Dictée du 14 octobre 2013

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Dictée du 14 octobre 2013.
Texte de Fr RABELAIS,(vers 1483- 1535) extrait de « GARGANTUA » (1535), sous
le pseudonyme de Alcofribas –[ anagramme de F Rabelais.]
Ce texte nous permet de revoir l’accord du comp de nom dans un nom composé : de la
confiture de coings, un kilo de raisin, de la compote de pomme. Cf règle en annexe.
Il nous permet aussi de revoir la vie et l’œuvre de cet auteur « inventeur d’une langue à
la fois populaire, contestataire et philosophique » souvent confrontée à la censure des
théologiens, représentatif du courant humaniste du XVI° S. L’éducation de Gargantua
vise à faire « une tête bien pleine sur un corps sain ». C’est le rôle de son précepteur qui
doit faire de Gargantua un jeune homme « éduqué » - lui, qui, jusque là était plutôt
négligé
« … c’est vanité que se lever avant la lumière » : ses anciens précepteurs l’avaient rendu
si sot, niais et ignorant : « Il se levait, fientait, pissait, se raclait la gorge, rotait, pétait,
bâillait, crachait, toussait, sanglotait, éternuait, se mouchait en archidiacre et, pour
abattre la rosée et le mauvais, il déjeunait de belles tripes, de belles grillades, de beaux
jambons, de belles pièces de chevreau et force tartines matutinales. »
Ponocrates (le nouveau précepteur) lui faisant remarquer qu’il n’aurait pas dû s’empiffrer
si brusquement au saut du lit, sans avoir fait quelque exercice au préalable, Gargantua
répondit :<<Quoi !! N’ai-je pas fait suffisamment d’exercice ? Je me suis vautré six ou
sept tours à travers le lit avant de me lever. N’est-ce pas assez ?>>
Ponocrates a donc la charge d’éduquer Gargantua, fils de Grangousier et de Gargamelle,
doté d’une grande intelligence et d’une précocité rare : »A boire ! à boire ! à boire ! »
s’écrie-t-il à peine sorti de l’oreille de sa mère….
Au XVI° , la langue utilisée est appelée, en linguistique, le moyen français .
On ne parle pas cette langue, on l’écrit, elle est réservée à une élite et le roi François
1er décide, par l’ordonnance de Villers-Cotterêts (1539) que tous les actes officiels
doivent être rédigés en français. La chasse aux patois commence, elle ne sera terminée
qu’avec les lois de Jules Ferry sur l’école obligatoire en 1881… et nous connaissons
encore des langues régionales. Il ne faut pas confondre un langage négligé avec un
dialecte ou un patois : ceux-ci ont une grammaire et un vocabulaire précis avec une
littérature régionale.
Pour exemple, voici une copie du texte du XVI° et, en face, la traduction d’aujourd’hui :
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Le texte de la dictée apparaît en partie puisque c’est cet extrait (avec des coupures).
Voyez que la langue du siècle de François Premier n’est pas encore la nôtre….
Remarquez aussi la conjugaison de l’imparfait en –oit et non –ait.
Et vous dîtes que l’orthographe est compliquée…
L’ Ordonnance de Villers-Cotterêts
2
Copie du préambule et des articles toujours appliqués de l'ordonnance de Villers-Cotterêts.
L'ordonnance de Villers-Cotterêts est un texte législatif édicté par le roi de France
François Ier, entre le 10 et le 25 août 1539note 2 (vingt-cinquième année de son règne) à
Villers-Cotterêts (dans le département actuel de l'Aisne), enregistré au Parlement de
Paris le 6 septembre 1539. Il pourrait s'agir du plus ancien texte encore directement en
vigueur en France.
Forte de cent quatre-vingt-douze articles, elle réforme la juridiction ecclésiastique,
réduit certaines prérogatives des villes et rend obligatoire la tenue des registres des
baptêmes. Elle est surtout connue pour être l'acte fondateur de la primauté et de
l'exclusivité du français dans les documents relatifs à la vie publique du royaume de
France ; en effet, pour faciliter la bonne compréhension des actes de l'administration
et de la justice, elle leur impose d'être rédigés dans cette langue. Le français devient
ainsi la langue officielle du droit et de l'administration, en lieu et place du latin.
