Chirurgie orthopédique : maîtriser le risque pour l

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L
SPÉCIAÈS
CONGR
LUNDI 10 NOVEMBRE 2014 - 9364
44e ANNÉE - 1, RUE AUGUSTINE VARIOT - CS 80004 - 92245 MALAKOFF CEDEX - TÉL. : 01 73 28 12 70 - ISSN 0399-2659 - CPPAP 0417 T 81257
89e CONGRÈS ANNUEL DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE CHIRURGIE
ORTHOPÉDIQUE ET TRAUMATOLOGIQUE, 10-13 novembre 2014, Paris
Avec le concours des coordinateurs de la communication à la
Sofcot : les Prs N. Passuti, R. Kohler,
C. Court, F. Fitoussi, C. Msika
de la comission du site Internet
w w w. s o f c o t . f r : l e s P r s e t
Drs A. Poichotte, B. Tomeno,T. Gregory, A. Blamoutier, HF. Parent,
B. Augereau, C. Msika, assistés du
bureau administratif de la sofcot :
Mmes G.Patte, E. Brackenbury,
M. Rachdi
et du site www.sofcot-congres.fr
Chirurgie orthopédique : maîtriser
le risque pour l’excellence de qualité
La SOFCOT toujours engagée dans sa démarche de qualité dédiée au patient multiplie, à l’occasion de
son 89e congrès, les initiatives d’éducation, aussi bien sur les thèmes pathologiques classiques que sur
les thématiques d’exercice professionnel.
Une édition réalisée par le Pr Charles Msika
Sommaire
L’avenir
centenaire
La SOFCOT
en 2014
Pied plat de l’adulte
Une analyse pas
à pas P. 2
L
a SOFCOT fut fondée au terme de
la Grande guerre afin de conserver et développer les connaissances
et l’expérience des soins prodigués
aux blessés. D’abord société savante,
diffusant les connaissances par ses
congrès et publications, elle a, au fur
et à mesure de sa croissance et de
l’évolution de la profession, élargi ses
missions. La SOFCOT s’est régulièrement adaptée à l’exercice chirurgical,
dans ses dimensions techniques,
relationnelles ou administratives.
Notre société, par son organisation,
s’est imposée auprès des tutelles
comme une experte
privilégiée, rassemblant les chirurgiens orthopédistes dans leur
diversité d’exercice professionnel.
Ainsi, le conseil national professionnel de chirurgie orthopédique
et traumatologique (CNP-SOFCOT)
a été créé en novembre 2013, pour
faire fonctionner notre société et
représenter l’interlocuteur unique
des tutelles. Il rassemble toutes les
composantes de la société, dans le
respect de la parité de la représentation des chirurgiens du secteur
public et privé : sociétés associées et
partenaires, académie (AOT), collège
(CFCOT), organisme d’accréditation
(Orthorisq), syndicat (SNCO) et fondation (FICOT).
Les chirurgiens orthopédistes sont
attentifs à la qualité et à la sécurité
des soins qu’ils prodiguent.
La SOFCOT a mis en place une structure de gestion du risque (Orthorisq),
tout en assurant le meilleur niveau
possible de qualification pour les
professionnels en exercice, via
notamment l’AOT le CFCOT. Mais la
qualité des soins suppose aussi leur
évaluation, comme en témoignent
les relations régulières avec la HAS.
Cette année lors du congrès plusieurs
séances seront conjointes avec cette
autorité. Enfin, la sécurité passe
aussi par la matériovigilance, sujet
interactif entre le CNP-SOFCOT et
l’Agence Nationale de sécurité du
médicament et des produits de santé
(ASNM).
Pour répondre
aux nouvelles
réglementations
du DPC, le CNPSOFCOT a créé
l’ODPC-COT. Le
rapport récent de
l’IGAS sur le DPC, va imposer à nos
structures de nouvelles adaptations.
Les chirurgiens orthopédistes interviennent à tous les âges de la vie pour
restaurer l’autonomie. Cela suppose
des nécessaires adaptations.
Par exemple, le développement de la
chirurgie ambulatoire. Ce mode de
prise en charge nécessite des adaptations du mode d’exercice et il doit
être accompagné par les établissements et les pouvoirs publics .
La recherche et l’innovation passent
par l’octroi de bourses de recherche
pour les jeunes collègues. La SOFCOT
a mis en place une fondation (FICOT)
pour collecter des fonds. Les partenariats avec les industriels sont aussi
indispensables. Les chirurgiens
français doivent pouvoir continuer
d’innover et le dynamisme industriel français doit pouvoir s’impliquer, tout en étant responsables et
soucieux des enjeux économiques
actuels.
Nous sommes attachés au rayonnement de la chirurgie orthopédique
française. Cette année, notre société
a été invitée d’honneur du congrès
américain (AAOS), espagnol,
allemand (DGKOU) et chinois.
Et lors de notre congrès, ce sont
les pays scandinaves qui sont à
l’honneur. Pour la première fois, les
communications en anglais sont
acceptées et la tenue de sessions traduites en Anglais devrait attirer des
collègues non francophones. Enfin,
notre revue OTSR continue
son ascension avec un impact factor
de 1,168 ce qui la place 39e de sa
catégorie.
Ainsi la SOFCOT a beaucoup changé
depuis sa naissance et toutes ces
adaptations ne sont possibles
qu’avec l’investissement de son bureau exécutif et de nombreux bénévoles, qui dans l’ombre font avancer
notre société ; qu’ils en soient ici
chaleureusement remerciés.
Secrétaire général de la SOFCOT
E
n 2013, mon prédécesseur le Pr
Bernard Augereau avait rappelé
l’histoire de la SOFCOT, devenue
récemment le Conseil national professionnel
CNP-SOFCOT. Cette évolution est
essentielle car notre structure permet d’avoir un interlocuteur unique
vis-à-vis des différentes tutelles, tels
que le ministère de la Santé, la Haute
Autorité de santé (HAS), l’Agence
nationale de sécurité du médicament
et des produits de santé (ANSM)
et la Fédération des spécialités
médicales (FSM).
Notre ligne politique pour l’année
2014 était « Qualité et Évaluation »,
en lien avec la HAS. Ainsi, le Congrès
2014 élaboré par le Professeur Rémi
Kohler, va intéresser les médecins
généralistes.
En pratique, l’objectif est d’élaborer
des recommandations de bonnes
pratiques. Un cahier spécial de
chirurgie orthopédique a été publié et
mis en ligne par la HAS sur son site.
Il permettra d’actualiser nos pratiques auprès de nos confrères.
La communication est également un
élément primordial. Ainsi, notre site
internet contient une arborescence
grand public afin que les patients
accèdent à des informations validées.
Les pathologies ostéoarticulaires
représentent une activité importante des consultations de médecine
générale et l’actualisation de nos
pratiques doit aider nos confrères.
Bien entendu, le CNP-SOFCOT fait
partie intégrante de la FSM, ce qui
assure une coordination avec les
autres spécialités médicales chirurgicales. Dans ce cadre, nous travaillons
sur le projet de registre des prothèses,
élément clef en termes de santé
publique et de vigilance.
Le CNP-SOFCOT s’est engagé dans
le cadre du DPC. Ainsi, la journée du
lundi 10 novembre du congrès lui est
consacrée : une matinée organisée
par Orthorisq (gestion des risques) et
une après-midi de conférences d’enseignement : malgré les incertitudes
réglementaires, notre société se doit
de pérenniser ce
programme consolidé par ailleurs par
le e-learning proposé depuis 2 ans.
Sur le plan international, la chirurgie
orthopédique et traumatologique
française est reconnue dans le monde
entier. Ainsi, la France était invitée
en mars 2014 lors du congrès de la
Société américaine d’orthopédie et
de traumatologie (AAOS). Au niveau
européen, nous sommes impliqués
dans toutes les commissions de la
Fédération européenne de chirurgie
orthopédique et traumatologique
(EFORT). L’influence française se
traduit par son rôle important au
sein de l’Association orthopédique
de langue française (AOLF). Cette
reconnaissance nous permet de faire
connaître les innovations françaises
en lien avec les industriels développant les dispositifs médicaux ; la
SOFCOT aborde avec volontarisme la
mondialisation.
L’avenir de notre discipline doit s’appuyer sur nos jeunes collègues. Ainsi,
le Collège d’orthopédie dirigé par le
Pr Dominique Chauveaux assure
une formation initiale et continue en
lien avec la sous-section du Conseil
national des universités (CNU) afin
d’assurer la validation de chirurgiens
orthopédistes et traumatologues
de qualité ; par ailleurs, le Collège
des jeunes orthopédistes (CJO) a une
place importante au sein du CNPSOFCOT pour les programmes
d’enseignement et scientifiques du
congrès. La défense de l’exercice
professionnel est dévolue au Syndicat
national des chirurgiens orthopédistes et traumatologies (SNCO), qui
s’est impliqué pour défendre nos
intérêts dans des domaines tels que
la chirurgie ambulatoire, la valorisation des actes...
Ainsi, en 2014, le CNP-SOFCOT a
consolidé sa reconnaissance sur
le plan national. En particulier, la validation de recommandations avec la
HAS et leur publication en ligne (dès
le jour du congrès) devront permettre
à nos collègues médecins d’actualiser
leurs connaissances.
Ligament croisé
antérieur
La reconstruction avec
le recul P. 4
Les registres
Une mine d’information
à exploiter P. 4
Fractures céphalobitubérositaires
Un traitement difficile
sans consensus P. 4
Activité sportive
chez l’enfant
Attention au surmenage
squelettique P. 6
Nouvelles technologies
de l’os
Au cœur des explorations non invasives P. 7
Arthrose du poignet
Des interventions à
la carte P. 8
Les voies de la prothèse
de hanche
Reprise, micromouvements et diamètre de
la tête P. 7 et 11
Président du CNP-SOFCOT
Retrouvez-nous en continu sur lequotidiendumedecin.fr
CHSP9364_001_001_QVW 1
DR
Éditorial du Pr Norbert Passuti
DR
Éditorial du Pr Charles Court
Histoires de rachis
Arthrose, fractures et
scoliose P. 9 à 12
06/11/2014 15:20:44
2
Congrès hebdo
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
SOFCOT
Pied plat de l’adulte
Une analyse pas à pas
Quelles sont les différentes
formes de pied-plat ?
Quels examens permettent de
le diagnostiquer ?
Que faire face à un pied-plat
douloureux ? Le point sur cette
pathologie.
calcanéonaviculaire, caractérisée
par la raideur de l’articulation subtalaire (fig.4). Le pied plat dégénératif touche la femme ménopausée le
plus souvent obèse.
●●Affaissement de l’arche médiale
du pied, le pied plat entraîne une
perte de la voûte (fig.1). Il en existe
de multiples morphologies, en fonction de la localisation des laxités
articulaires : plutôt en valgus (fig.2),
en cas de laxité médiale de cheville
ou d’hypermobilité sagittale du premier rayon (ascension anormale du
premier métatarsien à l’appui), ou
plutôt en abduction, en cas de laxité
talonaviculaire ou du médiopied
(fig. 3). La conséquence fonctionnelle est une marche apropulsive, à
cause de l’absence de verrouillage
du pied par le muscle tibial postérieur ; ce qui induit une poussée
médiale vers le pied opposé avec
des conséquences posturales sur
l’ensemble des membres inférieurs
et du rachis. La marche est alors
plus lente avec une fatigabilité plus
importante.
Plus rarement, les pieds plats
sont consécutifs à une lésion du tendon tibial postérieur suite à un traumatisme en éversion-valgus ou par
choc direct. La rupture du tibial postérieur ne permet plus le verrouillage du pied, qui s’affaisse progressivement. Le plus souvent, suite à
une laxité articulaire post-traumatique ou dégénérative qui conduit à
une distension progressive du tendon tibial postérieur lors de l’appui
au sol. Le tendon se fissure puis s’effiloche et enfin se rompt.
Le ligament calcanéonaviculaire plantaire et médial (ou spring
ligament des Anglo-saxons) limite
la plongée de la tête du talus lors de
l’appui du pied et protège le tendon
tibial postérieur. Sa distension ou
rupture conduit à la subluxation
talonaviculaire et au surmenage du
tendon tibial postérieur (fig. 5 et 6).
Secondaire, congénital,
dégénératif
Douleur
Les raisons de faire un pied plat
sont nombreuses. On distingue trois
catégories : le pied plat secondaire,
congénital et dégénératif. Les étiologies du pied plat secondaire sont
variées : traumatique – suite à des
fractures du calcanéus, du talus, du
médiopied ou des entorses – rhumatismale, neurologique, diabétique
(ostéoarthropathie). Le pied plat
congénital (de l’enfant ou l’adolescent) est le plus souvent idiopathique et non symptomatique, mais
peut être lié à une rétraction tendineuse (pied plat contracturé) ou à
une synostose talocalcanéenne ou
Rôle du tendon du tibial
postérieur
Certains pied plats sont douloureux. Celle-ci se situe le plus souvent
sur le trajet terminal du tendon
tibial postérieur, au niveau d’une
zone de fragilité vasculaire. La lésion du spring ligament est en profondeur du tendon, ce qui n’est pas
facile à distinguer cliniquement.
Parmi les autres causes de douleurs
médiales, il faut retenir la synostose
talocalcanéenne et l’arthrose du
médiopied.
Cependant, le pied plat occasionne aussi des douleurs latérales
de l’arrière-pied du fait de conflit
osseux entre le calcanéus et la malléole latérale, entre le tubercule
latéral du talus et la face dorsale de
l’apophyse antérieure du calcanéus,
dans le sinus du tarse ou au niveau
de l’articulation calcanéocuboïdienne liée à l’abduction du médiopied (fig. 7).
√ Il faut prévenir
les facteurs de risque
– obésité, diabète,
entorses mal
étiquetées – et adresser
en cas de test de
mise sur pointe
de pied anormal
Examen clinique
Dans le pied plat, l’examen clinique recherche les articulations
distendues ou enraidies (arthrose
ou synostose), repère les déformations (valgus et abduction) et leur
réductibilité. L’examen principal
d’analyse du tendon tibial postérieur est la mise sur pointe de pied à
partir de l’appui monopodal. En cas
de dysfonction sévère du tendon, le
pied vu de l’arrière reste en éversion
voire le test est impossible. Si le test
est normal avec une inversion du
pied, le traitement médical doit soulager le patient (fig. 8, 9, 10).
Imagerie
Les radiographies doivent être
obligatoirement en charge, car le
pied s’affaisse avec le poids. Il est
inconcevable de définir un pied
plat en décharge. Trois incidences
sont recommandées pour mesurer
les trois déformations : l’affaissement sur le profil, l’abduction sur
l’incidence dorsoplantaire de face,
le valgus sur l’incidence cerclée de
Méary (face de la cheville). L’analyse
du tendon tibial postérieur peut
Fig.1
Fig.2
se faire à l’échographie ou à l’IRM.
Le scanner est indiqué dans
le pied-plat raide, pour visualiser
une arthrose ou une synostose. Les
reconstructions 3D permettent une
visualisation plus précise du pied
dans sa globalité et l’analyse des
morphotypes osseux et articulaires
dans le cadre de la recherche (fig. 11,
12, 13).
Orthèses plantaires
Régulièrement prescrites en
première intention, les orthèses
plantaires ne corrigent cependant
pas le pied plat ; elles permettent
surtout un soulagement des douleurs. La chaussure avec un bon
maintien postérieur est essentielle
pour la correction du valgus et l’efficacité des orthèses plantaires.
Les rétractions tendineuses
du triceps sural ou des tendons
fibulaires justifient des étirements
par le kinésithérapeute, à débuter
avant les orthèses pour améliorer
leur efficacité sur un pied assoupli.
Le strapping en inversion voire un
plâtre sont des solutions à ne pas
oublier dans les formes hyperalgiques (fig. 14).
Place de la chirurgie
En cas d’échec du traitement
médical, la chirurgie peut être proposée. Il s’agit d’un acte difficile,
pratiqué par un nombre limité
de chirurgiens orthopédiques. Il
existe des contre-indications liées
au terrain défavorable lors d’association de facteurs à risque (obésité,
polyarthrite rhumatoïde, tabagisme, lymphœdème) et au stade
évolué, avec arthrose secondaire de
cheville.
L’arthrodèse subtalaire et médiotarsienne est la technique classiquement utilisée pour ré-axer
et fixer la correction. Il arrive que
l’arthrodèse soit limitée à une seule
Fig.9
Figure 4. Le pied plat raide de
l’adolescent ou de l’adulte jeune
doit évoquer une synostose
(coalition) talocalcanéenne.
Fig.5
Figure 7. La douleur siège
dans la zone sous malléolaire
médiale associée à une
tuméfaction atténuant le relief
de la malléole
articulation en cas d’atteinte monoarticulaire. Ces techniques sont
réalisables dans les formes fixées
arthrosiques comme dans les
formes réductibles.
Cependant, les formes réductibles peuvent être corrigées par des
ostéotomies (translation médiale de
la tubérosité ou allongement antérieur du calcanéus), des implants
dans le sinus du tarse, technique
appelée arthrorise (fig. 15, 16, 17).
