Cancer de l’endomètre et du col utérin - Dr Catherine GENESTIE I) Cancer de l’endomètre : Le cancer de l’endomètre est le cancer gynécologique le plus fréquent et la septième cause de mortalité par cancer en Europe de l’Ouest. Le plus souvent, il est révélé à un stade précoce, par la survenue de métrorragie, expliquant la bonne survie globale des patientes avec une survie à cinq ans, tous stades confondus, de 83%. L’âge moyen est de 68 ans. Le diagnostic est confirmé par une biopsie de l’endomètre, permettant de préciser le type histologique et le grade. Le cancer de l’endomètre est divisé en deux grands groupes ; le cancer de type I et de type II, ayant chacun une spécificité histologique et moléculaire. Le cancer de type I est le plus fréquent, représentant 80% des cancers de l’endomètre. Il est hormono-dépendant, survennant sur un terrain d’hyper-oestrogénie chez la femme périménopausée de 55 ans en moyenne. A l’histologie, il correspond à un adénocarcinome de type endométrioïde, développé au sein d’une hyperplasie glandulaire complexe avec atypies, lésion précancéreuse survenant lors d’une hyperoestrogénie prolongée. L’hyperplasie glandulaire endométriale est un spectre lésionnel correspondant à des aspects variables. Elle comporte soit une architecture simple ou soit une architecture complexe, à laquelle va s’associer ou non des atypies cytonucléaires. Les hyperplasies glandulaires simples avec atypies sont exceptionnelles, la majorité des hyperplasies glandulaires avec atypies ont une architecture complexe. Seul les atypies cytonucléaires confèrent à l’hyperplasie sont potentiel évolutif, se transformant en adénocarcinome endométrial dans 23 % des cas. L’architecture d’un adénocarcinome endométrioïde est le plus souvent tubulo-glandulaire ou parfois en nappes confluentes. Les cellules tumorales sont cylindriques, stratifiées et présentent des atypies cytonucléaires variées. Les altérations moléculaires des cancers de type I sont distinctes. L’instabilité des microsatellites et la perte d’expression des gènes de réparation de l’ADN (hMLH1, hMSH2, hMSH6 ou PMS2) sont observées dans les carcinomes endométriaux de type I associés au syndrome de Lynch, mais également dans 25 à 30% des carcinomes de type I sporadiques. L’activation de la voie de signalisation PI3K-AKT est fréquente dans les carcinomes de type I via des mutations de PTEN et/ou PIK3CA. L’inactivation du gène PTEN est un événement précoce, observée dès le stade précurseur d’hyperplasie glandulaire atypique. Les mutations des exons 9 et 20 de PIK3CA sont détectées dans 24 à 39% des cancers de l’endomètre, à un stade tardif, intervenant plutôt dans la phase d’invasion du processus carcinomateux. Une fréquence accrue de mutation de CTNNB1 dans les cancers de l’endomètre de type I (14% à 44%) est observé au stade d’hyperplasie atypique et non au stade de cancer. Le cancer endométrial de type II, est non-hormonodépendant, moins fréquent et représente environ 20 % des cancers endométriaux. Il apparait plus tardivement chez des femmes âgées de plus de 65 ans en période de post ménopause. Il se développe le plus souvent sur des lésions de carcinome intra-muqueux dans un contexte de muqueuse atrophique. A l’histologie, il correspond à un adénocarcinome séreux, à cellules claires ou un carcinosarcome avec un moins bon pronostic. Les altérations moléculaires des carcinomes de type II sont distinctes. La mutation de TP53 (exons 5 à 8) est observée dans 90% des carcinomes séreux et 72% dès le stade de carcinome in situ EIC, suggérant qu’il s’agit d’un événement précoce dans la carcinogenèse. Le grade histopronostique est uniquement appliqué à l’adénocarcinome de type I, le type II étant considéré d’emblée de haut grade. Il