CHAPITRE II -AL A M O R P H O GE NE S E VE GE T AL E E T L’ E T A B L I S S E M E N T D U P H É N O T Y P E POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 1 Malgré les importantes transformations de la biosphère, le règne végétal a colonisé tous les milieux du globe, à l’exception des régions désertiques trop arides ou gelées. Cette colonisation reflète la capacité d’adaptation et de diversification des végétaux. Quels sont les facteurs responsables de la diversité des formes végétales ? Chez les végétaux, l’embryon est présent dans la graine. Cet embryon n’est qu’une ébauche dont la forme ne permet guère d’avoir une idée de ce que sera la plante adulte. Cet embryon se développera et mettra en place les différents organes : racines, tiges ou tronc et branches, feuilles. On appelle morphogenèse cette croissance et cette mise en place progressive des caractéristiques du végétal. Quels sont les mécanismes fondamentaux de cette morphogenèse ? 1. La diversité morphologique des végétaux. Si l’on s’en tient aux végétaux supérieurs, la morphologie générale d’un végétal peut se résumer ainsi : Morphologie générale d’un végétal supérieur a) Des ports différents chez les végétaux de la même espèce. Le port d’un végétal correspond à l’architecture de la plante et se traduit par sa silhouette. Cette morphologie dépend des caractéristiques génétiques de l’espèce. Ainsi, un chêne est un arbre au tronc et aux ramifications puissantes, le sapin présente une silhouette pyramidale …. POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 2 Port Morphologie Tige rigide non ramifié sur quelques mètres (tronc) puis départ de nombreuses branches (houppier) Tige rigide avec bois ramifié à la base Tige feuillée verte et souple Arborescent Buissonnant Herbacé Végétaux Arbre Arbuste Herbacée Les trois grands ports des Végétaux Mais on constate que des différences de morphologie importantes existent entre des plantes qui appartiennent pourtant à la même espèce. Beaucoup d’arbres ont une silhouette différente s’ils sont isolés ou s’ils se développent en futaie (c’est un peuplement forestier d’arbres provenant de semis ou de plantations). On peut prendre l’exemple du chêne. Isolé cet arbre développe un feuillage ample et fourni. En futaie, le chêne possède un tronc plus élancé, les branches sont moins développées et le feuillage est localisé plus en hauteur. Lorsque les chênes sont en futaie, ces arbres ont tendance à aller « chercher » la lumière d’où une croissance en hauteur importante. A l’inverse, des plantes très différentes présentent parfois un aspect similaire si elles sont soumises à un même environnement. Par exemple, beaucoup de « fleurs » susceptibles de pousser en plaine ou en montagne possèdent une tige plus réduite et un feuillage très proche du sol quand elles se développent en altitude. Lorsque plusieurs espèces adoptent des morphologies semblables en réponse à des conditions identiques, on parle de convergence adaptative. D’autres facteurs sont impliqués dans ces différences morphologiques. POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 3 b) L’action des facteurs externes. Avant de développer différents facteurs, définissons 2 termes : l’adaptation et l’accommodation. ð Notions d’adaptation et d’accommodation. L’adaptation est une modification innée (héréditaire) et caractéristique d’une espèce. L’accommodation est une modification acquise, individuelle et réversible et ne dépend que des conditions de vie de la plante. ð La Lumière. Si un végétal reçoit un éclairement insuffisant, on constate un étiolement des plantes c'est-à-dire que les tiges s’allongent considérablement et la croissance des feuilles est inhibée (Document 1). Si un végétal reçoit un éclairement inégal, on observe une dissymétrie de la morphologie du végétal : la plante se courbe vers la lumière. ð Le vent (Document 2) Le vent joue un rôle considérable sur les végétaux et sur la végétation. Il est responsable de l’absence d’arbres et de végétaux ligneux élevés sur les côtes marines très exposées ou en haute altitude. Les effets mécaniques sont évidents : le vent arrache, tord et parfois emporte les plantes ou les portions de plantes mal adaptées, ou mail situées par rapport à lui. Cela donne les anémomorphoses qui sont des accommodations indicatrices des directions dominantes du vent. Les ligneux prennent alors le port en drapeau car les bourgeons et les rameaux au vent ne peuvent se développer. D’autres facteurs comme la pluviosité ou l’enneigement interviennent également. Les propriétés du sol et la disponibilité des éléments nutritifs sont aussi des facteurs qui peuvent conditionner la morphogenèse végétale. ð