LES TOXI - INFECTIONS ALIMENTAIRES

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LES TOXI - INFECTIONS
ALIMENTAIRES
INFORMATIONS
Pré-requis :
Durée de l'item :
Auteur(s) : Pr. N. MARTY (mail : )
Objectifs :
I – Introduction
Les intoxications alimentaires sont fréquentes y compris dans les pays occidentaux.
Dans les pays en voie de développement, elles demeurent un gros problème de santé
publique. A côté des causes infectieuses [ Précision : toxi-infections proprement dites ] aux quelles nous
nous limiterons, il existe des causes allergiques par ingestion d’allergènes ou produits
chimiques [ Précision : histamine, métaux lourds ] contenus dans les aliments.
La définition des toxi-infections alimentaires [ Précision : TIA ] est la suivante : infections
causées par l’ingestion d’aliments contaminés par certains agents infectieux ou par leurs
toxines. Dans certains cas, la pathologie n’est pas due à la prolifération d’un
microorganisme dans l’aliment mais à l’ingestion d’une toxine sécrétée par la bactérie et
préformée dans l’aliment avant son ingestion ; on parle alors d’intoxination.
Dans l’alimentation, plusieurs produits peuvent être eau et aliments divers [ Précision : eau
et aliments divers ] et différents facteurs de risque peuvent y être rattachés. La contamination
peut avoir eu lieu dès la production, ou lors de la préparation ou souvent lors d’une
mauvaise conservation. En général, les règles d’hygiène n’ont pas été respectées.
A chaque microorganisme se rattachent à la fois une symptomatologie plus ou moins
typique et une origine alimentaire préférentielle.
Il peut s’agir de cas Infobulleindividuels ou groupés [ Précision : famille, cantine, restaurant ] : ce
sont alors des toxi-infections alimentaires collectives [ Précision : TIAC ] . Dans ce dernier
cas, la conduite à tenir est précise.
II – Risques liés à la consommation de l’eau et des aliments
1. L’eau
1.1. écologie
Aujourd’hui, en raison de l’augmentation des besoins, l’eau destinée à l’usage alimentaire
provient autant des eaux superficielles que des eaux souterraines, ce qui augmente les
risques de pollution microbienne et nécessite des traitements complexes et coûteux. En
effet, les eaux usées d’origine diverse [ Précision : domestique, industrielle ] ont une microflore
caractéristique en quantité et qualité. Par exemple, une eau usée d’origine domestique
contient environ 107 UFC / ml de bactéries fécales et 105 à 106 UFC / ml d’Aeromonas. Une
eau usée hospitalière n’est pas plus polluée qu’une eau usée urbaine à l’exception de la
présence de P. aeruginosa [ Précision : dix fois plus ] et de Staphylocoques dorés [ Précision : absents
dans la seconde ] . Par contre, sa charge en Salmonella est trois fois moins importante. Les
systèmes d’épuration des eaux usées et les contrôles microbiologiques effectués sur les
sources d’eau pour usage alimentaire [ Précision : souterraines et de surface, lacs, rivières, … ] préviennent
normalement toute présence de microorganisme pathogène dans l’eau d’alimentation.
Cependant, des contaminations fécales peuvent se présenter à la source ou à un endroit
quelconque du système de distribution de l’eau. Elles peuvent aussi survenir
accidentellement dans le produit fini à la suite d’un traitement et d’une désinfection
insuffisante. Dans ces conditions les consommateurs vont ingérer une certaine quantité de
bactéries, de virus ou de parasites.
La liste des microorganismes pathogènes que l’on peut rencontrer dans les eaux
d’alimentation est longue. Nous nous limiterons à citer les plus courants :
- parmi les bactéries :
on distingue celles qui ont été responsables dans le passé de grands fléaux épidémiques ou
pandémiques comme les Salmonella [ Précision : fièvres typhoïdes et paratyphoïdes ] , les Shigella [ Précision
: dysenterie bacillaire ] et Vibrio cholerae [ Précision : choléra ] . Leur disparition dans les eaux traitées
et désinfectées distribuées laisse la place à des agents responsables de gastro-entérites ou
de diarrhées banales comme certaines Salmonella mineures, certaines Shigella, des Vibrio
autres que cholerae, des Escherichia coli [ Précision : EPEC, ETEC ] , Yersinia enterocolitica,
Campylobacter jejuni/coli. D’autres bactéries dites opportunistes peuvent être responsables,
comme Pseudomonas aeruginosa ou Aeromonas, de manifestations digestives chez des
malades fragilisés ou immuno-déprimés.
