$0.1-*$"5*0/4*/'&$5*&64&4"13453"/41-"/5"5*0/ 5)."5*26&5"1&3 Les infections parasitaires chez les transplantés 2. Toxoplasmose, paludisme, trypanosomiase, anguillulose et protozooses intestinales Marie-Hélène Bessièresa,* RÉSUMÉ A cours des Au d transplantations, t l t ti lles ttraitements it t iimmunosuppresseurs quii touchent l’immunité cellulaire ont comme conséquence de favoriser l’émergence d’infections parasitaires sévères habituellement bénignes chez les sujets immunocompétents. Le risque est maximum dans les 6 premiers mois suivant la greffe. Le receveur peut développer une parasitose par 3 voies, transmission par le greffon, réactivation d’une infection ancienne ou infection acquise après la greffe. Le diagnostic clinique et biologique de ces infections est difficile. Les toxoplasmes, Plasmodium, leishmanies, trypanosomes sont des parasites pouvant être transmis par le greffon ou être à l’origine de la réactivation d’une infection ancienne. En France, la toxoplasmose est la complication la plus fréquente. D’autres agents de parasitoses intestinales, cryptosporidies, microsporidies, et anguillule sont habituellement associés à des reprises évolutives d’une infection ancienne. Le risque d’infection par un parasite doit être évalué en fonction de l’origine géographique du patient et de séjour en zone d’endémie, de son passé médical, de son statut immunitaire et de celui du donneur vis-à-vis de la toxoplasmose. Un traitement prophylactique anti-infectieux, en particulier, pour prévenir la toxoplasmose, est conseillé pour diminuer la fréquence de la maladie. Parasites – toxoplasmose – transplantation – traitement immunosuppresseur – diagnostic. 1. Introduction Les greffes ou transplantations visant à remplacer un tissu malade par un tissu sain provenant d’un donneur sont de plus en plus pratiquées en raison des progrès majeurs dans les traitements immunosuppresseurs desti- a Service de parasitologie-mycologie Centre hospitalier universitaire de Rangueil TSA 50032 31059 Toulouse cedex 9 * Correspondance [email protected] article reçu le 18 mars, accepté le 14 avril 2008. © 2008 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés. SUMMARY Parasitic infections in organ transplant recipients 2. Toxoplamosis, malaria, trypanosomiasis, strongyloidiasis and intestinal protozoosis Treatment of allograft rejection by immunosuppressive treatments exposes organ and bone marrow transplant recipients to severe parasite infections. The risk is maximum in the 6 months following the graft. They may acquire significant parasitic disease by 3 ways : transmission with the graft, de novo infection, or activation of dormant infection as a consequence of immunosuppression. Toxoplasma, Leishmania, Plasmodium, Trypanosoma are the principal parasites that may be transmitted with bone marrow, kidney, or liver allograft. Another possibility is reactivation of latent infection. Strongyloides stercoralis, Cryptosporidium, Microsporidia cause severe gastrointestinal infections in infected patients. The risk of parasite infection has to take into account and prophylactic anti-infectious therapy, particularly for toxoplasmosis, must be performed to reduce the disease. Parasites – toxoplasmosis – transplantation – immunosuppressive treatment – diagnosis. nés à éviter le rejet de la greffe. Cette immunosuppression qui touche l’immunité cellulaire a comme conséquence de favoriser l’émergence d’infections parasitaires habituellement bénignes chez les sujets immunocompétents (tableau I). Le risque est maximum dans les 6 premiers mois suivant la greffe. Les protozoaires, toxoplasme, Plasmodium, leishmanie, trypanosome peuvent entraîner une infection généralisée. D’autres protozoaires, coccidies dont les cryptosporidies, microsporidies, et l’anguillule sont habituellement associés à des atteintes du système gastro-intestinal. Il faudra