Emploi des accédants aux soins pour addiction La personne souffrant d’addiction à une substance psychoactive est souvent perçue par la plus grande majorité des gens comme un délinquant, une personne sans emploi, en marge de la société. Ce cliché ne reflète pas la réalité des personnes dépendantes à une substance psychoactive. En effet, bon nombre de ces personnes sont bien insérées socialement, travaillent, paient des impôts… Ce travail a pour but d’étudier la population souffrant d’addiction à une substance psychoactive qui a recours à un traitement pour ce problème et qui travaille. Et en particulier de préciser les facteurs prédictifs du maintien dans l’emploi des ces patients addicts en soins. La connaissance de ces facteurs me permettra d’élaborer des pistes en vue d’améliorer la prise en charge de ces patients, entre autre du point de vue du médecin du travail. Dans un premier temps je rappellerai les définitions de l’addiction, son état des lieux en France ainsi que la politique de santé publique actuelle. Définition L’addictologie est une discipline assez récente qui permet sous un seul terme de regrouper l’ensemble des conduites addictives. Addiction L’addiction, ou les pratiques addictives, regroupent l’ensemble des conduites addictives, des conduites de consommation (y compris l’usage). L’addiction n’est pas définie par le produit mais par l’usage que le sujet en fait. Pour preuve, il existe des addictions sans produits, par exemple l’addiction au jeu, ou au travail. La classification internationale des maladies (CIM-10) distingue l’usage, l’abus (ou usage nocif) et la dépendance (physique ou psychique) Usage L’usage est la consommation du produit occasionnelle ou régulière. Il peut comporter ou non des risques pour la santé. Usage nocif L’usage nocif ou abus est un mode de consommation d’une substance psychoactive préjudiciable pour la santé. Les complications peuvent être physiques ou psychiques. Le diagnostic repose sur des preuves manifestes que l’usage d’une ou plusieurs substances a entraîné des troubles physiques ou psychiques. Ce mode de consommation donne souvent lieu à des critiques et a souvent des conséquences sociales négatives. On ne fait pas ce diagnostic quand le sujet présente un syndrome de dépendance Dépendance La dépendance est l’ensemble des phénomènes comportementaux, cognitifs et physiologiques survenant à la suite d’une consommation répétée de substance psychoactive. Elle est typiquement associée à un désir puissant de prendre la substance, à une difficulté à contrôler la consommation, à une poursuite de la consommation malgré des conséquences nocives, à un désinvestissement progressif, à une tolérance accrue et parfois à un syndrome de sevrage. Critères de la dépendance selon la CIM-10 : La CIM-10 présente la dépendance comme la manifestation d’au moins trois des signes ciaprès sur une période d’un an et ayant persisté au moins un mois ou étant survenus de manière répétée : 1- un désir compulsif de consommer le produit. 2- Des difficultés à contrôler la consommation. 3- L’apparition d’un syndrome de sevrage en cas d’arrêt ou de diminution des doses ou une prise du produit pour éviter un syndrome de sevrage. 4- Une tolérance aux effets (augmentation des doses pour obtenir un effet similaire). 5- Un désintérêt global pour tout ce qui ne concerne pas le produit ou sa recherche. 6- Une poursuite de la consommation malgré la conscience des problèmes qu’elle engendre. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) la dépendance se définit comme un état psychique et parfois physique résultant de l’interaction entre un organisme vivant et une substance psychoactive caractérisé par des réactions comportementales qui comportent toujours une compulsion à prendre la substance de façon continue ou périodique de façon à ressentir ses effets psychiques et parfois éviter le syndrome de sevrage. Le syndrome de sevrage physique est l’apparition d’un syndrome clinique spécifique par l’arrêt brutal d’une substance psychoactive, prise de façon continue et prolongée. Dans le cas des opiacés, il se manifeste en douze à vingt-quatre heures après la dernière prise, avec une anxiété, une insomnie, des douleurs dorso-lombaires et abdominales, des crampes nocturnes… L’addiction à un produit est caractérisée par une évolution chronique et