- parmi les virus :
leur nombre dans les eaux s’est considérablement accru [ Précision : plus d’une centaine de types
différents excrétés dans les selles d’hommes ou d’animaux ] ces dernières années, en raison, en partie, de leur
résistance aux agents de stérilisation. Parmi eux, le virus de l’hépatite A est le plus résistant
et pose le problème le plus aigu. A côté, on trouve des virus responsables de gastroentérites ou de diarrhées comme les rotavirus et les adenovirus. Egalement peuvent être
présents des Entérovirus [ Précision : polio, coxsackie ] .
- parmi les parasites :
un parasite intestinal responsable de dysenterie amibienne [ Précision : Entamoeba histolytica ] sévit
surtout dans les pays en voie de développement. Le rôle de Giardia lamblia responsable de
diarrhée prolongée pourrait être prépondérant dans les maladies hydriques. Le risque dû
aux Cryptosporidium dans l’eau est surtout évoqué pour les malades immuno-déprimés [
Précision : Sida ] .
Les helminthes qui pourraient contaminer les eaux d’alimentation sont nombreux. Certains
sont véhiculés par l’ingestion d’un hôte intermédiaire et d’autres sont transmis par
l’intermédiaires des œufs ou des kystes infectants [ Précision : ascaridiose, oxyurose, anguillulose,
echinococcose, distomatose,.. ] .
La survie de ces microorganismes dans l’eau est variable : les plus résistants sont les
protozoaires sous formes kystiques [ Précision : Giardia ] , puis les bactéries [ Précision : Yersinia ] ,
quant aux virus ils ne peuvent pas se multiplier et ont tendance à disparaître sous l’effet de
facteurs physico-chimiques et biologiques.
Les contrôles microbiologiques de l’eau alimentaire [ Précision : de distribution par le réseau d’adduction
public ou embouteillée ] s’attachent à une numération de la flore totale et à la mise en évidence
avec numération des principaux contaminants fécaux, pathogènes ou commensaux, selon
les normes de potabilité.
1.2. transmission hydrique
Dans le cas d’infection d’origine hydrique, l’agent responsable qui a contaminé l’eau
provient d’individus malades [ Précision : en incubation, en cours de maladie ou en convalescence ] , de porteurs
sains ou d’animaux que l’on appelle les réservoirs de germes. Si ces microorganismes
potentiellement pathogènes conservent dans l’eau leur viabilité et leurs propriétés de
pathogénicité et si leur nombre est suffisant [ Précision : dose infectieuse ] l’individu réceptif
pourra faire la maladie en absorbant l’eau contaminée.
Les agents contaminateurs proviennent habituellement du tube digestif de l’homme ou
de l’animal et sont éliminés principalement par les matières fécales, éventuellement par
les urines. A titre d’exemple, un malade atteint de choléra excrête plusieurs litres de selles
liquides par jour contenant 106 à 108 vibrions / ml. Les porteurs sains peuvent éliminer
toute leur vie des quantités de l’ordre de 107 Salmonella / g de selles.
La plupart de ces infections sont des anthropozoonoses, sévissant aussi bien chez
l’homme que l’animal. De nombreux animaux domestiques [ Précision : bœufs, porcs, chevaux ] sont
porteurs de Salmonella ; il en est de même des animaux de basse cour [ Précision : poule, canard,
pigeon ] , de rongeurs sauvages, d’animaux aquatiques. Yersinia enterocolitica est largement
répandu dans le monde animal : animaux domestiques, de boucherie, mammifères
sauvages, oiseaux, poissons, mollusques. Campylobacter jejuni est fréquent chez les
animaux d’élevage [ Précision : porcs, moutons, bovidés ] , s’est adapté au tube digestif des oiseaux
où il vit en saprophyte.
Certaines espèces par contre comme les Shigella, les vibrions du choléra sont strictement
humaines.
Le mode de transmission est ici par voie digestive, puisqu’il s’agit de l’ingestion d’eau
contaminée dans le cadre de toxi-infections alimentaires.
Pour que l’individu réceptif se contamine il faut qu’il soit sensible à l’agent infectieux, c’est-àdire qu’il ne se défende pas grâce à sa propre immunité. Pour qu’une infection ne se
dissémine pas et ne provoque pas une épidémie, il convient que la population soit
immunisée au moins à 70 %. Dans l’exemple de la poliomyélite, dans les pays sousdéveloppés où l’hygiène est peu développée, les enfants âgés de quatre ans et qui ont
survécu ont une forte immunité et sont donc protégés. Dans nos pays où l’hygiène et le
niveau sanitaire se sont beaucoup améliorés, les individus non immunisés qui entrent en
contact avec le virus à n’importe quel âge feront la maladie. Le facteur âge est important
dans le contexte des gastroentérites qui atteignent essentiellement les enfants en bas âge.
