Un score simple pour identifier les patients à haut risque d

publicité
Un score simple pour identifier les patients à haut risque d'AVC
après un AIT
Oxford, Royaume-Uni - Une équipe britannique conduite par le Pr Peter M Rothwell propose
un score simple pour identifier les sujets à risque d'accident vasculaire cérébral dans les suites
immédiates d'un accident ischémique transitoire. Cet outil devrait permettre d'orienter les
malades à risques vers des investigations plus poussées. [1]
Si l'accident vasculaire cérébral (AVC) est souvent précédé d'un accident ischémique transitoire
(AIT), la conduite à tenir après un AIT est très variable selon les centres. Les recommandations
nord-américaines et anglaises sont assez laconiques en indiquant que les patients ayant
souffert d'une suspicion d'AIT doivent avoir un bilan dans les sept jours. En fait, la véritable
question est de définir quels patients justifient des examens complémentaires en urgence et
ceux qui peuvent se contenter d'une prise en charge ambulatoire. Il faut le rappeler : le risque
d'AVC est de 10 % dans les sept jours suivant un AIT mais, à l'inverse, dans la mesure où
seulement 50 % des suspicions d'AIT sont confirmées, on peut en déduire que 95 % des
patients ne feront pas d'AVC dans les sept jours.
"Le problème de l'AIT est qu'il s'agit d'un diagnostic avant tout clinique et surtout rétrospectif car
un malade ayant un déficit neurologique persistant lors de la consultation ne souffre pas d'un
AIT mais d'un AVC en évolution" rappellent les auteurs. D'ailleurs seulement la moitié des AIT
suspectés sont confirmés. "Les symptômes sont peu spécifiques et un hématome sous-dural ou
une hémorragie cérébrale peuvent très bien se manifester comme un AIT avec un déficit focal
et transitoire » indique le Dr Philippe Niclot (neurologue, Hôpital du Havre).
Une étude pragmatique
Devant la pauvreté des échelles de pronostic immédiat, les
auteurs de l'étude ont voulu tester la validité d'un score simple
pour prédire le risque d'AVC dans la semaine suivant un AIT. « En terme de population, le
Ils se sont inspirés d'un score simple basé sur l'Age, la score marche puisque tous les
pression artérielle (Blood pressure), la présentation Clinique patients qui ont eu un AVC
et la Durée des symptômes (ABCD) de l'étude OCSP avaient un score de 5 ou 6. A
(Oxfordshire Community Stroke Project) sur une l'inverse, il n'y a eu aucun AVC
population de patients ayant présentés un AIT recensés chez les patients ayant un
pendant cinq ans sur 105 000 habitants. Seuls les critères score nul » Dr Philippe Niclot
déjà identifiés comme fortement prédictifs d'AVC à 3 mois (Neurologue, hôpital du Havre).
après un AIT ont été retenus. Les auteurs ont ensuite utilisé E
les données de l'étude OXVASC (OXford VASCular study) r
pour le valider. OXVASC et OCSP sont de rares études r
prospectives réalisées en population générale avec une e
évaluation détaillée par un neurologue. La cohorte OXVASC u
incluant tous les malades suspects d'AIT, quelle que soit leur r
modalité de prise en charge, était importante pour la !
validation du test.
S
i
"Il faut rappeler le contexte de ce travail pour comprendre ses g
apports et ses limites. D'abord, l'accident ischémique n
transitoire est une entité qui a intéressé surtout les e
épidémiologistes qui l'ont considéré comme un facteur de t
risque d'accident vasculaire cérébral à court terme. n
Maintenant qu'il est possible de traiter précocement un AVC o
avec la thrombolyse, l'intérêt s'est déplacé vers la détection n
des sujets à haut risque pour améliorer la prise en charge en
urgence. Corollaire de cette évolution, il s'agit pour le médecin d
d'adresser très tôt les malades à haut risque pour faire un é
bilan rapide et instaurer un traitement adapté" commente le f
Dr Niclot.
i
n
i
Résultats :
.
L'âge avec un seuil à 60 ans, l'élévation de pression artérielle
(>140/90 mm Hg), les caractéristiques cliniques (déficit
moteur unilatéral associé ou non à des troubles du langage et la durée des symptômes ( <10
minutes, entre 10 et 60 minutes, > 60 minutes) permettent de déterminer une population de
sujets à risque.