soupçonner ces infections devant REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUIN 2008 - N°403 // 53 les tissus, en particulier dans le cerveau, le cœur, les muscles. L’immunité contrôle une reprise évolutive de l’infection [1, 3]. Principaux parasites Parasites opportunistes Maladie Maladie opportunistes occasionnels Lors de transplantation, du fait d’un déficit de l’immunité cellulaire lié à des Toxoplasma gondii Toxoplasmose Giardia intestinalis Giardiase traitements immunosuppresseurs, il est Leishmania Leishmaniose Isospora belli Isosporose fréquent d’observer la réactivation de formes kystiques. La toxoplasmose Strongyloïdes stercoralis Anguillulose Echinococcus granulosus Hydatidose maladie survient habituellement dans Cryptosporidies Cryptosporidioses Taenia solium Cysticercose les 3 premiers mois suivant la greffe. Le système nerveux est le principal Microsporidies Microsporidioses Schistosome Bilharziose organe atteint puis le myocarde et les poumons [31]. Dans le cadre de la toxoplasmose après transplantation, il faut différencier les divers symptômes, fièvre, troubles pulmonaires, neurolotransplantions d’organes solides, cœur, poumons, rein, foie giques, digestifs dans les suites d’une greffe d’organe ou et la greffe de moelle [12]. Sur le plan clinique, un abcès de moelle. Le receveur peut développer une parasitose par du cerveau, une fièvre inexpliquée, une pneumopathie, un 3 voies, transmission par le greffon, réactivation d’une infecabcès du foie, une myocardite ou une choriorétinite doivent tion ancienne ou infection acquise après la greffe [5, 12]. évoquer une toxoplasmose. Des mesures préventives spécifiques ou prophylactiques doivent être prises chez ces patients pour les éviter. Tableau I – Infections parasitaires opportunistes chez les transplantés observées en France. 2. Toxoplasmose C’est l’infection parasitaire la plus fréquente en France chez les transplantés. Cette anthropozoonose cosmopolite dont l’agent est Toxoplasma gondii, protozoaire intracellulaire, se déroule successivement chez un hôte intermédiaire (oiseau, petit mammifère) puis chez l’hôte définitif le chat aboutissant à une reproduction sexuée dans les cellules de l’intestin grêle avec formation d’un œuf particulier, l’oocyste, rejeté dans le milieu extérieur avec les fèces du chat. Il est à l’origine de la contamination des herbivores. Un cycle incomplet fait intervenir uniquement des hôtes intermédiaires. Dans ce cas, la contamination est liée à l’ingestion de kystes contenus dans la chair d’animaux. C’est une parasitose majeure en termes de santé publique en France du fait de sa gravité chez le fœtus lors d’une primo-infection de la femme enceinte et chez les sujets immunodéprimés. Chez tout sujet immunisé, le parasite persiste sous forme de kystes, à l’état quiescent, dans Figure 1 – Kyste de Toxoplasma gondii . (Collection M.-H. Bessières) 54 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUIN 2008 - N°403 2.1. Au cours des transplantions d’organes solides Le risque de transmission du parasite par l’organe transplanté n’est pas négligeable notamment pour des organes tel le cœur qui est un lieu d’enkystement du toxoplasme [15]. Le risque existe si le receveur n’est pas immunisé et le donneur immunisé [11, 15, 23]. Dans cette situation, l’infection est liée à la réactivation des kystes présents dans le greffon, cause d’une primoinfection sévère (figure 1). Le traitement immunosuppresseur favorise l’éclatement des kystes et la diffusion des tachyzoïtes (figure 2). Le receveur développe une toxoplasmose sévère, mortelle en l’absence de traitement. Ces formes cliniques se traduisent par une pneumopathie interstitielle, une myocardite, une péricardite, une atteinte hépatique, voire une atteinte cérébrale souvent secondaire, une choriorétinite. Certaines équipes recommandent la prise d’une prophylaxie pour