Cette ordonnance, intitulée exactement « Ordonnan du Roy sur le faid de justice » a été rédigée par
le chancelier Guillaume Poyet, avocat et membre du Conseil privé du roi. Elle s'est longtemps
appelée Guillemine ou Guilelmine en référence à son auteur. Hors des Archives nationales, il
n'existe que deux exemplaires originaux sur parchemin : l'un aux Archives
départementales des Bouches-du-Rhône à Aix-en-Provence, l'autre aux Archives
départementales de l'Isère.
GARGANTUA :
Gargantua, fils de Grandgousier et de Gargamelle, naît dans de « bien estranges »
conditions.
Il a été porté pendant onze mois par sa mère Gargamelle. Il naît de l'oreille de sa
génitrice, lors d’une partie de campagne organisée par Grandgousier où elle a beaucoup
mangé, ri , plaisanté et dansé.
La taille extraordinaire de Gargantua permet à Rabelais de décrire de nombreuses
situations bouffonnes.
Immédiatement le nouveau-né est mort de soif et réclame « à boyre ». Surpris et
amusé par une telle soif , Grandgousier, son père , s’exclame : « Que grand (gosier) tu
as » , ce qui vaudra à l’enfant d’être appelé Gargantua.
Entre trois et cinq ans , Gargantua est élevé assez librement. Il bénéficie ensuite d’une
éducation délivrée par des pédagogues traditionnels . Puis il se rend à Paris pour
recevoir l’enseignement de Ponocrates. En chemin, l’énorme jument qu’il monte, chasse
les taons de sa queue avec une telle puissance, qu’elle détruit toute la forêt de Beauce.
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Arrivé à Paris, Gargantua s’amuse à dérober les cloches de Notre Dame pour les
accrocher au cou de sa jument.
Le royaume de Grandgousier est envahi par Picrochole. Grandgousier ne parvenant pas à
ramener Picrochole à la raison, il appelle son fils Gargantua à la rescousse. Ce dernier
prend la tête des combats. Il est aidé par Frère Jean des Entommeures, dont le courage
est exemplaire. Le fils de Grandgousier est victorieux et Picrochole doit s’enfuir.
Gargantua fait un discours de morale politique. Il indique également que le royaume du
vaincu reviendra à son fils dont l’éducation sera confiée à Ponocrates.
La victoire est célébrée à l’Abbaye de Thélème dont la devise est « Fay ce que
vouldras » , un adage prônant le libre arbitre entre le vice et la vertu.
Texte de la dictée :
« Une journée bien remplie »…
(…) Quand Ponocrates eut pris (indicatif. Passé antérieur) connaissance du vicieux mode
de vie de Gargantua, il décida de lui inculquer les belles-lettres d’une autre manière,
mais pour les premiers jours, il ferma les yeux, considérant que la nature ne subit pas
sans grande violence (sing préférable. + général) des mutations soudaines. (…)
Ensuite, il le soumit à un rythme de travail tel (acc avec rythme) qu’il ne perdait pas
une heure de la journée, mais consacrait au contraire tout son temps aux lettres ou aux
études libérales. Gargantua s’éveillait donc vers quatre heures du matin. Tandis qu’on le
frictionnait, on lui lisait quelque(s) page(s) des Saintes Écritures, à voix haute et claire,
avec la prononciation requise. (…)
Puis il allait aux lieux secrets excréter le produit des digestions naturelles. Là, son
précepteur répétait ce qu’on avait lu (cod avant = ce) et lui expliquait les passages les
plus obscurs et les plus difficiles. En revenant, ils considéraient l’état du ciel, regardant
s’il était comme ils l’avaient remarqué la veille au soir, et en quels signes entrait* le
soleil et aussi la lune ce jour-là. (…) * : [on pourrait écrire « entraient, puisqu’on a le soleil et aussi
la lune. Le texte choisit le sing à cause de la construction de la phrase – « et aussi la lune » est elliptique du
verbe]
Ensuite, pendant trois bonnes heures, on lui faisait la lecture. Cela fait, ils sortaient,
(…) jouaient à la balle, à la paume (…), s’exerçant élégamment les corps comme ils
s’étaient auparavant exercé (cod âmes placé après) les âmes. (…) (il s’agit de Gargantua
et son maître)
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Cependant, Monsieur l’Appétit venait et c’était juste au bon moment qu’ils s’asseyaient
à table.