1.3. évolution épidémique
La diminution des infections hydriques comme la fièvre typhoïde est spectaculaire dans
tous les pays où l’eau est traitée, distribuée et contrôlée. En France, il faut remonter à 1954
où plus de 150 cas de fièvres typhoïdes furent recensés à Lyon à la suite d’une
contamination du réseau. En Suisse, l’épidémie survenue à Zermatt en 1963 était due à
Salmonella typhi à partir de l’eau distribuée insuffisamment chlorée; elle a touché 437
personnes dont 260 touristes et causé 3 décès. Si la dysenterie bacillaire à Shigella
dysenteriae ayant provoqué de très grandes épidémies meurtrières en Amérique centrale
est devenue plus rare , les gastro-entérites dues aux autres Shigella [ Précision : sonnei et flexneri ]
restent aux Etats-Unis la cause la plus fréquente de gastro-entérite bactérienne devant les
Salmonelloses et les infections à Campylobacter jejuni/coli. Si les Escherichia coli entéro-
pathogènes [ Précision : EPEC ] restent limités aux gastro-entérites du nourrisson, le rôle des
ETEC [ Précision : Escherichia coli entérotoxinogènes ] dans les diarrhées du voyageur [ Précision : tourista ] est
important et l’origine hydrique y est souvent rapportée. Si les Yersinia enterocolitica sont
abondantes dans les eaux de surface, les végétaux et les animaux domestiques et rongeurs,
les sérotypes pathogènes [ Précision : O3 et O9 ] pour l’homme sont exceptionnels dans ces
milieux et rarement responsables d’épidémies [ Précision : dernière décrite en 1975 à Montana où plus de 40%
de touristes ont été touchés ] . Le choléra est une maladie «des mains sales» mais aussi
historiquement d’origine hydrique. Après avoir provoqué plusieurs pandémies au cours de
l’histoire avec un foyer indien important, le choléra s’est actuellement «assagi» avec des
foyers endémiques en Afrique et des cas sporadiques en Europe et aux Etats-Unis où les
crustacés [ Exemple : crabes, langoustes ] contaminés par l’eau sont souvent incriminés.
On assiste à un accroissement des cas d’ hépatite A transmise par cycle fécal-oral, le
réservoir étant presque exclusivement humain. Même si les rapports ne sont pas formels
sur le rôle de l’eau dans cette pathologie, il est certainement important. Comme pour la
poliomyélite, le taux d’infection est lié aux conditions socio-économiques et sanitaires. La
transmission des virus de la poliomyélite se fait d’individu à individu. Le rôle de l’eau n’a
jamais été démontré dans les épidémies. La plupart des gastro-entérites ou des diarrhées
d’origine inconnue sont probablement virales et dues à des rotavirus [ Précision : épidémies de la
petite enfance surtout et adultes, origine hydrique incertaine ] ou au virus de Norwalk [ Précision : épidémies d’origine
hydrique certaine et rapportées aux Etats-Unis ] .
Des épidémies dues à des Giardia ont été décrites aux Etats-Unis probablement d’origine
hydrique par non traitement d’eaux de surface de bonne qualité mais contenant des kystes
de Giardia.
Il semblerait grâce aux études épidémiologiques américaines poussées que l’on assiste à
une recrudescence des gastro-entérites virales et des giardiases au détriment des gastroentérites bactériennes. En France, il y aurait la même évolution à l’exception d’une
importance moindre des giardiases.
2. Les aliments
Pour protéger le consommateur, la législation sur les aliments est très sévère. Mais à côté
des exigences de fabrication strictes, les risques d’altérations secondaires sont moins pris
en compte par les industriels. En microbiologie alimentaire, il faut distinguer la simple
contamination qui peut ne pas être dangereuse pour le consommateur et la
multiplication des microorganismes entraîne souvent la maladie chez le consommateur.
Cependant, la contamination même faible ne doit pas être négligée car certaines espèces de
microorganismes peuvent causer une maladie même en petit nombre et l’aliment contaminé
peut à son tour atteindre d’autres denrées, ou contaminer les mains, les ustensiles de
cuisine et les surfaces de travail qui seront les vecteurs de contamination. Pour garantir la
sécurité des consommateurs et la qualité des produits alimentaires, il faut donc limiter les
contaminations et maîtriser la multiplication des microorganismes de l’aliment par de
bonnes conditions de conservation.
2.1. origine des microorganismes pathogènes
Les aliments peuvent être les agents de transmission de divers microorganismes infectieux
ou de leurs métabolites [ Précision : intoxinations ] .