La correction du pied obtenue
par ces interventions chirurgicales
est souvent spectaculaire, mais il ne
faut pas omettre qu’elle induit des
modifications notables de la posture
du fait de la récupération de la hauteur du pied et des modifications
fonctionnelles de la marche.
D’autre part, la récupération est
souvent longue, entre 4 et 6 mois
d’arrêt de travail conduisant à un report de l’intervention au détriment
de l’aggravation des lésions articulaires.
Pronostic
Le pronostic du pied-plat sévère
est à la cheville. Certes, on peut rencontrer des insuffisances de résultats du fait de l’absence d’intégration des lésions du médiopied, mais
l’atteinte arthrosique de la tibiotarsienne représente une situation qui
conduit le chirurgien à proposer
une panarthrodèse c’est-à-dire une
arthrodèse de la cheville, de l’arrière-pied et du médiopied, peu satisfaisante sur le plan fonctionnel.
Des travaux sont en cours concernant l’intérêt des réparations ligamentaires médiales de la cheville
et sur les arthroplasties totales de
cheville (fig. 18).
Conseils pour les généralistes
Il faut d’abord bien analyser et
traiter les rétractions tendineuses
inductrices de pied-plat, c’est-à-
Fig.10
Si la mise sur pointe de pied bipodale est normale (pied en inversion)
et que la pointe monopodale est pathologique (éversion ou impossible), le diagnostic de lésion du tendon tibial postérieur ou du spring
ligament doit être évoqué
Fig.11
Fig.12
Fig.13
Fig.3
Figure 1. Affaissement
de l’arche médiale
Figure 2. Valgus de
l’arrière-pied
Figure 3. Abduction du
médiopied
CHSP9364_002_003_QVW 2
L’articulation talonaviculaire
est stabilisée en médial par un
fibrocartilage calcanéonaviculaire appelé spring (ressort)
ligament (carré bleu) renforcé
par le tendon tibial postérieur
(trait vert).
Figure 8. L’examen de la plante
du pied montre l’abduction
avec la cassure du bord latéral
du pied et la supination
de l’avant-pied par rapport
à l’arrière-pied
Radiographies en charge en trois incidences :
– la face dorsoplantaire montre l’abduction avec l’axe talodeuxième
métatarsien (le col du talus doit être parfaitement visualisé) ;
– le profil montre l’affaissement de l’arche médiale, la ou les articulations effondrées et dans certains cas, l’arthrose secondaire ;
– l’incidence cerclée de Méary mesure le valgus de l’arrière-pied et
analyse d’éventuelles déformations articulaires de la tibiotarsienne,
une laxité ou une arthrose
PHOTOS : DR
Fig.6
06/11/2014 15:32:09
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
Congrès hebdo
3
Ligament croisé antérieur
Les résultats à long terme de la reconstruction
Après trois ans de travail,
une étude rétrospective multicentrique rapporte les résultats
à 10 et 20 ans des genoux opérés
d’une reconstruction
du ligament croisé antérieur,
afin de dégager des profils type
de l’évolution (1).
dire le tendon calcanéen (achille) et
les fibulaires (péroniers). Ensuite,
si le test de mise sur pointe de pied
monopodal est pathologique, le
patient doit être adressé au chirurgien.
La prévention des facteurs
de risque que sont l’obésité et le
diabète doit être poursuivie, sans
oublier les entorses du médiopied
souvent étiquetées entorses de
cheville et traitées par une orthèse
stabilisatrice de cheville qui ne stabilise pas le pied.
D’après la conférence d’enseignement
du Dr Éric Toullec, chirurgien du pied et
de la cheville exclusif libéral, polyclinique
de Bordeaux Tondu. Secrétaire général de
l’association française de chirurgie
du pied (AFCP).
www.chirurgie-cheville-pied.com
●●Un des deux symposiums de
la AOT-CNP SOFCOT s’intéresse
aux résultats à long terme (plus de
10 ans) du traitement chirurgical
des laxités antérieures du genou par
reconstruction du ligament croisé
antérieur (LCA). Si l’histoire naturelle, potentiellement péjorative,
d’un genou qui a subi une rupture
du LCA est bien connue depuis des
années (avec développement du
triptique instabilité–méniscectomie–arthrose à long terme), l’avenir
de la reconstruction du LCA par ligamentoplastie moderne (autogreffe
réalisée sous arthroscopie avec préservation du capital méniscal) reste
plus incertaine, en particulier pour
les résultats au-delà de 10 ans.
En effet, depuis 1981, où un symposium avait été consacré au traitement des ruptures ligamentaires
fraîches par Imbert, beaucoup de
chemin a été parcouru, avec de nombreuses évolutions.
Figure 14. Le strapping en inversion peut être très utile dans les
formes très algiques
Fig.15
Jeune sportif
La rupture du LCA est une affection fréquente chez le jeune sportif
(plus de 40 000 interventions de reconstruction en 2014), avec notamment plus de 18 000 ruptures liées
à la pratique du ski durant une saison. Elle est régulièrement –après
sélection des patients en tenant
compte des recommandations de
la HAS en 2008– traitée chirurgicalement par une reconstruction du
ligament.
L’objectif de cette intervention
est de reconstituer l’anatomie du genou afin de retrouver un genou fonctionnel stable et indolore, qui autorise ensuite la reprise des activités
sportives, limite la survenue de lésions méniscales ultérieures et cartilagineuses secondaires. Elle pour-
Fig.16
Les objectifs
PHOTOS : DR
L’arthrodèse du couple de torsion avec correction des déformations et
retente du tibial postérieur reste l’intervention la plus utilisée
Figure 17. L’ostéotomie
d’allongement du calcanéus
selon Evans permet une bonne
correction de l’abduction
de l’avant-pied
CHSP9364_002_003_QVW 3
Figure 18. L’arthrose valgisante
de cheville reste de pronostic
fonctionnel réservé ; la panarthrodèse est encore préférée
aux techniques conservatrices
en cours d’évaluation
●●Cette étude observationnelle (1)
a pour objectifs :
– d’évaluer les résultats fonctionnels à travers l’International
Knee Documentation Committee
(IKDC). Le retour au sport et à
la compétition avec un même
niveau sportif, sont les critères
retenus.
– D’étudier les résultats cliniques
et radiographiques en prenant en
compte la laxité résiduelle et son
gain, permettant d’appréhender
l’efficacité de la ligamentoplastie
sur la correction de la laxité initiale, et ce, quel que soit le mode
de mesure : manuel, instrumental
(KT 1 000 ou 2 000) ou radiologique. Cette laxité est mesurée en
millimètres par rapport au côté
opposé (différentielle).
L’IKDC global (qui prend en
compte la mobilité, l’épanchement, la laxité. IKDC A, B, C ou D
(respectivement pour normal,
presque normal, anormal, sévèrement pathologique) est fréquemment classé en A+B ou C+D dans
rait donc, théoriquement, avoir pour
objectif secondaire à long terme de
freiner la dégradation arthrosique
du genou.
Avenir fonctionnel
Cette pathologie concerne des
patients de tous âges mais le plus
souvent des sujets jeunes de 20 à
30 ans. Les résultats cliniques et
radiographiques à court terme (2
et 5 ans de recul) ont fait l’objet de
nombreuses publications sur la reprise des activités sportives. Cependant, leur avenir fonctionnel reste
une vraie préoccupation.
Les données à plus long terme
sont plus rares, mêmes si des
équipes françaises (2) avaient rapporté des résultats intéressants
sur des patients pris en charge il y
a de nombreuses années, avec souvent un capital méniscal non intact
au moment de l’intervention. Une
étude conduite à Caen en 2006 (publiée dans AJSM) pour analyser ce
type de résultats au-delà de 10 ans
avec des genoux moins préservés
au moment de l’intervention avait
orienté les résultats et renforcé la
nécessité de conservation méniscale, mais l’effectif était faible, avec
100 patients.
Étude française
L’intérêt d’une étude rétrospective multicentrique était de
pouvoir recueillir un collectif plus
important et ainsi mieux représenter les résultats au niveau national.
Ces patients, jeunes au moment de
l’intervention, sont très mobiles et
il est parfois difficile de les suivre en
consultation avec un examen habituel clinique et radiographique,
même si l’évolution de certains des
genoux opérés incite à les suivre
régulièrement.
Ainsi nous comptons, avec
cette étude, améliorer les données
recueillies par rapport aux données déjà publiées sur des sujets
jeunes au moment de l’intervention qui, 10 ans plus tard, ont bien
souvent moins de 40 ans. Il s’agissait d’une étude rétrospective
les études pour évaluer les bons et
mauvais résultats.
– D’enregistrer la survenue des
lésions méniscales secondaires
et le taux de méniscectomie
secondaire après chirurgie ligamentaire. Ce taux est le reflet de
la capacité de la reconstruction
ligamentaire à préserver le capital
méniscal.
– De suivre la survenue d’une arthrose selon les critères de l’IKDC
évalués à partir des radiographies
du genou prises en charge, de face,
de profil et en schuss. La préservation du ménisque se justifie
par l’hypothèse de prévenir la
survenue d’arthrose à distance de
l’épisode. La littérature rapporte
un taux important d’arthrose
après rupture du croisé antérieur,
opérée ou non (25 à 44 %).
– Enfin, les ruptures secondaires
sont rarement décrites dans les
études rétrospectives. Dans les
études prospectives randomisées,
les taux de rupture secondaire
vraie traumatique se situaient
entre 3,4 % et 4,1 % selon le type de
greffe utilisé.
multicentrique qui impliquait
19 centres médicaux (1).
Nous avons ainsi pu analyser
plus de 600 patients avec 10 ans de
recul et 180 à 20 ans de recul, ce qui
en fait un collectif important. Nous
avons pu ainsi analyser de nombreux critères pronostiques ; les
recouper avec la littérature afin de
dégager des portraits type d’évolution des genoux en terme de stabilité, nouvelle rupture, évolution méniscale, reprise du sport et devenir
arthrosique. Il est intéressant aussi
d’analyser nos pratiques en fonction des recommandations éditées
par la HAS en 2008.
D’après la conférence d’enseignement
du Dr Nicolas Graveleau (Paris) et du
Pr Christophe Hulet (Caen)
(1) Les investigateurs principaux sont le
Pr Christophe Hulet (CHU de Caen) et le
Dr Nicolas Graveleau (Espace Médical
Vauban, Paris) mais aussi les centres de
Lyon (Centre Albert Trillat, Centre Santy,
Hôpital Lyon sud), de Paris
(CHU Ambroise Paré et La Pitié-Salpêtrière, Clinique des Maussins, Centre
Nollet, Institut Goethe et CMC Paris V),
les CH de Versailles et Mayenne, les
hôpitaux militaires dans leur ensemble,
la polyclinique de l’Europe à La Baule, le
centre Borely de Marseille et les CHU de
Caen, Brest, Nice, Grenoble
(2) Chambat P (thèse de Selva), Dejour H
(thèse de T Ait Si Selmi), Lerat JL (thèse
de F Chotel), Neyret P (thèse de J Pernin),
Locker B (thèse de G Pierrard).
La SOFCOT poursuit un
effort d’éducation et de formation de ses membres.
Cet enseignement est coordonné
par les Prs Jacques Duparc
et Denis Huten.
Le texte de ces mises au point
extensives est publié régulièrement par Elsevier dans
les « Cahiers d’enseignement
de la SOFCOT ».
Les conflits d’intérêts de tous
les auteurs intervenant dans
ce numéro sont présentés sur
www.lequotidiendumedecin.
fr/conflits_dinterets
Rédactrice en chef :
Dr Charlotte Pommier
Secrétaire de rédaction :
Béatrice Dumont
06/11/2014 15:42:30
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Congrès hebdo
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
SOFCOT
Registres en orthopédie
Une mine d’informations dont on ne devrait pas se passer
Les registres ont apporté
énormément à la communauté chirurgicale. À l’échellon
individuel, ils fournissent à
chaque chirurgien des données
lui permettant de confronter
sa pratique à celle de sa profession. Aux niveaux national
et international, ils apportent
des informations inédites sur
les performances des implants
mais aussi des établissements,
dont les décideurs ne voudront
bientôt plus se passer. En
France, ils se heurtent encore à
des obstacles administratifs et
financiers.
●●À l’ère des biobanques et du big
data, la médecine est à la veille
d’une transformation révolutionnaire de ses connaissances et de
ses stratégies décisionnelles. La
chirurgie orthopédique avait été
à l’avant-garde de cette démarche,
avec l’expérience scandinave de
1975 concernant les prothèses totales du genou (PTG).
Ce n’est qu’en 1998 que parût le
premier registre en langue anglaise
(Nouvelle-Zélande), alors que les
États-Unis ainsi que de nombreux
pays européens peinent encore à ce
jour à se doter de tels outils. Il existe
actuellement 11 registres nationaux
répertoriés dédiés aux prothèses
totales de hanche (PTH) et PTG – soit
de manière exclusive soit au sein de
registres multisites. Leurs résultats
sont souvent consensuels, parfois
en opposition du fait d’importantes
variations liées aux cultures et aux
lois des marchés.
En France, un registre est « un recueil continu et exhaustif de données
nominatives intéressant un ou plusieurs événements de santé dans une
population géographiquement définie, à des fins de recherche et de santé
publique, par une équipe ayant les
compétences appropriées », selon le
Comité national des registres (CNR).
Maladies versus implants
En matière de prothèses, un
registre ne fait que tracer le devenir des dispositifs médicaux implantables (DMI). À l’inverse des
registres de maladies (infectieuses,
cancers, etc.), c’est la survie de la
prothèse que l’on étudie et non celle
du patient dont le décès prothèse
encore en place, correspond à un
succès probable ou relatif de celle-ci,
puisqu’elle aura servi la totalité de
la vie du patient sans avoir été changée.
La gestion d’un registre nécessite du temps, de l’argent et une
exhaustivité des données. Cela repose sur le recours à un identifiant
patient unique (numéro de Sécurité
Sociale), afin de tracer parfaitement
le patient et les actes chirurgicaux
liés à un même implant ; un financement pérenne ; une méthode de
collection moderne et rapide des
données, exclusivement par internet ; une exhaustivité obligatoire, au
moins pour les implants innovants.
Leurs effets sur les pratiques professionnelles doivent aussi être éva-
lués. Enfin, leur coût important pose
le problème de leur indépendance
financière et de la propriété de leur
contenu.
De larges applications
Avant tout, les registres permettent de comparer les résultats
des implants prothétiques entre
eux. Leur efficacité comme structure d’alerte en situation de crise est
un argument régulièrement avancé
par les gestionnaires. L’inclusion
d’implants prothétiques innovants
dans un registre national quasi-exhaustif permet de confronter leurs
résultats précoces à ceux des grands
standards et de dépister ainsi en
quelques années les performances
décevantes.
L’étude différentielle des registres
nationaux permet aussi d’approcher objectivement les éventuelles
variations entre données épidémiologiques, démographiques et technologiques. Il faut noter que le nombre
d’implants inclus chaque année varie
d’un facteur 1 à 20, sous l’influence
combinée de la démographie du pays
et de la collaboration plus ou moins
étendue des chirurgiens (observance). La couverture nationale est
importante à prendre en considération, en particulier pour les registres
les plus récents qui n’ont pas encore
atteint leur rythme de croisière.
Enfin, certains registres scandinaves publient les résultats de
chaque région et de chaque établissement, le public peut ainsi orienter
ses choix. Cela suppose une grande
Fractures de l’humérus proximal
maturité de la population et un
niveau élevé de culture de l’évaluation de la part des praticiens. On
comprend par contre les difficultés
à sortir des sentiers balisés pour les
équipes chirurgicales et le frein relatif à l’innovation au nom du principe
de précaution.
Investissement et
indépendance
L’avenir des registres est conditionné par l’investissement conjoint
des pouvoirs publics et des professionnels concernés. La création de
registres des implants est actuellement une recommandation
majeure de la Commission Européenne pour la médecine (EUCOMED), afin d’améliorer la qualité
des soins portés aux patients de
la communauté européenne. Cela
permettrait de réduire d’une part
les délais de réaction en cas de nouvelles alertes de matériovigilance,
et d’autre part leurs conséquences
sanitaires, en favorisant la transmission de l’information et en accélérant la réactivité des autres pays
quant à la poursuite des implantations d’un produit apparaissant
défectueux.
Même s’il reste difficile de mesurer la baisse des dépenses de santé
susceptible de découler de la mise
en application de ces recommandations, ces éléments peuvent inciter
les organismes payeurs à participer
à leur financement. La prévention
d’une dérive d’exploitation à visée
purement économique nécessite le
Fig.1a
maintien d’une certaine indépendance.
En France, tout registre se doit
de respecter la législation relative à
l’utilisation et à la conservation de
données personnelles, en particulier la loi « Informatique et libertés »
du 6 janvier 1978. Il est nécessaire
d’associer à leur développement les
sociétés savantes et les médecins intéressés : cette mission a été confiée
à la fédération des spécialités médicales (FSM). C’est sur la base du seul
volontariat qu’a été conçu en 2006
le registre des PTH de la SOFCOT
(agrément CNIL, N°04-1277).
