Pr M. Dematteis (MD, PhD) Addictologie, CHU de Grenoble INSERM U1042, UJF, Faculté de Médecine Le problème alcool : un problème majeur et complexe Un problème de santé publique, un problème hétérogène - 45000 morts/an, soit > 120 morts/jour - 3° cause de mortalité, 50% avant 65 ans, 50% mortalité directe - 4° cause de démence du sujet jeune (< 65 ans) > 1,5 Mo > 3 Mo 9% des jeunes ! 10 ivresses, 12 derniers mois Le problème alcool : un paradoxe ! Beaucoup de sujets malades # 5 Mo Peu de sujets traités # 150 000 dont 30 000 par le baclofène ! Une offre thérapeutique insuffisante et pas satisfaisante : - 1 stratégie thérapeutique : sevrage - abstinence : 3 médicaments + accompagnement - 50% de rechute à court terme Un constat : l'abstinence n'est pas une solution chez certains patients - vécu comme une contrainte : pire / meilleur - non envisageable, dans la durée - capacité de projection, cognition (flexibilité) Proposer de nouveaux objectifs thérapeutiques, - de nouvelles prises en charge adaptées - de nouveaux critères de jugement Le problème alcool : Quelle offre de soins ? Saitz, N Engl J Med 2005 Le problème alcool : une question de quantité Coronaropathie HTA Risques relatifs de cirrhose du foie selon le niveau de consommation d’alcool. AVC hémorragique Le problème alcool : une question de quantité Risques relatifs pour les pathologies associées au facteur de risque alcool Le problème alcool : une question de quantité Risques relatifs de suicide selon la quantité quotidienne d’alcool consommée. Risque de survenue d’au moins une conséquence sociale négative en fonction de la consommation annuelle d’alcool Le problème alcool : des seuils à risque WHO - Risk levels of alcohol consumption Le problème alcool : des seuils à risque Latino-Martel et al, CMAJ 2011 Le problème alcool : changement de paradigme Changement de paradigme / traitements existants Disulfirame Acamprosate Naltrexone prévention des rechutes systématique maintien de l'abstinence systématique maintien de l'abstinence systématique Baclofène maintien de l'abstinence réduire la consommation systématique / à la demande Abstinence ou Réduction des risques Nalmefène réduire la consommation prise à la demande Le problème alcool : changement de paradigme Changement de paradigme / traitements existants Disulfirame Acamprosate Naltrexone prévention des rechutes systématique maintien de l'abstinence systématique maintien de l'abstinence systématique Baclofène maintien de l'abstinence réduire la consommation systématique / à la demande Abstinence ou Réduction des risques Nalmefène réduire la consommation prise à la demande Le problème alcool : réduire la quantité consommée Sommes-nous prêts ? Acceptabilité de la consommation contrôlée Acceptabilité et pratique clinique Luquiens et al. Alcohol Alcohol 2011. Le problème alcool : réduire la quantité consommée Sommes-nous prêts ? - malades : OUI, mais faut-il la proposer à tout le monde ? - soignants : membres SFA, 49% croyants, 62% pratiquants Conférence de consensus ANAES-SFA 1999, 2001 - Objectifs, indications et modalités du sevrage du patient alcoolodépendant - Modalités de l’accompagnement du sujet alcoolodépendant après un sevrage NIAAA - 2007, 2010 "it’s best to determine individual goals with each patient. Some patients may not be willing to endorse abstinence as a goal, especially at first. If a patient with alcohol dependence agrees to reduce drinking substantially, it’s best to engage him or her in that goal while continuing to note that abstinence remains the optimal outcome” Le problème alcool : réduire la quantité consommée EMA - 2010 "In case an alcohol‐dependent patient is not able or willing to become abstinent immediately, a clinically significantly reduced alcohol intake with subsequent harm reduction is also a valid, although only intermediate, treatment goal, since it is recognised that there is a clear medical need in these patients as well." National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE) - 2011 "For all people who misuse alcohol, offer interventions to promote abstinence or moderate drinking as appropriate For harmful drinking or mild dependence, without significant comorbidity, and if there is adequate social support, consider a moderate level of drinking as the goal of treatment." Quels objectifs ? Quels critères de jugement ? Les critères : - selon les objectifs à atteindre - selon les patients - bas seuil : diminuer les risques, les conséquences - moyen seuil : consommation "contrôlée, maîtrisée" - haut seuil : abstinence Harm reduction services as a point-of-entry to and source of end-of-life care and support for homeless and marginally housed persons who use alcohol and/or illicit drugs: a qualitative analysis. McNeil et al. BMC Public Health 2012. Quels objectifs ? Quels critères de jugement ? Luquiens et al. Alcohol Alcohol 2011. Luquiens et al. Alcohol Alcohol 2011. Après sevrage : Quels critères de jugement principal ? Rechute - abstinence - consommation : - quantitatif : - nombre de grammes par jour - nombre de verres / durée (ex HDD) - nombre de jours d'abstinence - qualitatif : modalités de consommation Réduction : Quels critères de jugement principal ? Modération significative de la consommation sans sevrage préalable - modification / état basal - consommation : - quantité d'alcool consommée (g/jour) - nombre de jours (Heavy Drinking days) ! ! - recherche de répondeurs : - % de sujets avec consommation diminuée de 50, 70, 90% - % de sujets abstinents - % de