Jeudi 27 novembre 2014 Page 12 L’info en continu sur MAGAZINE www.tahiti-infos.com RECHERCHE llL'association Pa’e Pa’e No Te Ora cherche des bénévoles pour des expéditions de chasse nocturne au PK18 contre un "poisson jardinier" un peu trop envahissant. Le "Stegastes nigricans" a une particularité très intéressante parmi les animaux marins : il choisit un platier ou une patate de corail (vivant ou mort) et y cultive un gazon d'algues en éliminant continuellement, avec sa bouche, toute impureté et types d'algues qu'il n'apprécie pas. Cette espèce est très territoriale et extrêmement agressive, au point de ne pas avoir peur d'attaquer les baigneurs. Du coup, il chasse les juvéniles des autres espèces des patates de corail et les empêchent de s'y réfugier, explique l'association Pa’e Pa’e No Te Ora. Rapidement, "ils deviennent plus nombreux que les autres poissons, déséquilibrant l’ensemble." Or, cette association entretient un sentier sous-marin près de la plage du PK18 à Punaauia, qui est désormais "envahi de stégastes et PPNTO souhaite en réduire le nombre." Elle cherche donc des volontaires pour chasser ces encombrants jardiniers : "En pratique, la chasse se fait de nuit avec un petit fusil semblable à celui qui sert à la chasse aux poulpes. Un programme sera établi pour une équipe de quatre à cinq chasseurs pour un soir par semaine. L’idéal serait d’être assez nombreux pour que ce ne soit pas toujours les mêmes équipes." L'opération commencera par une formation assurée par le biologiste Charles Egretaud le dimanche 30 novembre à 9 heures sur la plage du PK 18, au niveau du sentier sous-marin et du panneau de PPNTO. Des éponges pour lutter contre les bactéries Des chercheurs du fenua ont étudié l'éponge Leucetta chagosensis. Celle-ci lutte contre les bactéries en les empêchant de communiquer entre elles. En décidant de ne pas les tuer, elle méthode évite de les rendre résistantes. Ce procédé pourrait être utilisé dans la médecine humaine. Les antibiotiques de demain vienll dront-ils de la mer ? C'est bien ce que laissent présager les recherches menées par Cécile Debitus, directeur de recherche à l'Institut de recherche et de développement (IRD), situé à Arue. Dans le cadre du projet Pomare, elle travaille avec des chercheurs de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer). Ces scientifiques ont parcouru les fonds marins de Polynésie pour répertorier dans un premier temps les éponges du fenua. "Cent quatre-vingts espèces différentes d'éponges ont été répertoriées", explique Cécile Debitus. "On en a recensé 40 % de très rares." Les chercheurs ont étudié en particulier l'éponge qui s'appelle Leucetta chagosensis. C'est une éponge jaune fluo que vous avez peut-être déjà croisée sous l'eau lors de plongées. Elle vit essentiellement sur les pentes externes des îles de la Société et des Tuamotu. "Les organismes marins comme les éponges qui exposent une large surface à la mer doivent se défendre contre le fouling (les salissures)", expose Cécile Debitus. "Pour cela, elles utilisent soit des défenses physiques soit des défenses chimiques. On a misé sur les défenses chimiques. Le fouling commence par la formation d'un biofilm, une surface de bactéries qui recouvre l'éponge", décrit la scientifique. Crédit photo : ©IRD/B. Bourgeois Crédit photo : Elapied pour fr.wikipedia.com Une association veut déloger le poisson jardinier du PK18 L'éponge Leucetta chagosensis vit essentiellement sur les pentes externes des îles de la Société et des Tuamotu. siècle. Mais, leur utilisation massive et répétée a conduit à l’apparition de bactéries résistantes à ces médicaments. Or, ces substances isolées des éponges ne "tuent pas la bactérie. La formation de ce biofilm est contrôlée par le quorum sensing, mécanisme qui permet la communication entre les bactéries. "Quand les bactéries vont trouver une surface pour s’installer, elles vont communiquer ensemble pour former le biofilm, c'est ce qui contrôle aussi la pathogénicité (mécanisme par lequel la bactérie rend malade)", décrypte Cécile Debitus. On l'empêche de s'exprimer, on la rend muette. Elle ne va pas exprimer de substance toxique et va continuer à vivre." Les inhibiteurs de quorum sensing pourraient ainsi servir dans la médecine humaine notamment pour le soin des infections urinaires. LES ÉPONGES NE TUENT PAS LA BACTÉRIE Les recherches ont permis de montrer que les éponges se défendent "contre ces agressions en stoppant la communication entre les bactéries, mais sans les tuer. C'est très important car comme on ne les tue pas il n'y a pas de phénomènes de résistances qui apparaissent", souligne la scientifique. Les antibiotiques ont permis de faire considérablement reculer la mortalité associée aux maladies infectieuses au cours du XXe Mais il faudra encore quelques années de travail avant de voir la molécule des éponges dans les rayons des pharmacies. "On va passer aux tests in vivo sur le poisson en particulier. Après il va falloir trouver une méthode de production de la molécule", précise Cécile Debitus. "Il y a encore quelques années de travail avant d'aboutir à un produit final." Au-delà de la médecine humaine, cette molécule pourrait aussi être utilisée comme "comme antifouling sur les coques de bateau par exemple", note la scientifique. Ce procédé aurait l'avantage de ne pas être toxique sur l'environnement. "Cent quatre-vingts espèces différentes d'éponges ont été répertoriées en Polynésie française", explique Cécile Debitus, directeur de recherche à l'Institut de recherche et de développement (IRD). "On en a répertorié 40 % de très rares." Crédit photo : ©IRD/S. Petek ENVIRONNEMENT Les aquaculteurs observent également de manière attentive ces recherches car elles pourraient permettre de lutter contre la bactérie à l'origine d'un taux de mortalité important dans les élevages de platax (parapehue). MT