Discours de Bernard Kouchner Ministre délégué à la santé Programme national nutrition santé Lancement de la campagne de promotion fruits et légumes Paris, Conférence de presse du 29 octobre 2001 e Mesdames, Messieurs, Je suis heureux aujourd’hui de pouvoir parler à nouveau avec vous d’un sujet qui me tient à cœur d’abord parce qu’il est toujours agréable de parler d’alimentation, qui allie plaisir et gastronomie mais aussi, dans le contexte actuel, d’aborder la santé par un côté positif sans obligatoirement parler de maladie, de pathologies, de risque, de mortalité… Merci à l’Assurance maladie et au CFES, qui une fois de plus nous accompagnent pour la mise en œuvre des actions de prévention. Vous vous souvenez tous que c’est le Premier ministre, lors de la clôture des Etats généraux de l’alimentation de décembre 2000, qui a annoncé le Programme national nutrition santé que Dominique Gillot a présenté le 31 janvier dernier. Ce grand programme sur cinq ans, ambitieux, met pour la première fois en France l’accent sur l’un des déterminants majeurs de la santé, la nutrition. Celle ci recouvre deux composantes : les apports nutritionnels par l’alimentation et les besoins nutritionnels (en particulier liés à la dépense énergétique). Améliorer la santé de l’ensemble de la population française nécessite de mettre l’accent sur les facteurs qui, très en amont, influencent la santé : c’est de la prévention telle que je souhaite qu’elle se développe en France. Eviter la maladie permet d’éviter bien des souffrances individuelles et, pour la société, bien des dépenses financières. C’est le sens d’un programme non pas axé sur une maladie donnée mais orientée vers un déterminant de la santé et qui considère la santé sous un angle global et positif. Le savoir populaire connaît l’influence de l’alimentation sur la santé. En France, passé le spectre des carences graves qui sévissaient encore au début du siècle dernier, nous sommes entrés dans une situation où les excès, les surcharges globales se combinent à des déficiences modérées en divers micro nutriments. Les pathologies qui en découlent, vous les connaissez. Elles sont responsables de l’essentiel de la mortalité, y compris du sujet jeune: maladies cardio vasculaires - et divers cancers, obésité qui fait aussi le lit du diabète de l’âge mûr, ostéoporose et ses conséquences sur les fractures notamment du col du fémur des personnes âgées, mais aussi les déficiences en fer du jeune enfant, de l'adolescente ou encore le déficit en folates de la femme adulte et son risque pour le développement fœtal. Il est clair aujourd’hui qu’il ne saurait y avoir de réduction sensible de la fréquence et de la gravité de ces pathologies sans une amélioration de la nutrition de la population tout au long de la vie. Les grands axes du programme national nutrition santé Manger est un plaisir. Promouvoir une alimentation et un mode de vie favorable à la santé en s’appuyant sur une vision positive de l’alimentation est la philosophie qui guide ce programme. C’est un programme de santé publique qui fixe des objectifs quantifiés pragmatiques, issus d’une analyse approfondie de la situation nutritionnelle dans la population française. Il fixe des principes qui guident les interventions, des stratégies précises, il détermine les grandes actions à mettre en œuvre dans chaque option stratégique. Il prévoit les moyens de son évaluation. Les objectifs prioritaires du programme national nutrition santé sont indissociables. La nutrition est globale. La population, durant la préparation des Etats généraux de l’alimentation, a dit son désarroi face à une offre alimentaire toujours plus abondante, accompagnée de discours sur la nutrition nombreux, incohérents, émanant de sources très multiples. Le Programme national nutrition santé vise à rendre de la cohérence à ces discours et actions et à permettre au consommateur d’identifier aisément les communications et actions . Le secteur de la santé observe, dépiste, guérit au mieux les pathologies liées à une nutrition insatisfaisante. Il ne saurait à lui seul intervenir sur l’ensemble des facteurs qui déterminent la qualité de l’offre alimentaire et les choix de consommation et d’activités des Français. C’est pourquoi le programme national nutrition santé fait appel aux différents secteurs qui ensemble peuvent agir pour améliorer la situation. Depuis le mois de mai, il est coordonné par un comité stratégique