Théories de la croissance [modifier]

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Croissance économique
La croissance économique au sens large désigne l'augmentation des biens et services produits dans une
économie sur une période donnée1. Selon la définition plus restreinte de François Perroux2, la croissance
économique correspond à « l'augmentation soutenue pendant une ou plusieurs périodes longues d’un
indicateur de dimension, pour une nation, le produit global net en termes réels »1.
En pratique, l'indicateur utilisé pour la mesurer est le produit intérieur brut ou PIB, et le taux de croissance est
le taux de variation du PIB. On utilise la croissance du PIB par habitant comme indication de l'amélioration du
niveau de vie même si d'autres indicateurs existent spécialement pour cela comme l'indice de développement
humain (IDH).
Sommaire
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1 Définition
2 La mesure de la croissance
3 Historique
4 Quelques déterminants de la croissance
5 Théories de la croissance
o 5.1 L'école classique
o 5.2 Schumpeter : L'innovation à l'origine de la croissance et de ses cycles
o 5.3 La croissance « sur le fil du rasoir » : Harrod et Domar
o 5.4 Le progrès technique comme résidu : modèle de Solow
o 5.5 Endogénéiser le progrès technique : les nouvelles théories de la croissance
6 Remise en cause
o 6.1 La croissance peut-elle être infinie ?
o 6.2 Conséquences négatives de la croissance
 6.2.1 Conséquences possibles sur l'environnement
 6.2.2 Bouleversement induits
7 Annexes
o 7.1 Bibliographie
o 7.2 Articles connexes
o 7.3 Lien externe
o 7.4 Notes et références
Définition [modifier]
Le terme de croissance est donc conventionnellement utilisé par les économistes pour décrire une
augmentation de la production sur le long terme. À court terme, les économistes utilisent le terme d'
« expansion » (qui s'oppose à la « récession » ou à la « dépression »).
Au sens strict, la croissance décrit un processus d'accroissement de la seule production économique. Elle ne
renvoie donc pas directement à l'ensemble des mutations économiques et sociales propres à une économie en
expansion. Ces transformations au sens large sont, conventionnellement, désignées par le terme de
développement économique.
La croissance est un processus fondamental des économies contemporaines. Elle transforme la vie des
individus en leur procurant davantage de biens et services. À long terme, le niveau de vie (que l'on ne doit pas
confondre avec la qualité de vie) des individus dépend ainsi uniquement de cette croissance. De même,
l'enrichissement qui résulte de la croissance économique permet seul (mais pas nécessairement) de supprimer
la misère matérielle.
La mesure de la croissance [modifier]
Articles détaillés : Indicateur économique, Produit intérieur brut et Parité de pouvoir d'achat.
La croissance économique est généralement mesurée par l'utilisation d'indicateurs économiques dont le plus
couramment utilisé est le Produit intérieur brut. Il mesure la somme des valeurs ajoutées des entreprises du
pays, auquel on ajoute le solde de la balance extérieure. Il offre donc une certaine mesure quantitative du
volume de la production. Afin d'effectuer des comparaisons internationales, on utilise également la Parité de
pouvoir d'achat, qui permet de mesurer le pouvoir d'achat dans une même monnaie. Pour comparer la situation
d'un pays à des époques différentes on peut également raisonner à monnaie constante.
L'indicateur du PIB reste cependant imparfait comme mesure de la croissance économique et du
développement. Il est pour cela l'objet de plusieurs critiques : il ne mesure ainsi pas, ou mal, l'économie
informelle. D'autre part, s'il prend en compte la production des services publics gratuits, il ne mesure pas
l'activité de production domestique (ménage, potagers, etc.). Selon la boutade d'Alfred Sauvy, il suffit de se
marier avec sa cuisinière pour faire baisser le PIB. Enfin, il ne prend en compte que les valeurs ajoutées, et
non la richesse possédée, par un pays. Une catastrophe naturelle (Katrina détruisant la Nouvelle-Orléans, par
exemple), qui détruit de la richesse, va pourtant contribuer au PIB à travers l'activité de reconstruction qu'elle
va générer. Cette contribution ne reflète pas la destruction antérieure, ni le coût du financement de la
reconstruction. Cette contradiction était dénoncée dès 1850 par l'économiste français Frédéric Bastiat qui dans
son Sophisme de la vitre cassée écrivait que « la société perd la valeur des objets inutilement détruits », ce
qu'il résumait par : « destruction n'est pas profit. »3
Théories de la croissance [modifier]
Les théories explicatives de la croissance sont relativement récentes dans l'histoire de la pensée économique.