prévenir ce risque [8]. Plus rarement, selon le même processus, la toxoplasmose peut être une complication d’une transplantation rénale [15, 28] ou hépatique [2]. Les formes cliniques sont comparables à celles observées dans la transplantation cardiaque. La Figure 2 – Physiopathologie de la toxoplasmose chez les transplantés. $0.1-*$"5*0/4*/'&$5*&64&4"13453"/41-"/5"5*0/ toxoplasmose peut être aussi la conséquence d’une réactivation d’une infection ancienne sans relation avec le statut immunitaire du donneur. Figure 3 – Diagnostic de la toxoplasmose au laboratoire de parasitologie. 2.2. Chez les greffes de moelle allogéniques La toxoplasmose survient, dans la majorité des cas, à la suite d’une réactivation d’une infection ancienne chez le receveur, avec une fréquence plus élevée lorsque le donneur est séronégatif pour la toxoplasmose [11, 21]. Le mécanisme est comparable à celui observé chez le patient atteint de sida. Il est dû à une réactivation des kystes toxoplasmiques présents dans les tissus d’un sujet immunisé puis la dissémination hématogène du toxoplasme entraînant une forme généralisée. C’est une complication souvent fatale observée dans les 30 à 100 jours suivant la greffe. L’organe le plus souvent atteint est le système nerveux central, les poumons et le cœur. Le pronostic est mauvais, 66 % des patients décèdent, en revanche si un traitement est institué rapidement 60 % survivent [22]. Le facteur le plus important est le site de l’infection. Les infections généralisées sont de mauvais pronostic. Les formes cliniques associent des symptômes à prédominance neurologique à des atteintes multiviscérales [21, 25]. De rares cas de primoinfection sont décrits chez des sujets non immunisés avant la greffe suggérant une contamination par la greffe ou par des produits sanguins. L’incidence est mal établie et sûrement sous estimée. Martino et al., à la suite d’une étude multicentrique, ont différencié la toxoplasmose maladie certaine définie par des symptômes cliniques et la mise en évidence des parasites dans les tissus d’une maladie probable pour laquelle des signes cliniques et radiologiques sont évocateurs de la maladie et la PCR positive dans le sang, le LBA ou le LCR sans autre étiologie retenue. Ils la différencient de la toxoplasmose infection définie par une PCR positive dans le sang sans preuve d’une atteinte d’un organe, associée ou non à une fièvre. Dans cette étude, 6 mois après la greffe, la maladie est diagnostiquée dans 6 % des cas et les infections dans 16 %. Ils préconisent un dépistage de la toxoplasmose infection par un suivi de la parasitémie sanguine par PCR afin d’instituer un traitement préventif de la maladie [22]. 2.3. Quelle que soit la transplantation Une prévention primaire doit être instituée si le receveur n’est pas immunisé consistant en des conseils hygiénodiététiques identiques à ceux fournis à la femme enceinte. Si le receveur est immunisé, la mise sous prophylaxie pendant la période de risque est effectuée par certaines équipes mais il n’y a pas, en France, de consensus national. L’utilisation de triméthoprime-sulfaméthoxazole en prophylaxie a diminué la fréquence de la toxoplasmose [17, 22, 29]. En cas de maladie, le traitement curatif associe pyriméthamine et sulfadiazine ou clindamycine si le patient est allergique [1, 3, 21]. Les complications liées à la transplantation ont justifié l’obligation d’un dépistage sérologique obligatoire de la toxoplasmose des donneurs et receveurs de greffe pour connaître leur statut immunitaire avant la greffe (décret n° 97-928 du 9 octobre 1997 relatif aux règles de sécurité sanitaire applicables à tout prélèvement d’éléments ou toute collecte de produits du corps humain et à leur utilisation à des fins thérapeutiques). Cette procédure n’empêche pas d’effectuer les greffes. 