Il reste toutefois un obstacle
majeur à la création de registres de
suivi efficace des patients : les conditions très restrictives d’utilisation
du numéro d’inscription au répertoire (NIR) national d’identification
des personnes physiques, qui ne
peut être autorisé que par décret du
Conseil d’État. Le caractère jusqu’à
présent purement volontaire des
registres a malheureusement montré ses limites. Plusieurs options
s’offrent aux pouvoirs publics pour
inciter praticiens et hôpitaux à les
alimenter. À l’extrême, conditionner le remboursement du DMI et de
l’acte chirurgical qui y est associé au
renseignement d’un registre, serait
à l’évidence d’une redoutable efficacité.
D’après la conférence d’enseignement
du Dr Christian Delaunay, chirurgien
orthopédiste et traumatologue, clinique de
l’Yvette, Longjumeau
Fig.1b
Un traitement difficile sans consensus
Les fractures à quatre fragments de l’extrémité proximale
de l’humérus, dites aussi
céphalobitubérositaires (figure
1a et b), sont très difficiles à traiter et ne bénéficient pas encore
aujourd’hui de consensus
parmi les chirurgiens qui s’en
occupent.
●●Ce symposium a pour objectif de
dresser un état des lieux des différents traitements des fractures céphalobitubérositaires, utilisés dans
douze centres spécialisés français et
d’en évaluer les résultats à partir de
deux études distinctes : prospective
et rétrospective.
La première a été menée durant
l’année 2013, après avoir eu l’aval
du comité d’éthique et de la Commission nationale informatique
et liberté (même s’il s’agissait en
fait d’une étude de soins courants
n’engageant en rien la sécurité du
patient, puisque chaque centre
utilisait le traitement qui lui était
familier). Ont été ainsi colligés de
manière prospective les traitements
suivants : orthopédique, ostéosynthèse par plaque vissée (figure 2),
par clou centromédullaire (figure
3), par embrochage (figure 4), par
la technique du bilboquet (figure 5)
et remplacement prothétique par
prothèse anatomique (figure 6) ou
inversée (figure 7).
Tous les patients ont été revus
avec un recul minimum de 6 mois et
maximum de 18 mois. Ainsi, les don-
CHSP9364_004_004_QVW 4
nées rassemblées ont permis d’une
part de mener une étude épidémiologique, d’autre part de recueillir les
complications éventuelles des différents traitements et enfin d’avoir
une évaluation des résultats fonctionnels à court terme.
Fig.2
Fig.4
Fig.5
√ Un large spectre
d’alternatives thérapeutiques
L’autre étude, rétrospective, a
consisté à revoir les patients opérés
entre 2009 et 2011 de manière à avoir
un recul minimum de 2 ans. Ont pu
ainsi être analysés les résultats tardifs, tant anatomiques (cals vicieux,
nécrose de la tête humérale [figure
8], migration ou lyse des tubérosités) que fonctionnels (douleurs
résiduelles, raideur, gêne dans la vie
quotidienne, force musculaire).
Au total, 219 dossiers ont pu ainsi
être colligés dans l’étude prospective
et 389 dans l’étude rétrospective, ce
qui constitue une base de données
particulièrement remarquable.
Fig.3
Fig.7
Fig.6
Fig.8
D’après un symposium dirigé par les
Prs Dominque Saragaglia (Grenoble)
et François Sirveaux (Nancy), avec la
participation des Prs et Drs Levon Doursounian (Paris), Damien Block (Nancy),
Romain Bouchet (Grenoble), Philippe
Clavert (Strasbourg), Xavier Ohl
(Reims), Christian Cuny (Metz), Thomas
d’Ollone (Nice), José François Gadea
(Tours), Clément Tournier (Bordeaux),
Laurent Obert (Besançon), Nicolas
Bonnevialle (Toulouse).
06/11/2014 15:21:40
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
Arthrose symptomatique
La viscosupplémentation a toujours sa place
Le principe
L’AH, principal constituant du
cartilage et du liquide synovial, est
une longue chaîne de sucres (glycosaminoglycanes), dont le caractère
très hydrophile lui confère une visco-élasticité à l’origine de propriétés
mécaniques du cartilage (absorption
des chocs) et du liquide synovial (lubrification articulaire, protection du
cartilage). Lors de l’arthrose, il y a un
déficit quantitatif et qualitatif en AH
articulaire, y injecter un AH exogène
vise non seulement à rétablir les propriétés mécaniques, mais aussi à induire des effets biologiques, l’AH injecté étant capté par des récepteurs
articulaires spécifiques : action antiinflammatoire modérée, anti-oxydante, anabolisante sur le cartilage,
antalgique directe par masquage des
nocicepteurs articulaires et réduction de la production enzymatique
induite par les cytokines. Des propriétés de visco-induction, c’est-àdire de stimulation de la production
d’AH endogène, pourraient expliquer
l’efficacité prolongée de l’AH exogène
injecté, alors qu’il a un temps de résidence articulaire court, rapidement
dégradé après son injection.
D’après la conférence d’enseignement de la
Dr Virginie Legré-Boyer, rhumatologue,
Institut de l’appareil locomoteur Nollet,
Paris. Ancienne interne et cheffe de clinique
des hôpitaux, ancienne praticienne hospitalière. Attachée en rhumatologie au CHU
Pitié-Salpétrière. Consultante à l’American
Hospital of Paris.
Conflits d’intérêt : Rottapharm (conférencière séminaires, co-investigatrice
essai thérapeutique), Sanofi Genzyme
(conférencière symposiums, séminaires ),
Expanscience (participation aux congrès),
Genevrier, Pierre Fabre (conseil scientifique
ponctuel, participation aux congrès), Labrha (co-investigatrice essai thérapeutique),
Smith Nephew (investigatrice principale
essai thérapeutique), Chemedica (participation aux congrès)
(1) Rutjes AW et al. Ann Intern Med
2012;157:180-91
(2) McAlindon TE et al. Nat Rev Rheumatol
2012;8:635-6
(3) De Campos GC et al. Clin Orthop Relat
Res 2013;471:613-20
(4) Jordan KM et al. Ann Rheum Dis
2003;62:1145-55
(5) American College of Rheumatology
2012 recommendations. Arthritis Care Res
2012;64:465-74
(6) American Academy of Orthopaedic Surgeons (AAOS). Treatment of Osteoarthritis
of the Knee : Evidence-Based Guideline. 2nd
ed. Rosemont, IL : AAOS; 2013. www.aaos.
org/ oakcpg
(7) Osteoarthritis : the care and management of osteoarthritis in adults. NICE
clinical guideline 59. London : NICE; 2014.
www.nice.org.uk/nicemedia/pdf/cg59niceguideline.pdf.
(8) OARSI recommendations. Osteoarthritis
Cartil 18;2010:476-99
CHSP9364_005_005_QVW 5
●●L’injection intra-articulaire, réalisée par un spécialiste, nécessite
une bonne technique, puisqu’elle
conditionne non seulement son
efficacité, mais aussi sa tolérance
(locale, lire encadré). Elle est parfois
délicate sur une articulation sèche
et peut bénéficier de certaines astuces. Hors genou – hanche, épaule
en particulier –, le recours à un
guidage radiologique ou échographique est préconisé. En cas d’épanchement articulaire avant l’injection, il faut traiter la synovite en
priorité : repos, glaçage articulaire,
AINS, et si nécessaire ponction-infiltration de corticoïdes. L’injection
d’AH sera différée d’une à quatre
semaines.
Plus de douze dérivés d’AH sont
commercialisés en France, sous statut de dispositifs – sauf le Hyalgan
qui a conservé un statut de médicament, avec une AMM dans la gonarthrose. On peut en distinguer deux
types : linéaires, ayant un poids
moléculaire (PM) faible, et réticulés
(regroupement tridimensionnel des
chaînes par des ponts), avec un PM
plus élevé et probablement une dégradation plus lente donc un temps
de résidence articulaire plus long,
sont souvent proposés en mono-injections.
Des présentations minidosées
d’AH (1 ml), moins onéreuses, sont
disponibles pour les petites articulations. Plus récemment des préparations d’AH combinés à des adjuvants
(mannitol, sorbitol, chondroïtine
sulfate), réticulés ou non, sont proposées. L’adjonction de ces substances vise à prolonger le temps de
résidence articulaire de l’AH, mais
ceci n’est pas prouvé. L’impact clinique des divers caractères des AH
n’est pas clair, ne permettant pas
d’orienter le choix vers tel ou tel produit.
En France, la viscosupplémen-
Tolérance
●●Une revue récente de la littérature conclut à une innocuité de
la viscosupplémentation (2). Sa
tolérance générale est excellente,
et satisafaisante localement, marquée par des réactions habituellement mineures, que l’on peut
limiter avec une bonne technique
d’injection.
La prudence reste cependant de
règle : tout épanchement d’allure
inflammatoire suivant une
injection nécessite une ponction
articulaire avec vérification systématique de l’absence de sepsis qui,
bien qu’exceptionnel avec cette
technique, doit rester présent à
l’esprit et justifie une prévention
par une parfaite asepsie, et une
information du patient sur les
signes évocateurs d’infection.
L’effet indésirable principal
consiste en des réactions douloutation consiste en 1 à 3 injections, à
1-4 semaines d’intervalle. Les doses
varient selon les produits utilisés
et l’articulation injectée. Pour la
gonarthrose, on effectue habituellement soit une série de 3 injections
(à 1 semaine d’intervalle), soit une
5
reuses ou inflammatoires locales
transitoires, dont la fréquence est
faible (2 à 6 % au genou), et qui ne
semblent pas grever l’efficacité du
traitement.
Plus rarement, de spectaculaires
réactions inflammatoires aiguës,
d’allure pseudoseptique, peuvent
se manifester (1-2 %). Elles sont
assez imprévisibles, ont surtout
été décrites avec l’hylane GF-20,
mais peuvent aussi survenir avec
des AH linéaires. Leur apparition
précoce, 1 à 24 heures après l’injection, est un élément rassurant
en faveur d’une réaction non septique, mais au moindre doute, une
ponction articulaire avec analyse
bactériologique doit être réalisée.
Quelques cas de crises aiguës de
chondrocalcinose ont été publiés
au décours d’injections d’AH.
D’exceptionnels cas de réaction
granulomateuse locale ont été
décrits, avec l’hylane seulement.
injection monodose. En dehors du
genou, rien n’est bien codifié. L’intérêt pour les mono-injections se développe. Il s’agit souvent de dérivés
d’AH réticulés, ayant en principe un
temps de résidence articulaire plus
long.
Efficacité
●●La viscosupplémentation a une
efficacité modérée (20 %) mais significative par rapport au placebo, sur la
douleur et la fonction, avec un taux
important de patients répondeurs
(60-70 % dans la gonarthrose). Elle
permet une épargne en antalgiques
opiacés et en AINS, avec un meilleur
rapport bénéfices-risques, et pourrait
retarder l’heure de la prothèse. L’effet
chondroprotecteur reste à confirmer.
L’efficacité clinique est retardée
de 2 à 4 semaines par rapport aux
infiltrations cortisoniques, mais
se prolonge pendant 6 voire 12 mois
(versus 1 à 3 semaines pour des corticoïdes). La co-injection systématique
des deux n’est pas justifiée, n’ayant
pas apporté de bénéfice net dans une
étude récente (3) et obligeant à respecter un délai de 6 à 24 semaines (selon les produits) avant toute arthroplastie, pour ne pas augmenter le
risque septique sur prothèse.
est actuellement possible en France
dans ce cadre, dans la gonarthrose
seulement – et non dans les autres articulations – à raison d’un traitement
par an et par genou, à condition que
l’AH soit prescrit et administré par un
spécialiste : rhumatologue, médecin
physique et rééducateur, ou chirurgien orthopédique. Elle n’est pas indiquée à titre préventif, en l’absence
d’effet chondroprotecteur prouvé
avec les schémas actuels. Elle est réservée à l’arthrose symptomatique.
Le renouvellement de la cure annuelle n’est indiqué que si l’arthrose
est à nouveau symptomatique.
Chez le sportif, l’innocuité de l’AH,
reconnu comme non dopant, en fait
un traitement d’appoint intéressant,
à réaliser si possible en intersaison.
À noter : la présence d’une chondrocalcinose radiologique (extrêmement fréquente chez le sujet âgé),
n’est pas une contre-indication, dans
la mesure où le patient n’est pas en
poussée de pseudogoutte.
Indications
La viscosupplémentation est
classiquement proposée dans l’arthrose, à condition qu’elle soit symptomatique, qu’il y ait échec et/ou
intolérance au traitement médical
– non pharmacologiques (conseils de
réduction pondérale, d’activité physique, d’épargne et de stabilisation
articulaire, orthèses), antalgiques, et
AINS. Un remboursement forfaitaire
Marche arrière des recommandations internationales
Injection radioguidée d’un AH
dans la hanche.
Mise en place de l’aiguille par voie
antéro-externe sous radioscopie.
Injection d’une petite quantité
de PDC iodé. Lorsque l’arthrogramme est obtenu, tentative
d’aspiration de liquide synovial.
Puis injection de 2 à 4 ml d’AH
L’AH faisait jusqu’alors partie
intégrante des recommandations internationales pour la prise en charge
de la gonarthrose, de la coxarthrose
et la rhizarthrose, parmi lesquelles
les recommandations européennes
de l’EULAR (4), qui reconnaissent une
efficacité symptomatique réelle bien
que modérée des injections d’AH.
Une position qu’elles ont toutefois récemment remise en question
dans la gonarthrose. Ainsi, pour le
collège des rhumatologues américains (ACR), depuis 2012, les injections ne sont pas recommandées de
façon générale dans la gonarthrose
mais conditionnellement, en cas
d’échec du traitement médical, en
particulier chez des patients âgés de
plus de 75 ans (5). Il en est de même
pour la coxarthrose. Les associations
de chirurgiens orthopédistes américains (AAOS) et britanniques (NICE)
ne recommandent clairement pas
l’utilisation de l’AH dans la gonarthrose (6,7). L’OARSI le recommande
de façon incertaine (8).
V. LEGRÉ-BOYER
●●Les injections articulaires d’acide
hyaluronique (AH) ont un grand succès, du fait de leur simplicité d’utilisation et de leur bonne tolérance.
Désignées sous le terme de viscosupplémentation, ou visco-induction,
elles sont, avec les infiltrations cortisoniques, le principal traitement
local de l’arthrose.
Technique
V. LEGRÉ-BOYER
La controverse sur l’efficacité des
injections articulaires d’acide
hyaluronique est alimentée par
certaines méta-analyses discordantes (1). Certains mauvais résultats seraient liés à une utilisation inappropriée des injections
dans les études, mal adaptées
au phénotype arthrosique des
patients (poussée inflammatoire,
souffrance osseuse,…).
Congrès hebdo
Technique habituelle d’injection d’un AH sur genou sec
Introduction d’une aiguille de 21 gauge par la voie latéropatellaire externe
(1-2 cm en dessous et en aval du bord supérolatéral de la rotule, genou en
extension ou en légère flexion, quadriceps relâché). Une subluxation latérale de la rotule, imprimée préalablement par la main opposée, facilite
la sensation de passage de la capsule. Tentative d’aspiration du liquide
synovial. Puis injection de 2 à 6 ml d’AH sans résistance et sans douleur.
Retrait de l’aiguille et mobilisation du genou en flexion-extension
Stade d’évolution et site
Il n’y a donc pas de profil de
réponse bien identifié de la viscosupplémentation. La meilleure
indication paraît être l’arthrose
modérée en l’absence de poussée
inflammatoire, c’est-à-dire sans
épanchement important. Cependant, certaines études ont observé
une efficacité dans les gonarthroses très évoluées, où les injections d’AH peuvent constituer une
solution d’attente avant le remplacement prothétique. En revanche,
les coxarthroses évoluées et destructrices rapides ne répondent
pas à la viscosupplémentation, et
restent du ressort de la chirurgie
prothétique.
Selon l’articulation concernée, la
réponse aux injections peut varier.
Pour le genou, l’indication idéale
semble être l’arthrose fémorotibiale
modérée sans épanchement. La
localisation fémoropatellaire a été
peu évaluée, son efficacité semble
moindre. Dans la coxarthrose, les résultats sont globalement décevants,
au terme d’études randomisées comportant peut-être un nombre insuffisant d’injections. Dans l’omarthrose,
avec ou sans rupture de coiffe, et dans
l’arthrose de cheville, les résultats
sont encourageants, mais pas avec
rupture de coiffe isolée ni capsulite.
Quant aux petites articulations,
l’efficacité de la viscosupplémentation est modeste (rhizarthrose), voire
non probante dans l’hallux rigidus en
mono-injection.
À retenir
Les injections articulaires d’AH
conservent une place indiscutable
dans le traitement de fond de l’arthrose symptomatique, surtout si
elle est modérée et sans épanchement. L’apport est particulièrement
appréciable chez les sujets jeunes ou
âgés fragiles (polypathologiques et
polymédicamentés), en alternative à
la chirurgie.
