Neuroblastome ou Sympathoblastome (144b)

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Neuroblastome ou Sympathoblastome (144b)
Professeur Dominique Plantaz
Janvier2004
Pré-Requis :
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Epidémiologie des cancers de l’enfant.
Embryologie du système nerveux.
Métabolisme des catécholamines.
Résumé :
Le neuroblastome est une tumeur maligne du jeune enfant développée à partir du tissu
nerveux sympathique. La localisation la plus fréquente est le rétropéritoine, en particulier
la surrénale. En l’absence de métastases, les problèmes thérapeutiques sont
essentiellement représentés par les difficultés à réaliser une exérèse complète, qui
permet la guérison la plupart du temps ; la chimiothérapie préopératoire joue un rôle
important dans des tumeurs inopérables, même non métastatiques. Certaines formes
localisées rares ont cependant une évolution péjorative liées à certaines anomalies
génétiques tumorales, en particulier l’amplification du gène Nmyc. Les formes
métastatiques sont les plus fréquentes et les métastases sont principalement osseuses et
médullaires après l'âge de 1 an et hépatiques chez le nourrisson. Le pronostic des formes
métastatiques est fonction de l'âge: chez les nourrissons, les métastases hépatiques ont
un pronostic habituellement favorable et peuvent même parfois régresser sans
traitement. Chez l'enfant plus grand, l'envahissement médullaire métastatique confère
encore actuellement un pronostic redoutable à cette tumeur, malgré des approches
thérapeutiques récentes, telles la chimiothérapie à hautes doses avec support de cellules
souches hématopoiétiques, et l'acide rétinoïque. La génétique moléculaire a permis une
identification de différents types de neuroblastomes. L'amplification de l'oncogène NMYC,
la délétion du bras court du chromosome 1 et la ploïdie des cellules tumorales sont des
facteurs pronostiques essentiels, qui avec l'âge de l'enfant, le caractère localisé ou
disséminé, et l'opérabilité permettent de définir le traitement optimal adapté au risque.
Mots-clés :
Neuroblastome, tumeur embryonnaire, système nerveux sympathique, tumeurs
abdominales rétropéritonéales, tumeur de la surrénale, cathécholamines urinaires, cancer
de l’enfant.
Références :
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"Standards, Options et Recommandations" (SOR). Neuroblastome et
Médulloblastome. John Libbey Eurotext. 1999.
Site de la Fédération Nationale des Centres de Lutte contre le Cancer :
http://www.fnclcc.fr/
Liens :
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Site de la Fédération Nationale des Centres de Lutte contre le Cancer :
http://www.fnclcc.fr/
Corpus Médical– Faculté de Médecine de Grenoble
1. Introduction et définition
C'est une tumeur embryonnaire maligne ayant pour origine le tissu sympathique (système
nerveux périphérique), ayant la particularité de sécréter des catécholamines. Elle peut se
développer en n'importe quel point de l'organisme où existent des structures nerveuses
sympathiques, c'est à dire tout le long du rachis et au niveau de la surrénale et réaliser une
tumeur parfois extrêmement évolutive et volumineuse.
Touchant le jeune enfant, c'est la plus fréquente des tumeurs solides de l'enfant.
Son pronostic a été très amélioré, mais reste encore très sévère dans les formes métastatiques
chez des enfants âgés de plus de 1 an.
Cette tumeur est aussi caractérisée par sa possibilité de maturation et parfois de régression
spontanée.
Photo : pièce opératoire ouverte d’un tumeur surrénalienne (avec néphrectomie)
(D. Plantaz)
Photo : aspect histologique : tumeur à petites cellules rondes
(D. Plantaz)
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2. Epidémiologie
Représentant environ 10 % des affections malignes de l'enfant, le neuroblastome vient au
3ème rang après les hémopathies malignes et les tumeurs du système nerveux central.
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90 % des neuroblastomes ont moins de 6 ans au diagnostic
30 % ont moins de 1 an
Plus de 50 % des tumeurs malignes du nouveau-né sont des neuroblastomes.
L’étiologie est inconnue mais le neuroblastome est associé avec un excès de fréquence à la
maladie de Recklinghausen.
3. Manifestations cliniques
Elles sont extrêmement variables en fonction de la localisation, de la taille, de l'existence et
des localisations des métastases.
3.1. Les symptômes liés à la tumeur
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Dépendent de la localisation :
o siège abdominal dans 70 % des cas, avec :
• masse palpable dure, bosselée, fixée, indolore, volumineuse de
découverte systématique
• ou accompagnée de signes de compression digestive.
o siège thoracique dans 20 % des cas,
• découverte sur une radiographie de manière fortuite,
Photo : radiographie, neuroblastome apical gauche
(D. Plantaz)
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ou du fait de manifestations respiratoires.