2.4. Diagnostic de la toxoplasmose Il est souvent difficile à établir. Plusieurs critères doivent être associés pour porter un diagnostic de toxoplasmose incluant les tests sérologiques et un diagnostic parasitologique comportant la mise en évidence du parasite dans le sang, dans divers liquides biologiques ou les tissus par recherche directe et détection de l’ADN toxoplasmique par PCR (figure 3) [1, 3, 35]. 2.4.1. Examens sérologiques Ils sont un des éléments du diagnostic. La détection des anticorps IgG et IgM est effectuée systématiquement. De nombreuses méthodes, dont les tests immunoenzymatiques, de plus en plus automatisées sont réalisables pour la détection des anticorps IgG et IgM. Elles détectent des anticorps dirigés contre des antigènes de membrane du parasite notamment la protéine P 30 et contre des antigènes solubles cytoplasmiques. L’immunité vis-à-vis de la toxoplasmose doit être connue pour le donneur et le receveur pour connaître les sujets à risque de primoinfection ou de réactivation. La sérologie apporte peu de renseignements au cours du suivi, sauf dans le cas de primoinfection mais avec un retard d’apparition des anticorps dû au traitement immunosuppresseur. On observe la négativation de la sérologie chez une majorité de greffés de moelle dans l’année suivant la greffe et les perfusions d’immunoglobulines peuvent entraîner des faux positifs. On peut également observer chez les transplantés d’organes une réactivation sérologique ne se compliquant pas forcément d’une reprise évolutive de la maladie. 2.4.2. Diagnostic de certitude Il repose sur la mise en évidence directe du toxoplasme dans les prélèvements, LBA, moelle osseuse, biopsie cérébrale et par les techniques de biologie moléculaire PCR dans le LBA, le sang, le LCR, la moelle osseuse, les biopsies cérébrales [9, 18, 16, 22] (figures 1, 4). Compte tenu de la gravité et de l’évolutivité de la toxoplasmose chez ces malades, il est important de pratiquer la réacREVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUIN 2008 - N°403 // 55 Figure 4 – Moelle osseuse : Toxoplasma gondii tachyzoïtes (MGG 6 à 8 μm). (CD Rom Anofel 3) tion de polymérisation en chaîne (PCR), technique de diagnostic rapide et plus sensible. La PCR en temps réel permet de plus de quantifier l’ADN amplifié et d’estimer la charge parasitaire [6, 10, 22]. Dans le cas des toxoplasmoses disséminées, associées à une parasitémie sanguine, en l’absence de traitement, la PCR est fréquemment positive sur des prélèvements de sang ou de lavage broncho-alvéolaire. Le diagnostic est également possible à l’examen direct du LBA ou d’un frottis de moelle mais la sensibilité est médiocre. Dans les cas de toxoplasmose cérébrale, la sensibilité de la PCR, réalisée sur le sang ou le LCR, est moindre [35]. La négativité d’une PCR n’exclut en aucun cas le diagnostic d’une toxoplasmose. 3. Paludisme Le paludisme est une autre parasitose observée chez les transplantés due à Plasmodium falciparum, Plasmodium vivax, Plasmodium malariae ou Plasmodium ovale. On estime à 1 à 2 millions le nombre de décès annuels et à 300 à 800 millions le nombre de cas cliniques. Le Figure 5 – Frottis de sang : Plasmodium falciparum trophozoïtes (MGG x 1000). (CD Rom Anofel 3). 56 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUIN 2008 - N°403 cycle comporte une phase chez l’homme et l’autre chez l’anophèle femelle qui transmet par piqûre le parasite à l’homme. Tous les symptômes chez l’homme sont liés à la multiplication du parasite dans les hématies. Dans le cas de Plasmodium vivax et Plasmodium ovale, certains parasites restent quiescents dans l’hépatocyte (hypnozoïtes) à l’origine d’accès de reviviscence tardif. La persistance du parasite dans l’organisme est estimée à moins d’un an pour Plasmodium falciparum, de 3 à 5 ans pour Plasmodium vivax et Plasmodium ovale et jusqu’à 20 ans pour Plasmodium malariae. Le paludisme est endémique dans le monde entier en zone