que je préside et au sein duquel sont représentés 7 ministères1, 2 agences2, le Conseil national de l’alimentation, les collectivités territoriales3, 2 organismes de recherche4, le secteur économique5, le secteur de la santé6 et notamment la CNAM et le CFES partenaires pour l’action présentée aujourd’hui. Avant de présenter la campagne de promotion des fruits et légumes, je tiens à vous parler du logo du programme national nutrition santé. Il s’agit de faire en sorte que toutes les actions œuvrant pour l’atteinte des objectifs du programme, puissent être identifiées. Aussi un logo spécifique a été créé. Durant l’été trois versions ont été soumises par Internet à quelques 500 professionnels de la nutrition. Le choix final s’est porté sur ce rectangle en équilibre sur un coin qui rappelle en toutes lettres le programme national nutrition santé. Ses couleurs et son apparence globale montrent clairement son origine institutionnelle publique. Sa bouche souriante dit alimentation et plaisir. Ce logo se veut un identifiant des actions et documents publics qui seront rédigés, élaborés, mis en œuvre dans le cadre du programme national nutrition santé. Reconnu par chacun il doit faciliter l’identification de l’origine du message émis, fournir la garantie de validité scientifique nécessaire et limiter la confusion face à la prolifération de messages parfois contradictoires. Les medias, vous même donc, nous aiderons à le faire connaître et reconnaître par tous. Au delà des actions publiques, un groupe de travail a été mis en place, comprenant des représentants de producteurs, distributeurs, industriels, collectives, consommateurs, administrations, afin de définir les conditions et modalités d’attribution et d’utilisation du logo pour des communications et actions engagées par le secteur économique et associatif. Il doit me rendre ses conclusions en fin d’année. La campagne de promotion des fruits et légumes L’un des consensus majeurs en matière de nutrition concerne la consommation de fruits et légumes. De très nombreuses études dans le monde entier ont mis en évidence les aspects protecteurs de ces aliments vis à vis de diverses localisations de cancers, des maladies cardio vasculaires. Elles ont prouvé leur intérêt dans la prévention de l’obésité et dans sa prise en charge. En revanche, ces études ne permettent pas de savoir quel composant particulier et spécifique de ces aliments leur confère ce rôle protecteur : une ou des vitamines ? un oligo élément ? des phyto stérols ? C’est bien la consommation de l’aliment entier, fruit et légume qui est souhaitable, sous n’importe quelle forme, frais en conserve ou surgelé, cuit ou cru, - c’est ainsi que les études ont livré leurs conclusions - et sous les formes qui sont disponibles sur les étals des marchés, dans les petites ou grandes surfaces ou encore dans les jardins des particuliers. La quantité optimum estimée par les experts est au minimum d’environ 400 grammes par jour. Impossible à traduire en portions quotidiennes et l’on ne va pas, heureusement, suggérer aux Français de peser leurs assiettes ! Mais nous savons que cela correspond à au moins 5 fruits ou légumes par jour, tels que nous avons l’habitude de les consommer : fruit seul ou portion de légume dans l’assiette. Bien sûr il est préférable de les consommer au moment des repas, mais, pourquoi pas, en cas de " petite faim ", préférer un fruit plutôt qu’un " en cas " apportant trop de graisses et de sucres. Cette campagne a été l’occasion de travailler très étroitement et de façon fructueuse avec nos partenaires traditionnels de la CNAM et du CFES que je remercie vivement. Cela a aussi été l’occasion de travailler avec le secteur économique des fruits et légumes. Un dialogue qu’il faudra prolonger à niveau local pour renforcer la consommation de ces aliments qui tendent à être délaissés par de trop nombreux français. Les actions menées et en cours Bien sûr le programme national nutrition santé ne se résume pas à ces aspects de communication. En neuf mois, bien des actions ont été menées à bien et mises en route avec nos différents partenaires. Je ne peux, au risque de me montrer trop long qu’en mentionner les titres : • La circulaire relative à la composition des repas servis en restauration scolaire et à la sécurité des aliments, a été publiée au mois de juin 2001. • Un dossier nutrition a été ouvert sur le site internet du ministère de la santé. Il