Ces théories ont conduit à mettre en avant le rôle primordial du progrès technique dans la croissance. Sur le
long terme, seul le progrès technique est capable de rendre plus productive une économie (et donc de lui
permettre de produire plus, c'est-à-dire d'avoir de la croissance). Toutefois, ces théories expliquent mal d'où
provient ce progrès, et en particulier en quoi il est lié aux fonctionnement de l'économie.
L'école classique [modifier]
Les économistes de l'école classique, écrivant pourtant au commencement de la révolution industrielle,
pensaient qu'aucune croissance ne pouvait être durable, car toute production devait, selon eux, inexorablement
converger vers un état stationnaire. C'est ainsi le cas de David Ricardo pour qui l'état stationnaire était le
produit des rendements décroissants des terres cultivables, ou encore pour Thomas Malthus qui le liait à son
"principe de population". Toutefois, Adam Smith, à travers son étude des effets de productivité induits par le
développement de la division du travail, laissait entrevoir la possibilité d'une croissance ininterrompue.
Schumpeter : L'innovation à l'origine de la croissance et de ses cycles [modifier]
A partir des travaux sur les cycles économiques de Kondratieff, Joseph Schumpeter a développé la première
théorie de la croissance sur une longue période. Il pensait que l'innovation portée par les entrepreneurs
constituait la force motrice de la croissance.
Pour Schumpeter, les innovations apparaissent par « grappes », ce qui explique la cyclicité de la croissance
économique. Par exemple, Schumpeter retient les transformations du textile et l'introduction de la machine à
vapeur pour expliquer le développement des années 1798-1815 ou le chemin de fer et la métallurgie pour
l'expansion de la période 1848-1873. De façon générale il retient trois types de cycles économiques pour
expliquer les variations de la croissance :
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les cycles longs ou cycles Kondratieff, d'une durée de cinquante ans ;
les cycles intermédiaires ou cycles Juglar, d'une durée de dix ans environ ;
les cycles courts ou cycles Kitchin, d'une durée de quarante mois environ11.
Il introduisit enfin le concept de « destruction créatrice » pour décrire le processus par lequel une économie
voit se substituer à un modèle productif ancien un nouveau modèle fondé sur des innovations. Il écrit ainsi12 :
La croissance « sur le fil du rasoir » : Harrod et Domar [modifier]
Après la seconde guerre mondiale, les économistes Harrod et Domar, influencés par Keynes, vont chercher à
comprendre les conditions dans lesquelles une phase d'expansion peut être durable. Ainsi, s'il ne propose pas à
proprement parler une théorie de la croissance (expliquant son origine sur une longue période), le modèle de
Harrod-Domar permet, néanmoins, de faire ressortir le caractère fortement instable de tout processus
d'expansion. En particulier, il montre que pour qu'une croissance soit équilibrée (c'est-à-dire que l'offre de
production augmente ni moins (sousproduction) ni plus (surproduction) que la demande), il faut qu'elle
respecte un taux précis, fonction de l'épargne et du coefficient de capital (quantité de capital utilisée pour
produire une unité) de l'économie. Or, il n'y a aucune raison que la croissance, qui dépend de décisions
individuelles (en particulier des projets d'investissement des entrepreneurs), respecte ce taux. De plus, si la
croissance est inférieure à ce taux, elle va avoir tendance non pas à le rejoindre, mais à s'en éloigner
davantage, diminuant progressivement (en raison du multiplicateur d'investissement). La croissance est donc,
selon une expression d'Harrod, toujours « sur le fil du rasoir ». Ce modèle, construit après guerre et marqué
par le pessimisme engendré par la crise de 1929, a toutefois été fortement critiqué. Il suppose, en effet, que ni
le taux d'épargne, ni le coefficient de capital ne sont variables à court terme, ce qui n'est pas prouvé.