tropicale et équatoriale [3]. Les agents du paludisme peuvent être transmis par voie transfusionnelle, par l’organe transplanté et par la moelle osseuse [5, 19, 20, 32, 34]. Dans le cas de transplantation hépatique, le parasite peut être transmis par les hépatocytes infectés ou les hématies parasitées [24]. Dans les transplantations rénales et cardiaques, la transmission du parasite peut être due à des hématies parasitées dans l’organe. Cette éventualité est rare. Les symptômes surviennent rapidement de 1 à 3 jours à plus d’une semaine. Des réactivations de l’infection due au traitement immunosuppresseur ont été décrites. La majorité des cas concernent des transplantés rénaux. Plasmodium falciparum est responsable de la majorité puis Plasmodium vivax. L’évolution de la maladie est favorable si elle est traitée [26]. 3.1. Diagnostic Le diagnostic du paludisme est une urgence. Il est basé sur la recherche du parasite sur frottis sanguin et goutte épaisse (figure 5). Ce diagnostic est conforté par la mise en évidence d’antigènes plasmodiaux circulants dont le HRP2 (histidine rich protein 2) par des tests commercialisés d’immunochromatographie [14]. Ces tests faciles à réaliser ont une sensibilité de l’ordre de 95 % mais ne permettent pas de quantifier la parasitémie. Les résultats sont faussement négatifs en cas de faible parasitémie. Les techniques basées sur l’amplification de l’ADN (PCR) ont une sensibilité et une spécificité élevée et permettent la détection de très faibles parasitémies ou des infectons mixtes. Le principal inconvénient est le temps requis. Le sérodiagnostic n’est pas utile pour le diagnostic d’urgence. Des recommandations en France pour la prise en charge du donneur et des receveurs ont été émises par le Directeur général de l’établissement français des greffes à la suite de transmission de paludisme à des receveurs d’organes. Concernant le donneur prélevé, si le donneur a fait un séjour en pays tropical dans l’année écoulé, un diagnostic de paludisme est à effectuer basé sur la détection en urgence de l’antigène spécifique HRP2 dans le sang. Deux tubes de sang total sont prélevés sur EDTA, le 1er tube est destiné à réaliser la recherche de Plasmodium sur frottis sanguin et goutte épaisse (réponse dans les 12 heures) et à la sérologie du paludisme, l’autre est à conserver 1 mois à 4°C pour une PCR éventuelle. Cette procédure n’empêche pas d’effectuer les greffes à condition qu’une thérapeutique spécifique soit instituée chez les receveurs en cas de résultats positifs des tests. Concernant le receveur, il faut penser systématiquement à la possibilité d’un paludisme devant une symptomatologie mal expliquée chez un sujet ayant séjourné en zone d’endémie. $0.1-*$"5*0/4*/'&$5*&64&4"13453"/41-"/5"5*0/ Figure 6 – Frottis de sang : Trypanosoma cruzi forme trypomastigote (MGG x 1000). (CR Rom Anofel 3) 4. Autres infections D’autres infections parasitaires peuvent être observées suite à un traitement immunosuppresseur chez les transplantés. 4.1. Maladie de Chagas Elle est due à Trypanosoma cruzi. Bien que d’une répartition géographique limitée à l’Amérique du Sud et centrale, elle peut poser problème du fait des migrations de populations latino-américaines vers d’autres continents. Le parasite peut se transmettre par transfusion sanguine ou transplantation d’organes de donneurs infectés. Chez les sujet transplantés, des formes aiguës ou des réactivations des formes chroniques sont observées Le diagnostic parasitologique direct peut mettre en évidence des trypanosomes dans le sang en phase aiguë à l’état frais et après concentration (figure 6) ou par techniques de PCR sur le sang. Le diagnostic immunologique est un diagnostic d’orientation du fait des réactions croisées avec la leishmaniose viscérale [5, 20]. 