Au début du repas, on (on= pronom indéfini, masc sing, Tout autre emploi est familier)
lisait quelque(s) plaisante(s) histoire(s) des gestes anciennes, jusqu’à ce qu’il eût pris
subj ; on dirait "qu’il ait pris…") son vin. Alors, si on le jugeait bon, on poursuivait la
lecture, ou ils commençaient à deviser ensemble, joyeusement, parlant pendant les
premiers mois des vertus et propriétés, de l’efficacité de la nature de tout ce qui leur
était servi à table : du pain, du vin, de l’eau, du sel, des viandes, des poissons, des fruits,
des herbes, des racines et de leur préparation. Ce faisant, Gargantua apprit en peu de
temps tous les passages relatifs à ce sujet dans Pline, (…) Aristote, Elien et d’autres.
Sur de tels propos, ils faisaient souvent, pour plus de sûreté, apporter à table les livres
cités plus haut. Gargantua retint si bien et si intégralement les propos tenus, qu’il n’y
avait pas alors un seul médecin qui sût (subj. Qui sache) la moitié de ce qu’il avait
retenu (cod = que=ce=sing).
Après, ils parlaient des leçons lues dans la matinée et, terminant le repas par quelque
confiture ( un peu de..) de coings [voir règle] il se curait les dents avec un brin de
lentisque, se lavait les mains et les yeux de belle eau fraîche, et tous rendaient grâce à
Dieu par quelque(s) beau(x) cantique(s) à la louange de la munificence et de la bonté
divines. ( il = Gargantua seul ou ils = G et son maître : les deux sont possibles ; de même, on peu écrire
quelque beau cantique si on n’en chante qu’un – ce qui respecte la phrase)
Gargantua.( Extrait. Chap 23) .(1535)
François RABELAIS. Translation de Guy Demerson (1996)
•
Quelque : devant un nom, il est adj indéfini
VARIABLE.
Devant un nom (ou un gr nominal) pluriel, il signifie plusieurs et
s’écrit au pluriel
Devant un nom (ou un gr nominal) singulier, il signifie « un peu
de », quelconque, un certain et s’écrit au singulier.
Souvent, les deux peuvent s’employer, MAIS il faut être cohérent ds la phrase
et respecter son sens : on peut perdre quelque pièce, ou quelques pièces. On ne
peut pas perdre « quelques argents », on écrira donc obligatoirement quelque
argent.
Une fiche avait été envoyée qui récapitulait « TOUT » et « QUELQUE » à la
dictée précédente.
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L’ACCORD des Noms COMPOSÉS :
Avec jus, confiture, compote, marmelade…..(texte)
-Quand on voit des morceaux
on écrit au pluriel
Ex : des confitures de prunes, une marmelade de pommes
-Quand on ne voit plus les morceaux
on écrit au singulier
Ex : des pâtes de coing, du jus de pomme
-Quand on emploie plusieurs fruits et légumes
pluriel
Ex :du potage de légumes, du jus de fruits MAIS de la soupe
de potiron.
Toujours être attentif au sens.
Avec un complément = matière : le même conseil prévaut.
-
Un banc de pierre (matière) mais un tas de pierres.
-
Un kilo de pêches (plusieurs fruits) mais un kg de raisin (on dit du raisin)
Règle générale : toujours regarder comme est formé le mot.
•
Un nom composé peut s’écrire en un seul mot (comme gendarme issu de gens
d’armes) ; il forme alors son pluriel comme les noms ordinaires, sauf quelques
exceptions.
•
Le nom composé peut également être divisé en plusieurs mots ; le trait d’union
sépare alors généralement les mots (mais pas toujours : compte rendu, faux sens,
pomme de terre, etc.).
Comment former le pluriel des noms composés non soudés ?
Seuls le nom et l’adjectif peuvent prendre la marque du pluriel selon le sens ou l’usage.
Les autres éléments demeurent invariables (verbe, adverbe, préposition).