Il s’agit d’un traitement d’utilisation simple et bien toléré, à condition
de posséder une bonne technique
d’injection. L’efficacité est certes
modérée, mais avec un taux important de patients répondeurs. La viscosupplémentation permet ainsi
une épargne en antalgiques opiacés
et en AINS, avec un bien meilleur rapport bénéfice-risque, et susceptible
de retarder l’heure de la prothèse au
genou. Des travaux restent à réaliser
pour déterminer notamment les facteurs prédictifs de réponse au traitement et le meilleur schéma thérapeutique selon l’articulation.
06/11/2014 15:22:44
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Congrès hebdo
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
SOFCOT
Activité sportive chez l’enfant
Attention au surmenage squelettique
La pratique sportive chez l’enfant présente de très nombreux
bénéfices tant physiques que
psychologiques et sociaux. Elle
nécessite cependant d’être encadrée par une surveillance médicale périodique suffisamment
au fait des risques squelettiques
propres à ce groupe d’âge.
Diversité des niveaux d’activité
Dans un monde plutôt dominé
par la sédentarité, certains enfants
se passent d’activités physiques en
dehors du cadre de l’école, d’autres
Qui n’a pas eu à rédiger un certificat d’aptitude au sport ?
participent régulièrement à des
activités récréatives, d’autres enfin intègrent dans leur emploi du
temps un club sportif, au point, pour
certains, de développer un esprit
de compétition spécifique. C’est
parmi eux majoritairement que se
rencontrent des lésions d’hypersollicitation de l’appareil locomoteur,
mais cette pathologie est susceptible de toucher tous les groupes
avec une sévérité variable.
PHANIE
●●En chirurgie orthopédique,
l’enfance englobe environ les deux
premières décennies de vie, durant
lesquelles le squelette n’a pas achevé
sa croissance définitive. Avant sa
maturité, le squelette est l’objet de
constants remodelages. Certains enfants développeront une pathologie
résultant des activités physiques,
qu’il importera de traiter ou préférentiellement de prévenir.
Spécificités de la croissance
La persistance des cartilages
de croissance, ou physes, accompagnée d’autres structures cartilagineuses également en remodelage,
caractérise l’appareil locomoteur
non mature. La pathologie souffre
d’un certain degré de confusion en
raison de la terminologie consacrée
par l’usage. L’adoption du suffixe
« ite » (ostéochondrite, épiphysite)
fait sous-entendre une composante
infectieuse ou inflammatoire qui
n’est pas nécessairement descriptive de la lésion rencontrée. Une fois
définie la topographie par rapport
aux physes des épiphyses et des apophyses, le terme d’ostéochondrose,
plus générique que son ancêtre traditionnel, permet de l’appliquer à
chacune de ces topographies et d’en
mieux préciser l’étiopathogénie.
Leur origine mécanique et/ou traumatique se comprend aisément.
■ Dans l’ostéochondrose apophysaire, se produisent fréquemment
des dysharmonies de croissance
entre le système myotendineux et
l’élément squelettique, susceptibles
de générer des tractions excessives.
Elles sont amplifiées à la fois par l’accélération de croissance pubertaire
et des activités sportives focalisées
sur l’épicentre des noyaux d’ossification secondaire. Conséquences :
des microdécollements, des réactions inflammatoires cicatricielles,
des ossifications ectopiques.
■ L’ostéochondrose physaire
semble plutôt le fait d’une concentration anormale de contraintes
compressives. Typiquement : le
radius distal de la gymnaste ou du
joueur de tennis. Les conséquences
sont cette fois des défauts de minéralisation de la zone d’ossification,
avec des inclusions cartilagineuses
métaphysaires, un éventuel élargissement de la physe voire des
troubles de croissances secondaires ; en principe réversibles par
l’arrêt de l’environnement traumatique répétitif.
■ L’étiologie de l’ostéochondrose
épiphysaire est loin d’être consensuelle. Il existe des théories multiples : endocriniennes, génétiques,
vasculaires, et traumatiques... Ainsi,
selon la localisation anatomique
et son étiologie présumée, on utilise l’appellation d’ostéochondrite
primitive ou d’ostéochondrite disséquante. L’ostéochondrite primitive touche le noyau d’ossification
primaire dans sa globalité chez
un enfant jeune (maladie de LeggPerthes-Calvé, de Köhler-Mouchet,
de Panner) alors que l’ostéochondrite disséquante concerne une
zone plus restreinte, ostéocartilagineuse, en zone portante chez
l’enfant plus âgé – condyle fémoral,
talus. L’étiologie des deux pathologies semble être multifactorielle,
vasculaire et traumatique voire microtraumatique.
la classification de Bédouelle en
4 stades de gravité croissante – le
stade IV présentant un séquestre
libre dans l’articulation.
Suivant la gravité, le traitement
est basé initialement sur l’arrêt des
activités sportives mais peut, pour
les formes plus évoluées, faire appel
à des interventions de plus en plus
souvent arthroscopiques de perforation ou de fixation d’un fragment
libéré.
■ L’ostéochondrose apophysaire :
la forme la plus fréquente est la maladie d’Osgood-Schlatter, intéressant la tubérosité tibiale antérieure.
À un stade particulièrement actif
de sa maturation, la tubérosité est
incapable de lutter contre les forces
exercées par le quadriceps, résultant
en de micro-avulsions qui s’ossifient
secondairement. Les avulsions du
tendon rotulien restent rares.
Cliniquement, on retrouve une
douleur élective à la palpation de la
tubérosité tibiale. L’interrogatoire
doit rechercher une erreur dans le
chaussage sportif par rapport au
terrain d’entraînement, en particulier en étudiant la rigidité et l’amortissement de la chaussure. Les radiographies du genou permettent
de suivre l’évolution de la maladie
qui répond bien au repos sportif
transitoire.
À la cheville et au pied
D’après la conférence d’enseignement du
Pr Frank Launay, service de chirurgie
orthopédique et pédiatrique, hôpital
Timone Enfants, Marseille
Un spectre étendu de pathologies
●●L’interrogatoire est essentiel. La
douleur mécanique est le signe central des lésions d’hypersollicitation.
Elle est classée en quatre stades,
suivant sa chronologie par rapport
à l’activité physique en cause, et son
retentissement fonctionnel. Sa localisation doit être précisée au mieux
ainsi que son impact sur l’activité
sportive. La technique de celle-ci
mérite une enquête fouillée (équipement, nombre d’entraînements hebdomadaires et durée…).
L’examen clinique cherche avant
tout à reproduire la douleur à la palpation. Un examen soigneux s’attachera à analyser l’état musculaire
et tendineux et à éventuellement
dépister des laxités articulaires.
L’imagerie est surtout contributive au diagnostic différentiel avec
une pathologie inflammatoire, infectieuse, voire tumorale.
Membre supérieur
Les lésions d’hypersollicitation du membre supérieur sont
plus rares qu’au niveau du membre
inférieur. Elles peuvent être répertoriées suivant l’articulation en cause.
À l’épaule, il s’agit de l’atteinte du
bourrelet (ou conflit sous-acromial)
dans le cadre de la pratique intensive
du tennis, de la gymnastique ou du
handball. Au niveau de l’humérus
proximal, il peut aussi être noté des
microtraumatismes physaires avec
élargissement de la physe proximale
(gymnastique, tennis, volley-ball,
natation).
Chez le gymnaste pour lequel le
coude est transformé en articulation
de charge, c’est au niveau du capitulum que les lésions sont le plus souvent retrouvées (il transmet 60 % des
forces en compressions). L’ostéochondrose primitive, ou maladie de
Panner, touche l’ensemble du capitulum chez l’enfant de 6 à 10 ans. L’ostéochondrose disséquante en atteint
une partie seulement, chez l’enfant
plus grand. L’atteinte est le plus souvent du côté droit, semblant encore
une fois montrer l’importance du facteur traumatique. On retrouve également une douleur latérale avec une
limitation de l’extension, mais il peut
se produire des épisodes de blocage
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du coude. Le fragment ostéochondral
intéressé est le siège d’une nécrose
avasculaire osseuse, qui va suivre les
différentes phases de réparation avec
une revascularisation, une invasion
par un tissu de granulation, l’ostéoclasie du foyer de nécrose, la croissance d’un néotissu ostéoïde, et enfin
une phase de remodelage. Le traitement curatif est tout d’abord l’arrêt
du sport, qui peut être définitif en cas
de persistance de la symptomatologie. Le pronostic doit être réservé car
le capitulum est un noyau mature
avec une faible capacité de remodelage.
La pathologie la plus fréquente
concernant le poignet est l’ostéochondrose physaire du radius distal
chez le gymnaste. Anatomiquement,
les adolescents ont tendance à avoir
un index ulnaire négatif, c’est-à-dire
une ulna plus courte que le radius.
Les contraintes du carpe chez le
gymnaste vont ainsi plutôt se faire
au niveau du radius, entraînant des
lésions de la physe. L’atteinte n’est en
général pas homogène et touche surtout la partie radiale et antérieure du
cartilage de croissance, pouvant provoquer des raccourcissements du radius avec un index ulnaire qui se positive, ou des déformations pouvant
ressembler à une celle de Madelung.
Le repos et surtout l’immobilisation
avant l’apparition des ponts d’épiphysiodèse sont prescrits. Au stade
de l’élargissement physaire, l’immobilisation pendant 4 à 6 semaines
permet la disparition de la symptomatologie clinique et radiologique.
Hanches, bassin
L’ostéochondrose la plus étudiée, celle de la hanche, connue sous
le nom de maladie de Legg-PerthesCalvé peut faire l’objet d’un traité indépendant et sera donc délibérément
passée sous silence ici.
Épines iliaques, petit trochanter ou tubérosité ischiatique sont
des sites reconnus de lésions apophysaires, plutôt sur le mode aigu à
type d’arrachement. Ils surviennent
sur un squelette en fin de maturation,
avec des muscles puissants et souvent raccourcis. Le muscle en cause
est en général identifié : sartorius
pour l’arrachement de l’épine iliaque
antérosupérieure, rectus femoris
pour l’épine iliaque antéro-inférieure, ischio-jambiers et l’adductor
magnus pour des arrachements de la
tubérosité ischiatique.
La radiographie standard identifie en général facilement de tels
arrachements. Le traitement conservateur (repos, suspension du sport)
conduit à la guérison, il reste très
exceptionnel de devoir recourir à une
réparation chirurgicale.
La pubalgie, caractérisée par
des algies autour du pubis, devient
fréquente chez l’adolescent. Peuvent
être en cause : une maladie d’insertion des grands droits ou des adducteurs, une ostéopathie pubienne
microtraumatique, une pathologie
du canal inguinal. Il existe en général une combinaison de plusieurs de
ces pathologies lors de la pratique du
football essentiellement. L’interrogatoire doit rechercher des facteurs
favorisants, comme une modification du type d’entraînement, du terrain, et un problème de préparation
physique. L’examen clinique explore
une douleur au testing des différents
muscles concernés afin de mieux cerner le problème. Le traitement est basé avant tout sur le repos, puis sur un
travail de reprogrammation musculaire de la paroi abdominopelvienne.
■ L’ostéochondrose du talus est une
ostéochondrose disséquante. Les
deux localisations préférentielles
sont antérolatérale et postéromédiale, celle-ci étant plus fréquente.
Certains avancent son origine microtraumatique, et d’autres ischémique ;
il existe en fait une origine multifactorielle, traumatique et vasculaire.
D’un point de vue clinique, il s’agit
classiquement d’une pathologie du
grand enfant de plus de 10 ans, pratiquant un sport en salle de type volley-ball ou handball, avec un revêtement peu amortissant et un mauvais
chaussage. La douleur est mécanique
et médiale. Repos, éventuelles perforations ou fixation d’un fragment
séparé constituent les principales
armes de traitement.
■ L’ostéochondrose du calcanéus, ou
maladie de Sever, a la même physiopathologie que la maladie d’OsgoodSchlatter, à savoir des tractions répétées du tendon d’Achille au niveau du
noyau d’ossification secondaire du
calcanéus. Elle est rencontrée plus volontiers chez le garçon entre 8 et 12 ans.
Les douleurs sont plutôt bilatérales et
asymétriques. Le traitement est basé
sur un repos sportif très transitoire,
des orthèses plantaires à visée amortissante, et des exercices d’étirement
du système suro-achiléo-plantaire.
Au genou
■ L’ostéochondrose épiphysaire :
la forme la plus fréquente est l’ostéochondrose disséquante du condyle
fémoral ou maladie de König. Elle
touche le plus souvent le garçon, sur
son condyle médial. Cliniquement,
l’examen est pauvre. La douleur,
de type mécanique augmentant à
l’effort et cédant au repos, est mal
précisée.
Le bilan radiographique de base
comprend des radiographies du genou de face, de profil, et en incidence
intercondylienne afin de visualiser
les lésions postérieures. L’IRM complète généralement le bilan afin
d’évaluer la vitalité du fragment, le
potentiel de croissance, la surface
articulaire, ainsi que l’interface
os-fragment. Le bilan radiologique
caractérise le stade évolutif selon
La prévention, clef de
l’arsenal thérapeutique
●●Même si la demande de l’enfant
et de son entourage est de faire
disparaître la douleur afin de permettre la reprise du sport, il est
important de mettre en place un
traitement préventif afin d’éviter
la récurrence ou la chronicisation
des lésions. Il faut détecter d’éventuels facteurs favorisants de ces
lésions d’hypersollicitation, et
rechercher des erreurs dans le
choix de l’équipement sportif.
En ce qui concerne la qualité de
la pratique sportive, il est important d’impliquer l’entraîneur,
afin de mieux analyser le geste
sportif et ses éventuelles erreurs
d’exécution, même en l’absence
de douleurs. Une surveillance
périodique est préférable.
Il faut également prendre en
compte le stade d’avancée
pubertaire de l’enfant. Les
maquettes cartilagineuses sont
particulièrement fragiles surtout
avant l’âge de 12 ans, et il importe
d’en tenir compte. L’éducateur ou
l’entraîneur doivent être sensibilisés à cette notion afin de pouvoir
adapter au mieux la charge de
travail à chacun, éviter une spécialisation sportive trop précoce,
et impliquer l’enfant dans sa prise
en charge préventive.
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LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
Congrès hebdo
7
Tiges fémorales non cimentées
Déterminer la stabilité primaire
Prothèse totale de hanche
Prise de tête sur le diamètre
La réflexion sur le diamètre des
surfaces arthroplastiques de
hanche est toujours d’actualité.
Pour l’instant, les solutions
adoptées sont plutôt satisfaisantes. On ne peut pas exclure
des évolutions supplémentaires
à l’avenir mais leurs résultats
resteront marginaux.
●●Bien que les dispositifs de prothèse totale de hanche (PTH) utilisés de nos jours soient directement
apparentés aux tout premiers, ils
n’ont pas cessé d’évoluer. Les configurations des arthroplasties totales
de hanche n’ont cessé de se modifier :
mode de fixation – cimenté ou non –,
dessin des implants et diamètre de la
tête prothétique, sujet actuellement
d’importants débats. Il est établi que
plus le diamètre de la tête est important, moins il y a de risque de luxation. D’un autre côté, ce diamètre
joue aussi un rôle indéniable dans
le taux d’usure, la restauration biomécanique de la hanche, le respect
de la proprioception, la survenue de
douleurs inguinales, d’effets cames
et la restauration des amplitudes
articulaires.
Des petites à succès
L’utilisation à grande échelle des
PTH a été possible grâce à l’introduction, dans l’interface articulaire de
référence en métal/polyéthylène, de
têtes de très petit diamètre (22 mm),
réduisant ainsi le cœfficient de friction. Cela réduisait les phénomènes
d’usures et assurait une longévité
satisfaisante à la prothèse.
La mode actuelle est d’implanter des têtes de grand diamètre afin
de diminuer le risque de luxation.
Ceci a été rendu possible par l’évolution des matériaux (polyéthylène
réticulé et couples de friction « durdur »). Cependant, le risque de complications (usure, douleurs…) a été
majoré. Jusqu’à 36 mm de diamètre,
les gains d’amplitudes articulaires,
de réduction d’un effet came et du
risque de luxation sont établis. Audelà, il n’y a plus d’amélioration significative.
Approche écologique
Si l’on veut adopter une approche écologique de l’arthroplastie
de hanche – c’est-à-dire respect du
diamètre fémoral natif – seul le resurfaçage de hanche à couple métalmétal est possible (voir illustration).
Une approche plus traditionnelle,
avec une prothèse à tige fémorale
et une tête de grand diamètre, comporte des incertitudes, notamment
sur la fiabilité des implants à long
terme.
Le couple céramique-céramique
en grand diamètre est exposé aux
mêmes problèmes le couple métalmétal de la même taille : douleurs
inguinales, squeaking (grincement
de la prothèse), descellement acétabulaire précoce et friction majeure
au niveau du cône morse de la tige
fémorale. En dehors du resurfaçage
de hanche, il semble en l’état actuel
prudent de ne pas implanter de prothèses à tête fémorale de plus de
36 mm.