4.2. Anguillulose disséminée Des parasitoses intestinales dont l’anguillulose habituellement bénignes chez les sujets immunocompétents deviennent opportunistes en cas d’immunodépression. Elles peuvent être acquises avant la transplantation ou suite à celle-ci [5, 17, 20]. L’anguillulose est due à un nématode Strongyloïdes stercoralis. Le mode de contamination est transcutané par les formes larvaires présentes dans le sol. C’est le seul helminthe qui peut causer une infection maligne plusieurs années après la contamination. Ce parasite intestinal est très répandu dans les pays tropicaux et subtropicaux. Il atteint le sud de l’Europe. C’est une parasitose assez fréquemment rencontrée en France chez les sujets migrants. Dans la majorité des cas, il s’agit de formes latentes, asymptomatiques, découverte lors de l’exploration d’une hyperéosinophilie sanguine ou d’un bilan systématique. Les formes sévères surviennent chez les sujets immunodéprimés en particulier ceux recevant des corticostéroï- Figure 7 – Selles : Strongyloïdes stercoralis larve rhabditoïde (275-15 μm). (CR Rom Anofel 3) des. Elles sont dues à la dissémination des larves dans l’organisme déterminant l’anguillulose maligne aiguë. Le pronostic reste mauvais (plus de 50 p. 100 de mortalité). Ceci est lié à une particularité biologique propre à l’anguillule, un cycle interne par transformation directe des larves rhabditoïdes en larves strongyloïdes infestantes sans passage dans le milieu extérieur. Ce cycle explique la persistance de ce parasite dans l’organisme, de 10 à 20 ans, et les formes malignes de la maladie. L’anguillulose maligne post-transplantation se caractérise par une prolifération massive des larves disséminées vers le système nerveux central, le foie, le cœur. Dans les formes graves survenant chez l’immunodéprimé, des signes neurologiques peuvent survenir sous forme d’un tableau de méningite aseptique, des larves peuvent être mise en évidence dans le LCR, mais aussi dans le sang, les expectorations ou encore dans les liquides pleuraux ou péritonéaux. Elle peut se développer suite à une primoinfection, par autoinfestation (cycle interne) ou rarement par transmission par la greffe [27, 30]. Plusieurs cas, dont certains mortels, ont été rapportés chez les transplantés rénaux, cardiaques et plus récemment de pancréas [13, 20, 30, 33]. La maladie survient habituellement dans les 6 mois suivant la greffe. Les symptômes sont gastro-intestinaux, avec atteinte pulmonaire et neuroméningée. 4.2.1. Diagnostic de certitude Il repose sur la mise en évidence des larves dans les selles fraîchement émises (figure 7). L’enrichissement par la méthode de Baerman basée sur le thermotropisme et l’hygrotropisme des larves est indispensable pour détecter les infestations faibles. Les larves peuvent être mises en évidence dans d’autres prélèvements, biopsies duodénales, LBA. Le sérodiagnostic est réalisable par les techniques d’immunofluorescence ou immunoenzymatique. Le traitement antiparasitaire de l’anguillulose maligne de première intention est l’ivermectine. Il est recommandé de pratiquer, avant la greffe, un diagnostic d’anguillulose chez tout sujet devant être transplanté ayant séjourné en zone d’endémie. Le traitement doit être systématique avant la greffe chez tout patient infecté. REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUIN 2008 - N°403 // 57 Figure 8 – Selles : Cryptosporidium parvum oocyste (Ziehl Nielsen modifié 5 μm). (CR Rom Anofel 3) 4.3. Protozooses intestinales Elles sont responsables de diarrhées persistantes qui peuvent être gravissimes chez les patients immunodéprimés [5, 7]. Les cryptosporidies et Isospora belli sont des coccidioses intestinales. La contamination est liée à l’ingestion d’oocystes directement au contact d‘un sujet infecté ou indirecte (mains sales, contamination par les animaux, consommation d’aliments ou d’eau contaminée. Il n’y a pas de traitement réellement efficace de la cryptosporidiose. L’isosporose