretagneOccidentale. Il dirige le laboratoire de
recherche ICI (EA 2652) et le mastère
recherche en sciences de gestion. Ses
recherches s’incrivent principalement dans
le cadre temporel de l’action individuelle.
Elles portent actuellement sur l’influence
de l’attitude à l’égard de la mort sur les
comportements de consommation ».
Sylvain WICKHAM, économiste – Master of Arts Harvard, a été professeur aux universités de Lyon, puis de Paris-Dauphine. Il
a participé au démarrage du COE de la
chambre de commerce de Paris et a réalisé
des missions pour la Banque mondiale. Il est
responsable de prospective industrielle à
l’ISMEA et auteur de nombreux ouvrages
dont L’espace industriel européen.
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