par des rechutes. Facteurs de risque des addictions Pour évaluer l’addiction à une substance, il faut prendre en compte les interactions entre un produit, un individu et son environnement. Facteurs individuels de vulnérabilité : - facteurs neurobiologiques et génétiques, - troubles de la personnalité ou du comportement, - éléments de vie, tels que deuil, maltraitance… - comorbidités psychiatriques, Facteurs liés à l’environnement : - le fonctionnement intrafamilial, une histoire familiale de dépendance, - les amis, - l’environnement, la perte de repères sociaux (chômage, précarité…) est un facteur de risque majeur. Facteurs de risque liés aux produits : - le risque de dépendance, les substances les plus addictives étant le tabac, l’héroïne et la cocaïne, - le risque de complications somatiques, psychologiques et sociales, - le statut social du produit, licite ou illicite. Facteurs liés aux modalités de consommation : - la précocité des consommations, plus la consommation d’une substance psychoactive démarre tôt dans la vie plus le risque d’apparition d’abus ou de dépendance est important, - les polyconsommations, qui sont un facteur d’aggravation du risque d’intoxication pour toutes les substances psychoactives, - la consommation autothérapeutique, à visée anxiolytique, antidépressive, sédative, qui peut être révélatrice d’un trouble psychologique sous-jacent, - l’usage solitaire, - la recherche d’excès, de défonce, - la répétition des consommations, le besoin de consommer quotidiennement sont des indicateurs de gravité. Etat des lieux des addictions en France Substances psychoactives et leur consommation : tabac, alcool, cannabis, héroïne, cocaïne, polyconsommation. Estimation du nombre d’usagers, des caractéristiques socio-demographiques des consommateurs des différentes substances L’alcool et le tabac sont les substances psychoactives les plus consommées en France. Les différentes substances psychoactives peuvent être classées selon différents critères, leur mode d’action, leur effet principal sur l’utilisateur, ou par exemple le fait qu’elles soient ou non licites : - Substances licites : tabac, alcool, médicaments psychotropes… - Substances illicites : héroïne et opiacés, cocaïne et crack, cannabis, amphétamines, ecstasy… Elles peuvent être classées selon leur effet principal sur le système nerveux central : - Substances sédatives : opioïdes, anxiolytiques, alcool… - Substances stimulantes, excitatrices : cocaïne, crack, amphétamines, nicotine, caféine… - Substances perturbatrices, hallucinogènes : LSD, ecstasy, cannabis… Dispositif de soins en France : pôle médicosocial, pôle ville, pôle hôpital Le dispositif de soins en addictologie a évolué récemment en France grâce aux deux plans gouvernementaux mis en place par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) de 1999 et 2004, avec la création d’un réseau de soins. Le réseau de soins doit répondre à plusieurs besoins et demandes : un repérage et une prise en charge les plus précoces possibles, une prise en charge globale, une réponse adaptée au niveau de gravité de l’addiction, une continuité des soins aux différentes phases de cette pathologie chronique. Le réseau de soins en addictologie est composé de trois pôles : - un pôle ville, - un pôle médicosocial spécialisé, - un pôle hospitalier. Le pôle médicosocial Ce pôle comprend les dispositifs d’accueil et de prise en charge des problèmes sanitaires et sociaux liés à l’usage de substances illicites, et des structures de lutte contre l’alcoolisme et le tabagisme. Le pôle médicosocial spécialisé est constitué des centres de soins de prévention et d’accompagnement en addictologie (CSAPA), regroupant les Centres de cure ambulatoire en alcoologie (CCAA) et les Centres spécialisés de soins en toxicomanies (CSST), et les dispositifs de réduction des risques. On distingue trois types de centres spécialisés de soins en toxicomanies (CSST) : - les centres de soins en ambulatoires (216 en 2006) - les centres de soins avec hébergement collectif (40 en 2006) - les centres de soins en milieu pénitentiaire (16 en 2006) En 2005, les CSST ont accueillis environ 540 personnes par structure soit 90000 patients, dont environ 50% de primo-consultants. (source OFDT, prévalence usage problématique de drogue) Le pôle ville Le médecin généraliste occupe une place