L’eau. Le cas extrême est celui de la régression de l’appareil végétatif immergé, que ce soit la disparition des racines ou la miniaturisation des lentilles d’eau. L’hétérophyllie constitue un autre exemple d’adaptation avec la sagittaire (Sagitarria sagittifolia). Cette plante possède 3 types de feuilles : - des feuilles immergées (rubanées) - des feuilles flottantes (arrondies) - des feuilles dressées aériennes (sagittées) (Document 3) POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 4 c) Conclusion. La morphologie des végétaux dépend donc à la fois du génotype et des conditions dans lesquelles leur développement se déroule. Les variations interspécifiques dépendent du bagage génétique des individus, bien que l’environnement puisse induire des ressemblances entre végétaux d’espèces différentes (c’est de la convergence). Mais une même espèce peut présenter certaines variations. Celles-ci ont pour origine une variabilité génétique ainsi que des accommodations au milieu de vie. La morphogenèse correspond à l’ensemble des mécanismes qui participent à l’édification d’un organisme. Quels processus interviennent dans le développement du système racinaire et de la partie aérienne d’une plante ? 2. La croissance d’une plante. a) Le développement du réseau racinaire. L’embryon présent dans une graine présente déjà une ébauche de racine. Au cours de la germination, c’est la croissance de cette radicule qui forme la racine principale. POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 5 Celle-ci s’allonge à partir de son extrémité et c’est à partir de cette racine principale que se forment latéralement des ramifications appelées racines secondaires. Ainsi se forme le réseau racinaire de la plante dont la morphologie dépend des caractéristiques génétiques de l’espèce mais aussi des conditions environnementales (Document 4). b) La mise en place des parties aériennes. L’embryon présent dans une graine comporte une petite tige présentant une ébauche de bourgeon terminal (appelé aussi bourgeon apical, situé à l’extrémité). Une tige est constituée d’une succession de nœuds et d’entrenœuds ; les entre-nœuds sont les segments dépourvus de feuilles, entre 2 nœuds successifs. Les feuilles sont insérées au niveau des nœuds qui comportent également un bourgeon situé à l’aisselle du point d’insertion : c’est à partir de ces bourgeons axillaires que se mettent en place des rameaux secondaires (Document 5). Sous nos climats, les feuilles ont en général une durée de vie limitée. Les bourgeons sont des structures permanentes mais ils ne fonctionnent pas de manière continue. Au cours de la période hivernale, leur développement est ralenti et ils sont abrités des conditions défavorables par des écailles protectrices. Au printemps, des bourgeons vont éclore, assurant une croissance et une ramification de la tige. La mise en place des parties aériennes de la plante dépend du fonctionnement des bourgeons. Revenons sur les racines. Au cours de la vie d’une plante, les racines s’allongent, grossissent et se ramifient. Quelle partie de la racine s’allonge ? Quels processus assurent cet allongement ? 3. Le fonctionnement des zones de croissance. a) La croissance en longueur des racines. Expérience (Document 6) : Lorsque la jeune racine des plantules a atteint quelques centimètres, on prélève quelques graines en germination. A l’aide d’un « feutre » indélébile très fin, on trace une série de traits aussi régulièrement espacés que possible. Puis on replace les graines sur le milieu humide. On observe les résultats quelques jours plus tard. POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 6 Quelle zone de la racine est le siège d’une croissance en longueur ? On constate que la zone de croissance des racines est localisée à quelques millimètres (voire quelques centimètres tout au plus) de l’extrémité. Cette croissance en longueur associe 2 phénomènes. - des divisions cellulaires qui produisent de nouvelles cellules, - une élongation de chacune des cellules produites. Les divisions cellulaires sont situées dans un territoire localisé tout à fait à l’extrémité de la racine sous une « coiffe » protectrice. Ce territoire est un tissu végétal appelé méristème, c’est un tissu végétal constitué de jeunes cellules qui sont le siège de nombreuses divisions cellulaires. Plus précisément, le méristème localisé aux extrémités est dénommé méristème apical. Dans le cas d’une racine ce méristème apical est dit racinaire. Pour une tige, il est dit caulinaire. Le Document 7 vous présente l’observation au microscope d’une coupe longitudinale de racine dans la zone de croissance. Le Document 7a montre l’extrémité de la racine