Le progrès technique comme résidu : modèle de Solow [modifier]
Robert Solow a été le premier à proposer un modèle formel de la croissance. D'inspiration néoclassique, ce
modèle se fonde sur une fonction de production à deux facteurs : le travail et le capital. La production résulte
donc exclusivement de la mise en combinaison d'une certaine quantité de capital (moyens de production) et de
travail (main d'œuvre).
Le modèle de Solow se fonde sur l'hypothèse que les facteurs de production connaissent des rendements
décroissants, c'est-à-dire qu'une augmentation de ceux-ci dans une certaine proportion engendre une
augmentation dans une proportion plus faible de la production. Il pose également comme hypothèse que les
facteurs de production sont utilisés de manière efficace par tous les pays. En posant que la population connaît
un taux de croissance que Solow qualifie de « naturel » (non influencé par l'économie), le modèle déduit trois
prédictions :
1. Augmenter la quantité de capital (c’est-à-dire investir) augmente la croissance : avec un capital plus important,
la main d'œuvre augmente sa productivité (dite apparente).
2. Les pays pauvres auront un taux de croissance plus élevé que les pays riches. Ils ont en effet accumulé moins
de capital, et connaissent donc des rendements décroissants plus faibles, c’est-à-dire que toute augmentation
de capital y engendre une augmentation de la production proportionnellement plus forte que dans les pays
riches.
3. En raison des rendements décroissants des facteurs de production, les économies vont atteindre un point où
toute augmentation des facteurs de production n'engendrera plus d'augmentation de la production. Ce point
correspond à l'état stationnaire. Solow note toutefois que cette troisième prédiction est irréaliste : en fait, les
économies n'atteignent jamais ce stade, en raison du progrès technique qui accroît la productivité des
facteurs.
Autrement dit, pour Solow, sur le long terme, la croissance provient du progrès technologique. Toutefois, ce
progrès technologique est exogène au modèle, c'est-à-dire qu'il ne l'explique pas mais le considère comme
donné.
Endogénéiser le progrès technique : les nouvelles théories de la croissance [modifier]
L'évolution du PIB par tête aux États-Unis de 1880 à 2003 s'écarte peu d'un trend de longue période dont les nouvelles
théories de la croissance cherchent à rendre compte
Les théories récentes cherchent précisément à rendre ce facteur endogène -c'est-à-dire à construire des
modèles qui expliquent son apparition. Ces modèles ont été développés à partir de la fin des années 1970
notamment par Paul Romer et Robert Barro. Ils se fondent sur l'hypothèse que la croissance génère par ellemême le progrès technique. Ainsi, il n'y a plus de fatalité des rendements décroissants : la croissance engendre
un progrès technique qui permet que ces rendements demeurent constants. La croissance, si elle génère du
progrès technique, n'a donc plus de limite. À travers le progrès technique, la croissance constitue un processus
qui s'auto-entretient.
Ces modèles expliquent que la croissance engendre du progrès technique par trois grands mécanismes.
Premièrement, le « learning by doing » : plus on produit, plus on apprend à produire de manière efficace. En
produisant, on acquiert en particulier de l'expérience, qui accroît la productivité. Deuxièmement, la croissance
favorise l'accumulation du capital humain, c'est à dire les compétences possédées par la main d'œuvre et dont
dépend sa productivité. En effet, plus la croissance est forte, plus il est possible d'accroître le niveau
d'instruction de la main d'œuvre, en investissant notamment dans le système éducatif. D’une manière générale,
la hausse du niveau d'éducation de la population – par des moyens publics ou privés – est bénéfique.
Troisièmement, la croissance permet de financer des infrastructures (publiques ou privées) qui la stimulent. La
création de réseaux de communication efficaces favorisent, par exemple, l'activité productive.