mettra notamment en ligne les documents produits dans le cadre du programme. • • Les guides alimentaires grand public et professionnels sont en cours d’élaboration. Une collection " les synthèses du Programme national nutrition santé " destinée aux professionnels a été initiée par la DGS7. • Deux publications visant à promouvoir la pratique de l’allaitement maternel ont été soutenues8. • Un outil pour l’évaluation de la masse corporelle a été conçu, validé par le collège des enseignants de nutrition. Il sera finalisé par le CFES et diffusé vers les professionnels de la santé. Une version enfant est en cours de conception. • L’unité de surveillance et d’épidémiologie nutritionnelle, unité mixte de l’Institut de veille sanitaire et du conservatoire national des arts et métiers est opérationnelle depuis le mois de mai 2001. • Diverses recherches opérationnelles ont été initiées avec le soutien de la DGS9. • Les projets soumis à l’appel d’offre 2001 de l’action Nutrialis du ministère de la recherche sont en cours de sélection, l’appel à projet 2002 est lancé10. • La Direction générale de la santé élabore une circulaire à destination des services déconcentrés, afin de stimuler et favoriser la coordination locale dans le cadre des Comité régionaux des politiques de santé. • Afin d’améliorer la restauration au sein des établissements de santé, un comité d’orientation a été mis en place dès le mois de mars. Les premiers travaux visent à améliorer la restauration hospitalière, en prenant en compte aussi la composante " soins " que revêt l’alimentation dans la prise en charge du malade, à améliorer le dépistage et la prise en charge de la dénutrition à l’hôpital, à tester des modes de prise en charge de l’obésité de l’enfant dans le cadre de réseaux de • • • soins ville hôpital. Des propositions sur l’évolution des métiers de la nutrition et des formations qui sont nécessaires, en commençant par le " diététicien " seront effectuées dans les prochains mois. De même va être débuté, avec l’éducation nationale, une réflexion sur la place de la nutrition dans les programmes scolaires. En 2002, un budget, actuellement en discussion au parlement, sera consacré par le ministère de la santé aux actions du programme national nutrition santé, tant au niveau déconcentré que central. Conclusion Depuis 9 mois, beaucoup a déjà été accompli. Une vraie dynamique est en place avec l’ensemble des partenaires. Et le programme dure 5 ans. Cette campagne est la première action très visible. Elle est très importante car elle montre le sens positif dans lequel le programme est lancé. Améliorer la nutrition pour réduire les principales pathologies qui sévissent en France est indispensable. C’est un levier essentiel de la prévention. Nous devons tous agir dans ce sens, afin que le comportement alimentaire des Français soit favorable à leur santé, que l’offre et les choix alimentaires concilient plaisir et santé. C’est le vœu des Français. Je me félicite d’ailleurs que les deux plus grandes revues de la presse consumériste (60 millions de consommateurs et Que Choisir) aient consacré leur dernier numéro au programme national nutrition santé. C’est la preuve que l’ensemble de la société est mobilisée sur ce sujet. Merci 1 agriculture et pêche, consommation, éducation nationale, jeunesse et des sports, recherche, intérieur, santé InVS et AFSSA 3 Association des maires de France, Assemblée des départements de France 4 INRA et INSERM 5 ANIA (Association national des industries alimentaires) 6 Fédération nationale de la mutualité française 7 Première parution : " la prévention des fractures liées à l'ostéoporose : nutrition de la personne âgée " Seconde parution (à venir) : " nutrition et cancer " 8 " Guide ressources pour l'allaitement maternel " édité par la coordination française pour l'allaitement maternel " guide à l'usage des professionnels de la santé sur l'allaitement maternel " édité par l'association départementale d'éducation pour la santé du Rhône. 9 " alimentation des personnes âgées vivant seules à domicile ", " réduction des carences en énergie et micro nutriments des sans domicile fixe " " étude des actions menées par les associations travaillant au niveau des quartiers sur le thème de la nutrition ". 10 les thématiques portent sur " alimentation et cancer ", " alimentation et obésité ", " alimentation et maladies cardio vasculaires ", " tables de composition des aliments " 2