Photo : radiographie, neuroblastome thoracique droit compressif
(D. Plantaz)
o siège pelvien dans 5% des cas avec des signes de compression vésicale ou
rectale.
o siège cervical dans 5% des cas.
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A tous niveaux, possibilité de signes neurologiques déficitaires lorsque la tumeur
pénètre dans le canal rachidien par les trous de conjugaison avec possibilité de
comprimer la moelle ou ses racines (neuroblastome en sablier).
Photo : IRM, neuroblastome en sablier
(D. Plantaz)
3.2. Les symptômes liés aux métastases
Environ 50 % des neuroblastomes sont métastatiques au diagnostic.
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Altération parfois marquée de l'état général avec pâleur en rapport avec une anémie
témoignant d'un envahissement de la moelle hématopoïétique.
Métastases ostéo-médullaires, révélées par des douleurs osseuses ou découvertes lors
du bilan.
Parfois ecchymose péri orbitaire avec exophtalmie en rapport avec des métastases
osseuses orbitaires réalisant un tableau très caractéristiques (syndrome deHutchinson).
Photo : syndrome de Hutchinson
(D. Plantaz)
Photo : syndrome de Hutchinson
(D. Plantaz)
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Métastases ganglionnaires : découverte d'une adénopathie sus-claviculaire.
Métastases sous-cutanées : nodules bleutés
Métastases hépatiques :
o découvertes lors de l'échographie.
o ou parfois entraînant chez un petit nourrisson une hépatomégalie monstrueuse
réalisant le classique syndrome de Pepper.
Photo : syndrome de Pepper
(D. Plantaz)
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3.3. Des syndromes associés sont possibles mais rares
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Syndrome catécholaminergique : flush, sueurs, HTA.
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Syndrome opso-myoclonique (syndrome cérébelleux, mouvements anormaux et ataxie
oculaire) associé dans 50% des cas à un neuroblastome.
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Diarrhée chronique sécrétoire par sécrétion de Vaso-active Intestinal Peptid (Vipome).
4. Les examens complémentaires : diagnostic paraclinique et
bilan d'extension
4.1. Le diagnostic est porté formellement dans plus de 90 %
des cas par le dosage des métabolites urinaires des
catécholamines
• HVA (acide homovanylique)
• VMA (acide vanylmandélique)
• Dopamine
Le dosage, réalisé par un recueil d'urines sur 24 heures est demandé en urgence devant toute
masse susceptible d'être un neuroblastome : tumeur rétro péritonéale, et tumeur du médiastin
postérieur en particulier.
4.2. Le bilan loco-régional est réalisé par l'imagerie
•
Radiographie sans préparation (ASP- Radio-pulm) :
montrant un effet de masse (opacité refoulant les structures normales) et objectivant
habituellement de fines calcifications.
•
Echographie++++ (dans toutes les localisations)
confirmant le caractère solide de la masse, qu'il faut mesurer dans les 3 dimensions,
recherchant des adénopathies régionales,
permettant d'apprécier les relations avec les organes de voisinage
et surtout les rapports avec les gros vaisseaux souvent intéressés par le processus
tumoral.
•
IRM (ou TDM)
permettant de mieux préciser les données de l'échographie, et surtout de rechercher
systématiquement une extension intra-rachidienne.
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Photo : IRM face, neuroblastome rétropéritonéal Gauche
refoulant le rein en bas et à Gauche
(D. Plantaz)
Photo : TDM, neuroblastome surrénalien Droit
(D. Plantaz)
4.3. Le bilan d'extension est complexe
4.3.1. Recherche de métastases osseuses
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Scintigraphie osseuse au technétium
Scintigraphie à la MIBG : en raison de leur équipement biochimique de cellules
adrénergiques, les neuroblastes sont capables d'incorporer de faux précurseur de la
synthèse des catécholamines, tels que la Méthyl Iodo Benzyl Guanidine que l'on peut
marquer à l'iode radioactif.
Cette scintigraphie révèle une fixation aussi bien sur la tumeur primitive que sur les
métastases osseuses.
4.3.2. Recherche de métastases médullaires
Par des myélogrammes + biopsie osseuse multiples sous anesthésie générale
recherche de métastases hépatiques : à l'échographie.
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4.4. La biopsie
Elle est devenue indispensable pour confirmer le diagnostic anatomo-pathologique même en
cas de tumeur primitivement inextirpable, et surtout pour réunir avant traitement des éléments
biologiques de pronostic au niveau de la tumeur :
• Détermination de la ploïdie des cellules tumorales (contenu en ADN) recherche d'une
amplification de l'oncogène N-myc (de mauvais pronostic).