D’après la conférence d’enseignement du
Pr Julien Girard, responsable médecine
et sport de la faculté de Lille 2, service
d’orthopédie C, hôpital Roger Salengro,
CHRU de Lille. Activité physique, muscle,
santé, faculté sciences du sport et de l’éducation physique, université Lille 2
●●Si l’épopée glorieuse des prothèses de hanche débutée il y a plus
d’un demi-siècle se poursuit encore
vigoureusement, le succès de cette
intervention se juge à la longévité
de la fonction rétablie. Elle tient à
la solidarisation prolongée entre
le squelette récepteur et l’implant
prothétique.
Certaines écoles privilégient
l’usage du ciment, d’autres non.
Ce matériau crée une interface de
comblement permettant la transmission des forces de la prothèse
au squelette. Elle peut s’avérer fragile au fil des années, c’est pourquoi
d’autres équipes préfèrent la fixation sans ciment : par emboutissage
très ajusté entre la prothèse et le fut
fémoral récepteur. Cette fixation
primaire est plus ou moins stable
en fonction du degré d’ajustement
et peut parfois s’accroître lorsque
se produisent des phénomènes de
repousse osseuse autour de la prothèse.
cadavériques restent la référence,
mais sont limitées à quelques évaluations ponctuelles simultanées,
et biaisées par déformation globale
de l’os en charge.
Au niveau du fémur, nous avons
développé un dispositif expérimental unique, permettant de quantifier
les micromouvements à l’interface
os-implant, ainsi que la distance
entre la tige et l’os (1, 2). Il s’agit
d’une analyse d’images de microtomodensitométrie d’un fémur cadavérique implanté et mis en charge.
Des billes radio-opaques sont implantées de façon régulière sur la
surface du canal médullaire. Cette
technique permet donc d’avoir une
mesure quasi-continue des micromouvements et de l’interstice
entre la tige et l’os. Ce dispositif a
été récemment amélioré afin de
tester deux conditions de charges :
une compression de 1 800 N et une
torsion de 14 Nm. Les résultats ont
montré la complexité et la grande
variabilité de la stabilité primaire,
selon le type de tige ou l’anatomie
du fémur. Cette nouvelle méthode
permettra d’adapter le choix de
l’implant et la technique d’implantation au patient, pour obtenir une
stabilité primaire optimale.
D’après la conférence d’enseignement
d’Alexandre Terrier*, Valérie Malfroy
Camine* et Hannes Rüdiger**
* Laboratoire de biomécanique en
orthopédie, école polytechnique fédérale
de Lausanne, responsable de table ronde.
Head of Joint Biomechanics Group. Laboratory of Biomechanical Orthopedics
EPFL, Suisse
** Service d’orthopédie et de traumatologie, centre hospitalier universitaire
vaudois, Lausanne, Suisse
(1) Gortchacow M et al. Simultaneous and
multisite measure of micromotion, subsidence and gap to evaluate femoral stem
stability. Journal of Biomechanics 2012
(2) Gortchacow M et al. A new technique
to measure micromotion distribution
around a cementless femoral stem. Journal of Biomechanics 2011;44(3):557-60
Micromouvements (μm)
√ Des mesures à
l’interface os-implant
et distance tige-os
Le descellement aseptique est
une cause importante d’échec de
l’arthroplastie totale de hanche
non-cimentées. Ce problème est
complexe et multifactoriel, mais
fortement associé à la stabilité
primaire de la tige fémorale : elle
est en effet nécessaire pour garantir l’ostéo-intégration de la tige, et
sa fixation à long terme. Évaluer
la stabilité primaire suppose de
mesurer les micromouvements
relatifs entre l’implant et la surface osseuse adjacente, ce qui est
impossible à réaliser sur le patient.
La prédiction par modélisation
informatique est une option, mais
difficile à valider. Les mesures
Antérieur
Médial
Postérieur
Latéral
DR
J. GIRARD
Resurfaçage de hanche à couple
métal-métal.
Une recherche fondamentale
intense se poursuit autour du
thème de la fixation prothétique, aspect essentiel du succès
d’une prothèse de hanche. Un
dispositif expérimental permet
désormais de quantifier les
micromouvements à l’interface
os-implant, ainsi que la distance
entre la tige et l’os. Explications
de l’équipe.
Les micromouvements mesurés autour de la partie diaphysaire
de la tige fémoral varient entre 0 (bleu) et 40 µm (rouge)
Nouvelles technologies
L’os exploré au plus près
Que ce soit dans le domaine
de la biologie ou de l’imagerie
osseuse, les avancées récentes
sont majeures, ce qui a multiplié les possibilités d’évaluation non invasive de l’os,
notamment avec l’HR-pQCT.
●●L’os possède classiquement trois
fonctions : le stockage de calcium, la
protection mécanique et la locomotion, qui permet à chaque individu
de chasser, se nourrir ou encore de
fuir… En sus de ces éléments vitaux
à la survie de l’espèce, les données
récentes de biologie prouvent que
l’os est un véritable organe endo-
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crine, en communication permanente avec le système vasculaire, le
tissu adipeux, le système nerveux
central et le système reproducteur
notamment.
Ostéocyte
La biologie osseuse a été révolutionnée récemment par la compréhension du rôle pivot de l’ostéocyte dans la physiologie osseuse,
en plus des deux types cellulaires
classiquement connus et décrits
dans le remodelage osseux (ostéoblastes/formation osseuse et ostéoclastes/résorption osseuse),
Le FGF23, comme la scléros-
tine, est synthétisé par l’ostéocyte
mature, enclavé dans sa matrice
minéralisée. La sclérostine inhibe
l’activité ostéoblastique, via une
action inhibitrice de LRP5 dans
la voie Wnt/ßcaténine. Des mutations inhibitrices de SOST sont
associées à des phénotypes de
masse osseuse élevée (dysplasie
sclérosante des os), tout comme
les mutations activatrices de
LRP5. À l’opposé, des mutations
inhibitrices de LRP5 induisent le
syndrome d’ostéoporose/pseudogliome.
La liste des biomarqueurs permettant d’étudier de manière non
invasive l’os est exponentielle, des
plus simples (phosphore, calcium,
produit phosphocalcique, parathormone, vitamine D) aux plus
compliqués : FGF23, fétuine, ostéoprotégérine, adiponectine, sclérostine, leptine, ostéocalcine pour n’en
citer que quelques-uns….
L’histomorphométrie reste
la technique de référence pour
apprécier l’atteinte osseuse, mais
elle est rarement utilisée en pratique courante. L’absorptiométrie biphotonique (DXA) évalue la
densité minérale osseuse (DMO).
Cependant, en 2000, l’OMS a redéfini l’ostéoporose, en introduisant
des critères de qualité osseuse
(micro-architecture, géométrie et
minéralisation), en plus du critère
quantitatif représenté par la DMO.
De nouvelles techniques d’imagerie osseuse performantes, peu irradiantes et novatrices ont donc été
développées, en particulier la tomographie périphérique quantitative de haute résolution (HR-pQCT,
avec une résolution de 82µm3 !) ou
l’IRM.
D’après la conférence d’enseignement de la
Dr Justine Bacchetta, centre de référence
des maladies rénales rares, hospices civils
de Lyon, INSERM 1033 et université de Lyon
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Congrès hebdo
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
SOFCOT
Arthrose du poignet
●●L’arthrose est un processus dégénératif chronique, non inflammatoire, par atteinte initiale du cartilage. Au poignet, elle est souvent
secondaire à des séquelles traumatiques ou à une affection métabolique (1-3). Elle peut se manifester
comme une simple affection douloureuse chronique, jusqu’à la paralysie de la main. À ce stade, le traitement conservateur par antalgiques,
anti-inflammatoire non stéroïdiens
(AINS), orthèse et infiltration(s), doit
toujours être tenté dans un premier
temps. La chirurgie fait appel à de
nombreuses techniques dites palliatives, dont le choix est déterminé
par l’étiologie, la localisation de l’arthrose et le patient (4).
Caractéristiques
La prévalence de l’arthrose du
poignet n’est pas connue, elle est en
effet souvent asymptomatique, en
particulier après fracture du radius
distal, mais aussi après instabilité
scapholunaire (5, 6). Une seule analyse systématique de 4 000 radiographies de poignets a retrouvé une
arthrose dans un peu plus de 5 % des
cas, qui concernait à 95 % les articulations autour du scaphoïde (1).
Les causes traumatiques sont dominées par les lésions ligamentaires
dissociatives de la première rangée
(désaxations scapholunaire et triquétrolunaire) et ostéo-articulaires
(pseudarthrose du scaphoïde ou cal
vicieux articulaire du radius distal).
L’arthrose peut aussi faire suite à une
affection inflammatoire ou métabolique : chondrocalcinose articulaire
(CCA) surtout, ou goutte, nécrose osseuse primitive (maladie de Kienböck
ou de Preiser), malformation (maladie de Madelung) [2, 3, 7]. Rarement,
il n’y a pas d’étiologie patente, comme
dans certaines arthroses scapho-trapézo-trapézoïdiennes (STT).
En fonction de l’étiologie, la topographie et l’évolution de l’arthrose
sont relativement stéréotypées et
conditionnent en partie le traitement
chirurgical. L’arthrose sur pseudarthrose du scaphoïde (fig. 1) et désaxation scapholunaire (fig. 2) débute au
niveau de l’interligne radioscaphoïdien (stades 1 et 2) puis concerne l’interligne médiocarpien (fig. 3 et 4), en
particulier capitolunaire (stade 3) [5,
8]. L’arthrose sur désaxation triquétrolunaire concerne d’emblée l’interligne médiocarpien. Fait essentiel,
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Données cliniques et examens
complémentaires
La clinique est assez stéréotypée,
associant des douleurs mécaniques,
une diminution des mobilités et une
perte de force. Ce tableau est généralement d’installation progressive
mais parfois déclenché par un traumatisme ou une activité soutenue
inhabituelle. La survenue d’un épisode inflammatoire aigu doit faire
évoquer une possible CCA. À l’examen, outre la limitation des mobilités, on peut retrouver une tuméfaction le plus souvent dorsoradiale
liée à la fois aux ostéophytes et à une
synovite localisée. La palpation doit
préciser tous les sites douloureux et
explorer aussi l’articulation radioulnaire distale, un problème associé
à ce niveau pouvant être une source
d’échec relatif (4, 9).
Les radiographies standards, de
face et de profil, sont le plus souvent
suffisantes pour porter le diagnostic
d’arthrose ainsi que celui de son étiologie (fig. 1 à 4). La présence de calcifications du ligament triangulaire
sera aussi recherchée ainsi qu’une arthrose des métacarpophalangiennes,
en faveur d’une CCA. La réalisation
d’un scanner ou mieux d’un arthroscanner doit être systématique avant
une arthrodèse partielle, pour confirmer la bonne qualité de l’interligne
restant ainsi qu’avant une résection de
la première rangée pour préciser l’état
du cartilage de la tête du capitatum.
Techniques palliatives
■ Les résections arthroplastiques
suppriment un conflit douloureux
par la résection de tout ou partie d’un
os, voire de plusieurs. La plus utilisée est la résection de la première
rangée des os du carpe (RPRC) [fig. 5]
mais elle n’est réalisable que si les
cartilages de la fossette lunarienne
du radius et de la tête du capitatum
sont respectés (10, 11). Ses bons résultats se maintiennent, avec un taux
de survie de 65 % à plus de 20 ans (11),
les échecs précoces sont de l’ordre
de 5 à 12 % (10,12). Environ 50 % des
patients ne ressentent aucune douleur. Les résultats sont moins satisfaisants chez les travailleurs manuels
lourds (12) et, moins durables chez
les sujets jeunes (11). La résection
arthroplastique peut être associée
à une interposition tendineuse ou à
un matériau synthétique, le pyrocarbone – biocompatible sans ostéo-intégration avec un faible coefficient
de frottement et un module de Young
proche de l’os (14,15). Il a donné lieu à
différents implants d’interposition
qui semblent bien tolérés mais sont
exposés au risque de luxation (16).
■ Les arthrodèses partielles sont
préconisées lors d’une arthrose localisée, avec persistance d’au moins
un interligne de bonne qualité (17).
Globalement, la mobilité moyenne
restante est de 50 à 67 % (3) avec une
échelle d’évaluation de la douleur
(EVA) moyenne de 2 à 3/10, l’indolence complète étant obtenue dans 50
Figure 1. Arthrose débutante
sur une pseudarthrose du scaphoïde (stade 1). Elle concerne
l’interligne entre le fragment
distal du scaphoïde et la styloïde radiale qui a un aspect
anormalement effilé. Notez que
l’interligne scaphotrapézotrapézoïdien présente aussi un
début d’arthrose
à 60 % des cas (9, 18). Elles sont associées à un pourcentage important de
complications précoces, dominées
par les pseudarthrodèses (17). Dans le
traitement de l’arthrose sur pseudarthrose du scaphoïde ou désaxation
scapholunaire, l’arthrodèse médiocarpienne (AMC) est associée à une
scaphoïdectomie (fig. 6). En l’absence
de complication initiale, elle donne
des résultats qui restent satisfaisants
au-delà de 10 ans et préserve 60 à 80 %
de la force (19).
■ L’arthrodèse totale (AT, fig. 7)
n’est souvent réalisée qu’après échec
d’une ou plusieurs interventions
préservant la mobilité (20) or dans
ces conditions elle donne de moins
bons résultats (4). Si elle est réalisée
en première intention, l’AT procure
une EVA moyenne de 2/10 et une force
de 80 à 90 %, et permet le plus souvent le reprise du travail (4). La perte
de la mobilité est rarement ressentie
comme un problème, avec un taux de
satisfaction de 80 à 100 % (20).
■ La dénervation est un traitement
symptomatique, qui agit par suppression des informations nociceptives d’origine articulaire. Des échecs
immédiats et une dégradation du
bénéfice sont possibles les premières
années mais, au-delà, les résultats
semblent stables (28). Le taux de reprises varie de 0 à 16 %. Au prix d’une
faible morbidité et d’un arrêt de travail court, elle permet de préserver
la mobilité voire de l’améliorer, au
moins à moyen terme (21). La dénervation soulage la douleur dans 70 à
75 % des cas, avec une EVA de 2 à 3, 80 %
des patients sont satisfaits. Le résultat n’est pas lié à l’âge, mais le soulagement est insuffisant chez les manuels
lourds (21).
■ Concernant les prothèses totales
de poignet (PTP), même si les dernières séries rapportent des résultats plus favorables, l’évolution de
la fixation de l’implant distal reste
problématique (22). Parmi elles, la ReMotion semble donner des résultats
prometteurs dans les poignets dégénératifs avec 92 % de survie à 4 ans de
recul moyen et un taux de satisfaction
de 95 % (23), mais le taux de descellements est de 18 %.
■ Les greffes ostéochondrales autologues d’origine costale peuvent
être utilisées à la fois comme spacer
ou en resurfaçage. Concernant les
poignets dégénératifs, Obert et al. les
ont utilisés pour traiter des SLAC et
SNAC wrists, des cals vicieux limités
à la surface lunarienne du radius et
des maladies de Kienböck de stade
IV (24). Les auteurs rapportent des
Figure 2. Arthrose de stade 2 sur
une désaxation scapholunaire.
L’interligne radioscaphoïdien
est globalement pincé (cf cliché
oblique) mais les interlignes
médiocarpiens et radiolunaires
sont préservés
résultats favorables à la fois sur la
douleur et la fonction, avec des greffons viables.
Indications chirurgicales
En cas d’échec du traitement médical, le choix thérapeutique se fait
d’abord en fonction de l’étiologie et
l’étendue de l’arthrose, pondéré par
les mobilités restantes, l’âge et la demande fonctionnelle du patient (3,4).
Il faut aussi prendre en compte ses
possibilités de reconversion professionnelle. Chaque intervention a des
complications potentielles et des
limites que le patient doit connaître
et auxquelles il s’adaptera plus ou
moins en fonction du contexte psychosocial. En cas d’échec précoce, la
nécessité d’une seconde opération
retardera sa réintégration socioprofessionnelle et augmentera le risque
d’échec d’une arthrodèse totale.
Il faut préserver au maximum
un débattement articulaire tout
en gardant à l’esprit que les études
montrent que le retentissement
fonctionnel est comparable quel que
soit le degré de restriction (10, 20) ;
l’objectif prioritaire reste le soulagement efficace de la douleur (4).
■ Dans les formes évoluées de maladie de Kienböck, le traitement
palliatif s’impose le plus souvent.
Une arthrodèse partielle est possible
pour décharger le lunatum mais on
remarque plus d’échecs qu’avec
l’AT (17). Celle-ci donne un résultat
fiable auprès des patients jeunes
et manuels (4). Auprès des patients
sédentaires ou âgés, avec des mobilités préservées, la dénervation peut
éviter une immobilisation et les complications potentielles des arthrodèses (10,21). L’utilisation d’un spacer
de cartilage costal reste à valider à
long terme (24).
■ Dans les arthroses avec instabilité
scapholunaire et pseudarthose du
scaphoïde, une méta-analyse comparant les séries de RPRC et d’AMC
n’a pas montré de différence en ce qui
concerne le soulagement de la douleur, la force et le résultat subjectif (13).
