Théorème des nombres premiers en progression

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Théorème des nombres premiers en
progression arithmétique
Pierron Théo
ENS Ker Lann
Stage de première année effectué à l’Institut Élie Cartan de
Nancy, dans l’équipe de théorie des nombres, sous la direction
de Gérald Tenenbaum.
2
Table des matières
I
Introduction et énoncé du problème . . . . . . . . . . . . . . .
4
II
Mise en place des outils et premières propriétés . . . . . . . .
4
II.1
Critère d’Abel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4
II.2
Fonction Λ de Von Mangoldt
. . . . . . . . . . . . . .
4
II.3
Caractères de Dirichlet . . . . . . . . . . . . . . . . . .
5
II.4
Fonctions L . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
8
II.5
Symbole de Kronecker . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
II.6
Formes quadratiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
III
Preuve analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
III.1
Démonstration du théorème dans le cas q premier . . . 14
III.2
Démonstration dans le cas général . . . . . . . . . . . . 19
IV
Densité analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
V
Preuve algébrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
Notations
On notera :
• a ∧ b le pgcd de a et b, et a ∨ b leur ppcm.
• P l’ensemble des nombres premiers.
• ϕ l’indicatrice d’Euler.
• a et q deux entiers premiers entre eux.
• pν ka si pν | a et pν+1 ∤ a.
• si s est un complexe, s = σ + iτ .
• log la détermination principale du logarithme complexe.
De plus, p désignera toujours un nombre premier.
3
I. INTRODUCTION ET ÉNONCÉ DU PROBLÈME
I
Introduction et énoncé du problème
Nous allons ici nous intéresser au résultat suivant.
Théorème I.1 Soit (a, q) ∈ (N∗ )2 un couple de nombres entiers premiers
entre eux. Il existe une infinité de nombres premiers appartenant à l’ensemble
a + Nq.
Ce théorème a été démontré par Gustav Lejeune-Dirichlet dans une première version en 1837 (cas où q est un entier premier) puis généralisé pour
tout nombre entier q en 1839 − 1840. Il l’a aussi montré pour les entiers de
Gauss en 1841.
II
II.1
Mise en place des outils et premières propriétés
Critère d’Abel
Proposition II.1 Si (an )n ∈ CN est à sommes partielles bornées et (bn )n ∈
(R+ )N décroît vers 0, alors
∞
X
an bn converge.
n=0
II.2
Fonction Λ de Von Mangoldt
Définition II.1 On définit la fonction Λ de Von Mangoldt par
Λ(n) :=

ln(p)
0
si ∃ν > 0, n = pν
sinon
Proposition II.2 Soit (a, q) ∈ N2 . Quand σ → 1+ (σ ∈ R), on a
X ln(p)
Λ(n)
=
+ O(1)
nσ
pσ
n≡a [q]
p≡a [q]
X
Démonstration. Par définition de Λ, on a
Λ(n) X X ln(p)
=
σν
nσ
ν>0 pν ≡a [q] p
n≡a [q]
X
=
Pierron Théo
ln(p) X X ln(p)
+
σν
pσ
ν>1 pν ≡a [q] p
p≡a [q]
X
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
Il suffit donc de prouver que
ln(p)
= O(1)
σν
ν>1 pν ≡a [q] p
X
X
On peut majorer cette somme (à termes positifs) par
X ln(n)
n>1
n2
qui est convergente, ce qui assure le résultat.
II.3
Caractères de Dirichlet
Définition II.2 Soit q un nombre entier tel que q > 1. On appelle caractère
de Dirichlet tout morphisme de groupes de (Z/qZ)∗ → C∗ .
Théorème II.1 Soit q un nombre premier. Il y a au plus q − 1 caractères
de Dirichlet de module q.
Démonstration. Soit q un nombre premier. Le groupe (Z/qZ)∗ est cyclique
d’ordre q−1 donc tout caractère de Dirichlet χ est entièrement déterminé par
l’image d’un générateur de (Z/qZ)∗ . On a donc au plus Card((Z/qZ)∗ ) = q−1
morphismes possibles.
Proposition II.3 Si q est premier, les caractères de Dirichlet associés sont
les
2iπbρ(n)
χb : n 7→ e q−1 , b ∈ J0, q − 2K
où ρ est l’application définie par g ρ(n) = n pour tout n ∈ (Z/qZ)∗ (où g
désigne un élément primitif de (Z/qZ)∗ ).
Démonstration. Ce sont bien des caractères. On a donc trouvé q − 1 caractères, ce sont donc les seuls.
On va maintenant décrire les caractères associés à un nombre entier q non
premier.
On décompose (Z/qZ)∗ en un produit direct de groupes cycliques (la
décomposition est unique à l’ordre près). Par le théorème chinois, on a :
(Z/qZ)∗ =
Y
(Z/pν Z)∗
pν kq
Proposition II.4 Soit p un nombre premier différent de 2, (Z/pν Z)∗ est
cyclique.
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
Démonstration. Soit p un nombre premier.
Le groupe (Z/pZ)∗ est cyclique puisque Z/pZ est un corps. On en prend
un générateur g.
Montrons que l’ordre ω de g dans (Z/p2 Z)∗ est p − 1 ou p(p − 1). On a
g ω ≡ 1 mod p2 donc g ω ≡ 1 mod p donc p−1|ω. De plus ω divise le cardinal
de (Z/p2 Z)∗ i.e. p(p − 1). On en déduit que ω = p − 1 ou ω = p(p − 1).
Si ω = p(p − 1), g est un générateur de (Z/p2 Z)∗ qui en devient cyclique.
Si ω = p − 1, on remarque que g + p est générateur de (Z/pZ)∗ et que
(g + p)p−1 ≡ 1 + (p − 1)pg p−2 6≡ 1 mod p2 . Donc g + p est générateur de
(Z/p2 Z)∗ . Dans la suite de la preuve, on prendra g un générateur de ces deux
groupes.
Montrons par récurrence que pour tout entier ℓ > 1, il existe hℓ ∈ N tel
ℓ−2
que g p (p−1) = 1 + hℓ pℓ−1 et p ∤ hℓ .
H2 est vraie car g p−1 ≡ 1 mod p donc il existe h2 tel que g p−1 = 1 + h2 p.
De plus p ∤ h2 car sinon g p−1 ≡ 1 mod p2 , ce qui est absurde.
Soit ensuite un entier ℓ > 1 tel que Hl soit vraie. On écrit alors
gp
ℓ−1 (p−1)
= (1 + hℓ pℓ−1 )p
Par la formule du binôme, il existe un entier n tel que
gp
ℓ−1 (p−1)
= 1 + pℓ hℓ + np2ℓ−2 = 1 + (hℓ + npℓ−2 )pℓ
et on a bien
hℓ + npℓ−2 ≡ hℓ 6≡ 0 mod p
Donc Hℓ+1 est vraie et le principe de récurrence assure le résultat.
Soit ℓ un entier. Notons alors ω l’ordre de g dans (Z/pℓ Z)∗ . ω divise le
cardinal de ce groupe donc ω|pℓ−1(p − 1). De plus, on a g ω ≡ 1 mod p donc
p − 1|ω. Ainsi, il existe k ∈ J0, ℓ − 1K tel que ω = pk (p − 1).
ℓ−2
Si k 6= ℓ − 1, on sait que ω|pℓ−2(p − 1) donc 1 + hℓ pℓ−1 ≡ g p (p−1) ≡ 1
mod pℓ . Or p ∤ hℓ donc hℓ pℓ−1 6≡ 0 mod pℓ . On en déduit que (Z/pℓ Z)∗ est
cyclique puisqu’il est engendré par g.
Proposition II.5 (Cas p = 2)
• (Z/2Z)∗ = {1}.
• (Z/4Z)∗ est cyclique (engendré par 3).
• Si ν est un entier tel que ν > 2, alors (Z/2ν Z)∗ est le produit d’un
groupe d’ordre 2 par un groupe cyclique d’ordre 2ν−2 .
Démonstration. Par récurrence, on prouve que pour tout m ∈ N \ {0, 1},
m−2
52
= 1 + 2m hm où hm est un entier impair.
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
En substituant ν à m, on voit que l’ordre ω de 5 modulo 2ν divise 2ν−2 .
En substituant ν − 1 à m, on trouve que ω ∤ 2ν−3 . Donc ω = 2ν−2 .
Comme 5 n’est pas un carré modulo 8, (Z/2ν Z)∗ n’est pas cyclique. En
effet, dans le cas contraire, il aurait un générateur e et il existerait un entier
ν−2
i tel que ei = 5. Comme ω = 2ν−2 , ei×2
= 1 donc 2|i. Ainsi 5 serait un
carré modulo 2ν donc modulo 8 car ν > 3.
ν
Le quotient (Z/2ν Z)∗ /h5i est alors d’ordre ϕ(2ω ) = 2 donc isomorphe à
Z/2Z.
Ainsi, (Z/2ν Z)∗ = (Z/2Z) × h5i.
On a montré qu’on pouvait décomposer (de manière unique) (Z/qZ)∗ en
un produit de groupes cycliques. La donnée d’un caractère de Dirichlet χ
modulo q est donc équivalente à la donnée de ses valeurs sur les générateurs
de ces groupes. On peut alors déterminer explicitement tous les caractères
de Dirichlet modulo q.
On écrit la décomposition en produit de facteurs premiers de q : q =
2ν
k
Y
ν
pj j avec ν > 0 et νj > 0. Pour tout j, on note gj une racine primitive
j=1
ν
modulo pj j . Pour m premier avec q (i.e. m ∈ (Z/qZ)∗ ), on peut alors définir
ν
de manière unique ε ∈ {0, 1}, η ∈ J0, 2ν−2 J et µj ∈ J0, ϕ(pj j )J tel que
m ≡ (−1)ε 5η
µ
mod 2ν et m ≡ gj j
ν
mod pj j
avec par convention ε = 0 si ν ∈ {0, 1}.
Avec ces notations, les caractères de (Z/qZ)∗ sont les ϕ(q) fonctions :