Ces microrganismes sont de deux origines :
- endogènes : déjà présents dans l’aliment avant sa préparation.
Ce sont les agents des anthropozoonoses présents dans les aliments d’origine animales et
transmissibles à l’homme. Normalement les animaux malades sont écartés par les contrôles
vétérinaires mais les animaux porteurs sains peuvent subsister
- exogènes : contaminant les aliments au cours de leur préparation,du transport, de
l’industrialisation ou de la conservation, à partir de l’environnement.
Les analyses de contrôle microbiologique des aliments recherchent à côté des pathogènes
intestinaux connus, certains microorganismes saprophytes selon des normes très précises
à la fois quantitatives et qualitatives variant en fonction du type d’aliment.
2.2. épidémiologie
Au cours des infections alimentaires, les agents pathogènes ingérés avec les aliments
vont dans l’intestin grêle et le colon et s’ils résistent à la barrière de la flore commensale
intestinale, ils colonisent les entérocytes et provoquent des effets pathologiques variés :
production de toxines [ Précision : entérotoxines entraînant une stimulation de la sécrétion, cytotoxines ou toxines protéiques
entraînant une destruction cellulaire ] , invasion [ Précision : colonisation ou ulcération de la muqueuse intestinale avec
inflammation ] , translocation [ Précision : colonisation des phagocytes de la muqueuse ou diffusion par la voie sanguine à
distance ] . Les manifestations courantes sont : la diarrhée, les douleurs intestinales et la
fièvre.
Les intoxinations alimentaires se produisent après ingestion de toxines préformées
dans l’aliment. Les effets cliniques sont variés : vomissements, diarrhées et douleurs
coliques, mais aussi syndromes neurologiques, vasculaires et hématologiques. Dans ces
cas, les denrées ont été d’abord contaminées puis soumises à des conditions de
température / temps qui ont permis non seulement une prolifération mais aussi un
métabolisme intense et formation de facteurs toxiques.
La dose infectieuse ne dépend pas seulement de l’agent pathogène et de sa virulence
mais aussi de l’hôte, son âge, son état physique, ses moyens de défense, de l’acidité
gastrique et de l’écosystème intestinal. L’aliment qui est véhicule support entre également
en jeu. L’hygiène de l’environnement est très importante d’où les normes strictes dans les
cuisines de restauration collective.
La perte d’informations épidémiologiques dans les maladies transmissibles par les
aliments est énorme, du moins dans les cas isolés ou familiaux peu graves où le plus
souvent il n’y a pas de consultation médicale et/ou l’aliment en cause n’est pas identifié. Par
ailleurs aucune déclaration n’est exigée par les autorités sanitaires.
Dans presque tous les pays, on estime que la viande de mammifères et de volaille et
leurs sous-produits sont responsables d’environ 70 % des épidémies. Les aliments
d’origine autre [ Précision : poissons, fruits de mer, œufs, laitages, fromages ] en sont la cause dans près de 20
% des cas.
Les accidents surviennent à la suite d’une double défaillance : contamination de l’aliment
puis température de conservation permettant la croissance des microorganismes. Ces
défaillances se produisent dans les restaurants dans environ 65 % des cas, dans les foyers
familiaux (30%) et dans les établissemments industriels (5%).
III – Diagnostic des TIA en fonction de l’agent causal
Le plus souvent le tableau clinique est celui d’une gastro-entérite avec diarrhée,
vomissements, douleurs abdominales souvent accompagné de fièvre et dans certains cas de
signes spécifiques. Elles sont en général de courte durée et suivies de guérison. Dans un
certain nombre de cas, des complications peuvent survenir, certaines graves pouvant
aboutir à la mort. Les plus fréquentes sont les septicémies et les syndromes rhumatismaux.
Les manifestations les plus simples peuvent être critiques chez les nourrissons, les vieillards
et les immuno-déprimés.