« La principale [des] conclusions [de ces nouvelles théories] est qu'alors même qu'[elles] donnent un poids
important aux mécanismes de marché, elles en indiquent nettement les limites. Ainsi il y a souvent nécessité
de créer des arrangements en dehors du marché concurrentiel, ce qui peut impliquer une intervention active de
l'Etat dans la sphère économique » 13. En particulier ce « retour de l'État » 14 se traduit par le fait qu'il est
investi d'un triple rôle : encourager les innovations en créant un cadre apte à coordonner les externalités qui
découlent de toute innovation (par exemple grâce à la protection qu'offre aux innovateurs les brevets) ; susciter
celles-ci en investissant dans la recherche (notamment fondamentale) et les infrastructures dont les externalités
dépassent le profit que peuvent en attendre les acteurs privés ; améliorer le capital humain en investissant dans
le système éducatif. D'une manière générale, c'est le rôle des politiques structurales de l'État, en particulier les
investissements dans le capital public, qui est ainsi souligné.
Remise en cause [modifier]
La croissance peut-elle être infinie ? [modifier]
Les tenants de la décroissance considèrent la croissance infinie comme une impossibilité physique et
expriment a minima de sévères réserves sur la possibilité de poursuivre le modèle actuel de croissance, en
raison de la nature finie de certaines ressources naturelles. Rien n'indique selon eux que l'on puisse y substituer
d'autres ressources, ni que les ressources renouvelables puissent rendre les mêmes services. De même, ils
soulignent les éventuelles dégradations de l'environnement qui pourraient remettre en cause la croissance
future. Pour les critiques de la croissance, la promesse de « développement économique pour tous » n'est donc
qu'une promesse qui ne repose sur rien de tangible. Néanmoins, en premier lieu il s'agit d'une conception
matérialiste de la croissance qui occulte le fait que la croissance ne concerne pas que des biens physiques mais
aussi des services qui sont immatériels. En second lieu toutes les prédictions de bornes absolues au
développement depuis Malthus se sont révélées fausses, en raison de la capacité de l'homme à trouver de
nouveaux usages aux ressources : le travail humain a été remplacée par le travail animal, puis mécanique, avec
le développement progressif d'énergies nouvelles : bois, charbon, électricité, pétrole.
Une partie de la croissance économique est permise par l'exploitation des ressources naturelles : il convient
donc de les gérer au mieux (par exemple par le recyclage), d'optimiser le potentiel d'extractions et de
ressources. L'efficacité du système capitaliste est alors parfois remise en cause. Néanmoins, Karl Marx
soulignait déjà dans Le Capital « l’acharnement fanatique des capitalistes à économiser les moyens de
production », faisant tout pour que « rien ne se perde ni ne soit gaspillé »16. Les économistes libéraux
soutiennent que le libre marché permet la meilleure affectation des ressources et leur gestion la plus efficace.
Pour l'économiste Pascal Salin, des problèmes d'efficacité et de gestion liés à l'exploitation des ressources
pourraient être résolus par la privatisation de ces ressources. En effet, un propriétaire, responsable d'une
ressource naturelle, va l'évaluer et la gérer de façon à maximiser sa richesse et va donc l'entretenir. Pascal
Salin prend comme exemple le problème de déforestation des forêts amazoniennes et écrit que « si des
entreprises privées, véritablement capitalistes, pouvaient se porter acquéreurs de droits de propriété intégraux
sur les forêts tropicales [...] elles seraient incitées à développer les plantations car la valeur de leurs terrains
dépendrait de la valeur des arbres susceptibles d'y être coupés dans le futur »17. Pascal Salin insiste également
sur le progrès technique et sur les « capacités d'inventivité de l'esprit humain ».
Contestant la vision optimiste d'un progrès technique capable de répondre aux problèmes et questions qu'il a
lui-même engendrés, des penseurs et économistes voient une autre logique à l'œuvre dans l'idéal de croissance,
qui obère la saine gestion des ressources de la planète. Ainsi pour Jacques Ellul, contempteur moderne de ce
qu'il a appelé le système technicien, pour une entreprise capitaliste, seul compte le profit indépendamment des
effets positifs ou négatifs de son activité18.
La croissance mondiale depuis la fin du XVIIIe siècle a été permise principalement par le charbon puis le
pétrole[réf. nécessaire], qui sont des ressources naturelles non renouvelables. D’autres sources d’énergie sont venus
compléter les besoins croissants en énergie comme l'énergie nucléaire qui elle aussi repose sur une ressource,
abondante selon l'AIEA19, mais non renouvelable, l'uranium.
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