χ(m) = exp 2iπ 
′
k
X
λj µj (m)

λε(m) λ η(m)

+ ν−2 +
νj
2
2
)
ϕ(p
j
j=1
en choisissant λ ∈ {0, 1}, λ′ ∈ J0, 2ν−2 J et, pour tout j ∈ J1, kK, λj ∈
ν
J0, ϕ(pj j )J.
Définition II.3 On appelle caractère de Dirichlet de module q le prolongement d’un caractère χ de (Z/qZ)∗ :
χ(m) =

χ(n)
0
si n ∧ q = 1 et m ≡ n
si n ∧ q > 1
mod q (m ∈ J1, qK)
Remarque II.1 On note χ0 le prolongement du caractère unité, i.e. l’indicatrice de {n, n ∧ q = 1}.
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
Définition II.4 On dit qu’un caractère de Dirichlet χ de module q est primitif si, et seulement si, il n’existe aucun caractère χ1 de module q1 < q qui
coïncide avec χ sur l’ensemble des entiers premiers à q.
Proposition II.6 (Condition de primitivité) Un caractère de Dirichlet χ
de module q est primitif si et seulement si q est la plus petite période de
χ|{n∈N,n∧q=1} .
II.4
Fonctions L
Définition II.5 On appelle fonction L associée à un caractère de Dirichlet
χ la fonction
X χ(n)
L : s 7→
s
n>0 n
définie sur l’ensemble des nombres complexes s où la série converge. On
notera L(·, χ) cette fonction.
Théorème II.2 Soit (an )n ∈ CN .
∞
X
an
converge
s0
n=0 n
alors cette série converge sur le demi-plan {z ∈ C; ℜ(z) > σ0 } et la convergence est uniforme sur tous les secteurs Sθ = {s ∈ C; | arg(s − s0 )| 6 θ} pour
θ ∈ [0, π2 [.
Si s0 = σ0 + iτ0 est un nombre complexe tel que la série
Démonstration. Supposons que
∞
X
∞
X
an
converge. Soit alors θ ∈ [0, π2 [ et ε > 0.
s0
n
n=0
an
converge, il existe un entier N ∈ N tel que pour tout n >
s0
n=0 n
n
n
X
X
ak
ak ε cos(θ)
6
.
Notons
A
:=
.
m > N des nombres entiers, m,n
s
s0
0
2
k=m k
k=m k
Soit s = σ + iτ ∈ Sθ \ {s0 } et n, m deux nombres entiers tels que n >
m > N. On a :
Comme
n
X
ak
ak
=
s
s
s−s0
0
k=m k k
k=m k
n
X
=
=
=
n
X
Am,k − Am,k−1
k s−s0
k=m
n−1
X
An,k
k=m
n−1
X
1
k s−s0
1
−
(k + 1)s−s0
+
Am,n
ns−s0
An,k (e−(s−s0 ) ln(k) − e−(s−s0 ) ln(k+1) ) +
k=m
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!
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Am,n
ns−s0
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
Or on a la majoration suivante :
−(s−s0 ) ln(k)
|e
−(s−s0 ) ln(k+1)
−e
|=
Z ln(k+1)
−t(s−s0 )
(s − s0 )
e
dt
ln(k)
Z ln(k+1)
6 |s − s0 |
|s − s0 |
=
σ − σ0
Comme s ∈ Sθ , on a
n
X
|s−s0 |
σ−σ0
=
1
cos(arg(s−s0 ))
X
|s − s0 |
ak n−1
6
|An,k |
s
σ − σ0
k=m
k=m k
ε
6
2
1
mσ−σ0
1
k σ−σ−0
cos(θ) − 1
−
nσ−σ0
!
e−t(σ−σ0 ) dt
ln(k)
6
1
k σ−σ0
1
cos(θ)
1
−
(k + 1)σ−σ0
!
donc
1
−
(k + 1)σ−σ0
!
+
|Am,n |
nσ−σ0
6ε
∞
X
an
vérifie donc le critère de Cauchy uniforme sur Sθ , elle y converge
s0
n=0 n
donc uniformément.
Corollaire II.1 Pour tout entier q > 0 et tout caractère de Dirichlet χ
de module q, L(·, χ) est holomorphe sur le demi-plan {z ∈ C; ℜ(z) > 1}.
Si χ 6= χ0 , elle est holomorphe sur le demi-plan {z ∈ C; ℜ(z) > 0}.
1
donc
σ
n=1 n
L(s, χ) converge absolument quand σ > 1. L(·, χ) est donc holomorphe sur
le domaine {z ∈ C; ℜ(z) > 1}.
Si χ 6= χ0 , par le critère d’Abel (proposition II.1), L(x, χ) converge pour
tout x ∈ R∗+ . En effet, la suite (n−x )n est décroissante et (χ(n))n est à sommes
partielles bornées.
Ainsi, la série L associée à un caractère χ 6= χ0 converge uniformément
sur tout compact de {z ∈ C; ℜ(z) > 0}. L(·, χ) est donc holomorphe sur ce
demi-plan.
Démonstration. Pour tout caractère de Dirichlet χ, |L(s, χ)| 6
∞
X
Proposition II.7 Si χ 6= χ0 et L(1, χ) = 0, alors L(s, χ) = O(s − 1) quand
s → 1.
Démonstration. Au voisinage de 1, comme L(·, χ) est holomorphe, elle est la
somme de sa série de Taylor. En la tronquant au premier terme, on obtient
L(s, χ) = L(1, χ) + O(s − 1) = O(s − 1)
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
Proposition II.8 Pour tout nombre complexe s tel que ℜ(s) > 1, pour tout
nombre entier k > 0 et tout caractère de Dirichlet χ, L est k fois dérivable
X (−1)k (ln n)k χ(n)
(car elle est holomorphe) et on a L(k) (s, χ) =
.
ns
n>1
De plus, si χ 6= χ0 , ce résultat est aussi valable pour ℜ(s) > 0.
Démonstration. Par le théorème II.2, (χ(n))n est à sommes partielles bornées
k
)n décroît vers 0 pour tout réel x > 0. Le critère d’Abel
(si χ 6= χ0 ) et ( (lnnn)
x
X (ln n)k χ(n)
assure alors que (−1)k
converge sur R∗+ .
s
n
n>1
On a donc la convergence uniforme sur tout compact de {z ∈ C; ℜ(z) > 0}
X (−1)k (ln n)k χ(n)
de la série
. On peut alors appliquer le théorème de dérins
n>1
vation sous le signe somme, qui assure alors que, pour tout nombre complexe
s tel que ℜ(s) > 0 :
L(k) (s, χ) =
X (−1)k (ln n)k χ(n)
ns
n>1
La cas χ = χ0 se traite de même puisque la série L(s, χ0 ) converge absolument sur le domaine {z ∈ C; ℜ(z) > 1}.
Proposition II.9 Soit χ un caractère de Dirichlet et s un complexe tel que
ℜ(s) > 1. On a
!−1
Y
χ(p)
1− s
L(s, χ) =
p
p∈P
Démonstration. Notons que pour tout p ∈ P et s tel que ℜ(s) > 1, on a
χ(p)
1− s
p
!−1
=
∞
X
χ(p)n
n=0
pns
Ainsi, le produit vaut
χ(2) χ(4)
1+ s + s +···
2
4
!
!
χ(3) χ(9)
1+ s + s +··· ···
3
9
En développant et en utilisant la multiplicativité de χ, on obtient
χ(2) χ(4)
χ(3) χ(2 · 3) χ(4 · 3)
+ s +···+ s + s s + s s + ···
s
2
4
3
2 ·3
4 ·3
χ(9) χ(2 · 9) χ(4 · 9)
+ s + s s + s s +···
9
2 ·9
4 ·9
+···
1+
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
Ce qui vaut bien L(s, χ) par existence et unicité de la décomposition en
produit de facteurs premiers.
Remarque II.2 On a, pour s tel que ℜ(s) > 1,
L(s, χ0 ) =
Y
1
=
(1 − p−s )ζ(s)
−s
1−p
p|q
p∤q
Y
En particulier, si q est premier, on a :
L(s, χ0 ) = (1 − q −s )ζ(s)
II.5
Symbole de Kronecker
On rappelle que le symbole de Legendre d’un entier d et d’un nombre
premier p, noté ( dp ), vaut 0 si p|d, 1 si d est un carré modulo p et −1 sinon.
On cherche à étendre cette définition à tous les couples d’entiers (d, p) avec p
non nécessairement premier pour donner une formule explicite d’un caractère
primitif réel.
Définition II.6 Soit d et m deux entiers avec m > 0. On appelle symbole
de Kronecker de d et m et on note ( md ) l’entier défini par
 d