due à Isospora belli affecte plus particulièrement les sujets immunodéprimés en zones tropicales et subtropicales. Un traitement par trimethoprimsulfamethoxazole est efficace. Le diagnostic est basé sur la mise en évidence des oocystes dans les selles après coloration de Zielh Nielsen modifiée, et plus rarement sur des biopsies pour la mise en évidence de cryptosporidies (figure 8). Les microsporidies sont d’autres protozoaires cosmopolites agents de diarrhée, à développement intra-cellulaire obligatoire, habituellement dans les entérocytes conduisant à la formation de spores, dont la taille est comprise entre 1 et 3 microns suivant les espèces. Les spores sont éliminées avec les selles ou les urines suivant les espèces, et disséminées dans le milieu extérieur. Le diagnostic de certitude repose sur la mise en évidence des spores dans les selles et autres prélèvements biologiques. Elle nécessite impérativement l’utilisation de techniques de coloration soit par un composé fluorescent (Uvitex 2b) colorant spécifiquement la paroi des spores, soit par le trichrome (coloration de Weber) qui colore les spores en rose (figure 9). L’examen microscopique ne permet pas de distinguer les différentes espèces. L’identification des espèces repose sur la microscopie électronique et sur l’amplification d’ADN parasitaire par PCR spécifique. Le traitement est efficace mais dépend de l’espèce. La prévention de ces parasitoses intestinales repose sur une hygiène rigoureuse individuelle (lavage des mains, 58 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUIN 2008 - N°403 Figure 9 – Selles : microsporidies Enterocytozoon bleneusi spores (coloration de Weber 0,8-1,5 μm). (CR Rom Anofel 3) des aliments, consommation d’eaux de boissons embouteillées, éviter les baignades en eau douce) et une prévention collective, lutte contre le péril fécal, renforcement des règles d’hygiène et des mesures de potabilisation de l’eau. D’autres infections parasitaires intestinales sont plus rarement observées. Les infections à Gardia intestinalis provoquent des diarrhées avec anorexie et perte de poids [33]. Les kystes sont recherchés dans les selles. Les trophozoïtes sont essentiellement mis en évidence par les biopsies de muqueuse jéjunale. Le traitement repose sur le métronidazole pendant 5 à 7 jours. 4.4. Autres infections parasitaires exceptionnellement rencontrées chez les transplantés Quelques bilharzioses ont été décrites suite à une transplantation d’organes (5, 20]. Le traitement par le praziquantel doit être répété en fonction des contrôles parasitologiques, avec une surveillance cardiaque et neurologique. D’autres infections sont décrites suite à une transplantation mais sont extrêmement rares. C’est le cas des infections dues à la forme larvaire d’Echinococcus granulosus, de Taenia crasiceps ou de neurocysticercose due à la larve de Taenia solium [4, 20]. Il faut, pour ces cas, prendre en compte les séjours en zone d’endémie et l’origine géographique du patient. 5. Conclusion Pour diminuer la fréquence de transmission d’un parasite par le greffon, et les infections survenant après la transplantation, il est essentiel de connaître les parasites opportunistes, leur répartition géographique, leur mode de transmission ainsi que l’historique médical du donneur et du receveur, leur origine, les séjours en zone tropicale, leur statut immunitaire vis-à-vis de la toxoplasmose. $0.1-*$"5*0/4*/'&$5*&64&4"13453"/41-"/5"5*0/ Références [1] AFSSA, Rapport du groupe de travail « Toxoplasma gondii » de « Toxoplasmose : état des connaissances et évaluation du risque lié à l’alimentation », Décembre 2005. [2] Assi M.A., Rosenblatt J.E., Marshall W.F., Donor-transmitted toxoplasmosis in liver transplant recipients: a case report and literature review, Transpl. Infect. Dis. 9 (2007) 132-136. 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