1. Nausées et vomissements au premier plan
-Intoxinations bactériennes
Staphylococcus aureus
Aliments le plus souvent en cause : charcuterie, pâtisseries, laitages, glaces [ Précision :
épidémies ] . La transmission est habituellement humain [ Précision : cuisinier avec furoncle, panaris ou porteur
sain ]
Souches entérotoxinogènes [ Précision : 50% S. aureus produisent une ou plusieurs entérotoxines ]
Incubation : 1 à 6 heures [ Précision : 3 heures en général ]
Vomissements puis diarrhée et douleurs abdominales dans un 2ème temps
Pas de fièvre
Il peut y avoir déshydratation importante et collapsus vasculaire
Durée des symptômes : < 3 0 heures
Traitement symptômatique
Pas de coproculture
Bacillus cereus
Aliments souvent incriminés : viandes, légumes, sauces, soupes, laits
Deux formes cliniques :
- émétisante, la plus fréquente, apparition 1 à 6 heures après l’ingestion de riz [ Précision :
souvent restaurant chinois ] , toxine préformée thermostable, dure 10 heures et guérit
spontanément [ Précision : ressemble à S. aureus ]
- forme avec diarrhée , plus rare, due à la production d’une autre toxine thermolabile par le
germe, in vivo, après ingestion de divers aliments insuffisamment réfrigérés, début 8 à 24
heures après et dure 36 heures au plus [ Précision : ressemble à C. perfringens ]
2. Diarrhée sans fièvre élevée ni caractère hémorragique, due à des germes non
invasifs
Il s’agit de diarrhées hydriques, profuses, liées à une atteinte diffuse de l’intestin grêle sans
invasion tissulaire significative.
Clostridium perfringens
Ce microorganisme est présent dans les aliments riches en protéines ou de type mal
apprêtés.
Souvent retrouvé en restauration collective quand mauvaise conservation après la cuisson
Produit deux types de toxines in vivo après son ingestion :
- toxine A [ Précision : dans nos pays ] .
Dans les collectivités [ Précision : 50% des personnes atteintes ] , aliments ayant séjourné à température
ambiante
Incubation : 6 à 24 heures
Diarrhée pendant 24 h, avec forte flatulence, nausées et fièvre dans 25% des cas,
vomissements dans 10% des cas, crampes et maux de tête
Traitement symptômatique
- toxine B : entérocolite nécrosante, souvent mortelle
Pays du tiers monde, malnutrition
Escherichia coli
Commensal du tube digestif chez l’homme, seuls certains sérotypes [ Précision : 5 ] sont
pathogènes :
- E. coli entérotoxinogènes [ Précision : ETEC ]
Principales causes des diarrhées infectieuses infantiles dans les pays en voie de
développement, transmission quand niveau d’hygiène bas
Incriminés dans la diarrhée des voyageurs [ Précision : turista ] : la diarrhée survient dès la
1ère semaine et évolue vers la guérison spontanée en 5 jours. Elle peut aussi être plus
tardive et survenir après le retour dans le pays d’origine. la diarrhée est aqueuse,
d’intensité modérée avec des douleurs abdominales. Transmission par l’eau.
Production d’une entérotoxine soit thermolabile [ Précision : toxine LT ]
- E. coli entéropathogènes [ Précision : EPEC ]
Responsables de gastroentérites infantiles, autrefois sous forme d’épidémies dans les
maternités et les crèches. Beaucoup plus rares aujourd’hui, car progrès en hygiène. Reste
une cause majeure de diarrhée infantile en Afrique, Asie et Amérique du Sud
Tableau clinique banal : selles aqueuses avec parfois du mucus, fièvre, vomissements,
parfois prolongé
- E. coli entéroadhérents [ Précision : EAEC ] Incriminés dans des cas de diarrhées
hydro-électrolytiques survenant surtout chez les enfants des pays en voie de
développement. Certains appartiennent aux mêmes sérotypes que les EPEC
Vibrio cholerae
Prototype des diarrhées par entérotoxine
En France, les rares cas enregistrés sont des voyageurs ayant séjourné en zones d’endémie
Transmis par l’ingestion d’eau et d’aliments contaminés et survient dans des situations
d’hygiène précaire et des milieux très défavorisés. Le vibrio peut survivre longtemps dans
un milieu hydrique et salé
Tableau clinique très variable : du simple portage asymptomatique à un état gravissime de
déshydratation. Fièvre modérée. Vomissements initiaux suivis par une diarrhée liquide
rapidement importante [ Précision : rapidement ] . La déshydratation peut entraîner en quelques
heures un état de choc hypovolémique avec insuffisance rénale. L’absence de compensation
des pertes conduit au décès.
Vibrio parahaemolyticus
Vibrion halophile [ Précision : eau saline ] pas très fréquent dans nos régions
Pouvoir pathogène dû à une cytotoxine
Transmis par les poissons, coquillages, crustacés, huîtres, consommés crus [ Précision : Japon,
Afrique ]
Incubation : 6 à 20 heures
Symptomatologie : id. Salmonelles
Traitement symptômatique
3. Diarrhées hémorragiques et très fébriles, dues à des germes invasifs
Les germes invasifs sont responsables d’entérocolites, entraînant une diarrhée avec sang et
glaires, très fébrile. Dans 40 % des cas la diarrhée est hydrique, banale mais l’importance
de la fièvre et des douleurs abdominales attire l’attention.