p



 d
p
d



2



 d
2
=0
est le symbole de Legendre
=1
si p ∤ d
si d ≡ ±1
= −1
pour p premier. On écrit alors
si p | d
si d ≡ ±5
d
m
!
=
v
Y
r=1
d
pr
!
si m =
mod 8
mod 8
v
Y
pr .
r=1
Proposition II.10 Tout caractère réel primitif de module q est nécessairement de la forme
!
d
n 7→
n
où d désigne un produit de nombres premiers entre eux de la forme −4, ±8,
p−1
(−1) 2 p (p premier impair). On a alors q = |d|.
Démonstration. Notons q = 2ν
r
Y
pνi i la décomposition en produit de facteurs
i=1
premiers de q. On a vu précédemment qu’un caractère de Dirichlet χ de
module q s’écrit comme le produit χ2 χp1 · · · χpr de caractères de Dirichlet de
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
modules respectifs 2, p1 , . . . , pr . Si un des caractères qui interviennent dans
le produit n’est pas primitif, il est facile de voir que χ ne sera pas primitif.
Ainsi, si χ est primitif, alors χ2 , χp1 , . . . , χpr le seront.
Il reste donc à caractériser les caractères primitifs de module une puissance d’un nombre premier.
• Cas d’un nombre premier p > 2. On considère donc un caractère primitif χ de module pα . Dans ce cas, pour tout entier n premier avec p,
χ(n) s’écrit
!
2iπbρ(n)
exp α−1
p (p − 1)
Si α 6= 1, on remarque que ce caractère est primitif quand b est premier avec p (sinon l’argument de l’exponentielle se simplifierait et ce
caractère découlerait d’une puissance moindre de p).
bρ(n)
Ce nombre complexe est alors réel seulement si pα−1
est entier ou
(p−1)
demi-entier. Comme ρ(n) peut valoir 1, le caractère est réel seulement
α−1
si b est divisible par p 2(p−1) . Ainsi, on doit avoir α = 1 (sinon p|b).
On a donc b = p−1
et le caractère devient (−1)ρ(n) = np (le symbole
2
de Legendre).
• Cas d’une puissance 2α avec α 6 2. Si α = 1, il n’y a que le caractère
principal. Si α = 2, le seul caractère non principal est
χ4 (n) =

1
−1
si n ≡ 1 mod 4
si n ≡ −1 mod 4
qui est primitif.
• Cas d’une puissance 2α avec α > 2. Dans ce cas, la forme générale des
caractères est
!!
mν m′ ν ′
+ α−2
exp 2iπ
2
2
avec m ∈ {0, 1}, m′ ∈ J0, 2α−2 − 1K et ν, ν ′ définis par
n ≡ (−1)ν 5ν
′
mod 2α
Ce caractère est réel seulement si 2α−3 |m′ , et si α > 3, ceci implique
qu’il n’est pas primitif. On doit donc avoir α = 3. On a donc 4 possibilités.
Si m = m′ = 0, on obtient le caractère principal.
Si m = 1 et m′ = 0, on obtient χ4 qui est un caractère de module 8
non primitif.
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II. MISE EN PLACE DES OUTILS ET PREMIÈRES PROPRIÉTÉS
Si m = 0 et m′ = 1, on obtient le caractère
χ8 (n) =

1
−1
si n ≡ ±1
si n ≡ ±5
mod 8
mod 8
qui est primitif.
Enfin, si m = m′ = 1, on obtient χ4 χ8 qui est primitif.
Ainsi, les seules puissances de nombres premiers pour lesquelles il existe
un caractère primitif réel sont 4, 8 et p pour tout entier p premier impair.
De plus, on a χ4 = n 7→ ( −4
), χ8 = n 7→ ( n8 ) et χ4 χ8 = n 7→ ( −8
), et par
n
n
la loi de de réciprocité quadratique, pour tout couple (n, p) d’entiers avec p
p−1
′
premier, ( np ) = ( pn ) avec p′ = (−1) 2 p.
Finalement, les seuls caractères primitifs réels sont les produits de ces
derniers, i.e. par multiplicativité du symbole de Kronecker, les n 7→ ( nd ) avec
p−1
d un produit de nombres de la forme −4, ±8 et (−1) 2 p avec p premier.
II.6
Formes quadratiques
Définition II.7 Si a, b et c sont des entiers, alors F = F (x, y) = ax2 +
bxy + cy 2 est appelée forme quadratique. On l’écrit {a, b, c}.
Le discriminant d’une telle forme est b2 − 4ac. Cette forme est dite primitive si et seulement si (a, b, c) sont premiers entre eux.
Proposition II.11 Le discriminant d’une forme quadratique est congru à
0 ou 1 modulo 4.
Démonstration. Soient a, b et c trois entiers. On a b2 − 4ac ≡ b2 mod 4. Or
les seuls carrés modulo 4 sont 0 et 1.
Par la suite, on va s’intéresser au dénombrement de telles formes. On va
d’abord réduire le problème en considérant les classes de formes pour une
tranformation qui laisse invariant le discriminant.
Définition II.8 On dit que deux formes sont équivalentes si et seulement
si elles sont égales à changement de base près et si la matrice de passage est
de déterminant ±1. Cette relation est une relation d’équivalence qui préserve
le discriminant.
Définition II.9 On dit qu’une forme F représente un entier k si, et seulement si, il existe des entiers x et y tels que k = F (x, y). Si x et y sont
premiers entre eux, on dit que F représente proprement k.
Proposition II.12 Toute classe contient une forme dite réduite i.e. telle
que |b| 6 |a| 6 |c|.
Pierron Théo
Page 13
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
Proposition II.13 Il n’y a qu’un nombre fini de classes de formes de discriminant d. On notera h(d) le nombre de formes primitives de discriminant d.
Démonstration.
• Si d > 0, la proposition précédente assure que |ac| > b2 = d+4ac > 4ac
donc ac < 0. On a alors
4a2 6 4|ac| = −4ac = d − b2 6 d
√
Ainsi, |a| 6 2d et |b| 6 |a|. a et b prennent donc un nombre fini de
valeurs, ce qui est aussi le cas de c puisque d est fixé.
• Si d < 0, par symétrie, on peut supposer a > 0 et c > 0. On a alors
|b| 6 a 6 c donc
q
4a2 6 4ac = b2 − d 6 a2 + |d|
Ainsi, |b| 6 a 6 |d|
. b et a prennent un nombre fini de valeurs, donc
3
c aussi puisque d est fixé.
Proposition II.14 Pour d congru à 0 ou 1 modulo 4, il existe au moins
une forme de discriminant d, à savoir :

x2
III
III.1
− d4 y 2
x2 + xy −
si d ≡ 0
si d ≡ 1
d−1 2
y
4
mod 4
mod 4
Preuve analytique
Démonstration du théorème dans le cas q premier
On se place dans le cas q premier. On rappelle que les caractères associés
sont de la forme :
χb : n 7→ e
2iπbρ(n)
q−1
,
b ∈ J0, q − 2K
où ρ désigne l’application définie par g ρ(n) = n pour tout n ∈ (Z/qZ)∗ (où g
désigne un élément primitif de (Z/qZ)∗ ).
Nous allons dans un premier temps démontrer le résultat suivant.
Proposition III.1 (Orthogonalité des caractères) Pour tout entier a premier avec q, on a
q−2
X
χb (a)χb (n) =
b=0
Pierron Théo