La RPRC est techniquement plus
simple, avec une faible morbidité qui
contrebalance le risque d’échec précoce inhérent à cette intervention et
elle pourrait préserver une dizaine de
degrés supplémentaires (12,13). Dans
les stades 2 chez un manuel lourd,
l’AMC paraît plus logique car la dégradation de l’interligne serait plus tardive. Pour un patient peu manuel ou
sédentaire, la RPRC ou la dénervation
sont possibles, en fonction de l’âge,
des mobilités et des désirs du patient.
Pour les stades 3, il n’y a plus de place
pour la RPRC et, en fonction de l’âge et
de l’activité, on discute entre AMC et
dénervation.
■ Pour les arthroses radiocarpiennes secondaires à une fracture
J. LAULAN
l’interligne radioulnaire est habituellement indemne et peut être utilisé
pour conserver un peu de mobilité au
poignet. Au contraire, l’arthrose après
fracture articulaire du radius distal
concerne l’interligne radiocarpien.
Elle est généralement bien tolérée,
même à long terme (6). L’atteinte peut
être limitée à l’articulation radiolunaire, après une fracture localisée, une
maladie de Kienböck ou dans la CCA (2).
J. LAULAN
Après échec du traitement
conservateur, le choix thérapeutique de l’arthrose du poignet
doit faire l’objet d’une réflexion
qui prendra en compte l’âge et les
différentes activités du patient.
Chez les sujets âgés, la dénervation est intéressante du fait de
sa faible morbidité ; elle soulage
efficacement les trois quarts et
permet de préserver la mobilité
restante. Sinon, la résection de la
première rangée des os du carpe
(RPRC) et l’arthrodèse médiocarpienne (AMC) sont les deux
interventions de référence pour
l’arthrose de stade 2. L’arthrodèse
totale ne doit pas être réservée
uniquement aux échecs, elle
pourra permettre au patient de
reprendre une activité manuelle
lourde et de ne pas se retrouver
désocialisé. La place des implants
partiels, greffes chondrocostales
et prothèses totales du poignet
(PTP) reste à définir.
J. LAULAN
Des interventions à la carte
Figure 3. Arthrose évoluée sur
pseudarthrose du scaphoïde,
touchant aussi l’interligne
médiocarpien (stade 3). Notez
que malgré le caractère évolué
de l’arthrose, l’interligne radiolunaire est préservé
articulaire du radius, l’intervention
de référence est l’arthrodèse radioscapholunaire associée à une résection
du pôle distal du scaphoïde (9). Dans
les formes localisées à l’interligne
radiolunaire, peuvent être envisagées
soit une arthrodèse radiolunaire, soit
une greffe ostéochondrale (24). Pour
l’arthrose STT isolée, le traitement
de référence reste l’arthrodèse STT.
Peut aussi se discuter une résection
du pôle distal scaphoïde avec interposition, mais elle présente un risque
d’instabilité secondaire (16). Enfin,
pour une arthrose pisotriquétrale
symptomatique, l’ablation sous-périostée du pisiforme est le traitement
de choix (3,10).
Dans les atteintes diffuses avec
un poignet raide et douloureux, le
choix se fera entre l’arthrodèse totale
chez un patient manuel jeune (fig. 7)
et la dénervation chez un sédentaire.
Chez un sujet âgé, l’intervention de
première intention est la dénervation ; il n’y a qu’en cas d’échec qu’une
arthroplastie d’interposition ou une
PTP peut être discutée.
D’après la conférence d’enseignement du
Dr Jacky Laulan, unité de chirurgie de la
main, CHRU de Tours
(1) Watson HK, Ballet FL. J Hand Surg Am
1984;9:358-65
(2) Saffar P. J Hand Surg Eur 2004;29:486-93
(3) Weiss KE et al. J Hand Surg Am
2007;32:725-46
(4) Laulan J et al. Orthop Traumatol Surg Res
2011;97:S37-41
(5) Laulan J. Chir Main 2009;28:192-206
(6) Roux C et al. Ann Orthop Ouest
2000;32:121-8
(7) Bain GI et al. J Wrist Surg 2012;1:103–114
(8) Le Nen D. Conférences d’enseignement
SOFCOT 2010;99:18-47
(9) Garcia-Elias M et al. J Hand Surg Am
2005;30:8-15
(10) Le Nen D et al. Orthop Traumatol Surg
Res 2011;97:S31-6
(11) Wall LB et al. J Hand Surg Am
2013;38:1498-504
(12) Richou J et al. Chir Main 2010;29:10-5
(13) Mulford JS et al. J Hand Surg Eur
2009;34:256-63
(14) Péquignot JP et al. Chir Main 2000;19:276-85
(15) Bellemère P et al. J Wrist Surg 2012;1:131-8
(16) Garcia-Elias M. J Hand Surg Am
2011;36:516-20
(17) Larsen CF et al. J Hand Surg Am
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(18) Siegel JM et al. J Hand Surg Am
1996;21:717-23
(19) Neubrech F et al. J Wrist Surg 2012;1:123-8
(20) Weiss AC et al. J Hand Surg Am
1995;20:813-7
(21) Simon E et al. Chir Main 2012;31:306-10
(22) Allieu Y, éd. Arthroplasties radiocarpiennes. Montpellier, Sauramps Médical 2012
(23) Herzberg G et al. J Wrist Surg 2012;1:17-22
(24) Obert L et al. J Wrist Surg 2013 ;2:234-8
06/11/2014 15:23:49
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
Congrès hebdo
9
Dégénérescence discale
J. LAULAN
Figure 4. Arthrose de stade 3 sur
une désaxation scapholunaire.
L’interligne médiocarpien est
lui aussi concerné par l’arthrose
alors que l’interligne radiolunaire est toujours préservé
Figure 5. Résection de la
première rangée. La tête du
capitatum devient articulaire
avec la surface lunarienne du
radius, nécessitant l’intégrité
de ces deux surfaces. Elle n’est
donc utilisable que dans les
stades 1 et 2 des arthroses sur
pseudarthrose du scaphoïde
et sur instabilité sacpholunaire
(cf figures 1 et 2)
Pour comprendre les troubles et
apporter un regard neuf
sur l’étiologie et les méthodes
de traitement des lombalgies
avec trouble de l’équilibre
sagittal, il est essentiel
d’analyser l’équilibre rachidien
global, y compris les paramètres
pelviens. Si un geste
chirurgical d’arthrodèse
est envisagé, il faudra
respecter ou recréer
les lordoses correspondant à
ceux-ci.
●●L’être humain vit debout, soumis
aux lois de la pesanteur et le rachis
subit les contraintes liées à cette
station, qui a été à l’origine de l’apparition des courbures rachidiennes
sagittales caractéristiques de l’espèce. Le système musculoligamentaire joue un rôle primordial dans le
maintien de l’équilibre.
La dégénérescence discale est un
phénomène inéluctable qui va modifier les courbures rachidiennes du
fait de la perte de hauteur du disque.
Ces changements sont importants
à analyser pour mieux comprendre
certaines lombalgies dont l’origine
mécanique confirmée est parfois
mal identifiée.
Il faut différencier deux parties
dans la colonne vertébrale : le pelvis (bassin) et le rachis de C7 à S1 (le
rachis cervical ne sera pas abordé
ici). Considéré comme la vertèbre
pelvienne, le bassin a deux rôles :
de socle, sur lequel s’encastre la colonne et de transmisson de la charge
aux têtes fémorales, qui vont la distribuer aux membres inférieurs
jusqu’au sol.
J. LAULAN
Complexe spinopelvien
J. LAULAN
Figure 6. Arthrodèse médiocarpienne associée à une scaphoïdectomie. Le seul impératif est
la préservation de l’interligne
radiolunaire. Elle est donc réalisable aussi dans les arthroses de
stade 3 (cf figures 3 et 4)
Figure 7. Arthrodèse totale du
poignet chez un patient manuel
qui avait une forme évoluée de
maladie de Kienböck et qui a
pu reprendre la même activité
professionnelle
CHSP9364_008_009_QVW 9
Paramètres pelviens
L’anneau pelvien rigide est caractérisé par l’angle d’incidence pelvienne (IP), intersection d’une ligne
qui va du centre des têtes fémorales
jusqu’au milieu du plateau sacré
(elle rend compte du volume du bassin) et d’une autre, perpendiculaire
au milieu du plateau sacré (elle caractérise le vecteur de transmission
de la charge du rachis sus-jacent). L’
IP décrit ainsi une relation entre le
plateau sacré et les têtes fémorales.
C’est un paramètre de morphotype
individuel.
Le bassin étant susceptible de
tourner autour des têtes fémorales,
deux autres angles liés à l’IP par
une relation géométrique sont utilisés pour décrire la position de celui-ci. Le Pelvis tilt (PT) ou version
pelvienne est l’angle entre la verticale passant par le centre des têtes
fémorales et une ligne rejoignant
leur centre à celui du plateau sacré
(quand le pelvis tourne en rétroversion, le PT augmente et inversement). La pente sacrée ou Sacral
slope (SS) est l’angle du plateau sacré avec l’horizontale. IP = SS + PT.
Paramètres rachidiens
La forme sagittale de la colonne
vertébrale est caractérisée par une
série de courbes définissant lordose
lombaire et cervicale et cyphose
thoracique. La limite théorique anatomique de la lordose lombaire est
définie par les vertèbres T12 et L5.
Ceci ne correspond pas à la réalité
mécanique car elle peut être plus ou
moins longue. C’est pourquoi il est
préférable de redéfinir ses points
de mesure, avec le plateau de S1 en
limite distale ; le point d’inflexion
en limite supérieure, défini par une
analyse de la forme de la colonne
vertébrale sur l’axe sagittal et correspondant au changement réel de
courbure de la lordose vers la cyphose ; l’apex de la lordose lombaire
(point le plus antérieur de la lordose
sur un rachis en position verticale).
On peut ensuite tracer, sur un
mode biomécanique, les courbures
du rachis avec un modèle dessinant
deux arcs tangentiels d’un cercle. Le
point tangentiel est localisé à l’apex
et les centres de l’arc touchent la
ligne horizontale dessinée de l’apex.
L’arc proximal est stable autour de
15–19° en moyenne. Ceci implique
que la valeur globale de la courbure
lombaire est directement liée à la valeur de l’arc distal. De la même manière, on calcule l’angle de cyphose
thoracique entre le point d’inflexion
et le plateau de C7.
nopelvien.
Situations pathologiques
Relation entre les paramètres
pelviens et rachidiens
Dans toutes les études, il y a
une forte corrélation entre SS
et angle de la lordose (R = 0,86 ;
p < 0,001), montrée ensuite
par le nouveau modèle
géométrique avec deux
arcs de cercle tangentiels. Approximativement, la lordose lombaire (LL) = IP + 10°.
Ainsi on comp r e n d les
Trois situations pathologiques
peuvent se présenter. Soit le patient
n’a jamais été normal : c’est le cas
des spondylolisthésis avec lyse isthmique qui apparaissent avant l’adolescence et ont tous un potentiel
évolutif majeur d’autant plus élevé
que le plateau sacré est en forme de
dôme. Soit il était initialement normal et un événement intercurrent
brutal (trauma, infection, tumeur…)
a conduit à un changement d’organisation des vertèbres et provoqué
un nouveau stress local sur un segment précis du rachis. Il va tenter de
s’adapter en adaptant l’équilibre rachidien dans les limites autorisées
par ses paramètres anatomiques
comme l’IP. Les disques normaux
et le système musculoligamentaire
vont tenter de compenser le
défaut en adaptant les
courbures sus et sous
jacentes à la zone pathologique.
Dernière situation, la plus fréquente
en pratique : le patient
subit une évolution
naturelle dégénérative – avec
la perte de
hauteur discale liée à
l’âge –
q u i
relations
très étroites
entre les paramètres pelviens et rachidiens. Il existe
un complexe spinopelvien
avec comme point de jonction le plateau sacré.
L’analyse de populations
asymptomatiques montre que
70 % de la lordose lombaire est
située sur L4/L5/S1 chez le sujet
sain. P Roussouly a réalisé une
étude prospective dans une population normale asymptomatique qui a permis de définir
quatre types de rachis, selon
leur IP. La population générale
est divisée en trois groupes :
IP faible (< 45°), moyenne (45 à
60°) et élevée (> 60°).
L’ a n a l ys e g l o b a l e d e
l’équilibre de la colonne vertébrale impose d’inclure la
cyphose thoracique supérieure. Le fil à plomb abaissé de C7 chez une personne
asymptomatique équilibrée se
projette juste au niveau du plateau
sacré, le plus souvent à sa partie
postérieure et dans tous les cas en
arrière des têtes fémorales. Cette
ligne verticale représente un moyen
très commode d’analyser l’équilibre
global du rachis.
Pour corréler l’équilibre à la position du bassin, il faut y associer la
SS. On définit alors un nouvel angle,
spinosacral (SSA), entre le plateau
sacré et la ligne reliant son centre au
milieu de C7, qui est très proche de la
ligne de gravité. La valeur moyenne
de SSA est de 135° +/– 8. C’est un
paramètre intrinsèque d’équilibre
qui est très fortement corrélé à LL
(r = 0,88) et SS (r = 0,91). Cet angle est
primordial car il permet d’intégrer
sur une seule mesure l’analyse globale de l’équilibre du complexe spi-
co n d u i t à u n
changement de
l’organisation spinopelvienne et provoque un déséquilibre
harmonieusement
réparti. Selon Battié, la
dégénérescence discale
est génétique à 75 %. Des
facteurs et conditions
extérieures peuvent
l’aggraver : surpoids,
activités physiques et
professionnelles contraignantes, traumatismes etc.
Outre les retentissements potentiels sur les
structures neurologiques,
c e tt e p e r t e d e h a u t e u r
e n ge n d re u n e p e r t e
de lordose lombaire
inéluctable. Il est donc
important d’analyser les
adaptations mécaniques de la colonne vertébrale thoracolombaire.
Toute variation des courbures
rachidiennes, quelle qu’en soit la
cause, devra être compensée et
l’un des moyens d’y parvenir est de
modifier la position du socle (SS).
Or SS et IP sont liées. Par conséquent, connaissant l’IP (paramètre
constant) on pourra en déduire une
approximation de la forme initiale
des courbures du rachis.
La rotation postérieure du bassin réduit la SS. Ce phénomène est
logique car il permet de faire reculer la ligne verticale abaissée de C7,
qui est fortement corrélée à la ligne
de gravité. L’organisme essaie donc
de rapprocher le plus possible cette
ligne du plateau sacré qui est la zone
d’équilibre économique. Un patient
avec IP faible est moins capable de
PHANIE
J. LAULAN
L’analyse de l’équilibre sagittal axe le traitement
compenser par ce mécanisme, car
la capacité de rétroversion du bassin est une anatomique. En cas de
cyphose lombaire sévère, la flexion
au niveau des genoux va encore
améliorer l’inclinaison du bassin et
horizontaliser le plateau sacré pour
permettre le maintien de l’équilibre.
Cette flexion des genoux permet
aussi de dépasser la limite de rétroversion du bassin imposée par la
limite d’extension des hanches.
La douleur
Dans le cadre des lombalgies,
l’origine des douleurs est multiple.
L’origine discale est maintenant reconnue : les phénomènes inflammatoires associés au Modic 1 sont fortement corrélés à des douleurs. De
même, les phénomènes arthrosiques
des facettes en génèrent.
Les pertes de courbures du rachis
qui sont quasi-exclusivement cyphosantes au plan sagittal sont responsables de phénomènes de compensation par le système musculoligamentaire. Ce mécanisme actif est efficace
et justifie pleinement l’utilisation de
la rééducation dans l’arsenal thérapeutique, surtout au stade initial, car
le travail musculaire et de la posture
permettent de trouver des attitudes
de compensation économiques et
donc non douloureuses. Cependant
ce travail est limité par la fatigue des
muscles posturaux qui ne peuvent
fonctionner au-delà d’un certain
seuil.
C’est dans ce cadre que l’analyse de l’équilibre rachidien global devient essentiel pour comprendre les troubles et apporter
un regard neuf sur l’étiologie et
les méthodes de traitement des
lombalgies avec trouble de l’équilibre sagittal. Les dégénérescences
discales liées à l’âge se concentrent
sur les derniers disques lombaires.
Or ils sont responsables de 70 % de la
lordose lombaire (lire supra) : toute
perte de lordose entre L4 /L5 et S1 va
conduire à une diminution importante de lordose globale qui va être
compensée par la nécessité de rééquilibrer le rachis.
Cela n’est possible que par une
augmentation de la rotation postérieure du pelvis : c’est-à-dire une
horizontalisation du plateau sacré
qui permet de remettre la verticale de
C7 en arrière des têtes fémorales. Le
rachis lombaire dégénératif va donc
modifier sa forme initiale. Ainsi, si un
geste chirurgical d’arthrodèse est envisagé il faudra respecter ou recréer
les lordoses correspondants à l’IP,
sinon on prendra un risque majeur
de laisser un dos mal lordosé, ce qui
engendrera un dos généralement
plus plat que son état initial et donc
un déséquilibre sagittal.
C’est le fameux « flat back » ou
dos plat post-opératoire, qui est
iatrogène parce que les paramètres
rachidiens n’ont pas été rétablis.