sujets à risque élevé qui évolue vers : ! ! ! un risque moyen ! ! ! un risque faible Critères de jugement secondaires Situation de recherche d'abstinence - délai / rechute - impression clinique globale ; qualité de vie - évolution des marqueurs hépatiques - compliance des patients au traitement ; à l'étude - caractérisation de la consommation si rechute / état initial - quantité moyenne en g/j - nombre de jours avec consommation, nombre d'HDD - nombre de jours d'abstinence - évolution de l'état physique, psychique, cognitif - impact / vie sociale, familiale, professionnelle - évolution de la sévérité de la dépendance - évolution du craving : OCDS Critères de jugement secondaires Situation de réduction des risques - délai / rechute - impression clinique globale ; qualité de vie - évolution des marqueurs hépatiques - compliance des patients au traitement ; à l'étude - caractérisation de la consommation si rechute / état initial - quantité moyenne en g/j - nombre de jours avec consommation, nombre d'HDD - nombre de jours d'abstinence - évolution de l'état physique, psychique, cognitif - impact / vie sociale, familiale, professionnelle Qualité de vie - évolution de la sévérité de la dépendance Sommeil - évolution du craving : OCDS ETIAM (échelle temporelle d'intensité de l'appétence moyenne) - Différentes échelles selon l'Addiction => caractérisation, quantification - intérêt diagnostique - intérêt pronostique - intérêt thérapeutique Critères de jugement secondaires Situation de réduction des risques - délai / rechute - impression clinique globale ; qualité de vie - évolution des marqueurs hépatiques - compliance des patients au traitement ; à l'étude - caractérisation de la consommation si rechute / état initial - quantité moyenne en g/j - nombre de jours avec consommation, nombre d'HDD - nombre de jours d'abstinence - évolution de l'état physique, psychique, cognitif - impact / vie sociale, familiale, professionnelle - évolution de la sévérité de la dépendance - évolution du craving : OCDS - maintien dans la durée des modifications = concept de consommation contrôlée! Evolution des critères de jugement : une révolution ? - paramètres évalués dans les études précédentes (acamprosate, naltrexone...) - implémentation d'une connaissance qui s'est constituée au fil des années de prise en charge avec les médicaments les plus anciens Peut-on envisager cette approche avec les anciennes molécules ? - disulfiram : effet antabuse - Acamprosate - Naltrexone Harm reduction approaches to alcohol use: Health promotion, prevention, and treatment. Marlatt. Addictive Behaviors 2002. Réduire la consommation : quel bénéfice ? Une partie des dommages immédiatement réversible Tous les risques immédiats sont complètement éliminés si l’alcool est supprimé (Toumbourow et al., 2004). Les maladies chroniques dépendent de la durée d’exposition - risque diminué mais pas complètement éliminé par suppression de l’alcool. - réduction de la consommation en population générale => baisse rapide du taux de maladies chroniques (mort par cirrhoses, dépression). Quid de la diminution ??? Patients Santé publique Quels points de vue ? Toute réduction de consommation est bonne à prendre ! Réduire la consommation : quel bénéfice ? Une partie des dommages immédiatement réversible Tous les risques immédiats sont complètement éliminés si l’alcool est supprimé (Toumbourow et al., 2004). Les maladies chroniques dépendent de la durée d’exposition - risque diminué mais pas complètement éliminé par suppression de l’alcool. - réduction de la consommation en population générale => baisse rapide du taux de maladies chroniques (mort par cirrhoses, dépression). Mortalité par cirrhose en France entre 1939 et 1945 Fillmore. J Stud alcohol 2002 Réduire la consommation : quel bénéfice ? Une partie des dommages immédiatement réversible Tous les risques immédiats sont complètement éliminés si l’alcool est supprimé (Toumbourow et al., 2004). Les maladies chroniques dépendent de la durée d’exposition - risque diminué mais pas complètement éliminé par suppression de l’alcool. - réduction de la consommation en population générale => baisse rapide du taux de maladies chroniques (mort par cirrhoses, dépression). Réduction d'1 litre d'alcool pur / an / individu Anderson & Baumberg (2006) Alcohol in Europe: A public health perspective Pertinence de cette approche ? Histoire de l'HTA - prévalence et chronicité - 1 milliard de personnes, > 14 millions de français, 50% sans ttt - 15-30% des patients alcoolodépendants - 30 ans de recherche clinique fructueuse, et toujours des questions... 1ère question : intérêt de faire baisser la PA ? => OUI (AVC), 17 essais de 1965 à 1992, # 50000 patients 2ème question : quel traitement de l'HTA ? - un traitement versus un autre ? - essais de grande taille, problème de puissance statistique - interprétation sur critères secondaires, restriction aux patients à haut risque - 46 essais comparatifs sur 20 ans, # 230 000 patients => les différents traitements sont équivalents, l'important est de baisser la TA 3ème question : baisser la PA de combien et chez qui ? => OUI chez les sujets âgés, patients à haut risque... mais les autres ? En Conclusion ! Les troubles liés à l'utilisation de l'alcool : une entité clinique hétérogène ! Les malades eux-mêmes sont hétérogènes : - objectifs thérapeutiques - leur capacité à les atteindre ! Nécessité de proposer de nouvelles modalités de prise en charge / dynamique des patients ! Adapter les critères de jugement