q
0
−1
Page 14
si n ≡ a
sinon
mod q
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
Démonstration. Si n ≡ a mod q, on a χb (a)χb (n) = χb (a)χb (a) = |χb (a)|2 =
1. Donc la somme vaut bien q − 1.
Si n 6≡ a mod q, la somme vaut
q−2
X
2iπ
(e q−1 (ρ(n)−ρ(a)) )b =
b=0
III.1.1
1 − e2iπ(ρ(n)−ρ(a))
2iπ
1 − e q−1 (ρ(n)−ρ(a))
=0
L(1, χb ) 6= 0 (b ∈ J1, q − 2K) implique le théorème
Avec cette hypothèse, il est loisible de prendre s dans un voisinage (réel)
de 1+ tel que L(s, χ) 6= 0.
Pour un caractère de Dirichlet χ fixé, on peut alors considérer alors la
fonction :
!
X
χ(p)
− log(L(σ, χ)) :=
log 1 − σ
p
p∈P
Comme L est dérivable, la dérivée de cette égalité s’écrit
−
X χ(p) ln(p)
L′
(σ, χ) =
L
pσ − χ(p)
p∈P
On remarque alors que
X χ(p)ν
χ(p)
1
χ(p)
=
=
νσ
pσ − χ(p)
pσ 1 − χ(p)
ν>0 p
pσ
Ce qui assure
−
∞
X
X X ln(p)χ(pν )
χ(n)Λ(n)
L′
(σ, χ) =
=
L
pνσ
nσ
n=1
p∈P ν>0
On peut alors multiplier cette relation par χ(a) et sommer sur χ. Par la
proposition III.1, on obtient
q−2
X
b=0
− χb (a)
X Λ(n)
L′ (σ, χb )
= (q − 1)
L(σ, χb )
nσ
n≡a [q]
On a alors par la proposition II.2 :
q−2
X
b=0
Pierron Théo
− χb (a)
X ln(p)
L′ (σ, χb )
= (q − 1)
+ O(1)
L(σ, χb )
pσ
p≡a [q]
Page 15
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
En utilisant la remarque II.2, le premier terme de cette somme vaut :
L′ (σ, χ0 )
L′ (σ, χ0 )
ζ ′ (σ)
ln(q)
1
−χ0 (a)
=−
=−
− σ
=
+ O(1)
L(σ, χ0 )
L(σ, χ0 )
ζ(σ)
q −1
σ−1
Comme on l’a vu précédemment, si b 6= 0, lim+ L(σ, χb ) existe et est non
σ→1
nulle (par hypothèse).
Alors, chacun des termes de la somme finie
q−2
X
b=1
− χb (a)
L′ (σ, χb )
tend vers
L(σ, χb )
une limite finie.
Ainsi, sous l’hypothèse L(1, χb ) 6= 0 pour tout b ∈ J1, q − 2K, on obtient
X ln(p)
1
=
+ O(1) quand σ → 1+ par valeurs réelles.
σ
p
(q
−
1)(σ
−
1)
p≡a mod q
X ln(p)
diverge. L’ensemble {p ∈ P; p ≡ a mod q}
Donc la somme
σ
p≡a mod q p
contient donc une infinité de termes.
III.1.2
Montrons L(1, χb ) 6= 0 pour b 6=
Théorème III.1 Si b 6=
q−1
2
q−1
2
alors L(1, χb ) 6= 0.
Lemme III.1.1
Pour tout θ ∈ R, 3 + 4 cos(θ) + cos(2θ) = 2(1 + cos(θ))2 > 0.
Lemme III.1.2
Pour tout s de partie réelle σ > 1, on a
log L(s, χb ) =
X X χb (p)ν
p∈P ν>0
νpsν
Démonstration. On a :
χb (p)
log L(s, χb ) = −
log 1 − s
p
p∈P
X
!
DSE
=
X X χb (p)ν
p∈P ν>0
νpsν
(car | χ(p)
| 6 1).
p
Remarque III.1 Le même raisonnement conduit à
log ζ(s) =
Pierron Théo
1
sν
p∈P ν>0 νp
XX
Page 16
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
Démonstration du théorème. En appliquant le lemme III.1.1 pour θ =
on obtient
4 cos(θ) cos(2θ)
3
+
+
>0
νσ
νp
νpνσ
νpνσ
2πνρ(p)b
,
q−1
On constate que cos(θ) = ℜ(χb (p)ν ). On a alors, en sommant sur p, ν
6= 2b) :
(convergence car b 6= q−1
2
06
X X 4ℜ(χb (p)ν )
X X ℜ(χ2b (p)ν )
3
+
+
νpνσ p∈P ν>0 νpνσ
νpνσ
p∈P ν>0
p∈P ν>0
XX

= 3 log ζ(σ) + 4ℜ 
X X χb (p)ν
p∈P ν>0
νpσν


+ℜ
X X χ2b (p)ν
νpσν
p∈P ν>0
= 3 log ζ(σ) + 4ℜ(log L(σ, χb )) + ℜ(log L(σ, χ2b ))
= 3 log ζ(σ) + 4 ln |L(σ, χb )| + ln |L(σ, χ2b )|


Ainsi, ζ(σ)3|L(σ, χb )|4 |L(σ, χ2b )| > 1.
Comme χ2b 6= χ0 , on a la convergence de L(σ, χ2b ) quand σ → 1+ . Donc
L(σ, χ2b ) = O(1).
Si on avait L(1, χb ) = 0, le membre de gauche serait en O(ζ(σ)3(σ−1)4 ) =
O(σ − 1), ce qui contredirait l’inégalité.
Ainsi, L(1, χb ) 6= 0.
III.1.3
Il reste à montrer que L(1, χ q−1 ) 6= 0 lorsque q est un nombre
2
premier
On pose χ = χ q−1 .
2
Définition III.1 Pour tout entier n > 1, on pose f (n) =
X
X
χ(d) et F (σ) =
d|n
f (n)e−σn .
n>1
Proposition III.2 Pour tout nombre entier n, on a f (n) > 0.
Démonstration. On a :
f (n) =
X
d|n
χ(d) =
ν
YX
χ(p)j > 0
pν knj=0
car χ(p) ∈ {0, ±1} et si χ(p) = 1, la somme vaut ν + 1 > 0 et sinon, elle vaut
1−χν+1 (p)
> 0.
1−χ(p)
Proposition III.3 Pour tout nombre entier n, on a f (n2 ) > 1.
Pierron Théo
Page 17
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III. PREUVE ANALYTIQUE
Démonstration. On a
2
f (n ) =
ν
Y X
χ(p)j
pν kn2 j=0
On remarque que tous les ν sont pairs. En effet, si ν = 2µ + 1, p · p2µ kn2 , donc
p|( pnµ )2 . Comme p est premier, p| pnµ donc p2 |( pnµ )2 et pν+1 |n2 , contradiction.
Ainsi, on a

ν
ν + 1
X
si χ(p) = 1
χ(p)j =
1
sinon
j=0
Ce qui assure le résultat.
Théorème III.2 Pour tout σ ∈]0, 1], on a
√
σ
L(1, χ) >
− Aσ
6
pour une certaine constante A > 1.
Démonstration. Pour tout σ ∈]0, 1], on a :
√1
F (σ) >
σ
X
−1
e
m=1
$
%
1
2
1
1 1
√ −1 > √ − > √ −1
=
e
σ
e σ e
6 σ
De plus, par définition,
F (σ) =
X
χ(d)
d>1
Soit θσ : d 7→
1
σd
−
1
.
eσd −1
X
e−σmd =
m>1
X
d>1
χ(d)
−1
eσd
La formule précédente assure
F (σ) =
L(1, χ) X
− θσ (d)χ(d)
σ
d>1
Or par le critère d’Abel (proposition II.1), la série est bornée quand σ →
0 ((χ(n))n est à sommes partielles bornées et θσ est décroissante positive).
On a alors, pour un certain A > 0 :
+
|F (σ)| 6
Donc
L(1, χ) +A
σ L(1, χ) > σF (σ) − Aσ >
et on a bien A + 1 > 1.
√
σ
− (A + 1)σ
6
1
Choisir σ = 144(A+1)
2 (σ ∈]0, 1] puisque A > 1) assure le résultat recherché, à savoir L(1, χ) > 0.
Pierron Théo
Page 18
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III. PREUVE ANALYTIQUE
III.2
Démonstration dans le cas général
III.2.1
Adaptation des formules pour le cas général
Comme précédemment, on a :
Proposition III.4 (Orthogonalité des caractères) Pour tout nombre entier
q > 1 et tout nombre entier a premier avec q, on a
X
χ(a)χ(n) =
χ