Age >60 ans =1
Augmentation de la pression artérielle : PAS>140 mmHg et/ou PAD >90 mm de Hg = 1
Caractéristiques cliniques : déficit unilatéral = 2, troubles du langage =1, autre =0
Durée des symptômes en minutes : >60 =2, entre 10 et 59 =1, <10=0
Les auteurs ne sont pas surpris de l'effet de l'âge et de la pression artérielle. Ils remarquent
cependant que l'élévation de la pression artérielle à l'admission était un facteur prédictif
plus fort que la notion d'une hypertension traitée, ils notent ainsi "une pertinence plus élevée de
la pression artérielle à l'admission sur le risque immédiat d'AVC".
Risque d'AVC à 7 jours stratifié selon le score ABCD dans la cohorte OXVASC des AIT
probables ou confirmés.
Score ABCD
Patients
AVC
Risque (IC à 95%)
N (%)
1
2 (1%)
0
0
2
28(15%)
0
0
3
32 (17%)
0
0
4
46 (24%)
1 (5 %)
2,2 (0-6,4)
5
49 (26 %)
8 (40 %)
16,3 (6,0-26,7)
6
31 (16 %)
11 (55 %)
35,5 (18,6-52,3)
total
188 (100 %)
20 (100 %)
10,5 (6,2-14,9)
La valeur prédictive des symptômes est plus difficile à expliquer. Il semble néanmoins que les
troubles du langage et le déficit moteur sont plus souvent associés à une ischémie définitive. En
ce qui concerne la durée, il semble assez logique que des épisodes prolongés soient le reflet de
la sévérité de l'ischémie. Ils reconnaissent que la valeur prédictive du test peut être améliorée
par la pondération de chacune des variables et l'incorporation dans le score du diabète. Le
risque d'AVC précoce est d'environ 30 % lorsque le score est de 6. D'où la nécessité d'examens
complémentaires en urgence avec la possibilité d'envisager une fibrinolyse compte tenu de son
efficacité lorsqu'elle est pratiquée rapidement.
Beaucoup d'exceptions au score
Le Dr Niclot souligne : « cette étude pose le défi de
l'organisation face à un AIT qui, s'il est confirmé,
s'accompagne d'un risque d'AVC de 10 % dans les sept
« Je pense qu'on ne peut pas
premiers jours, le risque s'élevant à 4 à 5 % dans les deux
se contenter de cette
évaluation car il existe de très
premiers jours. C'est une étude pragmatique et rationnelle
qui se base sur des facteurs de risque et des éléments
nombreuses exceptions qui
échappent à ce score » Dr P
cliniques simples. En terme de population, le score marche
puisque tous les patients qui ont eu un AVC avaient un score
Niclot, neurologue.
de 5 ou 6. A l'inverse, il n'y a eu aucun AVC chez les
patients ayant un score nul. Cependant, je pense qu'on ne
peut pas se contenter de cette évaluation car il existe de très
nombreuses exceptions qui échappent à ce score. Par exemple, un AIT qui se manifeste par
des vertiges, des paresthésies ou des troubles visuels comme la cécité monoculaire transitoire
dont on sait qu'elle est très évocatrice d'une sténose carotidienne. D'autre part, plusieurs étude
cliniques ont montré l'intérêt des examens paracliniques pour déterminer le risque d'AVC après
un AIT. L'IRM de diffusion ou le Doppler ou l'angiographie par résonance magnétique ont
montré que le risque d'infarctus à court terme était augmenté lorsqu'il existe un hypersignal
chez un patient ayant un AIT de longue durée avec un déficit moteur ou une aphasie. De
même, la présence d'une sténose cervicale ou intra-crânienne augmente le risque d'infarctus
cérébral à court terme.
Et de conclure « Je ne pense pas que cette étude va changer l'attitude du médecin généraliste
car il sait déjà qu'une hémiparésie est une urgence. En revanche, il risque de passer à côté
d'autres présentations trompeuses d'AIT »
Source
1. Rothwell PM, Giles MF, Flossmann E et al. A simple score (ABCD) to identify individuals
at high early risk of stroke after transient ischemic attack. Lancet. 2005;366 : 29-36
Téléchargement