• Recherche d'une délétion du bras court du chromosome 1 (1p).
5. Diagnostic différentiel
•
Pour les tumeurs abdominales : avec les autres tumeurs rétro-péritonéales, en
particulier :
o le néphroblastome : valeur de l'UIV. Catécholamines normales.
o l'hépatoblastome : tumeur intra hépatique. Alpha-foeto-protéines élevées.
o Les tumeurs germinales malignes (dosage sytématique HCG et AlphaFP)
•
Pour toutes les localisations : les autres tumeurs neurogènes, notamment situées dans
le médiastin postérieur à l'étage thoracique : neurofibrome (Recklinghausen),
ganglioneurome.
6. Les facteurs du pronostic
6.1. Stades d'extension
L'extension loco-régionale (qui conditionne les possibilités d'une exérèse complète) et
générale (métastases) ont une valeur pronostique importante :
Cette extension est définie par la stadification internationale INSS (International
Neuroblastoma Staging System) dérivée de la classification d’Evans.
Tableau : stadification internationale INSS (International Neuroblastoma Staging System)
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(Tous droits réservés)
6.2. Age
C'est un facteur pronostic essentiel :
• Age < 1 an = bon pronostic, y compris en présence de métastases.
• Age > 1 an = gravité +++ en cas de métastases ostéo-médullaires associées.
6.3. Facteurs biologiques
Le plus puissant des facteurs pronostiques biologiques est l'existence d'une amplification du
gène N-myc (augmentation du nombre de copies du gène), y compris en l'absence de
métastase et chez le nourrisson.
Il existe une classification clinico-biologique du neuroblastome qui rend compte de la grande
hétérogénéité de cette tumeur au plan de la présentation clinique, de l’agressivité tumorale et
de la réponse au traitement.
Tableau : classification clinico-biologique du neuroblastome
(Tous droits réservés)
7. Traitement
7.1. Méthodes
7.1.1. Chirurgie
Constante, c'est l'exérèse la plus complète possible au prix d'un minimum de risque et de
séquelle, ce qui dépend :
• de la taille,
• du siège :+ grande facilité pour les T surrénaliennes que pré rachidiennes.
• des rapports vasculaires et nerveux+++
Cette exérèse est :
• parfois impossible complètement.
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souvent précédée d'une chimiothérapie de réduction tumorale.
non justifiée d'emblée dans les formes métastatiques.
7.1.2. Chimiothérapie
Le neuroblastome est une tumeur très chimio-sensible.
• Les principales drogues efficaces sont :
o la vincristine
o le cyclophosphamide
o l'adriblastine
o le platine
o le vépéside
•
Les principaux intérêts de la chimiothérapie sont :
o la réduction tumorale pré-opératoire.
o le traitement des métastases
o le traitement des cellules tumorales résiduelles.
•
Les modalités de la chimiothérapie sont :
o la chimiothérapie conventionnelle = poly chimiothérapie séquentielle
o la chimiothérapie lourde avec greffe de moelle qui représente une voie de
recherche dans les formes de plus mauvais pronostic.
7.1.3. Radiothérapie
Le neuroblastome est radio sensible, mais la radiothérapie est peu utilisée compte tenu de
l'âge des enfants avec une indication très particulière : l'irradiation hépatique à faibles doses
dans le syndrome de Pepper.
7.2. Indication
7.2.1. Dans les formes localisées
•
•
petite tumeur sans rapport "dangereux" = exérèse
grosse tumeur et/ou rapports dangereux = chimio-chirurgie-chimio
7.2.2. Dans les formes métastatiques
•
du grand enfant :
o chimiothérapie pour la rémission des métastases et la réduction du volume
tumoral.
o exérèse de la tumeur primitive.
o chimiothérapie lourde de consolidation avec autogreffe.
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syndrome de Pepper :
o surveillance simple
o chimiothérapie peu agressive
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o ou radiothérapie hépatique
o puis exérèse secondaire de la tumeur primitive après régression des métastases.
7.3. Résultats
Stades localisés : 70 à 90% de guérison
Stades métastatiques < 1 an : 70% de guérison
Stades métastatiques > 1 an : 30% de guérison.
8. Conclusion
Le neuroblastome est une tumeur très polymorphe.
Malgré d'importants progrès diagnostiques et thérapeutiques, il reste une tumeur grave dans
certaines formes, justifiant une poursuite de la recherche.
L'hypothèse de la possibilité d'un dépistage plus précoce par un dosage systématique des
métabolites urinaires chez tous les nourrissons avant l'âge de 1 an est une des possibilités
actuellement à l'étude.
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