ϕ(q)
0
si n ≡ a mod q
sinon
On en déduit le résultat suivant.
Proposition III.5
1 X
L′
Λ(n)
=
−
(s, χ)
χ(a)
ns
ϕ(q) χ
L
n≡a [q]
X
On procède alors comme au paragraphe III.1.1 : on a cette fois
−
L′
ζ ′ (σ) X ln(p)
1
(σ, χ0 ) = −
−
=
+ O(1)
σ
L
ζ(σ)
p −1
σ−1
p|q
De plus, si χ 6= χ0 , L(σ, χ) converge en 1+ . Si on suppose ces limites non
nulles, on trouve alors :
1
ln(p)
=
+ O(1)
σ
σ−1
p≡a mod q p
X
ce qui assure que {p ∈ P, p ≡ a mod q} est infini. On doit ainsi prouver à
nouveau que pour χ 6= χ0 , L(1, χ) 6= 0.
III.2.2
Minoration de L(1, χ) quand χ2 6= χ0
Théorème III.3 Si σ > 1 et τ ∈ R,
L(σ, χ0 )3 |L(σ + iτ, χ)|4 |L(σ + 2iτ, χ2 )| > 1
Démonstration. Comme précédemment, on va utiliser la positivité du polynôme trigonométrique V (θ) = 3 + 4 cos(θ) + cos(2θ).
On remarque que pour tout caractère χ, il existe une application ψχ :
N → C (donnée par la forme générale des caractères, cf. page 7) tel que
χ = χ0 eψχ . On pose s = σ + iτ .
Pierron Théo
Page 19
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III. PREUVE ANALYTIQUE
On a encore
log(L(s, χ)) =
X X χ(p)ν
p∈P ν>0
psν
ν
ν
X X eψχ (p )−ντ ln(p)
eψχ (p )
=
=
νpνσ+νiτ
νpνσ
p∤q ν>0
p∤q ν>0
XX
De plus, pour tout z ∈ C tel que log(z) soit bien défini, ln |z| = ℜ(log(z)).
Ainsi,
X X cos(ψχ (pν ) − ντ ln(p))
ln |L(s, χ)| =
νpνσ
p∤q ν>0
Comme pour tout nombre entier n, ψχ2 (n) ≡ 2ψχ (n) mod 2π, on a :
2
3 ln L(σ, χ0 )+4 ln |L(σ+iτ, χ)|+ln |L(σ+2iτ, χ )| =
X X V (ψχ (pν ) − ντ
p∤q ν>0
ln(p))
νpνσ
D’où
L(σ, χ0 )3 |L(σ + iτ, χ)|4 |L(σ + 2iτ, χ2 )| > 1
Remarque III.2 Si χ2 = χ0 , |L(σ + 2iτ, χ2 )| diverge quand σ → 1+ donc on
ne pourra pas utiliser cette formule pour minorer L(1, χ).
Définition III.2 Pour un caractère de Dirichlet χ de module q fixé, on
X
χ(n). On notera de plus M2 la
définit Kχ la fonction qui à x ∈ R associe
n6x
fonction
qui à un caractère de Dirichlet χ de module q associe le nombre réel
Z
1 q
|Kχ (x)|2 dx.
q 0
Pour alléger les notations, on notera simplement K la fonction Kχ quand
il n’y a pas d’ambiguïté.
Remarque III.3 En utilisant la périodicité de χ, on peut montrer que
max |K(x)| 6 2q .
x>1
Proposition III.6 On pose L = ln(|τ | + q + 1).
Si χ 6= χ0 et 1 6 σ 6 2, pour tout k > 0, il existe ck tel que L(k) (s, χ) 6
ck Lk+1 .
Démonstration. Soit x > 2 et posons T = |τ | + 2. On a :
|L(k) (s, χ)| =
6
6
X (−1)k χ(n)(ln n)k ns
n>1
Z
k
∞ (ln t)k
X (ln n)
+
dK(t)
σ
s
t
x
n6x n
Z
∞ (ln t)k
X1
k
(ln x)
+
dK(t)
s
n
t
x
n6x
Pierron Théo
Page 20
ENS Ker Lann
>0
III. PREUVE ANALYTIQUE
On remarque que
assure :
Z
∞
x
X1
n6x n
= O(ln(x)). De plus, une intégration par parties
"
(ln t)k
(ln t)k
=
dK(t)
K(t)
ts
ts
6
1
xσ
1
x
et
x
|K(x)|(ln x)k
+
xσ
Z
+
Z
∞
x
∞
x
s ln(t) −
(ln t)k−1
ts+1
(ln t)k−1
k
K(t) dt
k + |s| ln t
|K(t)| dt
tσ+1
par x12 . De plus, |s| < T et k + |s| ln(t) =
Z ∞ (ln t)k
O(|s| ln(t)), on peut donc dominer par
dK(t)
s
x
t
On majore
par
#∞
1
xσ+1
Z ∞
|K(t)|(ln t)k
|K(x)|(ln x)k
+T
dt
x
t2
x
Comme pour tout t, |K(t)| 6 q2 , on obtient
Z ∞
|K(t)|(ln t)k
q(ln x)k qT Z ∞ (ln t)k
|K(x)|(ln x)k
+T
dt 6
+
dt
x
t2
2x
2 x
t2
x
Z
q(ln x)k qT (ln x)k ∞ 1
√ dt
√
+
6
2x
2 x
x t t
La dernière intégrale est un O( √1x ) donc :
qT (ln x)k
|L(k) (s, χ)| = O (ln x)k+1 +
x
!
On choisit alors x = qT et on obtient :
|L(k) (s, χ)| = O((ln qT )k+1) = O(max((ln q)k+1, (ln T )k+1 ))
= O((ln(q + T ))k+1) = O(Lk+1)
Remarque III.4 Dans le cas k = 1, on peut écrire |L′ (σ, χ)| 6 (1 + ln q)2
(pour χ 6= χ0 et σ > 1).
Théorème III.4 Il existe une constante absolue α > 0 tel que |L(s, χ)| >
αL−7 .
Démonstration. Soit η ∈]0, L1 ], s ∈ C et s0 = s + η.
Par inégalité des accroissements finis et par la proposition précédente, on
a |L(s, χ)−L(s0 , χ)| 6 ηC1L2 , ce qui assure que |L(s, χ)| > |L(s0 , χ)|−ηC1L.
Pierron Théo
Page 21
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
On a de plus L(σ + η + 2iτ, χ2 ) 6 C2 L puisque χ2 6= χ0 . Ainsi,
|L(s0 , χ)|4 >
>
=
1
L(σ + η, χ0
C2 Lζ(σ0 )3
3
)3 |L(σ
+ η + 2iτ, χ2 )|
1
Y
p|q
(1 − p−σ0 )3
C3 η
C2 L
puisque ζ(σ + η) < ζ(1 + η) ∼ η1 .
D’où, en utilisant
3
|L(s, χ)| >
En prenant η =
C5
,
L9
C4 η 4
− ηC1 L2
1
L4
on a
3
C4 C54 − C1 C5
|L(s, χ)| >
L7
En faisant tendre C5 → 0, le numérateur devient strictement positif et on
obtient bien le résultat attendu.
III.2.3
Minoration de L(1, χ) quand χ2 = χ0
Nous allons d’abord introduire quelques outils.
Définition III.3 Soit χ un caractère réel et σ > 1 un nombre réel. On
X χ(d)
définit la fonction multiplicative fσ (n) =
et on pose F (α, σ) =
dσ−1
d|n
X
fσ (n)e−αn pour α > 0 fixé.
n>0
Proposition III.7 Soit χ un caractère réel primitif. Si L(1, χ) 6 π4 , on a
M2 (χ) 6
q
7q
.
48
Démonstration. K est q-périodique et continue (constante) sur R\Z. Sa série
de Fourier converge donc en tout point de R \ Z : pour tout x ∈ R \ Z,
K(x) =
X
c
K(ν)e
2iπνx
q
ν∈Z
Pierron Théo
Page 22
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
On peut alors calculer les coefficients de Fourier de K, et en utilisant l’égalité
de Parseval, on obtient :
M2 (χ)2 6
X
q X χ(ν)2
(1 − χ(−1))2
2
qL(1,
χ)
+
4π 2
2π 2 ν>0 ν 2
2
c
|K(ν)|
=
ν∈Z
En majorant 1 − χ(−1) par 2 et χ(ν) par 1, on obtient
L(1, χ)2
1
M2 (χ) 6 q
+
π2
12
2
!
Compte tenu de la majoration de L(1, χ), on obtient bien la majoration
M2 (χ) 6
s
7q
48
Proposition III.8 Pour tout σ > 1, fσ (n) > 0 et fσ (n2 ) > n2(1−σ) .
Démonstration. Soit σ > 1. On a
fσ (p ) =
ν
X χ(d)
d|pν
=
dσ−1
χ(pj )
=
j(σ−1)
j=0 p
ν
X
1 + (−1)ν p(ν+1)(1−σ)
1 − (χ(p)p1−σ )ν+1
>
1 − χ(p)p1−σ
1 + p1−σ
car χ(p) ∈ {0, ±1}.
On trouve ainsi fσ (pν ) > 0 et fσ (p2ν ) > p2ν(1−σ) .