centrale dans le traitement des addictions dans le pôle ville. Son rôle est d’exercer une médecine de premier recours et de proximité. Il a une approche globale de la santé de l’individu, au sein d’un réseau d’autres intervenants du domaine de la santé. Son activité se place dans les domaines des soins, du dépistage et de la prévention. Il est en première ligne pour le repérage du début de consommation de drogues illicites. Il occupe une place centrale dans la prescription des traitements de substitution aux opiacés et aussi dans le suivi à long terme des patients dépendants. Le pôle hôpital Le pôle hôpital organise une réponse hospitalière suffisante et cohérente en addictologie. Il comprend les équipes hospitalières de liaison et de soins en addictologie, les unités de soins addictologiques spécialisées et hôpital de jour, les services d’addictologie universitaire. Réseau ville-hôpital La définition des réseaux de santé est la suivante : ils ont pour objet de favoriser l’accès aux soins, la coordination, la continuité et l’interdisciplinarité des prises en charge sanitaires. Ils assurent une prise en charge adaptée aux personnes sur les plans de l’éducation à la santé, de la prévention, du diagnostic et des soins. L’intérêt des réseaux en addictologie vient du fait que les problèmes cliniques sont complexes, souvent intriqués avec des pathologies somatiques, l’évolution est chronique, le repérage est difficile et le nomadisme médicale fréquent. L’organisation des réseaux en addictologie doit prendre en compte la durée dans le suivi d’une personne dépendante, l’importance de la continuité des soins entre les différents acteurs de la prise en charge hospitaliers et extrahospitaliers, la dimension psychopathologique de l’addiction, les problèmes d’exclusion, de précarités. Lieux de soins Principes de traitement, comprenant l’axe médical, l’axe psychologique et l’axe socioéducatif) ; en détaillant en particulier le traitement de substitution aux opiacés Origines de la prise en charge (patient, famille, médecin généraliste, justice…) Conduites addictives et travail Emploi et addiction : estimation de la prévalence de l’usage de substances psychoactives chez les travailleurs ; risques de l’usage de substances psychoactives dans le cadre du travail Emploi à l’entrée en traitement : l’emploi des accédants aux soins pour addiction à l’admission en traitement est inférieur à l’emploi de la population générale du même âge (enquête RECAP) ; description de la situation socio économique des accédants aux soins (selon les produits utilisés, selon les structures de soins) Emploi après traitement : quelques soient les études, les traitements et les produits consommés, on retrouve toujours une amélioration de l’emploi après le traitement pour addiction. Description des facteurs améliorant l’emploi après traitement, et des obstacles à l’obtention d’un emploi Rôle de l’emploi dans le traitement : l’emploi est souvent considéré comme un critère de réussite d’un traitement des addictions. Mais il peut aussi faire partie intégrante du traitement.. Revues de litérature d’étude sur la réhabilitation professionnelle en cours de traitement et de la thérapie par le travail (therapeutic workplace) Cas particuliers de deux populations qui présentent des éléments particuliers quand aux caractéristiques de leur addiction et aussi de leur difficultés d’accès à l’emploi les femmeset les personnes présentant des troubles co-occurents. Loin de l’image classique du toxicomane vivant à l’écart de la société, un certain nombre d’accédants aux soins pour addiction travaillent. Leur emploi peut être considéré comme une protection contre la précarité parfois engendrée par les addictions et un facteur prédisposant aux résultats positifs du traitement de leur addiction. Mais l’emploi, en plus d’être un facteur prédisposant à la réussite du traitement et un critère de réussite du traitement, peut faire partie intégrante du traitement des addictions. La réhabilitation professionnelle associée à un traitement classique ou la thérapie par le travail montre une efficacité en termes d’abstinence après traitement et de resocialisation. Tous les moyens qui peuvent être mis en œuvre au cours d’un traitement d’addiction, pour conserver ou obtenir un emploi, sont bénéfiques pour le succès du traitement.