où sont présents les méristèmes apicaux. Réalisons un tableau des caractéristiques des méristèmes apicaux. Localisation Aux extrémités des racines (et des tiges) Rôles Assurent la croissance en longueur Cellules Petites, isodiamétriques, indifférenciées Noyau Sphérique, volumineux, au centre de la cellule Cytoplasme Dense Vacuoles Nombreuses et très petites Paroi Paroi peu épaisse Plastes Jamais de chloroplastes Caractéristiques des méristèmes apicaux Les cellules des méristèmes apicaux sont indifférenciées : elles sont susceptibles de donner n’importe quel type cellulaire du végétal. On parle également de cellules totipotentes. Dans les quelques millimètres qui suivent le méristème, les cellules disposées en fils parallèles, subissent un allongement progressif important. Cette zone est appelée zone d’élongation cellulaire. Les cellules, dans cette zone, augmentent considérablement de taille dans le sens axial (à peu près 10 fois plus longues) essentiellement par accroissement de volume des vacuoles des cellules (Document 7b). POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 7 Enfin, un peu plus loin de l’extrémité, les cellules acquièrent des caractères spécifiques en liaison avec leur fonction. C’est la différenciation cellulaire (Document 7c). Certaines cellules localisées en périphérie deviennent des poils absorbants. D’autres cellules en position centrale, forment les tissus conducteurs de sève. D’autres encore se spécialisent dans l’accumulation des réserves. On peut résumer sous forme d’un schéma nos propos : On peut compléter nos explications par quelques schémas. Le Document 8 vous montre l’observation de quelques cellules spécialisées sur une coupe transversale de racine. [Annotations du document 8 en partant du haut : - tubes criblés : transport de la sève sucrée des feuilles aux autres organes. - vaisseaux conducteurs. - cellules de stockage et de réserve.] Remarque : les jeunes racines de Maïs grandissent d’environ 2 mm/h. Chacune d’elle produit environ 18500 cellules /h. Etudions comment s’édifie la partie aérienne d’une plante. b) Le fonctionnement des bourgeons. Les bourgeons sont non seulement responsables de la croissance en longueur des tiges mais sont aussi responsables de la constitution de nouvelles feuilles et de nouveaux bourgeons. Comment est organisé et comment fonctionne un bourgeon ? Est-ce qu’un bourgeon présente un méristème analogue à celui observé sur une racine ? POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 8 Les bourgeons sont situés à l’extrémité des tiges ou des rameaux (dits apicaux) et à l’aisselle des feuilles (dit axillaires). Le Document 9 vous présente une coupe longitudinale dans un bourgeon de Coleus (plante tropicale). [Annotations du document 9 en partant du haut : - Ebauche de feuilles ; - Méristème apical ; - Jeune feuille ; - Ebauche de bourgeon axillaire] Chaque bourgeon est constitué : (1) d’un méristème situé tout à fait à l’extrémité. (2) d’ébauches de feuilles imbriquées et recouvrant le méristème apical, les plus jeunes étant les plus proches du méristème. (3) de massifs de cellules méristématiques situées à l’aisselle de chaque ébauche foliaire. C’est le méristème apical qui produit et dispose les ébauches foliaires ainsi que les massifs méristématiques situés à leur aisselle. Les cellules produites par le méristème apical sont petites : elles s’allongent puis se différencient. Certaines cellules deviendront les cellules chlorophylliennes des feuilles, d’autres formeront les tissus conducteurs de la tige …. Lorsqu’ un bourgeon éclot, on assiste à une élongation des entre-nœuds et un développement des ébauches foliaires (Document 10). Les massifs de cellules méristématiques localisés à la base de chaque ébauche foliaire donnent naissance à l’origine des bourgeons axillaires. La structure et le fonctionnement d’un bourgeon axillaire sont comparables à ceux du bourgeon apical. Remarque : La vitesse de croissance d’une tige d’asperge peut dépasser 30cm/j, elle atteint 60cm/j pour les jeunes pousses de bambou. Conclusion : Le développement des végétaux passe par des phénomènes importants, qui sont la multiplication cellulaire, la croissance cellulaire et la différenciation cellulaire. On peut supposer que ces différents phénomènes puissent être sous la double influence du patrimoine héréditaire et de l’environnement. POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 9 Nous avons vu que les divisions cellulaires responsables de la croissance des végétaux se déroulent dans des zones spécialisées appelées méristèmes. Ces divisions cellulaires portent le nom de mitose. POLY-PREPAS AMIENS M.LAIGNIER [email protected] 10