Comme fσ est multiplicative, on a alors, pour tout n, fσ (n) > 0 et
fσ (n2 ) > n2(1−σ) .
Le cas σ = 1 découle des propositions III.2 et III.3).
Proposition III.9 Si σ ∈ [1, 1 +
Pierron Théo
1
√
],
8 q
F (α, σ) >
Page 23
√
3
πασ− 2
2
−
1
.
3−2σ
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
Démonstration. On a
F (α, σ) >
>
X
n2(1−σ) e−αn
n>0
Z ∞
1
2
t2(1−σ) e−αt dt
3
= ασ− 2
=
>
=
>
Z
1
∞
2
u2(1−σ) e−u du
(u =
√
αt,
du =
√
α dt)
ασ− 2 Z ∞ 1 −σ −t
t 2 e dt
(t = u2 , dt = 2u du)
2
1
3
Z 1
ασ− 2
1
3
Γ
−σ −
t 2 −σ e−t dt
2
2
0
Z 1
σ− 32
1
α
3
Γ
−σ −
t 2 −σ dt
2
2
0
σ− 32
α
1
3
Γ
−σ −
2
2
3 − 2σ
√ σ− 3
2
√
πα
1
3
1
= π
−
car Γ
−σ >Γ
2
3 − 2σ
2
2
3
=
2
Théorème III.5 Si σ > 1, L(σ, χ) >
1
√
.
9 q
Réduction du problème. On peut supposer σ ∈ [1, 1 +
cas contraire, on sait que :
L(σ, χ) =
Y
p∈P
χ(p)
1− σ
p
1
√
].
8 q
En effet, dans le
!−1
)−1 = 1 > 1 − p1σ . Si χ(p) = 1, ce facteur vaut
Or si χ(p) = 0, (1 − χ(p)
pσ
1
> 1 > 1 − p1σ et si χ(p) = −1, on doit montrer que 1+1 1 > 1 − p1σ , ce
1− 1
pσ
qui est équivalent à p2σ > p2σ − 1. On aurait donc
L(σ, χ) >
Y
p∈P
1
1− σ
p
!
=
pσ
1
σ−1
1
>
> √
ζ(σ)
σ
9 q
ce qui est le résultat.
On peut aussi supposer L(1, χ) 6 π4 . Dans le cas contraire, par l’inégalité
des accroissements finis, on a
L(1, χ) − L(σ, χ) 6 |L(σ, χ) − L(1, χ)| 6 (σ − 1)(1 + ln q)2
On en conclut
L(σ, χ) >
π (1 + ln q)2
1
π
π 1
− (σ − 1)(1 + ln q)2 > −
> − > √
√
4
4
8 q
4 2
8 q
Pierron Théo
Page 24
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
Avant de passer à la démonstration, nous allons d’abord démontrer le
lemme suivant.
Lemme III.5.1
Pour tout nombre réel t ∈ [1, +∞[ et σ > 1, on a les inégalités : h(t) > 0,
α
h′ (t) 6 0, h(t) 6 21 et |h′ (t)| 6 σ−1
+ 12
où g et h désignent les fonctions
2t
g : t 7→
1
1
− t
et h : t 7→ t1−σ g(αt)
t e −1
Démonstration. Soit t ∈ [1, +∞[. Il est clair que h(t) > 0. Notons ensuite f
la fonction t 7→ t1−σ . f est décroissante positive. De plus, g est dérivable et
on a :
et
2 t
2
′
t − 4 sh
g (t) = 2 t
t (e − 1)2
2
Ainsi, g ′ (t) > 0 ⇔ t − 2 sh
|
{z
φ(t)
t
> 0 dès que t > 0. On a φ′ (t) = 1−ch( 2t ) 6 0
2}
donc φ 6 φ(0) = 0. Donc g est décroissante positive sur [1, +∞[. On a de
même :
3
!
2
t
t
t
3
g ′′ (t) =
−
ch
t 3 sh
(t sh( 2 ))
2
2
2
{z
|
ψ( 2t )
}
On a ψ(0) = 0 et ψ ′ (t) = 3 ch(t)(sh2 (t) − t2 ) − t3 sh(t).
3
4
t6
Or sh(t) > t + t6 > 1 donc sh2 (t) > t2 + t3 + 36
> t2 +
3(sh2 (t) − t2 ) > t4 . On obtient alors
t4
.
3
Ainsi,
ψ ′ (t) > t3 (t ch(t) − sh(t)) > 0
Donc ψ > ψ(0) = 0 et g ′′ est positive.
Comme h = f g, h est décroissante donc h′ 6 0. De plus, comme g est
décroissante, g 6 lim+ g(t) = 21 . Comme f (1) = 1, h 6 f (1)g 6 21 .
t→0
Enfin, |h′ (t)| 6 (σ − 1)t−σ g(αt) + αf (t)|g ′(αt)|. On majore alors f (t) par
1 et t−σ par 1t :
σ−1
|h′ (t)| 6
g(αt) + α|g ′(αt)|
t
g est décroissante positive et g ′ est croissante négative donc g(αt) 6 g(0) = 12
1
et |g ′(αt)| 6 |g ′ (0)| = 12
. On obtient donc
|h′ (t)| 6
Pierron Théo
σ−1
α
+
2t
12
Page 25
ENS Ker Lann
III. PREUVE ANALYTIQUE
Démonstration de la minoration. Soit α > 0 un paramètre fixé.
Par définition, on a
F (α, σ) =
X X χ(d)
m>0d>0 d
e−αmd =
σ−1
X
χ(d)
L(σ, χ) X
=
− χ(d)h(d)
σ−1 (e−αd − 1)
α
d>0 d
d>0
avec g : t 7→ 1t − et1−1 et h : t 7→ t1−σ g(αt).
Munis des inégalités du lemme précédent, nous pouvons majorer :
Z
∞
L(σ, χ)
F (α, σ) −
=−
h(t) dK(t)
α
Z 1∞
IP P
K(t)h′ (t) dt
=
=
Z
1
q+1
K(t)
1
Z
X
h′ (t + jq) dt
j>0
!
Z
1 ∞ ′
6
|K(t)| |h′ (t)| +
|h (r)| dr dt
q t
1
!
Z q+1
h(t)
′
− h (t) dt (h′ 6 0)
=
|K(t)|
q
1
q+1
s
M2 (χ) Z q+1
(h(t) − qh′ (t))2 dt
6 √
q
1
M2 (χ)
√
q
On a
Z
1
q+1
6
q
7
48
(proposition III.7). On a aussi
Z
q 2 (σ − 1)2 (αq + 6)2
+
dt
2t2
72
1
Z
(σ − 1)2 q 2 q+1 1
(αq + 6)2 q
6
dt
+
2
t2
72
1
2 2
(σ − 1) q
(αq + 6)2 q
6
+
2
72
2
q(αq + 6)
1
q
+
car σ 6 1 + √
6
128
72
8 q
(h(t) − qh′ (t))2 dt 6
q+1
En utilisant la proposition III.9, on obtient (avec λ = αq) :
q
λ 42(1 + (λ + 6)2 )
L(σ, χ) > αF (α, σ) −
√
144 q
>
Pierron Théo
1
2
s
πλ
q
λ
q
!σ−1
q
λ 42(1 + (λ + 6)2 )
λ
−
−
√
q(3 − 2σ)
144 q
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ENS Ker Lann
IV. DENSITÉ ANALYTIQUE
En prenant alors λ =
1
8
i.e. α =
1
,
8q
on trouve que
√
3 2π
42 · 39
1
1
−
L(σ, χ) q >
− √
>
32
1152
9
8 3−2
√
IV
Densité analytique
Définition IV.1 Soit A un ensemble de nombres premiers. On appelle densité analytique de A et on note d(A) la limite :
lim+
σ→1
1
X
1
1
) p∈A pσ
ln( σ−1
si elle existe.
Remarque IV.1 La densité d’une partie finie de P est nulle. Ainsi, un ensemble de densité non nulle est infini.
Théorème IV.1 La densité de P est 1. Ainsi, d est à valeurs dans [0, 1].
Démonstration. Soit σ un nombre réel supérieur à 1. On a
1
ln(ζ(σ)) = −
ln 1 − σ
p
p∈P
X
=
!
=
XX 1
1
+
σ
nσ
p∈P p
p∈P n>1 np
X
1
nσ
p∈P n>0 np
XX
La dernière somme est majorée par
X
1
1
=
<∞
nσ
σ
σ
p
p (p − 1)
p∈P
p∈P n>1
XX
On obtient ainsi :
1
1
∼ ln(ζ(σ)) ∼ ln
σ
p
σ−1
p∈P
X
pour σ → 1+ . D’où d(P) = 1.
Nous allons montrer que, pour tout couple d’entiers (a, q) premiers entre
1
eux, d({p ∈ P; p ≡ a mod q}) = ϕ(q)
. Cela nous indique que, pour un
entier q fixé, les nombres premiers se répartissent uniformément dans les
ϕ(q) classes possibles modulo q. Dans la suite de ce paragraphe, on fixe un
couple d’entiers premiers entre eux (a, q).
Pierron Théo
Page 27
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IV. DENSITÉ ANALYTIQUE
Définition IV.2 Pour tout caractère de Dirichlet de module q, on définit
X χ(p)
la fonction fχ : σ 7→
.
pσ
p∤q
1
).
Proposition IV.1 Quand σ → 1+ , fχ0 (σ) ∼ ln( σ−1
Démonstration. On a :
fχ0 (σ) =
X1
1
1
−
∼ ln