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Le verbe reste invariable. Le nom prend le pluriel selon le
sens :
• des chasse-neige
VERBE + NOM
• des porte-monnaie
• des tire-bouchons
• des couvre-pieds
• et : un porte-avions, un sèche-cheveux
En général, les deux noms prennent la marque du pluriel :
• des choux-fleurs
NOM + NOM
• des sourds-muets
• mais des timbres-poste (= de la poste), des stations-service
(= pour le service) et des pauses-café (= pour prendre un
café)
D’une manière générale, les deux éléments prennent le
pluriel :
• des coffres-forts
NOM + ADJECTIF ou
• des grands-mères
ADJECTIF + NOM
• des beaux-frères
• des plates-bandes
• mais quand le premier élément se termine par -o, il est
invariable : des Anglo-Saxons, des micro-ondes.
L’adverbe est invariable :
ADVERBE + NOM
• des en-têtes
• des arrière-boutiques
D’autres exemples :
AUTRES NOMS
• VERBE + VERBE : des savoir-vivre, des va-et-vient et des
COMPOSÉS
laissez-passer (invariabilité)
• PROPOSITION : des pince-sans-rire (invariable)
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L’AUTEUR : FRANÇOIS RABELAIS (vers 1483-1535)
Les écrivains moralistes les plus remarquables du XVe siècle furent Rabelais,
Amyot, Montaigne et Calvin.
Vie de Rabelais
Rabelais naquit en Touraine, dans la petite ville de Chinon, vers 1483. Son père
était aubergiste, et possédait une petite fortune ; les propos et les exemples du
cabaret influèrent d’une manière fâcheuse sur l’esprit et le caractère de
l’enfant. Quoiqu’il n’eût aucun goût pour l’état ecclésiastique, il fut destiné à la
prêtrise. Son éducation terminée, il entra dans un couvent de Cordeliers ; c’est là
qu’il commença des études sérieuses ; il laissa aux autres moines le souci des
pratiques religieuses, pour se donner tout entier à la science ; seul dans son
étroite cellule, sans autre secours que les livres de son couvent, il parvint à
amasser un savoir prodigieux ; il se perfectionna surtout dans la langue grecque
et approfondit toute la littérature ancienne. Son ardeur au travail contrastait
avec la paresse de ses compagnons de cloîtres, qui étaient l’objet de ses
railleries et de son profond mépris. Il alla un jour jusqu’à s’affubler d’un costume
de saint François et se mit dans l’église à la place de la statue du saint, pour
faire croire au miracle les bonnes gens qui viendraient s’agenouiller devant lui.
Cette impiété lui coûta cher, car on le fit descendre de sa niche, on le fouetta
jusqu’au sang et il fut mis au pain et à l’eau dans les prisons du monastère pour le
reste de ses jours. Il en sortit, grâce à l’intervention de quelques amis ; de là, il
entra dans l’ordre de saint Benoît. Bientôt il s’évada, et devint secrétaire d’un
évêque qui avait été son compagnon d’études.
C’est alors qu’il fut mis en rapport avec plusieurs hommes distingués : Clément
Marot (écrivain et poète), Calvin (un des fondateurs, avec Luther, de la religion protestante)
et le savant Budé. Mais ces relations ayant failli lui attirer les rigueurs du clergé,
Rabelais jugea prudent de fuir le danger, et à l’âge de quarante-deux ans, il alla à
Montpellier pour y étudier la médecine.
Il ne tarda pas à être reçu docteur et à se faire une telle réputation de savoir et
d’esprit qu’il fut choisi par la Faculté de Montpellier pour venir réclamer à Paris,
auprès du chancelier Duprat, le rétablissement de certains privilèges
universitaires. N’ayant pas été reçu. Rabelais imagina de s’affubler un matin d’un
costume grotesque et se mit à se promener magistralement sous les fenêtres du
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chancelier. Il se présenta au portier, à qui il parla latin. Le portier, fort en peine,
fit appeler le secrétaire du chancelier ; Rabelais lui parla grec ; il continua ainsi,
répondant successivement aux messagers en espagnol, en italien, en allemand, en
anglais, en hébreu, tant qu’enfin le chancelier donna ordre d’introduire cet
étrange personnage qui fit alors sa requête en bon français, et obtint le
rétablissement des privilèges universitaires.
Pendant ce séjour à Paris, entre1528 et 1530, tout porte à croire qu’il devint
prêtre séculier et eut deux enfants d’une liaison avec une veuve parisienne.