est recommandé d’utiliser le grade défini par la FIGO (Fédération Internationale de Gynécologie-Obstétrique). Il est basé sur l’architecture et les atypies cytnonucléaires. Tout d’abord, on classe l’architecture, G1 : < à 5% de zones solides, G2 : entre 6 et 50 % de zones solides et en G3 : > à 50 % de zones solides. Puis, si les atypies cytonucléaires sont très importantes G1 passe en G2 et G2 en G3. Le deuxième facteur pronostique histologique indépendant pour la prise en charge thérapeutique est l’infiltration du myomètre. Le seuil de 50% est retenu en 2009, entraînant la modification de la classification FIGO. Le troisiéme facteur pronostique est la présence ou l’absence d’emboles carcinomateux. La taille et l’extension tumorale au sein du corps utérin sont discutées. Le statut ganglionnaire est également un facteur pronostique très important. Bibliographie : Baekelandt MM, Castiglione M: Endometrial carcinoma: ESMO clinical recommendations for diagnosis, treatment and follow-up, Ann Oncol 2009, 20 Suppl 4:29-31 Bokhman JV: Two pathogenetic types of endometrial carcinoma, Gynecol Oncol 1983, 15:10-17 Bonadona V, Bonaiti B, Olschwang S, Grandjouan S, Huiart L, Longy M, Guimbaud R, Bucher B, Bignon YJ, Caron O, Colas C, Nogues C, Lejeune-Dumoulin S, Olivier-Faivre L, Polycarpe-Osaer F, Nguyen TD, Desseigne F, Saurin JC, Berthet P, Leroux D, Duffour J, Manouvrier S, Frebourg T, Sobol H, Lasset C, Bonaiti-Pellie C: Cancer risks associated with germline mutations in MLH1, MSH2, and MSH6 genes in Lynch syndrome, Jama 305:2304-2310 Brinton LA, Lacey JV, Jr., Trimble EL: Hormones and endometrial cancer--new data from the Million Women Study, Lancet 2005, 365:1517-1518 Daraï E, Zacharopoulou C, Touboul C, Chéreau E, Ballester M. Stratégie ganglionnaire et cancer de l’endomètre : résultats de senti-endo. Bull Cancer 2012 ; 99 : 35-41. INCA: Recommandations pratiques du cancer de l'endomètre, (Institut National du Cancer) 2010, II) Cancer du col Le col utérin comporte deux parties anatomiques : l’exocol et l’endocol L’exocol est la portion du col visible (en colposcopie) à la partie haute du vagin. Il est revêtu d’un épithélium malphighien (épithélium pavimenteux stratifié) non kératinisé. L’endocol relie l’orifice externe à l’isthme utérin et est revêtu d’un épithélium glandulaire simple mucosécrétant. La zone de jonction est la zone de transition entre l’épithélium malpighien exocervical et l’épithélium glandulaire endocervical. Cette transition est abrupte. La situation anatomique (topographique) de la zone de jonction entre les deux types d’épithéliums peut varier. Le cancer du col de l’utérus a le 7ième rang en fréquence en France (incidence d’environ 3300 cas/an avec un pic d’incidence vers 50 ans) Incidence en France en baisse grâce au dépistage et au traitement des lésions précancéreuses. Type histologique : Les cancers du col sont - le plus souvent des carcinomes épidermoïdes (85%) - plus rarement des adénocarcinomes (environ 10%) Carcinogenèse, Lésions précancéreuses : Les lésions précancéreuses et cancéreuses du col sont liées dans la majorité des cas à la persistance d’une infection par un HPV potentiellement oncogène ou dit « à haut risque » (surtout HPV 16 ou 18). L’infection à HPV est une maladie sexuellement transmissible très fréquente, le plus souvent transitoire. C’est la persistance d’une infection à HPV «à haut risque» qui est associé à un risque de développer une lésion de néoplasie intra-epithéliale / CIN (néoplasie intraépithéliale cervicale). On utilisait anciennement le terme de dysplasie de l’épithélium malpighien. L’infection et la persistance virale se font préférentiellement au niveau de la zone de jonction. En cas de néoplasie intra-epithéliale / CIN, les plus sévères sont au niveau de la jonction : L’évolution des lésions- Histoire naturelle Terminologie : Koilocytes : Les cellules dont l’aspect est évocateur d’une infection à HPV. Ces cellules peuvent se voir sur frottis et plus rarement sur biopsies. Néoplasie intra-épithéliale / CIN : altérations morphologiques témoignant de l'existence d'un processus néoplasique à un stade précoce, non invasif. Dysplasie épithéliale : ancienne dénomination ; synonyme de néoplasie intra-épithéliale /CIN. Carcinome micro-invasif (au niveau du col) : dépassement de la membrane basale avec infiltration du chorion sous-jacent. Le foyer infiltrant ne dépasse pas 5mm en profondeur et 7 mm en largueur. Carcinome invasif (au niveau du col): dépassement de la membrane basale avec infiltration du chorion sous-jacent. Le foyer infiltrant dépasse 5mm en profondeur ou 7 mm en largueur. Critères morphologiques des lésions de néoplasie intra-epithéliale /CIN au niveau de l’épithélium malpighien du col (Classification OMS (2004): - CIN 1 : anomalies architecturales et cytologiques du 1/3 inférieur de l’épithélium, respect de la membrane basale. - CIN 2 : anomalies architecturales et cytologiques entre 1/3 et 2/3 de la hauteur de l’épithélium, respect de la membrane basale. - CIN 3-cancer in situ: anomalies architecturales et cytologiques dépassant les 2/3 de la hauteur de l’épithélium, respect de la membrane basale. Examen anatomopathologique d’une pièce de conisation et/ou trachelectomie: Le compte-rendu anatomo-pathologique devra comprendre les items suivants (« items minimaux définis par l’InCA-2009) : - Type histologique des lésions : CIN1/ CIN2/ CIN3-CIS) - Carcinome épidermoide, adénocarcinome - Taille de la tumeur en surface du revêtement épithélial : en mm - Extension tumorale en profondeur dans la paroi cervicale : (non invasif /micro-invasif = invasion < 5mm en profondeur et < 7mm en largeur/ invasif) - Emboles carcinomateux : non vus / présents - Limites chirurgicales endo /exo cervicales : saines oui / non. Si oui donner la marge (distance minimale entre lésion et limite de résection. Si non, préciser quel type de lésion est sur la limite (CIN, carcinome…) Examen anatomopathologique d’une pièce de colpohystérectomie totale : Le Compte Rendu anatomo-pathologique devra comporter les éléments suivants (« items minimaux définis par l’InCA-2009) - Localisation de la tumeur : Exocol/jonction/endocol/autre - Type histologique de la tumeur (selon la classification OMS 2014) : Carcinome épidermoïde /adénocarcinome (préciser le sous type)/ carcinome indifférencié/ à petites cellules / autres - Grade histopronostique : bien, moyennement ou peu diférentié. - Extension tumorale : État des limites chirurgicales de résection : saines/envahies. Si saines : marge minimale en mm - Autres facteurs pronostiques et prédictifs : Emboles vasculaires : non/oui - Critères permettant de déterminer le pT/pN et le stade FIGO micro-infiltrant : invasion en profondeur en mm/invasion horizontale en mm infiltrant : taille (plus grand diamètre)/invasion en profondeur en mm Extension extra-cervicale : vagin (2/3 sup.)/vagin (1/3 inf.)/paramètres/paroi pelvienne/vessie (muqueuse)/rectum (muqueuse)/uretère - Ganglions régionaux : nombre de ganglions envahis/nombre de ganglions examinés Si envahi(s), capsule ganglionnaire : saine/dépassée - Ganglions non régionaux : préciser localisation, nombre de ganglions envahis/nombre de ganglions examinés pour chaque localisation. Si envahi(s), capsule ganglionnaire : saine/dépassée - En cas de procédure du ganglion sentinelle : le préciser Bibliographie : Recommandations pour la prévention du cancer du col de l’utérus Collège National des gynécologues-obstétriciens, 2007.