Ceci souligne l’intérêt capital d’effectuer des radiographies du rachis
debout de profil avant toute chirurgie rachidienne (au minimum de D12
aux têtes fémorales) pour pouvoir
mesurer ces paramètres. Il n’est plus
concevable de réaliser une arthrodèse rachidienne en méconnaissant
les paramètres pelviens.
D’après la conférence d’enseignement du
Pr Jean Charles Le Huec, chef de service,
département orthorachis 2, CHU Pellegrin
Tripode, Bordeaux
06/11/2014 15:23:50
10 Congrès hebdo
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
SOFCOT
Rachis thoracolombaire
La fracture avec troubles neurologiques
●●Les traumatismes du rachis sont
fréquents et peuvent se compliquer
d’une atteinte neurologique dans
15 à 30 % des cas. L’incidence des
blessés médullaires en France est
estimée à 19,4 par million d’habitants (1). En 2007, la Haute Autorité de santé (HAS) a rapporté une
incidence de 1 200 nouveaux cas par
an de lésions médullaires traumatiques, avec une prévalence d’environ 50 000. Ils sont dus en majorité
à des accidents de circulation (40
à 45 % des cas), puis viennent les
chutes (volontaires ou non: 15 à
30 %), les accidents de sport (15 à
25 %) et enfin les accidents du travail et agressions (2). L’homme est
le plus touché (3:1). On note deux
pics de fréquence : entre 16 et 30 ans
majoritairement traumatiques, et
après 50 ans – préférentiellement
les chutes (2).
Les traumatismes vertébromédullaires sont responsables d’une
morbimortalité majeure, qui augmente avec l’âge du patient et le
nombre de lésions associées : traumatisme crânien, thoracique ou
abdominal en particulier (3). Les
fractures avec déficit neurologique
intéressent avant tout le rachis cervical (plus de 50 % des cas), le plus
mobile et le plus instable. L’étage
thoracique, en cause dans 20 à 30 %
des cas, est stabilisé par le thorax
et donc moins exposé, mais la vascularisation de la moelle épinière
thoracique est particulièrement
vulnérable.
Physiopathologie
Examen clinique et imagerie
●●Les fractures du rachis thoracolombaire (TL) peuvent endommager
la moelle épinière thoracique, le cône
terminal et/ou les racines nerveuses.
La cyphose traumatique avec
recul du mur postérieur ou la luxation
du rachis peut occasionner quatre
types lésionnels différents, qui résultent de l’impact initial et du déplacement, provoquant des déchirures
neuronales et vasculaires :
– la commotion médullaire, qui récupère en quelques heures ;
– la compression médullaire, responsable d’une ischémie médullaire persistante ;
– la contusion médullaire, caractérisée par une destruction axonale avec
des foyers hémorragiques ;
– la section médullaire.
Il existe un potentiel de récupération neurologique dans certaines
compressions médullaires. Il est particulièrement faible en cas de contusion médullaire et nul en cas de section médullaire (5, 6).
●●Les premières mesures thérapeutiques (maintien de l’hémodynamique) mises en œuvre,
l’examen neurologique
peut alors être pratiqué.
On recherchera le niveau de lésion sensitive
en testant les dermatomes sous- et sus-lésionnels. Le niveau
moteur peut être
concordant ou
discordant selon
l’atteinte médullaire. Tous les
muscles des membres inférieurs sont testés. Il est important de réaliser un examen
moteur au-dessus du niveau
lésionnel, même si l’imagerie est
disponible, car la lésion médullaire peut s’étendre secondairement.
Les lésions médullaires
centrales entraînent une paraplégie. Le syndrome sous-lésionnel comporte une abolition du tonus musculaire
avec paralysie flasque, une
abolition de tous les modes de
sensibilité et des réflexes ostéotendineux, une atonie du
sphincter anal, une rétention
urinaire et un priapisme chez
l’homme. Le signe de Babinski
n’apparaît que secondairement.
Il peut être présent au stade
aigu en cas de compression
médullaire partielle, avec un
syndrome sous-lésionnel incomplet.
Les scores de Frankel (9)
et de l’American Society Injury Association (ASIA) sont
superposables. Ils sont indispensables pour évaluer la sévérité de la lésion médullaire et
suivre son évolution.
Le testing moteur de 0 à 5
est réalisé de façon symétrique
La vascularisation médullaire repose sur trois axes artériels longitudinaux anastomosés : l’artère spinale
antérieure et deux artères postérolatérales. En thoracolombaire, l’artère
spinale antérieure provient des artères intercostales, parmi lesquelles
l’artère d’Adamkiewicz représente
Particularités chez
le polytraumatisé
●●Chez le polytraumatisé, il faut
prendre en compte l’ensemble
des lésions et évaluer celles qui
peuvent potentiellement engager
le pronostic vital. Les fractures
du rachis thoracique peuvent
être associées à un hémothorax,
des lésions pulmonaires ou une
dissection de l’aorte. À la charnière
thoracolombaire, les lésions
D’après la conférence d’enseignement des
Prs Yann Philippe Charles et Jean-Paul
Steib, service de chirurgie du rachis, hôpitaux universitaires de Strasbourg, Fédération de médecine translationnelle (FMTS),
université de Strasbourg. Conflit d’intérêt
en rapport avec la conférence : aucun
(1) Albert T, et al. Spinal Cord 2005;43:35765
(2) Holmes JF et al. Acad Emerg Med
CHSP9364_010_011_QVW 10
hépatiques ou spléniques peuvent
contre-indiquer le positionnement en décubitus ventral.
Lorsque l’état général et les lésions
associées le permettent, il est préférable de stabiliser le rachis dans
les 48 premières heures. Une intervention précoce améliore la fonction respiratoire, réduit la durée de
ventilation mécanique, les taux de
complications pulmonaires secondaires et de mortalité. Elle facilite
le nursing en réanimation et réduit
la durée de séjour (22, 23).
2001;8:866-72
(3) McHenry TP et al. J Bone Joint Surg Am
2006;88:997-1005
(4) Chiles BW et al. N Engl J Med
1996;334:514-20
(5) Kwon BK et al. Spine J 2004;4:451-64
(6) Hurlbert RJ et al. Spine (Phila Pa 1976)
2006;31(11Suppl):S16-21
(7) Charles YP et al. Surg Radiol Anat
2011;33:3-9
Figure 1. Dermatomes permettant
d’évaluer le niveau d’atteinte médullaire pour la sensibilité
(8) Vale FL et al. J Neurosurg 1997 ;87:23946
(9) Frankel HDH et al. Paraplegia
1969;7:179-92
(10) Denis F et al. Spine (Phila Pa 1976)
1983;8:817-31
(11) Magerl F et al. Eur Spine J 1994;3:184-201
(12) Dosch JC. Traumatologie du rachis.
Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson;2012
(13) Vaccaro AR et al. Spine (Phila Pa 1976)
en fonction du niveau médullaire et l’évaluation de la sensibilité au piquer et au toucher : absente, diminuée,
normale ou non testable
en fonction des dermatomes (figure 1).
Cet examen
détaillé permet
de déterminer le
niveau et le caractère complet ou
incomplet de
la lésion médullaire, avec
attribution
d’un score de A à
E. La réalisation d’un toucher
rectal est indispensable pour
différencier les stades A et B.
Classifications des
fractures
Ce bilan clinique terminé,
il faut obtenir une imagerie
adaptée le plus rapidement
possible : imagerie à distance
(lésions associées) et spécifique de la lésion vertébromédullaire sera réalisée.
■ Une tomodensitométrie
(TDM) du corps entier permettra de déceler toute lésion
intracrânienne, thoracique,
abdominale ou pelvienne
pouvant engager le pronostic vital. Les reconstructions
osseuses du rachis permettent d’analyser le
type de fracture, son déplacement, son degré d’instabilité et la présence de
fragments intracanalaires
(figure 2) [10, 11].
■ L’IRM en urgence est
recommandée en cas de
lésion médullaire. Indispensable lorsque le patient
est inconscient, elle permet
d’apprécier la lésion médullaire ainsi que l’hématome épi- ou intradural. Les
lésions discoligamentaires
sont également évaluées sur
l’IRM (12, 13).
DR
Vascularisation et facteurs
d’aggression médullaire
tl’irrigation principale. La vascularisation thoracique est précaire par
rapport à celle du cône terminal (7).
Dans une moelle saine, un système d’autorégulation médullaire
permet de maintenir un débit sanguin constant par le biais de phénomènes de vasodilatation et vasoconstriction, avec une pression de
perfusion médullaire variable, entre
50 et 150 mmHg : pression de perfusion médullaire = pression artérielle
moyenne – pression intramédullaire.
En cas de lésion médullaire, la
pression intramédullaire augmente
en raison de l’œdème, et l’atteinte
de l’innervation sympathique due
au choc spinal diminue la pression
artérielle moyenne et donc la pression de perfusion médullaire, ce qui
entraîne une ischémie neuronale. Il
en découle un principe fondamental
pour la prise en charge du blessé médullaire, qui consiste à maintenir la
pression artérielle moyenne au dessus de 85 mmHg pendant la première
semaine (6, 8).
Les facteurs d’agression médullaire (cérébrale) [ACSOS : Agression
Cérébrale Systémique d’Origine
Secondaire], tels que l’hypotension
artérielle, l’hypoxie, l’hypercapnie, l’anémie, l’hypothermie, l’acidose, l’hypo- et hyperglycémie, etc.,
favorisent l’extension des lésions et
doivent être limités dans la prise en
charge initiale du patient.
2005;30:2325-33
(14) Bracken MB et al. JAMA 1997;277:1597605
(15) Sayer FT et al. Spine J 2006;6:335-43
(16) Fehlings MG et al. Spine (Phila Pa 1976)
2006;31(11Suppl):S28-35.
(17) Launay O et al. Orthop Traumatol Surg
Res 2012;98:352-8
(18) Fehlings MG et al. Spine (Phila Pa 1976)
2010;35(21Suppl):S166-73
La jonction thoracolombaire
(T12-L1) représente 15 % des cas. Il
s’agit d’une zone fragile (atteinte
dans la moitié des fractures de tout
le rachis thoracique et lombaire),
à la jonction de la cyphose thoracique peu mobile et la lordose lombaire qui l’est plus. Les fractures de
la jonction lombosacrée sont plus
rares, mais potentiellement instables et parfois en cause.
Dans 25 % des cas de fracture
vertébrale avec déficit neurologique, une autre lésion vertébrale
est associée (4, 5). Dans une étude
de 577 traumatismes rachidiens
neurologiques, le déficit était une
tétraplégie (43,3 %), une paraplégie (46,6 %) ou un syndrome de la
queue-de-cheval (10,1 %) (1).
√ Une course contre
la montre où tous
les intervenants doivent
connaître leur rôle afin
de donner au blessé un
maximum de chances
de récupération
Néanmoins, un délai de décompression médullaire inférieur à
6 heures a, pour nous, une influence
favorable sur la récupération neurologique. C’est pourquoi, lorsque
la lésion rachidienne est évidente
au scanner et concordante avec
l’examen neurologique, il nous
paraît possible de se dispenser de
l’IRM qui représente alors une perte
de temps pour le traitement chirurgical.
DR
Les fractures thoraciques et lombaires représentent environ 50 %
des traumatismes du rachis avec déficit neurologique, paraplégie ou
syndrome de la queue-de-cheval en fonction de l’étage lésé. La prise
en charge rapide et systématisée par un centre spécialisé est
fondamentale pour le pronostic de la lésion médullaire.
À la phase aiguë, il faut limiter l’aggravation des lésions médullaires
par le traitement immédiat des facteurs d’agression systémiques de
survenue secondaire. La restauration rapide d’une hémodynamique
stable (pression artérielle moyenne supérieure à 85 mmHg) est
essentielle. Les protocoles de corticothérapie à hautes doses n’ont
plus d’indication. Leur effet sur la récupération neurologique n’est
pas prouvé, alors que leur taux de complications secondaires
septiques et pulmonaires est élevé. Un traitement chirurgical précoce permet la récupération neurologique dans certains cas.
Il repose sur la décompression médullaire, l’ostéosynthèse et la
réduction de la fracture. Si les lésions associées le permettent, le
bénéfice d’une intervention réalisée dans les 48 heures est démontré
chez le patient polytraumatisé. Une stabilisation précoce du rachis
améliore la fonction respiratoire et la ventilation mécanique ce qui
diminue la durée du séjour en réanimation.
Figure 2. Burst fracture avec
recul du mur postérieur et compression médullaire
(19) Cengiz SL et al. Arch Orthop Trauma
Surg 2008;128:959-66
(20) Dendrinos GK et al. Acta OrthopBelg
1995;61:226-34
(21) Van Middendorp JJ et al. Lancet
2011;377:972-4
(22) Dimar JR et al. Spine (Phila Pa 1976)
2010;35(21Suppl):S187-92
(23) Schinkel C et al. Curr Opin Crit Care
2008;14:685-9
06/11/2014 15:26:39
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
Congrès hebdo 11
Reprise de prothèse totale
de hanche
La voie d’abord, un paramètre
stratégique
pourra renseigner sur l’état neurologique.
Pour une désincarcération et le
transport vers un centre spinal, il est
important d’immobiliser l’axe craniocaudal afin de ne pas aggraver le
déplacement fracturaire et les lésions
neurologiques : le rachis cervical
est maintenu à l’aide d’une minerve
rigide, le tronc est mobilisé en bloc et
maintenu dans un matelas coquille.
La lutte contre l’hypotension par
perfusion de solutés doit débuter
pendant le transport. Le centre hospitalier spécialisé est prévenu par le
SAMU afin de préparer son arrivée.
À l’hôpital, la prise en charge
sera coordonnée entre médecins
réanimateurs, chirurgiens et radiologues. En salle de déchocage, on recherchera en premier lieu les lésions
vitales. Un examen neurologique
cérébral (score de Glasgow), thoracique et abdominal est effectué. Le
blessé est placé sous surveillance hémodynamique et électrocardiographique continue. Une radiographie
du thorax et du bassin et surtout une
TDM du corps entier ainsi qu’un bilan biologique sont réalisés.
En systémique, limitation
des facteurs d’agression
secondaires
L’expansion volémique à l’aide
de solutés de remplissage, guidée
par les lésions hémorragiques associées, est fondamentale. Le recours
aux vasoconstricteurs (noradrénaline), permet de maintenir une pression systolique > 120 mmHg et une
pression moyenne > 85 mmHg pendant sept jours. Malgré ces mesures,
75 % des traumatisés médullaires
ont au moins un épisode de pression
systolique < 90 mmHg, à l’origine
d’une ischémie neuronale (6, 8).
Quant aux protocoles cortisoniques National Acute Spinal Cord
Injury Studies (NASCIS) I, II et III,
proposés pendant la phase aiguë
du traumatisme médullaire, ils
sont extrêmement controversés. Le
protocole NASCIS III comprend un
bolus initial de succinate sodique
de méthylprednisolone de 30 mg/
kg, suivi d’un relais de 5,4 mg/kg en
intraveineux à la seringue électrique
pendant 48 heures (14).
L’action potentiellement antiinflammatoire au niveau médullaire
et l’amélioration du pronostic neurologique n’ont pas été démontrées
à ce jour. En revanche, le taux de
complications septiques, de pneumopathies et d’embolies pulmonaires est plus important chez les
patients ayant reçu des corticoïdes
à hautes doses (6, 15, 16). Par ailleurs,
les corticoïdes peuvent induire des
pics d’hyperglycémie potentiellement neurotoxiques.
DR
Techniques de décompression,
réduction et stabilisation en
urgence
Figure 3. Fracture luxation
T12-L1 traitée en urgence par
laminectomie (flèches) et
ostéosynthèse-arthrodèse
postérieure
CHSP9364_010_011_QVW 11
Le traitement chirurgical d’une
fracture thoracolombaire avec
troubles neurologiques repose sur
trois principes :
– la décompression médullaire ou
radiculaire ;
– la réduction de la fracture par augmentation de la lordose ;
– la stabilisation par ostéosynthèse
postérieure (système de vis pédiculaires, de tiges et de crochets) [fig. 3].
Figure 4. Fractures T8-T9 avec
défect osseux (flèche) nécessitant une reconstruction de
la colonne antérieure par cage
remplie de greffe osseuse
Reconstruction de la colonne
antérieure secondaire
Les lésions osseuses et déchirures discales nécessitent une
reconstruction antérieure secondaire afin d’assurer la stabilité et
le maintien de l’équilibre sagittal
sans perte de réduction. Les défects
osseux non traités évoluent vers la
pseudarthrose et peuvent entraîner
une rupture secondaire du matériel
en raison d’importantes contraintes
en position assise et debout.
Un mini-abord par thoracotomie, lombotomie ou thoracophrénolaparotomie vidéo-assistée permet
de reconstruire la colonne antérieure à l’aide d’une cage contenant
l’os prélevé dans le corps vertébral
fracturé et le segment de côte situé
dans la voie d’abord (figure 4).