Salmonella non typhi
Cause la plus fréquente des TIA, prédominance estivale. Formes collectives
Les volailles sont des réservoirs naturels [ Précision : œufs peu cuits ou crus, mayonnaise ] . Autres
aliments : patisseries à crème, laitages, pâtés, viandes, coquillages
Incubation plus ou moins longue [ Précision : 8 heures ]
Diarrhée liquide, fétide, vomissements, douleurs abdominales, fièvre
Principales souches : S. enteritidis et typhimurium
Hémocultures positives dans 5 à 10 % des cas. Métastases septiques : endocardite,
méningite, ostéomyélite, arthrite septique.
La fièvre disparaît en 2 jours et la diarrhée en 1 semaine
Traitement symptômatique, antibiotiques à éviter [ Précision : portage prolongé ]
Salmonella typhi et paratyphi
Responsables de la fièvre typhoïde
Transmission exclusivement inter-humaine à partir d’un porteur sain, voie de contamination
: l’eau ou un aliment contaminé
La fièvre typhoïde ne représenterait plus aujourd’hui que 8% de toutes les infections à
Salmonelles.
Incubation : 1 à 2 semaines
Fièvre élevée, douleurs abdominales, diarrhée inconstante, liquide et fétide, retardée
Progressivement prostration avec obnubilation [ Précision : tuphos ]
Complications graves : perforation, hémorragie digestive, myocardite, métastases septiques
Portage sain très prolongé [ Précision : plus d’un an ]
Shigella, Escherichia coli entéro-invasifs (EIEC), Campylobacter, Yersinia
Diarrhées sporadiques ou épidémies
Shigella
Les Shigelles sont des entérobactéries très virulentes [ Précision : quelques dizaines de germes vivants peut
provoquer la maladie chez un adulte sain ]
Shigellose endémique dans les zones tropicales ou subtropicales mais présente partout,
même en France [ Précision : retour de voyages ]
Maladie transmise de personne à personne le plus souvent ou par l’intermédiaire de l’eau ou
d’aliments contaminés.
Incubation : 1 à 3 jours
Au début diarrhée aiguë fébrile qui soit guérit spontanément soit se poursuit par un
syndrome dysentérique fébrile, avec de nombreuses émissions rectales glairo-sanglantes ou
même purulentes
Les formes les plus graves sont dues à S. dysenteriae 1 avec un état général altéré, parfois
un mégacôlon toxique ou des complications extra-digestives (bactériémies, syndrome
hémolytique et urémique)
Traitement antibiotique pour les patients symptomatiques
E. coli entéroinvasifs (EIEC)
Appartiennent à certains sérogroupes d’ E. coli et ressemblent aux Shigelles [ Précision : Shiga
like toxin ]
Concernent les enfants de moins de 10 ans dans les pays en voie de développement
Syndrome dysentérique fébrile ressemblant à celui des Shigelles mais moins marqué
Campylobacter
La fréquence des diarrhées à C. jejuni paraît importante, surtout aux USA. En région
parisienne, elle représenterait la 3ème cause reconnue de diarrhée aiguë infectieuse
Transmission essentiellement alimentaire [ Précision : volailles, produits laitiers non pasteurisés, eau non
chlorée ] , accessoirement de personne à personne ou par les animaux domestiques
Atteint surtout les enfants de moins de 10 ans
Cas sporadiques le plus souvent
Incubation : 2 à 3 jours, parfois 10 jours
Tableau clinique variable : diarrhée liquide peu marquée ou syndrome dysentérique franc,
toujours avec fièvre et douleurs abdominales dans 40 à 70 % des cas
Signes généraux très fréquents : céphalées, myalgies, anorexie, amaigrissement
Evolution en général favorable en une semaine. Complications possibles [ Précision : septicémies,
rhumatismales ] .
Yersinia enterocolitica
Seuls les sérotypes O3 et O9 sont pathogènes. Plus fréquents [ Précision : recrudescence automnohivernale ] en Europe du Nord
Aliments : viande de porc, charcuterie, volailles, lait et dérivés
Transmission possible de personne à personne par voie orale [ Précision : épidémies hospitalières ou
familiales ]
Incubation : 3 à 7 jours
Tableau clinique variable : selles molles ou entérocolite grave avec nombreuses émissions
de selles sanglantes, douleurs abdominales fréquentes. Fièvre inconstante.
Evolution prolongée : > 2 semaines. Parfois fausses indications d’appendicectomie
Complications : arthrites réactionnelles aseptiques [ Précision : groupe HLA B27 ] , érythème
noueux fréquent.
Cyclospora
Parasite [ Précision : microsporidie ] transmis par des aliments ou de l’eau contaminée par des
matières fécales infectées. L’homme semble être le seul hôte.