σ
σ
p
p
σ−1
p∈P
p|q
X
Proposition IV.2 Si χ 6= χ0 , fχ est bornée.
Démonstration. On a vu que
log(L(σ, χ)) =
X X χ(p)n
p∈P n>0
npnσ
On peut séparer la somme intérieure en n = 1 et n > 1 :
log(L(σ, χ)) =
X χ(p)
X X χ(p)n
χ(p) X X χ(p)n
+
=
f
(q)
+
+
χ
σ
nσ
nσ
pσ
p∈P p
p∈P n>1 np
p∈P n>1 np
p|q
X
La dernière somme est majorée par :
X X 1 χ(p) n
n pσ p∈P n>1
6
XX 1
X
X
1
1
1
6
=
6
<∞
nσ
nσ
σ (pσ − 1)
np
p
p
n(n
−
1)
n>1
n>1
n>1
p∈P
p∈P
p∈P
XX
Or L(1, χ) 6= 0 donc log(L(σ, χ)) est borné. Ainsi, fχ est bornée.
Il suffit maintenant d’appliquer la formule d’orthogonalité des caractères
X 1
pour trouver un équivalent de
:
pσ
p≡a [q]
X 1 X χ(a)χ(p)
1
=
pσ p∈P ϕ(q) χ
pσ
p≡a [q]
X
1 X
χ(a)fχ (σ)
ϕ(q) χ
1
=
fχ (σ) + O(1)
ϕ(q) 0
=
Donc
1
1
1
, ce qui est bien le résultat annoncé.
∼
ln
σ
p
ϕ(q)
σ−1
p≡a [q]
X
Remarque IV.2 On peut aussi déduire de ce résultat que d({p ∈ P, p ≡ a
mod q}) 6= 0, donc on a redémontré le théorème des nombres premiers en
progression arithmétique.
Pierron Théo
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V. PREUVE ALGÉBRIQUE
V
Preuve algébrique
Nous allons dénombrer les formes quadratiques primitives de discriminant
d fixé pour montrer que L(1, χ) 6= 0 pour χ réel de module q = |d|.
1
Proposition V.1 L(s, χ) =
s
m>0 m
module |d| est n 7→
d
n
X
d
m
!
car le seul caractère primitif de
(proposition II.10).
Proposition V.2 Soient m1 , . . . , mr premiers entre eux deux à deux. Le
nombre de solutions de (1) : f (x) ≡ 0 mod
de solutions de (Ei ) : f (x) ≡ 0 mod mi .
r
Y
mi est le produit des nombres
i=1
Démonstration. (1) est satisfaite si et seulement si les r équations E1 , . . . , Er
le sont. Donc si l’un des Ei n’a pas de solutions, (1) non plus.
De plus, si E1 , . . . , Er ont des solutions, le théorème chinois assure que
celles-ci correspondent chacune à une solution de (1).
Proposition V.3 Soient deux entiers ℓ > 0 et p ∤ n. Le nombre de solutions
de x2 ≡ n mod pℓ est donné par le tableau suivant :
n
impair
≡ 3 mod
≡ 1 mod
6≡ 1 mod
≡ 1 mod
N
4
4
8
8
p
2
2
2
2
2
>2
ℓ
1
2
2
>2
>2
N
solutions
1
0
2
0
4
1 + ( np )
Démonstration.
• Les trois premiers résultats sont clairs.
• Si p = 2, ℓ > 2, 2 ∤ n et n 6≡ 1 mod 8 alors on suppose qu’il existe x tel
que x2 ≡ n mod 2ℓ . x est impair et on a x2 ≡ n mod 8 donc x2 6≡ 1
mod 8. Or, pour tout y ∈ {1, 3, 5, 7}, y 2 ≡ 1 mod 8.
• Supposons p = 2, ℓ > 2, 2 ∤ n et n ≡ 1 mod 8. On peut prendre
n ∈ J1, 2ℓ − 1K.
De plus, pour tout x impair de J1, 2ℓ − 1K, il existe m ≡ 1 mod 8 tel
que x2 = m mod 2ℓ .
Chacun des 2ℓ−3 nombres m possibles apparaît au plus 4 fois. En effet,
0
0
si x2 ≡ x20 mod 2ℓ et 2 ∤ x0 , x ± x0 est pair donc 2ℓ−2 | x+x
× x−x
.
2
2
x+x0
x−x0
Comme 2 + 2 = x est impair, 2 ne divise pas les deux termes,
donc x ≡ ±x0 mod 2ℓ−1 . On a donc x ∈ {±x0 , ±x0 + 2ℓ−1 }.
Pierron Théo
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V. PREUVE ALGÉBRIQUE
On a donc 2ℓ−1 = 4 × 2ℓ−3 valeurs de x possibles pour 2ℓ−3 valeurs de
m. Or chaque m correspond à au plus 4 valeurs de x. Donc pour tout
x impair, il existe exactement quatre valeurs de m tels que x2 ≡ m
mod 2ℓ .
• On suppose p > 2 et ( np ) = −1. n n’est pas un carré modulo p donc pas
modulo pℓ non plus. On a donc 0 = 1 + ( np ) solutions.
• On suppose p > 2 et ( np ) = 1. On va procéder comme précédemment.
On peut encore prendre n ∈ J1, pℓ − 1K. De plus, dans cet intervalle, il
y a ϕ(pℓ ) = pℓ−1 (p − 1) nombres que p ne divise pas. Pour chacun de
ces nombres, il existe m tel que ( mp ) = 1 et x2 ≡ m mod pℓ .
ℓ
On a ϕ(p2 ) valeurs de m possibles et chacune compte au plus 2 fois. En
effet, si x2 ≡ x20 mod pℓ et p ∤ x0 , on a pℓ |(x + x0 )(x − x0 ) mais p ne
divise pas à la fois x + x0 et x − x0 (leur somme est 2x) donc x ≡ ±x0
mod pℓ , ce qui donne au plus deux valeurs de m.
Ainsi, on trouve qu’il y a exactement deux solutions, i.e. 1 + ( np ).
Définition V.1 On définit la fonction de Möbius µ : N → {0, ±1} par
µ(n) := 0 si n a un facteur carré, et µ(n) := (−1)m avec m le nombre de
diviseurs premiers de n distincts.
Proposition V.4 Si k > 0 et d ∧ k = 1, le nombre de solutions de x2 ≡ d
mod 4k est
!
X
d
2
2 µ(f )
f
f |k
Démonstration.
• Si d est impair, comme c’est un discriminant, d ≡ 1 mod 4. Ainsi
d ∧ 4k = 1 et on va pouvoir appliquer la proposition V.2. On résout
alors x2 ≡ d mod pℓ pour tout pℓ appartenant à la décomposition en
facteurs premiers de 4k. Comme 4 | 4k, si p = 2, ℓ > 2. Si 2 | k, le
nombre de solutions est :
d
2× 1+
2
!!
×
Y
p>2
d
1+
p
!!
p|k
=2
Y
p|k
d
1+
p
!!
Et si 2 ∤ k, le nombre de solutions est
2×
Y
p>2
d
1+
p
!!
=2
p|k
Pierron Théo
Page 30
Y
p|k
d
1+
p
!!
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V. PREUVE ALGÉBRIQUE
Par une preuve analogue à celle du développement eulérien de L (proposition II.9), on trouve qu’il y a, in fine :
2
Y
p|k
d
1+
p
!!
=2
X
f |k
d
f
!
où f parcourt les diviseurs sans facteur carré de k, ce qui correspond
bien à la formule annoncée puisque µ2 est l’indicatrice des nombres sans
facteur carré.
• Si d est pair, alors on a de même d ≡ 0 mod 4. Or x2 ≡ 0 mod 4 a
deux solutions et x2 ≡ d mod pℓ a 1 + ( pd ) solutions. On trouve encore
!
X
2 d
2 µ(f )
solutions.
k
f |k
Remarque V.1 !Le nombre de solutions de x2 ≡ d mod 4k avec 0 6 x < 2k
X
d
. En effet, si x est solution alors x + 2k l’est aussi, ce qui
est
µ(f )2
f
f |k
assure qu’il y a autant de solutions dans J0, 2k − 1K que dans J2k, 4k − 1K.
Proposition V.5 Si d < 0 et si k est représenté par {a, b, c} alors il existe
w couples (x, y) tels que k = ax2 + bxy + cy 2 , où on a posé :
w :=