Délai et récupération
neurologique
Il est admis que les traumatismes rachidiens avec lésions médullaires incomplètes (ASIA B-D)
peuvent évoluer vers une récupération neurologique lorsque le patient
est opéré précocement, au mieux
dans les 6 heures après le traumatisme (16, 17). En cas de déficit complet (ASIA A), aucun consensus n’est
établi et les avis divergent (18, 19).
Notre expérience nous a montré qu’un facteur fondamental de la
récupération est le délai entre le traumatisme et l’opération (17). Il doit
être le plus court possible, si l’état du
patient et les lésions associées le permettent. Il s’agit d’une course contre
la montre où tous les intervenants
doivent connaître leur rôle afin de
donner au blessé un maximum de
chances de récupération.
Le pronostic de récupération
dépend également du mécanisme
lésionnel médullaire. Il varie également en fonction de l’étage lésé. La
charnière thoracolombaire semble
propice à une chirurgie précoce
lorsque le traumatisme se situe au niveau du cône terminal ou de la queuede-cheval. Les fractures thoraciques
sont souvent associées à des lésions
thoraciques plus graves (19, 21).
En pratique, il est difficile de
prédire le potentiel de récupération neurologique en urgence et
il convient de donner toutes les
chances au patient blessé médullaire. Les paraplégies complètes de
score ASIA A de la charnière thoracolombaire peuvent récupérer
partiellement ou complètement
dans certains cas isolés. Cependant,
même lorsque la paraplégie ne récupère pas, l’ostéosynthèse précoce
a le mérite d’améliorer la fonction
respiratoire et facilite les soins de
nursing, ainsi que la rééducation
précoce en fauteuil roulant.
Le choix d’une voie d’abord
en chirurgie de reprise de la
prothèse totale de hanche est un
temps fondamental susceptible
de déterminer la totalité du
déroulement de cette délicate
intervention.
●●Si la très vaste majorité des prothèses totales de hanche conduit
à un succès durable, une fraction
d’entre elles nécessitent d’être réopérées soit au terme de plusieurs
années d’usage, soit de façon plus
anticipée en raison de complications, dominées par le descellement
– mécanique ou infectieux. Cette
chirurgie de reprise, plus délicate
car nécessitant un temps opératoire préalable de suppression des
implants initiaux, a pour objectif de
réimplanter une nouvelle prothèse,
avec un succès comparable à une
chirurgie de première intention. Ce
qui est, dans de nombreux cas, un
véritable défi technique qui exige un
plan de vol parfaitement élaboré.
Dès le stade de la planification
Le choix de la voie d’abord pour
une reprise de prothèse totale de
hanche est une étape importante
de la planification. Il faut analyser
si la plupart des objectifs poursuivis par l’intervention pourront être
atteints par une voie conventionnelle, ou au contraire spécifique. Ce
choix dépend de facteurs multiples
liés à l’indication, au patient, aux
implants, à la voie d’abord précédente, aux lésions des parties molles
et osseuses et, enfin, à l’expérience
de l’opérateur.
La littérature abonde sur les
voies d’abord utilisables en chirurgie de première intention : postérolatérale, antérieure, vantérolatérale,
trochantérotomie… En chirurgie de
reprise, elle est moins généreuse et
moins codifiée, du fait en partie de la
complexité des problèmes à traiter.
Une reprise d’arthroplastie
totale doit en effet reconstruire
une nouvelle hanche artificielle,
dont l’architecture et la fixation des
implants permettront de restaurer
durablement la fonction. Il s’agit le
plus souvent d’une intervention difficile, car longue et techniquement
exigeante. La qualité de sa planification est essentielle. Elle doit
définir précisément les objectifs de
l’intervention, les difficultés prévisibles, pour les anticiper, et enfin
les implants nécessaires et les éventuelles greffes. Le choix de la voie
d’abord est donc fondamental car
il influence le déroulement de l’ensemble de ces étapes.
La voie idéale doit satisfaire
un cahier des charges précis. Elle
Ne pas se cantonner à ses
habitudes
doit offrir une exposition satisfaisante des composants (implants,
ciment à l’intérieur ou à l’extérieur
du tissu osseux) devant être retirés,
pour éviter la réalisation de dégâts
supplémentaires si l’exposition est
inadéquate. Elle doit permettre la
réparation de l’ensemble des pertes
de substances osseuses identifiées
avant l’intervention, mais aussi
celles découvertes durant la chirurgie. Enfin, elle doit préserver au
maximum l’os et les parties molles
en évitant d’aggraver les lésions présentes.
Un refus de dogmatisme
Si la plupart des opérateurs ont
tendance à limiter leurs préférences
à la pratique de deux ou trois voies
d’abord dont ils ont l’habitude, ils ne
peuvent pas toujours, en situation
de reprise, satisfaire cet éclectisme
naturel. La tentation est grande
de vouloir utiliser la voie conventionnelle que l’on pratique au quotidien pour réaliser une reprise.
L’expérience importante d’une
voie d’abord permet au chirurgien
entraîné de repousser les limites et
de réaliser ainsi des reprises relativement difficiles. Néanmoins, il est
important de connaître les limites
incontournables et de maîtriser
d’autres alternatives.
Si, pour des opérateurs rodés, il
ne paraît pas abusif de conclure que
la voie d’abord postérieure et les
voies transtrochantériennes, classiques ou digastriques, paraissent
les plus aptes à faire face à quasiment toutes les circonstances, il n’en
va pas de même pour tous les chirurgiens. La voie transtrochantérienne
classique est malheureusement
moins utilisée et donc moins enseignée, ce qui est regrettable compte
tenu de son intérêt dans cette indication.
La tendance actuelle privilégie
le recours systématique à des voies
transfémorales plus ou moins étendues. Leur utilisation systématique,
prônée par la littérature anglosaxonne, semble discutable. Si elles
facilitent vraiment le temps d’ablation des implants, en revanche, elles
fragilisent le fémur et imposent le
recours à une tige longue loin d’être
toujours nécessaire. Souvent, le
même résultat peut être obtenu sans
interrompre la continuité des corticales en réalisant l’ensemble des
étapes d’extraction et de reconstruction par voie endocanalaire et ainsi
utiliser en toute sécurité une tige
standard.
D’après la conférence d’enseignement du
Dr Luc Kerboull, Institut Marcel Kerboull,
Paris
PHANIE
●●La prise en charge sur les lieux de
l’accident est la même que celle de
tout blessé grave ou polytraumatisé.
Si le blessé est conscient, le diagnositc
de paralysie est facile mais parfois,
les lésions associées peuvent masquer un déficit neurologique. Le coma pose un problème de diagnostic.
Lorsqu’une intubation précoce est
nécessaire, seul le médecin du SAMU
DR
Prise en charge
06/11/2014 15:26:40
12 Congrès hebdo
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Lundi 10 novembre 2014 – n° 9364
SOFCOT
Éditorial du Pr Rémi Kohler
Bouger, c’est rester libre !
tements conservateurs et
celle – restreinte – dédiée à la
chirurgie.
D’autres manifestations
portent sur des points
importants pour le patient tels que
la traçabilité des implants, des
greffons et substituts osseux mis en
place lors de gestes d’arthroplastie ou
de greffe. Au plan national, la mise en
place de registres permettra de mieux
répondre aux incidents éventuels
en synergie avec l’Agence nationale
sécurité du médicament (ANSM).
– Un forum consacré à la douleur en
orthopédie qui bénéficie des travaux
conjoints de la SOFCOT et de la société
de la douleur.
– Durant des tables rondes professionnelles sont abordés des
points d’actualité concernant les
généralistes, en amont ou en aval des
soins donnés à leur patient : la réglementation et la place de la chirurgie
qui se concluent par
des recommandations
de « Bonnes pratiques
professionnelles ».
Citons, par exemple :
– le dépistage de la luxation congénitale de hanche. Ce sujet concerne de
plus en plus fréquemment les généralistes et il est important de rappeler la
primauté de l’examen clinique néonatal, réalisé dans de bonnes conditions,
qui sera ensuite répété tout au long de
la première année de la vie. L’imagerie
(échographie de hanches) a dans le dépistage une place précise et restreinte
(indications ciblées) ;
– la lombalgie (« mal de dos ») est également une pathologie fréquemment
rencontrée, dont la conséquence
économique, par les arrêts de travail
qu’elle engendre, est considérable.
Une mise au point s’imposait sur
la place de la rééducation, des trai-
DR
L
a SOFCOT tient du 10 au 13 novembre 2014 son 89e congrès à
Paris. C’est une rencontre importante
pour tous les orthopédistes, à la fois
au plan scientifique, professionnel,
administratif ; un lieu d’échanges avec
les fabricants de matériel, les IBODES,
les kinésithérapeutes et enfin avec un
programme dense et varié ce congrès
associe nouveautés techniques et
mises au point sur des sujets parfois
controversés.
Beaucoup de sujets sont empreints
de la thématique de l’année « Qualité
– évaluation – gestion des risques ».
Ces notions sont très fortement
rappelées dans tous les domaines, à
l’instigation du Ministère de la santé
et de la Haute Autorité de santé. Une
collaboration constructive et cordiale
avec cette instance a d’ailleurs permis
de préparer un certain nombre de
sujets sous la forme de Tables rondes
à la scoliose idiopathique dont les
indications sont parfois difficiles à
poser. Ainsi, pourra-t-on peut-être
répondre à la question : est-il légitime
d’arthrodéser à l’âge de 20 ans une
scoliose idiopathique de 45°, à titre
préventif ?
On voit donc bien par la diversité du
programme proposé, l’importance
de cette spécialité dans le quotidien
de nos patients : l’orthopédie est
présente à tous les âges, chez l’enfant
(luxation de hanche, scoliose, etc.),
chez l’adulte (lombalgies…) et
chez les personnes âgées puisque
l’orthopédie gériatrique est en train
de devenir une véritable surspécialité au même titre que l’orthopédie
pédiatrique ! C’est l’occasion de
rappeler le beau slogan de la SOFCOT
en 2010 « Bouger, c’est rester libre ! ».
ambulatoire, dont le Ministère
souhaite augmenter encore la place
dans notre système de soins, et dans
le même esprit, l’étude des procédures d’hospitalisation accélérées
(« fast track surgery ») qui ne seront
possibles qu’avec la mise en place de
réseaux structurés pour la prise en
charge des patients (ce qui n’est pas
toujours simple).
– Enfin mentionnons les classiques
symposiums, temps forts de ce
congrès. Ils s’appuient sur des
grandes séries françaises collectées
et analysées de façon rétro- et
prospective. Ils comparent l’histoire
naturelle, sans traitement, et l’évolution avec traitement, pour apporter
des réponses moins empiriques
et légitimer certaines indications.
Mentionnons celui sur les ruptures
du ligament croisé antérieur, celui
sur les fractures complexes de
l’humérus et celui, inédit, consacré
Président de l’Académie d’orthopédie
traumatologie (AOT)
Scoliose idiopathique de l’enfant à l’adulte
●●Les travaux importants réalisés
pour mettre au jour l’étiologie de la
scoliose se sont avérés décevants. La
conjonction de facteurs génétiques,
neurohormonaux, vestibulaires, est
évoquée régulièrement, sans pouvoir
trancher fermement sur un primum
movens. Ces recherches ont eu le mérite néanmoins d’écarter définitivement les facteurs mécaniques comme
générateurs, ou aggravant une scoliose. Ainsi, les notions de sport – plus
ou moins recommandé – ou de port de
cartable – plus ou moins néfaste – sont
obsolètes chez l’enfant. Il peut donc
pratiquer toutes les activités physiques qu’il souhaite sans restriction.
Un diagnostic plus performant
conduire à des situations extrêmement complexes, voire des impasses
thérapeutiques.
Des traitements mieux évalués
Une spécialité transcendant
les tranches d’âge
L’évaluation de nos pratiques a
permis également de mieux cerner
l’efficacité des techniques mises en
œuvre chez l’enfant. À ce jour, la kinésithérapie régulièrement prescrite n’a
toujours pas démontré son efficacité.
Le traitement par corset a en revanche
passé avec succès les épreuves d’évaluation par la preuve.
Parallèlement, les techniques
chirurgicales ont gagné en efficacité
grâce à l’évolution des implants, et
en sécurité du fait des techniques de
monitorage médullaire.
Cependant, la plus grande avancée des 20 dernières années vient de
la prise de conscience que la scoliose
idiopathique n’est pas une maladie
de croissance, stoppant son évolution à l’âge de 18 ans. On sait désormais qu’elle est une maladie de toute
une vie, exigeant hygiène et surveillance du dos. Il est souvent nécessaire
de reprendre le traitement à certaines
étapes, notamment lors de la ménopause. Si la plupart des scolioses
idiopathiques évoluent bien et permettent une vie sociale et professionnelle normale, certaines formes vont
se dégrader après la fin de la croissance. Leur méconnaissance peut
La prise en charge de la scoliose de
l’adulte ne se limite plus désormais à
un traitement palliatif, constat d’impuissance. De véritables solutions
existent et la chirurgie de la scoliose
adulte est devenue une spécialité à
part entière. Ainsi, les passerelles se
multiplient entre les chirurgiens pédiatres et d’adultes. Cette pathologie
s’enrichit de manière permanente du
retour de chacun.
La composante tridimensionnelle, signalée dès la description
initiale de la maladie, a commencé
à prendre sa place dans la thérapeutique durant les années 1980. Elle s’est
formidablement développée depuis.
Il est ainsi établi que l’équilibre sagittal du patient est tout aussi important
pour son futur que sa courbure coronale ou sa gibbosité. Cette analyse de
la scoliose a permis de démembrer des
formes de pronostic très variables et
qui conditionnent le traitement dès
l’enfance, avec une optique résolument tournée vers le long terme. Il est
démontré que certaines formes a priori modérées en fin de croissance vont
évoluer de manière péjorative à l’âge
adulte et pouvant aboutir à des situa-
Jeune fille de 15 ans présentant
une scoliose de 35 degrés lobaire
malgré le port d’un corset depuis
3 ans et en aggravation sous
corset. Un traitement chirurgical
précoce permet une correction
moyennant le blocage de 3
niveaux disacaux
Décompression et correction
par ostéotomie vertébrale
transpédiculaire asymétrique
de L4 et fixation T11 pelvis.
Rééquilibration du tronc de face
et de profil
tions très invalidantes en deuxième
partie de vie, parmi une population
vieillissante et active.
C’est à ce titre que la Société française de chirurgie orthopédique et
traumatologique (SOFCOT) et ses
partenaires que sont la Société française de chirurgie du rachis (SFCR) et
le Groupe d’étude de la scoliose (GES)
ont souhaité que le point soit fait sur
cette nouvelle approche de la scoliose
idiopathique. Les travaux du symposium se sont volontairement axés sur
le devenir de l’enfant scoliotique
sur le plan médical mais également
DR
Le dépistage, qu’il se fasse par le
médecin traitant ou scolaire, s’avère
efficace. Peu d’enfants sur notre territoire passent à travers le filtre clinique
de la gibbosité. Les moyens d’imagerie sont devenus performants et peu
invasifs : radiographies microdosées,
scanner optiques non irradiants, l’accès facilité à l’IRM… Plus particulièrement, l’imagerie EOS permet d’obtenir
des images 2D et 3D moyennant une
irradiation divisée par 8 par rapport à
une radiographie conventionnelle. La
composante 3D permet en outre d’affiner le diagnostic de la scoliose.
DR
Sujet toujours difficile et en
pleine évolution, la scoliose idiopathique s’analyse tout au long
de la vie du sujet qui en est atteint.
DR
Une prise en charge durant toute la vie
Patiente de 60 ans. Antécédents lombalgiques. Aggravation durant
les 2 dernières années avec installation progressive d’un déséquilibre
antérieur et latéral.
Station debout possible uniquement avec une canne à gauche. Ne
sort plus de chez elle. Lombalgies et syndrome claudiquant limité à
quelques mètres
DR
Périmètre de marche illimité
sans canne
CHSP9364_012_012_QVW 12
en termes de santé publique. Les différents travaux originaux présentés
concernent des séries avec un recul
minimum de 20 ans, tant il est vrai
que seul le recul à long terme permet
une analyse objective.
Les chirurgiens pédiatres et médecins physiques doivent tout mettre
en œuvre pour conduire des enfants
en fin de croissance à un rachis équilibré dans le plan sagittal, même si
cela passe par une courbure résiduelle modérée. En outre, ils devront
identifier les formes de mauvais pronostic, même si elles sont peu inquiétantes en fin de croissance, et savoir
intervenir afin de pouvoir effectuer
des gestes simples et limités.
La surveillance est de règle
après la fin de la croissance. L’évolution, même si elle est péjorative, est
lente : une surveillance tous les 5 ans
paraît raisonnable. Or en pratique
elle n’est pas réalisée, ce qui génère
des situations complexes déjà évoquées. Une sensibilisation du public
et des soignants est nécessaire en ce
sens. Les médecins traitants doivent
savoir que désormais une scoliose
décompensée et douloureuse en
deuxième partie de vie n’est pas
une fatalité mais peut bénéficier de
traitements efficaces.
D’après la conférence d’enseignement des
Drs Jean-Luc Jouve (CHU de la Timone
Enfants, Marseille) et Daniel Chopin (CHU
de Lille)
06/11/2014 15:27:40
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