Clinique : diarrhée, perte d’appétit, de poids, nausées, flatulence, crampes abdominales,
douleurs musculaires, vomissements, peu de fièvre. Il peut y avoir persistance des
symptômes pendant en moyenne 7 semaines.
La répartition est mondiale et les cas se rencontrent essentiellement chez les touristes ou
les expatriés. La transmission est de type oro-fécal, directe ou indirecte avec un rôle
important de l’eau.
Virus (Rotavirus)
Intoxications collectives d’origine hydrique
Atteint plus les enfants et les adolescents
Diarrhée assez sévère avec fièvre élevée, selles souvent hémorragiques
4. Tableaux cliniques associés extra - digestifs
Aux manifestation digestives peuvent se surajouter d’autres symptômes qui dans certains
cas dominent le tableau clinique
E. coli entérohémorragiques (EHEC) : E. coli O157 : H7
Ont été décrits dans les colites hémorragiques épidémiques aux USA et au Canada
Aliments : viandes sous forme de hamburgers et lait non pasteurisé, volaille insuffisamment
cuite, eau non chlorée, jus de pomme non pasteurisé
Quelques cas en France
Fièvre inhabituelle et modérée, les émissions sanglantes durent moins d’une semaine et
sont parfois précédées d’une courte diarrhée hydrique
La biopsie colique retrouve des lésions de colite ischémique et infectieuse
La maladie peut se compliquer d’un purpura thrombotique thrombocytopénique ou d’un
syndrome hémolytique urémique [ Abréviation : SHU ] caractérisé par une anémie
hémolytique, une thrombopénie, une insuffisance rénale [ Précision : dû à une endotoxinémie ]
Botulisme
L’agent infectieux est Clostridium botulinum, bacille anaérobie sporulé, sécrétant une
exotoxine très virulente qui est préformée dans l’aliment : intoxination.
Les spores thermorésistantes peuvent contaminer les aliments : charcuteries [ Précision :
jambon ] , conserves familiales, semi-conserves, fruits, légumes, viandes, volailles, poissons.
Elles peuvent donner des formes végétatives qui produisent l’exotoxine thermolabile.
Le tableau clinique est essentiellement neurologique et grave : après quelques heures à
quelques jours, douleurs abdominales, vomissements et diarrhée puis rapidement troubles
neurologiques : fatigue, étourdissements, troubles oculaires [ Précision : diplopie ] , sécheresse
de la bouche, gêne à la déglutition, dans certains cas extrêmes insuffisance respiratoire. Pas
de fièvre.
Traitement : symptômatique et sérothérapie spécifique [ Précision : 3 types de toxines A, B et E ]
Epidémies souvent familiales.
Le diagnostic biologique ne peut se faire que par recherche de la toxine dans le sérum du
malade
Rare [ Précision : 30 cas / an ] en France.
5. Tableaux cliniques extra - digestifs particuliers
Deux infections bactériennes sont décrites ici car elles peuvent être transmises
occasionnellement par les aliments qui jouent le rôle de véhicule passif mais elles
n’entraînent pas de désordres digestifs.
Brucella
B. melitensis est l’espèce la plus pathogène pour l’homme chez qui elle détermine la fièvre
de Malte
Aliments infectants : lait de brebis et de chèvre et fromages dérivés
Les réservoirs sont les animaux infectés
Les contaminations existent avec les fromages au lait cru artisanaux et non contrôlés
Listeria
L. monocytogenes se multiplie assez rapidement à + 4°C
Bactérie ubiquiste : volailles, viandes, eaux de surface, plantes
Ne provoque une maladie sévère [ Précision : méningite, septicémie ] que chez les femmes enceintes,
les nouveaux-nés, les vieillards et les immuno-déprimés
Les produits alimentaires contaminés [ Précision : essentiellement fromages à pâte molle et charcuteries ]
peuvent donner des infections chez ces sujets sensibles.
Formes sporadiques ou épidémiques
Toxoplasma
Parasite pouvant infecter beaucoup d’ oiseaux et mammifères y compris les humains.
L’infection se transmet par contact avec les œufs du parasite.
Aliments contaminants : viande insuffisamment cuite, fruits et légumes contaminés par des
excréments de chat
Clinique : faible fièvre, syndrome pseudo-grippal, adénopathies. Chez les personnes
immuno-déprimées, pneumnie possible.