2



4
6
si d < −4
si d = −4
si d = −3
Démonstration. Il suffit de dénombrer les solutions de l’équation de PellFermat t2 − du2 = 4 d’inconnues
(t, u). En effet, la transformation de matrice
!
t−bu
−cu
2
de passage
laisse invariante la forme {a, b, c}.
au t+bu
2
Réciproquement,
prenons une application laissant invariante {a, b, c} de
!
r s
matrice
. On a alors
m n
(
a = ar 2 + brm + cm2
b = 2ars + b(1 + 2sm) + 2cmn
Ainsi, ars + bsm + cmn = 0. On trouve ensuite :
as = asr 2 + brsm + cm2 s
= asr 2 + cm2 s − ar 2 s − crmn
= cm(sm − rn) = −cm
Pierron Théo
Page 31
ENS Ker Lann
V. PREUVE ALGÉBRIQUE
De même, an = ar + bm. Ainsi, a | cm et a | bm. Comme a ∧ b = 1 = a ∧ c,
a | m. Il existe donc u tel que m = au. Alors s = −cu et n − r = bu.
Or
(n + r)2 = (n − r)2 + 4nr = b2 u2 + 4(1 + sm) = b2 u2 + 4(1 − acu2 ) = du2 + 4
En posant t = n+r, on a bien la forme de matrice annoncée et t2 −du2 = 4.
w est donc le nombre de solutions de l’équation de Pell-Fermat t2 − du2 =
4, ce qui conduit à la formule annoncée.
Remarque V.2 Si d > 0, il y a une infinité de solutions à l’équation de
Pell-Fermat (dont une solution fondamentale est ε). On considère alors les
représentations dites primaires
: les représentations
par les formes {a, b, c}
√
√
−b+ d
−b− d
′
telles que, avec θ = 2a et θ = 2a , on ait
x − θ′ y
16
< ε2 et x − θy > 0
x − θy
On peut ainsi prendre la convention w = 1 si d > 0 et si on dénombre les
représentations primaires.
Pour tout n, il y a qu’un nombre fini de représentations primaires de n.
Ce nombre est noté R(n).
Remarque V.3 Si k est représenté primairement par ax2 + bxy + cy 2 avec
x ∧ y = g 6= 1, alors gk2 est représenté primairement et proprement par ( xg , yg ).
Définition V.2 On appelle système représentatif de classes primitives de
formes un ensemble de formes où on a choisi une forme primitive dans chaque
classe (avec a > 0 si d < 0).
Proposition V.6 Soit k > 0 et k ∧ d = 1 alors R(k) = w
X
n|k
!
d
.
n
Démonstration. Soit ℓ tel que!ℓ2 ≡ d mod 4k et 0 6 ℓ < 2k. Par la reX
d
choix.
marque V.1, on a
µ(f )2
f
f |k
On remarque que kx2 + ℓxy + my 2 (avec m tel que ℓ2 − 4km = d) est
équivalente à une unique forme du système représentatif de k. Par la proposition V.5, il y a alors w représentations
(propres) de k par cette forme.
!
X
d
Il y a donc w µ(f )2
représentations propres de k.
f
f |k
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Page 32
ENS Ker Lann
V. PREUVE ALGÉBRIQUE
k
g2
Par la remarque V.3, R(k) vaut la somme des représentations propres de
pour tout g tel que g 2 | k. Le nombre recherché est alors
X
g 2 |k
w
X
f | k2
g
µ(f )
2
d
f
!
=
X
g 2 |k
w
X
µ(f )
f | k2
g
2
d
f g2
!
=w
X
n|k
d
n
!
en utilisant successivement que ( fd ) = ( fd )( dg )2 = ( f dg2 ) et que tout entier
s’écrit f g 2 avec f sans facteur carré.
Proposition V.7 Soit F une forme quadratique.
Si x et y parcourent toutes les classes modulo |d| alors il y a exactement
|d|ϕ(|d|) valeurs de F (x, y) premières à d.
Démonstration. Par la proposition V.2, il suffit de montrer que si pℓ |d, et
ℓ > 0, et si x, y parcourent toutes les classes modulo pℓ , alors p ∤ F (x, y)
exactement pℓ ϕ(pℓ ) fois.
Soit un entier ℓ > 0 et p un nombre premier tel que pℓ |d. Comme a∧c = 1,
on ne peut pas avoir p|a et p|c simultanément. Quitte à échanger x et y, on
peut supposer que p ∤ a.
Si p > 2, comme p ∧ 4a = 1, on peut regarder quand p ∤ 4aF . Or 4aF =
(2ax + by)2 − dy 2 donc, comme p|d, on regarde quand
2ax + by 6≡ 0 mod p
Comme p ∤ 2a, pour chacune des pℓ valeurs de y, tous les p − 1 classes
de x (celles différentes de −b(2a)−1 y) vérifient cette condition. On a donc
pℓ−1 (p − 1) = ϕ(pℓ ) valeurs de (x, y) qui satisfont cette condition.
Si p = 2, alors 2|d et 2|b. La condition F (x, y) ≡ 1 mod 2 s’écrit donc
x + cy ≡ 1 mod 2.
Pour chacun des 2ℓ choix de y possibles, x ne peut appartenir qu’à une
classe sur les deux possibles modulo 2 donc on a 2ℓ−1 = ϕ(2ℓ ) choix possibles
pour x.
Théorème V.1 Si d < 0 alors L(1, χ) =
ln(ε)h(d)
√
.
w d
Lemme V.1.1
On a
2πh(d)
√
w −d
et si d > 0 alors L(1, χ) =
N
wϕ(|d|)
1 X
lim
R(n) =
L(1, χ)
N →+∞ N
|d|
n=1
n∧d=1
Pierron Théo
Page 33
ENS Ker Lann
V. PREUVE ALGÉBRIQUE
Démonstration. Par la proposition V.6, on a
1 X
R(n) =
w n6N
X
m1 m2 6N
m1 m2 ∧d=1
n∧d=1
X
=
On a
X
1=
N
m2 6 m
1
m2 ∧d=1
d
m1
d
m1
√
m1 6 N
!
!
X
m1 6 N
√
X
X
√ √
N
m2 6 N N 6m1 6 m
m2 ∧d=1
d
m1
!
2
N ϕ(|d|)
·
+ O(ϕ(|d|)) donc la première somme vaut
m1
|d|
Nϕ(|d|) X 1
√ m1
|d|
De plus,
1+
N
m2 6 m
1
m2 ∧d=1
X
d
m1
N
N 6m1 6 m
!
d
m1
!
√
+ O( N)
√
est bornée donc la seconde somme est en O( N).
2
1
Par le critère d’Abel (proposition II.1),
√ m
m> N
X
d
m
!
!
1
=O √
.
N
N
wϕ(|d|)
1 X
R(n) =
L(1, χ).
N →+∞ N
|d|
n=1
Ainsi, lim
n∧d=1
Démonstration du théorème dans le cas d < 0. On prend un ensemble représentatif H. On a
X
R(n) =
R(n, f )
f ∈H
avec R(n, f ) le nombre de représentations de n par f . On fixe f = {a, b, c}
de discriminant d.
La somme
N
X
R(n, f ) est le nombre de couples (x, y) tels que 0 < ax2 +
n=1
n∧d=1
bxy + cy 2 6 N et ax2 + bxy + cy 2 ∧ d = 1.
La première condition indique que (x, y) sont à l’intérieur d’une ellipse
2πN
. Quand N tend vers +∞, le nombre de points qu’elle contient est
d’aire √
−d
2πN
équivalent à |d|12 × √
.
|d|
La deuxième assure qu’il y a ϕ(|d|)|d| classes possibles (proposition V.7)
pour x et y. Ainsi,
N
1 X
2πϕ(|d|)
q
R(n, f ) =
N →+∞ N
|d| |d|
n=1
lim
n∧d=1
Pierron Théo
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V. PREUVE ALGÉBRIQUE
Comme ce nombre est indépendant de f , on a
N
1 X
2πh(d)ϕ(|d|)
q
R(n) =
N →+∞ N
|d| |d|
n=1
lim
n∧d=1
Par unicité de la limite, on a le résultat.
Démonstration du théorème dans le cas d > 0. En suivant la même démarche,
on est amené à dénombrer les couples (x, y)√ tels que ax2√+ bxy + cy 2 6 N,
′y
d
d
x − θy > 0, 1 6 x−θ
< ε2 avec θ = −b+
, θ′ = −b−
et ε la solution
x−θy
2a
2a
2
2
fondamentale de t − du = 4.
On effectue le changement de variable ξ = x − θy et η = x − θ′ y. Dans le
repère (ξ, η), le secteur recherché est donné par ξη 6 Na , ξ > 0 et ξ 6 η < ε2 ξ.
C’est donc le secteur délimité par deux droites et une hyperbole :
η
ξ
L’aire de ce domaine est, dans le système de coordonnées (ξ, η) :
!
Z 1√N
Z √N
N
N
ε
a
a
2
− ξ dξ =
ln(ε)
(ε ξ − ξ) dξ + 1 √ N
aξ
a
0
ε
a
En multipliant par le jacobien √ad , l’aire de ce domaine est √Nd ln(ε) dans
le repère associé aux coordonnées (x, y).
Comme précédemment, le nombre de points à coordonnées entières qui
appartiennent à ce domaine est équivalent à d2N√d ln(ε) quand N tend vers
+∞.
De plus le choix des classes de x et y ajoute le facteur multiplicatif dϕ(d)
√ ln(ε). Ce qui assure
(proposition V.7), ce qui nous donne, in fine, Ndϕ(d)
d
N
ϕ(d)
1 X
R(n, f ) = √ ln(ε)
N →+∞ N
d d
n=1
lim
n∧d=1
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V. PREUVE ALGÉBRIQUE
Ce nombre est encore indépendant de f , donc
N
1 X
h(d)ϕ(d)
√
lim
R(n) =
ln(ε)
N →+∞ N
d d
n=1
n∧d=1
Par unicité de la limite, on obtient bien L(1, χ) =
Corollaire V.1 Si d < 0, on a L(1, χ) >
√
π
√
3 q
h(d)√
ln(ε)
.
w d
et si d > 0, L(1, χ) >
ln(α+β q)
√
6 q
2
2
où α et β sont les plus petits entiers strictement positifs tels que
α − dβ = 4.
Démonstration. Il suffit de remarquer que w > 6, que ε est la solution fondamentale de x2 − dy 2 = 4 et que |d| = q.
Ainsi, on trouve bien L(1, χ) > 0.
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Bibliographie
[1] H. Davenport and H.L. Montgomery. Multiplicative number theory, volume 74. Springer Verlag, 2000.
[2] E. Landau. Vorlesungen über Zahlentheorie. 1974.
[3] G. Tenenbaum and M.M. France. Les nombres premiers : Entre l’ordre
et le chaos. Dunod, 2011.
[4] Gérald Tenenbaum. Introduction à la théorie analytique et probabiliste
des nombres. Belin, 2008.
Remerciements
Je remercie tout le personnel de l’Institut Élie Cartan pour leur accueil.
Merci à Gérald Tenenbaum et à toute son équipe de m’avoir accordé du
temps et d’avoir patiemment corrigé mes erreurs.
Merci à Lauriane Huguet et Cyril Lacoste pour leurs remarques pertinentes sur ce document.
Merci enfin à mes collègues de bureau pour l’ambiance et la bonne humeur
qu’ils ont installées.
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