À peine reçu docteur. Rabelais alla s’établir à Lyon, (1532) pour y exercer la
médecine. C’est là qu’il publia l’Histoire du grand Gargantua. Quoique ce livre ne
fut qu’une ébauche de celui qu’il publia plus tard, il en fut plus vendu en deux
mois, dit-il, que de Bibles en neuf ans. Encouragé par ce succès, il publia l’année
suivante, Pantagruel.
Ce livre eut une telle vogue, qu’on en fit trois éditions en un an.
Le cardinal Du Bellay, évêque de Paris, vit Rabelais à Lyon et lui offrit de
l’emmener avec lui à Rome, où il allait comme ambassadeur. Rabelais accepta et
partit en qualité de médecin et de secrétaire du cardinal. Là, il se permit, dit-on,
devant le Saint-Père, une parole très irrévérencieuse ; effrayé aussitôt d’avoir
parlé si légèrement, il sort, saute sur un cheval et le lance au galop, malgré un
orage terrible qui venait d’éclater avec des torrents de pluie ; comme on lui criait
de s’arrêter : « J’aime mieux être mouillé que brûlé », répondit-il. On parvint
néanmoins à le rassurer et il fut ramené à Rome où Clément VII lui pardonna.
Après six mois de séjour, Rabelais fut rappelé en France pour porter au roi
quelque communication secrète de l’ambassade. En passant par Lyon, il fut forcé
de s’arrêter dans une hôtellerie, faute d’argent pour continuer sa route. Pendant
un quart d’heure, il fut fort embarrassé ; cet embarras est passé en proverbe
sous le nom de quart d’heure de Rabelais ; tout à coup il imagine le plus imprudent
stratagème ; il fait écrire par un enfant des étiquettes portant ces mots : Poison
pour faire mourir le roi… Poison pour faire mourir la reine, et il les attache à de
petits sachets remplis d’une poudre inoffensive ; bientôt les magistrats en sont
informés ; on se saisit du prétendu empoisonneur, on l’enferme dans une litière,
et on l’emmène sous bonne escorte à Paris, sans qu’il lui on coûtât rien. Il arrive
ainsi devant François Ier, raconte sa ruse, en donne la preuve en avalant le
prétendu poison ; le roi rit beaucoup de l’aventure. Toute sa vie, son goût de la
satire le met en danger, malgré ses nombreux soutiens, la sœur de François 1er,
Marguerite de Valois.
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Sous Henri II, il se fit nommer curé de Meudon, au grand scandale des dévots. Il
mourut deux ans après en 1555, à l’âge de soixante-dix ans. Ses derniers
moments ont été racontés de différentes manières. (Suivant les uns, il aurait eu une
mort édifiante ; suivant d’autres, au contraire, il serait mort en impie. Avant de rendre l’âme, il
recueillit ses forces pour s’écrier avec un éclat de rire : « Tirez le rideau, la farce est jouée. »)
Le chef-d’œuvre de Rabelais est le roman intitulé Gargantua. Sous des
apparences folles et bouffonnes, ce roman cache un but profond, que Rabelais
nous invite à découvrir dans la préface même de l’ouvrage.. Prenez exemple sur le
chien. En ouvrant un livre, qui en apparence est grossier, cherchez-y la substance
et la doctrine, la substantifique moëlle. »
Ce livre est en effet la satire mordante du moyen âge. Rabelais a passé en revue
la société tout entière : la royauté, la magistrature, le clergé, les cloitres, la
juridiction des baillis, celle des sénéchaux, du haut parlement, tout cela vient
figurer dans son poème, et lorsqu’il entreprend avec Panurge cette longue
odyssée, ce voyage à travers des terres inconnues, le pays qu’il découvre est une
terre allégorique et satirique, qui représente quelque canton de la société
contemporaine : voilà le sens véritable, le sens profond de l’œuvre. Les géants du
poème représentent les rois et les seigneurs de l’époque, qui, semblables à
Gargantua, épuisent à eux seuls tous les revenus de leurs provinces.
Ce n’est pas sans raison que Rabelais employa l’allégorie : cette forme lui
permettait de dire la vérité sans encourir le danger d’être brûlé vif. Néanmoins,
malgré toutes ces précautions, les allusions furent parfois si transparentes qu’il
jugea prudent de fuir. Son livre fut condamné par le Parlement et mis à l’index
par le Vatican.
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