Rubrique coordonnée par D. Challine <[email protected]> brèves Méningites à entérovirus : une zoonose ? Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 26/05/2017. Mots clés : méningite, entérovirus, zoonose Dans les pays tempérés à haut niveau sanitaire, nous assistons chaque année à des épidémies à entérovirus non poliomyélitiques. Entre les mois de juin et de septembre, des épidémies, d’ampleur variable, se manifestent principalement sous forme de méningites à liquide clair chez l’enfant et l’adolescent. Plusieurs sérotypes d’entérovirus en sont responsables, notamment des échovirus et des coxsackievirus. La transmission des entérovirus est strictement interhumaine et généralement fécoorale, parfois respiratoire en cas de maladie respiratoire associée. Pendant les saisons plus chaudes, la transmission féco-orale, favorisée par l’habillement plus léger, rend la contamination interhumaine plus facile, ce qui explique les épidémies saisonnières à entérovirus. On ne connaît pas à ce jour de vecteur biologique capable de transmettre à l’homme les entérovirus. Le travail de Freundt et al. [1] explore cette alternative de transmission des entérovirus chez l’homme. En effet, les méningites à liquide clair pourraient se développer après piqûre d’un arthropode hématophage comme la tique. En 1999, au Tennessee, aux États-Unis, une épidémie de méningite à entérovirus s’est déclarée. Les malades originaires de cette région présentaient des symptômes similaires : fièvre, myalgies, nausées, céphalées. Après 7 jours, ces symptômes se sont résolus sans séquelle. Les patients avaient en commun une piqûre de tique. Pour l’un d’eux, différents examens ont été effectués afin de déterminer l’agent responsable de la méningite ; seul un titre élevé d’anticorps contre le coxsackievirus A9 a été trouvé. Afin de déterminer si les tiques pouvaient être impliquées dans la survenue de ces cas, une collecte de tiques a été réalisée et la recherche des génomes d’entérovirus effectuée. Au total, 192 tiques ont été collectées, parmi lesquelles 40 appartenaient à l’espèce Dermacentor variabilis et 152 à l’espèce Amblyomma americanum. Le contenu de leurs intestins a été digéré avec la protéinase K, suivi d’une extraction phénol chloroforme. Les ARN isolés ont été ensuite rétrotranscrits et amplifiés à l’aide d’amorces spécifiques de la région 5’ non codante des entérovirus. Aucun des extraits provenant de l’espèce Dermacentor variabilis n’a été amplifié. En revanche, à partir des extraits provenant de l’espèce Amblyomma americanum, des fragments d’environ 400 pb ont été amplifiés. Ces fragments ont été séquencés et alignés afin de démontrer leur origine virale. Les résultats des alignements indiquent qu’ils possédaient une homologie de 91 % avec le poliovirus de type 2, de 90 % avec les poliovirus des types 1 et 3, de 90 % avec le coxsackievirus A11 et de 89 % avec les coxsackievirus A17 et A15. Ces séquences ont aussi été alignées avec celles trouvées chez un patient habitant la même région, ayant eu une méningite à entérovirus en 2001 après une piqûre de tique et présentant des anticorps anti-coxsackievirus. L’alignement montre une homologie de 100 % entre ces séquences. La preuve de l’implication des entérovirus dans ces cas de méningite n’est pas directe. Néanmoins, les résultats présentés sont suffisamment consistants pour nous montrer que la transmission des entérovirus par piqûre de tique est tout à fait possible. Ce travail nous ouvre une nouvelle voie à explorer{ N. Cuervo Laboratoire de virologie Hôpital Saint Vincent-de-Paul Paris Virologie, Vol. 9, n° 5, septembre-octobre 2005 Référence 1. Freundt EC, Beatty DC, Stegall-Faulk T, Wright SM. Possible tick-borne human enterovirus resulting in aseptic meningitis. J Clin Microbiol 2005 ; 43 :3471-3. 413