Trichinella
Parasite rare en France. Deux causes : viande de sanglier [ Précision : cas sporadiques ou petites
épidémies chez les chasseurs ] et viande de cheval [ Précision : épidémies en France ]
Clinique : fièvre, myalgies ou œdème de la face
IV – Les toxi-infections alimentaires collectives (TIAC)et les méthodes de
prévention générales
1. Les TIAC
La définition donnée par la Direction générale de la santé est la suivante : « apparition
d’au moins 2 cas d’une symptomatologie, en général digestive, dont on peut rapporter la
cause à une même origine alimentaire »
Elle inclut les causes infectieuses et chimiques [ Précision : métaux lourds, histamine, algues, ciguatoxines ]
L’existence d’une TIAC sera suspectée sur les éléments suivants :
- tableau clinique similaire chez au moins 2 individus
- même facteur d’exposition alimentaire retrouvé chez les patients atteints
Elles surviennent en milieu collectif ou familial. Les collectivités en général concernées
sont les crèches, les hôpitaux et les restaurants de collectivité.
Les TIAC sont assez fréquentes, y compris dans les pays à haut niveau économique.
Entre Décembre 94 et Mars 95, le réseau sentinelle a relevé 6189 cas.
Déclaration obligatoire d’une TIAC par le médecin à la DDASS qui déclenchera une
enquête spécifique.
La surveillance, le contrôle et la prévention des TIAC nécessitent une collaboration étroite
entre les médecins, les vétérinaires, les épidémiologistes et les professionnels de la
restauration collective et du secteur agro-alimentaire.
En France, les plus nombreuses sont dues à des Salmonelles [ Précision : 83 % en 1990 ] , après
viennent S. aureus et C. perfringens. En milieu familial, les TIAC sont surtout dues à S.
enterica enteritidis et génèrent peu de malades. En milieu scolaire, elles sont dues
principalement à C. perfringens et S. aureus et touchent un nombre important de
personnes.
La gravité des cas est estimée à partir du taux d’hospitalisation des malades qui est
d’environ 10 % et du taux de mortalité de 0,5 ‰.
2. Prévention, règles d’hygiène
Plusieurs facteurs de risque sont à maîtriser dans la chaîne alimentaire, de la production
jusqu’à la consommation.
1) Maîtrise de la qualité sanitaire et marchande des aliments
Il convient d’abord que soit respecté le code de bonnes pratiques de fabrication puis des
contrôles microbiologiques du produit fini sont réalisés.
Avant tout, les matières premières doivent être sélectionnées de bonne qualité.
Plusieurs procédés de traitements de décontamination sont utilisés : thermiques [ Précision :
apertisation, stérilisation ] , salaisons, filtrations, ….
Il est très important qu’au cours du stockage et de la distribution, la température soit
maîtrisée : réfrigération, avec maîtrise des pathogènes psychrotrophes [ Précision : Y.
enterocolitica, Listeria, certains sérotypes de C. botulinum, certains B. cereus ] , congélation bien conduite,
conservation au chaud [ Précision : 60°C ]
Pour éviter toute contamination le long de la chaîne, il convient de respecter des règles
d’hygiène strictes [ Précision : nettoyage, désinfection des locaux, ustensile ] . Le personnel doit être formé et
sensibilisé : la recherche de portage de Salmonelle chez les manipulateurs d’aliments
s’impose.
En règle générale, la chaîne du froid doit être bien respectée.
2) Analyse microbiologique des aliments
Elle est basée sur la méthode d’ échantillonnage représentatif. Elle est qualitative et
quantitative.
Pour chaque type d’aliment des marqueurs ou indicateurs seront recherchés [ Précision :
coliformes par exemple, indicateurs de contamination fécale ] .
Puis la recherche des pathogènes digestifs connus est effectuée.
Des valeurs de référence sont connues pour chaque type d’aliment.
A l’abattoir un contrôle des viandes est réalisé par les services vétérinaires, les produits
importés et les produits laitiers sont également particulièrement surveillés.
3) Règles d’hygiène pour le consommateur ou le cuisinier
Une réfrigération correcte des aliments conservés est nécessaire. L’hygiène régulière du
réfrigérateur s’impose.
Les cuisiniers en collectivité doivent être formés à l’hygiène.
Conclusion
Les microbiologistes se sont toujours intéressés et s’intéressent encore au diagnostic et la
physiopathologie des diarrhées infectieuses, les hygiénistes contrôlent la qualité de
l’alimentation afin qu’elle soit conforme aux normes et les épidémiologistes suivent la
situation pour analyser l’évolution des toxi-infections alimentaires, hydriques ou autres, au
cours des années.
La sécurité alimentaire est assurée par l’AFSSA, Agence française de sécurité sanitaire des
aliments, institution dépendant du Ministère de la Santé et ayant pour mission la vigilance
sanitaire des aliments.
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